…Et on murmure dans mon dos que ma musique est vieille !
✔ Laudamus te…
…Et on murmure dans mon dos que ma musique est vieille !
✔ Laudamus te…
Jean-Baptiste Poquelin, autrement plus connu sous le pseudonyme de Molière, a dû se retourner de plaisir du fond de sa tombe infamante, avec la belle mise en scène ultra-chic et moderne, par Dominique Serron en 2017, de sa pièce emblématique « Le Misanthrope » représentée pour la première fois au théâtre du Palais-Royal à Paris, le 4 juin 1666, par la Troupe du Roi.
Retrouvez les personnages : ALCESTE, dit le Misanthrope, amant de Célimène ; PHILINTE, ami intime d’Alceste ; ORONTE, « poète » et amant de Célimène ; CÉLIMÈNE, amante d’Alceste ; ÉLIANTE, cousine de Célimène ; ARSINOÉ, « amie » de Célimène ; ACASTE & CLITANDRE : 2 marquis prétendants de Célimène, BASQUE, valet de Célimène ; UN GARDE de la maréchaussée de France ; DU BOIS, valet d’Alceste. Voici l’adresse du texte! http://www.toutmoliere.net/IMG/pdf/misanthrope.pdf
Alceste, l’atrabilaire drôlement sympathique et vif-argent joué par Patrick Brüll a tout pour plaire! Il circule à la vitesse du vent sur un plateau ouvert, entre les alexandrins bénis des amoureux de la langue française et ses élans passionnels pour la belle Célimène. « Je veux qu'on soit sincère, et qu'en homme d'honneur, On ne lâche aucun mot qui ne parte du cœur. » « Sur quelque préférence, une estime se fonde, Et c'est n'estimer rien, qu'estimer tout le monde. » « Non, vous dis-je, on devrait châtier, sans pitié, Ce commerce honteux de semblants d'amitié » « et je hais tous les hommes: Les uns, parce qu'ils sont méchants, et malfaisants Et les autres, pour être aux méchants, complaisants».
@Célimène : #headoverheelsinlove : « Mon amour ne se peut concevoir, et jamais, Personne n'a, Madame, aimé comme je fais. » Mais, « J'entre en une humeur noire, en un chagrin profond, Quand je vois vivre entre eux, les hommes comme ils font; Je ne trouve, partout, que lâche flatterie, Qu'injustice, intérêt, trahison, fourberie » C’est là que l’on se dit que Molière a hélas mille fois raison!
http://www.atjv.be/Le-Misanthrope-2017
Première scène, Elle : Tu me prends pour une bille? Quelques scènes plus tard, Lui : Tu me prends pour une bille?
Pierre Arditi a triomphé dans « La Vérité » en 2011, le voici écumant dans les eaux marécageuses du nouveau spectacle de Florian Zeller : « Le Mensonge ». Paul, le mari d’Alice ment par habitude, par bonté d’âme, par bienveillance, comme preuve d’amitié et même d’amour. Peut-on l’accuser d’être hâbleur, roublard, hypocrite et dissimulateur ? Démonstration.
In vino veritas. La vérité est dans le vin n’est-ce pas ? Pas étonnant que sa jeune femme ait toutes les peines du monde à avaler le Château Mabille millésimé tant l’humeur est tendue ce soir-là. Le Mensonge plane. L’heure est à la Vérité. La scène de ménage est prête à éclater. Nous en sommes à quelques instants de recevoir à dîner leurs meilleurs amis, Laurence et Michel. Trinqueront-ils dans la complicité à la fin de l’exercice ? On le leur souhaite! Qui, de fait, souhaite pour soi ou les autres, déchirures, humiliations, et perte de confiance mutuelle à cause des mensonges?
Cette comédie sur les 50 nuances de la vérité se reflète dans les magnifiques jeux de lumière sur un décor fait de panneaux translucides blancs qui composent l’intérieur très design de l’appartement. On est au salon, plus que dépouillé, quelques fauteuils identiques, deux dressoirs vides surplombés de peintures baroques luminescentes. A droite une femme observe derrière son masque, à gauche une escalade de chairs nous renvoie le reflet d’une société aux mœurs légères et décadentes. Au fond, dans le dégagement qui mène à la cuisine est-ce un hologramme ou une toile à la Zubaran qui représente des coquillages symboliques. C’est tout. Plus aucun changement de décor tout au long de la pièce mais une multitude de virages lumineux entre les vérités de chacun. Du Pirandello de boulevard 2000. On n’est pas sorti de la caverne !
La mise en scène de Bernard Murat à la façon d’un étourdissant slalom, exploite les mouvements de scène et les mimiques corporelles changeantes ad libitum. Body language never lies ? Le public ne s’y fie pas ! Au contraire, c’est une occasion pour lui d’observer à la loupe toutes les postures des menteurs et des menteuses ! Pleines lumières sur les ficelles utilisées et l’empreinte du faux. Mais les manipulateurs se trahissent par des lapsus, des actes manqués, des contradictions, des poses théâtrales, des intonations de bonne foi effarouchée. Et le dossier à charge se constitue… laissant la porte ouverte, pour celui qui l’écoute, à la permission de mentir à son tour! Le jeu s’emballe et se multiplie par 4 personnages, avec la répétition systématique des questions du partenaire, les généralisations de cas particuliers, la temporisation, la reprise des arguments de l’autre retournés contre lui, les doubles discours. Mais les bribes de vérité s’échappent comme d’un panier trop rempli et se fraient un passage dans les fractures - c’est le propre de la lumière - malgré tous les efforts de dissimulation. Et c’est fort plaisant, car chacun peut s’entr’apercevoir dans ce miroir éclaté. Paul n’a pas l'intention de tromper, il veut protéger ses relations avec ses amis, avec sa femme. Il appelle cela la délicatesse ! C’est vrai. Le mensonge est inexcusable, c’est vrai aussi. Les vérités factuelles peuvent avoir des causes différentes, et le réel apparaît alors différent pour tout le monde : quoi de plus vrai ?
Avec les 30 ans d’amour de Pierre Arditi et Evelyne Bouix, Josiane Stoléru, Jean-Michel Dupuis, applaudis avec fracas par le public du Centre Culturel d’Auderghem, où l’on ne trouvait, le jour de la première, plus le moindre strapontin de libre. Pendez-moi, si mon billet ment!