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SPECTACLES

 Novembre 2021 : reprise au théâtre Varia d’un fracassant « Tramway nommé Désir » dirigé par Salvatore Calcagno

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L’univers de Tennessee Williams  se trouve transposé au cœur d’un été torride  dans un quartier sordide quelque part en Sicile. Oublié, le film d’ Elia Kazan  avec Marlon Brando et Vivien Leigh sorti en 1951 qui avait reçu 4 Oscars en 52 pour son propos fracassant.Le spectateur est pris ici dans un spectacle fleuve serti dans notre propre époque. Les habiles  jeux de lumière sont créés par Amélie Géhin  et les maquillages très élaborés  par Edwina Calgagno. En effet, Salvatore Calcagno conçoit la scène contemporaine comme une rencontre quasi sensuelle de différents langages artistiques.

..Cinématographique: des clips glauques  on ne peut plus chauds signés Zeno Graton, mais a-t-on, vraiment besoin de mettre les points sur les i ?  Faut-il de bout en bout diriger l’imaginaire du spectateur ?

..Musical ah! L’extraordinaire pianiste, le jeune Meraviglioso Lorenzo Bagnati qui crée  au piano un  scintillant  dialogue harmonique avec Blanche et son Gaspar de la nuit! Tout de même un peu long…

.. Chorégraphique, l’Afrique du Nord ou l’Asie Mineure  sont au rendez-vous avec la voluptueuse Rehab Mehal? Bien que de bon ton, dans notre société multiculturelle actuelle, est-ce fidèle  au propos de Tennessee Williams où la fracture socio-culturelle est infranchissable ? Et enfin ..Plastique, ah!  Bastien Poncelet, ce  merveilleux danseur éphèbe  énigmatique et  fascinant. C’est le seul vrai  pôle  de plaisir de ce spectacle multiforme.  

 

 

 On peut imaginer sans mal  la  superbe résidence symbolique de la famille ruinée, parée de hautes colonnes : “Belle Reve” est le nom de l’ancienne demeure où Stella (Marie Bos) et Blanche (Sophia Leboutte) ont grandi dans une splendeur fanée. Un « bon temps enfui à jamais  »  mais très  destructeur  car il empêche Blanche d’affronter toute réalité nouvelle.  Alors  que Blanche   a découvert avec stupeur les relations homosexuelles de son mari, qui s’est ensuite  suicidé,  Stella, sa jeune sœur rebelle  et irresponsable, selon elle,  a fui les lieux avec un amoureux bien en dessous de sa condition sociale. … Toutes choses qui remontent tout de même ?  à une époque assez révolue.  

 

Les mensonges, l’alcool, le sexe et la fumée serviront d’écran  à cette Blanche complètement déboussolée. Néanmoins dans l’interprétation, le rapport entre les deux sœurs ressemble plus  à celui d’un rapport  dominant  et violent mère-fille. C’est dérangeant. Que dirait Tennessee Williams ?

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Ironiquement, l’appartement minable de Stanley et Stella où accoste Blanche, se compose d’une  vague cuisine, d’une chambre et d’une salle de bains sommaire. On n’avait que faire des parties vidéos pour illustrer la misère ambiante. Des fausses perles comme cloisons. C’est tout sauf un paradis. C’est le  lieu terrible  où, une à une, toutes les  affabulations   de Blanche fondront dans une atmosphère suffocante de violence.

 

À la fin, la Stella  décharnée par la pauvreté  ne sera  plus cette jeune femme amoureuse de son mari « parfait » nommé Stanley. Lucas Meister, très physique, est un beau gosse qui bouge comme  un moniteur de Club Med. Craquant physiquement peut-être,  mais entier et immuable dans ses jugements. On peut dire qu’il reste d’un bout à l’autre du spectacle  le même jeune prolétaire arrogant et buté qu’il était au début.  Il  reste bloqué, humilié et  outré par la discrimination et le mépris que lui impose Blanche. Exaspérée par son machisme et son manque d’éducation, elle le traite de Pollack, terme  hautement dénigrant. Campant sur ses positions, il est incapable d’identifier ses propres lacunes et  n’est prêt en rien à changer quoi que ce soit  pour sa femme et son enfant à naître.  Il a une  nature  vulgaire et phallocratique, mise en lumière par les jeux de poker bien arrosés avec ses amis. On retrouve  Tibo Vandeborre dans le rôle ténébreux de Mitch.

 Le contraste  est flagrant   si on le compare avec  l’évolution psychologique et dramatique  des deux sœurs. Si Stella avait accueilli sa sœur dans son foyer au début  avec la plus grande bienveillance, elle  ne peut pas croire que Stanley  se soit rué sur Blanche pour en abuser. Elle la croit définitivement démente  et laisse les médecins emporter sa sœur ravagée par l’alcool et les désillusions vers l’hôpital psychiatrique. Ceci nous ramène bien sûr  à une image du profond malaise et  à l’isolement dont souffrait Tennessee Williams, vivant difficilement son homosexualité dans un  contexte d’exclusion toxique à l’époque.

 

Blanche, telle une star déchue omniprésente et intense,  n’est plus qu’une ruine. La femme coquette qui n’a jamais été désirée par son mari - c’est bien  là le drame -  a tout perdu et s’est  jetée à corps perdu  dans la promiscuité pour rassasier sa  faim désespérée d’amour et d’argent. Pathétique et plus démunie que tout, elle brandit désespérément  son dernier  rêve puéril de rejoindre un hypothétique “beau” qui refera d’elle une princesse. Hélas,  c’est le superbe porteur de fleurs androgyne (Bastien Poncelet)  qui annoncera la victoire de la Mort sur le Désir : l’emblème de sa Vie.

 

Dominique-Hélène Lemaire

Un tramway nommé Désir

Tennessee Williams

Traduction inédite Isabelle Famchon
Direction artistique et mise en scène Salvatore Calcagno
Avec Lorenzo Bagnati, Marie Bos, Salvatore Calcagno, Sophia Leboutte, Réhab Mehal, Lucas Meister, Pablo-Antoine Neufmars, Bastien Poncelet, Tibo Vandenborre

 

Créé  originellement au Théâtre de Liège

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Les parfums de fleurs de couteau. Rite funéraire. Sous le chapiteau,  toute la Méditerranée en pleurs. Mantilles noires,  mains jointes, les visages chantent un Kyrie Eleison bouleversant. Lux perpetua luceat eis. Pour qui ?  On entoure la veuve.  Le fils voudrait que la mère lui rende son couteau. Tout est là : le désir, la terre et le sang. On plonge d’un coup dans l’univers de Garcia Lorca. Derrière les bribes de mélopée  qui vous prennent  au ventre, surgit le fil rouge,  l’instituteur rouge et libre penseur, ami du poète qui égrènera  son hommage tout au long du spectacle. Cela aussi c’est un rite funéraire.

Le décor est fait d’une roulotte, un fois le voile noir levé,  d’un plateau circulaire de bois blond sur lequel les chaises s’envolent comme des brassées de feuilles mortes.   Décidément, Dominique Serron adore cela! C’est beau, on attend le développement. C’est alors que l’on est pris  par la  bourrasque théâtrale. Le parcours  prend le rythme d’une  traque. Le spectateur s’accroche aux racines pour ne pas tomber.  Il est hors d’haleine, il vient de comprendre que trois histoires  différentes s’entremêlent comme des battements de cœur régulier, pour souligner les thèmes favoris du poète espagnol. C’est ingénieux, parfois dur à suivre, mais tellement palpitant. Il va de soi que les dix-sept  comédiens -danseurs,-chanteurs  changent de peau et d’histoire à chaque tournant… L’inventive Dominique Serron à la mise en scène s’amuse et se repaît des apparences, des visions fugaces, fouaillant toujours  pour atteindre le drame pur. Les yeux des spectateurs sont éblouis par les scènes de village, les chiens, la pleine lune,les malédictions,  la discussion des brodeuses, le deuil omniprésent, le rêve de vie encore plus tenace, la campagne crucifiée par la sécheresse, les préparatifs de noces, le rapport fétide filles-mère, les personnages déchaînés,  la folie, le mal, les danses, les ensembles vocaux. Le corps à corps des amants  ennemis, un paroxysme de tension dramatique,  est un sommet de la  mise en scène. Béjart en aurait fait tout un spectacle.

 Cette trilogie rurale de Lorca qui regorge de mauvais présages: « Les noces de sang », « La maison de Bernarda Alba » et « Yerma » se trouve  ainsi déclinée en musiques chorales, danses et textes  si brûlants de non-dits palpables qu'ils  émeuvent au plus  intime. Cette trilogie  devient une bacchanale envoûtante. Utile de souligner  combien Garcia Lorca  a été  un poète  de la libération féminine, lui qui est tombé sous les balles des phalangistes, quelques mois après l’écriture de ces  trois chef d’œuvres qui dépeignent  l’âme féminine et l’Andalousie profonde. 

Chapiteau Des Baladins du Miroir
Boulevard Baudouin Ier
1340 Louvain-La-Neuve
Téléphone :
0800/25 325 - Réservation préférable
Tarif :
10 à 22€
Public :
à partir de 12 ans
Internet :
https://atjv.be/Desir-Terre-et-Sang

D’après l'œuvre de Federico Garcia Lorca - Adaptation et mise en scène : Dominique Serron - Avec (en alternance) : Irène Berruyer / Léonard Berthet-Rivière / Andréas Christou / Stéphanie Coppé / Elfée Dursen / Monique Gelders / Aurélie Goudaer / Florence Guillaume / François Houart / Geneviève Knoops / Sophie Lajoie / Léa Le Fell / Gaspar Leclère / Diego Lopez Saez / David Matarasso / Virginie Pierre / Géraldine Schalenborgh / Léopold Terlinden / Juliette Tracewski / Julien Vanbreuseghem / Coline Zimmer (Sous réserve de modification. Voir www.atjv.be

Du 19 septembre au 1er octobre 2019

 

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SPECTACLES

Un fracassant « tramway nommé Désir » à l'Atelier Jean Vilar


Ah! Les beaux jours? …Par Tennessee Williams.

Presque un spectacle fleuve que le metteur en scène, Salvatore Calcagno, transpose au cœur d’un été torride en Sicile. Le spectateur est pris dans un filet de résonances étonnantes qui ne cessent de se croiser. Salvatore Calcagno conçoit la scène contemporaine comme une rencontre quasi sensuelle de différents langages artistiques : musical d’abord, ah! L’extraordinaire pianiste, le jeune Meraviglioso Lorenzo Bagnati qui crée un mystérieux   dialogue harmonique avec Blanche et son Gaspar de la nuit! Plastique, ah!  Bastien Poncelet, ce danseur éphèbe  énigmatique et  fascinant. Cinématographique: des clips on ne peut plus chauds signés Zeno Graton. Enfin chorégraphique, l’Afrique du Nord ou l’Asie Mineure au rendez-vous avec la voluptueuse Rehab Mehal? Ajoutez à cela les jeux de lumière d’Amélie Géhin  et les maquillages très élaborés d’Edwina Calgagno… Ce qui est sûr c’est que le  metteur en scène décidément très créatif  serre  néanmoins au plus près le contexte américain qui a finalement très peu changé, où l’origine socio-économique ou géographique peut conditionner le destin de façon déterminante.

Résidence symbolique, parée de hautes colonnes, “Belle Reve” est le nom de l’ancienne plantation où Stella (Marie Bos) et Blanche (Sophia Leboutte) ont grandi dans la splendeur fanée après la guerre de Sécession. Un « bon temps » destructeur qui empêche Blanche d’affronter toute réalité. L’alcool, le sexe et la fumée lui servent d’écran. Les mensonges aussi.


À la fin poignante d’ « Un tramway nommé Désir » Blanche, telle une star omniprésente et intense,  n’est plus la femme coquette qui a tout perdu et s’est vue forcée de se jeter dans la promiscuité pour rassasier sa quête désespérée d’amour et d’argent. Pathétique et plus démunie que tout, elle brandit désespérément  son dernier  rêve puéril de rejoindre un hypothétique “beau” qui refera d’elle une princesse. Hélas, le superbe porteur de fleurs androgyne (Bastien Poncelet) annoncera la victoire de la Mort sur l’emblème de sa Vie, le tramway fracassant du Désir.


Ironiquement, l’appartement minable de Stanley et Stella où accoste Blanche à La Nouvelle Orléans, se compose d’une cuisine, d’une chambre et d’une salle de bains. Des fausses perles comme cloisons. C’est tout sauf un paradis, un lieu où, une à une, toutes les illusions  de Blanche fondront dans une atmosphère suffocante malgré le nom prestigieux et symbolique de l’adresse : “Elysium Fields”.

À la fin, Stella ne sera  plus la jeune femme amoureuse de son mari “parfait”. Stanley. Lucas Meister, très physique, est un beau gosse qui bouge comme un mannequin. Craquant physiquement, mais entier et immuable dans ses jugements. On peut dire qu’il reste le même jeune prolétaire arrogant et buté qu’il était au début. D’un bout à l’autre, il reste bloqué, humilié et  outré par la discrimination et le mépris que lui impose Blanche. Exaspérée par son machisme et son manque d’éducation, elle le traite de Pollack, terme  hautement dénigrant. Campant sur ses positions, il est incapable d’identifier ses propres lacunes et à les changer pour sa femme et son enfant. Sa nature statique et phallocratique est mise en lumière par les jeux de poker bien arrosés avec ses amis qui soulignent  par contraste l’évolution psychologique et dramatique de Stella et de Blanche. On retrouve  Tibo Vandeborre dans le rôle ténébreux de Mitch.

Stella qui au début avait accueilli sa sœur dans son foyer avec la plus grande bienveillance ne peut pas croire que Stanley ait finalement abusé de Blanche et laisse les médecins emporter sa sœur ravagée par l’alcool et les désillusions vers l’hôpital psychiatrique. Ceci nous ramène à une image du profond malaise et de l’isolement dont souffrait Tennessee Williams, vivant difficilement son homosexualité dans le contexte d’exclusion toxique de l’époque.

Dominique-Hélène Lemaire  

Un tramway nommé Désir

Tennessee Williams

Traduction inédite Isabelle Famchon
Direction artistique et mise en scène Salvatore Calcagno
Avec Lorenzo Bagnati, Marie Bos, Salvatore Calcagno, Sophia Leboutte, Réhab Mehal, Lucas Meister, Pablo-Antoine Neufmars, Bastien Poncelet, Tibo Vandenborre

Créé au Théâtre de Liège

Lieux et dates :

Du 28 Janvier au 1er Février Jean Vilar à Louvain-la-Neuve
11 au 13 Mars à Mons
15 Février Marche-en-Famenne
21 au 30 Avril Théâtre Varia à Bruxelles
5 au 9 Mai Théâtre de Namur

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Musica vita est … La raison des sortilèges musicaux

– Causerie musicale –

Avec Jean-Yves Clément entretenant brillamment l’entretien, voici le duo improbable de Michel Onfray le Normand et la vierviétoise Eliane Reyes, pianiste émérite, nommée récemment chevalier de l’Ordre des Arts et de Lettres en pays de douce France. Mais  le lieu, dites-vous ?  Cela se passait au cœur d’une abbaye,  une des plus anciennes fondations monastiques de Belgique qui abrite le Musée Guillaume Apollinaire : Labbaye de Stavelot qui date du VIIe siècle.

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 La causerie  émaillée de moments musicaux intenses sous les doigts de la fée Eliane a lieu dans le réfectoire des moines , dans une atmosphère d’abbaye de Thélème. Michel Onfray, fondateur de l’Université Populaire  rêve d’une une communauté philosophique construite sur l’amitié et dans laquelle les adhérents s’engagent à construire leur existence comme une œuvre d’art…


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Pour Michel Onfray, la Musique commence à émouvoir le futur enfant, dès la vie intra-utérine. Il évoque les bruits organisés ou non, «  engrammés »  dans le système nerveux de l’enfant, dont il restera à l’évidence nombre de traces mémorielles… La musique naît donc avec la vie. La nature est le monde sonore par excellence et J.S. Bach, plus que tout autre compositeur, a su, dans sa musique superbement  organisée, capter la vibration du cosmos. Donner une sorte de cartographie du ciel. On comprend que Michel Onfray, bien que se réclamant de l’athéisme, ne rejette pas la transcendance. Il parle de l’immanence de la musique où se mêlent étroitement le matériel et l’immatériel pour créer une sculpture artistique du Monde sonore. Il souligne aussi l’inévitable interaction des pulsions physiologiques qui scandent l’écriture musicale du compositeur et qui influent forcément sur l’état physiologique de l’auditeur. Il y a le savoir-faire de l’interprète qui, ce soir d’exception, a joué « Jesu bleibet meine Freude » de façon bouleversante. Le tempérament d’Eliane Reyes, revisite le célèbre morceau de Bach dans une interprétation veloutée, voluptueuse, sensuelle, comme  vivifiée  par le romantisme, et la féminité.  Son  jeu nous revient au visage, comme une signature musicale. Musica vita est.

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Il apparaît que plus on se met à l’écoute du monde avec bienveillance, plus on le questionne, plus on devient philosophe. Plus on se nourrit de musique. Ah le mythe d’Orphée et le lien de Platon avec la musique! Ce qui est sûr c’est que la musique ne fait pas bon ménage avec le Diable. Entendez par là, la soif de pouvoir, le rêve de puissance, l’orgueil, la jalousie, la cupidité. Dans la valse de Chopin interprétée ensuite par Eliane, Michel Onfray a entrevu, une sorte de moment de suspension, « une levée»,  précise Eliane, qui préside à l’intuition philosophique. Ici, on peut entendre la vivante hypothèse   de « l’éternel retour »  point commun entre Nietzsche et le bouddhisme. « Une invagination du temps ».

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Michel Onfray se réfère au philosophe Schopenhauer pour qui « La musique traduit, dans sa libre explosion du sein de la conscience humaine, tous les mouvements du vouloir vivre qui anime l’univers. Elle est la langue universelle, aussi claire que l’intuition elle-même ; et pourtant, grâce à ce qu’elle touche de si près à l’essence des choses, elle a en elle on ne sait quoi d’ineffable et de mystérieux. « Elle passe à côté de nous comme un paradis familier, quoique éternellement lointain, à la fois parfaitement intelligible et tout à fait inexplicable, parce qu’elle nous révèle tous les mouvements les plus intimes de notre être, mais dépouillés de la réalité qui les déforme » (Le monde comme volonté et comme représentation, Livre III, §52) »

On écoutera ensuite la transcription  de « La mort d’Isolde » de Wagner  par Liszt, les yeux absolument fermés. Les trémolos de douleur sont soulignés par des accords légers des arpèges qui ressuscitent la vie. On sent son cœur battre plus fort dans le crescendo des sonorités qui  semble étreindre un inaccessible infini. Du désespoir sans fond, émerge le souffle lumineux.


Le chapitre suivant traite du romantisme, où la petitesse de l’homme disparaît dans le spectacle sublime de la nature, et s’éteint face à la toute-puissance de la Mort. Mais voici « le Dieu fluvial riant de l’eau qui le chatouille  » dans les Jeux d’eau de Ravel. Eliane Reyes envoie dans son interprétation de Ravel une musique apollinienne, hédoniste, composée de salves de scintillements sonores dans un temps suspendu. Pour Onfray, L’embarquement pour Cythère de Debussy doit verser dans le cérébral, l’abstraction, l’éthéré… Oh que non se rebiffe la pianiste ! Eliane propose pour l’île joyeuse, un jeu sensuel, dionysiaque, liquide, concret où naissent les morsures du désir, les plages inaccessibles, les criques secrètes du plaisir pour le yin et la souffrance, résilience, et danse de feu pour le yang. Eliane Reyes has it all. Le dandy Onfray, a théorisé – avec l’humour qu’on lui connait -, la musicienne Eliane a joué. Le public s’est exalté. La soirée est inoubliable et signe la foi du philosophe en la bienveillance universelle et la musique qui l’accompagne. Après la belle interprétation du bis, la gymnopédie de Satie, aux couleurs de l’été indien enveloppé d’un sourire de madone, on remercie l’organisateur de la rencontre, Virgile Gauthier.

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Dominique-Hélène Lemaire, pour Arts et Lettres

Michel Onfray à l’Abbaye de Stavelot – le vendredi 13 septembre 2019 à 20h

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Jeanne avec Nicole Croisille au Centre Culturel d’Auderghem

Solitude, cynisme,  paranoïa, tendresse quand même…

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Jeanne : un rôle de femme qui n’a pas peur de dire ce qu’elle pense ! Marin : un rôle de jeune-homme mal dans sa peau, déconnecté de tout, au bord de la faillite relationnelle, mais  mû par la force de la vie. Craquant comme un bouton d’or au printemps. L’or de scène où coule une énergie de Don Quichotte qui va à l’encontre de la violence sociale qui enferme les aînés dans des prisons de silence et de désintérêt général. L’or de l’espoir qui se mêle de changer quelque chose  au désert d’une vie  bas de gamme. L’or  de la patience à l’épreuve d’une femme de fer qui tantôt vitupère tantôt crie au loup et hallucine. …Sa tanière est pourtant protégée d’une série impressionnante de verrous.  La « vioque » comme elle se nomme sans détours, vit dans une tour au 23e étage, cernée  par  l’infini du ciel et de ses nuages libres et gracieux, où elle espérait rêver le bonheur. Elle  ne sort à peu près plus, passant  ses heures à découper en bandelettes des magazines publicitaires, travail de souris qui détricote  une vie. Une vie de secrétaire exemplaire, objet de désir et de luxure  pour un  patron sans amour. Une femme  atteinte d’une maladie rare incidemment jetée  de la société où elle a passé toute sa vie. Un baiser perfide  sur la joue, une coupe de mousseux et des pistaches qu’elle déteste comme A Dieu.

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La rencontre improbable avec le jeune homme s’est faite  à l’occasion d’une action électorale de la mairie, qui  s’est mise à proposer divers services sociaux  aux démunis de l’arrondissement,   visées électorales  très peu dissimulées à la clef. Le personnage stéréotypé de l’assistante sociale (Florence Muller) est conçu pour provoquer le rire. On rit moyennement. D’un rire un peu jaune, un peu délavé. Trop de répétitions. L’auteur veut ratisser trop  large.

La mission du jeune homme providentiel est de  porter des repas aux vieux du quartier. Pour Marin, c’est l’occasion de tisser de chaque côté du plateau une relation d’intimité. Une première dans sa vie de nul,  transparente et fade.  Voilà une Jeanne qui se livre comme jamais elle ne l’avait fait et  le livreur de repas  se rassasie enfin de confidences vraies, pour la première fois de sa vie, découvrant  avec émerveillement le cheminement du bonheur et de l’échange. C’est le plus beau de l’histoire. Prendre un râteau pour déblayer une fin …de plus en plus noire, mais apprécier pleinement la chute inattendue.

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Nicole Croisille est loin de sa chanson… « Parlez-moi de lui » ! En jupe plissée écossaise, elle rentre ici dans le type grinçant des octogénaires d’Agatha Christie et s’en  trouve fort bien : Tatie Danielle, en moins coriace, en plus friable. Mais le jeune homme? Le charismatique Charles Templon, bourré d’humour, sterling gold?   Il  incarne  un personnage immaculé et succulent, pétri de bienveillance, d’écoute de l’autre, de respect, d’empathie et de joyeuse humeur, à l’opposé de la dame 100% caractérielle, perverse et manipulatrice qui hante les lieux.  » Pourquoi vous vivez seule d’ailleurs ? » la question cruciale. Adroite mise en scène de Jean-Luc Revol du texte  Jean Robert Charrier dans des décors de Sophie Jacobs et des costumes de Michel Dussarat. Aux lumières, François Menou et à la sono, Bernard Valéry pour alterner réalité et passages des songes à travers le miroir de l’âme.  

Dominique-Hélène Lemaire

JEANNE


Du mardi 12 au samedi 16 mars
 2019 à 20h30 et le dimanche 17 mars 2019 à 15h

Une pièce de Jean Robert-Charrier
Mise en scène : Jean-Luc Revol
Avec : Nicole Croisille, Charles Templon, Florence Muller, Geoffrey Palisse
Décors : Sophie Jacob
Costume(s) : Michel Dussarrat
Lumières : François Menou
Musique : Bernard Valéry
Durée : 1h40

 http://ccauderghem.be/index.php?mact=Agenda,cntnt01,DetailEvent,0&cntnt01id_event=229&cntnt01returnid=65

Réservation par téléphone : lundi, mercredi, jeudi et vendredi de 11h à 17h, le mardi de 11h à 15h et le samedi de 10h à 14h. 02/ 660 03 03

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Image may contain: one or more people and people standingLes femmes savantes au théâtre des Martyrs (Bruxelles)

Un délire organisé qui fait du bien!

De tous les Trissotins que nous ayons pu voir il est de loin le meilleur. Le plus manipulateur. Grand mince et ténébreux, sans la moindre trace de perruque ou de ruban, les tics de richesse tant appréciés du temps de Molière, il se présente avec l’habit de …Baudelaire? Sans en posséder le moindre tissu poétique. Mais ces dames sont sous le charme et frémissent de tout leur être devant le trompe l’œil et le trompe les coeurs, qui n’en veut qu’à la fortune familiale! Ah le triste suborneur! Il faut nommer Stéphane Ledune pour une interprétation réellement glaçante.

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Le dieu des dames femmes sachant « manier les symboles et les signes » s’appelle Vaugelas. L’illustre grammairien. Ces femmes avides de pureté janséniste, frétillent à la moindre rime, conspuent les syllabes ordurières, picorent les insanités, se repaissent de verbosité. Elles s’apprêtent au coup de foudre pour le Grec ancien (Maxime Anselin) , non contentes du galimatias latin. Gavées de formules scientifiques, elles font fi des valeurs pourvu que, dames intensément frivoles, elles soient sujettes aux honneurs des savants esprits.

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Peste soit l’animal, le mari qui n’a rien à dire, perd sa seule alliée des bonheurs terrestres, la très avantageuse Sylvie Perederejew jouant Martine que l’on met honteusement à la porte pour simple crime linguistique. A Dieu le parler vrai, la bonne chère, les petits plats dans le four et la grande joie de vivre. Heureusement que le pater familias dont il ne porte guère que le nom, a un compère à ses côtés, le plus exquis des frères, Ariste ( un très aimable et aristocratique Laurent Tisseyre) qui l’écoute et qui, par son habileté et sa belle intelligence, le tirera de son infaillible trépas!

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Mais le colloque féminin serait bien fade sans la présence fulgurante d’une véritable sexbomb nommée Bélise (l’explosive France Bastoen) dont les émois à répétition feraient réveiller les morts. Et puis il y a la guerre entre les deux sœurs, jalouses de toute évidence! La grande, c’est Armande (Lara Ceulemans ), en col Claudine et robe religieuse bleu Marine, fort courte ma foi, autant que les idées, mais baignée dans une chevelure à faire baver les vieillards en quête de Suzanne. Et la sœurette, Henriette (Salomé Crickx), des airs de révolutionnaire qui refuse l’ascendant maternel, une mystérieuse fille de l’air, qui, blême de confusion, préférerait être muette que de braver les confrontations. Notons que le discours acéré lui vient, comme l’esprit vient au filles, au fur et à mesure que l’intrigue avance et que l’amour grandissant qu’elle éprouve pour Clitandre fait le jour … et sans doute la nuit. Ce dernier se voit bien sûr honni par la très féministe académie domestique doublée d’un impitoyable tribunal .

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On en vient donc à nos deux préférés : Clitandre (Dominique Rongvaux) , le futur beau-fils qui, très loin de se laisser faire, vient bravement se mêler au public dans la salle. Et son nouveau père, le très épicurien Benoît Van Dorslaer qui tout au long de la pièce, doit opérer la difficile conversion du mari terrorisé par sa femme, vers une condition d’homme libre, heureux de vivre. Mais qu’il est donc difficile de franchir cette porte qui l’anéantit! L’ état à atteindre, c’est l’idéal d’honnête homme, bien-sûr! Toutes le pièces de Molière en témoignent. Avouez que cet homme aurait dû être canonisé au lieu d’être jeté à la fosse commune. Comme le public se régale!

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Le metteur en scène qui œuvre au mandala de personnages a un sens de l’équilibre parfait. Chaque pierre ajoutée à l’ouvrage a du sens et du poids. Toutes les forces se rencontrent et se tiennent comme pour encourager un écho durable chez le spectateur. L’absence de décor conventionnel d’une vraie maisonnée souligne combien le décor est futile dans nos vies. Le metteur en scène s’inspire du principe de frugalité shakespearien au profit d’un travail magistral sur l’analyse psychologique, fouillée au maximum. Comme pour un hui-clos moderne, voilà un mur. En panneaux de contreplaqué, de couleur brute, le bruit de la craie blanche pour écrire, une porte de vielle salle de bain percée de trois carreaux absents, ouverts sur le néant et deux chaises de bois peintes en blanc. Une perspective plate en deux dimensions, sol et mur. C’est Tout. Il faut nommer le roi de la fête du rire délectable: Frédéric Dussenne.

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Au fur et à mesure que les actes se déroulent, le décor se ressert, un plafond de même texture vient même s’emboîter, la troisième dimension? La part manquante? Enlevé c’est pesé, a-t-on jamais vu une interprétation de Molière plus éternelle que celle-là? L’éphémère est devenu visionnaire. Le féminisme pourtant balbutiant chez les femmes de Molière y trouve son compte et le pauvre mari que l’on prend en pitié est bien ridicule quand-même dans sa tirade de la place de la femme à la maison! C’est tout l’art de dire, de suggérer, de sub-liminer.

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Quel dépouillement, ce lit de fer blanc, seul nouveau meuble habillant le plateau après l’entracte. Il évoque tout à la fois la lointaine ruelle dans laquelle les femmes de lettres accueillaient les courtisans dans leurs salons, mais aussi le harcèlement pathétique dont fait preuve un Trissotin digne d’ enfermement. Il n’a finalement rien pour lui, comme le souligne très bien Hélène Theunissen (Philinthe). Il peut à peine à se maîtriser devant une Henriette plus qu’inquiète devant ses assauts répétés. Trissotin, la pierre qui blesse ? On la jette dans la rivière et on garde tout le mandala dont chaque élément a une saveur policée par les vents de l’esprit et du cœur. Et vive Madeleine de Scudéry! Et la langue de Molière, dis ? La langue? Comme la fleur, il nous l’a donnée! (d’après …France Gall!)

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Dominique-Hélène Lemaire

GÉNÉRIQUE DU SPECTACLE
TEXTE Molière
JEU Maxime Anselin, France Bastoen, Lara Ceulemans, Salomé Crickx, Stéphane Ledune, Sylvie Perederejew, Dominique Rongvaux, Hélène Theunissen, Laurent Tisseyre, Benoît Van Dorslaer
DÉCOR Vincent Bresmal
COSTUMES Romain Delhoux
LUMIÈRES Renaud Ceulemans
RÉGIE Christophe Deprez
MISE EN SCÈNE Frédéric Dussenne

Ridicules, ces femmes savantes ? « Je prends au contraire au sérieux le débat philosophique qui les agite » « L’enjeu, pour Philaminte, Armande et Bélise, est d’importance, car il ne s’agit pas moins que du statut des femmes dans une société patriarcale, et leurs propos ne sont pas dépourvus de sens.»  F.D.

COPRODUCTION Théâtre en Liberté, L’acteur et l’ecrit – Compagnie Frédéric Dussenne, LA SERVANTE, Théâtre des Martyrs 
Photos : Isabelle De Beir

DATES
Les représentations auront lieu du 15 au 26 janvier 2019.
Les mardis et samedis à 19h00, les mercredis, jeudis et vendredis à 20h15, le dimanche 20.01 à 15h00.
Bord de scène mardi 15.01.

INFOS & RÉSERVATIONS
02 223 32 08 – http://theatre-martyrs.be/

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administrateur théâtres

« L’Ecume des jours » de Boris Vian à l’AT-JV. Vous y allez aussi?

Chick, Chloé et Colin. Une guitare électrique emmanchée d’un jeune homme de haute stature, le sourire  éblouissant adorable d’une jolie fille à  la chevelure blonde ondulée,  aussi menue qu’une souris aux côtés de son compagnon  à  la barbe noire, Colin, et  …un trou de souris, bien plus grand que nature dans la tapisserie du temps retrouvé, servent de piliers à la  nouvelle adaptation théâtrale de « L’Ecume des jours » de Boris Vian.

 Humour féroce, empire des extases de l’amour,  poésie fantastique, musique du grand Duke, divers fracas du monde, déferlent aussitôt sur des planches brûlantes d’invention. L’inspiration Jazz est omniprésente,  la gestuelle et le parler francophone 2021 s’infiltre innocemment  dans  la mise en scène absolument magique  de Sandrine Molaro et de  Gilles-Vincent Kapps pour le Théâtre de la Huchette à Paris et sans nul doute, nous en faisons vœux, une longue tournée, débutée en Belgique  à l’Atelier Jean Vilar.

Le texte de Boris Vian est scandé pour la scène par Paul Emond, grand maître  en  adaptations théâtrales, et soigneusement pollinisé. Sa note d’intention est bruissante d’intentions artistiques tout aussi  inspirées   que réussies.  Son texte étincelant est d’un rythme et d’une musicalité intenses. Le pianotail révèle ses moindres saveurs, la danse du biglemoi fait surgir le désir,  l’appartement des lumières s’obscurcit à force de nénu-phares plus noirs que la mort. Et tombe la neige et ses cristaux immaculés sucés sur la langue. La langue de Boris Vian, bien sûr. Elle fouette, elle secoue, elle attache et s’excuse tendrement. Le chat se plie avec bienveillance  aux dernières volontés de la fidèle souris!     

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Parlons aussi de l’immense trou de souris. Il est peut-être un souvenir de tableau de Magritte, ou le trou à raclures de la patinoire  (pas  celles de taille-crayon), ou le lit conjugal des ébats amoureux de Colin et Chloé, ou, la forme du nénuphar dév-horreur. Ou un  simple trou de serrure pour la clef des rêves…  

Prenons ensuite  les trois comédiens changeant sans cesse de cape et de personnages d’hiver ou d’été (à  cause des Noces, bien sûr ! ). Ils sont enivrants.  …C’est eux qui nous promènent avec goût sur les sentiers de l’imaginaire dans une incomparable habileté scénique. Ils se distribuent les rôles comme des enfants dans un jeu de récréation. Selon le principe d’ « incarnation et de désincarnation permanent qui permet un mouvement permanent du dialogue à la narration et donne au spectacle»  …un  incontestable cachet  poétique «  dans un va-et-vient  entre répliques, énoncé, musique et chant ».

Dans la neige scintillante de ce spectacle,  au travers  du rêve  teinté des nuages roses du texte  et de soleil couchant embaumé de parfums délicats,  il reste deux traces parallèles et dévorantes. On est frappé par le parallélisme entre l’addiction de Chick à Jean-Paul Sartre dont on entend parfois bourdonner le débit atrocement sérieux, et la mort grandissante fermement installée dans les poumons de Chloé. Un crescendo de douleur. 

  Maxime Boutéraon,  principalement  personnage de Colin, est bouleversant.  Antoine Paulin,  un Chick magnifique, et splendide dans tous ses rôles, de Nicolas le majordome, à Jésus Christ compatissant et silencieux.  Et Florence  Fauquet? Une diction exquise et un bouquet de jeunesses  piaffantes et belles, des roses vivant simplement  le bonheur d’exister. Beautiful people. 

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Le spectacle se ressent comme un bienfaisant bain de sensations de jouvence. Il se déguste en mode « carpe diem »  avec délectation, tant et si bien, qu’à peine terminé, on le reverrait bien en boucle  continue, pour le charme, l’émotion, l’euphorie, et malgré la tragédie. Car c’est justement le côté artistique intense, côté cinq étoiles d’ailleurs,  qui fait mouche et  réjouit tant le cœur, et l’esprit, et tous les sens. Tant de grâce! Temps de délices. Tant d’amour. Et tant qu’à faire, condamner en pieds de nez magistraux, l’argent, la guerre et le travail obligatoire, les vrais et  gigantesques fossoyeurs de nos vies.

  • Metteuse en scène : Sandrine Molaro
  • Metteur en scène : Gilles-Vincent Kapps
  • Interprète(s) :  Florence Fauquet, Maxime Boutéraon, Antoine Paulin
  • Lumières : Laurent Béal
  • Scénographe : Erwan Creff
  • Musiques : Gilles-Vincent Kapps
  • Costumes : Julie Allègre

Dominique-Hélène Lemaire


https://www.atjv.be/L-Ecume-des-jours-1819 Du 22 au 27 novembre 2018 Au Théâtre Jean Vilar – Louvain-la-Neuve

Infos et réservations : 0800/25 325 – 

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administrateur théâtres

Littérature, théâtre, valeurs, classique, roman épistolaire, désir, jalousie, confessions, psychologie, amour, 21e siècle, passion, coup de foudre, abandon, femme, paix, dignité…

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«  24 HEURES DE LA VIE D’UNE FEMME SENSIBLE » d’Eva BYELE

« Je vous aime, mon ami, plus que l’on n’a jamais aimé ; mais il ne se passe pas une minute de ma vie sans qu’une secrète anxiété ne se mêle à l’enchantement de ma passion. » Voilà ce qu’écrit, dans un  fatal mécanisme de  jalousie, ajouté à la tendance qu’ont beaucoup de femmes à  attiser le malheur, à le projeter dans des mots qui finalement signent leur arrêt de mort, Constance de Salm (1767-1845), femme libre  du XVIIIe siècle. Elle écrit anonymement en 1824 un roman épistolaire bouleversant et lucide qui inspirera les « Vingt-quatre heures de la vie d’une femme  » de Stefan Zweig en 1927.


L’écriture comme manière d’être au monde.
 A son tour, la jeune écrivaine Eva Byele, en 24 lettres numérotées, décide de faire le tour de l’horloge des sentiments avec sa propre  sensibilité du 21esiècle.  Les «  24 heures de la vie d’une femme sensible » d'Eva Beyele se déclinent en vaillants battements de cœur, se lisent et s’écoutent comme une calligraphie de la passion. Ira-t-on vers une catharsis ?  Chaque lettre contient un chapelet de paragraphes qui pourraient vivre tout seul, comme  autant de  bouteilles à la mer.  Comme dans l’œuvre de Jane Austern, les concepts de  Sense and Sensibility se livrent un duel poignant et romantique.  La sentimentalité détruira-t-elle la dame comme ce fut le cas de madame Bovary? La dame artiste finira-t-elle enfermée comme Camille Claudel ?

Ou assistera-t-on à l’avènement d’une femme  cultivée et intelligente de cœur et d’esprit,  émergeant de sa passion, renouvelée, solidifiée, resplendissante? L’écriture aborde avec grande pudeur mais combien de justesse, les errances intimes de cette jeune épouse artiste, livrée aux exigences domestiques d’un milieu bourgeois où elle vit, emprisonnée dans  un  carcan  cotonneux et insipide, en plein dans les années folles. Son mariage érodé la suffoque, l’insensibilité du mari l’a poussée à l’incartade adultère. Le mari est devenu un mur de silences. Soit dit en passant: « La société n’a pas appris aux hommes à parler, c’est pour cela qu’ils condamnent les femmes au silence ». Scripsit.  Elle se le dit, l’écrit, le lit avec effroi et se rebelle par l’écriture que le milieu où elle vit, condamne.

Le mari prend ombrage des livres qui sont son refuge, Le voilà jaloux et de la plume, et de l’écriture. Le terrain est libre pour Octavio,  le compositeur qui la ravit et lui ravit les sens avec son espièglerie d’enfant. Le rire lui revient. La sensualité se savoure comme si on relisait les voluptés de Christine de Pizan… Voici le baiser brûlant, la fougue, l’extase,  l’éphémère, et l’immortel. « Le relent de la fenêtre sur l’impossible ». On pense aux rêves de Jacques Brel... au baiser d'Alain Souchon. Comme cela est  vivement tourné! 

Quelle chute inattendue, quel parcours initiatique vers la paix intérieure, quelle éclosion à ce qu’elle « est », quelle hauteur soudaine  vis-à-vis de ce qu’elle « hait ». Le bonheur, elle le découvre, est « en soi ». Donc,  jamais elle ne retombera en « esclavage ».   Voici un avènement  pur et dur de femme du 21e siècle, droite, sûre d’elle mais  dénuée du  moindre orgueil. No Pride, no Prejudice. La romancière féministe anglaise Jane Austern,  doit se réjouir, de l’autre côté du miroir. Voici, grâce au verbe,  l’existence versus les silences qui tuent.

Comme cela est vivement joué! Dans une mise-en scène fourmillant de détails intéressants, jusqu’à la couleur de l’encrier. Du vieux Rouen? Le texte est incomparablement habité par celle qui l’a écrit. La partition musicale, signée Louis Raveton, souligne le propos par ses clair-obscurs, ou ses mouvements haletants dignes des meilleurs suspenses. Celle-ci rejoint  le moindre frisson de l’âme, chaque révolte, chaque poison combattu avec opiniâtreté, chaque aveuglement …dissipé par la beauté des mots sur la page.

    Voici d'ailleurs le "credo" de l'artiste: "Ce seule en scène est l’occasion de proclamer, à nouveau, l’importance de l’écriture pour les femmes ; véritable lieu de liberté qui leur permet d’avoir accès à elles-mêmes, à leurs pensées, leurs sentiments ainsi que de rêver, de se rêver et de rêver leur vie. 
Comme l’écriture est performative, la femme qui crée acquiert le pouvoir de devenir autre et de choisir sa vie, devenant par là-même un modèle de liberté et d’émancipation. 
Par l’acte même d’écrire, la femme s’affirme comme sujet et non plus comme objet. C’est comme si elle déclarait : «J’écris donc je suis». 
Dans un monde où l’on cherche continuellement à réduire la place des femmes, l’écriture, la création – au-delà de l’acte de subversion – sont un premier pas vers la libération. 
Puissent le livre de la pièce et ce seule en scène être lus, entendus ; puissent les mots écrits et prononcés résonner en chaque être afin de trouver le chemin du cœur et de l’esprit."

Cette pièce, présentée au théâtre de la Clarencière ces jours derniers, a été jouée à Barcelone, à l’Ateneu del Raval, du 10 au 13 mai 2018, au Festival d’Avignon, au Théâtre Littéraire Le Verbe fou, du 6 au 29 juillet 2018 et à Montpellier, au Théâtre du Carré Rondelet du 14 au 16 septembre 2018.

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"24 heures de la vie d'une femme sensible"
Texte, mise en scène et interprétation : Eva Byele
Assistante à la mise en scène : Marion Peltier
Création musique : Louis Raveton

Télécharger le dossier de presse

Les jeudi 15, vendredi 16 et samedi 17 novembre 2018 à 20h30  https://www.laclarenciere.be/

Dominique-Hélène Lemaire

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administrateur théâtres
Le sacre et l'éveil? Une révélation, ce spectacle ! Il est  poétique, musical et si chorégraphique! Bravo à Dominique Serron,  entourée d’un cast de  comédiens exaltants : Paul-Henry Crutzen, Abdel El Asri, Florence Guillaume, Vincent Huertas, Luc Van Grunderbeeck, Félix Vannoorenberghe, Laure Voglaire, Line Adam, Renata Gorka, Nadia Benzekri, Xavier Lauwers et toute l'équipe de L' Infini Théâtre.

« Beau comme un opéra »: c’est  la rumeur qui a circulé comme une traînée de poudre le soir de la fabuleuse première à la Comédie Claude Volter   le 18 avril 2018.   « l’Eveil du printemps »  ,une pièce de l’auteur allemand Wedekind (1881),  a été  croisée avec une mise en page émouvante d’extraits  du « Sacre du Printemps » d'Igor Stravinsky (1913). Le résultat est convaincant. Dans cette  toute nouvelle perspective,  la  mise en scène est franchement  créative et engagée. Dominique Serron évoque avec tact … infini et écoute profonde, les échos du « cimetière de la jeunesse »  de ce héros, Melchior, revenu des années plus tard,  sur les lieux du crime …collectif, n'est-ce pas?

 

  Le   métissage littéraire et musical de la « Kindertragödie » se transforme  en même temps, en  un  manifeste moderne,  qui dénonce les maltraitances rampantes que peuvent parfois infliger des  parents en mal de communication avec leurs enfants. Les raisons abondent: dans  une société brutale, formatée et imperméable aux sentiments, sont-ils victimes de leur époque? Eux-mêmes, sont-ils trop jeunes pour assumer ou répètent-ils des comportements qui ont traversé plusieurs générations sans remise en question?  Sont-ils frustrés par des peurs et des souffrances indicibles?  Enivrés de pouvoir parental? Bloqués pour mille et une autres raisons honorables - ils en ont sans doute de très bonnes - comme de ne jamais avoir lu Françoise Dolto, et  se trouvent  dans l'impossibilité chronique  de gérer les  premiers émois amoureux  de leur progéniture, ou même, de leur expliquer sereinement et ouvertement « les choses de la vie ». Mais l’époque de  l’Allemagne de Bismarck est-elle pour autant révolue? 

 

 Par souci de multiplicité esthétique, le travail de création de Dominique Serron associe  un troisième volet. Il a été  élaboré  au sein de diverses écoles bruxelloises,  par de jeunes adolescents et adolescentes. Ce sont  des capsules vidéo de lyrisme muet, réalisées in situ ou dans les environs immédiats de l’école …y compris le cimetière d’Uccle. Il suffit d'observer: chaque mouvement des personnages  filmés colle impeccablement au tempo de la musique! C’est prodigieux. Les jeunes, confrontés au texte et à la musique  sont devenus acteurs, au propre et au figuré, au lieu d’être de simples récepteurs. Bel objectif éducatif s'il en est!  Ils se sont mis à  rêver l’action, ils ont réagi avec authenticité et dansé leur ressenti  aigu et spontané face au suicide, face à la violence parentale, à la pression scolaire, à la castration du désir, à une société blessante et inhumaine. Leurs regards, leurs visages, et leurs postures sont bouillants d’interrogation et aussi d’accusation silencieuse. Chacun d'eux porte les marques  de l’intensité vibrante de leur implication dans le projet. Ces  séquences  filmées rythment le spectacle comme une respiration inédite entre chaque scène. Les chorégraphies émouvantes, nées  à la croisée de la théâtralité et de la musique,  ont l’avantage de pouvoir  faire  apprécier la contemporanéité du propos.  L’ensemble devient  un tout admirablement monté,  fruit d’un travail de création original et audacieux, dans le droit fil de  ceux auxquels  nous a habitués la pétulante et infatigable  metteuse en scène pour qui,  le travail corporel des comédiens se doit d’être  toujours avant-coureur du  verbe, ce qui donne un relief extraordinaire au propos...

 A chaque spectateur de relever des détails poignants qui le touchent personnellement… La liste sera longue. Juste quelques exemples… Le bruit des parapluies refermés avec brutalité sue le bord de la tombe, une fois les « formalités accomplies »…  Ce décor unique et polyvalent, mais essentiel : un immense comptoir bourré de tiroirs. Ceux d’une morgue ? Ceux de  notre société cloisonnée faite de trappes et de placards? Posés sur un immense buffet de cuisine,  de furtifs souvenirs de Dead Poets Society ou ceux de James Dean (A Rebel Without a Cause) ?  Cette idée effrayante que le jeune Moritz s’est tué « par amour pour ses parents »? Ce geste désespéré de mère impuissante qui donne sa médaille à son fils à défaut de pouvoir  le défendre contre un père tyrannique… Ces chaussures abandonnées que l'on ramasse, l'air de rien. L'ignoble phrase entendue: «Cet enfant n'était pas de moi! » Cette citation glaçante d'Othello: «As-tu fait ta prière, Desdémone?»  Ce sac d’où émergent des aiguilles à tricoter, qui font froid dans le dos! …Et surtout le talent fou et l'énergie débordante de toute la production!

 

Texte original : Frank WEDEKIND

Musique originale : Igor STRAVINSKY

Traduction : Jacques de DECKER

Conception, Adaptation & Mise en Scène : Dominique SERRON

Adaptation musicale & création sonore : Line ADAM

Ingénieur son : Colin BURTON

Scénographie & Costumes : Renata GORKA

Création vidéos : Nadia BENZEKRI

Création lumière : Xavier LAUWERS

Crédits photos :  Pierre Bolle

...Hélas, seulement jusqu'au 6 mai 2018, précipitez-vous pour réserver!

Du 18 avril au 6 mai à la Comédie Claude Volter. Informations et réservation: www.comedievolter.be ou 02 762 09 63

En octobre 2018 à l’Atelier Théâtre Jean Vilar  

https://artsrtlettres.ning.com/events/le-sacre-et-l-eveil

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administrateur théâtres

Songe ou mensonge ? Complicité de deux géants russes…Pouchkine et Rimsky Korsakov.  Que nous réserve l’aube nouvelle ?

Quelque part dans un empire
Plus lointain qu'on ne peut dire,
Vivait le grand roi Dadon,
Qui dès l'enfance eut le don
D'infliger par son courage
À ses voisins force outrages.
Or ce roi, quand il vieillit,
Voulant loin des chamaillis
Connaître des jours paisibles,
A son tour devint la cible
De ses voisins qui dès lors

Lui causaient beaucoup de tort… 

Ainsi commence le conte russe écrit par Pouchkine (1799-1837) en 1834. Jugé irrévérencieux, par ses remarques caustiques sur le Tsar Nicolas I,  celui-ci fut déjà censuré.

 La satire  gagne encore en puissance avec le librettiste, Vladimir Belsky et la musique de  Rimsky Korsakov (1844-1908). Il fut à son l’époque plus difficile de  faire sautiller Le Coq d’or de sur la scène russe que de faire passer un chameau par le  trou d’une aiguille…raconte à l'époque, le critique musical, Joel Yuliy Engel (1868-1927).  Quoi de plus subversif d’ailleurs qu’un conte, pour critiquer  ce régime tsariste pourri  qui ne recule pas devant le crime et ne tient pas  ses promesses? En 1905, le compositeur   fut destitué, puis réintégré dans ses fonctions au Conservatoire pour avoir apporté son soutien public à des étudiants rebelles. La création du dernier opéra de Rimski-Korsakov eut finalement lieu le 24 octobre 1909 à Moscou dans un théâtre privé, après sa mort.

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  "Il a le rang et les vêtements du Tsar. Mais son corps et son âme sont ceux d'un esclave. À quoi ressemble-t-il? Les courbes impaires de son personnage rappellent celle d'un chameau, Et ses grimaces et caprices sont celles d'un singe ..." La musique transparente de cet opéra alerte et malicieux, composé près de  10 ans  avant la révolution de 1917, regorge d’allusions parodiques au pouvoir en place, critiquant ouvertement ce roi malhabile, son régime autoritaire et arbitraire et l’asservissement de son peuple, pourtant libéré officiellement du servage en 1861.

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Cet extraordinaire Coq d’or hélas rarement joué, est un  vrai  cadeau de décembre avec la très  intelligente  mise en scène du français Laurent Pelly et surtout sous la baguette d’Alain Altinoglu qui  dirige, avec quelle force théâtrale,  son premier opéra depuis sa prise de fonction  comme chef attitré de La Monnaie! Alain Altinoglu préside à son orchestre comme un chef d’atelier de tapisserie musicale, assemblant les 1001 mélodies orientales de la composition en une immense fresque débordante de vie, qui met en scène une myriade de sonorités instrumentales bien adaptées à la voix des solistes.

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En prime, cadeau dans un cadeau, entre le 2e  et le 3e acte, Alain Altinoglu dépose la baguette, quitte l’orchestre, ouvre un piano et joue en interlude musicale les suites tirées de l'opéra avec la violoniste Saténik Khourdoïan … qui  plane avec son archet, les yeux fermés. Pur bonheur, moment de grâce,  d’extase peut-être, un saisissant contraste après la ridicule scène entre la sublime  et séduisante reine Chemakhane (Venera Gimadieva/ Nina Miasyan) et le balourd roi Dido (Pavlo Hunka/ Alexey Tikhomirov), qui se comporte, à peu de choses près, aussi stupidement et vulgairement que  certains touristes sexuels des contrées lointaines.

 

 Cette nouvelle production de La Monnaie tend un miroir à la bêtise humaine et à tous les tyrans du monde.  Le travail de la mise en scène où le peuple et le tas de charbon se confondent  capte à contre-jour le jeu de foules versatiles. Souvenirs de tableaux expressionnistes ? Les magnifiques costumes de fourrure de renard argenté de la cour impériale  se chargent  au fur et à mesure la poussière noir charbon. Celle-ci finit par  devenir de plus en plus  envahissante,  jusqu’à atteindre même le  splendide costume de la reine Chemakhane, une truite d’argent enchanteresse si suggestive dans son torride solo érotique,  devant un roi  béat d’admiration! Le décor de ce deuxième acte n'est pas une immense corne d'abondance mais une immense nasse illuminée de désir dont le piège se refermera sur le roi incompétent. Les lumières (Joël Adam), elles aussi, comme les tonalités musicales, ne font que s’assombrir, et  annoncer l’inéluctable déclin et la mort du monarque absolu. Le somptueux lit d’argent  où paresse le roi est une pièce d’orfèvrerie qui une fois montée sur un tank dévastateur, dit tout de l’horreur de la guerre. Les figures déshumanisées  qui accompagnent la Circé orientale font frémir.

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Mais l’émerveillement est  entier à chaque apparition du Coq d’or, un être mythique dont les postures sont plus vraies que nature. Le poitrail doré se gonfle de chants mystérieux chantés par la voix de Sheva Tehoval, tandis que la danseuse, Sarah Demarthe, accomplit le miracle mimétique sue scène par une danse d’une incomparable  grâce animale. Les tressaillements de l’immense queue faite de plumes de paradisier, ou du moins on l’imagine, les sabots d’or qui chaussent les pattes délicates qui cherchent à éviter de se salir, et le refuge sur un radiateur pendant le sommeil injuste du tsar sont autant de secondes de beauté: tout chez cette figure fabuleuse,  est matière d'espoir, matière  à rire et à plaisir, comme échappée des Contes du Chat Perché!         

 

 La féerie subversive est  bourré d’humour : « Tout conte est mensonge mais n’en contient pas moins quelque allusion. Puisse-t-il servir de leçon à maints braves jeunes gens. » dit Pouchkine et le facécieux Astrologue (Alexander Kravets)  de conclure : «  Seule la tsarine et moi-même y étions bien vivants ! Les autres, chimères, élucubrations, fantômes blafards, vacuité… » Notre société semble être accablée des même maux de décadence et de désarroi… Quel coq d’or risque subrepticement de s’animer et de pourfendre  son crâne ?  

© LA MONNAIE/BAUS

http://www.lamonnaie.be/fr/program/10-le-coq-d-or

liens utiles:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Pouchkine

https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Coq_d'or_(op%C3%A9ra)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_II_(empereur_de_Russie)

 « Le Coq d'or » a séduit la presse ! – 


– Opéra magazine 14.12.2016
Le Coq d'or, (...) est admirablement servi par la Monnaie de Bruxelles depuis hier soir. Lecture orchestrale enivrante d’Alain Altinoglu, (...) et mise en scène de Laurent Pelly réussissant le juste dosage entre onirisme, fantasmagorie et satire dans une œuvre hésitant entre différents genres. 
-----------
–  La Libre Belgique, 14.12.2016
Un Coq d’or noir, étincelant et poétique. Après un « Capriccio » de grande classe, voici un « Coq d'or » qui pourrait marquer les mémoires.
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– Le Soir, 15.12.2016
Une féerie somptueusement maligne.
------------
– L'Echo, 15.12.2016
Une mise en scène savoureuse de Laurent Pelly : un régal d’insolence douce, absurde et taquine (…) 
------------
– FAZ.NET, 15.12.2016
«Der goldene Hahn» is eine Prachtpartitur.

 

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administrateur théâtres

play_434_lisbeths_(2).jpg« Lisbeths » (2006) de Fabrice Melquiot au théâtre Le Public  

 La douce canicule de cette mi-septembre se meurt vite dans l’atmosphère renfermée de la salle des voûtes du théâtre Le Public et la pièce devient vite  irrespirable, …entendez, dans le sens de l’absence de respirations! En effet, les deux comédiens vont mener train d’enfer, aspirés dans la fébrilité de leur poursuite amoureuse à travers les ronces de la vie.

George Lini et Isabelle Defossé ont tout donné ! La langue  est haletante, truffée d’interruptions, de rires trompeurs,  de lapsus, de choses échappées à l’inconscient, de bulles effarouchées, d’hésitations essoufflées, de précipitations  vertigineuses dans un jeu théâtral intelligent et juste.  Ils ne savent pas comment s’approcher, coincés dans leurs carapaces bourrées d’épines. Pas facile l’amour chez les oursins, comment remonter à la surface ?

 Les giclées de « enfin bref » sont autant de cris d’alarme brûlants. Le sol du plateau est un lit de braises. « Enfin bref », c'est le mot qui assassine le présent, qui court haletant vers un futur qui se dérobe, qui angoisse et qui terrorise.  A lui seul il symbolise  l'urgence d'un désir inassouvi, sans jamais l'ombre d'un espoir de contentement, avec à la clef la déception comme clef de voûte de la vie, dans une course absolue et effrénée, à l'assaut des ombres et non des choses et des gens, tels qu'ils sont! 

 Le duo fantastique des deux comédiens Georges Lini & Isabelle Defossé détient un  puissant pouvoir d’invitation à la réflexion. Cette pièce fulgurante du savoyard  Fabrice Melquiot pourrait-elle briser le cycle infernal de nos temps pressés et utiles... ?   Et si on éduquait les gens au contentement et non à l’avidité permanente ? Une avidité stimulée par la publicité, qui affirme qu’il nous manque toujours impérieusement quelque chose.  Une civilisation du besoin chronique et permanent, sans cesse ressassé, qui  instille dans les esprits la dure sensation de manque.  Ils ont les yeux dans les yeux, le corps à corps, mais pas la sérénité de  l’accord ! Le spectateur ne ressortira pas indemne, touché, mais heureusement pas coulé !

 « Ils ont tout et pourquoi cela ne marche pas » se demande-t-on?  Cette question ne cesse de hanter le spectateur souvent pris à témoin par les comédiens, ballotté dans l’ivresse des mots, des dialogues et des narrations croisées au cours de joutes qui ne sont pas que verbales puisque le corps est maître à bord. Ainsi, le spectateur est entraîné, troublé, subjugué par  l’énergie théâtrale époustouflante du  ballet des amoureux qui évoluent tels des papillons de nuits affolés, dans un clair-obscur plus livide que le désespoir. Et pourtant  la fille avait des rêves, elle avait su larguer les amarres, et pourtant elle avait - mine de rien- semé la lumière, rêvé d’un enfant dans la blancheur d’une innocence retrouvée,  galbée de verres de laits à la chaîne et de craies blanches prêtes à écrire une nouvelle vie.

Le phénomène de l’amour - ce qui fait que nous existons à nos yeux et aux yeux des autres - devrait être la tendre aspiration de chaque homme et de chaque femme. Mais la pièce  se fait de plus en plus pessimiste  et l’inaccessible étoile reste bel et bien inaccessible pour les deux personnages, à force de se concentrer sur leur propre désir et non sur celui de l’autre. Et pourtant tout avait  si bien commencé, un peu comme dans L’Ecume des jours: sur les  sentiers peu fréquentés  du fantastique et de la poésie.

lisbeth

 

 Petits commerçants, petits consommateurs d’amour, ils s’éteignent aussitôt allumés, des lucioles perdues dans le grand noir !  Et l’homme est impuissant  devant son destin, vissé à une  angoisse obnubilante comme un coquillage sur son navire car sa Lisbeth, tout d’un coup, n’est  plus la Lisbeth qu’il connaissait dans les moindres recoins : elle a changé ! Elle est une Lisbeth plurielle et réelle. Et cela  Pietr ne l’accepte pas! …S’il pouvait se dire qu’elle est  tout bonnement vivante, traversée par le désir d’enfant et assoiffé de  lui ! Incapable de renoncements, il la fige dans son imaginaire, la cloue comme un papillon sur la planche de l’entomologiste, alors que la vie, c’est justement l’adaptation perpétuelle et le changement! Pauvres humains plus piquants encore,  mais bien moins sages, que les oursins!

 

http://www.chargedurhinoceros.be/index.php?option=com_content&view=article&layout=edit&id=118

...À plus de quarante ans, Pietr se contente de brèves aventures : représentant de commerce, ce n’est pas un métier pour être en couple, on n’est jamais là. Lisbeth fait irruption alors qu’il n’attendait plus rien. Ils se plaisent et décident rapidement de faire un enfant, dans un hôtel, face à l’océan. Elle patiente sur le quai de la gare. Quand il descend du train, il voit cette femme qui vient vers lui, tout sourire, toute lumière. Ce n’est plus Lisbeth, c’est une autre Lisbeth, c’est une inconnue. Mais il reste pourtant l’envie d’atteindre cet amour absolu …

De Fabrice Melquiot, mise en scène de Georges Lini, avec Isabelle Defossé et Georges Lini

Du 6 septembre au 29 octobre 2016 à 20h30 au Théâtre Le Public à 20h30

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=434

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fabrice_Melquiot

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Définir la beauté

      Ca, C'est la définition de la beauté par Voltaire: 

"Le crapaud trouve belle sa crapaude"

 Ca plutôt que la beauté aseptisée,formatée, la beauté qui n'est que jolie.

 La beauté se révèle au soir, en glissant dans le caniveau. 

 La beauté aime le crépuscule, ne craint pas le noir.

 Autre définition, celle de breton, le pape du surréalisme n'a pas dit que des inepties:

 "La beauté sera convulsive ou ne sera pas"

fin flo fond vert

Je revois flo sur fond vert avec intérêt. Je valide et ne déclare jusqu'à demain au moins de ne pas retoucher cette récente peinture 100x80 acry et nombreux marouflages sur toile Gegout©adagp2011

 En écrivant ces lignes je tente de trouver la mienne, celle qui colle à mon humeur.

 Et ma définition actuelle (au jour d'aujourd'hui comme aiment le préciser certains) serait encore celle là:

Etre là, les sens en alerte..le regard figé sur l'instant magique qui lui ne va pas vous attendre..

 


 

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Chair flesch..

On relève la tête, regard en coin sur des fesses qui se déplacent au beau milieu d'un corps. C'est le soleil enfin qui exacerbe les sens.

Déhanchement chaloupé, le jean un peu tombant, tenue négligée, un mouchoir sort à moitié de sa poche, La journée s'annonce belle et je rêve seul dans mon jardin.

Pas de défilé, pas de ses passantes qui déambulent sans un regard sur mes yeux ou se lit le désir.

Chair flesch.

Un mur de mon atelier ou l'on peut voir 12 variations sur un genoo too moo

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Je crois entendre des pas qui résonnent sur le trottoir.

Allongé sur mon transat, je fixe la haie sombre de lierre. Une mouche passante, s'énerve entre deux feuilles qui ne bronchent pas

Moi stupidement installé, la jambe en l'air un sac de glace entoure mon genou

C'est la première mouche de l'année..



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Cendre d’agonie

Faut-il vivre ailleurs de soi-même
Dans un corps céleste abrité
Ou même chercher au lointain
Comme une comète chuchotée..!

Faut-il dire à plus tard..?!
Pour revivre si soucieux
Ou même rester à jamais
Dans un réel façonné..?!

Partir ailleurs sans navire
Sous la prise des sondes narratives..?!
Ou même aller au lointain
Tout près des rêves primitifs..?!

Périr en cendre d’agonie
Pour un meilleur jour du désir..?!
Et grandir mille fois comme une fleur
En caressant le jour sans fleurir..?!

08/O8/2OO6
Par : Abdeslem SBIBI
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