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L'oiseau qui loge dans mon cèdre

 

L'oiseau qui loge dans mon cèdre,

Est habillé d’orange et porte un manteau noir.

Il se pose voyeur, collé contre la vitre,

Sur le rebord de ma fenêtre.

 

Il s’envole bientôt pour s’occuper ailleurs.

Il reviendra au nid, souvent,

Chargé de choses nécessaires.

Il n’y reste jamais longtemps.

 

Son va-et-vient est incessant.

Il volette, se perche, marche sur le gazon,

Picorant à son gré, selon son appétit.

Il semble confiant et tout à fait chez lui.

 


Lors moi, ravie de sa présence,

Pour ajouter à son festin,

Je sème des biscuits et des croûtes de pain,

Qui serviront peut-être à nourrir ses petits.



11/6/1992

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Je dirais que cette tumeur était le concentré de tout ce que j’avais amassé depuis le déclic que j’avais ressenti en moi en découvrant le corps inanimé de mon amour. J’ignore pourquoi, sans l’approcher, sans le toucher, je savais qu’il n’était déjà plus de ce monde… A l’instant même, j’ai ressenti une chose indescriptible, un choc d’une violence inouïe…  Il n’était pas possible que moi aussi, je ne m’effondre pas… Je pense que « ça » date de cet instant précis…

 

Au fil du temps, j’ai nourri de mes chagrins ce que j’appellerais une montgolfière immonde, vu sa forme… La perte de mon complice de toujours, celle de ma grande copine qui avait décidé qu’on mette fin à son calvaire en débranchant les machines qui la maintenaient en vie, mes déboires perpétuels et grandissants avec la famille, les enfants… des soucis matériels… un manque d’amour chronique… Elle a tout englouti goulûment.

 

Une fois ma boule de chagrin envolée, j’ai commencé ma convalescence…

J’avais mis à profit ce séjour à la clinique pour réfléchir à ce que serait ma vie… Je ne devais plus m’embarrasser de ces choses qui avaient empoisonné mon existence jusqu’ici…

 

J’ai passé des heures à observer le petit bout de ciel que je voyais depuis mon lit d’hôpital. Ce morceau d’univers me parlait…

Quoi ? Les nuages… Eh bien oui, ils sont chargés, énormes et pourtant, ils finissent par s’écarter… Parfois, une éclaircie… vite reprise d’assaut… Mais le ciel ne se décourage jamais… Même si parfois, il en pleure, même si sa peine inonde le monde… Demain, il fera meilleur.

 

Demain arrive toujours…  Mon petit bout de ciel me souriait quand j’ai enfin pu me lever…  J’étais toujours connectée à un tas de tuyaux mais on avait accompli sur moi un excellent travail et le reste ne dépendrait plus que de moi…

Sous ce ciel d’humeur changeante, je m’aperçus très vite qu’il y avait le monde… Je l’avais déjà vu auparavant, mais il me semblait différent…

Je n’existais pas pour ces gens affairés, souffrants ou soignants, visiteurs et travailleurs… vivants. Mais eux, existaient pour moi… Ils étaient ce qui me reliait à cet univers en marche… Bientôt, j’en referais partie… De la meilleure façon qui soit… J’y veillerais…

 

Mais ça commençait déjà à cet instant précis… On riait beaucoup dans ma chambre… Les infirmières adoraient y venir décompresser… J’ai bénéficié de toutes leurs petites attentions…

Je dormais peu… Je refaisais le monde avec l’infirmière de nuit…

J’étais connue à tous les étages où je déambulais avec mon pied à perfusions…  Ma kiné a vite démissionné… Elle était censée m’apprendre à respirer convenablement et à m’aider à marcher sans que je ne m’effondre…  Au début, il fallait bien qu’elle justifie son salaire… Alors, elle m’accompagnait dans le couloir où nous parlions sophrologie…

 

Chaque jour était un combat gagné… Ma victoire : une sonde, un redon, une perfusion enlevés… Jusqu’à ce que je sois libre de mes mouvements… Quelques jours plus tard, je quittais la clinique, forte de ce petit bout de ciel bleu ancré en moi… Cette espérance d’une vie nouvelle… Une autre chance qui était offerte à ma petite personne…

 

http://www.lulu.com/spotlight/Yvette13

 

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Mourir est difficile.

 

 

 

Il s’y était repris à quelques reprises sans aboutir. L’avant dernière fois, il avait été blessé. Physiquement blessé, inutilement blessé. C’est lui, vivant, qui avait reçu les condoléances émues, à ce qu’elle disait, de Julie qui croyait s’adresser à son amie. A peine s’il avait pu répondre

- c’est moi, Julie

Elle avait raccroché. Elle avait pensé qu’il n’avait pas changé.

- Toujours ces sinistres plaisanteries.

La dernière fois, il avait préparé un cocktail de médicament destiné à dormir. Il espérait bien entendu qu’il ne se réveillerait plus. Mais il n’avait pas fermé la porte à clé de sorte que lorsque Simone était entrée, qu’elle le vit affalé sur la table, de petites bouteilles vides autour de lui, elle comprit immédiatement ce qui venait de se passer. Elle appela l’hôpital, puis le traîna littéralement jusqu’au lavabo. En glissant un doigt

dans la bouche, elle le forçât à vomir.

- Vous êtes arrivée à temps, dit le jeune urgentiste. Il ne risque plus rien. Demain, il aura l’estomac un peu barbouillé. 

Il la regarda, un mince sourire aux  lèvres. Il pensa qu’une scène un peu dramatique avait poussé l’homme à faire semblant de se suicider devant sa compagne. Appétissante ; pensa-t-il avant de sortir.

A toutes ses amies, à Julie y compris, Simone raconta ce qui s’était passé. Elle ajoutait à chaque fois qu’elle n’en tirait aucune gloire, que Pierre était amoureux d’elle mais qu’elle ne lui avait rien promis.

Julie était l’amie que Simone avait remplacée lorsque Pierre s’était séparée d’elle parce que ; disait-il, il n’avait pas encore envie de se marier.

- C’est d’une ménagère dont tu as besoin, c’est ça ?

Il souriait à la manière d’un Casanova de province.

- Ce n’est pas de ma faute si je plais aux femmes.

Depuis, c’est à Julie qu’il pensait lorsque Simone était dans ses bras. Il fallait en convenir, c’est Julie qu’il aimait au point que sans elle la vie lui paraissait impossible.

Durant la nuit lorsqu’il qu’il voulait prononcer le nom de Julie au lieu de celui de Simone, il ne pouvait le faire qu’en son for intérieur ou, hélas il ne pouvait s’y forcer, il ne pouvait le prononcer qu’en rêve.   

S’il fallait y trouver un peu de réconfort, c’était dans l’idée que de regretter Julie, tout douloureux que ce soit, c’était encore penser à elle.

Le suicide est toujours une bonne idée lorsqu’on est fatigué de vivre. Il y a un risque cependant. Il arrive qu’il réussisse.

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Le sacré et le profane

12272986871?profile=original"Le sacré et le profane" est un essai du sociologue et historien française d'origine roumaine Mircea Eliade (né en 1907), publié en 1956. Cet essai clair et synthétique vise à fournir au grand public une introduction générale et raisonnée à l'étude phénoménologique et historique des faits religieux. En 1917 avec le "Sacré", Rudolf Otto ouvrait un champ de recherches nouvelles: l'analyse des modalités de l'expression religieuse. Mais surtout sensible au côté irrationnel de celle-ci, il ne se donnait pas comme objet la totalité de l' expérience du sacré. Eliade, tout en s'inscrivant dans la même perspective, entend quant à lui étudier le comportement de l' "homo religiosus", dans sa dialectique complète avec ses terreurs, mais aussi sa raison. C'est ce second aspect que toute son oeuvre met en évidence dans les sociétés archaïques et orientales. Le point de départ de l'essai, comme de toute recherche phénoménologique sur les structures ultimes de la conscience de l' homo religiosus, c'est l'opposition du sacré et du profane qui est  double. D'une part ce sont deux modalités d'être-dans-le-monde dont la seconde (la profane) est récente, problématique et issue de la première. D'autre part ce sont les deux termes initiaux de la dialectique de l'hiérophanie qui caractérisent la vision sacrale du monde. Eliade ne se contente pas de décrire les structures abstraites pour les opposer à celle de l'homme profane, il nourrit son analyse d'exemples les plus divers sans croire pour autant avec Tylor ou Frazer à une réaction uniforme de l'esprit humain; l'analyse phénoménologique atteint au-delà des différences de "religions",  mais les maintenant, la structure toujours répétée de l'opposition fandamentale qui caractérise toute "religiosité".

Les deux premiers chapitres très denses de l'essai d'Eliade esquissent l'analyse de l'expérience de l' espace et du temps pour l'homo religiosus. Dans l'opposition initiale du sacré et du profane à travers laquelle se structure tout le vécu de l'homo religious, le temps et l' espace se donnent comme non homogènes. L' espace est morcelé, c'est l' hiéphanie qui en révèle les points fixes, les zones réelles; c'est par elle que se fonde le monde. Eliade illustre ce point de l'examen de la manière dont sont vécues la demeure humaine et la demeure divine par la conscience religieuse. Il oppose à la "machine à habiter" de Le Corbusier,  à la maison de l'homme profane, la demeure construite selon un rituel qui réitère la cosmogonie, sur un plan qui est "imago mundi". De même, à l'opposé du temps historique et profane linéaire et homogène, la conscience religieuse conçoit un temps cyclique, rompu par les fêtes et les récitations de mythes qui l'une et l'autre sont retour aux origines, réitération cosmogonique, possibilité pour l'homme d'être contemporain des dieux.

Les deux autres chapitres de l'essai explicitent la vision religieuse du monde à partir de cette architectonique. La nature entière des sphères ouraniennes aux eaux de la mort, des enfantements de la vie à la paresse des astres est emprisonnée dans les rêts d'une parole rituelle qui la fonde et la rend signifiante. Le monde parle aux consciences religieuses parce qu'il est, pour elle, créé et que tout geste sacré, toute parole sacrale, vise à réitérer cette création. En prenant pour exemple les "sites parfaits", ces jardins qui furent la passion des taoïstes chinois du XVIIe siècle. Eliade montre comment s'est désamorcée et défaite cette vision "en miroir" de la nature sacrée. La vie humaine dans son accomplissement est pensée et sentie par l'homo religiosus selon la même structure. Elle est comme l' espace, le temps et la nature morcelée: elle a ses fêtes, ses mythes, ses seuils. Une brève phénoménologie des rites de passage et des initiations à la sexualité, à la mort et au sacré suffit à illustrer ce point.

Pour conclure, Eliade s'interroge sur la seconde opposition du sacré et du profane: non plus celle qui, pour la conscience religieuse, fonde le monde et la vie mais celle qui différencie comme deux modes de l'être-au-monde la conscience religieuse et la conscience profane. Pour la conscience profane le sacré est conçu comme obstacle à la liberté mais l'homme moderne est-il vraiment profane? Peut-être pour le savoir devrait-on concevoir une histoire de la religiosité. Conçue et vécue pour elle-même et en elle-même, elle devient ensuite figure de la conscience déchirée pour être aujourd'hui "oubliée"; cela ne signifierait nullement sa disparition mais plutôt qu'elle parlerait aujourd'hui à travers les théologies de la mort de Dieu et dans l'insignifiance de la vie journalière, le langage de l' inconscient.

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A Pascale,

La vie se montre lourde, amère,

trop acide parfois, noire et pleine d'ingratitude ;

Posons sur elle un voilage clair,

un baiser d'espérance,

une cajolerie venus de soi ;

Prodiguons-nous un peu de bien,

pour soi déjà,

 juste rechantons !

Acceptons d'être,

dans les moments les plus aigus,

brutaux, une mère pour soi-même !

Accordons-nous ce temps consolateur, précieux.

Posons sur elle, ce voilage clair,

cette éclaircie qui peu-à-peu,

deviendra bleue !

 NINA

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A peine un adultère

Pierre avait passé cinq ans aux Etats-Unis. Lorsqu’il était revenu, c’était en septembre, l’après midi tirait sur sa fin, il s’était rendu directement chez Julie. Il l‘avait serrée dans les bras et elle s’était abandonnée contre lui.
Le lendemain matin, ils étaient encore au lit, elle lui avait dit qu’elle avait épousé Bernard mais, elle s’en rendait compte aujourd’hui, c’est lui qu’elle aimait.
Son corps était encore moite. Elle ne savait pas si cette odeur était la sienne ou celle de Pierre. Elle respirait fort. Elle ne réfléchissait pas, elle voulait qu’il la prenne encore. Elle avait la main sur son sexe.
- Pourquoi es-tu parti ? Ne m’abandonnes plus, Pierre. C’est toi que j’aime. Pourquoi es-tu parti ?
Elle alla préparer le petit déjeuner après avoir posé sur les épaules un léger peignoir qu’elle laissa flotter et qui la rendait plus nue que si elle n’en avait pas mis du tout.
Pierre était âgé de trente cinq ans. Il était aussi maigre que lorsqu’elle l’avait connu à l’âge de vingt ans assis au bord de la piscine municipale tandis que Bernard, plus musclé, se jetait à l’eau à partir du plongeoir haut de cinq mètres.
- Et Bernard ?
- Ne penses pas à lui. Il ne revient que dans dix jours. En attendant, tu logeras ici. Tu iras chercher tes bagages à l’hôtel.
Pierre secoua la tête d’un air dépité.
- Je n’ai pas été à l’hôtel.
- Tu es venu directement ici ? Tu n’as rien ?
- Plus rien, Julie. Rien ni personne.
Elle se sentait inexplicablement heureuse. Il n’avait qu’elle. Elle aurait voulu le bercer comme elle avait bercé durant de nombreuses années l’ours en peluche qu’elle avait reçu à sa naissance.
Elle conduisit Pierre dans ce qu’elle nommait le dressing-room. Elle ouvrit la garde robe de Bernard.
- Changes de vêtements. Vous avez pratiquement la même taille.
Elle le regardait changer de vêtements avec curiosité alors que quelques heures auparavant, elle avait vu, nu, son corps tout entier. Il avait cessé de se changer.
- Je vais t’attendre dans la cuisine.
Durant les jours suivants ils se conduisirent comme un couple marié dont aucun des membres n’était astreint à un horaire. De sorte qu’ils se levaient tard, déjeunaient avant même de s’habiller, parfois ils se remettaient au lit.
Si elle n’avait pas envie de cuisiner, ils allaient au restaurant. C’est elle qui lui glissait sous la table quelques billets avec lesquels Pierre réglait l’addition.
Le moment qu’elle préférait c’était le soir avant de se mettre au lit. Ils regardaient la télévision, lui assis dans un fauteuil et elle, les genoux pliés, accroupie à ses pieds. Elle posait la tête sur ses cuisses. Elle aimait ce moment où elle sentait qu’il respirait plus fort et lui poussait la tête contre le ventre.
A la même heure, tous les soirs Bernard téléphonait. Il était ingénieur. Il travaillait sur des plateformes maritimes. Il ne revenait que tous les deux mois.
La veille de son retour, deux mois passent vite pensa-t-elle, elle lui dit que Pierre était revenu.
- Il a voulu que nous soyons les premiers avertis de son retour. Demain nous viendrons te chercher. Je préparerai un repas comme tu les aimes.
Lorsqu’un couple se dispute, c’est le soir avant de se mettre au lit. Les ébats sexuels auxquels il se livre ensuite parce que les disputes mettent les nerfs à vif rendent incompréhensibles les raisons de la dispute. En revanche les aveux, c’est après les ébats sexuels qu’ils se font. Les relations amoureuses relèvent d’une alchimie singulière.

La veille du retour de Bernard, Pierre avait pris une chambre d’hôtel. La vie d’avant avait presque repris pour Bernard et Julie. Sinon que le lendemain alors que
Julie était étendue auprès de Bernard.
- Il faut que je te dise, Bernard. Je suis amoureuse. De Pierre.
- Tu es amoureuse ?
- De Pierre.
Il le voyait bien, elle parlait sérieusement. Bernard n’était pas homme à crier. Les cris dissimulent la peur qui, soudain, vous envahit.
- Je…je dois réfléchir.
Il s’était assis pendant qu’elle enfilait sa robe de chambre. Il avait mit la couverture sur ses épaules, d’instinct, comme s’il n’était pas convenable de se montrer tout nu devant une femme pour qui, peut être, il était devenu un étranger.
Ce soir là, c’est dans le lit de Pierre que Julie se coucha. Bernard avait la nuit entière pour réfléchir à une situation qui lui était tout à fait inconnue sinon par les histoires sinistres de cocus.
Bernard ne voulait pas perdre Julie. Tuer Pierre ? Il n’y pensait pas réellement. Cela ne l’aiderait en rien. Mourir, pas davantage.
Il fallait bien finir par se poser la question : une femme comme l’était Julie vivait-elle comme une nonne lorsqu’il s’absentait deux mois durant ? Qui donc mettait-elle dans son lit ? Des rencontres de hasard ? Deux mois !
Pierre, il le connaissait, c’était un ami. Il aimait Julie. Elle comptait pour lui comme elle comptait pour Bernard. Il l’aurait tué sans hésiter si ce n’avait pas été le cas.
La réponse finit par s’imposer. S’il ne l’avait à lui que durant huit jours à chaque fois qu’il revenait de mission, n’était-ce pas mieux que de ne plus l’avoir du tout ?
Elle était sur le point de pleurer. Elle n’aimait pas faire de la peine. Ils étaient assis face à face dans le salon.

- J’ai besoin de toi, Julie.

Bernard avait demandé à Pierre de les laisser seuls quelques heures. Elle n’avait rien objecté. Il fallait vider l’abcès, elle en avait conscience. Tout régler au plus tôt. Pierre avait dit oui. Il ne savait pas l’attitude qu’il devait adopter. Il dit qu’il reviendrait plus tard.
-Je te comprends, Julie. Je n’étais jamais là. Je n’ai pas l’intention de vous empêcher de vous aimer. Mais j’ai besoin de t’avoir à mes côtés. Je mourrai si tu t’en vas.
Bernard s’exprimait comme il s’exprimait sans doute durant une négociation d’affaires. D’un ton uni mais sans hésitation. Les mains jointes posées sur la table.
- J’ai besoin de sentir ton odeur. Tu ne peux pas me refuser ça. J’ai besoin de t’appeler tous les jours.
Il avait préparé une valise. Elle se laissa embrasser.
Elle avait encore les yeux mouillés lorsque Pierre était revenu. Toute alanguie elle se serra contre lui. C’est elle qui le conduit à la chambre qui avait été, la veille encore, celle de Bernard et qui serait désormais la leur. En l’espace d’un moment, ce qui avait été un adultère était devenu les retrouvailles d’un couple libre de ses élans. Même s’il n’avait pas le droit de les afficher officiellement.
Pendant un mois, ce fut ce qu’elle appelait avec exaltation « des noces de chair ». Elle était incapable d’expliquer ce qui lui embrasait le ventre lorsqu’elle était auprès de Pierre mais c’est elle qui l’entrainait. Le coup de téléphone de Bernard était loin de leur déplaire, ils l’attendaient comme un repère important.
C’est Pierre qui avait dit un soir, ils en avaient ri peu après :
- Il n’a pas encore appelé. J’espère qu’il ne lui est rien arrivé.

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Charlie et ses drôles de bobines.

Charlot a 100 ans ! Arts et lettres se devait de fêter ça !

Charlot a donc 100 ans et tout le monde l'acclame. Cent ans... pas tout à fait pourtant...

Si Charles Chaplin (1889-1977) voit effectivement son premier film "Pour gagner sa vie" ("Making a living") pour la Keystone sortir le 20 février 1914,

http://youtu.be/7LoLw4TJKdU

il est dans un rôle de dandy ridicule, Slicker, loin de son personnage emblématique. Mais la démarche y est déjà, gandin dégingandé.

Il est vrai qu'il endosse vite le costume du vagabond, the Tramp, dans "Kid auto races at Venice" qui sort 5 jours plus tard ! Cependant le nom de Charlot qui lui colle à la peau comme son melon lui est donné en 1915 par les distributeurs français.

http://youtu.be/-nUptPWbE88

"Kid auto races" deviendra donc "Charlot est content de lui" où il s'imposera face à la caméra (à la manière plus tard d'un de Funès).

Content il peut l'être car Chaplin enchaîne dès lors les Charlots pour la Keystone, 34 tournés en 1914 !, jusqu'à "Charlot roi" :

http://youtu.be/Ya2E3LC8Olo

... "His prehistoric past".

Puis "Charlot débute", "His new job", en 1915 pour l'Essenay :

http://youtu.be/5A2ZZTP44Xc

Suivront 13 autres films jusqu'à la fin mars  1916 avec "Charlot cambrioleur" ("Police") où le "convict 999" rafle la mise :

http://youtu.be/iCDpcVvFnuw

La Mutual voit alors "Charlot chef de rayon", "The floorwalker", dès la mi-mai 1916 :

http://youtu.be/ecGTyQZJciM

... jusqu'à "Charlot s'évade", fin 1917 (soit 12 films). "The adventurer" gagne alors de nouveaux territoires :

http://youtu.be/yYon3hTo9gE

Enfin pour la First National il démarre "Une vie de chien", pour lequel il compose une musique, un ragtime dans l'air du temps :

http://youtu.be/XQborlR9HAw

et de "a dog's life" dès la mi-avril 1918 jusqu'au "Pèlerin", en 1923 :

http://youtu.be/r2M51_9wmdg

ce seront 9 films seulement, de plus en plus ambitieux, personnels, complexes.

Avec "The pilgrim" il est bien devenu l'un des pères fondateurs les plus importants du cinéma mondial.

Et de quitter le court métrage, le pur burlesque pour cofonder avec Douglas Fairbanks, Mary Pickford, David W. Griffith et Thomas Ince, la United Artists le 5 février 1919 pour marquer d'une empreinte indélébile "L'opinion publique" en septembre 1923 jusqu'aux "Feux de la rampe" et son personnage de Calvero le clown déchu en 1952.

Avant de rentrer au pays en butte à des tracasseries sans nombre dues à l'acharnement d'un Hoover tenace et hargneux, à un maccarthisme délirant.

Un exil en Suisse où il retrouve la paix entouré d'Oona O'Neill, son dernier et grand amour, et de leurs huit enfants. Et où il renoue avec l'Angleterre pour les dernières productions britanniques d'"Un roi à New York" en 1957 et "La comtesse de Hong-Kong" son dernier film dix ans plus tard.

Si Chaplin avait définitivement ôté le costume de Charlot avec Monsieur Verdoux en 1947 avec un personnage trouble à la Landru, c'est bien dans la défroque du vagabond qu'il marque à jamais nos mémoires.

12272986260?profile=original                                   Solitude... muette

                                   Charlot... bonheur

                                                                                     (huile sur toile de Chantal Roussel, que je remercie pour son aimable autorisation)

Si le spectacle vous a plu je vous promets une suite avec des révélations, et même de l'inédit !

En attendant...

Bon divertissement !

Michel Lansardière

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Un souvenir ordinaire

 

 

 

La première fois que j'ai planté un caillou tout blanc, lisse et luisant, dans un pot plein de terre, j'avais cinq ans. Peut être moins, peut être plus. Peut être que ce n’est pas vrai, et que j’ai tout rêvé.

J'étais persuadé qu'à force de patience et de soins réguliers, il deviendrait un caillou gigantesque. Toute la rue en aurait été surprise. J'aurais haussé les épaules et j'aurais dit:

- ce n'est rien, ce n'est rien.

J'avoue qu'il ne s'est rien produit. J'ai conservé le pot sous mon lit pendant trois mois. Je l'arrosais régulièrement. Puis, j'ai vérifié si le caillou s'y trouvait toujours, et j'ai jeté le pot, et le caillou, dans la poubelle.

C'était l'année 1936.

 

 

C’est étrange. Aujourd’hui, je me souviens des premières années de ma vie davantage que de celles qui viennent de s’écouler. Est-ce que cela signifie que les premières comptent bien plus que les dernières ? Si je me laissais aller à rire, je dirais qu’une vie d’homme pourrait être bien plus courte qu’elle ne l’est. Que l’important c’est le début. Que le début, c’est une autre histoire, la meilleure peut être. L’avenir, c’est du remplissage avant la mort.

Mes parents et moi, nous habitions 11 rue Van Helmont. Un peu plus bas, rue des Bogards, à dix mètres à peine, se trouvait un magasin où on pouvait acheter des bonbons ou des caramels à la pièce. Les rouleaux de réglisse, les diables, noirs et brillants, y étaient particulièrement demandés sauf par ceux qui disaient que ce n'était pas beau de tirer dessus, les dents serrées, déjà noires, les lèvres ouvertes par l'effort. Mais ce sont les mêmes qui, sur leur tablier, nouaient leur écharpes par devant pour paraître plus âgés, alors que la plupart d'entre nous la nouaient sur le dos.

Notre immeuble, une grande et large bâtisse avait une entrée, au milieu de la façade, dont le couloir donnait sur une cour flanquée de trois autres immeubles. Au milieu de la cour se trouvait une auge de pierre, une pompe, et une tôle ondulée pour frotter le linge.

Je n'ai jamais pénétré dans aucun de ces trois immeubles. Notre logement se trouvait dans l'immeuble de façade.

Chacun de ces immeubles constituait pour chacun de ses occupants un quartier distinct, au caractère singulier, peut-être même une autre ville. Les gens ne s’y connaissaient pas tous, ils étaient trop nombreux. Ils n'avaient pas les mêmes horaires de travail. Ils venaient de régions différentes, et leurs accents, parfois, étaient difficiles à comprendre pour des enfants.

Nicolas Pelz, qui était mon ami, un bon élève, et un bon fils, lui, me répétait souvent ma mère, m'avait dit, un jour que je m'étonnais de l'animation qui régnait dès qu'on s'éloignait de la rue Van Helmont:

- Plus tard, tu comprendras.

Un jour, il me dit que c'était le bon jour pour voir.

- Tu comprends, c'est dimanche. Nous allons au théâtre. Ca te va?  

Le théâtre où Nicolas nous avait amenés n'était pas un véritable théâtre. C'était un cabaret nommé l’Ancienne Belgique où les gens venaient pour boire un verre ou plusieurs, attablés autour de tables rondes, tout en regardant sur une scène qui se trouvait au fond de la salle d'autres gens, les artistes, qui chantaient ou racontaient des histoires gaies. Nicolas qui était un habitué me dit qu'il ne savait pas pourquoi les applaudissements, c'était la coutume d'applaudir après chaque prestation, étaient plus nourris lorsque les histoires ou les chansons étaient tristes. Il avait même vu, je te le jure, croix de bois, croix de fer, une femme pleurer si bruyamment que le monsieur qui l'accompagnait n'arrêtait pas de lui taper sur l'épaule, en lui disant:

- Voyons, voyons, c'est pour rire.

Ce fut un après-midi éblouissant.

J'avais huit ans, lorsque dans la cour de l'école, un condisciple avec lequel je jouais m'a crié:

- Sale juif !

Je ne savais pas ce que c'était qu'un juif, et pourquoi mon condisciple avait ri en le disant. Et pourquoi, il avait tendu le poing. J'ignorais même ce que le mot signifiait. En quoi il définissait quelque chose. Grand, soit, Jérémie l'était. Beau, oui. Toutes les femmes affirmaient que le bébé de madame Kowack était beau. Malin, je n'avais qu'à évoquer Nicolas Pelz.

Soudain, j'apprenais que j'étais juif. C'était bien ou non?  Tous mes camarades de la rue Van Helmont devaient l'être également, bien que nous n'en ayons jamais parlé. Nous n'étions pas tellement différents les uns des autres. Seul, Gustave était bossu.

Un jour, mon père a dit à ma mère :

- C'est comme si nous étions toujours en Pologne. C'est en Belgique qu’il fera ses études, et il sera un belge semblable aux autres belges. Mais à Bruxelles, nous ne connaissons que des juifs. Même l'épicerie est juive. Nous construisons nous-mêmes ce mur que nous reprochions aux autres de construire entre eux et nous.

Je ne suis pas sûr évidemment que c'est en ces termes que mon père s'est exprimé devant ma mère, mais l'esprit devait être celui-là.

Quelques semaines plus tard, c’était un dimanche, nous avons pris le train jusqu'à Tournai. En sortant de la gare, j'étais entre mon père et ma mère, chacun serrait ma main.

- C'est ici que nous vivrons désormais et, comme la plupart des gens, peut être jusqu'au dernier de nos jours.

J'ai toujours suspecté mon père d'avoir l'amour du théâtre.

- Ainsi soit-il.

C'était un jour de la mi-juillet. Un jour de soleil, un jour où l'air était doux. Les arbres de la place, les façades, les rails des trams, l'éclat qui les recouvrait étaient plus brillant qu'à Bruxelles.

Mes parents, je l'ai vu sur une ancienne photographie, avaient l'air d'un couple de provinciaux béats devant un panorama de guide touristique. Il me semble que c'est sur cette photographie que je les ai vraiment regardés.

Ma mère avait trente trois ans. Elle portait un chapeau cloche muni d'une voilette, les cheveux noirs bouclés à la permanente soulignaient les bords du chapeau. Le rouge à lèvre était rutilant comme c'était la mode: le rouge baiser qui ne laisse pas de trace. Ce n'était pas une très grande femme. A en juger par la photo, sa taille devait être de un mètre soixante deux, soixante trois. Il me semble que c'était une jolie femme, et séduisante. Mais un fils est-il à même de juger de la beauté de sa mère?

Mon père portait, bien droit sur la tête un chapeau de feutre gris, un Borsalino, et un costume étroit de couleur marine. Son visage avait les pommettes saillantes, ses yeux étaient sombres, et ses chaussures brillaient comme si elles étaient neuves. Elles l'étaient probablement. Ils m'avaient enfoncé mon béret jusqu'au milieu du front.

- Nous allons aller à pieds, ce n'est pas très loin. Tu veux bien marcher? Tu es un grand garçon à présent.

La rue Royale va de la gare jusqu'à l'Escaut. Un pont que levait un technicien à chaque fois que se présentait un chaland permettait de rejoindre la rue Notre-Dame.

C'est un peu plus loin que mon père avait loué un local, surmonté d'un étage et d'un grenier, qui bientôt serait un magasin de chaussures à l'enseigne de " chez Sammy ".

Quant à moi, ils m’avaient inscrit dans une école qui portait le nom étrange d’école de la justice.

En quittant la rue Van Helmont mon père devenait à la fois un provincial, et quittait, peut être pour toujours, la condition ouvrière. C'est la lutte finale, n'évoquerait plus que des souvenirs de jeunesse.

Mais j'ai un reproche à lui faire. Pourquoi, lorsqu'on est amené à prendre des décisions aussi difficiles, elles modifient la vie de tous les membres d'une famille, pourquoi n'interroge-t-on pas les enfants? Eux aussi, on leur arrache une partie de leur passé, aussi concret pour eux qu'un territoire. A peine, ont-ils pu embrasser une petite fille blonde à qui ils tiraient les nattes, et qu'ils ne reverront probablement jamais.

Les dimensions de Bruxelles m'étaient inconnues. Bruxelles était-elle une grande ville, une très grande ville, je n'en savais rien. Par contre, Tournai était une grande ville. Un soir, adolescent, il m'avait fallu cinq heures pour en faire le tour par les grands boulevards qui séparaient la ville proprement dite de ses différents faubourgs.

C'était une ville en étoile. Vous vous éloigniez du centre, en haut, en bas, par la droite ou par la gauche, et vous aboutissiez à des routes qui portaient le nom de leur endroit de destination. Chaussée de Bruxelles, chaussée de Douai, chaussée de Valenciennes, chaussée de Lille, etc. Toutes les villes ont-elles des routes qui mènent à d'autres villes? Mais peut être toutes les villes sont elles de grandes villes pour un enfant de dix ans.

Même si en un seul jour, il quittait le domaine de l'enfance pour celui des incertitudes de l'adolescence.

 

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La justice providentielle

 

 

 

Je n'avais jamais lu les dix commandements.

Les six derniers ne sont que règles de morale,

Devraient être suivis tout instinctivement.

Or, comme il n'en est rien, la vie est infernale.

Pouvons-nous recourir à la loi du Talion,

Estimer qu'il est sain de réagir nous-mêmes?

Cela est fort tentant dès que nous oublions

Que nous pourrions avoir des problèmes extrêmes.

Face à une injustice, odieuse, accablante,

Je ne peux m'empêcher d'espérer que le sort,

Qui intervient parfois de façon surprenante,

Punisse avec rigueur le coupable des torts.

Je confesse, bon gré, que je suis satisfaite

Quand je vois l'être abjecte, à son tour affligé.

Il avait sans scrupule vécu des jours de fête,

Croyant stupidement s'être bien protégé.

25 janvier 2014

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TRISTESSE

 

                                                                               

 

Être triste, mélancolique,

c'est un peu perdre son chant,

cette couleur mélodique,

que ne veut point entendre l'être aimé ;

elle se meut alors en une froideur tranchante,

ce silence si bavard, brutal.

Être triste, mélancolique,

c'est sa voix qui perd de sa verve, de sa limpidité,

tout contre l'inflexibilité,

 la négligence de l'être aimé ;

elle se meut alors en un souffle alourdi, tout défleuri,

porteur de mon cœur tout bancal.

Être triste, mélancolique,

c'est  vous écrire depuis toujours,

avec tout mon soleil bleu il est vrai,

de ne recevoir de vous,

pas même un bout de votre ciel ;

Imaginez un seul instant un soleil tombé par terre,

avec juste au dessus de lui,

un ciel tout blanc,

sans une lettre de vous,

ni un mot, ni une phrase ;

bref la plus inconsolable des absences,

de vous à moi,

 la page blanche.

 

NINA

 

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Une mère.

J'ai assisté aux funérailles de Pierre. A regret. Pour sa mère qui se trouvait au bord de la tombe sans regarder personne, sans regarder la tombe.

Elle se tenait droite, les yeux fixés devant elle. Les traits tendus, la bouche serrée, les bras le long du corps, un peu en arrière, on eut dit qu'elle allait prendre son élan. Elle était belle.
Lorsque Pierre était absent, elle m'invitait à prendre un verre chez elle, café ou thé, ou vin ou alcool, selon l'heure. Mais c'était pour parler de Pierre. Elle savait que j'étais son ami le plus proche. Celui à qui il ferait des confidences, de celles qu'on s'interdit de faire à sa mère. A celle, cependant, qui donnerait tout pour être la confidente de son fils.
Elle était veuve depuis plus de dix ans. Elle ne s'était jamais remariée. C'est seul qu'elle avait élevé Pierre, ce fils unique qu'elle idolâtrait.
Avait-elle eu des amants? Elle était jeune, désirable, les
prétendants ne devaient pas lui manquer. Mais on ne lui connaissait personne. Et quand une amie trop curieuse lui posait la question, elle répondait:
- N'ais-je pas l'homme le plus beau et le plus attachant qu'une femme puisse rêver?
C'était une réponse banale mais je n'étais pas certain qu'elle ne représentait pas la vérité pour elle.
Pierre n'avait que dix-huit ans lorsque je l'ai connu. J'en avais vingt-trois. Il s'était inscrit à un cours d'histoire dans un institut privé qui préparait à l'entrée dans les grandes écoles. J'y faisais office de surveillant, de répétiteur, de n'importe quoi pourvu qu'il y ait quelqu'un qui parcourût la salle de classe pendant que les élèves travaillaient.
Entre Pierre et moi, s'était installé un climat de sympathie réciproque puis d'amitié réelle après que nous nous soyons promenés ensemble à la sortie des cours. Je l'accompagnais chez lui puis, plutôt que de nous quitter, c'est lui qui me raccompagnait jusqu'à mon domicile. Le plus souvent ce manège qui avait fini par nous amuser tous les deux se déroulait plusieurs fois avant que nous nous séparions. Jusqu'au lendemain.
Lorsque son père mourut, Pierre qui n'avait que huit ans fît des cauchemars toutes les nuits. Il se dressait en hurlant. Sa mère le prenait dans son lit et lui parlait à voix basse pendant qu'il se calmait et, apaisé, finissait par s'endormir, le corps contre celui de sa mère et le visage contre sa poitrine.
- Dors, mon petit chéri. Dors.
Elle fermait les yeux mais ne dormait pas. Elle continuait de murmurer:
- Dors, mon petit chéri. Dors, mon petit homme.
Il avait pris l'habitude de dormir auprès de sa mère. Le soir, lorsqu'il était l'heure de se coucher, c'est dans le lit matrimonial qu'il se glissait. A l'heure où elle-même allait se coucher, elle le trouvait recroquevillé au milieu du lit. Dès qu'elle était au lit, il se poussait contre elle. Il s'agitait jusqu'au moment où elle le prenait dans ses bras. Et sa respiration devenait régulière.
Le matin elle se levait avant lui pour lui préparer son petit déjeuner, puis il faisait sa toilette pendant qu'elle préparait son cartable. Le dimanche en revanche, c'est elle qui lui donnait son bain.
Elle lui savonnait le corps entier, jusqu'à son sexe et son derrière qu'elle savonnait avec le plus de vigueur. C'étaient des endroits qui doivent être immaculés. Elle se réjouissait lorsque le sexe de Pierre durcissait dans sa main.
- Mon petit homme.
Elle était pratiquement nue quand elle le lavait. En slip et soutien-gorge. A l'âge qu'il avait, cet aspect de sa mère ne devait pas perturber son fils, pensait-elle. Et durant de nombreuses années elle avait pris l'habitude de faire sa toilette devant lui. De cette façon, pensait-elle, il ne prendrait pas l'habitude de fantasmer sur le corps des femmes. Un corps est un corps, rien de plus. Si elle en avait eu le pouvoir, dès le début de l'humanité, elle aurait interdit qu'on cachât le corps des humains. Est-ce que les animaux, mammifères ou autres, se couvraient? Cela ne les empêchait pas de procréer. Ni d'y prendre du plaisir. Ce sont les vêtements qui sont à la source de la perversité.
Après ces vigoureuses professions de foi, elle passait beaucoup de temps devant la coiffeuse de la chambre à coucher. Elle se peignait et se maquillait, en regardant dans le miroir le petit Pierre immobile qui contemplait sa mère.
- Mon petit homme.
C'est une expression qu'elle utilisait souvent. Et la portait à lui tendre les bras pour le serrer contre sa poitrine.
- L'homme de ma vie. Tu le sais que tu es l'homme de ma vie.
Pierre me disait :
- Jusque fort tard, j'ai plus souvent dormi auprès de ma mère que dans mon lit. De toute manière, la porte de ma chambre, elle était voisine de la sienne, était toujours ouverte. Quand je ne dormais pas, je l'entendais me dire:
- Tu dors?
Et parfois c'est elle qui me réveillait quand elle me demandait si je dormais.
Pierre me parlait de sa mère avec l'air résigné et malheureux de parents qui ont un gosse handicapé mental. Parfois j'avais le sentiment qu'il la haïssait.
- Qu'elle me laisse vivre. Et si j'ai envie d'être malheureux.
- Elle n'a jamais été tentée de recommencer sa vie? Ta mère est très belle. Je suppose que comme toutes les femmes, elle a des besoins.
- Des besoins?
Je changeais de sujet. Je me demandais si en recueillant les confidences de Pierre, je pensais réellement à lui.
- Elle est belle, non?
Il avait dix-sept ans quand sa mère et lui avaient rencontré la fille d'une amie de sa mère. Pierre avait détourné la tête en rougissant.
- Pierre.
Il avait rougi plus fort encore, et avait baissé les yeux. Cette timidité maladive en face des filles, elle devait la constater à de nombreuses reprises depuis lors. Et elle s'en désolait.
Une nuit qu'il était étendu auprès d'elle, elle lui entoura les épaules et le serra contre elle.
- Tu es un bel homme, tu sais. Elles seront nombreuses, les filles qui voudront t'avoir dans leur lit. Je peux te le dire, tu es toujours mon petit homme chéri. Il n'y a pas de mot tabou, tu peux me croire. Un sexe comme le tien, mon chéri, ferait le bonheur de toutes les femmes.
Elle l'avait à peine touché, et il avait durci, le ventre soudain en feu.
- Ce n'est pas ce que tu crois.
Il était sorti du lit, il était entré dans sa chambre et il avait fermé la porte.
Comment dire à sa mère que les filles ne l'attiraient pas.
- Ce jour-là, je crois qu'elle ne se serait pas refusée.
- Elle croit bien faire, Pierre. Elle t'aime. Dis-lui que ce ne sont pas les filles que tu aimes. Il faudra bien qu'elle s'y fasse.
- Elle en deviendrait malade.
Un soir qu'il était rentré tôt, il entendit des gémissements qui venaient de la chambre de sa mère. Inquiet, il poussa la porte. Nue, haletante, elle était assise sur le ventre d'un homme qui lui serrait les hanches.
Au bruit de la porte, elle avait tourné la tête.
- Pierre.
Pierre avait refermé la porte.
- Vas-t' en.
Elle rejeta la couverture, mit sa robe de chambre, prit les vêtements le l'homme, et les lui mit dans les bras. Elle répétait:
- Vas-t' en. Vas-t' en.
Elle l'avait presque ramassé dans la rue parce qu'il fallait qu'ils sortent, Pierre et elle, de cette situation qui s'était créée il y avait longtemps, et qu'elle n'avait pas pu maîtriser. Elle se rendait compte que c'était son petit Pierre qui en était la victime.

Cela avait été sa façon à elle, encore une fois, de se sacrifier pour lui, de lui manifester son amour. Et, une fois de plus, elle avait été maladroite. Est-ce que l'amour ne suffit pas pour distinguer le bien du mal?
Pierre avait retrouvé au grenier le pistolet de son père. Bien emballé dans un morceau de toile grise, et glissé dans une sacoche de cuir souple, il était resté à l'endroit où son père l'avait déposé. Peut-être par superstition, personne n'y touchait jamais.
Jusqu'au jour où Pierre l'avait glissé dans la bouche.

 

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Ouvrage à caractère historique sur le vicinal dans l'entité d'Incourt.

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Patrick Piffet, l’auteur, est un amateur qui démarra son projet en se posant des questions sur un lieu dit (par les anciens d’Opprebais) « la ligne de tram ».

De fil en aiguille, de recherches historiques en collection de documents, cartes géographiques et photos anciennes, il s’est ingénié à redécouvrir le tracé des voies, les sites, les gares, les cafés, les sociétés d’exploitation, le matériel roulant, les aspects économiques, sociaux et politiques de l’époque en mettant l’accent sur le formidable essor qu’a suscité la création de la voie métrique par la SNCV.

Abondamment illustrée, cet ouvrage remémorera aux plus anciens un temps où la mobilité dans les entités rurales n’était pas un vain mot, et aux plus jeunes, elle permettra de découvrir des lieux actuels riches d’un passé glorieux, témoins de l’engouement sans précédent que suscita le vicinal auprès de nos populations.

Tous les renseignements pour se procurer l'ouvrage se trouvent sur la page de couverture ci-jointe. 

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François Speranza nous fournit régulièrement d'excellentes critiques d'artistes.  Les titres de ses billets livrés sont repris ci-dessous, les plus récents situés en haut de cette table des matières.

Nous lui sommes extrêmement gré d'un tel travail, qui enrichit superbement le réseau et qui offre aux artistes qui ont été choisis avec le plus grand soin une analyse pointue de leurs oeuvres.

Les billets critiques de François Speranza deviennent de plus en plus connus et attendus avec impatience par les artistes qui font l'objet de commentaires ainsi que par ceux qui ont pu contempler de visu toutes les oeuvres mentionnées et qui attendent des suppléments d'informations afin de compléter leurs ressentis, et d'approfondir leur rencontre avec les artistes.

Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.

       

         Ceci est une initiative originale et exclusive du Réseau Arts et Lettres.

Chacun de ces billets porte le sigle du Réseau qui est accordé aux contributions exceptionnelles:

Arts 
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Lettres

N.B.: toutes les expositions relatées dans ces billets se sont déroulées à L'Espace Art Gallery, 35 rue Lesbroussart à Bruxelles - Ixelles.

Robert Paul, fondateur et administrateur général du Réseau Arts et Lettres

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ABSTRACTION LYRIQUE - IMAGE PROPHETIQUE : L'ART DE KEO MERLIER-HAIM

DE L’ABSTRACTION DES CORPS : L’ART DE DEJAN ELEZOVIC

L'IMAGE DE LA FEMME DANS LA MYTHOLOGIE D'ARNAUD CACHART

L’IDEE, ARCHITECTURE DE LA FORME : L’ŒUVRE DE BERNARD BOUJOL

LE THEATRE DES SENS : L’ŒUVRE D’ALEXANDRE PAULMIER

DU CIEL INTERIEUR A LA CHAISE HUMAINE : L’ŒUVRE DE NEGIN DANESHVAR-MALEVERGNE

VARIATIONS SUR LE BESTIAIRE : L’ŒUVRE DE ROBERT KETELSLEGERS

ELIETTE GRAF ENTRE POESIE ET MAGIE

COULEURS DE MUSIQUE, MUSIQUE DES COULEURS : L’ART DE HOANG HUY TRUONG

REFLETS D’UNE AME QUI SE CHERCHE : L’ŒUVRE DE MIHAI BARA

LE SIGNE ENTRE PLEINS ET VIDES : L’ŒUVRE DE CHRISTIAN GILL

ENTRE LES SPHERES DE L’INFINI : L’ŒUVRE D’OPHIRA GROSFELD

PAR-DELA BÉATRICE : LE DIALOGUE DE CLAUDIO GIULIANELLI

DE L’ESTHETIQUE DU SUJET : L’ART DE JIRI MASKA


ENTRE REVE ET FEMINITE : L’ŒUVRE DE CHRISTIAN CANDELIER

DE L’ORDINAIRE COMME ESTHETIQUE : L’ŒUVRE DE YVONNE MORELL

QUAND SURREALISME ET HUMANISME EXPRIMENT L’ŒUVRE D’ALVARO MEJIAS

UN THEATRE DE COULEURS ET DE FORMES : L’UNIVERS D’EDOUARD BUCHANIEC

CHRISTINE BRY : CAVALCADES AU CŒUR DE L’ACTE CREATEUR

QUAND LE MYTHE S’INCARNE DANS L’ART : L’ŒUVRE D’ODILE BLANCHET

D’UN SURREALISME L’AUTRE : LES FLORILEGES DE MARC BREES

DE LA TRANSPARENCE DE L’AME : L’ŒUVRE DE MARIE-CLAIRE HOUMEAU

VERS UN AUTRE SACRE : L’ŒUVRE DE RODRIGUE VANHOUTTE

LE SIGNE ENTRE LA CULTURE ET LE MOI : L’ŒUVRE DE LYSIANE MATISSE

DE LA MATIERE ENTRE LES GOUTTES DE L’ESPACE : L’ŒUVRE DE FRED DEPIENNE

FREDERIQUE LACROIX-DAMAS - DU PALEOLITHIQUE AU CONTEMPORAIN : RETOUR SUR L’ORIGINE DU MONDE

ENTRE SURREALISME ET METAPHYSIQUE : L’ŒUVRE DE GHISLAINE LECHAT

LA FEMME CELEBREE DANS LA FORME : L’ŒUVRE DE CATHERINE FECOURT

LA LIGNE ENTRE COULEURS ET COSMOS : L’ŒUVRE DE VICTOR BARROS 

CHRISTIAN BAJON-ARNAL : LA LIGNE ET LA COULEUR : L’ART DE L’ESSENCE

LE ROMAN DE LA ROSE : L’ECRITURE PICTURALE DE JIDEKA

MARTINE DUDON : VOYAGE ENTRE L’ESPACE ET LA FORME

TROIS MOMENTS D’UNE CONSCIENCE : L’ŒUVRE DE CATHERINE KARRER

CHRISTIAN KUBALA OU LA FORME DU REVE

L’ŒUVRE DE JACQUELINE GILBERT : ENTRE MOTS ET COULEURS

TROIS VARIATIONS SUR UN MEME STYLE : L’ŒUVRE D’ELIZABETH BERNARD

ISABELLE GELI : LE MOUVEMENT PAR LA MATIERE

L’ART, MYSTIQUE DE LA NATURE : L’ŒUVRE DE DOROTHEE DENQUIN

L’AUTRE FIGURATIF : l’ART D’ISABELLE MALOTAUX

CLAUDINE GRISEL OU L’EMOTION PROTAGONISTE DU MYTHE

VOYAGE ENTRE LYRISME ET PURETE : L’ŒUVRE ABSTRAITE DE LILIANE MAGOTTE

GUY BERAUD OU L’AME INCARNEE DANS LA FORME

LA FEERIE DE L’INDICIBLE : PROMENADE DANS L’ŒUVRE DE MARIE-HELENE FROITIER

JACQUELINE KIRSCH OU LES DIALOGUES DE L’AME

DU CORPS ET DU CODE : L’HERITAGE PICTURAL DE LEONARD PERVIZI

JACQUES DONNAY : ITINERAIRES DE LA LUMIERE

MIREILLE PRINTEMPS : DIALOGUE ENTRE L’ESPACE ET LE SUJET

STEPHAN GENTET: VOYAGE ENTRE LE MASQUE ET LE VISAGE


MARC LAFFOLAY : LE BOIS ET LE SACRE

FLORENCE PENET OU LA COULEUR FAUVE DES REVES

LE SURREALISME ANCESTRAL DE WILLIAM KAYO

CLARA BERGEL : DE L’EXISTENCE DU SUJET



GERT SALMHOFER OU LA CONSCIENCE DU SIGNE

ALFONSO DI MASCIO : D’UNE TRANSPARENCE, l’AUTRE

 

LESLIE BERTHET-LAVAL OU LE VERTIGE DE L’ANGE


TINE SWERTS : L’EAU ENTRE L’ABSTRAIT ET LA MATIERE


ELODIE HASLE : EAU EN COULEURS


RACHEL TROST : FLOATING MOMENTS, IMPRESSIONS D’INSTANTS


VILLES DE L’AME : L’ART DE NATHALIE AUTOUR


CHRISTIAN LEDUC OU LA MUSIQUE D’UNE RENAISSANCE


CHRISTIGUEY : MATIERE ET COULEUR AU SERVICE DE L’EXPRESSION


HENRIETTE FRITZ-THYS : DE LA LUMIERE A LA LUMINESCENCE


LA FORME ENTRE RETENUE ET DEVOILEMENT : L’ART DE JEAN-PAUL BODIN


L’ART DE LINDA COPPENS : LA COULEUR ET LE TRAIT DANS LE DIALOGUE DES SENS


CLAUDE AIEM : OU LA TENTATION DU SIGNIFIE


BOGAERT OU L’ART DE LA MYSTIQUE HUMAINE


MICHEL BERNARD : QUAND L’ART DANSE SUR LES EAUX


PERSONA : DE L’ETAT D’AME AU GRAPHISME. L’ŒUVRE D’ELENA GORBACHEVSKI


ALEXANDRE SEMENOV : LE SYMBOLE REVISITE


VERONICA BARCELLONA : VARIATIONS SUR UNE DEMARCHE EMPIRIQUE


FRANCOISE CLERCX OU LA POESIE D’UN MOMENT


XICA BON DE SOUSA PERNES: DIALOGUE ENTRE DEUX FORMES DU VISIBLE


GILLES JEHLEN : DU TREFONDS DE L’AME A LA BRILLANCE DE L’ACHEVE


JIM AILE - QUAND LA MATIERE INCARNE LE DISCOURS


DIMITRI SINYAVSKY : LA NATURE ENTRE L’AME ET LE TEMPS


FRANÇOISE MARQUET : ENTRE MUSIQUE ET LEGENDE


CLAUDINE CELVA : QUAND LA FOCALE NOIE LE REGARD


LES COULEURS HUMAINES DE MICAELA GIUSEPPONE


MARC JALLARD : DU GROTESQUE A L’ESSENTIEL


JULIANE SCHACK : AU SEUIL DE L’EXPRESSIONNISME MYSTIQUE


ROSELYNE DELORT : ENTRE COULEUR ET SOUVENIR


BETTINA MASSA : ENTRE TEMPS ET CONTRE-TEMPS

XAVI PUENTES: DE LA FACADE A LA SURFACE : VOYAGE ENTRE DEUX MONDES

MARYLISE GRAND’RY: FORMES ET COULEURS POUR LE TEMPS ET L’ESPACE

MARCUS BOISDENGHIEN: ETATS D’AME…AME D’ETATS : EMOTIONS CHROMATIQUES

 

JUSTINE GUERRIAT : DE LA LUMIERE

 

BERNADETTE REGINSTER : DE L’EMOTION A LA VITESSE

 

ANGELA MAGNATTA : L’IMAGE POUR LE COMBAT

 

MANOLO YANES : L’ART PASSEUR DU MYTHE

 

PIERRE-EMMANUEL MEURIS: HOMO LUDENS

 

MICHEL MARINUS: LET THE ALTARS SHINE

 

PATRICK MARIN - LE RATIONNEL DANS L’IRRATIONNEL : ESQUISSES D’UNE IDENTITE

 

CHRISTIAN VEY: LA FEMME EST-ELLE UNE NOTE DE JAZZ?

 

SOUNYA PLANES : ENTRE ERRANCE ET URGENCE

 

JAIME PARRA, PEINTRE DE L’EXISTENCE

N.-B:

Statistiques des consultations de l'ensemble de ces billets au 22 mai 2014:

20936 consultations

Mise à jour du 13 juin 2015: Ces billets ont été consultés  43120 fois

Mise à jour du 5 juillet 2016: ces billets ont été consultés 74256 fois

Mise à jour du 6 juillet 2017: ces billets ont été consultés 96071 fois

 

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Ô le plaisir des rêveries!

 

 

On sait le bonheur éphémère.

On oublie cette certitude,

En accueillant des habitudes.

Heureux, on ne s'inquiète guère.

Des zones ensoleillées, fertiles,

Dont les étrangers sont exclus,

Où vivent des humains élus,

Peuvent ne pas sembler fragiles.

Il n'existe cependant pas

De lieux terrestres où ne pénètrent

La folie attaquant les êtres

Et des forces les perturbant.

Malgré les énormes distances,

Chacun se trouve spectateur

Des plus implacables terreurs

Pouvant surgir dans l'existence.

Peut-on se rendre aveugles et sourds,

Accéder à l'indifférence,

S'ensoleiller dans le silence

Savourer la douceur d'un jour?

Ô le plaisir des rêveries,

D'errance en un autre univers!

Viennent aux lèvres de beaux vers

Chargés des grâces de la vie.

24 janvier 2014

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administrateur théâtres

Richard III au théâtre Royal du Parc

12272989285?profile=originalRichard III (Shakespeare)

 

« Me voilà entré si avant dans le sang, qu'il faut qu'un crime chasse l'autre… »

 L’histoire: le duc de Gloucester est un York, le frère du roi Edouard IV qui  a détrôné le dernier des Lancastre, Henry VI, en 1471. Il souffre haineusement de disgrâces physiques et est dévoré par l’ambition. Il fait arrêter son demi-frère, George, duc de Clarence, qui est mené à la Tour de Londres pour y être noyé. Il parvient à obtenir la main de Lady Anne dont il a tué le mari,  le  prince de Galles (fils de Henry VI). Il s’arrange pour qu’Edouard IV meure aussi. Devenu régent, il fait disparaître à la Tour de Londres ses propres neveux, le jeune héritier de douze ans, Édouard V et son frère. Les femmes de la cour sont incapables d’empêcher ces meurtres programmés. Il fait courir le bruit que  Lady Anne est atteinte d’une maladie incurable… Il  se fait proclamer roi sous le nom de Richard III et il obtient la main de sa jeune nièce Élisabeth. Les femmes sont toujours aussi impuissantes à arrêter son appétit dévorant. L'usurpateur règne par la terreur. Le comte de Richmond, leur unique allié,  prend la tête d’une rébellion qui conteste la légitimité de Richard et ses abus de pouvoir. Nous voilà  la nuit de la bataille de Bosworth, en 1485. Le roi Richard est  hanté par les spectres de ses victimes. Il est réduit à combattre à pied, lançant son exclamation célèbre : «Un cheval ! un cheval ! Mon royaume pour un cheval !» (V, 4). Il est vaincu bien que ses troupes soient bien  plus nombreuses que celles de Richmond et trouve la mort. Le  comte de Richmond (Lancastre par sa mère) est proclamé roi sous le nom de Henry VII. Il épouse  Élisabeth d'York, jeune veuve de Richard III. La réconciliation des deux familles signe la fin de la guerre fratricide des Deux Roses et instaure la nouvelle dynastie des Tudor. La paix au doux visage et la riante  prospérité sont enfin possibles!  Ils auront beaucoup d’enfants, dont le futur Henry VIII! Et les photographes de Paris Match  de crépiter! Oui! Car la mise en scène d' Isabelle Pousseur  est  résolument moderne!

Dans son hypocrite voyage vers  la sauvagerie du  pouvoir absolu, le duc de Gloucester, futur Richard III sous les traits de Guy Pion ne connait ni lois divines, ni lois humaines. Il est un  monstre de fourberie, de manipulation meurtrière et de  méchanceté. Pas une valeur humaine ne trouve grâce à ses yeux, il n’a pas une once de pitié et n’éprouve aucun respect  pour  la vie : pour la femme, qu’elle soit  mère, épouse, sœur,  nièce, ou pour l’enfant. Il incarne  l’image démoniaque de la  crapule totale, privée de tout scrupule, de tout sentiment hormis  son amour immodéré de lui-même. Il évolue à la façon d’une machine impitoyable dont  l’ingéniosité diabolique se plaît à prendre le public à témoin et pratique autour de lui un interminable jeu de massacres, singeant la puissance de Dieu en personne. 

La deuxième partie de la pièce démontre enfin que cet être qui se croit illimité est totalement enfermé et prisonnier de  lui-même. La scène où il est hanté par les ombres blanches de ses victimes est sublime. Cette scène qui précède la bataille est d’une plasticité remarquable. Elle  est enfin chargée d’humanité et cela fait du bien!  Chorégraphie et texte épousent finement l’âme torturée du conspirateur avant sa chute.  C’est le cœur de la pièce dont le climat  hallucinant  fait enfin oublier la présence sur scène de cet inutile travesti sorti des années folles qui avait hanté  le plateau au début. Il a fallu  pas mal temps avant de comprendre que ce personnage en perruque et en fourreau à paillettes n’était pas une prémonition de la mort omniprésente mais  la putain d’un des autres ducs, assassiné lui aussi.   

 

Néanmoins on ne comprend pas comment un personnage aussi noir et aussi méprisable que ce mielleux duc de Gloucester réussisse à gagner le cœur de la pauvre Lady Ann qui se lamente au bord de la tombe de son mari tué par le monstre. La scène de sa séduction n’est pas fort convaincante. A moins qu' Isabelle Pousseur,  la metteuse en scène n’ait décidé de mettre  en scène la douloureuse tentation de la collaboration avec l’ennemi. Quand c’est une question de vie ou de mort, il faut beaucoup de courage pour résister. La reddition de Lady Anne est un peu trop brusque, pas vraiment explicable.  Une scène qui fait  froid dans le dos, surtout au vu des costumes choisis, qui rappellent fortement la deuxième guerre mondiale.  L’autre scène très accablante est celle où Gloucester convainc cyniquement sa mère de lui donner la main de sa nièce, la jeune Elisabeth pour  légitimer son nouveau pouvoir.

Le texte a été contracté pour que le spectacle ne dure que 2h 45 entracte compris. Képis, galons et costumes militaires gris ou kaki font partie de cette mise en scène moderne. Le plateau est vide à part une sorte de large  colonne de fin voilages dorés dans laquelle on voit jouer des personnages par transparence avec de splendides effets de lumière. Ce lieu de prédilection pour tous les moments forts de la pièce représente La Tour de Londres,   les  appartements royaux, la salle du conseil du palais où  le perfide Gloucester se fait longuement prier avant « d’accepter » le couronnement. Un micro amplifie ici et là les appels à la sagesse shakespearienne. Pas une goutte de sang, juste une cagoule noire passée sur la tête de la victime qui rappelle le capuchon de la fauconnerie. Il y a ce grand escalier que Richard III monte en conquérant, vêtu d’habits royaux criards avant de le redescendre pour mourir plus tard, seul et abandonné, ayant même fait assassiner Buckingham le fidèle comparse  de ses infamies.

12272989868?profile=originalEn dehors des prestations impeccables de Guy Pion (Gloucester)  et de Simon Duprez (Buckingham), les personnages féminins sont particulièrement bien étudiés et remarquablement  interprétés. Anouchka Vingtier (Lady Ann),  Beatrix Ferauge (Lady Gloucester), Brigitte Dedry (Lady Elisabeth) sont, toutes, admirables. Et le reste de la distribution, à l'avenant!

 Au Théâtre royal du Parc, jusqu’au 15 février, à 20h15 (dimanche à 15h). Infos & rés. : 02.505.30.30, www.theatreduparc.be

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administrateur théâtres
AU théâtre Poème: François Emmanuel était l'invité de Pascale Seys dans Le Grand Charivari sur Musiq'3 ce samedi . Pour l'écouter ou le réécouter : http://www.rtbf.be/radio/player/musiq3?id=1886891
"Joyo ne chante plus", notre 2ème spectacle de François Emmanuel - avec Gwen Berrou dans une mise en scène de Pascal Crochet, commence ce jeudi !! Pour les plus curieux, il y  a eu même une avant-première mardi 21 à 14h ! Réservation souhaitée : reservation@theatrepoeme.be ou 02/538 63 58

Courir au théâtre Poème pour se baigner dans la musique des mots, ce que l’on adore. Entendre une voix qui les caresse, les exalte, les consume, les fait frétiller, les adule, les capte et les relance dans l’univers. C’est du moins ce que l’on attendait du spectacle de mots créé par le texte de François Emmanuel, un personnage bien sympathique entr’écouté sur nos ondes récemment.

Et ressortir du spectacle la gorge feutrée d’inconfort, de malaise et de frustration de n’avoir rien compris. Avoir rencontré l’auteur, François Emmanuel, et lui avoir conté, complètement catastrophés, le malheur de n’avoir été ni émus, ni touchés par cet étalage répétitif de solitude ou de folie. Dites-moi où sont les codes d’accès ? Y a-t-il des clefs ? On est désemparés. Le but du jeu est-il de causer le désarroi du spectateur ? Lui confier aussi que l’on s’est presque endormis, par trois fois. Que ouf, le texte est dans la boîte que l’on tient sous le bras et que l’on va prendre le temps de le ré-appréhender chez soi, par une lecture attentive, l’esprit prêt à la découverte. Dommage ! Une phrase de Nietzche a été malheureusement prononcée : « L’art n’est pas pour tout le monde ». On a discuté avec ce même professeur de cinéma qui explique : "Dans ce spectacle il n’y a rien à comprendre, rien à emporter. Ne croyez pas que vous avez un prêt à consommer, all inclusive ! Il faut rassembler les fragments (du long caquetage proposé) - vous me suivez ? - et faire son tissage personnel." Cheminer en solitaire, c’est là tout l’intérêt de cette nouvelle approche cocasse du théâtre. C’est le spectateur qui est mis à contribution et qui doit se référer à lui-même, à son vécu personnel et ainsi partir en voyage… Bonne chance !

Le décor est morne et triste à mourir : un deux-pièces suranné, chichement meublé, couleur terres. Lumières aussi faiblardes que la voix. Au début, la comédienne semble surgir d’une muraille des grottes de Lascaux et, dans sa robe sans manches droite et courte, figure des lents gestes d’échassier. A un autre moment le jeu de lumières donne l’illusion d’une longue table couverte de pièces comme un immense échiquier – la terre vue de l’univers ? - Il s’avère que ce n’est qu’une mince étagère couverte de figurines grossières en terre cuite. Hommes ? Oiseaux ? Epars et renversés à la fin du spectacle. La gestuelle est d’une lenteur exaspérante, la voix est sèche, monocorde, infra-communicative sauf pour l’impression de tristesse et d’exclusion du monde ou celle de folie désespérante. Joyo ? Il ne s’agit ni de l’albatros de Baudelaire, encore moins de l’oiseau bleu de Maeterlinck ou de l’oiseau de Junon ou d’Athéna. Les oiseaux à connotation sexuelle de Miro ? Peut-être. On cherche vainement à se raccrocher à quelque chose ! Qu’on me donne une branche ! L’oiseau dont on parle pourrait tout aussi bien être un chat, un chien ou un cochon d’Inde. La femme qui joue pourrait être un homme…

L’histoire, s’il y en a une, après en avoir rassemblé les débris épars est un fait divers. Une femme encore jeune, triste et sévère à mourir, se prépare à faire une cérémonie d’enterrement de son oiseau sans cage, qu’elle vient de perdre. Elle est excédée par les bruits divers de ses voisins et surtout le martèlement des talons aiguilles de sa voisine du dessus. Elle est harcelée par des huissiers qui vont bientôt procéder à son expulsion. Elle s’adresse à plusieurs reprises à un juge imaginaire et singe à merveilles le jargon judiciaire. Qui sait… des références à Kafka ? C’est tout. Le détail intéressant : si le spectateur en quête de clefs va voir dans la boîte à cigares où elle a enfermé l’oiseau avant de le conduire au bûcher, il y a (on le savait) des photos de jeunesse, quelques fils à broder et 6 fonds de montres anciennes ayant perdu leurs aiguilles que l’on aurait pu prendre, vus de loin, pour des hosties. Cela, aucun des spectateurs ne l’aura deviné. Sauf les très curieux qui ont osé poser la question après.

Loin de nous l’idée de mettre à mal l’excellente comédienne Gwen Berrou. Elle a eu bien du courage de se mesurer à un texte aussi dilaté et soporifique ! C’est une mission impossible de construire un jugement critique pour quelque chose qui ne vous parle pas et que l’on ne comprend pas. Donc, donnons juste …le bénéfice du doute ! Il faut sans doute avoir lu le texte avant d’aller au spectacle !

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Un suicide ordinaire


Lorsqu’Hélène est morte, il avait dit à René de qu’il ne souhaitait pas que ses amis assistent aux funérailles. Ni recevoir de lettres de condoléances. A l’exception de l’un d’entre eux, Gilbert, dont la femme était morte d’un cancer quinze jours auparavant, et incinérée deux jours plus tard. Ce matin là, Pierre avait eu le sentiment d’assister à la répétition générale d’une pièce dans laquelle il ne tarderait pas à jouer un rôle. Il avait pleuré.

Depuis, il avait appris que trois mois plus tard Gilbert avait épousé sa secrétaire. Elle était sa maitresse depuis longtemps.

La cérémonie d’incinération fut courte. Debout, seul dans le funérarium, Pierre fixait le cercueil qui s’engouffrait dans une bouche de flammes aux sons d’une marche funèbre. Cette fois, il avait les yeux secs.

- Vous voulez assister à la dispersion des cendres ?  

Une heure plus tard, le desservant  lui avait remis un galet qu’il ajouta à leur anneau de mariage, à un collier d’ambre qu’elle aimait, et au morceau de pièce d’identité qui lui avait été remis la veille. Il voulait les conserver pour que, au delà du souvenir, il puisse rester une trace matérielle de leur union.  

Revenu chez lui, il s’était étendu tout habillé sur le lit. Il voulait mourir. Il y avait dans l’armoire à pharmacie un grand nombre de médicaments sous forme de pastilles à avaler. En avaler une poignée d’un seul coup, lui avait-on dit un jour, pouvait assommer un bœuf. Mais tuer un homme ?

Il était resté trois jours dans cette position larvaire sans se laver, sans se raser, sans se peigner. Au bout de trois jours, il avait ressenti un élancement à l’estomac mais ce n’était pas le symptôme de la mort, c’était celui de la faim. 

Il avait pris dans le frigo un morceau de pain, il l’avait décongelé, et il l’avait mangé. Puis il s’était levé, il avait pris un bain, il s’était rasé soigneusement, et il était allé au supermarché pour acheter de quoi se nourrir.

Il avait aussi acheté un livre donc le titre était explicite : suicide, mode d’emploi, d’un certain Gillon. Vous avaliez un tube complet de barbituriques, et il était probable que vous ne vous réveilliez plus. C’est le mot « probable » qui l’avait arrêté.

Il le constatait, il est plus simple de mourir à la suite d’une maladie incurable ou lors d’un grave accident.  Alors même que vous est laissé le choix du moment et de l’environnement, mourir de sa propre main était singulièrement difficile. Bien plus qu’on ne l’imagine dans les ténèbres de sa détresse.

Une autoroute passait à proximité de la maison sous le viaduc qu’il empruntait depuis des années. Juste après un virage en épingle à cheveux assez mal conçu à son sentiment. Il le répétait souvent, il fallait faire attention, et ne pas rouler trop vite. Un moment d’inattention, une vitesse excessive, et vous pouviez franchir d’un bond le monticule sous lequel se trouvait le viaduc. Et vous retrouver sur l’autoroute, mais en quel état !

Il ne faut pas trop trainer lorsqu’on à l’intention de se suicider. C’était la faute à Julie s’il n’avait pas mis son projet à exécution.

Julie était une de leurs amies. Elle avait perdu son mari, un charmant garçon, lors d’un accident de chemin de fer. Il y avait eu trois morts, la presse n’en avait pas fait sa première page parce que c’était au moment des élections présidentielles américaines, mais l’un d’eux était Albert, son mari.

Elle avait téléphoné le lendemain de l’incinération d’Hélène. Elle avait dit qu’elle avait compris, Pierre ne savait pas encore ce qu’elle avait compris, mais elle souhaitait le voir. Il ne pouvait pas le lui refuser.

Julie était de ces femmes que leur mari comblait  souvent, c’était criant, mais moins souvent qu’au temps de leurs premières années de mariage. Elle l’avait confié à son amie Hélène.

Pierre avait souvent pensé à Julie lorsque sa femme était vivante. Depuis qu’elle était morte, il avait cessé d’y penser. C’est Julie qui s’était rappelée à lui

L’idée de son suicide se ramena quelques jours plus tard à une idée dont on débat avec sa conscience mais sans s’efforcer de la matérialiser. Et dont très vite, on ne débat plus : la vie continue.

Ce livre qu’il avait laissé ouvert à la page qui recommandait d’avaler un tube de barbiturique, il l’avait fermé et  rangé dans un tiroir. Ce virage à proximité de la maison dont le dessin lui semblait aussi tranchant et dangereux qu’une lame, il suffisait de faire preuve d’un peu de prudence avant de l’aborder. D’ailleurs, il l’empruntait depuis plus de dix ans, quelque soit l’état de la route, et sans y penser.

Suicide ? Il fallait être stoïque et courageux. Accepter sans fléchir le sort que le sort vous réserve. Vivre, soit.

Le soir même, après le coup de téléphone de Julie, il avait pris un bain, il s’était légèrement parfumé, il avait mis une tenue dont il savait qu’elle l’avantageait. Il s’était offert un double whisky pour se donner un coup de fouet. La nuit était tombée lorsqu’il était monté en voiture et s’était rué sur la route, la tête en feu.

Une heure plus tard, il était dans le lit de Julie. Peut être n’y a-t-il pas de justice immanente ? Dieu doit détourner la tête.

C’est en rentrant chez lui aux premières lueurs de l’aube qu’il avait manqué le virage, et qu’il s’était écrasé sur l’autoroute.

 

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Renaissance,

                                                                              

 

Je me tais,

pareillement à l'hiver,

mon cœur craque,

lorsque je pense à vous ;

si  insuffisant est mon corps,

pour seul le contenir,

mon âme le console,

 l'élargit ; j'écris  !

Alors je chante,

pareillement à l'hiver,

mon cœur compose,

déborde, non sans élégance,

lorsque je pense à nous !

Dehors,

il neige chaudement.

 

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LES OBJETS...

Du fond de leur mémoire

Si les objets parlaient

On aurait mal à croire

A ce qu'ils raconteraient!

Trop souvent négligés

Passant de mains en mains

Ou parfois relookés

Et tournés vers demain!

Ils ont pris dans leur bois,

Leur pierre ou leur acier

L'écho de tant d'émois

qu'on pensait oubliés!

Mais dans leurs molécules

Le cœur des années

Loin d'être minuscule

encore moins surannées...

Prend bien la dimension

D'une continuité

Dont la répercussion

Pourrait nous étonner...

Chinés ou flambant neufs

A l'ombre de nos espoirs

Les objets font un bœuf

En chantant notre histoire!

J.G.

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