Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

opéra (91)

administrateur théâtres

Après notre brûlant été 2018, c’est une saison fantastique  qui s’ouvre à Liège avec Il Trovatore de Verdi,  et voilà  un incendie qui se déclare! Alerta ! Alerta ! Du coup de foudre, au brasier des passions, aux tourments du bûcher, aux glaives incandescents sous l’enclume, à cette croix monumentale du Christ rongée aux quatre bouts par les flammes, au feu de camp des gitans,  à l’incandescence des voix…

 S'inspirant du roman gothique romantique de Gutiérrez, Verdi offre des rôles solistes superbement caractérisés qui sont interprétés avec fougue par un casting irréprochable. Voici une sublime installation de tragique sans jamais rien de statique, des voix off oniriques du choeur et de certains solistes, des chants rutilants et visionnaires...  Verdi  fait jaillir la musique enflammée des passions dont nous voyons l’embrasement se propager inexorablement  comme un feu de forêt jusqu’à l’apocalypse finale et ses paroles de damnation. Les solistes, le choeur et son choriphée très proche du théâtre antique sont portés en parfait équilibre avec un orchestre où ils se partagent crépitements, jaillissements, sublimations, éclats, fureurs, explosions et contribuent à accentuer les cascades de pressentiments, les sanglots de douleur et d’amour, les tourments de la jalousie, de l’envie, et de la vengeance. Le châtiment  pour tous. L’œil de la vengeance est immense comme celui de Caïn dans la tombe.  

L’image contient peut-être : une personne ou plus, feu et ciel 

 L’action se déroule dans la Saragosse du XVème siècle. Le comte de Luna est éconduit par la dame d’honneur de la princesse de Navarre, Leonora dont il est éperdument amoureux. Lenora, une divine Yolanda Auyanet  a eu le coup de foudre pour le vaillant Manrico, mais aveuglée par l’amour, elle se trompe de galant...  Azucena, la mère de Manrico, est une gitane obsédée par l’image de sa mère envoyée au  bûcher pour sorcellerie  et qui sur le chemin de son supplice  lui a fait jurer de la venger.  Manrico décide de fuir avec Leonora mais défie Luna qui veut le tuer et  envoyer sa mère au bûcher elle aussi.  Les voilà emprisonnés.   Manrico  en arrive à maudire Leonora dont il croit qu’elle  s’est donnée au Comte pour le sauver. Mais celle-ci bien sûr  a avalé du poison et ne sera jamais l’épouse de Luna.  De rage,  celui-ci ordonne  l’exécution par les flammes de Manrico  tandis qu’Azucena lui explique  qu’il vient de tuer son propre frère  puisque Maurico a été adopté suite à un malencontreux échange d’enfants sur le bûcher. L’opéra s’achève sur la vengeance d’Azucena  qui  a enfin vengé la mort de sa mère… Stefano Virioli signe la mise en scène, Franco Marri est aux lumières: scènes de genre embrasées et flaques de lumière dans les scènes intimes.   

 Cet opéra, un monument de séduction musicale,  dirigé par Daniel Oren aura subjugué une salle, elle aussi enflammée.  Comment ne pas être consumé de plaisir devant la beauté vocale périlleuse des différents  interprètes, tous animés d’une gigantesque flamme intérieure, d’une force et d’une énergie impressionnantes. La complexité musicale de la partition, sa finesse et ses paroxysmes sont  rendus  à la perfection  par l’illustre Daniel Oren, figure légendaire du monde musical  régulièrement invité  dans les lieux les plus prestigieux de notre planète.  On  est certes reconnaissant  au directeur de L'Opéra de Liège Stefano Mazzonis di Pralafera d’avoir pu le convier sur la scène liégeoise. Scrupuleusement attentif aux possibilités vocales de chacun, il maintient une balance parfaite entre les chanteurs et l’orchestre, offre des litières de pizzicati quasi inaudibles pour accueillir les émotions les plus délicates  lors des moments de grâce. Chaque phrasé et chaque nuance sont presque palpables. Quelle douceur infinie dans cette scène avec Violetta Urmana en Azucena,  « mère » passionnée de Manrico-Il Tovatore et figure prophétique,  qui, dévastée par la douleur, clouée au sol, presque morte, émet un chant en duo avec Leonora  que l’on sent émerger de façon quasi imperceptible,  sans que personne ne puisse dire quand cela a commencé. 

 L’œuvre, un monument d’imbroglio romantique et d’invraisemblances, prend le public au cœur de l’irrationnel et de l’émotionnel,  là où siègent les pires pulsions humaines, un lieu sombre où prospèrent les superstitions,  l’on met à mort les sorcières, où fleurit la rivalité,  la haine, où règnent l’orgueil, la jalousie et la soif du pouvoir et finit par conduire inexorablement vers l’enfer.

  O terque qua terque… voici l’inévitable triangle  évoqué par le choix du décor qui évoque une  sorte de pyramide monumentale au pied de laquelle coule le sang des sacrifices humains et rappelle la forme préférée des bûchers. Elle est constituée de deux volées d’escaliers sur lesquels fourmille la sombre dramaturgie espagnole et les gitans.

Le triangle évoque le personnage central, Il Trovatore, un légendaire Fabio Sartori qui est à la fois le rival amoureux du Comte de la Luna, son ennemi guerrier, et l’enfant volé qui s’avère être son frère perdu... Hélas, les retrouvailles sont sanglantes, et frappées par un destin aveugle et destructeur qui indique que la vengeance n’a pas de fin dans la lutte subconsciente entre frères… 

Cette pyramide souligne bien sûr aussi le triangle infernal dans lequel évolue le mysticisme de l’amour  indéfectible de l’ardente  Leonora et son formidable trouvère, Fabio Sartori, un monstre de la scène,  face à  Mario Cassi dans le rôle du Comte de la Luna, qui  nous offre une remarquable performance de  la passion virile et  dévorante. Tous trois jouent à fond l’intensité dramatique, jusqu’aux limites de l’insoutenable violence des sentiments.

La pyramide  est aussi couronnée par trois pics d’actes manqués, qui stigmatise l’aveuglement des passions humaines et souligne une  criante   symbolique  émotionnelle  chez ces personnages.  Leonora, dans la scène du balcon  dans son duo plein de fraîcheur avec Inès (Julie Bailly)  rêve à son idylle, mais  se trompe  fâcheusement d’amoureux! Ensuite, la sorcière se trompe d’enfant et jette le  sien dans le brasier, et finalement, le frère finit par tuer par erreur, son propre frère.  Et c’est la musique somptueuse de Verdi sculptée dans  une infinité de  clairs-obscurs qui soutient  ces  différents édifices de façon grandiose.  C’est ainsi que le public, conquis par cette production fantastique entre mélodrame, onirisme et symbolisme, offrira de longues flambées d’ovations et d’applaudissements pour saluer le succès de ce spectacle monumental servi par des artistes flamboyants.  

Streaming

SAMEDI 22 SEPT. 2018 à 20h30 sur Culturebox.

    https://www.operaliege.be/spectacle/il-trovatore/

Lire la suite...
administrateur théâtres

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes deboutJuste ce qu’il faut d’atmosphère sensuelle et méridionale des palais de l’Andalousie du XVIIIe siècle et au bout…. Le bonheur !

 Envoûtés par la qualité de la musique et  celle de la distribution éblouissante réunie sur le plateau de l’Opéra de Liège,  les spectateurs  participent, à  une  folle journée (le sous-titre même  de la pièce  Le Barbier de Séville  de Beaumarchais) vécue par Figaro, valet du Comte et Suzanne,  camériste au service de la Comtesse Almaviva, habitant une belle demeure à Séville.

7._van_wanroij_acte_2_01.jpg 

Après une ouverture fulgurante,  augurant le caractère ludique de l’opéra et de son issue heureuse,  les deux amoureux préparent leurs noces, mais  le Comte, un coureur impénitent, a juré  d’exercer son « droit de cuissage » sur Suzanne, la   jeune  et séduisante  fiancée. Mis au courant, Figaro, jure de déjouer les plans de son maître.  «  Se vuol ballare signor contino » déborde d’énergie  combattante et annonce un personnage de haute voltige.   Mais  Figaro se heurte  à de nombreux écueils :  Don Basilio (Enrico CASARI), le maître de musique, qui joue le douteux rôle de l’entremetteur pour le Comte,  Marcellina ( une ébouriffante Alexise YERNA), soutenue par maître Bartholo (Julien VÉRONÈSE) , qui,  après avoir prêté de l’argent à Figaro contre promesse de mariage, espère bien se faire épouser, mais finit  par découvrir qu’elle est sa mère, ce qui résout la question! Et aussi, parmi les gêneurs,  l'adolescent craquant et adorable, Cherubino,  amoureux de « sa marraine », la Comtesse, mais aussi  amoureux de toutes les femmes à la ronde.

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes sur scène et mariage

Judith VAN WANROIJ,  La Comtesse,  loin d’être une personne figée et compassée, vit dans l’opulence  mais elle est désabusée par les frasques  de son mari volage, par ailleurs "Grand d'Espagne!". Elle se révèle  être d’une  vive et belle intelligence et d’une humanité touchante, comme dans son air «  Porgi Amor », un vrai coup de cœur.  Tout ce qu’elle chante porte un relief extraordinaire.   Elle est restée la Rosine pétulante, enlevée jadis par le Comte et partage l’esprit rebelle et critique de son impertinente  compagne, Suzanne. Ensemble elles vont tramer des pièges pour faire ... entendre raison!  Ainsi ce   merveilleux duo « Sull'aria » où la comtesse dicte  le billet donnant rendez-vous au comte. Une merveille d’harmonies féminines.  

L’image contient peut-être : 2 personnes

Surprises, déguisements, quiproquos, situations embarrassantes, rebondissements dignes de vaudeville émaillent donc l’histoire  dans un  tempo vif et enjoué, jusqu’à ce que tombent les masques au quatrième acte. Le tout est ciselé avec finesse, saveur et jubilation par le maître de musique: Christophe Rousset,  titulaire de deux rôles.  D'une part, instrumentiste délicat et talentueux, au piano forte qui illumine l'ouvrage, et de l'autre,  incomparable chef  de l’architecture musicale de l'opéra.  Il a un don extraordinaire pour mettre  les choses en musique : révélations, surprises et revirements... Il narre cette histoire hautement ludique avec brio  et  intercepte  la  multitude  des états psychologiques  tout en faisant mystérieusement  ressortir  le regard critique  de Mozart sur de l’Ancien régime, par des modes burlesques. Il pénètre inlassablement l’arrière des masques et déjoue les singeries sociales, questionnant avec humour les rapports homme-femmes. Avec une préférence pour les femmes? 

En dehors du plaisir intense de la musique, la réussite de ce spectacle tient  particulièrement à la mise en scène d’une pureté dé(?)concertante! Signée Emilio Sagi.  Cela dit beaucoup!  Les décors et les costumes en élégantes teintes pastel ou sable, sont  comme  - idéalisés -  et jouent avec de belles  luminosités et la subtile blancheur du palais, jusqu’au dernier acte - le plus fou et où la musique a atteint un niveau quasi charnel -    qui se déroule, lui  dans un  luxuriant jardin semi-tropical, un paradis où ne peut qu’advenir le pardon, indissociable compagnon de l’amour véritable.

Mais la réussite parfaite de cette production tient  bien sûr surtout  à la qualité de ses interprètes.  Aux côtés de la  Comtesse  pleine de charme, de noblesse  et  de profondeur, Jodie DEVOS met sa voix claire et naturelle ainsi que  sa malicieuse théâtralité au service du  fougueux personnage de Suzanne, plus maîtresse que suivante!  Elle est le centre de tous les duos qu’elle mène sans faiblir…avec la vaillance musicale  intrépide que l’on lui connaît.  L’exquise Raffaella MILANESI  est le jeune Chérubin: du vif-argent éveillé à l’amour qui gambade sans la moindre retenue, tel un jeune dieu, libre, farceur, tendre, passionné, possédé par l’énergie grisante et urgente  de son personnage.  Quant au Comte Almaviva, il est superbe,  tellement déterminé et sûr de lui dans son inconstance toute masculine.  Il  est interprété par un  Mario CASSI tout-à-fait solaire. Sa tessiture semble rayonner et vibrer, caressant les plafonds et les  fenêtres du palais, continuant à jouer  de splendides couleurs de parade masculine,  même si  ...c’est finalement  Suzanne qu’il découvre dans le placard à la place du jeune amant qu’il brûlait de surprendre  à l'acte II, ou  même s’ il ...se  fait piéger par Suzanne et la Comtesse à l'acte IV,  et apparaît  comme un personnage plutôt ridicule.

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes assises

Délicieuse Julie MOSSAY dans  Barbarina, qui elle aussi décline une des facettes de l’amour dans sa belle cavatine de l'Acte IV  … et un jardinier râleur et intempestif à souhait, très bien campé sous les traits de Patrick DELCOUR.    Mais la palme revient sans doute  au chatoyant  Figaro,  le jeune baryton Leon KOŠAVIC à l’élocution parfaite. Un homme de caractère,  qui n’a rien à envier à son maître en termes de voix masculine  affirmée, héroïque et radieuse, et  à travers lequel on perçoit  un  brûlant de désir de construire un nouveau monde, rêvant pour  celui-ci,  de  plus d’amour,  plus de  justice et de  plus  de liberté. La densité et la musicalité du  final est un  sorte d’aboutissement heureux, de fusion parfaite du comique et du sérieux du livret, le moment  où s’arrête enfin  le tourbillon de ces personnages illustrant si bien l'esprit du XVIIIe siècle, celui  où le regard et l’oreille se trouvent confondus d’admiration devant l’esthétique de la  mise en scène  et  la  qualité  sonore  de la production.

29793670_2066193180076725_8585094485979955200_n.jpg?_nc_cat=0&oh=f4eeb8a113c2d64822e99f1c281fca36&oe=5B6022C1

 En Italien DIRECTION MUSICALE : Christophe Rousset MISE EN SCÈNE : Emilio Sagi CHEF DES CHŒURS : Pierre Iodice  ARTISTES : Mario Cassi, Judith Van Wanroij, Leon Kosavic, Jodie Devos , Raffaella Milanesi, Julien Véronèse, Alexise Yerna, Julie Mossay, Enrico Casari,Patrick Delcour  

NOMBRE DE REPRÉSENTATIONS : 5 DATES : Du vendredi, 06/04/2018 au samedi, 14/04/2018

 

Avec L’Orchestre et Chœurs de l’ Opéra Royal de Wallonie-Liège, nouvelle production

Vous trouverez ici des Ressources  à propos de  la biographie de Mozart.

 

Lire la suite...
administrateur théâtres

­­­­­­­­­­12273287074?profile=originalDernier spectacle de la saison 2017-2018, voilà un Macbeth  de Verdi bouleversant hier soir à l’Opéra de Liège dans une mise en scène très inspirée de Stefano Mazzonis di Pralafera. A la fois une somptueuse conclusion de saison,  gratifiée d’un déluge de  costumes - les créations belles à couper le souffle de Fernand Ruiz - et une  réflexion  forte  sur le monde. Comme si dans la moitié du monde déjà dans l’ombre,  la soif  effrénée de pouvoir avait ouvert ses ailes obscures et se mettait à dévorer l’humanité entière, d’Ouest en Est… Glaçant. Rien n’a changé entre l’Ecosse du Moyen-Age et le monde d’aujourd’hui. « Alla corona che m’offre il fato La man rapace non alzerò ». Vers la couronne que me tend le destin je ne tendrai pas une main avide!  Hélas, ...Wishful thinking!    12273287473?profile=original En parallèle avec  l’ambition dévorante de Lady Macbeth,  on est percuté,  par une  spirale vertigineuse de vengeance meurtrière et d’orgueil démesuré. Et pire encore, c’est Verdi qui le dit, il y a le rôle clé du surnaturel  et   du très néfaste recours  à la nécromancie pour  forcer le destin.  C'est lui qui déclenche la débâcle finale faite de trahison, de meurtres,  de solitude et de folie sans retour.

Dès  le prélude dramatique (roulements de tambours, éclats de cuivres, staccatos vibrants, marche déjà funèbre)  où glissent inexorablement  les figures jusqu’à l’échec et mat, l’histoire est transposée  sur un échiquier présenté en miroir, dans un décor de Jean-Guy Lecat.   Cloches fatidiques… la beauté a des côtés sombres et le reste est chaos.

Véritable  vase d’expansion d’émotions denses  et  de climat dramatique,  l’orchestre  irradiant soutient l’ouvrage sous l’ample baguette de Paolo Arrivabeni, un chef déterminé et précis. Il  sensibilise aux  moindres replis de l’âme exaltée et machiavélique de Lady Macbeth. Il enlumine les ballets, de bois et de timbres  grinçants. Il danse le sabbat avec  les sorcières aquatiques et cornues en voiles turquoise sous la voûte étoilée, tandis qu’elles  ne cessent  de tirer les fils du destin et d’emmailloter les victimes comme dans une  gigantesque toile. Il anime les larges coups de ballets où revient en force l’esprit démoniaque…signés brillamment par Rachel Mossom et la fabuleuse  Compagnia Del Centro di danza Baletto di Roma.  Il  développe une tension théâtrale constante à travers de magnifiques cuivres, les tissages soyeux de violons d’une grande finesse, et les amplifications musicales prodigieuses des  sentiments exacerbés.

12273287674?profile=original

Le chœur spectaculaire sous la direction de Pierre  Iodice « ouvre les portes de l’enfer et engloutit la terre ! » et  préfigure  l’amplitude de celui de Nabucco… C’est tout dire! Le "Patria oppressa" déborde de larmes.  ​

Si Verdi souhaitait une « Lady laide, méchante qui dispose d’une voix rauque, étouffée, caverneuse… », la scène liégeoise accueille une star d’une  présence incomparable, d’une agilité rythmique d’un autre monde  et une voix de tragédienne accomplie. Tatiana Serjan dans  son rôle de Lady  Macbeth, connaît un succès foudroyant. Elle  a chanté ce rôle depuis Turin en 2002 plus de 300 fois,   fréquentant les scènes les plus prestigieuses : la Scala de Milan, à l’Opéra de Rome, au Teatro Comunale de Bologne, au Mai musical florentin, au Teatro Regio de Parme, au Teatro Massimo de Palerme, au Festival d’opéra de Ravenne, à la Staatsoper de Bavière (Munich), à la Deutsche Oper de Berlin, au Teatro Real de Madrid, au Liceu de Barcelone, au Théâtre national de São Carlos de Lisbonne, à l’Opéra de Zurich, à l’Opéra de Dallas, au Lyric Opera de Chicago, à la Staatsoper de Vienne ou encore aux festivals de Bregenz et Salzbourg, et maintenant, à L’Opéra de Liège. Son entrée en scène pour convoquer les forces du mal, est puissante, incantatoire  et pleine de feu et de profondeur. Sa grande scène de somnambulisme est un suspense déchirant. Cela commence sotto voce,  la lanterne à la main, parcourant un à un les carré lumineux de l’échiquier comme lors d’une descente aux enfers,  va-t-elle percevoir l’horreur de ses crimes ? Ou la folie obscurcit-elle totalement son cerveau, elle qui essaie vainement de se débarrasser des taches de sang sur ses mains? En contraste saisissant quelle pureté de voix dans le duo qui l’observe, le médecin et la suivante : Roger Joachim et Alexise Yerni…  Elle est aux côtés de l’impressionnant baryton Leo Nucci, 76 ans, véritable légende du chant verdien, qui interprète Macbeth de façon héroïque et terriblement humaine,  formant avec elle un ensemble fantastique et triomphant. Le poignard vibre, Macbeth résonne jusqu’au fond des cœurs et soupire: « Je meurs haï du ciel et de la terre, Vile couronne ! »  

À leurs côtés, l’on remarquera le ténor Gabriele Mangione en Macduff et la basse Giacomo Prestia en Banco.

La distribution est  brillament complétée par Papuna Tchuradze (Malcolm), Alexise Yerna (Dama di Lady Macbeth) et Roger Joakim (Medico & Sicario). 

 ma.12, je. 14, me. 20, sa. 23, ma. 26 juin 2018 | 20h > di. 17 juin 2018| 15h

Opéra Royal de Wallonie-Liège Place de l’Opéra - B-4000 Liège

 Infos/réservations : +32 (0) 4 221 47 22 | www.operaliege.be

 En direct le je. 14 juin à 20h30 sur culturebox.francetvinfo.fr

Suivez la diffusion sur  Culturebox, disponible en replay, du spectacle Macbeth de Verdi à l'Opéra Royal de Wallonie-Liège. 
Avec Paolo Arrivabeni à la direction musicale, dans une mise en scène de Stefano Mazzonis Di Pralafera, avec Leo Nucci, Tatiana Serjan, Gabriele Mangione, Giacomo Prestia, Basso, Papuna Tchuradze, Alexise Yerna, Roger Joakim, Dominique Detournay, Ludivine Scheers, Marc Tissons 

Lire la suite...
administrateur théâtres

1._le_domino_noir_officielles_logo_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-25.jpg« O douce soirée! Moment enchanteur!  Mon âme enivrée renaît au bonheur! » Chaque année, une jeune et riche  aristocratique nommée Angèle quitte le couvent pour se rendre à un bal masqué sous le  couvert d’un «Domino noir». Horace  est tombé amoureux d'elle, l’an dernier au bal de Noël donné par la Reine sa cousine,  et  il la retrouve aujourd’hui. Angèle porte bien son nom…  « Qui je suis? Une fée, un bon ange qui partout suit vos pas, dont l'amitié jamais ne change, que l'on trahit sans qu'il se venge,  et qui n'attend pas même, hélas un amour qu'on ne lui doit pas! » Tout l’art sera de faire tomber un à un les masques afin que les deux amants  soient capables de s'unir. 

2._le_domino_noir_officielles_logo_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-26.jpg

 Daniel-François-Esprit Auber a écrit de la musique sur un livret de Scribe qui est léger et brillant, Berlioz le décrivant comme "vivant et amusant, une de ses plus belles partitions". Avec Anne-Catherine Gillet et Cyrille Dubois dans les rôles principaux, nous avons été enchantés. Mais le reste de la production n’est pas moins scintillant. Un brillant François Rougier dans le rôle de Juliano, le compagnon d’Horace et Brigitte la suivante d’Angèle forment un  duo  jubilatoire mi-paon, mi-mimosa comme en témoignent leurs incroyables parures. Antoinette Dennefeld,  tellement primesautière dans son air  "Au réfectoire, à la prière" à l’acte III.

14._le_domino_noir_officielles_logo_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-28.jpg 

 Beaucoup moins poétique et un peu lourdeau, ce faux accent anglais de Lord Elfort qui, gonflé de jalouse possession a laissé sa femme à l’hôtel et vient faire des ronds de jambe au bal masqué, déguisé en  prétentieuse pintade/hérisson, grossissant ses plumes après chaque réplique ou couplet, en vertu de la ponctuation. Mais il faut bien que l’on se moque… Beau masque!  

3._le_domino_noir_officielles_logo_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-3.jpg

Dans un jeu d’aiguilles fantastiques,  le temps s’emmêle et Angèle,   ayant perdu son amie et fuyant le bal comme Cendrillon,   se retrouve à jouer le rôle de servante Aragonaise auprès de la plantureuse Jacinthe, une ultra généreuse Marie Lenormand,  gouvernante  de  Juliano le vieux garçon…  Un morceau de choix, où courtisée par quarante gaillards, et contrefaisant un accent du terroir,  elle leur tient la dragée… haute!  Horace qui est arrivé, la reconnait… Quelle imposture et quel supplice! Se pourrait-il qu’elle ait la cuisse légère? Pour récupérer les clefs du couvent elle se présente en noir fantôme à  Gil Perès (un  drolatique Laurent Kubla), l’amoureux de Jacinthe et concierge du couvent,  qu’elle terrorise… Encore une métamorphose  réjouissante! Pire encore, la voilà  devenue Abbesse surmontée d’une tiare en forme de tout Eiffel… à qui le jeune Horace confie ses peines de cœur, cette fois sans la reconnaître!  Mais il suffira d’un coup d’ordonnance royale pour réordonner cette ludique et malicieuse  Midsummer night’s dream à la française. Coup de chapeau à dame Ursule sous la voix bien timbrée de Sylvia Bergé.

9._le_domino_noir_officielles_logo_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-9.jpg   

 

Les décors, les costumes façon Boris Vian, et les mélanges techno / opéra de nos grands-parents ont de quoi faire rire et  combler nos attentes d’univers féerique en Absurdie.  Ce  beau morceau de dépaysement lyrique et visuel est mis en scène par  les metteurs en scène Valérie Lesort et Christian Hecq, l’homme de Nivelles qui habite à Paris et  dont c’est la première mise en scène lyrique. Il est Sociétaire de la Comédie Française.  Ensemble, ils déploient  une belle verve dans la construction et un esprit de gaieté éblouissant!  

 

 

Ainsi le théâtre caracole  joyeusement , les comédiens-chanteurs sont engagés, la musique  joue gaiement les quadrilles sous la baguette enjouée de  Patrick Davin  tandis que les portes  mystérieuses du Bal et du couvent, s’ouvrent et se referment gracieusement et qu’un chapelet ininterrompu  de voix  charmeuses et cabotines, de timbres ravissants naviguent  avec aisance  sur une partition  que l’on croyait oubliée. Qui donc  pourrait prétendre que l’on n’entend que de la musique italienne à L’Opéra de Liège? 

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/stefano-mazzonis-di-pralafera-une-figure-remarquable-directeur-de

Une presse unanime! 

https://www.forumopera.com/le-domino-noir-liege-0-de-matiere-grasse-100-de-plaisir

  

http://toutelaculture.com/spectacles/opera/domino-noir-opera-romantico-vaudevillesque-servi-belle-legion-de-chanteurs-comediens/

 

http://www.crescendo-magazine.be/retour-brillant-dun-chef-doeuvre-parfait/

 

https://www.olyrix.com/articles/production/1811/domino-noir-daniel-francois-esprit-auber-opera-royal-liege-wallonie-avis-critique-chronique-article-compte-rendu-patrick-davin-valerie-lesort-christian-hecq-anne-catherine-gillet-cyrille-dubois-antoinette-dennefeld-francois-rougier-marie-lenormand-laurent

http://www.lalibre.be/culture/scenes/opera-un-domino-drolatique-poetique-et-magique-5a91479bcd70f0681dd6bd72#.WpNE5KTI3ls.facebook

Lire la suite...
administrateur théâtres

Il était une fois Nicola - pas le saint - le compositeur italien contemporain, Nicola Campogrande  qui, ayant visité en l’an 2007 la Fondation Folon en Belgique, se prit à rêver de composer un  opéra  greffé sur  ses émotions picturales et le fabuleux chant des couleurs de Folon, prince du graphisme onirique.

 Un autre jour, ce fut L’Opéra de Liège qui contacta ledit musicien, et, 9 mois plus tard, le texte  italien de Piero Bodrato ayant été traduit en français par les soins de Maria Delogu,  l'opéra « #Folon »  était  prêt  pour un  baptême qui eut lieu un 2 mars 2018  à L’Opéra de Wallonie,  en avant-première d’une  belle série de représentations  dites « scolaires » ne laissant que …deux dates libres pour le public.

Le principe veut que les  enfants qui iront voir cet opéra participatif,  soient initiés en classe à chanter eux-mêmes des chansons  pour accompagner chœurs et solistes. Et malgré les notes très aiguës et les tempi fort rapides, cela marche!  Et quelle inoubliable aventure pour les enfants de la Maîtrise de l'Opéra!  Quelle expérience providentielle aussi pour un jeune chef d’orchestre de 28 ans, de pouvoir échanger et travailler avec un compositeur en vie… Nicola Campogrande.  Et de devenir créateur de musique en duo!

 Lors des « scolaires »  il s’est avéré qu’au lieu d’être captivés par leurs smartphones - mais les très jeunes en ont-ils déjà ? On espère que non -  les 800 têtes blondes, vouées aux plaisirs de la découverte, ont, dit-on,  été  happées par  l’environnement de rêve qu’est l’Opéra de Liège, ses dorures, ses lustres, mais surtout  par l'atmosphère magique de l'expérience.

4._folon_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-20.jpg   

Les enfants  ont été séduits d'abord  par le bal des couleurs évoqué par la musique  créative du compositeur, miroitante et cascadante, portée par l’énergie de ses 1001 percussions et par la baguette habile du chef d’orchestre Ayrton Desimpelaere, Chef Assistant à La Direction Musicale au sein de l'ORW. Ils ont été fascinés  par la magie chorale des  enfants de la Maîtrise de l'Opéra orchestrée par Véronique Tollet et le talent des solistes lyriques dont la diction leur était suffisamment accessible. Ils ont adoré les merveilleuses graves de Roger Joakim, Monsieur Alphonse, gardien du musée, fascinés par  l’homme bleu incarné par le tendre Pierre Derhet et  par Julie Bailly  la « bestfriend » portant perruque …verte  de  jalousie. Les tout juste 6 ans ne peuvent pas lire les sous titres et ne sont pas portés sur les professeurs doctes et ronchons! Pauvre  Patrick Delcour! Orangine était interprétée par Natacha Kowalski.

1._folon_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-12.jpg

Ils ont été émerveillés par les décors créés par la fondation Folon pour l’opéra, auxquels répondaient  la valse de costumes et de perruques  presque fluorescents de Fernand Ruiz.  Ah les splendides chaussettes!  Pour Ayrton Desimpelaere, le défi était de  diriger  à la fois l’orchestre, les solistes lyriques et le chœur d’enfants en leur tournant le dos, à chaque fois qu’il  devait faire face au public pour le diriger et chanter avec lui.

Un vrai tour de force pour lui,  car aux  séances pour tout public, la « participation » a été moins active et le retour après le tomber du rideau moins délirant, mais cela tient sans doute à une  préparation moins approfondie et au mélange des âges. Les tout-petits (4-6-8 ans) ont sûrement  apprécié leur première exposition au monde lyrique, bien que l’histoire présentée les ait parfois dépassés.

3._folon_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-8.jpg

Sont-ils déjà sensibles aux « growing pains »  des  adolescents? On en doute un peu ! Mais l’interdit qui pèse sur l’utilisation de smartphones dans le musée, et les catastrophes qui peuvent en découler les ont  impressionnés.  Mais, si Folon avait été dans la salle, aurait-il joué au jeu des interdits, lui, l’homme libre comme l’oiseau? En revanche, le baiser  qui sauve, qui est celui d’une « princesse charmante »  et non celui d’un prince, a beaucoup plu! Idée intéressante que l’amour pour sortir du cadre, non?   Si les personnages n’offrent  qu’un minimum de complexité, la morale à tirer sur la surexposition aux écrans, était bien clairement exposée, et le selfie, totalement condamné!   En effet l’objectif de la production est de mettre en lumière et en musique, la banalité des échanges par moyens électroniques, versus l’incommensurable part de rêve qu’offrent les artistes.

2._folon_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-2.jpg

 Une histoire simple donc, pédagogique en diable, trop peut-être, car on se demande si  l’oeuvre n’aurait pas été vécue plus intensément s’il y avait eu une meilleure  pénétration dans l’œuvre même de Folon.  Telle qu’elle est construite, cette histoire pourrait se jouer avec n’importe quel autre artiste peintre…

On se prend à penser que Folon est plus une toile de fond que le fond de l’histoire.  Y aurait-t-il dans cet opéra une part manquante dans la mise en scène, signée Alexandre Tiereliers? The missing link ? On aurait aimé que l’artiste Jean-Michel Folon apparaisse à travers cet opéra avant tout  comme un passeur d'humanité, face à l’isolement urbain du monde moderne, un chantre de la beauté d’une nature bienveillante, un apôtre d’une totale liberté de penser et un adepte inconditionnel  du respect des droits de l’homme. Et bien sûr, par la nature  poétique de ses tableaux couleur d’arc en ciel,  un semeur de rêves qui vous donne la clef des champs oniriques et rêve  lui-même d’un monde sans frontières… Mais sans doute l’opéra conduira, on l’espère, les familles à rendre visite au sanctuaire onirique des couleurs, créé par l’artiste lui-même à quelques pas du Château de La Hulpe.  Finalement, l’opéra est-il  encore toujours en création?

5._folon_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-5.jpg

Néanmoins,  tous les enfants auront  eu l’occasion de saisir l’urgence d’une place de choix à réserver aux artistes dans une société, et leur rôle révélateur , un peu comme les  fées dans les plus belles histoires. Celles-ci leur révèlent la nature dont sont faits les rêves. Ainsi, le chef d'orchestre, qui indique une voie et invite à rentrer dans l'œuvre qu'il a mise en  musique, offrant  à chacun la possibilité de créer et de réentendre sa propre interprétation. Ainsi, Folon, qui  par son art, fait voir la transparence des choses.

Nouvelle production Opéra Royal de Wallonie-Liège en collaboration avec la Fondation Folon

http://www.operaliege.be/fr/activites/folon

#Folon se produira également au Palais des Beaux-Arts de Charleroi le mercredi 14 mars 2018 à 16h.

 

Crédit photos: © Lorraine Wauters / Opéra Royal de Wallonie

Lire la suite...
administrateur théâtres


Ce « Double bill » comme on l’appelle à New-York, surnommé "CavPag"  par certains spécialistes,  est une nouvelle perle  au diadème du répertoire de la Monnaie. Il présente donc deux opéras  "Cavalleria rusticana" et "Pagliacci"  écrits par deux compositeurs italiens différents et  qui se connaissaient à peine mais dont la parenté littéraire est évidente.  Héritières de Verdi,  les deux  œuvres  qui traitent le même thème, se trouvent aujourd’hui liées pour l’éternité dans l’histoire de l’opéra et annoncent déjà Puccini.  Le drame en un acte de Verga « Cavalleria rusticana »,   a inspiré Mascagni et  a permis au souffle vériste de se propager dans le monde de l'art lyrique. La première de l'œuvre eut lieu à Rome en 1890 et  aété pendant deux décennies, la figure de proue de l'opéra italien. « Pagliacci » l’opéra en deux actes de Ruggero Leoncavallo, fut créé le 21 mai 1892 au Teatro Dal Verme à Milan.

A la fin du XIXe,  Pietro Mascagni et Ruggiero Leoncavallo sont les deux porte-étendards  du mouvement vériste qui se greffe sur  l'œuvre littéraire d'Émile Zola (1840-1902)  illustrant  par le nouveau genre de  ses romans réalistes,  la vie  précaire réservée aux couches modestes de la société et aux opprimés.  Ces  deux opéras véristes parlent un langage ordinaire, vivent  humblement par opposition aux figures sublimes qui peuplent les opéras italiens classiques  et mettent en scène des personnages de la vie de tous les jours, aux comportements peu  édifiant et aux réactions spontanées parfois très dévastatrices. En n’excluant pas la violence domestique…et le meurtre passionnel.

Cavalleria rusticana 

 Veristissimo bouleversant ! Tragique destin de deux tranches de vie dépeignant l’amour entre  simples gens du peuple qui,  hantés  par la jalousie,  ne voient comme issue, que la mort.   Mais avant cela, que d’intensité dans l’exposition des deux mélodrames aux contours hyper réalistes! 

Cavalleria rusticana

Créativité intense dans la recherche du sens : la mise en scène de Damiano Michieletto est très adroite  car elle réussit à imbriquer les deux œuvres l’une dans l’autre, en travaillant notamment  sur  des incursions des personnages d’un drame  vers l’autre.  On peut observer soit des signes annonciateurs,  soit des  flashbacks émouvants qui font référence à  l'histoire d'à côté…  En effet Silvio et Nedda apparaissent dans l’intermezzo de la première histoire, tandis que  Santuzza  se retrouve dans les bras de Mamma Lucia dans  la deuxième.  La force  destructive de la jalousie est le point commun des deux œuvres et la confusion entre réalité et fiction est clairement le pivot de «  Pagliacci ». Quant à la jalousie, n’est-elle pas  elle aussi le fruit toxique d’un imaginaire qui prend ses doutes et ses craintes pour de la réalité? Pour couronner le tout, le temps de Pâques et  de l’Assomption se font la révérence, abolissant le temps  et le délires humains, en un clin d’œil farceur…

Cavalleria rusticana

 Créativité intense dans la recherche de l’esthétique : le plateau tournant permet l’utilisation de différents lieux du drame, en variant la profondeur de l’approche, comme une caméra de cinéma italien des années 50. Les moments « d’entre-deux » où l’on peut contempler en même temps la scène qui s’éloigne et  la suivante qui  est en train de surgir  se parent d’émotion presque métaphysique,  car  le spectateur cesse brutalement  de  participer directement  au drame pour accéder à une approche omniscient de l’action.  Esthétiquement, les différents moments de chaque tableau pourraient  chacun constituer des  tableaux très plastiques de la vie simple des petites gens. Pour exemple ces images captant la vie qui palpite dans l’atelier de pâtisserie où la pâte  généreuse se pétrit, la farine vole et les fours s’allument   et celle qui frémit dans la loge de théâtre et dans la salle de spectacles de "Pagliacci".  Les décors, c’est du Hopper live ! ...On est comblé. De très beaux mouvements de foule contribuent aussi  à lisser  le dénominateur commun des deux actions et de fondre  les deux œuvres l’une dans l’autre. 

Cavalleria-Rusticana-400x215.jpg

Interprétation primordiale : Dans ce genre d’opéra, en dehors des couleurs totalement pittoresques portées par un orchestre sous la baguette narrative d' Evelino Pido, l’interprétation est primordiale et le défi de chanter, jouer et convaincre est pleinement réussi dans cette extraordinaire  production de la Monnaie.   Pour les voix, nous avons été bouleversés par Mamma Lucia, plus vraie que tout, d'une cuisante d’humanité, incarnée à la perfection par Elena Zilio. Chacune de ses paroles, chacun de ses gestes pèse un million  d’affects et de justesse de sentiments. La jeune excommuniée, Santuzza (Eva-Maria Westbroek) aux abois est en tout point plus vraie que nature…et surtout stupéfiante dans ses côtés sombres. Elle est très convaincante aussi  dans ses échanges désespérés avec Turridu (Teodor Ilincai)   qui brandit de  très beaux vibratos. Le ténor projette avec éclat le machisme made in Italy et une violence qui n’a rien de larvé.  L’immense Sylvio, symbole du pouvoir et de la frime est joué par un formidable Dimitri Platanias, baryton plein de panache qui s’alimente  au monstre aux yeux verts de Shakespeare, mais n’aura jamais l’occasion de regretter son geste.

Pagliacci

Dans "Pagliacci", franchement plus manichéen, on retrouve une  très habile mise en abîme de scènes naïves de la Passion rappelant le temps de Pâques,  -  anges y compris - …alors  que les pittoresques processions mariales du 15 août que l'on a pu admirer dans le premier opéra devraient battre leur plein devant la salle des fêtes où se jouera le drame à 23 heures… Le personnage de Canio (Carlo Ventre) très attendu  et brillant dans son « Recitar ! - Vesti la giubba », impressionne tandis que le jeune couple Nedda-Silvio, joue l’amour innocent,  léger et bucolique. On est  franchement gâtés par les duos  de Simona Mihai et de Gabriele NaniEt Tonio (Scott Hendricks) s’avère bien  lourd, harcelant et écœurant, après un prologue pourtant très  "matter-of-fact" ... mais cela, c’est sans doute la faute au vérisme!  

Pagliacci

https://www.lamonnaie.be/fr/program/427-cavalleria-rusticana-pagliacci

Lire la suite...
administrateur théâtres

Bel hommage!

Quand il débarque à Liège en 2007,  Stefano Mazzonis Di Pralafera fera issu de la noblesse turinoise mais né à Rome n’est plus si jeune, mais il a déjà une solide réputation : il vient de secouer avec succès une vénérable institution, le Teatro Communale de Bologna, où il a été nommé superintendant trois ans plus tôt. Son mantra, c’est la jeunesse à l’opéra : des jeunes et parfois très jeunes, qu’il attire avec sa politique de prix, ses animations scolaires, ses programmations spécifiques. Il quitte Bologne en pleine gloire, salles pleines, enthousiasme de tous les publics, le vieux comme le nouveau. Suite à un concours international, il vient d’être désigné directeur général et artistique de l’Opéra Royal de Wallonie à Liège, Belgique. En Italie, on s’interroge : que va-t-il faire là-bas, dans la pluie et la grêle ?

Stefano Mazzonis sait ce qu’il fait, il aime les défis, et sait que l’Opéra Royal de Wallonie est la plus grande institution culturelle de la Communauté française de Belgique, un budget de 19 millions d’euros, près de 200 personnes employées ; il sait aussi que Liège, cernée par la Flandre, la Hollande, l’Allemagne est le dernier bastion de la latinité vers le septentrion, et qu’y vit une importante communauté d’origine italienne. Il a son idée et fait un pari…

Dix ans plus tard le bilan est impressionnant : la salle de mille places est pleine tous les soirs, l’ORW attire près de 100.000 spectateurs chaque saison, dont près de trente pourcents de jeunes ; le tiers du public vient de Flandre, de Hollande ou d’Allemagne, les opéras sont sous-titrés dans les trois langues et visibles sur le net, via culturebox, avec grand succès.

L’image contient peut-être : 5 personnes, personnes souriantes, personnes debout

Et pourtant, celui qui a appris la musique très jeune et qui s’y destinait a dû suite à un revers de fortune apprendre un « vrai » métier et ce sera le droit, Stefano se spécialise dans les télécoms pour Cofindustria, la puissante organisation des patrons italiens. Mais sa passion le taraude, et il ne peut pas s’empêcher de lancer à la télé et à la radio les concerts du dimanche, rendez-vous de musique classique et d’opéra qui vont devenir une institution en Italie. Et de fil en aiguille, petit-à-petit, on l’invite, il s’offre une première mise en scène en 1983, qui tourne en France, en Allemagne, en Belgique…

Et à Bologne et à Liège, il continue à mettre en scène les opéras du répertoire italien, Verdi, Puccini, Rossini, Donizetti… Son pari est tout simple : on laisse Wagner aux allemands, le contemporain et l’audace à La Monnaie de Bruxelles, et à Liège on montrera de l’italien, du classique, classiquement, costumes et grands décors, quoique…

« Stefano Mazzonis m’a fait venir à cause de ma totale incompétence et comme je ne sais pas du tout comment on fait, j’invente nécessairement quelque chose de différent…. »

Pour la réouverture après travaux de la magnifique salle à l’italienne de l’Opéra de Liège, en 2012, Stefano Mazzonis fait appel au cinéaste Jaco Van Dormael pour mettre en scène « Stradella », une œuvre de jeunesse de César Franck, qui n’a jamais été jouée. La piscine sur scène, où les chanteurs se noient lentement d’un acte à l’autre marquera les esprits…

Et c’est ce qu’en fin musicologue il préfère : exhumer des partitions et des opéras oubliés, négligés, qu’il crée ou fait créer à Liège, et qui sont souvent repris par les opéras du monde entier, comme « Jérusalem » de Verdi, « La gazetta » de Rossini ou « Guillaume Tell » d’André-Modeste Grétry, le compositeur liégeois dont le cœur bat toujours dans la statue érigée face à l’opéra, un mantra pour Stefano Mazzonis, et comme un air d’opéra qui enchanterait les brumes du nord.

source: Patrick de Lamale

Lire la suite...
administrateur théâtres

                                               Le dictateur romain Lucio Silla chef de file des optimates, qui s'opposent aux populares de Marius, s’est octroyé tous les pouvoirs en  écartant physiquement  ses opposants. Il les a vaincus au cours de deux guerre civiles, ayant par ailleurs récolté les lauriers d’une victoire lors d’une  expédition en Grèce contre le roi Mithridate VI. La Rome antique sert d’écran sur lequel se projettent les inquiétudes politiques du XVIII siècle.  Dans l’opéra de Mozart,  Silla, interprété dans la production du théâtre de la Monnaie par le ténor Jeremy Ovenden, a tué Mario, le père de Giunia et a exilé son bien-aimé Cecilio - le castrat original de Mozart a les traits de la soprano  Anna Bonitatibus.  Sylla exige  de Giunia qu’elle l’épouse. Incarnée par la talentueuse soprano néerlandaise Lenneke Ruiten, fidèle à la scène du Théâtre de de la Monnaie, la belle Guinia est séquestrée, elle est  au désespoir et tente de mettre fin à ses jours. Elle trouve un allié en Cinna - une sulfureuse Simona Saturová,  qui s’avère être une sorte d’agent double splendidement manipulateur, masculin ? féminin ? -, qui rêve de  faire renverser le tyran. Cecilio, qu’elle croyait mort, réapparaît dès le début de l’acte I et rend à tous, l’espoir d’un renversement proche… Les complots réussiront-ils ? Action directe, soumission, ou mort consentie? Après une analyse fouillée de l’origine  du mal, à travers les états d’âme des protagonistes et  leurs rivalités sentimentales sur fond de conflit politique, la vertu sera finalement  exaltée à  la fin du troisième acte, car Silla, coup de théâtre,  surprend la scène d’adieu des deux amoureux promis à la mort et se laisse peut-être gagner par la grâce, pardonne, renonce à ses châtiments  et, magnanime, s’élève au-dessus des conflits. Brillant !  Tout comme plus tard, dans « La clémence de Titus » (1791)  

12273266884?profile=original

  Puisant l’énergie créatrice dans ses tourments d’adolescent et ses démêlés avec son père omnipotent,  Mozart compose ce drame amoureux et politique à seize ans à peine. C’est son  troisième opera seria, noble et sérieux après « Mitridate, re di ponto »(1770) et « Ascanio in Alba »( 1771) au Teatro Regio Ducal de Milan. Mais la  partition où se succèdent les airs et récitatifs habituels  innove et introduit une grande richesse orchestrale, de nombreux  duos bouleversants et  ajoute l’intervention du chœur. On est devant un joyau musical …qu’il suffirait peut-être d’entendre les yeux fermés en version concertante, tant l’œuvre semble parfaite et tant  la palette et la densité des sentiments des solistes de cette splendide production est chatoyante, expressive et variée.

12273266678?profile=original

Le metteur en scène allemand Tobias Kratzer a choisi un nouvel écran sur lequel projeter les inquiétudes politiques du XXIe siècle. Il a  pris  le cadre épuré d’une  villa  hors de prix. Au milieu d’une impénétrable forêt, deux étages, en forme de cube de lumière et de ciment monté sur un podium  constituent  la retraite secrète et solitaire du dictateur. Elle est gardée par des chiens loups. …Un seul, en l’occurrence et qui ne fait pas vraiment peur, mais le symbolisme est limpide.  Signé Rainer Sellmaier, le décor (contemporain) joue continuellement sur les ombres et les lumières avec de très beaux effets de stores vénitiens et de violents jeux d’écrans. Il joue sur les tombes (romantiques) dans le parc entouré de murs et d’une grille sévère,  et  joue sur de lugubres sapins (de forêt noire)  accentuant l’impression d’enfermement. La villa est truffée de micros et de caméras de surveillance dans une approche bien Orwellienne. Le dictateur, incapable de vrais sentiments ou de quelconque empathie, vit à travers son obsession des écrans. Son pouvoir sera anéanti lors qu’il cassera brutalement sa commande à distance dans un dernier mouvement de colère.  Deux personnages secondaires exposent ses choix possibles. Les pulsions de mort : c’est Aufidio (Carlo Allemano)… sorte de spectre d’un autre âge, voire un vampire ? Ou l’ami inexistant…?  Quoi qu’il en soit, il incarne l’esprit du mal. L’autre c’est la jeune sœur  du dictateur, Celia (Ilse Eerens) qui survit grâce à sa maison de poupées et est amoureuse de Cinna. Elle  exalte  les pulsions de vie, d’espoir et de paix… Mais l’atmosphère reste macabre tout de même. Les choristes balancent et rampent entre Lumpenprolétariat et  monstres d’Halloween.  Nous voilà donc dans un opéra bien  noir qui brasse vampirisme et  pulsions de monstre machiste. Il pourrait tweeter: « Celui qui ne m’aime pas mérite tous les châtiments ! » Un enfant gâté, jamais arrivé à maturité?

12273267477?profile=original

La mise en scène rappelle les thrillers gothiques ou …American Psycho. On se met à rechercher un écran contre des humeurs violentes en se recentrant sur l’orchestre ou les solistes aux voix divines.  Un antidote pendant que défilent déclarations d’amour-haine, scènes de plus en plus sanglantes, scènes  de sexe ou de mort, de cruauté, de colère, d’humiliations… de suicide ou de toute puissance ? Peut-être, mu par son envie de dénoncer les maux du siècle, Thomas Kranzer en fait-il  un peu trop. Car la dérive attend le metteur en scène quand, contre toute attente, après des vidéos de viol explicite sur grand écran, la villa se fait cerner par les forces de l’ordre et attaquer comme si l’enjeu était de traquer un vulgaire terroriste… Stupéfaction des auditeurs soudainement enlisés dans l’horreur, la danse macabre ? Agressés par un éclat de rire infernal? Dommage pour ceux qui  désiraient savourer  la joie musicale qui les reliait au génial Mozart  grâce à l’incomparable complicité du chef d’orchestre Antonello Manacorda et à la beauté du pardon.    



LUCIO SILLA  de WOLFGANG AMADEUS MOZART
Direction musicale – ANTONELLO MANACORDA
Mise en scène – TOBIAS KRATZER
Décors et costumes – RAINER SELLMAIER
Éclairages – REINHARD TRAUB
Video – MANUEL BRAUN
Dramaturgie – KRYSTIAN LADA
Chef des chœurs – MARTINO FAGGIANI
 
Lucio Silla – JEREMY OVENDEN
Giunia – LENNEKE RUITEN
Cecilio – ANNA BONITATIBUS
Lucio Cinna – SIMONA ŠATUROVÁ
Celia – ILSE EERENS
Aufidio – CARLO ALLEMANO
 
ORCHESTRE SYMPHONIQUE & CHOEURS DE LA MONNAIE


NOUVELLE PRODUCTION 

Première, 29 octobre 2017 - 15:00
31 octobre - 19:00
02, 04, 07, 09 & 15 novembre - 19:00
12 novembre - 15:00

La production sera accessible intégralement et gratuitement sur Arte Concert en live le 9 novembre et en streaming du 5 au 25 décembre sur  www.lamonnaie.be
Lire la suite...
administrateur théâtres

«Et prenant la fleur de cassie qu’elle avait à la bouche, elle me la lança, d’un mouvement du pouce, juste entre les deux yeux.» Prosper Mérimée, Carmen

 

Depuis ce temps et  la création en 1875 à Paris de l’opéra de Georges Bizet sur la scène lyrique parisienne, la Seine a bien coulé et débordé de nombreuses fois hors de ses rives. A Liège ce soir, un vent de liberté a secoué les bords de Meuse. Un réel débordement d’émotions et la beauté spectaculaire des tempêtes. Voici Carmen, plus que décoiffée, cheveux aile de corbeau, coupe courte comme en 1925, tombée dans le huis-clos d’un cirque, et bien décidée d’ en sortir! 

L’image contient peut-être : 1 personne, sur scène

La voix de Nino Surguladze , originaire de Tbilissi, Georgieprend toutes les positions, dans un vibrant kamasoutra d’émotions. La belle  qui l’incarne à la perfection, corps, souffle, voix et âme, se nomme fièrement  et fascine comme aux premiers jours de la lecture de Mérimée, touchant l’imaginaire en plein cœur. Tout est dit : « L’amour est un oiseau rebelle que nul ne peut apprivoiser.»  La liberté est son apanage, elle fuse vers le ciel pour exiger son droit au désir et au plaisir. Les arguments les plus nobles ne l’empêcheront pas de se jeter à travers la montagne, fuir le bonheur confortable, et palpiter dans les bras d’un nouvel élu! La bohémienne enchante, ensorcelle, et se laisse égorger comme cette chèvre de la même époque (Lettre de Mon Moulin 1866) face au loup qui la regarde avec ses yeux de braise. Etoile de sang, elle combattra jusqu’au petit jour… usant de ses sulfureux déhanchements, de ses regards appuyés, de sa voix  trempée dans quelque mélange alchimique précieux, qui ne peut que transformer l’éphémère en universel. Elle est accompagnée de ses deux amies, Frasquita et Mercédès deux galantes primesautières et délurées: Alexia Saffery  qui remplace pour l'ensemble des représentations  Natacha Kowalski, et Alexise Yerna.

L’image contient peut-être : 2 personnes Don Jose/ Marc Laho partagé entre l’amour et le devoir est pareillement intéressant. Au fur et à mesure de la prise de conscience de sa subjugation pour la sauvage maîtresse de son cœur, il gonfle sa voix d’émotions nouvelles,  de plus en plus désespérées, de plus en plus convaincantes, et pourtant renvoyées  par la belle adorée avec la plus grande désinvolture.  Le combat final avec son nouveau  rival Escamillo, un très brillant  Lionel Lhote, est prémonitoire, il lui sert pourtant à comprendre qu’il ne peut pas gagner!  Au dernier tableau, dans le silence du cirque désert, son crime passionnel l’enferme à jamais dans l’enfer de la culpabilité. Il  s’est  définitivement  écarté des  les chemins  vertueux -  sans doute inculqués par sa mère navarraise apôtre de l’abnégation,  qui disaient - peuchère - que l’amour …prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune… - Ah la  pauvre Micaëla / la très blonde vénitienne Silvia Dalla Benetta! Proie de la passion, pris de folie,  - peut-on tuer l’être aimé par amour ? - Don Jose ne contrôle plus rien et surtout pas ce couteau qui jaillit de ses mains et commet l’irréparable.

L’image contient peut-être : 2 personnes, personnes assises et barbe

 Dans ce magnifique décor de pacotille, la théâtralité est omniprésente puisque la version choisie par le metteur en scène  est  la version parlée de l’œuvre. Dommage pour Roger Joakim qui interprète le lieutenant Zuniga aux côtés du brigadier Morales / Alexei Gorbatchev et n'a pas beaucoup de lignes chantées...mais dont la prestation est néanmoins très aboutie et  presque cinématographique. Tous les belges sont au top, que de belles dictions et de superbe en scène! C’est le vivant qui prime,dans ce foisonnement baroque,  avec au début, sans paroles ni musique, un fascinant feu d’artifice:  la frappe passionnelle des talons, ces  claquement  de mains des couples de danseurs qui ne cesseront de venir tournoyer ou d’observer de l’intérieur les progrès de l’intrigue. Le plateau est une piste humaine.  The world is a stage … Die Welt ist ein Zirkus sagt des Meister Henning Brockhaus .    Il n’épargne pas les chorégraphies, les acrobates et les merveilles circassiennes. Le décor est beau comme une boite à poupées… Et les costumes sortent des fabuleux ateliers liégeois. Ne parle-ton  d’ailleurs  pas des vertus du  Gesamtwerk? Cela ne peut évidemment pas plaire à tout le monde… L’image contient peut-être : une personne ou plus et personnes sur scène

Dans une telle œuvre, les chœurs bien sûr sont à l’honneur. Pierre Iodice, comme toujours, sur la scène lyrique de Liège est garant de la qualité vocale à travers les déplacements surprise, tantôt à un balcon, tantôt à un autre, tantôt dans la mêlée, mais toujours, la diction est limpide comme l’eau des montagnes… Et  tout  à la fois,  pour le plaisir exquis de notre écoute, la chef d’orchestre Speranza Scappucci  consume l’orchestre dans la  légèreté et la musicalité absolues. Plantée dans le sable elle échafaude une cathédrale de légèreté. Toute en fumée comme  celle des voluptueuses cigarières exotiques…  Elle geste la partition, avec fougue et tempérance à la fois, jetant des poudres pudiques sur des moments d’intime tendresse…Elle convoque les coups de foudres  de l'Amour et ses désespoirs, et les terribles coups de faux de la Mort.  C’est elle aussi qui administre les adorables chœurs d’enfants déguisés en taureaux. Quelle chance, cette rencontre de Opéra Royal de Wallonie-Liège et  de cette amazone solaire reine de la musique dont ils ont fait leur chef principal !

 d'autres détails: ici

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/nouvelle-production-de-carmen-l-op-ra-royal-de-wallonie-li-ge

Lire la suite...
administrateur théâtres

Carmen, J - 2

Pour débuter l’année 2018, une nouvelle production de Carmen sera représentée sur la scène de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège. Sous la baguette du chef principal attitré Speranza Scappucci, une mise en scène spectaculaire emmènera Nino Surguladze et Gala El Hadidi dans le rôle-titre, mais aussi les Belges Marc LahoMickael SpadacciniLionel Lhote et Laurent Kubla.


 Pour rappel, la saison se poursuivra  avec Le Domino Noir de Daniel-François-Esprit Auber,  mais voici les détails de ce premier opéra de l'année à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège dont la première est affichée dans deux jours et qui COMPORTE DEUX DISTRIBUTIONS  

«Carmen est l’un des opéras que j’apprécie le plus.
Quand j’étais petite, mes parents m’avaient emmenée
voir le film éponyme de Francesco Rosi avec Placido
Domingo. On peut dire que c’est grâce à ce
Carmen que je suis tombée amoureuse de l’Opéra.
Au cours de ma carrière, j’ai souvent travaillé cette
oeuvre, qui est parfois considérée à tort comme une
« comédie musicale ». Or c’est une grande tragédie
avec une musique fantastique. Je suis également très
heureuse de la diriger dans un pays où l’on parle le
français».

Entretien avec Speranza Scappucci, 25 mars 2017.

L’opéra le plus célèbre du monde débute comme une opérette espagnole et se termine dans une effroyable tragédie. Georges Bizet, que la mort fauchera à 36 ans avant de pouvoir mesurer le succès de sa Carmen, réalise là une prouesse musicale et vocale exceptionnelle qui fait date dans l’Histoire de l’Opéra. Il nous offre quelques-unes des plus inoubliables mélodies du répertoire, dans un exotisme omniprésent et avec une force dramatique inouïe. La fameuse scène des gitanes où les cartes prédisent la mort à Carmen est l’un des sommets d’une partition passionnée, exubérante et habitée de personnages aussi tragiques qu’attachants.

L’amour est un oiseau rebelle, Près des remparts de Séville, La fleur que tu m’avais jetée,tant d’airs si populaires aujourd’hui qu’on en oublie l’accueil glacial du public lors de la première en 1875. Carmen se démarquait des créneaux habituels de l’opéra-comique, un genre plus léger, associant chant et dialogues parlés. Est-ce la musique ou le réalisme du sujet qui choqua ? Très vite pourtant, Carmen triompha sur les scènes du monde entier.

1._carmen_repetitions_scene_suite_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-2.jpg

http://www.operaliege.be/fr/activites/carmen-0

La mise en scène

Pour sa première venue à Liège et concrétisant ainsi un projet qu’il caressait de longue date, le metteur en scène
Henning Brockhaus a choisi de situer l’action de Carmen dans l’univers d’un cirque un peu décalé : acrobates,
figurants et danseurs de flamenco rejoindront les solistes et le choeur dans une arène évoquant la corrida du
dernier acte. Inspiré par le théâtre épique de Bertolt Brecht, la vision de M. Brockhaus s’affranchira du pittoresque
souvent associé à Carmen pour offrir une dimension nouvelle et fraîche à cette histoire. En conséquence,
l’oeuvre sera présentée dans sa version originale avec dialogues parlés.


LE CARACTÈRE INFINIMENT ACTUEL DE CARMEN

Entretien de Silvia Campana avec Henning Brockhaus in L’Opéra - International Magazine, Spécial Opéra Royal de Wallonie-Liège,supplément au n°19, Milano, septembre 2017, p. 63


Henning Brockhaus sera à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège pour mettre en scène une nouvelle production de
Carmen, à laquelle il apportera une expérience culturelle complexe. Cette dernière commence par des années
de musique, de sciences, de philosophie et de psychologie. Mais elle se modèle et trouve sa vocation dans la
rencontre avec Giorgio Strehler, au Piccolo Teatro de Milan.
De là débute une carrière qui l’a mis en contact avec divers genres théâtraux sur lesquels il s’est appuyé avec
intelligence et esprit d’innovation. Ainsi sont nées des mises en scène qui ont laissé leurs traces et constituent
autant de modèles d’une façon différente et nécessaire de présenter l’opéra. Carmen exerce une fascination
irrésistible et est devenu terrain d’expérimentation pour tous les grands metteurs en scène qui s’y sont essayés.
Nous avons demandé à Henning Brockhaus de nous suggérer quelques idées permettant au spectateur d’approcher
le travail de Bizet à la lumière d’une conscience critique renouvelée.
Carmen est l’opéra le plus représenté dans le monde. Pour quelle raison ?
« ‘Carmen’ est l’opéra le plus compréhensible, tant du point de vue musical que du point de vue du livret. Il
s’inscrit dans la tradition de l’opéra-comique et on pourrait même le comparer au Songspiel, comme dans les
œuvres de Kurt Weill. La trame est infiniment actuelle et la musique pénètre instantanément le cœur ; il n’y a
rien d’artificiel, tout est naturel ».
Pourquoi chaque metteur en scène rêve-t-il de signer une version de Carmen ?
« Cet opéra stimule beaucoup la fantaisie. Tous les personnages débordent de caractéristiques et la musique,
avec ses rythmes entraînants et ses couleurs marquées offre au metteur en scène une immensité d’inspirations ».
Quelle est votre vision de l’opéra de Bizet ?
« L’opéra de Bizet se déroulera au sein du monde du cirque et du spectacle érotique. Je renonce à tous les rappels
pittoresques qui gravitent autour de cette œuvre et offre une dimension nouvelle et fraîche à cette histoire ».
Qui sera Carmen, la protagoniste de votre version ?
« Carmen sera une dame très érotique et séduisante, capable d’aimer et de jouer avec l’amour ».
Carmen est-elle capable d’aimer ?
« Carmen ne se laisse pas posséder. Son sens de la liberté est extrême, elle ne s’attache à personne et personne
ne peut l’attacher. Les hommes autour d’elle sont tous des bourgeois et voient l’amour comme de la possession.
Aimer, pour Carmen, c’est faire l’amour, au sens physique ou, comme nous disons aujourd’hui, coucher. Carmen
ne connaît pas toutes les conceptions bourgeoises de l’amour et n’a pas non plus une vision religieuse. Sa façon
d’aimer a quelque chose d’animal et est empreinte de liberté. Mais Carmen est également très seule dans sa
façon d’être. Elle ne parvient pas à trouver la relation qui lui convient ; c’est également pour cela qu’elle change
continuellement d’homme ».
Que doit éviter un réalisateur qui décide de mettre Carmen en scène ?
« Il faut éviter de tomber dans les clichés pittoresques de carte postale ».

LANGUE : Français DIRECTION MUSICALE : Speranza Scappucci 

MISE EN SCÈNE:Henning Brockhaus 

CHEF DES CHŒURS : Pierre Iodice

ARTISTES : Nino SurguladzeGala El HadidiMarc LahoFlorian LaconiSilvia Dalla BenettaLionel LhoteLaurent KublaNatacha KowalskiAlexise YernaPatrick DelcourPapuna TchuradzeRoger JoakimAlexandre Tiereliers

 8 REPRÉSENTATIONS :  Du vendredi, 26/01/2018 au vendredi, 09/02/2018

2._carmen_repetitions_scene_suite_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-8_pp.jpg

«Carmen met le monde qui l’entoure sans cesse au défi. C’est une femme
forte, libre, jeune, jamais vulgaire. Elle est intelligente, sensuelle, courageuse!
Les qualificatifs ne manquent pas. Toutes les femmes peuvent se reconnaître
en elle. Elle est et restera intemporelle. C’est en cela que réside sa force et
sa grandeur.»
«Bien que Carmen s’insurge contre les tabous de notre société, bien
qu’elle puisse être parfois cruelle, c’est une femme authentique, qui sait ce
qu’elle veut. Elle ne ment jamais, elle a un don pour l’amitié, pour l’amour
inconditionnel. [...] C’est une femme libre qui, au nom de cette liberté qui
lui est si chère, est prête à sacrifier sa vie! Comment ne pas s’attacher à une telle personnalité?»


Nino Surguladze in L’Opéra - International Magazine, Spécial Opéra Royal de Wallonie-Liège, supplément au n°19, Milano,septembre 2017, p. 60

Lire la suite...
administrateur théâtres

Dialogues des Carmélites, l’opéra le plus célèbre de Francis Poulenc (1899-1963) fut créé à Bruxelles en 1959, soit deux ans à peine après sa création à la Scala et à Paris. C’est une œuvre tragique magistrale, musicalement et dramatiquement. Elle a cette qualité royale : «  la force » et « le dépouillement », pourrait-on ajouter.  L’histoire de ces carmélites décapitées durant la Révolution française est connue par le récit qu’en fit l’une d’entre elles. Sur la nouvelle "La dernière à l'échafaud", de Gertrud von le Fort (1931), Georges Bernanos livre un dialogue de film qui sera publié en 1949, quelques mois avant que la mort ne l’enlève à un public fervent qui n’avait cessé de s’élargir.

L’image contient peut-être : une personne ou plus, mariage et intérieur

 

 Les nombreuses prières que comptent l’œuvre confèrent une aura sacrée à l’œuvre. Elles soulignent le refus du compromis et de la transaction. Elles cristallisent l’honneur chrétien : une relation fusionnelle de l’honneur humain et de l’amour du Christ pour les pauvres humains. Blanche incarne un miracle. La faiblesse, la fragilité et la peur sont transfigurées en héroïsme quand la terreur et la violence iconoclaste compromettent ce que nous avons d’élévation et de civilisation.

dialogues_patricia_petibon_blanche_de_la_force_stanislas_de_barbeyrac_chevalier_de_la_forcecbaus_0.jpg

 

A la mort prodigieuse de la prieure, crucifiée par le doute sur  la couche verticale de sa chambre  de nonne, la grâce inonde l’esprit de la jeune Blanche comme  une vague de tendresse éternelle. Ce mot « tendresse » effleuré par la sainte femme, mère de toutes les filles,   elle se l’était réservé comme ma seule chose à emporter.  Ce viatique pour l’au-delà est un trait d’union.  La mort des carmélites qui n’ont pas renoncé à leur foi est un manifeste contre tout ce qui blesse ou avilit l’être humain. La délicieuse sœur Constance, accède aux plus hautes valeurs sans jamais les trahir grâce à ce que Bernanos nommait « l’esprit d’enfance ». Un mélange de pureté, de joie pure, d’idéal et de goût absolu de Dieu. Les deux interprétations de ces  deux rôles de vestales sont immaculées, tout comme leur blanches robes!

 

Les tableaux intimistes d'Olivier Py se succèdent et  déploient de bouleversantes émotions. La tristesse du père qui voit sa fille se condamner au Carmel, la détresse physique et morale de la jeune Blanche qui est envahie par une peur maladive, les murs mouvants qui se referment sur les couleurs du monde, la  souffrance et la peur délirante de la mort de la prieure vue du ciel, l’ultime rencontre de Blanche avec le chevalier de la Force désespéré de voir sa sœur s’enterrer vivante, la déroute des priantes universelles de l’amour face à  la sauvagerie de l’invasion de la soldatesque, le caractère ambigu de l’aumônier démis de ses fonctions,  tout est suggéré de manière minimaliste mais tellement chorégraphique, au sens étymologique du terme. Le mythe brille dans la caverne! Le point culminant de l’opéra est un point d’orgue poignant et sans doute inoubliable par sa majesté.   Le sacrifice des nonnes sera libératoire lorsqu’elles s’éparpilleront une à une dans l’espace étoilé, à chaque coup de guillotine,  leur prison terrestre s’étant ouverte à l’infini de l’univers. Vision extraordinaire d’alpha et d’oméga sur l’onde musicale du Gloria Patri… On a le souffle coupé!

dialogues_sandrine_piau_soeur_constance_mireille_capelle_mere_jeannecbaus_0.jpg

 

  L’Orchestre symphonique et les Chœurs de la Monnaie (chef des chœurs Martino Faggiani)  

Il n’y a pas plus vivant que les nuances de gris… dit-on !  L’interprétation du chef d’orchestre Alain Altinoglu, directeur musical de la Monnaie, à la tête de l’orchestre ne cesse de fasciner par le scintillement des émotions et la souplesse des atmosphères. Il ne cesse d’allumer mille et un feux. La palette des sentiments aussi sombres que les costumes et le décor est faite de veloutés, de crépitements,  d’explosions, de signaux d’alarme prémonitoires, de plaintes, de craintes et d’héroïsme flamboyant, spirituel et charnel. 

Peter de Caluwe a réuni une  double distribution éblouissante, choisissant parmi les plus belles voix féminines  du chant français et belge : la soprano Patricia Petibon et la belge Anne-Catherine Gillet, dans le rôle de Blanche de la Force ; les sopranos Sandrine Piau et Hendrickje Van Kerckhove  pour Sœur Constance de Saint-Denis ; la mezzo-soprano Sylvie Brunet-Grupposo  pour Madame de Croissy ; les sopranos Véronique Gens et la jeune Marie-Adeline Henry dans le personnage de Madame Lidoine ; les mezzo-sopranos Sophie Koch et Karine Deshayes dans Mère Marie de l’Incarnation.  Pour les rôles masculins, nous avons admiré la prestance du  baryton-basse français Nicolas Cavallier dans le Marquis de la Force et l’intense  jeune ténor Stanislas de Barbeyrac (débuts à la Monnaie) dans le Chevalier de la Force. Guy de Mey dans le rôle de l’aumônier  … ce rôle, ambigu ?

Nous  nous interrogeons, au passage sur l’intrépidité de La Monnaie à oser présenter une œuvre qui met en scène l’héroïsme religieux et pour certains, une forme de fanatisme, qui devrait pourtant baisser pavillon  par les temps qui courent… Provocation? Le public n’a qu’à réfléchir ! Sans nul doute!

 DISTRIBUTION

Direction musicale ALAIN ALTINOGLU
Mise en scène OLIVIER PY
 
Décors et costumes PIERRE-ANDRÉ WEITZ
Éclairages BERTRAND KILLY
Chef des chœurs MARTINO FAGGIANI
 
Le Marquis de la Force NICOLAS CAVALLIER
Blanche de la Force PATRICIA PETIBON / ANNE-CATHERINE GILLET*
Le Chevalier de la Force STANISLAS DE BARBEYRAC
L’Aumônier du Carmel GUY DE MEY
Le Geôlier, Thierry, M. Javelinot NABIL SULIMAN
Madame de Croissy SYLVIE BRUNET-GRUPPOSO
Madame Lidoine VÉRONIQUE GENS / MARIE-ADELINE HENRY*
Mère Marie de l’Incarnation SOPHIE KOCH / KARINE DESHAYES*
Sœur Constance de Saint Denis SANDRINE PIAU / HENDRICKJE VAN KERCKHOVE*
Mère Jeanne de l’Enfant Jésus MIREILLE CAPELLE
Sœur Mathilde ANGÉLIQUE NOLDUS
Premier commissaire YVES SAELENS
Second commissaire ARNAUD RICHARD
 
ORCHESTRE SYMPHONIQUE & CHŒURS DE LA MONNAIE
ACADÉMIE DES CHŒURS DE LA MONNAIE s.l.d. de BENOÎT GIAUX
 

 

 

https://www.lamonnaie.be/fr/program/426-dialogues-des-carmelites

en live sur
operavision.eu
15.12.2017

diffusion sur Klara
13.01.2018

diffusion sur Musiq3
20.01.2018

streaming disponible sur
www.lamonnaie.be/fr/streaming
10.01 > 30.01.2018

Lire la suite...
administrateur théâtres

…Et on murmure dans mon dos que ma musique est vieille !

 

✔ Laudamus te… 

Joie, ravissement, bonheur théâtral et musical complets devant cette production de one-man-opera, flanquée de deux anges, musiciennes passionnées : Les chanteuses lyriques Julia Szproch, soprano et Sarah Théry, mezzo, deux figures en robes blanches incarnant émotion,  pureté et source de vie. Il faut dire que  le comédien de cet opéra parlé en 11 tableaux est de taille à endosser l’Antonio Vivaldi  hors d’âge  décrit avec immense saveur,  par Vincent Engel dans son roman Alma Viva (Ker edition 2017) qui retrace le récit des derniers mois de la vie du compositeur.  Viva Alma  Viva !

06-viva-4.jpg

 ✔ Pietro Pizzutti a le charme natif de l’italien, l’agilité bourdonnante de pilleur de jeunes filles en fleurs, le charme du rêveur ...pas toujours solitaire, et les irrésistibles intonations du Don Juan pourfendeur des hypocrisies patriciennes et de la boue toxique des foules  mortifères. Les colères misanthropes du Maître de violon au Pio Ospedale della Pietà éclatent avec vigueur, sa verve poétique pour la lagune de Venise attache, son credo « je prie, j’aime et je crée » remplit d’ivresse!

Difficile de faire la part du livre et celle  du diseur de mots dont les postures, les pitreries et les révélations enchantent. Merci l’Artiste! Fervent défenseur de Dieu mais pas des bondieuseries, gonflé de respect pour son père et refusant de l’enfermer dans un Requiem, amoureux de ses origines simples - du barbier au violoniste - il conspue le clavecin aristocratique et  pourfend l’ostentation des pharisiens de tout poil.

« Mon masque à moi est tissé de notes et j’aime la vie car j’adore Dieu qui nous a offert la vie ! » Etre musicien c’est être au plus près de Dieu … et de ses anges! Il mêle l’azur des musiques naissantes aux caresses érotiques et à l’esprit de Dieu ! Dominus vobiscum…Et cum spiritu tuo ! Le texte vous embarque loin de la vieillesse, au plus près de l’amour. De quoi frissonner. « Le gondolier pousse sa barque d’un coup d’archet virtuose propre à enflammer la lagune… »Tout est dit, le reste est variations sur le thème enivrant de la célébration de la vie. Les messes, les mots, les titres, les programmes frelatent la vérité de la musique. «Je ne me moque pas du monde c’est le  monde qui se moque de la musique. »

 06-vivagd.jpg

    Il faut saluer bien sûr la parfaite mise en scène de  Gabriel Alloing.  L’écrin dans lequel se joue cette brillante péroraison sur l’amour de la vie est un superbe triptyque de silhouettes de la ville sur lequel  apparaît à tour de rôle  la salle du conseil des « governatori » de la Pietà à qui s’adresse Vivaldi, un florilège de peintures de très saintes femmes, le bruissement de l’eau du canal à l’aube des sentiments, et le gondolier rêveur qui mène sa barque à travers les sublimes musiques. 

 

Benedicimus te !

 

In Musica veritas! L’ensemble baroque des Muffatti - I migliori vini dolci italiani - divisé en diptyque, à gauche et à droite de la scène ravit par  la  sonorité des timbres  délicats, la polychromie, la grâce, la  théâtralité du geste musical qui brode fidèlement  le texte mais sans emphase. On perçoit au contraire une réelle empathie avec le comédien et cela crée une sorte de dialogue parfait. N’est ce pas cela, ce que veut dire «concertare»? Dialoguer.

 

✔Glorificamus te !

L’image contient peut-être : une personne ou plus et nuit

http://www.atjv.be/Viva

  

Lire la suite...
administrateur théâtres

                      Créé à Paris le 2 décembre 1840, « La Favorite » de Gaetano Donizetti s'installe à Liège dans sa version originale française!  Fernand (Celso Albelo), un jeune novice, fils spirituel du Grand-prêtre Balthasar (Ugo Guagliardo) , est  déchiré entre sa foi et son  coup de foudre pour une inconnue. Il abandonne son monastère  pour rejoindre les forces armées d’Alphonse  XI, roi de Castille (1311–1350) qui se prépare à partir en guerre contre l'envahisseur maure. Il ne se doute cependant pas un seul instant que la femme qu'il aime est la maîtresse "favorite" du roi. Nous sommes  dans l'Espagne du XIVe siècle, au temps des luttes de pouvoir entre l’Église et l’État et  leurs tumultes illustrés  par les  somptueuses pages lyriques de Donizettti, brillamment dirigées par Luciano Acocella. Alphonse a bien caressé l’intention de répudier sa femme pour faire de Léonor, sa  nouvelle  reine…comme le fera deux siècles plus tard le roi anglais Henry VIII (1491–1547) mais il craint l’excommunication.  Pour  récompenser Fernand  de sa  bravoure,  le roi (Mario Cassi)  le couvre d’honneurs et accède à son désir en lui  accordant la main de Léonor. Il conseille sarcastiquement à Leonor d’être fidèle au moins à Fernand. Ce n'est que le jour même de leur mariage que Fernand découvre avec  horreur la relation de Léonor avec le roi. Sa colère virile explose : S O N honneur est définitivement trahi ! Voyez-vous donc ! Humilié et ostracisé par ses compagnons d’armes, il repousse alors ses titres et ses trésors et retrouve ainsi l’estime de Don Gaspar (Matteo Roma)   et des Seigneurs. Il retourne au monastère, laissant ses vœux et sa nouvelle épouse sombrer dans le désespoir. On assiste aux rites de  son ordination. Mais la tragédie romantique est loin d’être achevée car Leonor, mourante vient s’expliquer avec lui. L’amour de Fernand renaît. Bouleversé,  il veut s’enfuir avec elle, mais elle lui demande de respecter ses vœux et s’éteint dans ses bras.    

                                                                         Stupéfaction, le rideau s’ouvre sur une sombre salle des coffres, où l’on véhicule des bocaux étranges sur une table roulante. Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley se déploie. Le rituel s’installe devant un triangle lumineux sur la pointe. Le glaive du pouvoir divin et de l’injustice? 2080 est bien pire que 1984 de Georges Orwell. La nature, « cette sève de l’être humain » a disparu. Les vestiges se retrouvent dans des bocaux gardés par le pouvoir suprême, un monastère-laboratoire. Dans ce monde d’éprouvettes, plus de pacte familial, ou social, plus de droit à la pensée ou au discernement. Les femmes aux longues chevelures voilées de blanc, toutes identiques, sont offertes à la contemplation. Futures porteuses de guerriers, elles sont cloîtrées sous globe dans la ruche …de plastique, en l’occurrence. Contrôlées, dépossédées de leur libre-arbitre elles font partie d’un monde fait de splendides paysages lumineux tous artificiels. Le seul arbre de l’œuvre, placé dans un cylindre, agrémente comme un saint-sacrement,  la chambre du roi. En 2080 ? La liberté est bien morte, et malgré son caractère trempé  le roi  plie le genou  devant l’autorité religieuse.  En forme de leçon de morale glaçante, un très beau ballet met en scène deux femmes-papillons qui, ayant conservé leurs couleurs, et malgré la beauté de leur art, meurent sous les regards assassins. Chorégraphie: Luisa BALDINETTI. Rosetta Cucchi est la metteuse en oeuvre de ce monde minéral désenchanté. Les costumes, - le ou la - plastique des  lumières et la  scénographie soulignée par des ronces tentaculaires fluorescentes quand on n’est pas dans le monastère-laboratoire, éclatent d’ironie. 

                                                                     Honneur aux femmes.  La  brûlante mezzo-soprano  Sonia Ganassi, incarne dans un portrait sincère de Léonor. Palpitante, humaine, elle s’insurge contre le sérail de ses sœurs qui toutes penchent la tête sous leurs voiles nacrés. Se fait-elle torche incandescente de désespoir au dernier acte, dans ses échanges déchirants avec Fernand ? Donnant beaucoup de tenue aux duos avec Fernand (Celso Albelo) , elle passe des couleurs sombres aux assauts verbaux désespérés et au délire de l’amour avec une incomparable virtuosité. Et son français est bien audible, ce qui est beaucoup moins le cas pour les interprètes masculins de cette production où il faut souvent se référer à la bande déroulante pour en comprendre la diction.   Sa compagne, Inès resplendit de fraîcheur, incarnant par la qualité de la voix, la fameuse sève humaine disparue de ce monde minéral. Une voix solaire, une diction parfaite, un rayonnement musical qui s’avère être un réel répit dans ce monde fossilisé malgré tous ses effets de lumières (Fabio Barettin/Sylvain Geerts ).

                                                        Les chœurs  aussi sont à l’honneur : de véritables rafales de pluie bénéfique bruissante où vibre une humanité chaleureuse restée indépendante de la volonté de la mise en scène.  Une production saisissante par sa modernité et surtout pour la superbe prise de rôle d’Ines (Cécile Latschenko), l’exquise compagne de Leonor qui devait en principe trouver Fernand pour  lui avouer la vérité sur elle. Interceptée par Don Gaspar (Matteo Roma)  elle a été arrêtée par ordre du Roi, pour avoir aidé Léonor dans sa trahison.

                                                            Quel monde… d’hommes!  

 

http://www.operaliege.be/fr/activites/la-favorite

Lire la suite...
administrateur théâtres

« Norma » est à l’affiche à L’opéra de Liège. Tous deux, Vincenzo Bellini et John Keats, le poète romantique anglais,  sont morts  très  jeunes, et c’est comme si leur âme flottait encore sur le temps suspendu qu’ils ont su reproduire dans leurs compositions, qui, musicale, et  qui poétique. Ou peut-être les deux ?  “A thing of beauty is a Joy for ever !”

1._norma_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-34.jpg

A entendre ce magnifique opéra de Bellini interprété de façon aussi sublime le jour de la première à Liège, on ne pouvait que se laisser  porter sur les chemins de la beauté musicale et en être atteint en plein cœur. En effet il semble que la musique  de Bellini,  transposée avec autant d’authenticité par Massimo Zanetti à  la direction d’orchestre et par Pierre Iodice à celle des chœurs, a  fait renaître toute l’énergie du  compositeur, lui  conférant  un souffle d’éternité. Mais sans les interprètes, un magnifique casting de six solistes talentueux,  point de forêt mystérieuse, point de rochers bleus veinés d’or, point d’autel, de  sacrifices druidiques, point de brasier justicier, ni de mythe, ni de lune apaisante et élégiaque, ou de faucille d'or en forme de croissant ! L’accent n’est pas mis sur la confrontation de valeurs religieuses, ni  les choix politiques ou la liberté des peuples, c’est  ici l’affrontement intime des passions humaines qui fascine.  

La tragédie se déroule en Gaule transalpine lors de l’occupation romaine. Norma, La prêtresse d’Irminsul, le pilier du ciel, est écartelée entre son devoir sacerdotal, son statut d’épouse répudiée, et ses devoirs de mère clandestine. L’amour divin, l’amour humain et l’amour maternel se vouent une bataille sanglante.  La mise en scène prend l’envergure fantastique  d’une cosmogonie, elle est  signée Davide Garattini Raimondi. Deux puissances en présence: le divin et et le temporel qui s'affrontent.  La montagne  « barbare » d'une part et creusé dans son flanc, un immense bas-relief ouvragé  inspiré d’un sarcophage romain (IIIe siècle ap.JC) : le Sarcofago Grande Ludovisi de Rome, qui témoigne des batailles entre  Romains et  Barbares.  

 Rendons donc hommage à la distribution, vivante, homogène, généreuse dont l’engagement dramatique est prodigieux mais sans emphase. Patrizia Ciofi (Norma)*Gregory Kunde (Pollione)Josè Maria Lo Monaco (Adalgisa),  Andrea Concetti (Oroveso)Zeno Popescu (Flavio), Réjane Soldano (Clotilde) font vibrer puissamment la forêttragique  des sentiments. On est devant une  source inépuisable d’émotions d’une fluidité continue, évitant les effets spectaculaires et  serrant au plus près la recherche de  vérité essentielle. Appréhendant quelque peu la virtuosité acrobatique de l’œuvre, que l'on se plait à dire meurtrière pour les  solistes qui s'essaient au rôle titre, nous nous sommes juste trouvés dans  le champ de la séduction et face à un équilibre absolu des voix, des décors et des costumes intemporels étincelants (Giada Masi). A de nombreux endroits, la volupté de l’écoute arrête le temps qui ne passe pas! Dans la fosse, les musiciens expriment  l’empathie pour notre condition humaine et développent fidèlement  la tension dramatique sous la main expressive et fougueuse du chef d’orchestre qui geste tout cela! Car rien n’est figé.  En parallèle,  la chorégraphie soigneuse de  multiples ballets dansés (guerriers romains, prêtresses, druides), confère  au décor, de vivantes palpitations, déchirantes d’humanité. Le silence  des corps en mouvement est d’une grande éloquence pour dénoncer la torture des sentiments et les violences avérées qui peuplent l’histoire des hommes! … Sous la direction de Barbara Palumbo. Aux lumières : Paolo Vitale.   

Néanmoins, ce que l’on retient surtout de cette représentation foisonnante et  subtile, ce sont les prestations exceptionnelles de Patrizia Ciofi, dans le rôle-titre mythique  immortalisé autrefois par Maria Callas, Leyla Gencer, Joan Sutherland, Montserrat Caballé…

Norma, immense prêtresse vénérée et femme secrètement amoureuse, déchirée par la traîtrise de celui qu’elle aime, se montre divine en vestale, jeune femme planante, aérienne, souple, envahie d’amour dans sa bouleversante intimité!  Elle se montre délicieusement complice  avec sa  jeune consœur spirituelle, Aldagisa. On surprend des affectueux élans vers ses enfants, mais elle reste torturée par le besoin de vengeance, puis de rédemption. Elle se hérisse d’attaques, passe par la douceur et la virtuosité, se fait puissance et agilité. La longueur de souffle semble inépuisable, le défi vocal de la partition semble toujours gagné avec de belles lignes pures de vocalises et surtout, le rôle est habité comme jamais!

L’auditoire ne peut se retenir d’applaudir et d’acclamer fougueusement l'émouvant duo féminin  « Sì, fino all'ore estreme!... » de Norma et Aldagisa (Josè Maria Lo Monaco) la jeune prêtresse dont s’est épris le présomptueux romain. Confondant de superbe et de suffisance, la voix chaude du ténor extraverti Gregory Kunde clame: « Je suis protégé par un puissant pouvoir - celui de l’amour qui enflamme tout mon être - je jure d’abattre cet autel d’infamie! ». Le timbre délicat d’Adalgisa  respire la séduction et la tendresse pure et innocente et on éprouve ce « bonheur irradiant » dont Stendhal parle à l’écoute de Rossini et de Cimarosa.

3._norma_officielles_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-15.jpg

 Quant à  la diction impeccable et la  voix cuivrée et solaire du ténor  qui joue de bonne grâce la lourdeur de l’envahisseur romain, elles sont remarquablement adaptées à l’œuvre bellinienne. Mystère de la musique? Duos et trios finiront par effacer les contours de l'imposant décor, pour ne garder que le temps suspendu!   

 

*Silvia Dalla Benetta (Norma 04/11/17)

 

Du jeudi, 19/10/2017 au samedi, 04/11/2017

 

http://www.operaliege.be/fr/activites/norma

Lire la suite...
administrateur théâtres

Opéra en 4 actes
Livret de Ruggero Leoncavallo, Marco Praga, Domenico Oliva, Giulio Ricordi, Luigi Illica et Giuseppe Giacosa
Créé à Turin en février 1893

18._manon_lescaut_officielles_-_site_logos_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-33.jpg

Le célèbre roman  de l’Abbé Prévost : Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut (1731),    se trouve incarné  en opéra  par  Daniel-François-Esprit Auber en 1856 et  par Jules Massenet , le « maestro colossale » selon les dires de Puccini, en 1884. Puccini quant à lui,   « all'italiana, con passione disperata » en 1893, abandonne  la jeune fille innocente et frivole  du XVIIIe siècle pour  ressusciter le destin d’une  femme sensuelle de son temps habitée par une folle énergie. Elle recherche passionnément les plaisirs de la vie, écartelée entre les attraits inconciliables du luxe et la vérité du désir amoureux. Devant la mort inéluctable, elle refuse de mourir: « No, non voglio morire ! »

Clair de lune au crépuscule. Les couleurs du premier acte sont celles du  Bal du Moulin de la Galette à Montmartre, peint en 1876 par Auguste Renoir. Une palette de bleus lumineux, de verts acides mêlés de glauques et de  violets intenses, les couleurs du spleen.   L’atmosphère est  bruissante, on joue aux  tables de bistrot au pied  de l’auberge d’Amiens. L’arrière-plan du plateau diffus tient de l’impressionnisme.  Une  foule animée, les femmes en robes à crinoline constitue des chœurs exubérants dans leur ode retentissante à la jeunesse et à l’espoir.   Tragédie ou comédie ? Quelle blague! La puissante soprano Anna Pirozzi  & le ténor sicilien Marcello Giordani, forment un  couple central intense et passionné, très bien accordé dans la voix et le jeu. Le timbre noble et chaleureux de l’un répond au diapason des émotions  à vif de l’autre.  

Le chevalier Des Grieux (Marcello Giordani) tombé amoureux de  l’ardente Manon (Anna Pirozzi) à sa descente de calèche,  revit  son rêve caressant  et son coup de foudre passionné :        Donna non vidi mai simile a questa!

        A dirle: io t'amo,

        tutta si desta -- l'anima.                                                    

        Manon Lescaut mi chiamo!

        Come queste parole                                            

        mi vagan nello spirto

        e ascose fibre vanno a carezzare.

        O susurro gentil, deh! non cessare!...  

3._manon_lescaut_officielles_-_site_logos_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-4.jpg

 Mais dès cet instant,  Des Grieux signe sa perte.  De son côté, Géronte, - au nom plus qu’évocateur - Fermier-Général de la Province de son état, séducteur caduc, conspire avec Lescaut (Ionut Pascu), le frère très vénal de la belle-promise-au-couvent. Le vieux barbon  se délecte à l’idée d’enlever sa proie et de l’installer à Paris dans un cadre princier. Impeccable prestation de Marcel Vanaud.

12._manon_lescaut_officielles_-_site_logos_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-18.jpg  

 Grande ellipse narrative. Si Manon s’est enfuie avec Des Grieux à Paris, elle l’a très vite trahi  pour se retrouver dans l’écrin de  la richesse. Les décors somptuaires sont  de Jean-Louis Lecat. Au centre du plateau, trône un superbe escalier d’honneur. Manon  a franchi d’un coup toute l’échelle sociale.   La voilà à sa toilette,  face au miroir de la foule, adulée et caracolant effrontément sur  l’orchestration ferme, gracieuse et brillante de Speranza Scapucci. Laquais, femmes de chambre et perruquier, sont empressés. Son frère, Lescaut  se vante «  c’est grâce à moi que tu as échappé à l’étudiant ! ». Mais au milieu de ses dentelles, Manon livre son cœur déchiré : in quelle trine morbide...                              

       nell' alcova dorata v'è un silenzio..                           

        un freddo che m'agghiaccia!..

        Ed io che m'ero avvezza

        a una carezza

        voluttuosa                                                      

        di labbra ardenti e d'infuocate braccia...

        or ho... tutt' altra cosa!                   

                O mia dimora umile,

                tu mi ritorni innanzi

                gaia, isolata, bianca                                   

                come un sogno gentile

                e di pace e d'amor! 

Manon  s’étiole devant les madrigaux commandés par Géronte. Le chant de pastoureaux libres et heureux la rend nostalgique!   Les secrets du menuet la font enrager au bras du vieux barbon qui l’a couverte d’or ! On attend avec impatience  le magnifique duo avec son amant très en colère  qui débarquera miraculeusement. Dunque non m'ami più?

            Mi amavi tanto!

            Oh, i lunghi baci!  Oh, il lungo incanto!

            La dolce amica d'un tempo aspetta

            la tua vendetta...                                         

            Oh, non guardarmi così: non era

            la tua pupilla

            tanto severa! 

 Manon implore son pardon, l’amour fait le reste.  La chef d’orchestre divine,Speranza Scapucci, dont c’est la première apparition  comme chef principal attitrée de l'ORW-Liège, pour la saison 2017-2018 est une  fabuleuse créatrice d'atmosphères. Elle enlace son orchestre  dans  d'intrépides  étreintes musicales qui deviennent ivresses  de sentiment. Sa baguette passionnée tresse les émotions, prenant  le ciel et les astres à témoin. Les amants tragiques se sont rejoints au pied des fauteuils de l’élégant salon. Point culminant intense de la rencontre amoureuse… balayée par l’arrivée du vieillard en colère : « C’est là vote remerciement ? » L’orchestre traduit les battements de cœur de la femme prise au piège. Des Grieux la  conjure  de fuir avec lui… Mais Manon est décidément incorrigible. Elle est  éblouie par les mirages du luxe largement amplifiés par  les  cuivres brûlants de l’orchestre. Elle perd du temps, caresse langoureusement les meubles précieux, part à la recherche des bijoux qu’elle veut emporter ! Des Grieux est sombre : «  quel avenir obscur feras-tu de moi ? »  « N’emporte que ton cœur!» supplie-t-il !

Après l’arrestation des amants  à la fin du deuxième acte, place  à un splendide intermezzo pendant lequel on lit dans les pensées de Des Grieux : « C’est que le l’aime avec une passion si violente qu’elle me rend le plus infortuné des homes J’ai tout employé, à Paris pour obtenir sa liberté : sollicitations adresse, force m’ont été inutiles. J’ai pris le parti de la suivre, dût-elle aller jusqu’au bout du monde ! » Une citation du texte de l’Abbé Prévost.   Les cordes font vibrer le désespoir. Le violoncelle soliste  dialogue avec l’alto soliste, puis le violon solo avant l’entrée de tout l’orchestre qui répand des vagues successives d’angoisse. Crescendo puissant et inéluctable…pour annoncer le mélodrame final. Speranza Scapucci reçoit des applaudissements très largement mérités.  Au troisième acte, nous sommes au Havre.  Le jour se lève sur le quai où seront amenées les femmes de mauvaise vie en partance pour L’Amérique, terre de bannissement. Le mélange insolite de paquebot à vapeur et de bateau à roues à aubes… suscite l’admiration du public. Le traitement des malheureuses femmes que l’on fait monter à bord remplit d’effroi! C’est l’appel : Rosetta! Manon! Ninetta! Regina! Violetta! Toutes malmenées et méprisées. La foule de badauds  est contenue par la police. Magnifique réglage scénique.  L’orchestre polit les affres de douleur de Manon, prisonnière derrière une grille ; l’amour est son crime ! La passion  des amants  et les envolées lyriques sont à leur comble.

L’image contient peut-être : une personne ou plus

Des Grieux  bouleverse la foule assemblée et le public par sa décision de suivre Manon en exil. Le quatrième acte est une vallée de larmes partagée par le couple maudit, dévoré par la soif au milieu du désert qu’ils doivent traverser pour rejoindre la colonie anglaise. Ils sont exténués et impuissants. Manon, malgré la fièvre et l’épuisement, reste forte, comme en témoigne sa voix ! Sola... perduta... abbandonata!.. Sola!..                       

        Tutto dunque è finito. E nel profondo

        deserto io cado, io la deserta donna!

        Terra di pace mi sembrava questa...

        Ahi! mia beltà funesta,                                          

        ire novelle accende...

        Da lui strappar mi si voleva; or tutto

        il mio passato orribile risorge

        e vivo innanzi al guardo mio si posa.

        Di sangue ei s'è macchiato...                                    

        A nova fuga spinta

        e d'amarezze e di paura cinta

        asil di pace ora la tomba invoco...

        No... non voglio morire... amore... aita! 

 Mais le désert brûlant engloutira une à une, ses  fiévreuses paroles  d’adieu à la vie... « Sur mes fautes l’oubli s’étendra, mais l’amour vivra ! » sont  les  dernières paroles de Manon, sur lesquelles Des Grieux finit par rendre l’âme.   

 

La direction habile des chœurs très mobiles  est confiée à Pierre Iodice.   Les superbes éclairages de  Franco Mari font vibrer les émotions, les costumes  de Fernand Ruiz déploient richesse et imagination tandis que la  soigneuse mise en scène de Stefano Mazzoni Di Pralfera est loin de décevoir. Au deuxième acte, comme dans une maison de poupée, les différents plans offrent l’illusion de caméras qui pénètre dans plusieurs décors à la fois. Mais par-dessus tout, on gardera en mémoire  ces deux mains qui se cherchent, l’une à bord du navire, l’autre sur le quai…. 

19._manon_lescaut_officielles_-_site_logos_c_lorraine_wauters_-_opera_royal_de_wallonie-43.jpg

Speranza Scappucci dirige l'Orchestre et les Choeurs de l'Opéra Royal de Wallonie-Liège. 

MISE EN SCÈNE : Stefano Mazzonis di Pralafera

CHEF DES CHŒURS : Pierre Iodice

ARTISTES : Anna PirozziMarcello GiordaniIonut PascuMarcel VanaudMarco CiaponiAlexise YernaPatrick DelcourPietro Picone

NOMBRE DE REPRÉSENTATIONS : 5 DATES : Du mardi, 19/09/2017 au samedi, 30/09/2017

Infos & Réservations http://bit.ly/2xUkMY3    

Jeudi, 28/09/2017

L'Opéra Royal de Wallonie, en association avec la société de production Jim et Jules, la RTBF et France Télévisions, propose une diffusion en direct sur Culturebox, l'offre numérique dédiée à la culture de France Télévisions, sur medici.tv et sur le site de la RTBF de l'opéra de Puccini. http://culturebox.francetvinfo.fr/

           

 

Lire la suite...
administrateur théâtres

Aucun texte alternatif disponible.Des clés  pour l’opéra, …au cœur de la Forêt de Soignes 

Quoi de plus  enthousiasmant  pour débuter la nouvelle saison de critiques chez Arts et Lettres, que  le charmant spectacle « Il était une fois… une flûte enchantée ! » une  adaptation pour enfants de l’œuvre de Mozart  en  60 minutes   de bonne humeur et de légèreté, écrite par Sophie van der Stegen,  respirant l’exquise musique  du compositeur et son rêve des Lumières!  La (Petite) Flûte Enchantée est un projet Enoa (European Network of Opera Academies),  en coproduction avec l’ Escuela de Musica Reina Sofia, Fondation Calouste-Gulbenkian. La tournée a débuté en Belgique le 26 août à Louvain-la-Neuve (au Kidzic à la ferme du Biéreau), nous l’avons dégustée ce  samedi  10 septembre, à La Chapelle Musicale Reine Elisabeth qui affichait complet! Ensuite elle voguera vers d’autres contrées…

   Heather Fairbairn, ludique et mystérieuse,   est à la mise en scène. Tout commence avec des enfants munis de coussins et de masques d’oiseaux joliment assemblés avant le spectacle qui se rassemblent autour d’un podium servant d’écrin à un arbre de lumière stylisé, seul représentant d’une forêt imaginaire. Les  baies vitrées de la salle  de la Chapelle musicale donnent sur les bois.  Ainsi, au cours de  cet opéra participatif et immersif,  les jeunes de l’école maternelle à l’école primaire picoreront en live et pour la première fois pour nombre d’entre eux, les graines  de l’éveil musical et amoureux. La flûte enchantée n’est-telle pas une initiation au coup de foudre, à l’amour au premier regard, puis à sa maturation en empruntant la voie étroite?

12273242485?profile=original

   Quelque part, un escabeau sans prétention et un coffre à  malices ou à costumes ont rejoint le mystère de greniers d’antan.   A l’autre bout,  une pianiste (Julie Delbart /Marie Datcharry) fera frémir des atmosphères : des orages terrifiants, l’autorité du sage, les déclarations d’amour et  les  improvisations de bonheur qui pétillent dans la musique originale d’Ana Seara! 150 regards émerveillés qui ont fait le pari de l’imaginaire seront comblés, l’énergie du conte et de la musique circule  avec naturel. Comme le dit la conclusion du spectacle : « La musique, l’amour, l’amitié et l’imagination, c’est tout l’Opéra. »

 12273239492?profile=originalLe ténébreux barytonGuillaume Paire incarnait avec  voix assurée et entregent solide un Papagéno génial, en costume d’explorateur, ainsi que le mage Sarastro … et la Reine de la Nuit et ses maléfices! D’emblée, il sauve le séduisant prince Tamino (le très romantique ténor, brûlant et  enchanteur, Fabien Hyon)du terrifiant serpent de la forêt, grand comme une ablette. Rires. Celui-ci tombera ensuite amoureux du portrait de  Pamina, enlevée à sa terrible mère, et séquestrée par Sarastro. Flûte enchantée et carillon magique convoquent la magie… Mais pas que : la magie  même du spectacle et la voix des enfants devenus oiseaux des forêts, ouvrent les portes de l’imaginaire!   Des épreuves terribles attendent le jeune couple, dont la pire : le silence! Parents et enfants se retrouvent à rêver devant la vraie fée du spectacle Pamina (Julie Gebhart) : délicate, frissonnante, juvénile, tendre, exquise image de princesse, douée d’une voix extraordinaire au timbre fruité et aux aigus très agréables. C’est la même interprète, Julie Gebhart qui représente la coquine Papagéna.  « En musique, aidez-nous à trouver Papagéna ! » lance le maître du jeu musical, en nettement mieux que Dora l’exploratrice!  Rassemblées dans la joie de l’écoute et des rires, les gosses de tous âges et leurs parents sont réellement conquis par la découverte !

12273244064?profile=original 12273244852?profile=original

Chapelle Musicale Reine Elisabeth

445 chaussée de Tervuren, 1410 Waterloo

  12273244898?profile=original

http://belgium-events.com/event/la-petite-flute-enchantee-family-opera-2

 

Mind you! If you want to support the project, nominate us for an Opera Award! 
- Visit www.operaawards.org/nominate
- In the category 'Education & Outreach', type: Queen Elisabeth Music Chapel's La (petite) Flute Enchantee

Lire la suite...
administrateur théâtres

LE THEÂTRE ROYAL DE LA MONNAIE a rouvert ses portes!

Le 5 septembre, le Théâtre rénové de la Monnaie rouvrait enfin ses portes. Et que pouvait-il y avoir de mieux et de plus symbolique qu’une création du compositeur belge Philippe Boesmans, son septième opéra pour la Monnaie? Associé au metteur en scène et écrivain de théâtre Joël Pommerat, ils se sont inspirés de Pinocchio, l’immortel héros de bois du conte pour enfants de Carlo Collodi, pour en distiller une leçon à laquelle les « grands » ne seront pas moins sensibles. Parce que la route de la petite marionnette vers la sagesse n’est jamais achevée et qu’elle ne cesse de résonner dans le dur monde des adultes.
Pinocchio a été  créé en juillet durant le Festival d’Aix-en-Provence. La direction musicale de l’Orchestre symphonique de la Monnaie  a été  confiée à Patrick DavinJoël Pommerat est accompagné, pour la mise en scène, de son vieux complice Eric Soyer pour les décors et éclairages, d’Isabelle Deffin pour les costumes et de Renaud Rubiano pour la vidéo.

12273240480?profile=original


La distribution minutieusement choisie est entièrement  en langue française t dans une diction très soignée. Le découpage de l’œuvre en petites scènes, fréquent chez Joël Pommerat, a favorisé la répartition de plusieurs rôles pour chaque chanteur. Complice de longue date de la Monnaie, le  baryton Stéphane Degout - directeur de la troupe / premier escroc / deuxième meurtrier /  directeur de cirque – est considéré comme un des meilleurs barytons de sa génération.c’est un. Le baryton-basse Vincent Le Texier - le père / troisième meurtrier / le maître d’école - est un formidable interprète de musique contemporaine, avec de nombreuses créations à son actif.
La soprano Chloé Briot incarne le déluré petit pantin. Le ténor Yann Beuron incarne le Deuxième escroc / le directeur de cabaret / le juge / premier meurtrier / le marchand d'ânes. Deux québécoises viennent compléter cette distribution et faire leurs débuts à la Monnaie : la mezzo-soprano Julie Boulianne pour  la chanteuse de cabaret / le mauvais élève - et la soprano Marie-Eve Munger  pour la fée. A cela s’ajoutent les musiciens Fabrizio Cassol (saxophone et coordination de l'improvisation), Philippe Thuriot (accordéon) et Tcha Limberger (violon tzigane) qui interpréteront la musique de scène intégrée par Philippe Boesmans, comme à son habitude, à la partition de l’orchestre.

REPRÉSENTATIONS 
SEPT 5, 7, 8, 12, 13, 15, 16 - 20:00
SEPT 10 - 15:00
 

 https://www.lamonnaie.be/fr/program/422-pinocchio

 

Le festival  inORGuration, programmé à l’occasion de la restauration de l’orgue de la salle Henri Lebœuf, accueillera le concert d’ouverture de la saison symphonique de La Monnaie  sous la baguette d’Alain Altinoglu, avec l’Orchestre symphonique, le Chœur de femmes (dirigé par Martino Faggiani), et le Chœur de jeunes et l’Académie de chœur de la Monnaie (dirigés par Benoît Giaux). Accompagnés deThierry Escaich, représentant majeur de la nouvelle génération d’organistes et compositeurs français, ils nous proposeront un chatoyant programme « transatlantique ».
 
Le concert s’ouvrira avec les Nocturnes de Claude Debussy (1862-1918). Debussy a choisi le terme « nocturnes » pour sa capacité à évoquer des impressions et des lumières particulières : celles d’un ciel nuageux et changeant (Nuages), d’un cortège de fête (Fêtes) ou d’une mer aux vagues argentées sous la lune (Sirènes). Souvent citée pour son caractère impressionniste, cette œuvre repose avant tout sur la subtile orchestration du compositeur français, dans un jeu polyrythmique complexe et envoûtant qui en fait la richesse.
De l’autre côté de l’Atlantique, Samuel Barber (1910-1981) compose la Toccata Festiva pour l’inauguration de l’orgue de l’Academy of Music de Philadelphie. Pourtant organiste de formation, Barber n’écrira que très peu pour orgue, ce qui donne à cette partition un caractère exceptionnel. Le compositeur a cherché à mettre en valeur les possibilités techniques du nouvel orgue autant que la virtuosité de l’orchestre de Philadelphie. Cela donne une œuvre virtuose et débordante d’énergie, où fanfares éclatantes et jeux d’orgue alternent avec de plus lents et lyriques passages.
Après l’entracte, place à la dévotion paysanne, avec les Litanies à la Vierge noire de Francis Poulenc (1899-1963) qui feront vibrer le cœur de la salle. Composée en 1936 à l’occasion d’un passage à Rocamadour, c’est un hommage du compositeur français à l’humble statue qui trône dans l’église de ce petit village qui fut l’un des grands pèlerinages de la chrétienté.

12273241452?profile=original
Enfin, Alain Altinoglu nous fera découvrir la nouvelle œuvre du compositeur belge Benoît Mernier (1964°), Dickinson Songs. La programmation de cette création parallèlement au Pinocchio de Boesmans n’a rien de fortuit. Ancien élève de Philippe, Benoît Mernier est également l’un de ses proches compagnons de musique. Il est l’auteur pour la Monnaie de deux opéras, Frühlings Erwachen en 2007 et La Dispute en 2013.

REPRÉSENTATION 
17 septembre 2017 - 20:00
 
PALAIS DES BEAUX-ARTS
23 Rue Ravenstein, 1000 Bruxelles
 

https://www.lamonnaie.be/fr/program/431-dialogues-de-l-orgue

 


Le deuxième concert de la saison réunira  les compositeurs Philippe Boesmans et Francis Poulenc, formant ainsi un pont entre les productions d’ouverture, Pinocchio et Dialogues de l’orgue, et  la grande production de décembre, Dialogues des carmélites. Ce concert sera exceptionnel car il marque les débuts à la Monnaie du chef d’orchestre américain Dennis Russell Davies, et car nous pourrons y entendre deux œuvres pour deux pianos exécutées par deux formidables pianistes français David Kadouch et Cédric Tiberghien et encore de par la présencen de  la soprano italienne Anna Caterina Antonacci, l’une des voix les plus éminentes de la Monnaie qui  interprétera La Voix humaine de Poulenc, un rôle dans lequel elle excelle.

La Voix humaine, tragédie lyrique composée en 1958 sur un texte de Jean Cocteau, est une œuvre de pleine maturité et d’une puissance dramatique  exceptionnelle. Poulenc réussit là un tour de force théâtral et musical qu’Anna Caterina Antonacci a déjà relevé à Paris et Genève.

12273242256?profile=original

 "Aujourd’hui, le chant français, et je ne parle pas seulement de l’opéra, mais aussi des répertoires de chambre et symphonique, fait vraiment partie de ma respiration. Je pense même pouvoir dire que je me sens de plus en plus proche de la musique française ", confiait la soprano italienne dans une interview en 2013. Cela se ressent particulièrement dans ce rôle qui exige une profonde sincérité, magnifiquement chanté par celle qui interprétait très récemment encore le rôle-titre de Pénélope de Fauré pour la Monnaie.

REPRÉSENTATION 
24 septembre 2017 - 20:00
 
PALAIS DES BEAUX-ARTS
23 Rue Ravenstein, 1000 Bruxelles

https://www.lamonnaie.be/fr/program/432-la-voix-humaine

 

Enfin, la danse est aussi à l’honneur aussi avec du 23.09.2017 au 27.09.2017 la production d’ Anne Teresa De Keersmaeker, dont l’affinité particulière avec Bach n’est plus à démontrer. Elle approfondit sa quête d’une écriture chorégraphique  en saisissant  l’essence même du langage du compositeur. Le violoncelliste de renommée internationale Jean-Guihen Queyras, trois danseurs et deux danseuses (dont Anne Teresa De Keersmaeker elle-même) donneront vie à la partition de Bach.

REPRÉSENTATIONS 
Première, 23 septembre — 20:00
26 & 27 septembre — 20:00
24 septembre — 15:00

https://www.lamonnaie.be/fr/program/446-mitten-wir-im-leben-sind

de-munt-mji4mja5mta3oa.jpg

 Crédit photos: Anne Van Aerschot

 

 Après deux saisons de fermeture pour rénovation, le théâtre royal de La Monnaie en profite aussi pour proposer une balade dans ses coulisses en compagnie des techniciens de la maison le 16 septembre prochain. C’est que ces travaux de deux ans ont aussi permis d’intégrer quelques techniques parmi les plus modernes. L’occasion de découvrir la réalité du quotidien derrière la façade néo-classique.

La Monnaie, 23 rue Léopold, 1000 Bruxelles, site : lamonnaie.be. De 13h à 15h30 (de 10h à 15h30 pour les abonnés). Entrée libre.

https://www.lamonnaie.be/fr/program/644-journee-portes-ouvertes

 

 

Lire la suite...
administrateur théâtres

le-verfugbar-aux-enfers-bandeau.jpg« J’ai écrit une opérette, une chose comique, car je pense que le rire,

même dans les situations les plus tragiques, est un élément revivifiant.» (G.TILLION)

Germaine Tillion* est une jeune ethnologue spécialiste de l'Algérie lorsque débute la Seconde Guerre mondiale. 12 octobre 1940, le Ghetto de Varsovie voit le jour et les ténèbres s'abattent. Après la capitulation de 1940, elle refuse la politique du régime de Vichy, elle qui a vu monter l'idéologie nazie alors qu'elle se trouvait en Allemagne en janvier 1933. Elle cherche immédiatement à agir, organise des évasions de prisonniers et des distributions de tracts qui dénoncent Vichy, avec l'aide de sa mère. Elle se lie avec de nombreux groupes de résistants, et le réseau du Musée de l'Homme. Elle est arrêtée le vendredi 13 août 1942, alors qu'elle organisait l'évasion d'un camarade et un transfert de microfilms. Ignorant que sa mère a été arrêtée elle aussi, elle est déportée à Ravensbrück en 1943 sous le statut Nacht und Nebel. Au camp, elle entreprend d'étudier le fonctionnement concentrationnaire avec l'aide d'autres détenues, et leur présente ses analyses sur ce système criminel et économique, convaincue que sa compréhension les aidera toutes à y survivre. Elle rapportera qu'elle a survécu alors grâce à ses « sœurs de résistance » et à la « coalition de l'amitié ». C’est cachée dans une caisse pendant plusieurs jours au  cours de l'hiver 1944-1945, qu’elle écrivit son livret "Le Verfügbar aux Enfers", avec l'aide de ses complices qui lui fournissaient papier, crayon et leurs propres souvenirs pour les airs des chansons. Elle mêle à des textes relatant avec humour les dures conditions de détention, des airs tirés du répertoire lyrique ou populaire.

verfugbar-mail

Le rire, technique de survie communautaire 

Un levain de survie, le miracle de l’humanité

 « Faire rire, rire de soi et transmettre l'information,  trois actes de résistance en situation extrême : telle est la performance de Germaine Tillion » lit-on dans la préface de l’œuvre aujourd’hui conservée au musée de Besançon.   Dans son combat humaniste, Germaine Tillion s’emploie dans l’écriture clandestine à exposer la logique concentrationnaire et à l’objectiver, ce qui donne des clés pour  y résister. La prisonnière politique étiquetée NN « classe, distingue les catégories de détenues, leurs statuts, leurs nationalités, leurs appartenances sociales. Elle note les proportions, remarque les différents taux de survie et cherche des explications. »  Face à l’horreur, à l’oppression,  à l’anéantissement, se moquer de soi est une ultime affirmation de soi. Par dérision,  Germaine Tillion utilise  une forme ô combien irrévérencieuse pour traiter d’un sujet aussi grave. Son  opérette-revue pastiche l'Orphée aux Enfers d'Offenbach.  La parodie fourmille de  souvenirs littéraires ou musicaux, question de maintenir la dignité humaine par le jeu du texte et l’évocation de musiques évanouies.

 Ainsi, elle  met en scène un savant d’opérette, spécialiste en histoire naturelle,  qui fait semblant de décrire une nouvelle espèce biologique: le Verfügbar,  organisme étrange dont la vie d’avant constitue la phase  embryonnaire,  éclot à son arrivée  dans le camps nazi de la mort, et ne peut espérer qu’une longévité  fort réduite,  de plus ou moins trois ans selon les cas. Son mode de vie est décrit sous forme de sketchs émouvants et burlesques. On pourrait se demander s’il fait  partie des vers luisants, puisqu’il éclaire tant dans la nuit et le brouillard?  Pourtant, son humour est très noir : « Et quand le train s'est arrêté, On ne m'a pas demandé mon billet ..., Mais malgré le plaisir de la nouveauté, J'aurais bien voulu  m’en aller ... » Il est le  miroir dans lequel se reflètent les innommables souffrances des détenues… 

22382073_10211334027371337_8326297020760153238_o.jpg?oh=3b4bce4e75658a61adcd161e3f4fca9e&oe=5A8401CD&width=260« Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent »

«Nuit et Brouillard» par Jean Ferrat

Verf%C3%BCgbar-4-1180x787.jpg

La performance de la compagnie  des Souffleuses de chaos est extrêmement fidèle au texte et aux annotations musicales de Germaine Tillion, dont parents étaient de grands mélomanes. Elle ressuscite des chansons populaires, des airs d’opéra comme substrat musical, un humus d’émotions confisquées par l’environnement concentrationnaire. Le quatuor aguerri - Alizée GAYE,  Marion NGUYEN THÉ, Marie SIMONET & Tiphaine VAN DER HAEGEN – a  mis deux ans de recherche approfondie, d’affinement et de modulation sous la direction de Marion Pillé. On se trouve aujourd’hui devant une œuvre vivante, digne et esthétique. Sur scène, on assiste à une explosion de sensibilités féminines  qui partagent avec ferveur un crescendo de douleur mais aussi d’espoir. Paradoxalement,  on finit par concevoir que ressentir la douleur prouve que l’on est d’ailleurs encore vivant!

000211.jpg?width=350

Le contraste est fort troublant  entre les maquillages de geishas, les coiffures sophistiquées,  les superbes robes froufroutantes de  taffetas noir qui mettent en valeur bras  nus et jambes gracieuses et ...les  poignantes marionnettes efflanquées  en pyjama rayé qui  miment la détresse des  françaises rebelles. Il y a tant de vie et d’humanité dans la manipulation vivante de ces poupées de chiffons! Comme si chaque comédienne se penchait avec immense compassion sur chaque prisonnière, à la manière d’une fée salvatrice et lui donnait une force expressive mystérieuse.  Il y a tant d’intensité dans le jeu des comédiennes lorsqu’elles se lâchent dans leurs danses à la vie! Il y a tant de vérité à l’abri du rire dans le texte! Il y  a tant de mots qui finissent par  désarmer le Mal… Les voix des choristes sont fraîches, vibrantes  et tendres mais stridulent aussi, de manière lugubre, dans la nuit avec de lumineux relents de chœurs antiques. Les chorégraphies crépitent d’énergie vitale, les corps sont en perte d'équilibre, s'effondrent,  les visages se tournent vers le ciel absent. ...Serons-nous les aveugles de Breughel?  Les effets chorégraphiques bouleversants  sont portés et démultipliés par la musique nuancée du pianiste qui joue dans l’ombre.  L’esthétique du texte souterrain donne la main à la dramaturgie des jouvencelles d'aujourd’hui et allume dans le cœur et l’esprit, le rejet incontournable et définitif de la barbarie.

Image associée

La résistante Germaine Tillion, morte à l’âge de 100 ans en 2008 est entrée au Panthéon en 2015. Elle a eu l'occasion de voir son œuvre jouée au Théâtre de Chaillot, à Paris en 2007. Chaque représentation à la Comédie Claude Volter  sera  suivie utilement d’un débat qui abordera chaque fois, différents sujets liés à la Shoah.

http://www.comedievolter.be

Une production des Les Souffleuses de Chaos

Assistanat à la mise en scène : Noémi KNECHT / Musique : Simon BESÈME 

Lumière : Clément BONNIN / Scénographie & costumes : Élisabeth BOSQUET

Marionnettes : Sylvie LESOU, Benjamin RAMON &Marie SIMONET  

Maquillages : Daphné DURIEUX  

Coach voix : Hughes MARÉCHAL

Coach marionnettes : Patrick RABIER 

Coach corps : Hélène FERRACCI

           du Mercredi 11 au Samedi 28 octobre 2017

 

LE VERFÜGBAR AUX ENFERS – UNE OPÉRETTE À RAVENSBRÜCK

de

Germaine TILLION

*Source : http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu06404/le-verfugbar-aux-enfers-une-operette-de-germaine-tillion.html

 

Lire la suite...
administrateur théâtres

Des clés  pour l’opéra, …au cœur de la Forêt de Soignes 

21744981_10159214128795459_1045586378_o.jpg?oh=0c64a9909aca3c5aea57abcd769ae2f3&oe=59BDF37E&width=300

Quoi de plus  enthousiasmant  pour débuter la nouvelle saison de critiques chez Arts et Lettres, que  le charmant spectacle une  adaptation pour enfants de l’œuvre de Mozart  en  60 minutes   de bonne humeur et de légèreté, écrite par Sophie van der Stegen,  respirant l’exquise musique  du compositeur et son rêve des Lumières!  La (Petite) Flûte Enchantée est un projet Enoa (European Network of Opera Academies),  en coproduction avec l’ Escuela de Musica Reina Sofia, Fondation Calouste-Gulbenkian. La tournée a débuté en Belgique le 26 août à Louvain-la-Neuve (au Kidzic à la ferme du Biéreau), nous l’avons dégustée ce  samedi  10 septembre, à La Chapelle Musicale Reine Elisabeth qui affichait complet! Ensuite elle voguera vers d’autres contrées…(Luxembourg, Portugal & Espagne!)

21764477_10159214128765459_659163548_o.jpg?oh=2b252c377ed87416b987a8e5a4420469&oe=59BDCB56&width=300

   

Heather Fairbairn, ludique et mystérieuse, est à la mise en scène. Tout commence avec des enfants munis de coussins et de masques d’oiseaux joliment assemblés avant le spectacle qui se rassemblent autour d’un podium servant d’écrin à un arbre de lumière stylisé, seul représentant d’une forêt imaginaire. Les  baies vitrées de la salle  de la Chapelle musicale donnent sur les bois.  Ainsi, au cours de  cet opéra participatif et immersif,  les jeunes de l’école maternelle à l’école primaire picoreront en live et pour la première fois pour nombre d’entre eux, les graines  de l’éveil musical et amoureux. La flûte enchantée n’est-telle pas une initiation au coup de foudre, à l’amour au premier regard, puis à sa maturation en empruntant la voie étroite?

 21742095_10159214129175459_865008333_o.jpg?oh=b998a914e9f3424913de1f9f2351ac7c&oe=59BEE75B&width=300  Quelque part, un escabeau sans prétention et un coffre à  malices ou à costumes ont rejoint le mystère de greniers d’antan.   A l’autre bout,  une pianiste (Julie Delbart /Marie Datcharry) fera frémir des atmosphères : des orages terrifiants, l’autorité du sage, les déclarations d’amour et  les  improvisations de bonheur qui pétillent dans la musique originale d’Ana Seara! 150 regards émerveillés qui ont fait le pari de l’imaginaire seront comblés, l’énergie du conte et de la musique circule  avec naturel. Comme le dit la conclusion du spectacle : « La musique, l’amour, l’amitié et l’imagination, c’est tout l’Opéra. »

 Le ténébreux barytonGuillaume Paire incarnait avec  voix assurée et entregent solide un Papagéno génial, en costume d’explorateur, ainsi que le mage Sarastro … et la Reine de la Nuit et ses maléfices! D’emblée, il sauve le séduisant prince Tamino (le très romantique ténor - brûlant et  enchanteur  -  Fabien Hyon) du terrifiant serpent de la forêt, grand comme une ablette. Rires. Celui-ci tombera ensuite amoureux du portrait de  Pamina, enlevée à sa terrible mère, et séquestrée par Sarastro. Flûte enchantée et carillon magique convoquent la magie… Mais pas que : la magie  même du spectacle et la voix des enfants devenus oiseaux des forêts, ouvrent les portes de l’imaginaire!   Des épreuves terribles attendent le jeune couple, dont la pire : le silence!21745048_10159214129400459_87792270_o.jpg?oh=cda0a4cfaa346a3044f6287eaca050f7&oe=59BF0783&width=300

Parents et enfants se retrouvent à rêver devant la vraie fée du spectacle Pamina (Julie Gebhart) : délicate, frissonnante, juvénile, tendre, exquise image de princesse, douée d’une voix extraordinaire au timbre fruité et aux aigus très agréables. C’est la même interprète, Julie Gebhart qui représente la coquine Papagéna.  « En musique, aidez-nous à trouver Papagéna ! » lance le maître du jeu musical, en nettement mieux que Dora l’exploratrice!  Rassemblés dans la joie de l’écoute et des rires, les gosses de tous âges et leurs parents sont réellement conquis par la découverte !

 

Chapelle Musicale Reine Elisabeth

445 chaussée de Tervuren, 1410 Waterloo

  

21744550_10159214129225459_828288800_n.jpg?oh=8e388d88c4aba8b85bdcd48bc5e04653&oe=59BE003C&width=300

http://belgium-events.com/event/la-petite-flute-enchantee-family-opera-2

 

Mind you! If you want to support the project, nominate us for an Opera Award! 
- Visit www.operaawards.org/nominate
- In the category 'Education & Outreach', type: Queen Elisabeth Music Chapel's La (petite) Flute Enchantee

 

 

 

Lire la suite...
administrateur théâtres

La Chypre imaginaire de Shakespeare est une  riche possession vénitienne, bastion  entre l’Islam et la chrétienté orientale. Priorité à la structure et aux couleurs : les notables festoient sur  l’esplanade d’un palais vénitien dans un déluge de tenues d’apparat, dignes de tableaux renaissance de Véronèse : Les noces de Canna (1562)?    On ne peut qu’être remplis d’admiration pour ces costumes rutilants faits de  tissus et  soieries tellement  raffinés -“Stuff dreams are made of” -   et signés  par le fidèle  créateur de L’opéra Royal de Wallonie: Fernand Ruiz. Ceux-ci, tous différents, font  presque passer au second plan les colonnades antiques du palais où se déroule l’action après la  bataille de Lépante…

Cette histoire Shakespearienne encensée par Verdi avait été écrite en 1603-1604 après la publication d’un édit royal de 1601 ordonnant l'expulsion de tous les Noirs d'Angleterre. Otello, le général maure de l’armée Vénitienne est en extase devant  sa jeune  épouse Desdemona qu’il a épousée contre le consentement de ses parents. Cependant,  son conseiller de confiance, Iago, commence à laisser  entendre que Desdemona est infidèle. Il veut causer la perte d’Otello et le pousser au crime passionnel.  Qui des deux, Otello va-t-il croire : son perfide et envieux compagnon d’armes  ou son innocente  femme? Avec une exactitude presque mathématique, on assiste au développement  du sentiment de  jalousie, depuis sa naissance à peine perceptible jusqu’à son fatal paroxysme. Les chœurs toujours dirigés par Pierre Iodice sont somptueux et constituent un renouvellement ininterrompu de  tableaux vivants  de l’époque Elisabéthaine!

19149332_1732475403448506_8008282694085806649_n.jpg

 

Otello se confond impeccablement avec la ligne ascendante implacable de la jalousie, depuis la confiance extatique au premier acte, jusqu’à l’instant où naît le soupçon infusé avec machiavelisme par Iago, celui où commence la traque de la trahison imaginaire dans une  passion qui s’exaspère jusqu’à la folie bestiale. Et puis, devant le constat de son crime et l’innocence certaine de la victime, il se précipite dans l’abîme du désespoir et de l’inutile repentir. Le ténor   argentin José Cura, formé par Domingo Placido  explore sa partition avec vigueur brûlante et profusion de couleurs.  Son «Abbasso le spade!» clamé avec autorité contraste pleinement avec son duo  avec Desdemona, qui clôt le premier acte. Il diffuse parfaitement sa perception de  la volatilité du bonheur lorsqu’il dit vouloir mourir dans l’extase de l’étreinte de sa compagne.  «Già nella notte densa» déborde de tendresse. Les dieux seraient-t-ils jaloux de ce pur bonheur?

Otello

Jose Cura © Lorraine Wauters 

«  Credi in un Dio cruel che m’ha creato simile a sè ! » Je crois à un Dieu cruel qui m’a fait à son image ! Le sulfureux Iago (Pierre-Yves Pruvot), humilié de s’être vu refuser une promotion,  a engagé une machination infernale pour détruire celui qu’il s’est mis à haïr avec passion.  Il est  consumé par l’orgueil, la jalousie, l’envie et le désir de vengeance. Sa duplicité monstrueuse  fascinante  en fait une figure d’un charisme  infernal qui force  malgré tout l’admiration du public. Quelle prestation et quelle sonorité ! Le baryton Pierre-Yves Pruvot  endosse le costume de l’hypocrisie avec une conviction et un talent vocal et théâtral exceptionnel. Ses moindres inflexions changeantes tantôt caressantes, tantôt menaçantes donnent froid dans le dos tant la fourberie est toxique!

19145793_1732477266781653_2136085662843167168_n.jpg  

 

Desdemona est remarquablement intense dans sa naïveté et son aveuglement amoureux, mais aussi d’une lucidité  surnaturelle  devant l’imminence de sa fin brutale. Cinzia Forte  qui s’est illustrée sur la scène de l’Opéra de Wallonie plusieurs fois, RigolettoLe Nozze di FigaroFidelio et La Bohème) possède une voix pleine de fraîcheur de délicatesse et de rondeur. Ses aigus soulignés par la finesse des violons et en suite  celle des  bois sont super légers !  Son désarroi devant les accusations injustes est  immensément touchant. « Atterré, je fixe ton terrible regard, en toi, parle une furie ! » « L’Eternel voit ma foi ! »L’orchestre est en délire et l’accompagne dans son sentiment d’injustice. Otello l’étouffe sur sa poitrine, elle fuit et les cordes soulignent son isolement. Plainte douloureuse, le soleil s’est éteint.  On retrouve la hantise de l’antiquité grecque.  Dans la fange amère et glacée, elle pleure son âme qui se meurt. Après son Ave Maria, « prega per noi ! » elle quitte le coussin sur lequel elle s’était agenouillée pour s’approcher du lit mortel. L’Amen est illuminé bordé de violons fins comme des cheveux d’ange  Son jeu  final d’oiseau pour le chat est pleinement attendrissant et semble penser :  « Tue-moi mais fais vite !» « As-tu prié » demande Otello ! «  Mon pacte est l’amour. » Tout est dit !

19149373_1732478070114906_3282010000752505476_n.jpg

S’il visait l’excellence  pour sa dernière représentation à L’Opéra de Liège,  Paolo Arrivabeni, dont  c’est la dernière saison, a atteint pleinement son but. Il  confirme sa très fine et profonde  connaissance de l’œuvre et son habileté pour traduire tous les sentiments. Il  parcourt la triple tragédie  dans les moindres détails, avec un sens aigu des variations d’atmosphères et un traitement époustouflant des orages annonciateurs de  tempêtes de sentiments dont les humains sont victimes. La pâte sonore luxuriante semble monter comme un immense soufflé de haine, de jalousie et de désarroi d’une rare  intensité. De la place où nous étions, nous avions une vue plongeante sur l’orchestre, de quoi pouvoir observer les moindres détails des interventions des instrumentistes. Joie musicale redoublée. Quatre notes de harpe disent la nuit qui descend, l’accompagnement du rire de Iago est fracassant et quand le doute pénètre Otello, les cordes en tremblent ! Le venin de la trahison imaginaire s’infuse dans les bois, la colère d’Otello bouillonne avec un orchestre en folie alors que genou à terre celui-ci fait un pacte avec le Diable! Les cuivres sont sanguinaires : « Comment vais-je la tuer » se demande Otello ! Et la munificence de la cour vénitienne déferle avec les chœurs qui saluent le vainqueur de Chypre. A la fin du 3e acte le chef a donné toute sa force et est épuisé par le paroxysme musical. A la fin du 4e acte, le dernier souffle de vie est expulsé par l’orchestre.    19224769_1732477563448290_253497608858692607_n.jpg

Le jeu de la suivante, Emilia n’est pas moins convainquant « Je suis ta femme, pas ton esclave ! » assène-t-elle à Iago. Alexise Yerna a été entendue sur la même scène dans Manon, Luisa Miller, Rigoletto, Ernani, Il Barbiere di Siviglia, Lucia di Lammermoor, La Traviata et Orphée aux enfers. Les deux femmes sont à la pointe de l’intimité, elles s’entraident avec la ferveur du désespoir.  Leur duo tendre souligné par les hautbois est un moment d’émotion intense et lumineuse. C’est elle qui expliquera avec détermination la félonie de son mari  à l’ambassadeur de Venise (notre cher Roger Joachim). Et Cassio, le jouet du destin, c’est  Gulio Pelligra (dans Nabucco en octobre dernier) qui l’habille d’une très belle humanité.

SAISON : 2016-2017

DIRECTION MUSICALE : Paolo Arrivabeni MISE EN SCÈNE : Stefano Mazzonis di Pralafera CHEF DES CHŒURS : Pierre Iodice ARTISTES : José CuraCinzia FortePierre-Yves PruvotGiulio PelligraAlexise YernaRoger JoakimPapuna TchuradzePatrick DelcourMarc Tissons

NOMBRE DE REPRÉSENTATIONS : 6DATES : Du vendredi, 16/06/2017 au jeudi, 29/06/2017  

http://www.operaliege.be/fr/activites/otello

Crédit photos: Lorraine Wauters

Lire la suite...

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles