J'ai le plaisir d'y participer aux côtés de 23 artistes , de toutes techniques ! Maryse Louis en est l'invitée d'honneur .
L'expo est accessible les 23, 24 et 30 septembre et le 1 octobre , de 11 h à 18 h .
J'ai le plaisir d'y participer aux côtés de 23 artistes , de toutes techniques ! Maryse Louis en est l'invitée d'honneur .
L'expo est accessible les 23, 24 et 30 septembre et le 1 octobre , de 11 h à 18 h .
Continuons d’éclairer notre lanterne en examinant au plus près notre sujet...
Deux jeunes gens étudiant une statue de Vénus
à la lueur d’une lampe
Godfried Schalcken (1643-1706)
(huile sur toile ; collection Leiden, New York)
En matière de clair-obscur, Aphrodite est un oxymore à elle seule comme nous allons le voir. Contradiction toute féminine ?
Il faut cependant remarquer que si Aphrodite était libre, la société athénienne n’était guère égalitaire. Les femmes passaient leur vie au gynécée où elles tissaient et filaient doux. Hors les processions rituelles point de sorties. A Sparte, si elles pratiquaient l’éducation physique et se montraient au palestre, pour l’éducation intellectuelle elles pouvaient repasser !
Quand l’ordinaire se réduisait aux tâches ménagères.
Comment dès lors ne pas idéaliser pour les unes,
fantasmer pour les autres ?
A Tamassos, d’où provient cette statuette, Aphrodite eût bien sûr son temple.
(terre cuite, VIe s. av. J.-C. ; musée archéologique de Nicosie, Chypre)
Tous les ans à Chypre, ses fidèles, couverts de myrte, affluaient dans son sanctuaire à Palaia Paphos (l’ancienne Paphos, aujourd’hui Kouklia) où, ne songeant plus qu’aux douces joies des hyménées et à leurs mystères après avoir reçu un phallus et du sel (j’en ai un grain aussi), ils se livraient à des fêtes orgiaques.
« Viens, Cypris, offre-nous tes couronnes,
Et dans les coupes d’or, gracieusement,
Verse comme un vin ton nectar
Mêlé de joies. »,
Sappho, qui pour l’Aphrodite a dédaigné l’Eros.
Sans verser dans les excès, ne cédons pas aux divagations de Pierre-Joseph Proudhon qui en la matière pousse un peu loin le bouchon lorsqu’il écrit « Le culte multiplié d’Astarté, Aphrodite ou Vénus ; les fêtes orgiaques, dionysiaques ou bacchanales ; les lamentations sur la mort d’Adonis, les jeux floraux, les prostitutions sacrées, le priapisme universel, les poésies érotiques, l’amour vulgivague, omnigame en sont les monuments. Ajoutons encore les théâtres, les danses, le vin, la bonne chère. Ainsi tout se tient : le raffinement des arts amène la corruption. » Ne pas se courber certes, mais voir dans l’art la racine de toutes les dépravations, il y a là un pas que je ne franchirai pas. Des spartiates il n’est dans ce domaine effectivement rien resté, plus laconique il faut parfois demeurer.
Figurines de terre cuite (VIe s. av. J.-C.), aèdes, chanteurs et musiciens.
Petits présents faits à Aphrodite, rustiques mais touchants,
lors des processions et célébrations données en son honneur
au temple de Kition (Larnaca).
Que la fête commence !
(musée archéologique de Nicosie, Chypre)
Chœur des Bacchantes :
« Chypre ! C’est l’île d’Aphrodite
Où nichent les Amours ensorceleurs
Ils font venir une âme aux mortels… »
Euripide (480-406 av. J.-C.)
Evohé !
A Rhodes, le temple d’Aphrodite était situé à l’entrée de la ville antique, au niveau de l’ancien port de Mandraki, mais de là à penser qu’elle n’est qu’une hétaïre, voire pire une vile femme à marins ! Une poule à facettes pour nightclubbers en goguette !
Toujours est-il qu’avec le prompt renfort de croisiéristes, nous nous vîmes trois mille en arrivant au port. Et que sous la canicule nous constatâmes que Vénus est bien la plus chaude*1 du système solaire !
Ruines du temple d’Aphrodite à Rhodes
(IIIe siècle av. J.-C.)
A mélanger ainsi les genres et si on remonte plus loin dans le temps, avec « la déesse aux serpents » minoenne, Astarté, la « reine de lumière » babylonienne et Ishtar, la « donneuse de lumière » cananéenne, déesses du croissant fertile, Inanna pour les Sumériens, ou encore Hathor l’Egyptienne, que l’on peut toutes à raison assimiler à Aphrodite ; ou que l’on porte le regard tout au nord avec la Freyja scandinave par exemple, partout on retrouve des déesses de l’Amour et de la Fécondité, à la sexualité certes débridée.
D’accord, à Babylone, Ishtar ou, à Sumer, Inanna avaient leurs praticiennes, grandes prêtresses de l’amour sensuel. Certes, comme le chantait Ferré, avec
« La ‘the nana’, c’est comme un ange qu’aurait pas d’ailes.
La ‘the nana’, au septième ciel tu fais tes malles. »
Vrai toujours que Vénus libentina avait la libido exaltée. Voluptueuse et légère comme susurrait Farmer « petite bulle d’écume, poussée par le vent. » Qu’Aphrodite Porné était invoquée par les courtisanes en tant que divinité de l’amour vénal. Que plus d’un mâle a succombé sous leurs charmes, au point que notre déité était surnommée Androphonos, la tueuse d’hommes ! Et Vénus Libitina, par une malencontreuse euphonie*2, veillait aux cérémonies funèbres…
Eros et Thanatos.
« Mourir sans mourir est cette frénésie qui se nomme amour. »,
Métastase*3
Souvent libertine, parfois même catin vouée aux enfers.
Mais faire d’Aphrodite ou de ses avatars la mère de tous les vices et de l’art son vecteur le plus propice ! Dans cette conation camarade Pierre-Joseph, je te le dis tout net, tu attiges !
« Les bains, le vin et Vénus usent nos corps.
Mais les bains, le vin et Vénus font la vie. »,
Proverbe latin.
Toutefois rappelons-nous cette maxime de Cléobule de Lindos, un des Sept sages de l’Antiquité,
« La modération est le plus grand bien »,
conservons un calme olympien, et reprenons.
Vendredi pour Vénus, friday pour Freyja !
Chaudron de Gundestrup (détail)
(âge du fer celtique, ca 500 av. J.-C., argent. Musée national, Copenhague)
Quoi qu’il en soit, des temples un peu partout, en Grèce, en Crète, en Asie mineure surtout, révèrent Aphrodite.
Figure d’Aphrodite dans le style de l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle.
Quelle femme d’épithètes !
Des yeux comme mouillés qui arracheraient des larmes à un cœur de pierre.
(fin de la période hellénistique ; palais des Grands Maîtres de Rhodes)
J’en rêve encore… Car elle mérite tous les qualificatifs, est dotée de bien des attributs, et suscite toujours l’admiration.
(musées du Vatican)
« Rien de plus suave, de plus voluptueux que ses contours. »
Quoique « Dédain, ironie, cruauté,
se lisaient sur ce visage d’une incroyable beauté cependant.
… Sentiment pénible qu’une si merveilleuse beauté
pût s’allier à l’absence de toute sensibilité. »,
Prosper Mérimée
Statue d’Aphrodite dite Vénus de l’Esquilin
Marbre d’après l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle.
Serait-elle devenue pudique ?
On disait déjà qu’au sortir de l’eau-mère à Paphos elle se cacha derrière un buisson de myrte, plante qui depuis symbolise charme et jeunesse.
Elle semble dire et médire, à la manière de Musset :
« Le marbre me va mieux que l’impure Phryné
Chez qui les affamés vont chercher leur pâture,
Qui fait passer la rue au milieu de son lit,
Et qui n’a que le temps de nouer sa ceinture
Entre l’amant du jour et celui de la nuit. »
(marbre, 1er siècle apr. J.-C., musées capitolins, Rome)
Praxitèle avait il est vrai, en la personne de sa maîtresse, Phryné, un modèle parfait. Quoique hétaïre, à ce que l’on disait une pouliche d'Aphrodite, il était difficile de la haïr tant sa beauté resplendissait. Et bien qu’on l’appelât « le Crible », passant tout petit ami au sas de ses envies, ôtant ses dessous le laissant sans le sou.
« Elle mérite l’admiration sous toutes ses faces.
On raconte qu’un homme en tomba amoureux et que, s’étant caché une nuit, il fit l’amour avec la statue :
Des taches sur le marbre gardent, dit-on, la trace de sa concupiscence. »,
Pline l’Ancien, à propos de Praxitèle et de sa Vénus de Cnide.
Ménauphantos, sculpteur grec du 1er s. av. J.-C. (?)
(musée national, Rome)
Si Praxitèle créa le prototype du nu féminin avec l’Aphrodite de Cnide, souvent décliné, on doit à un autre sculpteur grec de génie, Doidalsas de Bithynie, le modèle de l’Aphrodite accroupie. Il faut aussi citer Scopas de Paros, proche de Praxitèle, pour sa Vénus pudique ou alors, plus explicite, chevauchant un bouc, Epitragia, l’Aphrodite Pandemos. Phidias pour sa céleste Aphrodite Ourania, Callimaque et son Aphrodite Genetrix, Alcamène, Agoracrite…
Une plastique parfaite à vous faire perdre la tête.
C’est l’effet que fit Phryné, née à Thespies, où on vouait un culte à Eros.
Copie romaine du Ier ou IIe s. d’après l’Aphrodite de Thespies de Praxitèle.
(musée du Louvre, Paris)
Collection Richelieu
(marbre, IIe s., restaurée au XVIIe ; musée du Louvre, Paris)
A noter que si une gravure sur la plinthe l’attribue à Praxitèle celui-ci vécut au IVe s. av. J.-C. A ce propos, je relève cette remarque de Phèdre, l’affranchi d’Auguste : « Certains ouvriers de ce siècle ]… Le fabuliste vécut de - 14 à + 50 ap. J.-C. environ[ augmentent de beaucoup l’estime et le prix de leurs ouvrage en gravant sur une nouvelle statue de marbre le nom de Praxitèle ]…[ : car l’envie, qui cherche toujours à mordre, est beaucoup plus favorable au mérite des anciens, qu’aux gens de bien qui vivent aujourd’hui. »
Ou le peintre Apelle de Cos pour sa Vénus Anadyomène.
Selon Pline l’Ancien, « Certains pensent qu’elle (Pancaspé, la maîtresse préférée d’Alexandre, qui en fit « don » à l’artiste touché par charis, la grâce) posa pour la Vénus Anadyomène. »
Au bain et sans grand frais de toilette.
(Ier ou IIIe s. av. J.-C. ; palais des Grands Maîtres de Rhodes)
Un tableau*4 si saisissant que plus tard « le divin Auguste dédia dans le sanctuaire de son père adoptif César. » Par malheur l’œuvre rapidement se détériora et « Apelle avait commencé une seconde Vénus de Cos, où il se proposait de surpasser en beauté la première. Mais la mort lui refusa le temps nécessaire à la finir. » Un Apelle entendu à la Renaissance par Botticelli, Giorgione, Bellini, Titien, Véronèse, Tintoret, puis, avec leurs Vénus plus baroques et opulentes, par Bronzino, Giordano, Carrache, Le Guerchin, Rubens, Vélasquez… Quelle cohorte de prétendants.
Aphrodite accroupie de Doidalsas de Bithynie
Copie romaine en marbre de l’époque d’Hadrien
d’un original en bronze du IIIe s. av. J.-C.
(musée national, Rome)
A suivre…
Si vous avez raté les deux précédents numéros de la série, vous trouverez là une session de rattrapage :
1. A Paphos, l’effrontée Aphrodite fût :
https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/a-paphos-l-effront-e-aphrodite-f-t-aphrodite-1-5
2. A la poursuite d’Aphrodite la dorée :
https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/a-la-poursuite-d-aphrodite-la-dor-e-aphrodite-2-5
Michel Lansardière (texte et photos)
*1 Mercure, la planète la plus proche du soleil, est à une température moyenne de 420°C, alors que Vénus, à l’atmosphère chargée en soufre provoquant un violent effet de serre, est à 460°C. Brûlante ! mais, gare, elle sent le soufre.
*2 Malheureux glissement sémantique qui va de libentina à libitina car c’est Perséphone, Proserpine à Rome, qui était la reine en titre des Enfers.
*3 Authentique ! Pierre Métastase (Pietro Trapassi dit Metastasio, 1698-1782), poète et librettiste, notamment pour Pergolèse ou Mozart (La clémence de Titus).
*4 Pinax. Pinakès que les Grecs disposent dans des pinacothèques.
Aphrodite Niképhoros de la villa de Thésée,
Nea Paphos, marbre, 2e/3e s. av. J.-C.
(musée de Chypre, Nicosie)
Et là sur cette plage d’Achni qui vit émerger Aphrodite, au Rocher du Grec, les Achéens s’en revinrent de Troie et débarquèrent. La boucle était bouclée.
Ou presque… Permettez encore que je file la métaphore tant la légende est belle.
(marbre du 1er siècle découvert à Soli, musée de Chypre, Nicosie)
Aphrodite la dorée, qui fait naitre l’amour
Et met en émoi la création entière.
Dorée comme un Titien, une certaine morgue aux lèvres.
Son galbe est parfait, mais ne lui dites pas qu’elle est la plus belle hellène, irascible, elle pourrait se méprendre et vous poursuivre de sa vindicte.
A Chypre toujours, un jeune sculpteur pétri de talent, Pygmalion, se prit à créer une statue qu’il voulut divine. Chaque jour il passait et repassait son ciseau jusqu’à atteindre la forme suprême de l’art, l’art vivant qui fait oublier le geste, qui fait oublier le reste. Tant et si bien qu’il s’éprit de sa création, d’un amour sans retour.
Aphrodite s’en émut. Et la statue ne demeura pas de marbre, ou d’ivoire, ni sans défense.
« De son sein il approche une amoureuse main… Pygmalion sent des veines tressaillir… Alors, transporté d’allégresse, il rend grâces » à la déesse*1.
Il appelle l’œuvre de chair Galatée, qu’il étreint aussitôt.
N’y voyant pas offense,
« La vierge sent ses baisers et rougit, elle ouvre à la lumière un œil craintif, et voit à la fois le ciel et son amant. »
Anne-Louis Girodet de Roucy-Trioson (1767-1824)
« Elle rougit parfois, parfois baisse la vue ;
Rougit, autant que peut rougir une statue. »,
La Fontaine
(musée du Louvre, Paris)
Là, la voyez-vous frémir ?
Mais je dois à la décence ne pas en dire plus.
Toutefois « quand la lune eut vu neuf fois son croissant se remplir, Paphos naquit », qui donna son nom à la cité qui chaque année célèbre Aphrodite.
Cypris est d’ailleurs le nom souvent donné à Aphrodite par les Cypriotes.
A Chypre où, comme à Rhodes ou Cythère (Cythérée), elle comptait ses plus fervents adeptes.
Cypris voyant Cypris à Cnide s’écria
Hélas, hélas ! Où Praxitèle m’a-t-il vue nue ?
Epigramme de l’Anthologie grecque
Consacrés à Aphrodite, les poissons rouges (le cyprin doré) étaient élevés en son honneur à Athènes. Quant aux disciples d’Hippocrate, drôles de carabins, ils ont donné à une sécrétion, manifestation du désir sexuel, le nom de cyprine. J’en rougis comme cuivre, mais tout de même, tout ce que l’on apprend sans jamais oser le demander*2 ! Comme aurait dit Freud, je prends sur moi, « Ҫa laisse sans bras ! »
Cyprin doré dans un bassin du musée archéologique de Rhodes
Collection Borghèse
(marbre, IIe siècle, complétée au XVIe ; musée du Louvre, Paris)
Ah, elle en fit tomber des chefs notre Aphrodite Niképhoros, « porteuse de victoires », la Vénus Victrix des Romains ! Car même si d’Arès (Mars) elle accoucha d’Harmonie, je crois que jusqu’à Vercingétorix on en paya le prix, que toujours, n’en déplaise à Brennus, Vénus commande aux choses de la chair que malignement elle mêle à l’esprit.
Découverte en 1651 à Arles, copie romaine d’après Praxitèle,
restaurée par Girardon.
Elle tient la pomme de Pâris, tout en réfléchissant face à sa psyché.
L’entendez-vous fredonner cette lointaine mélopée :
« Au-delà des mers, là-bas sous le ciel clair… mon pays et Pâris
… pour eux toujours mon cœur est ravi… »
(musée du Louvre, Paris)
Jules César lui-même, par l’entremise de sa tante Julia, qui eût Anchise comme aïeul, se prétendit parent d’Aphrodite.
Aphrodite, en effet, d’Anchise, jeune et beau berger apparenté à la famille royale de Troie, enfanta Enée*3. Enée, fuyant Troie saccagée par les Grecs, revenu des Enfers, finit par s’installer dans le Latium, devenant l’ancêtre de Romulus et Remus, fondateurs de Rome. Enée, dont descendent les Julii, la gens Julia. C’est ainsi que se bâtissent les empires. Et qu’Aphrodite est au fondement de notre civilisation.
La Mère de l’eau (Vandmoderen)
Kai Nielsen (1882-1924)
(Copenhague, glyptothèque Carlsberg)
Quelle lignée tout de même que celle de notre Vénus Genetrix !
Une mère figurée dans un drapé moulant et suggestif. Tentatrice, elle nous apostrophe.
M’imagine-t-on en nourrice ? au gynécée…
En effet on ne la voit guère au foyer, vaquant aux tâches ménagères, la marmaille sur les bras. Portant un enfant, c’est pourtant ainsi que se présente l’Aphrodite courotrophe.
Rare et sage image d’une déesse-mère, car ce n’était pas l’instinct maternel qui prédominait chez elle, trop mariolle pour s’encombrer d’une progéniture certes pléthorique. Famille nombreuse, famille heureuse, peut-être, mais seul son petit Eros préféré savait lui procurer toute la félicité.
Bien plus que deux amours, elle avait cependant deux vertus. Celle que l’on prêtait à Aphrodite Apostrophia de faire oublier les amours contrariés. De changer les cœurs et de vous purifier, un don d’Aphrodite Verticordia que l’on invoquait.
« Dis à ta déesse qui tu veux que sa force plie à ton amour. »,
Sappho (ca 630-580 av. J.-C.)
Copie romaine d’après un bronze de Callimaque.
Callimaque était surnommé le catatexitechnos, le « trop minutieux ».
Mais comment lui reprocher, et ne pas frémir devant ce drapé « mouillé », être tenté par cette pomme à croquer ?
(marbre de Paros ; musée du Louvre, Paris)
Nous suivrons encore la versatile, les poètes ne me contrediront pas, la matière est fertile.
avec Eros monté sur un dauphin.
(copie romaine d’après Praxitèle ; marbre ; musée du Louvre, Paris)
Et nous accompagnerons encore, par parenthèses, sa parentèle.
« Celui qui est touché par l’Amour ne marche jamais dans l’ombre. »,
Platon (ca - 427/- 348)
Attention toutefois au fripon Cupidon car « son jeu est cruel.
Son cœur est méchant mais sa langue est de miel.
Ne touche pas aux traîtres dons du plus beau des dieux immortels.
Son trait est petit, mais il atteint le ciel. »
(IIe s. ap. J.-C., marbre, musée du Louvre, Paris)
Torse d’Aphrodite du type de la Vénus d’Arles
(Ecole de Praxitèle ; musée archéologique de Rhodes)
A suivre…
En attendant, vous aimerez peut-être retrouver ici la première partie de ce billet :
Michel Lansardière (texte et photos)
*1 Que le poète latin Ovide, à qui l’on doit ces citations, nomme bien sûr Vénus.
*2 Cyprine… En conchyliologie, c’est aussi le nom donné à un coquillage, du genre vénus évidemment ; en minéralogie à une variété cuprifère de vésuvianite (ou idocrase) utilisée comme pierre fine. Quant aux « cheveux de Vénus », ce sont des cristaux aciculaires de dioxyde de titane, une forme de rutile donc, que l’on trouve en inclusions dans le quartz. Cette dernière appellation est aussi donnée, en botanique, à la nigelle de Damas.Sabot de Vénus étant une petite orchidée poussant dans nos Alpes.
*3 Curieuse analogie, Enée, Æneas en latin, signifiant de cuivre (ou d’airain, bronze). Chypre tient également son nom du cuivre natif, cyprium, dont elle détenait de fabuleux gisements, que l’on trouve mentionnés dans des inscriptions mésopotamiennes du IIe millénaire évoquant le cuivre d’Alasia (aujourd’hui Enkomi, ou Tuzla pour les Turcs). Par contre, pas de marbre à Paphos comme sur le reste de l’île, il venait donc de Paros. Et Cypris est un autre nom d’Aphrodite, j’y reviendrai…
Naissance de Vénus, 1863
Alexandre Cabanel (1823-1889)
(musée d’Orsay, Paris)
Au commencement, si l’on en croit la Théogonie d’Hésiode, furent d’abord créés Chaos, Gæa (le Terre) et Eros (l’Amour, force primitive)…
Gæa engendra le Ciel, Ouranos, les montagnes, Ori, et la mer, Pontos.
Puis, avec un sens de la famille qui force le respect, Gæa s’unit à Ouranos et ils donnèrent ainsi naissance aux Titans, aux Cyclopes et aux Géants. Sacrée filiation.
Ouranos était un dieu fort sourcilleux. Il craignait que ses enfants ne lui ravissent le pouvoir, aussi, afin de contrer leurs noirs desseins, les enferma-t-il dans le ventre de Gæa, devenue son épouse. Elle en prit ombrage et ourdit un plan avec son fils Cronos, le plus jeunes des Titans…
Alors qu’Ouranos gagnait sa couche, toujours prêt à honorer sa moitié, Cronos, s’approchant en tapinois, trancha net les parties viriles de son père dépité.
Ouranos dépité, la lippe pendante...
Mais... c'est une fille... bah, appelons-la Aphrodite Ourania
(falaise proche de Pétra to Romiou, Paphos, Chypre)
Et le sang*1 s’épandit dans la mer…
Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867)
(musée Condé, Chantilly)
De l’écume (aphros) se forma, d’où surgit Aphrodite Anadyomène (« sortie de la mer »). A Cythère précisément, une île grecque entre la Crète et le Péloponnèse, et, de là, portée par le doux Zéphyre, gagna Chypre, l’île d’Aphrodite.
« Le souffle du vent d’ouest l’a portée
De l’écume jaillissante et par-dessus la mer profonde
Jusqu’à Chypre, son île, aux rivages frangés de vagues. »,
Homère (VIIIe s. av. J.-C.)
Là, exactement, sur la plage d’Achni, à Pétra tou Romiou, le rocher d’Aphrodite, près de Paphos. Elle prit ainsi le nom de Kyprogéneia, « née à Chypre » (il est vrai qu’à Cythère, de mauvais esprits sans doute, la disent Kythéreia, née là-bas !).
« Tous furent émerveillés à la vue de Cythérée
Aux cheveux ceints de violettes. », id.
Dont elle n’avait ni la discrétion ni la pudeur, nous le verrons.
Et l’onde de choc se propagea…
Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867)
(musée d’Orsay, Paris)
Dire qu’elle était parfaite…
Que la colombe était son emblème.
Aphrodite, « radieuse déesse dorée »,
ointe qu’elle fut d’huile immortelle à sa sortie de l’onde par les Charités.
Elle reprend ici le modèle créé par Praxitèle à Cnide,
qui vaut mieux que les vertus aphrodisiaques prêtées à la cantharide.
(marbre, 1er siècle av. J.-C., musée de Chypre, Nicosie)
Blanche comme l’écume, dure comme le marbre, aux proportions idéales, telle le nombre d’or. Un canon vous dis-je, la callipyge. Et ardente avec ça, voire impertinente, l’innocente !
Aphrodite callipyge (« aux belles fesses »)
(marbre, début XIXe, d’après l’antique.
Parc du château de Chantilly.
Original conservé au musée archéologique de Naples)
Dessous le nom de Vénus belle-fesse ;
Je ne sais pas à quelle intention ;
Mais c’eût été le temple de la Grèce
Pour qui j’eusse eu le plus de dévotion.
Que jamais l’art abstrait qui sévit maintenant
N’enlève à vos attraits ce volume étonnant.
(La Fontaine, pour les quatre premiers vers, Brassens pour les deux suivants. Nos deux poètes auraient, n’en doutons pas, apprécié ce partage)
Qui vous embarque pour ses fêtes galantes.
Laissez-vous donc emporter par ce tourbillon…
Aphrodite, déesse de l’Amour, préside au bonheur et à la fidélité des couples… Pourtant, de son temps, la déesse de la Volupté, mit plus que de raison le feu au panthéon, multipliant les accrocs, déclenchant les passions.
Elle se maria à Héphaïstos, maître du feu, patron des forgerons, difforme il est vrai, mais qui ne portait alors de cornes !
William Bougereau (1825-1905)
(musée d’Orsay, Paris)
A Chypre même, elle recueillit Adonis bébé, qu’elle confia à Perséphone, reine des Enfers. Toutes deux s’enamourèrent du bel adolescent qu’il était devenu. Zeus intervint avant que l’orage ne gronde et ne devint tempête. Il demanda à sa fille Calliope, une des Muses inspiratrices des Arts et Lettres, de trancher le différend. La messagère partagea équitablement le temps entre les deux rivales, tout en laissant quatre mois l’an à la guise d’Adonis.
D’une liaison avec Arès, dieu de la guerre et son propre beau-frère, Aphrodite eut quatre enfants, dont un petit Eros, enfant charmant certes, ailé et joufflu, mais archer maladroit ou facétieux, c’est selon. Et qu’il ne faut pas confondre avec le dieu primitif de l’Amour. Car il pouvait taper sur la mandoline, bambino !
Ce qui n’empêchait pas Aphrodite d’être toujours éprise d’Adonis qui, pour se distraire, partit à la chasse. Arès, éternel tempérament orageux, de l’éphèbe envieux, se changea en sanglier et chargea mortellement l’impudent imprudent qui saigna abondamment. A tire-d’aile la déesse en détresse « sur son char traîné par des cygnes, s’élance dans les plaines éthérées. », Ovide. Elle « ne touchait pas encore au rivage de Chypre, mais elle reconnait de loin les gémissements d’Adonis mourant. » D’une flaque répandue elle fit éclore l’anémone, d’une goutte naquit l’adonide goutte-de-sang. Une épine au pied piqua la déesse et que croyez-vous qu’il advint ? une rose blanche pour la jolie maman se mua en rose rouge. Si ce n’est pas du charme, je rends les armes!
Vénus conduite par l’Amour auprès d’Adonis mort
Bertoja (Jacopo Zanguidi, dit ; 1544-1573)
(musée du Louvre, Paris)
Funeste destin et gros chagrin pour notre héroïne après ce coup de boutoir. Elle obtint de Perséphone qu’il revint la moitié de l’année au Royaume des vivants.
(Ecole française, XVIe s ; musée Condé, Chantilly)
De Poséidon (Neptune), qui préside aux profondeurs marines, et sacré « ébranleur de la terre », deux enfants naquirent, dont une fille, Rhodos, dont l’île de Rhodes tient son nom.
De Dionysos, né de la cuisse de Jupiter (Zeus), dieu de l’ivresse et de la transe - enfin elle le prétendit, il était en voyage… mais Adonis passait par là – elle accoucha de Priape, dieu de la fécondité, pas vraiment attirant mais au naturel si érectile…
Tandis que d’Hermès (Mercure), un dieu très leste et remuant, elle aurait eu Hermaphrodite, au caractère ambivalent hérité de ses parents.
Et lorsqu’elle ne séduisait pas le tout Olympe, elle semait la zizanie dans les couples les plus unis !
Belle d’entre les belles. Les têtes tournaient, la jalousie rongeait les cœurs les plus endurcis…
Aphrodite et Eros, dite Vénus Felix
Alors, heureuse ?
Epoque romaine impériale,
d’après l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle
(musée Pio Clemento, Vatican)
Au mariage de Pelée, roi d’Egine, et de Thétis, la splendide Néréide, Eris, la déesse de la discorde ne fut pas de la noce. Lors du repas, elle lança « à la plus belle » une pomme d’or cueillie au jardin des Hespérides. Héra, Athéna, Aphrodite se reconnurent dans l’invective. Chacune voulut donc, à juste titre, gouter à cette golden et la défendre de la convoitise des deux autres.
Léonard Limosin (ca 1505-1576)
Email de Limoges ; d’après une gravure de Marc-Antoine Raimondi
exécutée d’après un tableau perdu de Raphaël.
(Musée national de la Renaissance, Ecouen)
Pâris, le petit berger, simple mortel, quoique fils de Priam, roi de Troie, à la demande de Zeus, dut trancher le différend. Aphrodite lui promit alors la Belle Hélène et, Pâris ainsi tenté élit Aphrodite évidemment. Pomme de discorde qui déclencha la guerre de Troie… Le ver était dans le fruit.
Paolo Caliari, dit Véronèse (1528-1588)
Taquin, Cupidon (Eros) badine avec un chien, symbole de fidélité, tandis que Mars (Arès) se désarme devant Vénus (Aphrodite) qui s’amuse d’une girouette. Au moulin elle batifole, au four Vulcain (Héphaïstos) forge sa vengeance.
(musée Condé, Chantilly)
Couchée dans le foin, le Soleil fut témoin, selon Ovide, « du commerce adultère de Vénus et de Mars » et celui-ci livra « au fils de Junon (Vulcain-Héphaïstos) les infidélités et l’asile qui en est le théâtre. » Alerté, Vulcain les surprend « réunis dans la même couche ]…[ et les enchaîne au milieu de leurs embrasements. » Il fit alors entrer les dieux de l’Olympe ; à la vue de ce spectacle « les Immortels éclatèrent de rire, et cette aventure servit longtemps d’entretien à la céleste cour. »
Vulcain, à la demande expresse de Neptune, libère pourtant les amants de leurs liens. Ce qui ne suffit pas à calmer l’ire de la déesse.
« La déesse de Cythère tire de cette révélation une mémorable vengeance ; elle veut qu’à son tour celui qui a trahi ses mystérieux amours soit trahi dans des amours semblables. Que peuvent, ô fils d’Hypérion (le Soleil, que les Romains assimilèrent à Apollon), ta beauté, ta chaleur, et l’éclat de tes rayons ? » Elle frappe le Soleil d’un désir ardent pour Leucothoé, un feu irréfléchi. N’ayant plus d’yeux que pour cette vierge, il délaisse ses amours passés, Rhodos, Clyméné et Clytie.
Pour la séduire et l’abuser, il prend la forme de sa mère, Eurynome. Clytie, folle de jalousie, dénonce le subterfuge au père, Orchamus. Scandale dans la famille, ce dernier, implacable, fait enterrer sa fille vivante. Le Soleil, n’y pouvant mais, répand sur le corps de Leucothoé un nectar odorant. Et la Nymphe, trempée de l’essence divine, devint encens (boswellia).
Eplorée, Clytie se tourna vers le Soleil, changée en héliotrope (ou en tournesol*2 dans une version courante de la légende). Depuis elle suit éternellement sa course.
La métamorphose de Clytie en tournesol
Un… De… Troy… Soleil !
Jean-François de Troy (1679-1752)
(musée Bossuet, Meaux)
Honteuse malgré tout des conséquences de son effroyable courroux, Vénus partit se rafraîchir les idées dans sa retraite de Paphos, tandis que Mars battait la campagne en Thrace.
Ah l’Amour !
Et vous, sacrifierez-vous à son culte ?
A suivre…
Michel Lansardière (texte et photos)
*1 De ce sang primordial et de la divine semence naîtront également des Géants et les Erinyes (Furies), dont la charmante Mégère. Quelle engeance !
*2 Le tournesol, ou girasol ou soleil, de nos campagnes aurait été introduit en Europe par les conquistadors au XVIe siècle… alors que l’héliotrope d’Europe était répandu dans tout le bassin méditerranéen. L’héliotrope, ou jaspe sanguin, est aussi une variété de calcédoine verte mouchetée de rouge évoquant des taches de sang. Taches que l’on observera plus aisément en mouillant la pierre et en la tournant vers le soleil avant de la sculpter (« pierre des martyrs ») et de la polir. Tandis qu’en peinture l’héliotrope est une nuance de violet. Le girasol également est une variété d’opale ou de quartz chatoyants qui accrochent les rayons du soleil.
« N’oubliez pas l’Art tout de même. Y a pas que la rigolade, y a aussi l’Art ! » C’est écrit dans le texte impertinent de Raymond Queneau le Normand, puisqu’il est né au Havre! Et l’art de la mise en scène et de l’adaptation est au top, dans ce merveilleux spectacle présenté au Parc pour clôturer la saison. Miriam Youssef signe un véritable feu d’artifice.
Tonique comme Alice au pays des merveilles, Zazie, la petite donzelle en visite à Paris, découvre le monde. C’est un vent de fraîcheur, des couleurs acidulées, la liberté des choix, de l’humour noir à travers des personnages hauts en couleurs et en parodie. Partout comme des pastilles à sucer, les vues de Paris telles des points sur les i. Les illustrations sont de Jean Goovaerts et Sébastien Fernandez. Avec Miriam Youssef, ils n’y sont pas allés de main morte, chamboulant les modes et les codes, fabriquant avec leur splendide équipe comme faite sur mesure, une œuvre théâtrale poétique et percutante autour du personnage délirant et lucide de Zazie, une fille au répertoire épicé, aux réparties souvent ponctuées de « Mon Q »! Du grand art!
Jeune provinciale sortie d’un milieu familial plus que compliqué, la voilà jetée, elle l’espère, dans le ventre de Paris pour une première libre exploration du monde, avec sur les lèvres des questions aussi étourdissantes que tyranniques. Fraîchement arrivée, elle hurle sa déception comme un enfant gâtée : le métro est fermé pour cause de grèves. Elle découvre aussi un oncle « gardien de nuit » qui fait le plus souvent la tante: Gabriel à la ville, Gabriella au Mont-de-Piété! Le radieux Stéphane Fenocchi. Pleins feux sur la sexualité d’une drôle de famille d’accueil, les questions essentielles de l’enfant obstinée « déjà formée » (elle insiste !) …mais pas formatée, dérangent! Même pas peur, elle fugue de nuit et s’élance vers la liberté. These boots are made for walking… Elle ne lâche pas ses bottes jaune citron quand elle quitte son effarant tutu rouge, pour enfiler les « bloudjinnzes » de la liberté! « Tu causes, tu causes et c’est tout ce que tu sais faire ! », claironne Laverdure, le perroquet des tenanciers du bar d’endsous! Quelqu’un doit lui avoir tordu le cou : le squelette dudit perroquet trône sur l'épaule de Turandot, le tenancier grimmé comme un pirate, secondé par la craquante Mado P'tits-Pieds, la serveuse... De savoureux personnages brillamment joués par Luc Van Grunderbeeck et François Regout.
En tout état de cause, c’est avec son langage détonnant que Zazie se défend et affirme son identité et sa liberté, toute vulgarité vaincue. Pure magie, Julie Deroisin interprète l’héroïne à la perfection, argot y compris. Elle enchaîne les « Hormosessuel qu’est-ce que c’est?». La jeune effrontée en a vu d’autres, et pas des plus délicates, dans sa campagne natale… Queneau nous conduit dans un rêve en boucle. « Paris n’est qu’un songe… » La réponse de Zazie, rendue furtivement à sa mère par la douce Marcelina inopinément transformée en jeune Marcel, sera énigmatique: « Alors, t’as vu le métro ? Non j’ai vieilli ! » En à peine deux nuits! En 1959, dans la France d’après-guerre, Queneau entend dénoncer la stigmatisation sociale de l’homosexualité, la bêtise profonde des français de souche qui conspuent les étrangers, le recours à la culpabilisation, les accusations non fondées des bien-pensants, les manières fortes de la police bleu-blanc-rouge et le pouvoir des apparences. Voilà, sous un jour poétique, le Paris des déshérités libérés des conventions sociales et des lourdeurs mondaines…
L’éclatante et jeune équipe sous la conduite de l’infatigable metteuse en scène capte les reflets de la société dans une indiscutable verve scénique. Les costumes de Thibaut De Costeret et Charly Kleinermann sont eux aussi de véritables œuvres d’art réalisées par Elise Abraham et Sarah Duvert. Même compliment pour les maquillages et coiffures d'Urteza Da Fonseca. Le décor, lui aussi, joue aux œuvres d'art: fait de pièces cubistes genre Optical Art en équilibre sur la pointe du cœur, on l'enverrait bien faire un tour au Musée Vuitton avec ses lignes Mondriaan et ses éclairages couleurs oiseau des tropiques, ou "Jungle Arc" de l’artiste américain Ray Burggraf. Du rêve, quoi ! C'est Geneviève Péria au pinceau, Alain Collet aux lumières. Vertigineux, ce décor: il fourmille de trappes secrètes, d’escaliers, de rampes dissimulées, de plans inclinés instables où opère l’inénarrable et vénéneux équilibriste qu’est le Satyre, Pedro-Surplus, Trouscaillon le policier, Bertin Poirée et enfin Aroun Arachide, vrais et faux en série, admirablement incarnés par John-John Mossoux.
On ne sait si le bus de touristes allemands cherche de la choucroute ou la Sainte-Chapelle. Le métro, même s’il est en grève, sort de terre. Sa grille fermée se tord de rire et laisse échapper ce grand échalas, style poireau sans chapeau, cité plus haut. Personnage énigmatique, magnifiquement interprété par John-John Mossoux qui joue les métamorphoses. Un individu multiforme, transfuge sans foi ni loi, un œil vissé sur l’Autre, prédateur en diable, qui ne sait même plus à la fin qui il est! Voilà, pour le côté thriller. Et puis il y a une séquence pure poésie et les musiques rêvées d'Isabelle Fontaine... et une veuve sentimentale, la veuve Mouaque (Pierre Poucet) qui mourra en Gavroche ! La faute à Voltaire, la faute à Rousseau !
On adore bien sûr le couple angélique formé par Stéphane Fenocchi et Sébastien Schmit. Et tout autant, la tendre histoire d’amour entre l’ami Charles, le taximane au pittoresque tacot et Mado P’tits pieds, jouée par le duo Jean-François Rossion et François Regout.
...Voir tant de talents se correspondre et fleurir entre les pavés, et donc, applaudir à tout rompre, voilà du vrai bonheur et du grand art!
Exposition d’illustrations contemporaines chinoises, entre mythes et modernité
Du 5 au 23 mai 2017, le Centre Culturel de Chine à Bruxelles accueille une exposition inédite :
plus d’une soixantaine de dessins et de peintures illustrant les origines de la civilisation chinoise ainsi que les aventures de ses héros mythiques sont mis en lumière à Bruxelles sous le nom « Where the dream begins : Creating the World » (« Là où le rêve commence : la création du monde »).
Quatre des artistes exposés ainsi que des représentants de la Shanghai Chinese Painting Academy – maître d’œuvre de l’exposition – se sont rendus tout spécialement à Bruxelles pour le vernissage de l'exposition.
Une diversité des styles et des techniques
Au total, pas moins de 68 illustrations classées en 17 collections composent l’exposition. Chacune de ces collections mettra en image des styles chinois très distincts grâce à l’identité artistique marquée de chacun des artistes exposés.
Le visiteur est confronté avec une grande diversité des styles et des techniques utilisées : encre de Chine, peinture à l’huile, peintures traditionnelles chinoise, pastels et même images digitales figurent au programme.
Un nouveau souffle pour l’illustration et la bande dessinée chinoise
Cette exposition se veut moderne et contemporaine, toutes les œuvres exposées ayant été réalisées en 2016. Elle s’attache surtout à faire connaître l’Histoire de la civilisation chinoise au travers de sa thématique. La richesse culturelle de la Chine s’y ressent également : les artistes exposés sont de tous âges et proviennent des quatre coins de la Chine. Spécialistes de l’illustration et de la bande dessinée chinoise, ceux-ci partagent le même souhait : en prenant part au projet, ils espèrent apporter un nouveau souffle à la créativité chinoise et offrir des œuvres inédites au grand public. Ce large projet de la Ville de Shanghai, berceau de la bande dessinée, vise à illustrer l'histoire de la civilisation chinoise par le biais de réalisations d'artistes contemporains et "représente le fruit d'un travail récent de recherche sur les mythologies chinoises, très populaires en Chine, qui se transmettent tant à l'oral qu'à l'écrit", explique Jianjun Tan, vice-directeur de la Shanghai Chinese Painting Academy, maître d'œuvre de l'exposition. "Nous sommes ravis de voir que cette exposition permettra d'ouvrir un dialogue entre la Chine et l'Occident".
Les bandes dessinées de poche, ou lianhuanhua, ont été publiées pour la première fois dans les années 1920 et étaient une source majeure de divertissement public. Dans les années 1950 et 1960, ils ont même été utilisés pour faire connaître les politiques gouvernementales, en particulier pour les personnes qui ne pouvaient pas lire. Les premières bandes dessinées présentaient des légendes folkloriques et des personnages d'opéra. Des illustrateurs notés ont été rédigés pour le travail. L'apogée des bandes dessinées a pris fin pendant la «révolution culturelle» (1966-76), mais ils ont commencé à revenir à la fin des années 1970 jusqu'au milieu des années 1980. Les bandes dessinées étaient généralement vendues dans des kiosques à Shanghai, mais l'ère numérique rapide a détourné l'attention de nombreux jeunes lecteurs du genre. "Nous espérons que cette série de plus de 30 œuvres basée sur des mythes chinois va relancer les bandes dessinées dans un cadre contemporain"
“Pangu Creates the New World” by Feng Yuan part of the project “Creating the World — Literary and Artistic Works on Chinese Creation Myths.”
Axing Xi est un peintre au style unique adepte de l’art folklorique chinois, travaillant tout en nuances et avec une inclination marquée pour le mystère. Une des légendes contées en image est celle de la création des humains par Fuxi et Nuwa.*
Les deux divinités mythiques Fuxi et Nuwa quittent en volant les montagnes de Kunlun pour aller vers l'ouest, région désolée et désertique à l’époque. Nuwa pense que ce serait merveilleux s'il y avait des humains à son image dans ce monde. Elle ramasse alors de la boue de ses mains fait une copie d'elle-même, d’après son reflet dans un ruisseau. Miraculeusement, une figure de d’argile apparaît. Nuwa prend alors une branche de rotin vert, la plonge dans la boue et agite la branche. Des milliers de gouttes de boue sont projetées dans toutes les directions à travers les airs. Nuwa tenant le bras de Fuxi vole dans le ciel. Comme l'air dans leur sillage est tombé sur les gouttes de boue, chacune est immédiatement transformée en être humain. Tous les humains descendent alors au sol et se dispersent dans toutes les directions pour constituer les premiers ancêtres de différentes tribus humaines.
Ici la légende de la princesse Leizu qui enseigna le tissage de la soie.
Xiaofang Ding peintre créatif s’attache lui à apporter une touche de modernité à la peinture traditionnelle chinoise.
du 5 au 23 mai, être visitée en famille
ils ont intérêt à amener leur carnet de dessin car ils peuvent sûrement y puiser de l'inspiration pour leurs propres œuvres picturales!
* https://matricien.org/patriarcat/mythologie/nuwa/
China Cultural Center in Brussels
Faites entrer les lauréats… (affiche)
La ville de Paphos, un petit port tranquille de la côte sud-ouest de Chypre, a été choisie comme capitale européenne de la culture 2017 (avec Aarhus au Danemark).
Aussi ai-je décidé tout au long de cette année de vous présenter quelques aspects de la culture chypriote, riche de tant de siècles passés, variée de tant de cultures brassées.
Et comme le thème général retenu « Lier les continents, créer des ponts entre les cultures » me semblait fort à propos pour un site comme le nôtre…
Dans cette introduction je vais m’attacher à mettre en avant quelques peintres et sculpteurs chypriotes.
Yiota Ioannidou
Sol Alter
(bronze, 2016)
Ouvrons notre horizon…
Avec cette sélection forcément suggestive, et ce à plusieurs titres.
D’abord, seulement huit artistes contemporains ont été retenus par un jury dont je ne faisais évidemment pas partie.
Ensuite par le thème imposé pour cette exposition inaugurant l’année culturelle « Au départ les mythologies. »
Enfin, une seule œuvre par artiste était choisie.
Un choix restreint donc, mais qui a le mérite d’être celui des Chypriotes eux-mêmes.
Cette exposition montre toute la vigueur de l’art chypriote. Chypre, un pays meurtri certes, toujours envahi, mais qui sans cesse se relève et avance. Chypre creuset de tant de cultures. Chypre d’aujourd’hui et de toujours.
Voici donc les artistes et les œuvres honorés pour commencer la saison culturelle...
Christos Foukaras (né en 1944). Après s’être formé à l’architecture à Nicosie, il poursuit ses études à Moscou, se spécialisant dans l’art décoratif (fresques, mosaïque, peinture murale, vitrail…) avant de s’installer quelque temps à Athènes puis de retourner à Chypre comme professeur d’art plastique, pour enfin pouvoir se consacrer à plein temps à son art.
Les aïeux
Tradition et modernité. Des demoiselles d’honneur qui ne sont pas sans rappeler les Ménines telles qu’interprétées par Picasso.
(huile sur toile, 1996)
Christos Christou (né à Paphos en 1950). Diplômé des Beaux-Arts de Paris, son cœur maintenant balance entre notre capitale et l’amour de son pays. Il mêle avec bonheur influences byzantine, Renaissance et modernisme.
La naissance d’un ange
(acrylique et feuille d’or, 2010)
George Kotsonis (né en 1950). Peintre de la grâce et du bonheur, il a étudié à Londres puis en Chine et à Prague avant de retourner vivre et travailler à Paphos.
Léda et le cygne
(acrylique, 2014)
Léda, un thème éternel, ici revisité avec élégance et sensualité.
Léda, épouse du roi de Sparte Tyndare, se baignait toute nue dans le fleuve Eurotas, quand un cygne s’approcha. Tonnerre ! C’était Zeus en personne ainsi métamorphosé qui déjà s’échauffait. Zeus, tout feu, tout flamme, qui faisait flèche de tout bois en ce temps-là, ne tarda pas à s’unir à Léda. Un œuf elle trouva, d’où éclot la Belle Hélène. Et d’un même élan conçut les Dioscures (« fils de Zeus »), les jumeaux Castor et Pollux.
Andras Charalambides (né en 1939). Après s’être orienté vers une carrière sportive dans une école de gymnastique d’Athènes, il bifurque et entre à l’Académie des Beaux-Arts de la ville. Il s’installe à Paphos où il adopte un style abstrait jusqu’à l’invasion turque de 1974. Il complète alors sa formation à Redding en Angleterre avant de retrouver la mythologie grecque et l’art byzantin comme sources d’inspiration et vivre paisiblement le reste de sa vie.
Le secret de l’Oracle
(acrylique et feuille d’or, 2005)
Andy Hadjiadamos, dit « Adamos » (1936-1960). Peintre, sculpteur, graveur et auteur né à Paphos. Il étudie en Afrique du Sud avant de retrouver son pays fin 1972 pour le quitter pendant les évènements tragiques de 1974. Il revient en 1980 s’installer dans sa ville natale. Si sa sculpture est imprégnée du travail de Henry Moore, sa peinture de l’art brut d’un Dubuffet, on sent ici l’influence prépondérante d’un Gauguin ouvrant ses bras au monde, ou d’un Munch.
L’homme jaune
Pacifique et rédempteur
Ecoutez son cri contre la Ligne Verte
(peinture sur bois, 1999)
Costas Economou, né en 1925. Il s’est formé à Morfou (aujourd’hui Güzelyurt dans Chypre occupé) puis à Londres avant d’enseigner à Nicosie. C’est un artiste réputé qui privilégie l’aquarelle sans pour cela dédaigner l’huile.
Le royaume des oiseaux
A la manière de Chagall, un rêve en couleurs.
(huile sur toile, 1999)
Stass Paraskos (1933-2014). Formé à Leeds. Influencé aussi bien par l’art byzantin que par celui d’un Matisse ou d’un Gauguin, qui décidément laissa son empreinte sur les îles.
Printemps païen
(huile sur toile, 1968)
A ces sept peintres d’aujourd’hui s’ajoute la présentation d’une sculpture fort symbolique de Kypros Perdios.
Phoenix, oiseau mythique (albâtre gypseux, 1983)
Né d’un volcan, toujours occupé, humilié, écartelé, brûlé, Chypre à chaque fois renait de ses cendres et se régénère. Même si, comme l’écrivait Albert Camus*, devait revenir « l’heure des martyrs, aussi inlassables que l’oppression, et qui finissent par imposer à un monde indifférent la revendication d’un peuple oublié de tous, sauf de lui-même. »
Hors les murs, deux œuvres de Yiota Ioannidou récemment installées ont été immédiatement adoptées par la population locale. La première, Sol Alter, accueillie comme étant « La Dame qui veille sur le port de Paphos. » Au pied de la seconde, j’y ai vu des messages de paix et de fraternité déposés par les passants.
Le petit pêcheur
(bronze, 2016)
Yiota Ioannidou (née en 1971) est une jeune artiste formée à Athènes et habitant Paphos. Un talent multiforme à l’étonnante maturité.
Puisse cet article vous donner l’envie de découvrir ce pays, et Chypre retrouver, avec cette génération d’artistes, son Âge d’or.
Un des thèmes annexes pour 2017 est « Mythes et religion » (avec « Voyageurs du monde » et « Scènes du futur »), voilà donc un axe que je me propose d’emprunter tout au long de cette année. Nous aurons donc d’autres rendez-vous sur l’île d’Aphrodite…
Michel Lansardière (texte et photos)
* Chypre était alors possession britannique. Camus réclama en vain la grâce de Michalis Karaolis dans un article pour L’Express du 6 décembre 1955, « L’enfant grec », qui fut pendu le 10 mai 1956. Il avait 23 ans. Devenue République indépendante en 1960, et malgré son intégration à l’Union européenne depuis le 1er mai 2004, Chypre reste amputé de 37% de son territoire, comme anglaisé d’une partie vive occupée par les Turcs depuis 1974. Sa capitale, Nicosie, est toujours coupée en deux…
Nota : le journal Beach News de Paphos m’a été bien utile pour la rédaction de plusieurs des courtes biographies données ici.
War and Judgment on Earth facing …Eternity
Première mondiale à la Cathédrale des Saints Michel et Gudule : voici l’accrochage d’une impressionnante tapisserie sur le livre de l’Apocalypse (exposée du 28.04 au 15.06 2017)
20 ans de préparation
36 m de long, 3 m de haut
22 chapitres de l’Apocalypse
14 tapisseries
240 couleurs différentes de fils
3 éclairages différents
Jusqu’au 15 juin, la cathédrale de Bruxelles accueille en première mondiale la « Tapestry of Light » de l’artiste australienne Irene Barberis. Elle fera ensuite le tour des musées et cathédrales de UK et d’Europe. L’accès est gratuit.
Sur 36 mètres, c’est tout le livre de l’Apocalypse qui est évoqué en 14 pièces tissées en Belgique. Cette tenture est le résultat de plus de 10 ans de recherche technologique et artistique.
Irene Barberis est une artiste australienne munie d’un doctorat, enseignante, chercheur et conférencière
à la University RMIT School of Art. Elle est la directrice fondatrice du «satellite» de recherche internationale
d'art Metasenta ®, le Centre mondial pour le dessin. Elle est co-directrice de la Galerie contemporaine
Langford120 à Melbourne. Elle donne des conférences sur la peinture dans le programme School of Art
de Hong Kong à Hong Kong Art School et a été critique internationale pour le « Rome Art Program »
basé à New York pendant 3 ans.
Elle a lancé de nombreux projets artistiques internationaux en collaboration avec des artistes et des institutions au Royaume-Uni, aux États-Unis, au Moyen-Orient et en Extrême-Orient, organisant d'importantes expositions à travers le monde. Madame Barberis dirige les publications de Metasenta Publications, une initiative d'édition internationale pour artistes, architectes, poètes et designers.
En tant qu’artiste d'installation et de nouveaux médias, elle a organisé plus de quarante expositions individuelles en Australie et à l'étranger et a participé à quatre-vingt expositions groupées. Elle est impliquée dans de nombreuses collections publiques et privées, y compris la Collection Sol Lewitt, à New York. Irene se consacre également à l’art dans les espaces publics et remporté de prestigieux projets en Australie et au Royaume-Uni.
Née à Chiswick, en Angleterre, en 1953 elle déménage en Australie en 1956. Elle grandit dans la campagne rurale de Victoria, suit des cours de ballet à l'âge de trois ans, forcée d’abandonner après une blessure à l'âge de neuf ans. Après un diplôme d'études supérieures au Collège victorien des arts de Melbourne, elle reçoit la bourse 1979 de Keith et Elizabeth Murdoch de la VCA. Irene Barberis vit et travaille à Paris pendant trois ans, et revient en Australie en 1982 où elle épouse le sculpteur australien Adrian Page en 1984. Elle termine un MFA au Collège victorien des Arts, à l’Université de Melbourne en 1994 et un doctorat sur «Éléments abstraits et figuratifs de l'apocalypse et ses représentations» en 2000.
En effet, quand en 1998, l’artiste découvrit et tomba en extase devant …la Tapisserie de l’Apocalypse à Angers, elle eut un choc et décida de relever un défi vieux de 500 ans. Dans la « Tapestry of Light », son œuvre spectaculaire qui représente un travail de près de 10 ans, l’art de la tapisserie d’antan selon les techniques des Gobelins se voit réinterprété grâce aux progrès récents de l'activité photonique à l'échelle nanotechnologique. On sait que les manuscrits et les tapisseries utilisant des techniques anciennes offrent différents degrés dans l'éclat de leurs pigments: qualités qui ont changé, à notre époque contemporaine, en concepts scientifiques de teinte, de saturation et d'intensité. Dans La « Tapestry of Light », il y a une rencontre troublante. L'art et la science de la lumière sont explorés du point de vue de la collaboration entre un artiste pratiquant qui interprète l'histoire de l'illumination de l'art dans un contexte contemporain et le scientifique qui s'intéresse aux matériaux et aux systèmes photoniques. Irene Barberis joue sur les croisements de lumières de sources différentes pour mettre en évidence la dramatisation de l’expérience spirituelle ou poétique. Il y a un recours conscient aux jeux de lumière naturelle, de lumière phosphorescente, fluorescente, luminescente, celle induite par rayons ultra-violets et d’autres techniques hautement sophistiquées fait partie de la ré-imagination de l’œuvre d’art. Celle-ci, selon les mises en éclairage, dévoile des aspects particuliers « mis en lumière » au sens propre, et des profondeurs mystérieuses. Il y a peut-être aussi, qui sait, l’effet de la lumière spirituelle qui induit l'action ou l'état de grâce…
Disons en passant, que cette nouvelle alliance de l’art et de la science constitue un symbole de taille : elle présente une innovante proposition de paix entre spiritualité et recherche scientifique qui s’unissent dès lors dans une recherche commune du mystère de la perfection. La « Tapestry of Light » relie l'Art et la Science de la Lux, Lumen, Illumination et le Photon. Il faut savoir que cette tapisserie (36 m de long sur 3m de haut) a été tissée en Belgique en 2014, aux ateliers de tapisserie de Flandres, ceux qui ont notamment fabriqué des pièces majeures de grands artistes tels que Chuck Close (Etats-Unis), Grayson Perry et Craigie Horsfield (Royaume-Uni).
En effet, deux principes sous-tendent la démarche novatrice de l’artiste : Einstein établissait clairement «le mystère comme l'origine commune de l'art véritable et de la vraie science», tandis que le philosophe allemand Karl Kraus note que «la science est une analyse spectrale. L'art est une synthèse légère ». Conçue et orchestrée par une femme, cette incomparable « Tapestry of Light » rejoint donc la lignée d'œuvres d'art qui mettent en scène les textes de l’Apocalypse.
"Cette tapisserie sur l'Apocalypse parle de la fin du monde, mais aussi de la vie après, d'une ville future, parce qu'il y a beaucoup de choses qui se passent après la fin du monde que l'on connaît", commente Irene Barberis. "L'idée d'une fin à ce monde est avec nous à chaque fois qu'on lit un journal: l'environnement, les guerres, les réfugiés... Mon travail porte sur la guerre, mais aussi sur l'espoir, la vie et l'éternité. Il y a une transition de la réalité que l'on connaît aujourd'hui à une autre réalité. Mon message au public est un appel à la prudence, car ce que nous expérimentons aujourd'hui est l'Apocalypse, mais il y a aussi de l'espoir."
On pourrait passer des heures à analyser les mille et un détails de l’œuvre qui illustre les 22 chapitres de l’Apocalypse selon Saint-Jean, tant le foisonnement des symboles bibliques et les connotations artistiques, faisant allusion à 500 ans d’histoire de l’art occidental abondent. Les références fourmillent : elles sont issues de vieux manuscrits (Beatus de Silos 1109), elles se greffent sur des œuvres anciennes de Giotto, Dürer, Le Greco, les 21 images de L’Apocalypse d’Angers, et l’art médiéval. Le choc des images créées par cette humaniste des temps modernes avec celui des paroles bibliques entrelacées est fait pour projeter de nouvelles illuminations. Des détails humoristiques ou parodiques de la vie domestique moderne courent en filigrane tout le long de l’œuvre : nous sommes des êtres réels de chair et de sang se nourrissant le matin de céréales et de lait… ou du moins dans les pays anglo-saxons. On déambule en commençant à gauche du chœur pour faire le tour de celui-ci et revenir vers le point de départ. L’Alpha et l’Omega.
Dès la première tenture, on est pris dans une sorte de tornade artistique envoûtante, une tempête de mots, de couleurs et de fibres pour se glisser, pas à pas, mot à mot, point par point vers le règne de l’abstraction et du mystère. Si beaucoup de scènes évoquent la folie humaine sauvage, et prévoient même la mort des océans qui se mettent à brûler, la création de cette œuvre monumentale fait partie d’une progression, à la façon du roman anglais allégorique The Pilgrim's Progress from This World to That Which Is to Come de John Bunyan, publié en 1678.
C’est une recherche très humaine de partage et d’illumination, soutenue par le pari de la confiance et la foi en l’Espérance transmise par les différents textes bibliques. C’est à la fois le tissu de nos rêves, celui de nos liens, celui de nos espérances. La dernière image de l’œuvre présente une synthèse imaginaire de la perfection : la Jérusalem transparente sous forme de diamant imaginaire, synthèse de toutes les perfections artistiques, scientifiques, mathématiques et spirituelles. Un nouveau rêve d’alchimiste? La pierre philosophale d’une alchimiste en l’occurrence! Sa visite commentée à 10 heures, ce 29 avril 2017, a été un extraordinaire moment de grâce, un lumineux accompagnement vivant, joignant l’alchimie du verbe à celle du geste. L’aboutissement de l’épopée picturale est un message de paix et d’espérance saisissant, célébrant la lumière sans laquelle il n’y a pas de vie. Une demi-heure plus tard Irene, cet ange artistique d’une incroyable envergure, et d’un talent éblouissant rejoignait l’aéroport…
https://www.tapestryoflightproject.com/
https://www.facebook.com/media/set/?set=oa.1338680426212399&type=1
Guernica, mi amor
de et par : José Perez
José Perez est traducteur, poète-partisan, et conférencier. Nous avons applaudi son précédent spectacle en octobre dernier au théâtre de la Clarencière. Il mettait en scène la poésie de Garcia Lorca, et ce fut un triomphe! La salle, ce soir, est à nouveau comble. « Le rôle des poètes, c’est d’y croire ! »
José Perez est né dans le même quartier de Malaga en Espagne que Picasso. Cela fait 20 ans qu’il méditait de rendre hommage à Guernica, cette toile mythique qui fut une révélation pour lui dès le plus jeune âge, une toile qui fut le témoignage visuel le plus éloquent et le plus fort de l’horreur absolue de la guerre, tant défensive qu’ offensive. Pablo Picasso dit lui-même de ce manifeste : « Cette peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre, offensif et défensif contre l’ennemi. » Elle symbolise la colère ressentie par le peintre à la mort des innombrables victimes tombées le 26 avril 1937, un jour de marché, à16h30 sous le feu des escadrilles allemandes à la demande du Général Franco. On se souvient de cette célèbre anecdote qui raconte qu’Otto Abetz, alors ambassadeur du régime nazi à Paris, aurait lors d'une visite d’atelier devant une photo de Guernica demandé à Picasso avec colère: « C'est vous qui avez fait cela ? » Et Picasso aurait répondu bravement: « Non… c'est vous ! »
José Perez ne croit pas aux tables qui tournent ni à aucune bondieuserie, mais il croit dans le Diable et conte l’histoire du Mal : «Et puis le diable s’en était pris à mon village », raconte-t-il, alors que l’innocent village basque préparait une noce ! La toile fut exposée il y a 80 ans au Pavillon espagnol de l'Exposition internationale à Paris en 1937. On ne peut passer cet anniversaire sous silence!
C’est l’occasion pour José Perez de réunir sous sa plume les deux figures tutélaires espagnoles :
« A ton chevalet, peintre, à ta muse, poète,
Dessine-nous le jour, invente-nous la fête,
La surface de ta page blanche, inondée de vermeil,
La surface de ta toile blanche, inondée de soleil,
Que luisent tous les feux tournés vers l’Empirée,
Que nagent les dauphins vers le port de Pirée. »
Aujourd’hui, les bombes tombent de plus en plus près, et de plus en plus souvent. Convoquer Picasso après avoir invité Garcia Lorca pour condamner le franquisme est une évidence. Il faut prendre les armes poétiques et artistiques pour confronter le Mal absolu. Pour que les gens se rendent compte des relents de la bête immonde qui se réveille… partout dans le monde en 2017. Elle est parmi nous.
Il ne faut plus la faire, la guerre. C’est écrit dans le sang de la terre, « quand il n’y a plus de ciel pour bercer la campagne, quand il n’y a plus de feu pour chauffer l’Espagne ! » Quand des noms d’hommes sont mis en répertoires, quand on se tient au mur sous le bruit des sirènes. Quand la chemise est maculée de sang. Et que les hommes se sont enfuis dans la forêt. Il y a tant d’hommes et de femmes accablés et torturés dans les cachots pour avoir condamné le silence. Il y a tant d’enfants sacrifiés dans le grand saccage.
« …Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent… »
Très habilement, José Perez mélange le terreau des grands poètes français Aragon, Apollinaire et d’autres encore, l’argile féconde de vastes musiques classiques et la tourbe légère de chants traditionnels espagnols, le feu de sa propre passion poétique, la voix de la Résistance, la guitare, le talon, le bâton, la berceuse de Brahms et la valse de Chostakovitch pour nous émouvoir et nous faire entrevoir l’avènement de la démence et l’épouvantable suicide de la Liberté.
« Picasso colombe au laurier
Fit Guernica la mort aux cornes
Pour que dans un monde sans bornes
La nuit ne vienne plus jamais
La nuit ne vienne plus jamais
La nuit ne vienne plus jamais » – Jean Ferrat
« Je n'ai jamais considéré la peinture comme un art de simple agrément de distraction. Ces années d'oppression terribles m'ont démontré que je devais combattre non seulement pour mon art mais aussi pour ma personne ». Pablo Picasso
µ https://www.laclarenciere.be/
µ José Perez prépare un autre spectacle à La Clarencière, pour le mois de Juin : « le Carré Long » La franc-Maçonnerie a 300 ans. Avec Myriam Kaminski, Kate Rizzi, Cécile Rigot, et François Mairet. Les 23 et 24 juin 2017
µ Rejoignez-nous! https://www.facebook.com/groups/364779173602534/
µ Et profitez-en pour plussoyer la page de l'auteur de cet article où vous retrouverez quelques photos du spectacle! https://www.facebook.com/plusde500billetsdeDHL/
"Vous désirez quelques notes biographiques sur moi et je me trouve extrêmement embarrassé pour vous les fournir ; cela, mon cher ami, pour la simple raison que j'ai oublié de vivre, oublié au point de ne pouvoir rien dire, mais exactement rien, sur ma vie, si ce n'est peut-être que je ne la vis pas, mais que je l'écris. De sorte que si vous voulez savoir quelque chose de moi, je pourrais vous répondre : Attendez un peu, mon cher Crémieux, que je pose la question à mes personnages. Peut-être seront-ils en mesure de me donner à moi-même quelques informations à mon sujet. Mais il n'y a pas grand-chose à attendre d'eux. Ce sont presque tous des gens insociables, qui n'ont eu que peu ou point à se louer de la vie."
La Salle des Voûtes du théâtre le Public accueille un portrait éclaté de Luigi Pirandello (1867-1936) à l’aide de figures emblématiques issues des nouvelles de l’écrivain sicilien : « Je rêve, mais peut-être pas », « Ce soir on improvise », « L’homme à la fleur à la bouche ». Une petite suite de cauchemars interprétée avec talent de rêve par un trio de comédiens capables d'allumer et de projeter à merveilles ces personnages de l’absurde : Axel de Booseré, Jean-Claude Berutti (mise en scène et adaptation ), Christian Crahay (en alternance avec Lotfi Yahya) et Nicole Oliver.
Une fois donnés en pâture au public, les thèmes iront se balancer librement dans son imaginaire, lui qui devient, s’il se laisse faire, créateur à son tour, tout autant que l’est le metteur en scène lorsque celui-ci construit sa rencontre avec le texte. Le fil rouge c’est un outrecuidant chef de troupe à la Berlinoise nommé Hinkfuss.
Théâtre dans le théâtre, que voit-on sur l’écran noir de nos nuits blanches ? L’amour, la jalousie, la possession, la dispute. Le mystère ou le rêve dans la voix de cette femme voilée comme dans les tableaux de Magritte ? L’inversion des rôles puisque c’est Luigi qui fut en butte à la jalousie morbide de sa femme ? Un credo : l’énergie de l’acteur libère les doutes, les mensonges, les tricheries, la cruauté. La tyrannie des conventions sociales. La fourbe tyrannie du mâle : « Il voulait lui faire une surprise…» La robe de strass couleur rubis alanguie sur le tapis vert de la salle de jeu ou sur la méridienne verte flanquée d’un pouf répond mollement, absente de l’embrasement, tout à son désir d’un collier de perles et à ses rêves d’amants. Le drame couve. Soudain la comédienne prend le pouvoir et explose les artifices…à la manière d’Alice.Lewis Carroll? Déchaînement!
Dans la tentative d’une représentation impossible, il n’y a néanmoins pas de couture apparente entre les pièces accolées du jeu de miroirs…comme chez Picasso et les autres de la même époque.
Heureux qui communique : on suit sur l’écran noir et blanc le visage, le regard de Mommina, devant une fenêtre ouverte sur un paysage, Magritte encore. Rico, Le mari qui la séquestre referme la fenêtre. Il ne veut plus qu’elle pense ou pire, qu’elle rêve. Prisonnière, elle lui échappe même s’il la brutalise. Ses sœurs, restées libres font scandale: elles chantent en public. Pendant qu’elle raconte à ses deux fillettes, l’histoire de cet opéra qu’elle chantait avec sa famille, des souvenirs heureux ressuscitent sous forme de marionnettes. Bonjour les géants de la Montagne ! Elle se met à chanter et meurt devant ses filles, sous l’émotion qui l’étouffe. Rico Veri la découvre morte et repousse le cadavre du bout du pied. Cruauté : Il l’a trompée en allant seul à l’opéra voir l’œuvre chantée par une de ses jeunes sœurs, Totina restée libre. Paradoxe de la comédienne : elle n’a plus de souffle et n’arrive pas à mourir… Le cauchemar ! Poignant.
On s’égare encore, l’ombre de Delvaux ou de Marceau se profile-telle ? Chargé de cadeaux pour sa famille, un personnage plein de certitudes a raté son train de trois minutes. Il rencontre ce malade qui porte une fleur funeste à la bouche…dévorante comme le nénuphar dans l’Ecume des jours. Il a besoin de s’attacher à la vie de gens qu’il ne connaît pas, pour ne pas mourir. « Moi Monsieur, je m’accroche à la vie par l’imagination. J’imagine la vie des gens que je ne connais pas et c’est bon pour moi ! La vie on l’oublie quand on la vit … mais la vie Monsieur … la vie … surtout quand on sait que c’est une question de jours … » Cauchemar. Edgar Poe es-tu là ? Non c’est Pirandello, Luigi de son prénom. Paradoxal de son surnom.
Freud enfin, es-tu là ? Ou Marcel? "Dans les personnes que nous aimons, il y a, immanent à elles, un certain rêve que nous ne savons pas toujours distinguer mais que nous poursuivons."Le temps retrouvé. Voilà la visite de la mère, morte, coiffée d’un large chapeau impressionniste voilé. Scène où le fils pleure sa propre mort en elle. Désespoir de la solitude. Pour elle il ne sera plus jamais le fils ! Elle ne peut plus jamais le penser comme il la pense! Bouleversant.
Très beau théâtre de réflexion sur l’incommunicabilité, vibrant de références, foisonnant de vitalité scénique et esthétique… toutes choses qui ne peuvent laisser indifférent. Art is life. Dixit Kandinsky.
https://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=461&type=1
Bel exemplaire d’éventail chinois
Outre Paris, la Normandie, le Beauvaisis, la Chine, autres maîtres incontestés qui excellent dans un travail de patience infinie (sur des éventails en fils d’ivoire par exemple), on trouve aussi une production de qualité chez les éventaillistes allemands, les ateliers d’ivoiriers d’Erbach (Hesse) s’en étant fait une spécialité, ou autrichiens, avec Vienne. Et leurs articles sont prisés dans le monde entier, particulièrement, comme on le sait, en Italie, en Espagne ou au Japon.
Japon, pays de longue tradition, les plus raffinées aimaient en arborer, comme la courtisane et poétesse Ono no Komachi, du moins ainsi la représenta-t-on (c’était ma contribution au geishavoir, « Car mon bonheur est moqueur ! », Nietzsche).
Courtisane sous la neige, 1831
Estampe sur éventail, Uchiwa-eban, Utagawa Kunisada
Geisha
La rieuse geisha, coquette Japonaise,
Agite son ombrelle et son éventail blancs,
Se pâme au clair de lune avec des frissons d’aise,
Et pare son peignoir aux larges plis flottants,
De chrysanthèmes blancs ; coquette Japonaise.
Fernand Prévost de Belvaux, 1903
Portrait réalisé au XVIIe d’Ono no Komachi (825-900)
Musée d’art oriental Edoardo Chiossone (Gênes)
Au XXe siècle, la vogue pour l’éventail a décliné, remplacé par le vulgaire ventilateur, « un bel aérateur, pour bouffer les odeurs » (Vian), relégué au rang de vil support publicitaire. Avant de reprendre sa place dans les défilés, avec ses strass et ses paillettes, comme dans la rue, des créateurs contemporains lui apportant un nouveau souffle. Eternel recommencement, il revient dans l’air du temps...
Plus léger qu’Eole ;
Il naît et s’envole,
Renaît et s’enfuit.
Julien Offroy de La Mettrie (1709-1751)
Street art à Montmartre
Strass et paillettes font se pâmer les grisettes
« Dans la jungle de la solitude,
un beau geste d’éventail peut faire croire à un paradis. »
André Breton (1896-1966)
Chérubins pourvoyeurs de doux alizés.
Un bruissement d’aile pour un dernier froufrou…
Avant que le vent mauvais de l’automne ne souffle, si vous voulez bien déposer quelques mots avant que ces feuilles ne s’envolent.
Avec ces cinq Fantaisies j’espère avoir montré que l’objet était porteur d’art et de poésie, maintenant autant en emporte l’évent…
Un atelier de tabletier (Méru, Oise)
Boutons, dominos, éventails, tabletterie
Bonbons, caramels, esquimaux, chocolat
Boutons et petits articles (coffrets, peignes, damiers…) de la mode parisienne assuraient l’ordinaire du tabletier, occupaient les moins talentueux.
Nacre, écaille, os, bois d'ébène, corne, ivoire…
Formica, inox, compressé, linoléum, bakélite…
Mécanisation, standardisation, délocalisation, consommation…
Besogneux, ouvriers, gagne-petit, traîne-misère… qui se sont révoltés en 1909 à Méru et dans ses environs. Une guerre des boutons qui durera trois mois, durement matée par la troupe.
Complainte du progrès, les arts ménagers auraient-ils chassé les arts décoratifs ?
Les espèces protégées pour un océan de plastiques…
Industrie du luxe contre production de masse ?
Lansardière Michel (texte et photos)
P. S. : si vous voulez retrouver rapidement mes quatre premiers articles consacrés à l’éventail, avec au total 40 photos originales, avec des modèles qui vont de l’Antiquité à nos jours :
La surprise de l'été :
https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/la-surprise-de-l-t-art...
Je sème à tout vent :
https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/je-s-me-tout-vent-fant...
L'art, la matière et le savoir-faire :
https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/l-art-la-mati-re-et-le...
Vingt fois sur le métier :
Faites-en ainsi déferler - ouvrir lentement degré par degré en parlant d’un éventail - les cinq volets. Au contraire, lassés par ce billet long comme un paravent, vous pourrez préférer décharger, les ouvrir brusquement en les faisant claquer comme pour un éventail.
Le Festival Artonov vous ouvre ses portes dans des lieux d'exception!
Ce riche festival interdisciplinaire mêle musique et arts visuels, musique et architecture, fashion design, danse et théâtre, des Arts regroupés dans une démarche interdisciplinaire, sans jamais négliger leur individualité. Il trouve son inspiration dans la période Art Nouveau d'abord, Art Déco ensuite, périodes où l'art était appelé à enrichir et faire évoluer nos société.
Jeudi 6 octobre, 20h
Première à la Villa Empain avec "La Route de la soie". L'Osuna Trio ( Thomas Baeté, Emre Gültekin et Raphaël Decock ) et l'artiste de sable Colette Dedyn emmèneront le public sur les traces de Marco Polo.
Pendant ce concert, vous entendez ce que Marco Polo aurait pu entendre lors de ses voyages en direction de l’est à la fin du Moyen Age.
Trois personnalités musicales se rencontrent ici: Thomas Baeté, joueur de viole médiévale et chanteur de paroles de troubadours, Emre Gültekin, virtuose du saz, qui a grandi dans la tradition de la musique anatolienne, et Raphaël Decock dont la fascination pour les chants diphoniques et le jeu du chatkan ramène en vie les steppes de l’Asie centrale.
Au total, 9 spectacles où jeunes et professionnels confirmés de renommée internationale seront mis en présence.
La « série FRINGE » proposera 3 performances de jeunes artistes/étudiants en Art. Les performances seront produites autour de l’installation d'une maison de Jean Prouvé, dans l’espace du CAB le Contemporary Art Center, bâtiment Art Déco dédié à l’art contemporain.
La « série ARTONOV » prévoit 6 spectacles d’envergure en collaboration avec des artistes et ensembles que nous sommes pressés de découvrir. Le dimanche, c'est Eliane Reyes qui sera la glamour pianist de cette seconde édition du festival. Ce très original concert-conférence sans entracte aura lieu au Musée van Buuren, durant lequel la pianiste et l’écrivain Yann Kerlau redécouvriront l’histoire de la mode associée aux compositeurs de l’époque Art Nouveau et Art Déco.
Un concert ponctué d’anecdotes alliant mode et musique, au cours duquel Eliane Reyes interprétera des œuvres de Chopin, Saint-Saens, Massenet, Fauré, Debussy avant de terminer par ‘Printemps’ de Nicolas Bacri.
Retrouvez le programme détaillé sur www . festival-artonov.eu .
C'est un réel plaisir et un honneur d'annoncer ce festival pour Arts et Lettres qui a déjà été invité l'année dernière, lors de son lancement. Ce festival est à la fois innovation, quête d'excellence et oeuvre de transmission.
Vincenzo Casale son directeur artistique et fondateur, a été invité ce matin par Xavier Vanbuggenhout sur la Première dans «Entrez sans frapper » pour vous parler de son projet ambitieux où l'art et l'humain sont si solidaires.
http://www.rtbf.be/auvio/detail_entrez-sans-frapper-l-integrale?id=2147945
minute 1h 31 52
La mode est dictée à Paris. C’est à Paris que sont installées les boutiques de luxe. Mais c’est à Dieppe (ivoiriers), et plus généralement en Normandie, ou à Sainte-Geneviève, Andeville, Méru (tabletiers), dans l’Oise, que se font les montures.
Rien que pour celles-ci, de nombreux ouvriers et artistes s’emploient pour obtenir une pièce unique. Débiteurs, Monsieur, pour le gros œuvre, puis façonneurs, polisseurs, découpeurs, graveurs, sculpteurs, ces derniers se trouvant bien évidemment au sommet de la hiérarchie, s’activent. Un teinturier, un doreur, un vernisseur, un joaillier peuvent s’y joindre pour les finitions. De l’ouvrier au maître, la division artistique du travail joue à plein.
Enfin, des peintres, et des plus fameux, interviendront pour embellir la feuille, rehausser le dessin de délicates touches de gouache.
Parmi les peintres spécialisés dans ce délicat travail citons, pour l’exemple, Gustave François Lasellaz (1848-1910) ou Maurice Lenoir (1853-1940).
Mais tous ou presque, de la petite main au grand créateur, longtemps resteront dans l’ombre.
« Je décorais des éventails. »,
Pierre-Auguste Renoir (1841-1919)
Et Gauguin se languissait. Alors lui aussi en orna, et ne devint célèbre qu’après les Marquises.
De leur côté Katsushika Hokusai (1760-1849) ou Utagawa Kunisada (1786-1864) les faisaient rimer en de précieux poèmes visuels en réalisant des estampes sur éventail, uchiwa-eban, pendant les années de disette.
Deux carpes, ca 1833
Dans leur sillage, Monet, Van Gogh, Klimt…
Uchiwa-eban, Katsushika Hokusai (musée Guimet)
Ô temps suspend ton vol, laissez-nous savourer les rapides délices.
Dessin de Félix Anthyme Aubert - ? - (1866-1940),
artiste membre du mouvement nommé, fort à propos, L’Art dans Tout
Ainsi Anthyme sera un peu moins anonyme
Et cependant réunis pour qu’élégantes, starlettes comme midinettes, se sentent transportées d’aise.
On les retrouve aujourd’hui sur les étals de tous les pays.
Ici des modèles venus d’Asie, vus sur… les bords de la Mer Noire, en Bulgarie
Sur un Eventail de Mademoiselle Mallarmé, le poète développant un art épigraphique écrivit :
Vertige ! voici que frissonne
L’espace comme un grand baiser
Qui, fou de naître pour personne,
Ne peut jaillir ni apaiser.
Stéphane Mallarmé (1842-1898)
Le temps et les mots passant :
S’ouvre l’éventail enfoui.
Etais las, restant à t’attendre,
Le temps rongé par le malin.
Des échos se faisaient entendre.
Ensemble ont pris le dernier train.
Suzanne Walther-Siksou,
extrait de Pastiche de Eventail de Madame Mallarmé
A sa manière, Emile Gallé reprit cet art épigraphique sur ses verreries parlantes, affirmant par son savoir-faire porté au plus haut degré que « La matière pour nous est matière à poésie. »
Le vent clair
qu’est-ce donc ?
Quelque chose à aimer
sans lui donner de nom
Bienvenue au vent qui va de l’avant
Je lève ma coupe de vin à sa caresse
Je bois à la santé du vent qui va…
Su Dongpo (1036-1101)
Chiné… à Lyon.
A la santé du vent qui va, donc…
A suivre…
Michel Lansardière (texte et photos)
Retrouvez ici mes trois premiers articles de fantaisies :
La surprise de l'été :
Je sème à tout vent :
L'art, la matière et le savoir-faire :
Merci Suzanne, à qui j’ai emprunté quelques vers. Qu’elle me pardonne d’avoir écorné son poème, Stéphane lui m’a déjà absout pour avoir interverti deux de ses vers dans mon précédent billet.
Sans davantage vouloir crâner, je ne suis pas devenu ékraventuphile, juste fan, le sujet mérite d’être déployé...
Venderosas de rosquillas en un rincon de Sevilla, 1881.
Manuel Wssel de Guimbarda (1833-1907)
Musée Carmen Thyssen, Malaga.
« Manœuvrer un éventail… Les Espagnoles y excellent ;
l’éventail s’ouvre, se ferme, se retourne dans leurs doigts si vivement,
si légèrement, qu’un prestidigitateur ne ferait pas mieux. »
Théophile Gautier (Voyage en Espagne, 1843)
Recién casados, 1905
Ricardo Lopez Cabrera (1864-1950)
Musée Carmen Thyssen, Malaga.
« L’éventail les suit partout, même à l’église où vous rencontrez des groupes de femmes de tous âges, agenouillées ou accroupies sur leurs talons,
qui prient et s’éventent avec ferveur. »
Théophile Gautier (1811-1872)
L’éventail permet à la belle Andalouse comme à l’hirondelle des faubourgs parisiens de se rafraîchir, quoi de plus anodin, dans les chaleurs de l’été, au bal ou aux terrasses des cafés. Mais aussi d’échapper au carcan imposé du chaperon ou de la duègne. En toute discrétion, de solliciter la conversation ou de répondre au larron ainsi émoustillé.
Femme à l’éventail (Après le bal, 1908)
Pablo Picasso
Musée de l'Ermitage, Saint-Péterbourg.
« Nous les Espagnols, c’est la messe le matin, la corrida l’après-midi, le bordel le soir. Dans quoi ça se mélange ? Dans la tristesse. »
Pablo Picasso (1881-1973)
Sans chichi, sans flafla, ni lourd flabellum. Juste un léger, tout petit-petit triangle de tissu avec lequel on joue, qu’on plie et replie, qui déferle et papillonne dans un froufrou de dentelle devant le fringant fripon frissonnant.
Ainsi on pourra, dans le langage tel que codifié au XIXe siècle dont j’extrais ces cinq ou six conseils à la frétillante frivole :
Appeler à se montrer prudent,
en faisant tournoyer l’éventail dans sa main gauche :
Nous sommes épiés
Puis, le mettant devant son visage de la main gauche :
Si nous avions une conversation privée…
Alors, peut-être, l’éventail passant à main droite :
Suivez-moi !
Que déjà elle le porte à ses lèvres !
Embrasse-moi idiot !
Puis, le plaçant sur la joue droite…
Oui !…
Se pâme-t-elle aussitôt, emportée par le vent des soupirs…
… ?
Trop tard ! L’objet des désirs tournant dans la main droite :
J’aime un autre que vous !
Mon Dieu, quelle girouette, direz-vous ! Comme la plume au vent…
Mais que la coquette prenne garde, dans son courroux, de s’en battre l’œil !
Avec pour tout langage
Rien qu’un battement aux cieux*
... Sans ambages, Maupassant, qui connaissait les vertus et ne s’en laissait pas conter par la première bécasse venue, se pavanant, se prenant pour Vénus, inscrivit :
Sur un éventail
… Je n’écrirai rien que mon nom ;
Pour qu’en vous éventant la face,
Votre œil le voie et qu’il vous fasse
Sous le souffle frais et léger,
Penser à moi sans y songer.
Guy de Maupassant (1850-1893)
* Nota : les deux premiers vers sont empruntés à Stéphane Mallarmé (1842-1898)
A la parade, peut-être aurait-il été mieux inspiré s’il avait pensé à un de ses devanciers :
Cinq ou six soupirs, cinq ou six fleurettes,
Cinq ou six : Hélas, je meurs d'amour...
Jean François Sarasin (1615-1654)
Bah, « Dans la douleur, les sentiments se déploient comme un éventail. Ce que l’on vit est terrible, mais décuple aussi les sentiments. »
Marie Deroubaix (1953-2011)
Car « Si les plaisir du corps sont si vifs, quels sont ceux de l’âme ! Je parle de cette tendresse pure, de ces goûts exquis qui semblent faire distiller la volupté goutte à goutte au fond de nos âmes. »
Julien Offroy de La Mettrie (1709-1751)
Passant sur cette page, si cela vous a plu, déposez donc ici un petit mot.
Et retrouvez là mon premier billet à cet accessoire dédié :
Michel Lansardière (teste et photos)
Sans m’éventer, je pense avoir trouvé un sujet rafraîchissant pour cet été…
Et nul besoin pour cela de prendre un ton ombrageux, quand tout ne devrait être que zéphyr.
Mais... qu’est-ce là, qui volète devant vos yeux si doux, faisant écran, certes affriolant, entre nous ?
L’éventail, puisque c’est bien là notre sujet, aurait été inventé en Chine,
Fengbo, comte du Vent.
Chine (province du Fujian, fin XIXe)
Musée des Confluences, Lyon.
mais c’est du Japon que les Portugais l’ont rapporté en 1549.
Eventail (bambou et papier)
Japon (époque d'Edo, XIXe siècle)
Musée des Confluences, Lyon.
En France, on dit qu’il arriva dans les bagages de Marie de Médicis (1575-1642), reine de France de 1600 à 1610, régente jusqu’en 1614.
Hé, c’est qu’en Italie nous avons de toutes ces choses-là dans nos coffres.
Claude-Ignace Brugière de Barante (1745-1814)
Danseuse tenant un flabellum
Figurine de terre cuite, Athènes ou Béotie (région de Grèce centrale),
4e siècle av. Jésus-Christ (musée de Laon)
Pourtant en Europe, l’éventail trouve son origine dans le flabellum, ce grand éventail monté sur une hampe, fait de plumes d’autruche, de larges feuilles palmées ou de plumes de paon, qui déjà servait à aérer pharaon. Que l’on retrouvera encore, agité par un suisse, pour éventer le pontife.
Eventail écran proche de l'antique flabellum
(plumes de paon, Inde)
« Si l’empire appartenait à la beauté et non à la force,
le paon serait sans contredit, le roi des animaux »
Buffon (1707-1788)
Quoi de plus troublant que ces ocelles qui oscillent devant les yeux d’une belle en une valse à mille vents ?
Toutefois, en France, l’éventail ne se répandit qu'au XVIIe siècle, avant d’être l’accessoire indispensable à toute coquette au siècle suivant.
Henriette Louise de Waldner de Freundstein (1754-1802), dans ses Mémoires de la baronne d’Oberkirch, évoque un certain Méré, « éventailliste merveilleux », au faubourg Saint-Jacques, qui jadis fut la « voie sublime des couvents ». Cet artiste « loge dans un taudis ; il peint des sujets à la gouache de telle façon que certainement ni Boucher, ni Watteau n’ont rien fait de semblable. Sa manie est de n’y jamais mettre son nom. »
Selon le temps, le lieu et l’usage, l’éventail servit à attiser le feu, à affrioler, comme arme de défense (taiji shan en Chine, gunsen et tessen au Japon) ou de séduction massive, chasse-mouche ou missive. L’éventail est un langage.
Et « un langage tout muet qu’il est, est d’autant plus dangereux qu’il n’est entendu que par l’esprit, et que l’esprit se plaît à l’entendre. », Jacques Boileau (1635-1716).
Langage codé, à l’instar de celui des mouches (cf. https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/une-journ-e-particuli-re-la-roche-guyon), qui évolua au fil du temps comme le verlan aujourd’hui.
Bon coche, je m’en vais vous guider. Ainsi, au XVIIIe siècle, en toute galanterie :
Cacher, de son éventail fermé, l’œil droit pour demander :
Quand vous verrai-je ?
Puis le porter, toujours fermé, à l’oreille gauche pour signifier :
Gardez notre secret
Les choses avançant, enhardie par tant d’audace,
dissimuler ses yeux derrière ce « paravent de la pudeur » pour dire :
Je t’aime
Voire le porter au cœur :
Je suis à toi…
Ne pas tarder car, ainsi cachée, bailler ostensiblement montrera à l’étourdi trop peu entreprenant qu’il peut s’éclipser :
Vous m’ennuyez !
Ce qu’on appelle maintenant se prendre un vent !
Vous qui auriez juré que la cause de son tourment était de vivre sans amant.
Eventail de la première moitié du XVIIIe siècle.
Gorge d'ivoire, nacre et argent, feuille de parchemin peint à la gouache
(réserves du musée national de la Renaissance, Ecouen)
Il me reste à souhaiter que vous réserverez à ce billet meilleur accueil. Que vous y trouverez :
« Des bons mots, des saillies, quelques étincelles
(l’esprit à sa mousse comme le champagne),
mais plus encore de joie ».
« Et que le goût du plaisir brille dans tous les yeux.
… Que toutes les voluptés viennent tour à tour,
tantôt amuser, tantôt enchanter nos âmes.»,
Julien Offroy de La Mettrie (1709-1751)
Bise à toutes, bon vent à tous !
Michel Lansardière (texte et photos)
L’éventail est aussi et avant tout un objet d’art qui fait appel aux meilleurs artistes et artisans pour les confectionner, ainsi qu’aux matières les plus nobles.
Poursuivons donc notre inventaire…
… sur l’éventaire d’un antiquaire
Et autres souvenirs surannés, comme ce carnet de bal oublié…
Souvenirs d’une marguerite effeuillée
Le moment est donc venu de rouvrir notre magasin des frivolités, de pousser la porte de l’atelier et nous remettre sur le métier.
Les matériaux les plus précieux sont donc employés pour les brins (baguettes), panaches (branches extérieures), bouts ou flèches (la partie supérieure du brin, entre les branches), comme pour la feuille.
Les brins formant la gorge et bouts seront en bois (prunier, citronnier, ébène, santal, palissandre…), en os ou ivoire, en corne, nacre ou écaille de tortue, laque ou vernis Martin, argent ou or, pouvant enchâsser diamant, rubis, topaze.
La feuille pourra être de papier, tissu (taffetas, satin…), peau (vélin, peau de cygne, canepin, cabretille…), dentelles ou plumes, nacre ou ivoire... L’imagination est au pouvoir.
On en trouvera de tout type, écran (fixe), brisé (des lamelles remplacent la feuille), squelette (à brins étroits et peu nombreux), sultane (à bouts décorés), à systèmes (à mécanismes), plié en aile de chauve-souris, palmette, cabriolet, cocarde, plein vol…
On innove et lance sans cesse de nouveaux modèles stimulant ainsi tant les inventeurs que la clientèle.
Curiosité, certains sont même munis d’une lorgnette au théâtre des vanités.
Ah ! voir sans être vue tout en étant admirée…
D’autres, de type carnet de bal, sont munis d’un stylet, niché dans le panache, permettant de noter, au dos de chaque brin, le nom du prochain invité.
Toutefois ne comptez pas sur moi pour en éventer tous les secrets. Je sais rester discret.
Munie de ce hochet,
A toute heure, en tous lieux, la coquette se montre ;
Il n’est point de plaisir où l’on ne la rencontre :
Allez au cours, au bal, allez à l’Opéra,
A la foire, il est sûr qu’elle s’y trouvera.
Charles Perrault (1628-1703)
Les meilleurs artisans d’art seront au travail. Ce sont les tabletiers-éventaillistes, ivoiriers, dentellières, doreurs…
Je ne voudrais d’autre travail
Que d’agiter cet éventail
Pour faire une brise légère
Qui pousserait tout doucement
Le bateau vers un port charmant
Et vous seriez la passagère.
Paul Arène (1843-1896)
Alors,
Cet éventail si c’est lui
Aile tout bas la courrière*
Stéphane Mallarmé (1842-1898)
Il va bientôt pleuvoir bergère
Allons sous ma chaumière…
Et, vous qui à la plage peut-être, profitant des deniers beaux jours, encore vous prélassez, doigts de pied en éventail, postez, je vous en prie, quelques mots sur cette page.
Michel Lansardière (texte et photos)
* Evente doucement la messagère (bienvenus sont les commentaires).
J’ai extrait et inversé ces deux vers de Eventail de Madame Mallarmé.
P. S. : retrouvez ici mes précédents billets autour d'un éventail :
La surprise de l'été :
Je sème à tout vent :
Le vihâra (monastère bouddhique) de Rajamaha, Dambulla
Le bouddhisme s’est donc répandu depuis l’Inde où il est né, au troisième siècle avant Jésus-Christ, et s’est profondément enraciné au Sri Lanka.
L’art du Sri Lanka s’est donc naturellement inspiré de l’art indien. Et c’est particulièrement vrai à Sirigiya où les fresques de la fin du Ve siècle peuvent être comparées à celles d’Ajantâ, datant du Ve au VIIe siècles.
Mais à Dambulla, cet art s’est mêlé d’influences tamoules très marquées. Tamouls qui se répandirent d’Inde du Sud à l’île de Ceylan, particulièrement à l’est et au centre du pays.
D’où un style original, dit de l’ « Ecole kandyenne ».
Dambulla est par ailleurs situé au centre géographique de l’île. Point culminant à 160m au-dessus de la plaine et rayonnant sur tout le territoire. Rangiri, le « Rocher doré », ainsi appelé dans les temps anciens pour ses statues recouvertes d’or, était le lieu tout indiqué pour porter la doctrine. Bien sûr, peintres et sculpteurs, tout à leur vénération, sont restés anonymes, suivant ainsi la voie du renoncement.
Dambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle
Au 1er siècle avant J.-C., au temps du royaume d’Anuradhapura, les moines, qui déjà occupaient les grottes, offrirent leur protection au roi Vattagamani Abhaya en exil. En retour, rétabli sur son trône, il y fit bâtir un temple. Qui depuis ne cessa d’embellir et de rayonner.
Bouddha, lors de ses pérégrinations, fit trois fois halte à Lanka.
Et trois fois par jour battent les tambours en l'honneur de Bouddha.
L’art populaire s’est développé, que l’on retrouve notamment dans les danses et les masques.
Une tradition qui perdure et un rapprochement entre certaines peintures, ces masques, la danse et la musique kandyennes peut être pertinent. Ce que je vais tâcher de démontrer ici.
Avec ces figures de danseuses célestes au masque « princier »…
Les fleurs qu'elles tiennent semblent exprimer la fertilité de la terre.
Dambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle
L'influence tamoule s'y fait sentir.
Dambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle
Les gandharvas, quant à eux, étaient les compagnons des apsaras, musiciens et chanteurs au paradis d’Indra, Seigneur du Ciel, dieu de la guerre et de la foudre, le Svarga. Le Svarga était situé au-dessus du mont Meru, montagne mythique dont, selon la légende, le sommet se serait détaché pour former le… Sri Lanka.
Mais permettez-moi de poursuivre mon interprétation…
Si les masques sri-lankais sont généralement peints de couleurs vives, j’ai préféré photographier ces pièces brutes qui nous paraissent plus authentiques.
... Ou masques grimaçants (démons, des moines et des merveilles)…
L’armée de Mâra, l’esprit du Mal, et ses démons attaquant le Bouddha
Plafond de la grotte principale, Dambulla, XVIIIe siècle.
Asuras ou rakshasas (démons)
Masques traditionnels utilisés dans les danses de démons du sud de l’île.
N’ayez crainte, mes amis… laissez-vous entraîner sur la piste et entrez dans la transe…
« Tel un peintre que terrifie l’effroyable monstre qu’il vient de peindre,
le vulgaire est épouvanté par le samsâra* »
Mahâyânavinsikâ
Danseur masqué (Kandy)
Le pouvoir des charmes sur l’enfer
et sur les 27 démons qui accablent l’humanité.
Ces danses, rythmées au son des tambours et autres percussions (athrabane, pantheru, udekki), visent à s’attirer la bénédiction des divinités protectrices, tout en luttant contre les influences maléfiques.
Rites de conjuration issus d’un fonds ancien accordé aux usages bouddhiques qu’accompagne une musique aux motifs, là aussi, répétitifs, organiques, à la force hypnotique.
Instruments traditionnels, déjà présents dans les festivités de la Cour**, et danses exécutées par les hommes. Ces dernières s’ouvrent aujourd’hui aux femmes.
Formellement, on peut m’objecter qu’un septième précepte bouddhique veut que l’on s’abstienne de danse, spectacle, musique et chant. Qu’il est donc peu probable que ceux-ci aient influencé la peinture d’un monastère. Mais, outre que je ne suis pas un spécialiste, il n’entre pas dans les cinq règles de base du bouddhisme (ne pas nuire aux êtres vivants ou tuer, ne pas prendre ce qui n’est pas donné, ne pas avoir une vie sexuelle désordonnée, ne pas mentir ou blesser, ne pas s’adonner aux drogues), strictement applicables à tous. Cette observance ne serait donc réservée qu’aux seuls bonzes. Les peintres n’étaient pas nécessairement moines, une certaine perméabilité aux empreintes extérieures induites possible (d’où un emprunt dans l’enduit !), n’empêchant pas de se conformer au canon. Et, comme aurait dit le Bouddha lui-même :
« L’enseignement est semblable à un radeau qui est fait pour traverser,
mais auquel il ne faut pas s’attacher. »
A 29 ans Bouddha renonça à sa vie princière pour l'ascèse.
Mais seule la "voie médiane", entre luxure et ascèse,
le recours à la méditation, lui permit de gagner l'illumination.
Fermez le ban !
Au final, ce sont donc cinq grottes aménagées en sanctuaires abritant 157 statues et des peintures murales sur plus de 2000m2 (dont 153 représentations du Bouddha), le tout formant le Temple d’Or de Dambulla, classé au Patrimoine Mondial de l’Humanité. Les trois principales sont le « Temple du Roi divin » et son Bouddha couché de 14 mètres, sculpté à même le roc avec de subtils plis qui lui donnent grâce et mouvement. Le « Temple des Grands Rois » et ses 53 statues du Maître, dont là encore un Bouddha couché de 15m et des fresques du XVIIIe siècle. Le « Nouveau Grand Temple », toujours des statues et 1800m2 de fresques relatant les épisodes de la vie du Bouddha. Les deux autres grottes sentent la peinture trop fraîche, mais montrent que l’art est toujours vivant.
Temps arrêté, peinture « tempérée » qui se déploie sur les parois ondulantes, ces fresques vous emballent de l’intérieur, vous enveloppent, déroulant les scènes de la destinée de L’Illuminé en autant de contes de l’anté-Christo (pardonnez ce vilain jeu de mots) qui s’attachent à l’esprit et l’invitent à méditer.
Grand Bouddha couché
dans l’attitude du parinirvâna
La quiétude de L’Eveillé dans un somptueux plissé.
Sculptures à profusion et voute peinte dans le moindre recoin.
Envoûtant, non ?
Alors certes le tracé est souvent un peu gauche, les couleurs trop tranchées, les thèmes récurrents, la lecture des œuvres difficile à appréhender, les repeints plus ou moins récents fréquents, mais l’effet d’ensemble est saisissant et j’espère vous avoir finalement montré combien ce peuple et cette culture étaient attachants.
Quoiqu’il en soit, de la visite de ce temple rupestre, le plus important du pays, se dégage une impression de grande sérénité.
Vous pouvez retrouver la première partie de cet article sur :
Ayubowan…
* Samsâra : cycle sans fin des naissances et des morts, dans lequel les actes de vie antérieurs (karma) entraînent les vivants jusqu’à ce qu’ils parviennent à la délivrance finale (nirvâna). Les exégètes remarqueront par ailleurs que cette citation se rapporte au mahâyâna, le bouddhisme du « Grand Véhicule », suivi au nord et à l’ouest de l’Asie. Or le Sri Lanka embrasse l’hînayâna, la voie du « Petit Véhicule ». Mais, sans rejeter cette réfutation possible d’un revers de la main - c’est pas bien, tends-la plutôt à ton prochain -, allez trouver des citations abordant la peinture ! Qui après tout est mon sujet.
** Le dernier roi de Kandy fut déposé par les Anglais en 1815. Quant au mouvement nationaliste cinghalais, il naquit ici, à Dambulla, en 1848, un siècle avant l’indépendance du pays.
Michel Lansardière (texte et photos)
Le Sri Lanka est profondément marqué par le bouddhisme originel. Il en conserve la forme la plus pure et son art en est le meilleur vecteur.
Si le Bouddha a interdit aux moines l’exercice de certains arts libéraux, la médecine comme le commerce, le tabou ne touchait pas la production et la diffusion d’images décoratives comme figuratives. Mais elles sont toujours symbolistes, idéalisées. D’où notre impression d’uniformité, de répétition, liée aux archétypes ainsi créés.
Au contraire la peinture devait être le propagateur de la foi le plus efficace. Le sittara (peintre) le véhicule le plus sûr. Peintre porte-parole, traçant la voie d’une vie meilleure pour le pécheur. Couleurs et formes menant à la connaissance, à la réflexion, à la sagesse et à l’éveil. Comme dans notre imagerie médiévale ma foi.
Peinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle
« Lorsque le sittara peignait un arbre sur un mur, il ne cherchait pas à représenter un arbre particulier, mais il voulait évoquer un symbole et un type idéal. Cette image était en un sens l’âme ou l’esprit fondamental de tous les arbres de l’espèce choisie par l’artiste. »,
Diyogu Badathuruge Dhanapala (1905-1971)
Ici la peinture se déploie non pas sur la toile (bien qu’aujourd’hui elle se retrouve sur internet), mais sur la paroi rocheuse ou le mur des temples. Ce qui revient à employer deux techniques souvent confondues. La fresque proprement dite, et la peinture à la détrempe.
Dans la première les couleurs s’imprègnent dans le plâtre et s’intègrent à la surface.
Dans la détrempe, les couleurs sont peintes par couches sur la surface du plâtre.
Scènes de la vie du prince Siddharta
- le futur Bouddha -
parti en quête de la vérité.
Peinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle
La fresque vraie se révèlera au final plus pérenne, avec des couleurs naturelles, douces et fondues. Certes le choix des couleurs, appliquées sur l’enduit encore humide, est limité. L’ocre, le jaune, le rouge dominent, soulignés de noir. Puis le vert tendre, malachite, le bleu, parcimonieux, rehaussent les tons sourds de l’ensemble.
Avec la détrempe, les couleurs sont plus vives, plus variées peut-être, le trait plus net. Mais ces peintures tendent, à la longue, à s’écailler. D’où les nombreux repeints ultérieurs, les couches successives qui altèrent le dessin. Et le style se perd.
Un style primitif, sensuel et libre, tout en restant dans les canons de la foi, pour les premières.
Un style plus tardif, naïf souvent, plus emprunté, pour la peinture à la détrempe. Ce qui trahit un certain déclin, qui correspond aussi, soutenons l’hypothèse, à l’occupation de l’île par, tout à tour, les Portugais, les Hollandais, les Anglais.
Scènes de la vie du prince Siddharta.
Peinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle
Arrivé à ce moment de ma présentation, je dois vous avertir que vous ne verrez pas d’images du premier style. La raison en est simple, quoique pas toujours compréhensible !
Peinture à la détrempe, Dambulla
" Ceux qu’aveuglent attraction et répulsion ]…[ ne peuvent comprendre une telle Doctrine qui s’annonce à contre-courant, subtile, profonde,
difficile à saisir. "
Sûtra bouddhique
A Sigiraya, le Sihagiri, « Rocher du Lion », abrite dans une saillie rocheuse, à franc de falaise, d’admirables fresques, datées du Ve siècle. Les plus belles et originales qui soient, les plus connues aussi. Les photos, encore récemment, étaient autorisées. L’endroit est bien gardé, les visiteurs pas si nombreux (un escalier à la verticale y mène, par une chaleur éprouvante), la lumière naturelle suffisante. Mais j’imagine que les obsédés du flash (ici parfaitement inutile, pire néfaste) ont sévi. L’interdit s’est imposé.
A Dambulla, le Rangiri, « Rocher doré », couvre une série de cinq grottes protège 150 Bouddhas et de nombreuses peintures à la détrempe. La pénombre règne, les peintures, pour les raisons ci-dessus expliquées, fragiles. Le flash est donc nécessaire. Là, la photographie, naguère interdite, est maintenant autorisée. Si j’ajoute que les deux sites sont protégés et inscrits au Patrimoine mondial de l’Unesco, je ne m’explique pas la logique de ces décisions (d’autant qu’au musée archéologique de Polonnaruwa, où les œuvres relèvent de la statuaire et de l’art décoratif, donc en pierre ou en bronze… les photos sont aussi prohibées) !
Cette longue digression pour vous dire que nous ne verrons que des illustrations du second style. Je me limiterai, pour l’essentiel à Dambulla, le plus caractéristique de ce dernier, où j’ai donc pu saisir les scènes les plus explicites.
Pourtant les « Demoiselles du Ciel » de Sigiraya, princesses, servantes ou apsaras (nymphes célestes) sont si graciles, élégantes et sensuelles « La poitrine nubile et pleine, la taille mince à peine plus forte que le cou, les bras fuselés et les mains exquises comme de longues fleurs » qu’on les regarde, lascives, sans se lasser. Tout n’est vraiment ici qu’harmonie, luxe, calme et volupté, pour le poète inventé.
Regrets.
Jeune femme en costume traditionnel cinghalais
Arrachons-nous, je sais, c’est dur, à ces Demoiselles des nuages pour nous intéresser enfin à Dambulla, plus précisément au vihâra (monastère) de Rajamaha. Cette fois vous ne le regretterez pas.
Peinture à la détrempe, Dambulla
« Allez, ô moines ! et voyagez pour le bien et le bonheur d’autrui, par compassion pour le monde, pour le bien-être des dieux et des hommes. »
A suivre...
Michel Lansardière (texte et photos)
Pour sa 34e édition, Art Brussels s’installe dans un nouveau lieu, Tour & Taxis.
Art Brussels dévoile les détails des sections Rediscovery, Discovery et Solo et son projet artistique phare.
Cet ancien site de dédouanement et d’entreposage, construit en 1904, est un modèle spectaculaire d’architecture industrielle. De taille réduite par rapport à l’édition précédente, la foire accueille cette année 141 galeries venant de 28 pays, réparties sur trois sections principales : PRIME, DISCOVERY et une nouvelle section, REDISCOVERY.
En outre, 24 galeries participent à SOLO, une section consacrée à la présentation d’œuvres d’artistes individuels. Cette année, le comité international a sélectionné un tiers (32 %) de nouveaux venus, parmi lesquels :
Ben Brown Fine Arts (Londres), Luis Campaña (Berlin), Laurent Godin (Paris), Peter Kilchmann (Zurich), Tina Kim (New York), Parisa Kind (Francfort), Antoine Laurentin (Paris, Bruxelles), Lyles & King (New York), Pace (Londres, Pékin, Hong Kong, Menlo Park, New York), Thomas Schulte (Berlin), Timothy Taylor (Londres), Elisabeth & Klaus Thoman (Vienne), Wilkinson (Londres), Martin van Zomeren (Amsterdam). Deux tiers (68 %) des exposants ont participé à l’édition précédente, et bon nombre d’entre eux (30 %) font preuve d’un engagement durable depuis plusieurs années, tels qu’Albert Baronian (Bruxelles), Bernier/Eliades (Athènes, bientôt à Bruxelles), Meessen De Clercq (Bruxelles), dépendance (Bruxelles), Grimm (Amsterdam), Xavier Hufkens (Bruxelles), Jablonka Maruani Mercier (Bruxelles, Knokke), Rodolphe Janssen (Bruxelles), Krinzinger (Vienne), Mitterand (Paris), Mot International (Londres, Bruxelles), Nathalie Obadia (Paris, Bruxelles), Almine Rech (Bruxelles, Paris, Londres), Michel Rein (Paris, Bruxelles), Tucci Russo (Torre Pellice) Pietro Sparta (Chagny), Sorry We’Re Closed (Bruxelles), Daniel Templon (Paris, Bruxelles), Valentin (Paris)…
DISCOVERY
Cette section, qui présente une plus jeune génération d’artistes et soutient le travail de galeries émergentes, a joué un rôle important dans le développement du profil d’Art Brussels comme « foire de découverte ». DISCOVERY a été lancée l’an dernier en vue de réunir et de présenter des artistes internationaux prometteurs dont l’œuvre n’est pas encore très connue en Europe. Cette section accueille cette année 30 galeries (soit 21% des galeries participantes) exerçant depuis maximum huit ans. Ensemble, elles présentent des œuvres de 61 artistes, toutes créées entre 2013 et 2016. Véritable occasion pour les collectionneurs et les professionnels de l’art de faire des découvertes, cette section consolide la réputation d’Art Brussels en tant que foire où l’on peut identifier des artistes au début de leur carrière. Cette année, les nouveaux venus sont:
Sabrina Amrani Gallery (Madrid), angels (Barcelone), Arcade (Londres), :BARIL (Cluj-Napoca), BWA Warszawa (Varsovie), Château Shatto (Los Angeles), Document Art (Buenos Aires), General Store (Picton), Iragui (Moscou), Ellis King (Dublin), Neumeister Bar-Am (Berlin), The Sunday Painter (Londres) et Rita Urso (Milan). Les galeries peuvent exposer un à trois artistes sur leur stand. Le comité de sélection des galeries de la section DISCOVERY est composé de : Michael Callies, dépendance (Bruxelles) | Aaron Cezar, Directeur de Delfina Foundation (Londres) | Zoë Gray, Commissaire d’exposition à WIELS (Bruxelles) | Katerina Gregos, Commissaire d’exposition et Directrice Artistique d’Art Brussels| Nikolaus Oberhuber, KOW Gallery (Berlin).
REDISCOVERY
Cette section joue également un rôle majeur dans le développement du profil déjà bien établi de la foire comme « lieu de découverte ». Quatorze galeries présentent des œuvres d’artistes importants de l’avant-garde historique, vivants ou décédés, ayant été sous-estimés, négligés ou indûment oubliés. La sélection se concentre sur la création artistique entre 1917 et 1987 ; elle établit un lien entre les prémices de l’art conceptuel et l’avènement de pratiques néo-conceptuelles et souligne l’importance d’une mémoire de l’histoire de l’art. REDISCOVERY aspire à contrebalancer le « présentisme » inhérent aux foires d’art contemporain en mettant en évidence des artistes étonnants, inconnus et originaux n’ayant pas encore percé dans le courant dominant de l’histoire de l’art. Quelques artistes phares présentés dans la section Rediscovery :
Roy DeCarava (1919-2009, É.-U.) était le premier photographe américain à recevoir une bourse du Guggenheim. Ce pionnier de la photographie afro-américaine a marqué une rupture avec la tradition du documentaire social de son époque, et fut en outre un militant actif des droits civils (Jenkins Johnson gallery, San Francisco).
Eduardo Terrazas (° 1936, MX) est un membre fondateur de la scène artistique contemporaine mexicaine dont l’œuvre embrasse différentes disciplines, incluant l’architecture, le design, la muséologie et l’urbanisme. Terrazas s’est fait connaître pour avoir développé une forme d’abstraction spécifique qui combine des éléments géométriques avec des composantes du folklore mexicain, naviguant entre art contemporain et artisanat traditionnel (Timothy Taylor, Londres).
Bob Law (1934-2004, UK) était un des pères du minimalisme britannique, connu pour ses grandes toiles et dessins composés uniquement de nuances de noir et de simples dessins abstraits (Richard Saltoun, Londres) ;tandis que Boris Lurie (1924-2008, É.-U.) était le fondateur controversé du NO!art, un mouvement d’avant-garde anti-art qui a vu le jour à New York en 1959 et fustigeait la société de consommation (Odile Ouizeman, Paris).
Vera Molnar (° 1924, HU) est une pionnière de l’art numérique et algorithmique (Galerie Oniris – Florent Paumelle, Rennes). La photographie expérimentale de Barbara & Michael Leisgen (° 1940, DE & ° 1944, AT) a fait office de contrepoids à la photographie conceptuelle, typologique, pratiquée dans les années 70 (Beta Pictoris Maus, Birmingham). L’artiste féministe indéfinissable Hessie (° 1936, CU) produit des œuvres diverses et variées, avec de la peinture, des textiles, des objets du quotidien, voire du rebut (Arnaud Lefebvre, Paris).
SOLO
Comme les années précédentes, Art Brussels continue à porter une attention particulière aux présentations individuelles. 24 galeries exposeront des projets SOLO d’artistes de 18 pays (Europe, Moyen-Orient, Amérique et Asie), ce qui en fait le groupe le plus international et géographiquement diversifié de la section SOLO d’Art Brussels à ce jour.
Sélectionnée par Katerina Gregos, cette section comporte une variété de pratiques artistiques, aussi bien d’artistes émergents qu’historiques, de générations différentes, représentant des courants allant du conceptuel, du formel et du minimaliste au politique et au post-colonial.
Larissa Lockshin (Canada, ° 1992), Albert Baronian (Bruxelles) Ester Fleckner (Danemark, ° 1983), Avlskarl Gallery, (Copenhague) David Medalla (Philippines, ° 1942), Baró Galeria (Sao Paulo) Ori Gersht (Israël, °1967), Brand New Gallery (Milan) Anoek Steketee (Pays-Bas, ° 1974), Flatland Gallery (Amsterdam) Shaun Gladwell (Australie, °1972), Galerie Analix Forever (Genève) Iván Navarro (Chili, ° 1972), Galerie Daniel Templon, (Paris/Bruxelles) LAb [au] (Belgique, fondée en 1997), Galerie Denise René (Paris) Taysir Batniji (Palestine, ° 1966), Galerie Éric Dupont (Paris) Sammy Baloji (République Démocratique du Congo, ° 1978), Galerie Imane Farès (Paris) István Csákány (Roumanie, °1978), Galerie Krinzinger (Vienne) Bob and Roberta Smith (UK, °1963), Galerie Kusseneers (Bruxelles) Levi van Veluw (Pays-Bas, ° 1985), Galerie Ron Mandos (Amsterdam) Rokni Haerizadeh (Iran, ° 1978), Isabelle Van Den Eynde (Dubai) Georges Tony Stoll (France, °1955), Jérôme Poggi (Paris) Noémie Goudal (France, ° 1984), Les Filles Du Calvaire, (Paris) Jochen Höller (Autriche, ° 1977), Mario Mauroner (Vienne) Nicolás Lamas (Pérou, ° 1977), Meessen De Clercq (Bruxelles) Marinella Senatore (Italie, ° 1977), MOT International (Londres, Bruxelles) Darren Almond (UK, °1971), New Art Centre (Salisbury) Pier Paolo Calzolari (Italie, ° 1943), Ronchini Gallery (Londres) Dinh Q. Lê (Vietnam, °1968), Shoshana Wayne Gallery (Santa Monica) Yann Gerstberger (France, °1983), Sorry We’re Closed (Bruxelles) Kristof Kintera (République tchèque, ° 1973), D + T Project (Bruxelles).
PROJETS ARTISTIQUES
‘Cabinet d’Amis : the accidental collection of Jan Hoet’ est le projet artistique phare de l’édition d’Art Brussels 2016. Il s’agit d’une sélection d’œuvres de la collection de feu Jan Hoet. Hoet (1936-2014) était un commissaire d’exposition internationalement reconnu, qui a fait sensation en 1986 avec son exposition révolutionnaire Chambres d’Amis. Ensuite, il a assuré le commissariat de Documenta IX à Kassel, ainsi que plusieurs autres expositions importantes. Il est de surcroît le fondateur du S.M.A.K, le musée d’art contemporain à Gand. En Belgique, il était une des rares personnalités du monde de l’art contemporain à être connues de tout un chacun. Son dévouement et sa passion pour l’art sont sans équivoque et l’idéalisme, l’opiniâtreté et le goût de la provocation du personnage contribuent à sa réputation légendaire. La collection de Jan Hoet est hautement idiosyncrasique ; elle résulte plus de relations forgées avec des artistes tout au long de sa carrière que d’une accumulation d’œuvres intentionnellement rassemblées. Beaucoup de pièces sont des dons d’artistes. Le résultat est éclectique et insolite, soulignant le caractère non-conformiste de son propriétaire. Bien que la collection compte près de 500 œuvres, la plupart d’entre elles sont de taille modeste. L’exposition présente des œuvres d’artistes belges et de bien au-delà, renommés, internationalement salués ou moins connus, artistes avec lesquels Hoet a travaillé en étroite collaboration.
Parmi les artistes présentés, on peut citer : Joseph Beuys, Christian Boltanski, Michaël Borremans, Ricardo Brey, Marcel Broodthaers, Cai Guo-Qiang, Thierry De Cordier, Raoul De Keyser, Wim Delvoye, Jessica Diamond, Marlene Dumas, Jimmie Durham, Günther Förg, Rodney Graham, David Hammons, Joseph Kosuth, Kris Martin, Bjarne Melgaard, Marisa Merz, Cady Noland, Dennis Oppenheim, Panamarenko, Giulio Paolini, Richard Prince, Nedko Solakov, Luc Tuymans, Patrick Van Caeckenbergh et Franz West. Katerina Gregos est curatrice de l’exposition, organisée avec l’aimable concours de la famille de Jan Hoet. Elle se tiendra à l’Hôtel de la Poste, un espace à l’intérieur du site historique et nouveau port d’attache d’Art Brussels, Tour & Taxis. La scénographie de l’exposition est conçue par l’artiste, Richard Venlet, qui vit et travaille à Bruxelles. L’exposition bénéficie du généreux soutien d’Anglo Belge Special Risks et de Stibbe.
CAMPAGNE DE COMMUNICATION 2016
Chaque année, Art Brussels choisit un artiste pour concevoir sa campagne de communication. L’approche créative de la campagne 2016 a été confiée à OTTOMURA.
OTTOMURA est un collectif belge fondé en 2010 par trois photographes pour répondre à des commandes, ensemble ou individuellement, sans que cela interfère avec leur pratique photographique personnelle. Le collectif se concentre sur les médias visuels et touche résolument à tous les genres : documentation d’exposition, mode, photojournalisme, missions à caractère commercial… Les images de la campagne d’OTTOMURA ont été produites à Tour & Taxis, sur le nouveau lieu d’accueil d’Art Brussels, en vue de souligner les caractéristiques de ce bâtiment industriel spectaculaire de 1904. Les artistes se sont lancés dans une série d’expériences in situ, avec de la fumée colorée dans les espaces vides du bâtiment, créant une atmosphère éthérée, plongée dans une attente latente, qui s’animera entre le 21 et 24 avril 2016.
Anne Vierstraete, Managing Director : « Avec son déménagement à Tour & Taxis, Art Brussels affine la qualité de sa liste de galeries participantes et renforce son lien de longue date avec la scène artistique particulièrement dynamique de Bruxelles. Ce faisant, elle se rapproche géographiquement des expositions proposées dans son programme OFF, des galeries et de l’offre artistique générale en ville qui animera Bruxelles à la fin du mois d’avril.
Le célèbre Brussels Design Market aura également lieu à Tour & Taxis durant le week-end d’Art Brussels, diversifiant ainsi l’offre avec des centres d’intérêt complémentaires. Le déménagement est une excellente occasion de rehausser la qualité d’autres paramètres tels que la scénographie de la foire qui sera confiée cette année à Tom Postma Design. Qui plus est, faisant écho à la réputation de Bruxelles de haut lieu de la gastronomie, Art Brussels va offrir une expérience culinaire créative, sous la supervision d’un des maîtres de la fine cuisine en Belgique, Jean-Michel Loriers (JML). Enfin et surtout, Art Brussels tient à remercier ING pour son soutien continu depuis 2005; ING présentera une installation in situ de Peter Kogler, spécialement conçue pour la foire. »
ART BRUSSELS : CONTEMPORAIN DEPUIS 1968
Bien qu’elle garde son profil jeune de ‘foire de découverte’, Art Brussels est une des foires les plus anciennes et les plus établies d’Europe. Fondée en 1968, sous le nom « Art Actuel », par un petit groupe de galeristes belges respectés qui invitaient chacun une galerie étrangère à y exposer, la foire avait un caractère nomade au cours de ses premières années, et se déplaçait dans des lieux aussi différents que le Casino de Knokke (1972) ou le Palais des Beaux-Arts à Bruxelles (1976). En 1989, la foire a déménagé au Heysel, l’emplacement de l’ancienne Expo 58, où elle est restée jusqu’à l’année dernière. Jusqu’en 1997, l’asbl des Galeries belges d’Art contemporain a géré la foire, avant sa reprise par le groupe Artexis-Easyfairs, actif au niveau international dans la gestion d’espaces d’expositions et l’organisation d’événements multi-formats.
Depuis ses débuts, Art Brussels a évolué en une incontournable foire d’art contemporain internationale, parmi les meilleures d’Europe. Elle reçoit chaque année plus de 400 candidatures. En déménageant dans son nouvel écrin, Art Brussels poursuit son évolution, conservant son profil de foire à la pointe de la découverte, qui présente des galeries et des artistes émergents et inconnus, au sein des sections DISCOVERY et REDISCOVERY, de même que des galeries établies de réputation internationale au sein de la section PRIME.
Informations pratiques:
Contacts Presse Belgique et Europe: Gerrie Soetaert Press & Communication Gerrie Soetaert |
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Art Brussels 2016 se déroule à Tour & Taxis du vendredi 22 avril au dimanche 24 avril 2016, de 11h00 à 19h00
Preview : Jeudi 21 avril 2016, de 11h00 à 17h00 Vernissage : Jeudi 21 avril 2016, de 17h00 à 22h00
Vernissage : Jeudi 21 avril 2016, de 17h00 à 22h00
Lieu; Tour & Taxis Avenue du Port 86C, 1000 Bruxelles, Belgique