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suicide (5)

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Pharisiens ou patriciens ?  ... Peu de différence!

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Quand on a 18 ans, on  se sent  un héros. Aveuglé par l’amour, on ne supporte pas le monde tel qu’il est, on se révolte contre la mort, on est prêt à faire tout seul la révolution contre tous les jougs. On se sent gonflé de la puissance quasi divine, prêt  à faire tabula rasa de tout le passé, de toutes les hypocrisies de tous les mensonges et on est prêt à tous les crimes de lèse-majesté, quelle que soit la chute. On se sent libre, lucide, logique. On a des ailes. On crache sur les dieux qui autorisent la souffrance. On veut la Lune. Le rêve de l’impossible. Mais quand Caligula enclenche sa logique, c’est sa propre mort qu’il signe.

Il est jeune, il est beau, il est éphémère... comme Gérard Philippe en 1948. Il est humain, il est exalté et charismatique,  il va jusqu’au bout de la folie, comme Itsik Elbaz, en 2018. Le jeu est mené de main de maître-tailleur de pièces iconoclastes, par Georges Lini. Le spectacle?  Une machine infernale. « Il s’adressera aux gens d’aujourd’hui avec les moyens d’aujourd’hui, dans une scénographie qui sera une machine à jouer, de manière à ramener le propos de Camus à la lumière et exposer sa richesse contemporaine. « L’insécurité ! Voilà ce qui fait penser ! »  Je vais faire tomber quelques gouttes de poison dans l'intimité de chaque spectateur et faire en sorte qu'il assume entièrement ce poison.   C’est  l'expérience de la tragédie moderne, à laquelle toute l’équipe vous convie. »  La distribution de "Belle de nuit", la compagnie de Georges Lini est éblouissante. La scénographie, les costumes (Renata Gorka), résolument modernes se trouvent sous la houlette de  Patrick de Longrée. 

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 « Reconnaissons au moins que cet homme exerce une indéniable influence. Il force à penser. Il force tout le monde à penser. L'insécurité, voilà ce qui fait penser. Et c'est pourquoi tant de haines le poursuivent

La pièce s’ouvre sur le  mot « rien » (nihil). On ne peut esquiver la vérité essentielle que l’on va tous mourir. Avec la mort de sa sœur, le jeune Caligula  prend conscience de  cette finitude, de la condition mortelle de l’homme promis au néant. Les dieux sont morts. Le ciel est vide.   Crise existentielle : le bonheur est impossible quand on est conscient de cette finitude.  Dans  un accès de lucidité mélancolique, la lune devient pour lui le symbole de l’immortalité et du bonheur. « J'ai donc besoin de la lune, ou du bonheur, ou de l'immortalité, de quelque chose qui soit dément, peut-être, mais qui ne soit pas de ce monde… »  Qu’on la lui apporte ou l’on sera châtié !  Innocent condamné à mort, il se révolte. « Rien ne va plus. Honnêteté, respectabilité, qu'en dira-t-on, sagesse des nations, rien ne veut plus rien dire.»  Il se sent libre  au point de verser dans  une  paranoïa hallucinante. Ultra-moderne dérive: provocation, démesure, cruauté.    

L’œuvre contient à la fois l’impossible rêve de l’impossible, et les très réels bruits de bottes redoutés par Albert Camus lors de son écriture de la pièce en 1938. Le public à la fois spectateur et acteur parmi la foule, stupide, docile, lâche et manipulée, se cabre d’horreur devant les épouvantables meurtres en série décidés par le pouvoir absolu. La spirale de violence est alors sans fin et jusqu’à la nausée. L’image sanglante de la fin rappelle les derniers mots de George Orwell dans « Animal Farm » …en bien plus tragique encore.   

Caligula-05-DEL-Diffusion-Abbaye-Villers-la-Ville.jpg?width=430  Le choix de Georges Lini de présenter l’œuvre iconoclaste au cœur des pierres de l’Abbaye de Villers-la-Ville dans le silence des ruines n’est pas fortuit. Pour mieux prouver les silences de Dieu ? Le malaise est palpable. Pour mieux  souligner le  constat désenchanté et angoissant de l'absurde?   Pour mieux confondre le joug de la tyrannie et confondre ceux qui, de nos jours, usent et abusent, au mépris de tous les honnêtes gens? Pour stigmatiser tous azimuts le pouvoir absolu ?  L’actualité du propos fait mouche.  Le personnage de Caligula porte à la fois la semence du rêve  et sa contradiction qui  va du meurtre au suicide consenti. Certes, les patriciens sont … tout sauf des poètes. comme le chante Jacques Brel,« Ces gens-là, ne pensent pas » le poète  doit être  exécuté !  Certes, le monde a besoin de se réveiller mais, condition humaine oblige, Caligula n’échappe pas à son destin comme dans les grandes tragédies grecques. Par sa folie meurtrière il se condamne sciemment. Il sombre consciemment quand la folie du pouvoir s’empare de lui, au mépris de tout ce qui n’est pas lui. 

  Et Itsik Elbaz fait merveilles dans l’interprétation magistrale et  saisissante de dignité du  personnage de Caligula. Mais il n’y a pas que lui dans l’équipe de Belle de Nuit. France Bastoen,   fulgurante complice,  joue  Caesonia, le pôle féminin de Caligula, rôle qu’elle interprète avec passion, dévotion et  immense justesse, à la façon de l’Ismène d’Antigone, mais parée de la violence radicale de notre époque. A l’instar de Caligula elle ironise sans cesse, tout en invoquant la foi en l’amour et l’espoir de voir son amant guérir de son cynisme. Le Scipion de Damien De Dobbeleer est tout aussi juste. Bien que Caligula ait fait mourir son père, le jeune poète comprend trop bien Caligula pour le haïr et ose lui dire les choses en face. Il lui présente un miroir sans concessions. Stéphane Fenocchi en Hélicon, ancien esclave affranchi par Caligula, et son serviteur le plus dévoué est  particulièrement convainquant et splendidement campé. Il se dit ironiquement « trop intelligent pour penser »… mais vomit, comme Caligula, la lâcheté et l’hypocrisie des patriciens. Didier Colfs fait le poids en jouant Cherea, prodigieux personnage, cultivé et intelligent,  qui tutoie Caligula,  et ne désespère pas de le ramener à l’humanisme…au nom des autres et en homme soucieux de l’avenir de Rome. S’il prend la direction du complot, ce n’est pas pour venger les petites humiliations de patriciens vexés c’est pour le bien commun, en homme intègre qui refuse de rentrer dans la logique nuisible de Caligula. « Il faut que tu disparaisses. D’autres que moi me remplaceront et je ne sais pas mentir ! » :  la voix d’Albert Camus ?  Thierry Janssen se plait à interpréter un Lepidus angoissé, pathétique, plus vrai que nature. La scène du poison jouée par Jean-François Rossion en Mereia est un moment dramatique qui atteint des sommets de théâtralité et d’intensité. Tout bascule.  L’absurdité vous saisit à la gorge.  Michel Gautier et la danseuse  Hélène Perrot à la limite de la transe,  qui jouent  le couple Mucius, complètent remarquablement ce jeu de massacres, teinté en continu par  le soutien musical dynamisant ou nostalgique de François Sauveur et Pierre Constant  à la guitare électrique. A  eux seuls, un chœur antique?  

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Mise en scène : GEORGES LINI

Costumes : RENATA GORKA
Scénographie : PATRICK de LONGRÉE
Création musicale : FRANÇOIS SAUVEUR et PIERRE CONSTANT
Éclairages : CHRISTIAN STENUIT
Assistante à la mise en scène : NARGIS BENAMOR

Avec


ITSIK ELBAZ (Caligula) – FRANCE BASTOEN – DIDIER COLFS – DAMIEN DE DOBBELEER – STÉPHANE FENOCCHI – MICHEL GAUTIER – THIERRY JANSSEN – HÉLÈNE PERROT – JEAN-FRANÇOIS ROSSION – LUC VAN GRUNDERBEECK – FRANCOIS SAUVEUR

Produit par RINUS VANELSLANDER et PATRICK de LONGRÉE

ABBAYE DE VILLERS-LA-VILLE

http://www.deldiffusion.be/prochaine-production

 

Liens utiles: 

https://www.rtbf.be/info/regions/detail_un-caligula-tres-contemporain-au-coeur-des-ruines-de-villers-la-ville?id=9974555

http://www.levif.be/actualite/magazine/tous-les-chemins-menent-a-villers/article-normal-865341.html

 

 

 

 

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administrateur théâtres
Le sacre et l'éveil? Une révélation, ce spectacle ! Il est  poétique, musical et si chorégraphique! Bravo à Dominique Serron,  entourée d’un cast de  comédiens exaltants : Paul-Henry Crutzen, Abdel El Asri, Florence Guillaume, Vincent Huertas, Luc Van Grunderbeeck, Félix Vannoorenberghe, Laure Voglaire, Line Adam, Renata Gorka, Nadia Benzekri, Xavier Lauwers et toute l'équipe de L' Infini Théâtre.

« Beau comme un opéra »: c’est  la rumeur qui a circulé comme une traînée de poudre le soir de la fabuleuse première à la Comédie Claude Volter   le 18 avril 2018.   « l’Eveil du printemps »  ,une pièce de l’auteur allemand Wedekind (1881),  a été  croisée avec une mise en page émouvante d’extraits  du « Sacre du Printemps » d'Igor Stravinsky (1913). Le résultat est convaincant. Dans cette  toute nouvelle perspective,  la  mise en scène est franchement  créative et engagée. Dominique Serron évoque avec tact … infini et écoute profonde, les échos du « cimetière de la jeunesse »  de ce héros, Melchior, revenu des années plus tard,  sur les lieux du crime …collectif, n'est-ce pas?

 

  Le   métissage littéraire et musical de la « Kindertragödie » se transforme  en même temps, en  un  manifeste moderne,  qui dénonce les maltraitances rampantes que peuvent parfois infliger des  parents en mal de communication avec leurs enfants. Les raisons abondent: dans  une société brutale, formatée et imperméable aux sentiments, sont-ils victimes de leur époque? Eux-mêmes, sont-ils trop jeunes pour assumer ou répètent-ils des comportements qui ont traversé plusieurs générations sans remise en question?  Sont-ils frustrés par des peurs et des souffrances indicibles?  Enivrés de pouvoir parental? Bloqués pour mille et une autres raisons honorables - ils en ont sans doute de très bonnes - comme de ne jamais avoir lu Françoise Dolto, et  se trouvent  dans l'impossibilité chronique  de gérer les  premiers émois amoureux  de leur progéniture, ou même, de leur expliquer sereinement et ouvertement « les choses de la vie ». Mais l’époque de  l’Allemagne de Bismarck est-elle pour autant révolue? 

 

 Par souci de multiplicité esthétique, le travail de création de Dominique Serron associe  un troisième volet. Il a été  élaboré  au sein de diverses écoles bruxelloises,  par de jeunes adolescents et adolescentes. Ce sont  des capsules vidéo de lyrisme muet, réalisées in situ ou dans les environs immédiats de l’école …y compris le cimetière d’Uccle. Il suffit d'observer: chaque mouvement des personnages  filmés colle impeccablement au tempo de la musique! C’est prodigieux. Les jeunes, confrontés au texte et à la musique  sont devenus acteurs, au propre et au figuré, au lieu d’être de simples récepteurs. Bel objectif éducatif s'il en est!  Ils se sont mis à  rêver l’action, ils ont réagi avec authenticité et dansé leur ressenti  aigu et spontané face au suicide, face à la violence parentale, à la pression scolaire, à la castration du désir, à une société blessante et inhumaine. Leurs regards, leurs visages, et leurs postures sont bouillants d’interrogation et aussi d’accusation silencieuse. Chacun d'eux porte les marques  de l’intensité vibrante de leur implication dans le projet. Ces  séquences  filmées rythment le spectacle comme une respiration inédite entre chaque scène. Les chorégraphies émouvantes, nées  à la croisée de la théâtralité et de la musique,  ont l’avantage de pouvoir  faire  apprécier la contemporanéité du propos.  L’ensemble devient  un tout admirablement monté,  fruit d’un travail de création original et audacieux, dans le droit fil de  ceux auxquels  nous a habitués la pétulante et infatigable  metteuse en scène pour qui,  le travail corporel des comédiens se doit d’être  toujours avant-coureur du  verbe, ce qui donne un relief extraordinaire au propos...

 A chaque spectateur de relever des détails poignants qui le touchent personnellement… La liste sera longue. Juste quelques exemples… Le bruit des parapluies refermés avec brutalité sue le bord de la tombe, une fois les « formalités accomplies »…  Ce décor unique et polyvalent, mais essentiel : un immense comptoir bourré de tiroirs. Ceux d’une morgue ? Ceux de  notre société cloisonnée faite de trappes et de placards? Posés sur un immense buffet de cuisine,  de furtifs souvenirs de Dead Poets Society ou ceux de James Dean (A Rebel Without a Cause) ?  Cette idée effrayante que le jeune Moritz s’est tué « par amour pour ses parents »? Ce geste désespéré de mère impuissante qui donne sa médaille à son fils à défaut de pouvoir  le défendre contre un père tyrannique… Ces chaussures abandonnées que l'on ramasse, l'air de rien. L'ignoble phrase entendue: «Cet enfant n'était pas de moi! » Cette citation glaçante d'Othello: «As-tu fait ta prière, Desdémone?»  Ce sac d’où émergent des aiguilles à tricoter, qui font froid dans le dos! …Et surtout le talent fou et l'énergie débordante de toute la production!

 

Texte original : Frank WEDEKIND

Musique originale : Igor STRAVINSKY

Traduction : Jacques de DECKER

Conception, Adaptation & Mise en Scène : Dominique SERRON

Adaptation musicale & création sonore : Line ADAM

Ingénieur son : Colin BURTON

Scénographie & Costumes : Renata GORKA

Création vidéos : Nadia BENZEKRI

Création lumière : Xavier LAUWERS

Crédits photos :  Pierre Bolle

...Hélas, seulement jusqu'au 6 mai 2018, précipitez-vous pour réserver!

Du 18 avril au 6 mai à la Comédie Claude Volter. Informations et réservation: www.comedievolter.be ou 02 762 09 63

En octobre 2018 à l’Atelier Théâtre Jean Vilar  

https://artsrtlettres.ning.com/events/le-sacre-et-l-eveil

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                                               Le dictateur romain Lucio Silla chef de file des optimates, qui s'opposent aux populares de Marius, s’est octroyé tous les pouvoirs en  écartant physiquement  ses opposants. Il les a vaincus au cours de deux guerre civiles, ayant par ailleurs récolté les lauriers d’une victoire lors d’une  expédition en Grèce contre le roi Mithridate VI. La Rome antique sert d’écran sur lequel se projettent les inquiétudes politiques du XVIII siècle.  Dans l’opéra de Mozart,  Silla, interprété dans la production du théâtre de la Monnaie par le ténor Jeremy Ovenden, a tué Mario, le père de Giunia et a exilé son bien-aimé Cecilio - le castrat original de Mozart a les traits de la soprano  Anna Bonitatibus.  Sylla exige  de Giunia qu’elle l’épouse. Incarnée par la talentueuse soprano néerlandaise Lenneke Ruiten, fidèle à la scène du Théâtre de de la Monnaie, la belle Guinia est séquestrée, elle est  au désespoir et tente de mettre fin à ses jours. Elle trouve un allié en Cinna - une sulfureuse Simona Saturová,  qui s’avère être une sorte d’agent double splendidement manipulateur, masculin ? féminin ? -, qui rêve de  faire renverser le tyran. Cecilio, qu’elle croyait mort, réapparaît dès le début de l’acte I et rend à tous, l’espoir d’un renversement proche… Les complots réussiront-ils ? Action directe, soumission, ou mort consentie? Après une analyse fouillée de l’origine  du mal, à travers les états d’âme des protagonistes et  leurs rivalités sentimentales sur fond de conflit politique, la vertu sera finalement  exaltée à  la fin du troisième acte, car Silla, coup de théâtre,  surprend la scène d’adieu des deux amoureux promis à la mort et se laisse peut-être gagner par la grâce, pardonne, renonce à ses châtiments  et, magnanime, s’élève au-dessus des conflits. Brillant !  Tout comme plus tard, dans « La clémence de Titus » (1791)  

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  Puisant l’énergie créatrice dans ses tourments d’adolescent et ses démêlés avec son père omnipotent,  Mozart compose ce drame amoureux et politique à seize ans à peine. C’est son  troisième opera seria, noble et sérieux après « Mitridate, re di ponto »(1770) et « Ascanio in Alba »( 1771) au Teatro Regio Ducal de Milan. Mais la  partition où se succèdent les airs et récitatifs habituels  innove et introduit une grande richesse orchestrale, de nombreux  duos bouleversants et  ajoute l’intervention du chœur. On est devant un joyau musical …qu’il suffirait peut-être d’entendre les yeux fermés en version concertante, tant l’œuvre semble parfaite et tant  la palette et la densité des sentiments des solistes de cette splendide production est chatoyante, expressive et variée.

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Le metteur en scène allemand Tobias Kratzer a choisi un nouvel écran sur lequel projeter les inquiétudes politiques du XXIe siècle. Il a  pris  le cadre épuré d’une  villa  hors de prix. Au milieu d’une impénétrable forêt, deux étages, en forme de cube de lumière et de ciment monté sur un podium  constituent  la retraite secrète et solitaire du dictateur. Elle est gardée par des chiens loups. …Un seul, en l’occurrence et qui ne fait pas vraiment peur, mais le symbolisme est limpide.  Signé Rainer Sellmaier, le décor (contemporain) joue continuellement sur les ombres et les lumières avec de très beaux effets de stores vénitiens et de violents jeux d’écrans. Il joue sur les tombes (romantiques) dans le parc entouré de murs et d’une grille sévère,  et  joue sur de lugubres sapins (de forêt noire)  accentuant l’impression d’enfermement. La villa est truffée de micros et de caméras de surveillance dans une approche bien Orwellienne. Le dictateur, incapable de vrais sentiments ou de quelconque empathie, vit à travers son obsession des écrans. Son pouvoir sera anéanti lors qu’il cassera brutalement sa commande à distance dans un dernier mouvement de colère.  Deux personnages secondaires exposent ses choix possibles. Les pulsions de mort : c’est Aufidio (Carlo Allemano)… sorte de spectre d’un autre âge, voire un vampire ? Ou l’ami inexistant…?  Quoi qu’il en soit, il incarne l’esprit du mal. L’autre c’est la jeune sœur  du dictateur, Celia (Ilse Eerens) qui survit grâce à sa maison de poupées et est amoureuse de Cinna. Elle  exalte  les pulsions de vie, d’espoir et de paix… Mais l’atmosphère reste macabre tout de même. Les choristes balancent et rampent entre Lumpenprolétariat et  monstres d’Halloween.  Nous voilà donc dans un opéra bien  noir qui brasse vampirisme et  pulsions de monstre machiste. Il pourrait tweeter: « Celui qui ne m’aime pas mérite tous les châtiments ! » Un enfant gâté, jamais arrivé à maturité?

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La mise en scène rappelle les thrillers gothiques ou …American Psycho. On se met à rechercher un écran contre des humeurs violentes en se recentrant sur l’orchestre ou les solistes aux voix divines.  Un antidote pendant que défilent déclarations d’amour-haine, scènes de plus en plus sanglantes, scènes  de sexe ou de mort, de cruauté, de colère, d’humiliations… de suicide ou de toute puissance ? Peut-être, mu par son envie de dénoncer les maux du siècle, Thomas Kranzer en fait-il  un peu trop. Car la dérive attend le metteur en scène quand, contre toute attente, après des vidéos de viol explicite sur grand écran, la villa se fait cerner par les forces de l’ordre et attaquer comme si l’enjeu était de traquer un vulgaire terroriste… Stupéfaction des auditeurs soudainement enlisés dans l’horreur, la danse macabre ? Agressés par un éclat de rire infernal? Dommage pour ceux qui  désiraient savourer  la joie musicale qui les reliait au génial Mozart  grâce à l’incomparable complicité du chef d’orchestre Antonello Manacorda et à la beauté du pardon.    



LUCIO SILLA  de WOLFGANG AMADEUS MOZART
Direction musicale – ANTONELLO MANACORDA
Mise en scène – TOBIAS KRATZER
Décors et costumes – RAINER SELLMAIER
Éclairages – REINHARD TRAUB
Video – MANUEL BRAUN
Dramaturgie – KRYSTIAN LADA
Chef des chœurs – MARTINO FAGGIANI
 
Lucio Silla – JEREMY OVENDEN
Giunia – LENNEKE RUITEN
Cecilio – ANNA BONITATIBUS
Lucio Cinna – SIMONA ŠATUROVÁ
Celia – ILSE EERENS
Aufidio – CARLO ALLEMANO
 
ORCHESTRE SYMPHONIQUE & CHOEURS DE LA MONNAIE


NOUVELLE PRODUCTION 

Première, 29 octobre 2017 - 15:00
31 octobre - 19:00
02, 04, 07, 09 & 15 novembre - 19:00
12 novembre - 15:00

La production sera accessible intégralement et gratuitement sur Arte Concert en live le 9 novembre et en streaming du 5 au 25 décembre sur  www.lamonnaie.be
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Tragédie du choc des cultures Est-Ouest. Le choc de l’amour vrai et de l’éphémère, de l’orgueil et de l’humilité. Le choc du rêve et de la réalité. Et une sérieuse critique de la façon outrecuidante dont l’Occident traite l’Orient.

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Une toiture de pagode est posée sur le vide.  A Nagasaki, au Japon, Benjamin Franklin Pinkerton (Leonardo Caimi), jeune lieutenant de la marine  américain a recours à l’entremetteur Goro (Riccardo Botta) pour se procurer les services d’une jeune geisha de 15 ans Cio-Cio-San, alias Butterfly en anglais. Il a acheté une maison locale sur une colline. « Ce petit papillon voltige et se pose avec une telle grâce silencieuse, qu'une fureur de le poursuivre m'assaille, dussé-je lui briser les ailes ».  Son ami, le consul américain Sharpless (Aris Argiris)  l'avertit que le mariage sera pris au  très sérieux par la  jeune-fille et déplore  sa désinvoture. « Ce serait grand péché que de lui arracher les ailes et de désespérer peut-être, son cœur confiant ».   Mais l’insouciant et arrogant  Pinkerton porte déjà un toast à son vrai mariage, quand il épousera une  américaine. Les lois japonaises l'autorisent à signer un acte de mariage pour 999 ans mais  il peut le rompre chaque mois, s'il le souhaite. Dès le début, on sait que l’histoire tournera au drame.

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Arrive la jeune Cio-Cio-San,  annoncée par un chœur de joyeux gazouillis de jeunes- filles. Elle est  heureuse et amoureuse de son fiancé, entourée de parents et d'amis, soulagée de pouvoir quitter son état de geisha. Impressionnée par l’étranger, elle charme  Pinketon, qui reste cependant  insensible devant le déballage de ses innocents trésors :   de menus objets féminins et les ottokés, des statuettes symbolisant l'âme de ses ancêtres  ainsi que  le précieux  poignard avec lequel son très honorable père s'est suicidé en se faisant hara-kiri. Soumise, elle  va jusqu’à promettre d’oublier les dieux de sa famille et d’aller prier le Jésus américain. Après un simulacre de cérémonie vite expédiée, la  fête de famille est interrompue par  le terrifiant oncle Bonze (Mikhail Kolelishvili)  que l’on n’a pas invité et qui la maudit  pour avoir renié la religion de ses ancêtres.

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Pinkerton  chasse les intrus avec hauteur et enfin seuls, les deux époux chantent leur l'amour mutuel. Sombre prémonition de Cio-Cio-San:  « On m'a dit qu'au-delà des mers, s'il tombe entre les mains de l'homme, le papillon sera percé d'une épingle et fixé sur une planche ! » Fin de l’acte I.

Trois ans plus tard, Madame Butterfly, reniée par sa famille  est seule et abandonnée. La  fidèle Suzuki (Qiu Lin Zhang) prie les dieux  pour sa maîtresse qui survit grâce à une illusion : « Ô Butterfly, petite épouse, je reviendrai avec les roses à la belle saison quand le rouge-gorge fait son nid. »  Suzuki  essaie de lui ouvrit les yeux mais  elle est  persuadée que Pinkerton reviendra comme il l'a promis « Un bel di vedremo ». L’entremetteur Goro se présente avec un  riche prétendant, le prince Yamadori, aux allures de magnifique paon blanc paradant sous les lumières, mais  elle  lui répond qu'elle est déjà mariée. Le consul Sharpless, dont le rôle développe de plus en plus d’humanité,  arrive pour tenter de  lui lire lettre de rupture de Pinkerton, à laquelle dans son aveuglement, elle  refuse catégoriquement de croire. La très belle voix de baryton riche et sonore se fait de plus en plus resplendissante. Elle  lui oppose qu'elle se tuera si son mari ne revient pas tout en dévoilant qu'un enfant est né de leur union. Un formidable  coup de canon annonce l'arrivée du navire de Pinkerton. Folle de joie elle décore la maison de fleurs et revêt son habit de noces pour l’accueillir.  Suzuki et l'enfant s'endorment avec le « Coro A Bocca Chiusa ».  Elle n’a pas  fermé l’œil. A l'aube,  Suzuki la convainc de prendre du repos. C'est alors que Kate, l'épouse américaine de Pinkerton apparaît et demande à Suzuki de convaincre  sa maîtresse de lui confier cet enfant dont ils ont appris l’existence et à qui ils assureront un avenir. Suzuki est  suffoquée. Sharpless rappelle à Pinkerton ses mises en garde, mais celui-ci, ne supporte pas d’être confronté, avoue sa lâcheté et s’enfuit.  Lorsque Cio-Cio-San comprend la vérité, elle accepte, par  ultime obéissance à son « mari », de confier son enfant au couple, à condition que Pinkerton vienne le chercher lui-même ! Mais une fois seule,  ayant éloigné l’enfant, elle  se donne la mort avec le  couteau de son père.

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Voilà une histoire qui ne manque pas de nous faire réfléchir sur les relations de pouvoir entre occupant et occupé, entre prédateur et victime, entre  âge mûr et jeunesse,   entre pauvres et riches, capables de tout se procurer, quels que soient les enjeux humains. Voilà une femme abandonnée qui n’a plus de subsistance.  Voilà une fille-mère aux abois qui, plutôt que voir son enfant la regretter ou la rechercher  un jour, préfère se donner la mort! C’est d’une violence glaçante. Une histoire écrite en 1898 par un anglais, John Luther Long.  Une histoire qui n’a, en outre, pas fini d’exister deux siècles plus tard, époque où nous sommes prêts à tout vendre et à brader.

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C’est néanmoins dans l’histoire du  théâtre japonais traditionnel et les rythmes de la cérémonie du thé que la metteuse en scène danoise Kirsten Dehlholm (Hotel Pro Forma)  a choisi de nous plonger. Elle veut gommer  par ses installations scéniques toute notion de réalisme ou d’anecdote. Elle choisit d’utiliser l’histoire au profit de l’innovation d’une forme  créative  de portée universelle.  Saisissant l’occasion  que les suicidés japonais continuent à hanter la terre sous forme de fantômes condamnés à raconter sans relâche leur histoire, elle poste donc en bord de scène  une Butterfly méconnaissable sous sa perruque grise – les fantômes vieillisent-ils donc ? – mais oh combien retentissantes d’émotions depuis la naissance de l’amour, à ses élans,  jusqu’à la douleur qui conduit à la mort. Le 3 février, c’était Amanda Echalaz qui assurait ce rôle d’une  rare exigence et d’une rare beauté.  En parallèle, Kirsten Dehlholm  fait jouer  sur scène une admirable poupée de porcelaine réalisée par des artistes japonais (Ulrike Quade Company) guidée par un trio de marionnettistes d’une souplesse fabuleuse. La ressemblance est telle avec ce que l’on imagine de la jeune geisha, qu’à plusieurs reprises on la voit vivante!  Cette technique ne peut que  renforcer bien sûr le propos de Pinkerton qui  considère la jeune épousée comme un pur jouet éphémère de ses désirs. Ainsi le double portait de Butterfly volette : prisonnier de son dédoublement, prisonnier de la tradition,  prisonnier de son destin fatal, prisonnier du silence de la poupée aux gestes  parlants, prisonnier d’une douleur  rendue muette par la mort. On pense à Liu de Turandot. Le public est contraint de mélanger sans cesse les deux propositions, visuelle et auditive,  dans un effort d’accommodation comme pour mieux souligner l’absurdité  de la douleur… sauf à se laisser entièrement emporter par  la qualité extraordinaire de l’orchestration sous la baguette de Roberto Rizzi-Brignou. Et c’est ce qui arrive.

 Par son  lyrisme,  ses nuances,  la musicalité de ses timbres,  le déferlement romantique, la dramaturgie musicale est  bouleversante.   On sent poindre les harmonies chatoyantes de Debussy, on sent virevolter le papillon et les humeurs changeantes, les espoirs et les inquiétudes.  Au sein du foisonnement de couleurs orchestrales, la tension dramatique s’amplifie  jusqu'au bout, jusqu’à atteindre le cœur de la douleur.  Au cours de l’ivresse  du voyage musical, on reconnait des thèmes populaires japonais  alternés avec le début de la mélodie de l’hymne américain, le Star Spangled Banner,  de quoi  soulager un peu  de la tension des sentiments exacerbés! 

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Mais ce sont surtout les tableaux de la nature des sentiments  qui sont saisissants de beauté ou … glaçants d’effroi comme les thèmes de la malédiction, du désespoir, de la mort et du suicide. Côté décor, s’embrasent de fabuleux jeux de lumières sur les créations en origami rendues vivantes. Jamais on n’oubliera les barreaux de dentelle de la cage qui se referme sur la jeune fille.  Les personnages déambulent à petits pas, tous les gestes se fondent dans la proposition  théâtrale délibérée de lenteur extrême orientale. L’air du cerisier est suivi d’un fabuleux cortège de  fleurs d’hibiscus multicolores et lumineuses, assoiffées d’amour, une  dernière parade amoureuse extraordinaire, hélas solitaire et inutile.

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Toutefois d’autres choix de la mise en scène sont beaucoup moins enchanteurs, à chaque fois que l’esprit parodique s’en mêle. Comme de remplacer la frégate guerrière par un  bâtiment de croisière  géant, à faire frémir tout Venise.  Comme cette nuée de rouges-gorges morts dans l’explosion des canons du navire de guerre qui marque la fin des illusions de Cio-Cio-San. Comme cet enfant-roi  hypertrophié en matière plastique gonflable qui surgit, comme une aberration dans le dernier tableau. Il semble alors que la mise-en scène ait pleinement réussi  son pari d’accentuer la  grossièreté  occidentale face à la beauté d’une héroïne victime de son innocence, de sa fragilité, de sa sensibilité et de ses traditions.

Agenda:  

http://www.lamonnaie.be/fr/program/17-madama-butterfly

Direction musicale : ROBERTO RIZZI BRIGNOLI
BASSEM AKIKI (10, 12 & 14/2)

Mise en scène : KIRSTEN DEHLHOLM (HOTEL PRO FORMA)
Co-mise en scène :  JON R. SKULBERG
Collaboratrice à la mise en scène :  MARIE LAMBERT
Décors :  MAJA ZISKA
Costumes :  HENRIK VIBSKOV
Éclairages JESPER KONGSHAUG
Dramaturgie :  KRYSTIAN LADA
Collaboration à la chorégraphieKENZO KUSUDA
Collaboration pour la marionnette : ULRIKE QUADE
Chef des chœurs : MARTINO FAGGIANI

Distribution

Cio-Cio-San : ALEXIA VOULGARIDOU
AMANDA ECHALAZ (1, 3, 7, 9, 12/2)
Suzuki : NING LIANG
QIULIN ZHANG (1, 3, 7, 9, 12/2)

Kate Pinkerton : MARTA BERETTA
F. B. Pinkerton : MARCELO PUENTE
LEONARDO CAIMI (1, 3, 7, 9, 12/2)
SharplessARIS ARGIRIS
Goro : RICCARDO BOTTA
Il Principe Yamadori : ALDO HEO
Lo zio Bonzo : MIKHAIL KOLELISHVILI
Il commisario / L’ufficiale : WIARD WITHOLT
Yakuside : RENÉ LARYEA
Madre di Cio-Cio-San : BIRGITTE BØNDING
Zia di Cio-Cio-San : ROSA BRANDAO
Cugina di Cio-Cio-San : ADRIENNE VISSER
Marionnettistes : TIM HAMMER, JORIS DE JONG, RUBEN MARDULIER, SUZE VAN MILTENBURG

Orchestre symphonique et chœurs de la Monnaie

PRODUCTION : La Monnaie / De Munt
COPRODUCTION : Ulrike Quade Company

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administrateur théâtres

Après avoir dépeint le Japon dans Madame Butterfly, Giacomo Puccini met le cap sur la Chine, son dernier voyage, car il  mourra à Bruxelles,  laissant  son dernier opéra inachevé. Le compositeur parvenu au terme de sa vie déclare « Toute la musique que j’ai écrite jusqu’à présent me semble une plaisanterie en comparaison de la musique que j’écris en ce moment » Turandot a été composé entre 1921 et 1924. Toscanini en dirigea la première, en avril 1926.

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 Cet opéra est  l'un des plus  vibrants  exemples d’exotisme musical. Résolument moderne et stupéfiante, l’architecture orchestrale est particulièrement efficace  et souligne une judicieuse alternance entre l’atmosphère de conte et le drame insoutenable,  cette  marche  inexorable vers un destin fatal. Une ultime expression de souffrances  longuement tues.  Une débauche d’instruments à percussions,  une débauche de couleurs, une débauche de tableaux sonores.  Voilà ce qui nous est offert par  Paolo Arrivabeni dans la fosse  à la tête de   l’Orchestre de l’Opéra Royal de Wallonie. Les chœurs dirigés par Pierre Iodice,  sont composés de soixante chanteurs majestueusement costumés (Fernand Ruiz). Ils  sont placés de part et d’autre, dans les galeries mystérieuses qui entourent le palais de la Cité Interdite. Le luxe d’éclairages miroitants module à la perfection les mouvements sur le plateau et aux fenêtres du palais ainsi que  la débauche de sentiments exacerbés.   

  A Pékin, une princesse hautaine et cruelle, nommée Turandot,  promet d’épouser un prince qui résoudra trois énigmes. Les prétendants sont décapités s’ils échouent.

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Calaf, prince en exil rêve de reconstituer son pouvoir perdu. "Tu m’as pris mon royaume, tu nous as mis en cage mon père et moi, tu tues mon peuple, donc me voici pour te frapper en retour."  Mais il est fasciné par la princesse jusqu’au délire et veut tenter sa chance. En première partie, on la voit apparaître dans une tenue - large tunique et pantalon - d’une blancheur étincelante et glaciale. Elle est porteuse d’un sceptre qui ressemble à une faux. Comme la personnification de la mort. La mort blanche même, aussi  implacable et dévastatrice que la cocaïne ou l’héroïne. Le prince est halluciné. "Pour la dernière fois, vaincs cette fascination" supplie son père! Et les trois magnifiques mages...

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L’histoire de la femme de glace remonte à plusieurs générations. Une transmission toxique a eu lieu. Il y a des milliers d’années son aïeule a été trahie par un conquérant tartare. Après avoir mis la ville à sac, il l’emmena dans son lointain royaume  où elle mourut de chagrin. C’est pour venger cette infamie, que la princesse Turandot a imaginé l’épreuve. Elle porte avec elle le lourd fardeau d’un trauma transgénérationnel que pour rien au monde elle ne voudrait lâcher car il la protège de la capitulation face à l’homme. Et plus que tout, elle  rêve d’indépendance et craint l’amour charnel avec tout ce qu’il représente. Elle utilise le viol mythique de son aïeule pour haïr  tous les hommes…C’est un  être féroce mû par la vengeance « Je venge sur vous, cette pureté, ce cri et cette mort ! » Ironiquement,  la princesse a sauvagement  besoin de  victimes  expiatoires   pour parvenir à accepter la part féminine  d’elle-même qu’elle renie. L’interprète de Turandot est Tiziana Caruso, un rôle qu’elle maîtrise totalement.

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Le metteur en scène José Cura, incarne avec flamboyance le prince sans nom. José Cura est passé maitre à la fois dans le chant, la direction d’orchestre, la mise en scène et la scénographie.  Calaf, dont personne ne connaît l’identité, résoudra les trois énigmes mais ne veut pas forcer la glaciale beauté à qui il lance lui aussi un défi : il s’avouera vaincu et acceptera la mort si Turandot  réussit à découvrir son nom, ce dont elle ne doute nullement: elle possède toutes les armes de torture pour faire avouer le moindre de ses sujets.  Lui - péché d’orgueil ? -  ne veut recevoir la princesse que par amour. Il est sûr de sa victoire et bouillant d’impatience.  

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Une  seule personne connaît ce nom : l’esclave Liù, amoureuse de Calaf «Parce qu’un jour, dans le palais, tu m’as souri ! ».Elle est fragilité, innocence et  sincérité.  Elle se trouve dans la foule, avec son maître, un vieillard,  le roi détrôné Timur (Luca Dall’Amico), père de Calaf. Une foule bruissante comme en Chine,  qui commente, admire et  se repaît d’imprécations, comme dans la tragédie grecque.  Le  fameux air de Calaf Nessun Dorma  atteste que personne à Pékin n’est autorisé à dormir, sous peine de mort tant que le nom du prince  ne sera révélé. La tension est au maximum. Liù, la jeune esclave se sacrifie pour l’homme qu’elle aime. C’est  l’exquise Heather Engebretson,  jeune soprano américaine, diplômée de la célèbre Julliard School qui l’incarne. Liù est symbole de pureté, de bonté et de beauté morale. Archétype du sacrifice par amour. Celle par qui la malédiction familiale peut être vaincue.

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 Les magnifiques éclairages d’Olivier Wery font vivre cette cité impériale légendaire,  plantée en bord de scène,  d’enfants de notre siècle -  une quarantaine d'enfants de la Maîtrise de l'opéra-  qui construisent des maquettes, dessinent, peignent, dorment et chantent … sous le regard attendri d’un professeur-mandarin (Roger Joachim). Une façon élégante et astucieuse  de relier deux époques, de montrer que les enfants gardent cette capacité de voyager dans l’imaginaire, de  souligner  que tout ceci est un conte  mais que les contes ont toujours une morale!  La morale, c’est la jeune et bouleversante  Liù qui la détient : « Liù, bonté, pardonne et oublie ! »  Et Timur,  en habits noirs la suit dans le couloir de la mort « pour attendre à ses côtés, la nuit sans le matin. »

http://www.operaliege.be/fr/activites/turandot

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