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comédie (193)

administrateur théâtres

12272878490?profile=original« Ca c’est bien. Questionnez. Questionnez toujours ! »

 Contrastes : Le temps s’est arrêté à 5h 35,  à la mort de la  femme du vieux professeur Mashkan (Alexandre von Sivers). L’horloge de la bibliothèque rococo a de singuliers traits communs avec celle du bâtiment central du plus célèbre des camps de la mort. Les barbelés et les bruits d’univers concentrationnaire  surgissant régulièrement sur la toile de fond du décor sont une sorte de mise en abîme, si l’on peut dire. La dignité du vieux professeur et sa passion retrouvée en présence d’un unique élève cache mal sa pauvreté pécuniaire et un passé indicible.

 Voyage initiatique dans le temps : Stephen Hoffman,  (Jean-François Brion), un  jeune américain adulé est envoyé par son père en Autriche pour surmonter un  blocage soudain  et inexplicable dans sa  brillante carrière de pianiste prodige. Une condition : qu’il fasse œuvre de mémoire  en allant visiter Dachau. Mais arrivé à Vienne, il va devoir affronter un  professeur inattendu et grognon aux propos souvent  antisémites. Dès son entrée en scène le jeune pianiste triple A est arrogant, agressif  et agité par une nervosité fébrile. Il est clair qu’il ne veut pas repartir à zéro par le chant…. C’est un affront à son talent ! Les leçons démarrent tant bien que mal… 

12272878894?profile=originalCe qui  fait la beauté du spectacle n’est pas seulement le décor de l’équipe bien rôdée de Marc Cocozza, un décor aussi soigné que celui d’une antique boîte à biscuits, c’est la superposition extraordinaire de niveaux d’écoute qui rendent l’œuvre universelle et en font une leçon de vie et une leçon de mémoire.  Et quelle polysémie dans cette complexité symphonique ! S’opposent sur le plateau l’allemand et le français,  l’ancienne Europe et les Etats-Unis avant-gardistes, la  réflexion et l’émotion, la jeunesse et la maturité, le maître et l’élève, le père et le  fils, le piano ou le chant et la poésie, la dépression et l’exaltation,  le devoir de  mémoire et le pardon… et la liste n’est pas close!   Plusieurs thèmes bouleversants forment l’armature de la pièce: la controverse de l’élection de  Waldheim élu président de la République d'Autriche 8 juillet 1986,  le déni général du passé nazi de l’Autriche. La transmission et  le devoir de mémoire. Mais aussi le pouvoir de rédemption de l’amitié et de l’art,  l’importance de de l’appartenance à une culture donnée, allemande en l’occurrence, Heinrich Heine. Tout ceci est traversé par  l’utilisation de la dérision et de l’humour comme protection, voici un savoureux festival d’humour juif.   

Ce n’est pas fini.  Le cycle de chansons de Schumann : Dichterliebe constitue  autant de volets …bénéfiques  à l’articulation de la pièce. Des paroles de désir et de volupté se greffent sur la mélancolie de la musique : de la beauté pure, à en croire le profeseur de musique ! Ces volets  illustrent à la perfection la  belle phrase de Bertold Brecht: « La qualité d’un homme se révèle à travers ce qu’il pleure et la manière dont il le pleure » Le langage universel de Liszt, Beethoven, et des variations Goldberg de l’Aria de Bach seront également de la partie… Détail intéressant : en fin de tableau, tandis que Mashkan joue un morceau, une version enregistrée survient, parfaitement alignée sur la musique jouée, jusqu’à ce qu’elle soit interrompue par le premier accord  qui ouvre la  nouvelle scène, comme par magie ! Un procédé  où lumières, musique et comédiens sont  orchestrés à la seconde près... Travail millimétré ! 

Ceci  nous mène évidemment à parler du travail  gigantesque du metteur en scène,  Jean-Claude Idée. In illo tempore, il nous a dit avoir reçu des mains de Jean Piat la traduction de la pièce « Old Wicked songs » à l’affiche de Broadway plus de 200 fois en 1996… Une des œuvres de  Jon Marans, auteur New-Yorkais. Le titre se réfère à la dernière chanson du cycle de Schumann « « Die alten, bösen Lieder ».  Jean-Claude Idée  laissa fermenter le projet pendant dix ans. Il est en effet très malaisé de monter un tel spectacle qui, sans être une comédie musicale, marie le verbe, le roi des instruments de musique,  et le chant sur scène. Le tout en traduction française avec des passages en allemand. C’est finalement l’adaptation très fluide de  Thomas Joussier de 2010 qui a été retenue pour la qualité de la version française. Mais surtout, Jean-Claude Idée  a  fini par trouver  en Alexandre von Sivers et en Jean-François Brion, les  deux fabuleux interprètes qu’il attendait.

Ceux  qui savent mettre des sentiments  à la fois sur un clavier, des mots et des paroles. Des comédiens qui savent d’instinct trouver la gestuelle adéquate quand les mots se dérobent et que l’indicible apparaît.

Du 19 au 29 mars 2013 Rencontre avec les artistes : le 28/3 Au Théâtre Jean Vilar

0800/25 325

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=501

 Une production de l'Atelier Théâtre Jean Vilar et du Festival Royal de Théâtre de Spa.

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12272877053?profile=original     Angélique ou Maléfique ?

Un grand plancher vide est cerné de rideaux noirs. Sommes-nous au centre d’un catafalque ? Peut-être. Angélique, dont on ne dit pas une seule fois le nom dans la pièce, n’existe pas. Ses parents l’ont accordée en mariage à  un rustre, Georges DANDIN que l’on a affublé en échange de son argent, d’une particule clinquante. Le voilà devenu « Georges de la Dandinière ». Mais la jeune épouse a le sentiment étouffant d’avoir été enterrée vivante, mariée contre son gré.

Rebelle et victime, elle écume de colère de ne pas pouvoir profiter de sa jeunesse et d’avoir été jetée dans les bras du vieux barbon. Soit dit en passant : le rôle fut  interprété à l'époque par la propre femme de Molière ! Ce soir, c’est Harmonie Rouffiange qui s’en charge.  Dès les premières répliques,  elle écrase de ses paroles glaciales  tout son entourage, sauf Claudine (Héloïse Gimondi ) sa servante poursuivie des assiduités de Lubin (Frédéric Mosbeux),  l’entremetteur de Clitandre. Mépris dont elle peine  même à se défaire, dans  les scènes d’amour avec son amant.  On lui doit néanmoins de magnifiques tirades piquantes sur l’urgence de la libération de la femme, car elle sait bien parler. C’est le seul instant où elle semble sympathique, …ce qui ne devait pas trop être le cas quand Molière interprétait le mari! 12272877273?profile=originalQuant à ce  vieux barbon, il n’est pas si rébarbatif que cela. C’est un personnage tragique, intemporel, complexe et extrêmement bien travaillé par un  Jean Knepper avec moustache! Mais il est impuissant et seul contre les manipulations fatales de la société qui l’entoure. De là, toute son humanité. « George Dandin, George Dandin, vous avez fait une sottise, la plus grande du monde. » (scène 1, acte I) persifflent les monstres bien-pensants. Même son serviteur Colin lui fait faux bond (François Makanga). On assiste  à son humiliation croissante qui va le précipiter vers une fin tragique. Retour à la case paysannerie : il est le véritable dindon de la farce, victime des maléfiques pouvoirs de manipulation d’une femme sans scrupules. Il est  pourtant  le seul dans la pièce à avoir de la noblesse de cœur. Enlevez le « s » à Georges et il  ressemblera à un parfait gentleman anglais. Il personnifie «  l’honnête homme », idéal du 17e siècle, être de vertus et d’équilibre à l’opposé du courtisan hâbleur. Hélas,  la situation dans laquelle il s’est mis est aussi bancale que la porte qui ouvre sur sa maison prête à s’écrouler. Il est dans son bon droit et le voilà régulièrement moqué  et dupé par tous, sans compter les gnomes monstrueux échappés à tout moment des rideaux, qui raillent sa folie d’ascension sociale, lors de ses  douloureux apartés.

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 Tout aussi monstrueux, Monsieur et Madame de Sotenville, les beaux parents sont d’ignobles marionnettes géantes et sadiques qui stigmatisent l’appât du gain, les préjugés, l’hypocrisie et l’absence d’amour. Ce qui est extraordinaire, au point de vue de la théâtralité,  c’est la vie et l’esprit qui s’empare brusquement de l’énorme bouche des pantins par l’entremise des deux comédiens impassibles  qui jouent deux rôles à la fois. Jeu fascinant d’Héloïse Gimondi et Frédéric Mosbeux!

 L’amoureux secret, le gentilhomme libertin, Clitandre, on le sent, malgré ses boucles, n’a sans doute pas l’étoffe d’un séducteur irrésistible mais sert à entretenir les rêves d’évasion de la triste fée du logis. Pascal Dandoy joue le rôle à merveilles.  La langue de Molière est délicieusement perlée d’humour et de belles intonations, le jeu scénique est d’une irrésistible drôlerie et d’une belle vivacité. Les poursuites dans le noir et les histoires de porte rivalisent avec les jeux de cache-cache dans les sous-bois que l’on retrouvera chez Marivaux. L’ironie de la situation est à son comble dans l’acte III où Dandin après avoir été forcé une nouvelle fois de présenter des excuses, n’a vraiment plus qu’à se jeter à l’eau. 12272876481?profile=original Nous avons affaire dans ce spectacle, à du Molière  tout simplement sublimé. Une entreprise osée, mais fort réussie par l’inventive metteuse en scène Marie Gaüzère Lesueur … dont c’est la première production.

La distribution:

George Dandin :Jean Knepper

Angélique: Harmonie Rouffiange

Clitandre : Pascal Dandoy

Claudine et Madame de Sotenville : Héloïse Gimondi

Lubin et Monsieur de Sotenville :Frédéric Mosbeux

Colin : François Makanga

Mise en scène, scénographie : Marie Gaüzère Lesueur

Chargée de communication : Héloïse Gimondi

 

 

 http://www.laclarenciere.be/

Tout public : Les mercredi 13, jeudi 14, vendredi 15, samedi 16, Les mardi 19, mercredi 20, jeudi 21 et vendredi 22 mars 2013 à 20h30

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12272875861?profile=originalUN TANGO EN BORD DE MER fut créé le 6 août 2010 au Festival Royal de Théâtre de Spa. Depuis, l’immense comédien français  Jean-Pierre Bouvier n’arrête pas de séduire par le raffinement  et la pudeur de son jeu. On l’a vu jouer avec sensibilité et  subtilité en 2011 dans LA DAME AU PETIT CHIEN et en 2012, dans le rôle magistral de Willy Brandt de DÉMOCRATIE de Michael Frayn. Il est le maître ès sentiments ressentis.

Le duo qu’il interprète avec Frédéric Nyssen (lui aussi dans DÉMOCRATIE) est dans cette ligne de travail nuancé. La mise en scène soignée  de Patrice Kerbrat et les verres de vodka  y sont pour beaucoup. D’une part il y a les monologues intérieurs tantôt feutrés, tantôt passionnés ; de l’autre il y a une pratique de  l’écoute attentive de l’autre.  Et même l’art subtil  de faire trouver à l’autre, les mots qu’il faut pour creuser la vie intérieure. Comme s’il s’agissait non pas d’un texte écrit et interprété mais d’une sorte d’improvisation affective.  Jean-Pierre Bouvier  endosse ici le rôle de Stéphane, la quarantaine, un profil d’homme élégant, instruit et posé, écrivain en vue de surcroît.  Il voyage, voit du beau monde et mène une existence enviable. Vincent est beaucoup plus jeune, il brûle tout ce qu’il adore, ne tient pas en place, et est réactif comme du vif argent.  Leur différence d’âge, de milieu, de statut, les éloigne et les fascine à la fois. On comprend très vite qu’ils ont été éperdument amoureux quelques années auparavant. Retrouvailles fortuites  ce soir-là  au bar d’un hôtel de bord de mer ? Le décor n’a certes pas le lustre rêvé, mais l’absence de barmans ou l’absence incongrue d’activité dans l’hôtel leur offre soudain un lieu et un temps d’entre deux, où les vérités les plus profondes peuvent éclore sans se faner, …sous les délicates lumières de  Laurent Béal.

 

Sensibilité, vivacité, tendresse, fougue et retenue à la fois. La gestuelle des deux hommes est un ballet du temps présent sur scène. Un pas en avant, deux pas en arrière et la sensualité des souvenirs ne demande qu’à remonter à la surface. Qualité des silences.  Justesse absolue des interprétations, les rôles étant à la base bien définis. Chacun suit son orbite et le public attend avec émoi chaque frôlement tangentiel. La fluidité du texte de Philippe Besson est magnifique et a des résonnances émouvantes dans  la vie de tous. Qui peut dire qu’il n’a jamais quitté ou été quitté ? Qui peut dire qu’il n’a jamais joué son couple au quitte ou double ?  L’histoire d’amour de ces deux hommes ressemble à toutes les histoires d’amour. Des histoires que l’on sait condamnées d’avance et qui pourtant sont si belles et si tentantes.12272876271?profile=original

La présence vibrante  des comédiens sur scène fait oublier le décor trouble de bar nocturne, somme toute fort ordinaire.  Le rythme du spectacle est un lent crescendo vers la vérité intérieure tandis que les  personnages de plus en plus vibrants pèsent leurs chimères et leurs souffrances, interrogent,  se dévoilent progressivement, et se cherchent mutuellement.

Frédéric Nyssen en particulier, est un maître ès non-verbal qui hurle son mal-être (sans jeu de mots), sa colère, ses angoisses, la difficulté de ses choix. Craquant de vérité, totalement crédible dans son impulsivité  et ses poses générationnelles d’être écorché. Tour à tour, il esquive, brouille les cartes et s’évapore sans explications. Mais à la fin tous deux, décapés par leur confrontation, retrouvent l’authenticité,  loin des maquillages du mensonge protecteur.

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=500

 du 12 au 15 mars 2013, reprise

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12272874880?profile=originalUn Chapeau de paille d’Italie  De Eugène Labiche

Mise en scène Gilles Bouillon par la compagnie du  Centre Dramatique Régional de Tours, À l’Aula Magna, un accueil de L’ATJV (Atelier Théâtral Jean Vilar)

 

...Où le mot noces rime avec atroce!

Tout commence par le cauchemar d’un quidam réveillé en sursaut tandis que le temps s’écoule à l’envers. Le temps de rentrer de plein fouet dans un magnifique spectacle parodique du temps passé ! Ou du futur, qui sait ? Chapeau, les Français !

Une double poursuite s’organise, ridicule et surréaliste. Futuriste aussi pour le dynamisme, le mouvement et la vitesse. Il y a ceux qui courent derrière leur marié, qui lui poursuit un chapeau. Comique de situation. Les comédiens sont en habits de noces fin de siècle - les superbes costumes sont de Marc Anselmi - et animent une débandade de polichinelles jamais rêvée sur les planches. Explication : une femme élégante prise au piège de l’adultère se présente avec son amant à la porte du futur marié dont le cheval a malencontreusement avalé le chapeau de paille d’Italie. Plainte musclée de l’amant, un « petit criquet » africain : Il faut d’urgence réparer l’injure (retrouver un chapeau identique) ou le mari de la friponne risque fort d’étrangler sa femme si elle revient nu-tête de son équipée. Les ferrets de la Reine revisités à la mode bourgeoise.

Rien de plus au programme si ce n’est la course effrénée derrière des chimères, le mobilier qui vole et les vols planés des comédiens, une visite chez la modiste de nos grand-mères et au pire, un 80 Chasseurs saugrenu. Et des salves de rires parmi les spectateurs tant le spectacle est une chorégraphie endiablée réussie. C’est burlesque et beau. La scénographe Nathalie Holt, par son art de l’ellipse, la dimension poétique de ses agencements, collages, couleurs, matières, donne aux cinq décors des cinq actes toute la fluidité que nécessite l’aventure de cette dramaturgie du mouvement, étonnamment explosive, aux harmoniques contemporaines. Les tableaux qui fusent derrière le rideau sont autant de scènes bouffonnes que l’on croirait peintes à la main. Le texte a peu d’importance. C’est la gestuelle et la plasticité du spectacle qui plaisent. Unité de tons : il y a une succession de décors gris à fleurs, chevaux et hypocrites rayures assorties aux costumes de noce qui mettent les personnages en scène avec humour, à la manière de James Ensor. Unité de sons : cela gesticule chante et crie à s’en déjanter les mandibules! On retrouve l’ironie, la dérision et le sarcasme. Un personnage semble tout droit sorti de Watteau : c’est le cousin amoureux de la cousine, thème récurrent dans la pièce. Il a des allures de Gilles ou de Pierrot Lunaire avec ses pantalons bouffants trop larges et trop courts. Cela donne le dernier coup de pinceau à la pantomime. Une pantomime du spectacle de la bourgeoisie, il va sans dire. « Vous me rappelez les orgies de la Régence » fulmine le beau-père ! Et le pianiste d'égrener ses notes d'un air énigmatique.

Comique de genre : la scène érotico-musicale dans les riches salons de la baronne de Champigny. « Allons berger, sors ton pipeau et y jouons un air en commun ! » Comique de posture : le futur beau-père (pépiniériste) est un « porc épic » affublé d’un pot de myrte qu’il arbore comme un bâton de maréchal. Et Georges Brassens saute aussitôt à l’oreille : « Avec son p’tit pot, l’avait l’air d’un c… ma mère! » Comique de répétition « Mon gendre, tout est rompu ! » une phrase de la plus belle essence de comportement bourgeois. Comique douloureux : « Père, vous m’avez sacrifiée » se lamente la future épouse déjà délaissée. « Que veux-tu, il était rentier» s’excuse le père! Comique de cabrioles, d’un bout à l’autre, ce n’est décidément pas avec cette pièce, que l’on mourra pour des idées! Mais qu’importe!

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=498

Tout le dossier du spectacle et les photos :

http://www.cdrtours.fr/un-chapeau-de-paille-ditalie/

Dramaturgie: Bernard Pico Scénographie: Nathalie Holt Costumes: Marc Anselmi Lumières: Michel Theuil Musique: Alain Bruel Assistante mise en scène: Albane Aubry Maquillages et coiffures: Eva Gorszczyk Régie Générale: Laurent Choquet Construction du décor réalisée par l’équipe technique du CDR de Tours sous la direction de Pierre Alexandre SiméonAvec Frédéric Cherboeuf Jean-Luc Guitton Marc Siemiatycki Denis Léger- Milhau Léon Napias Xavier Guittet Stéphane Comby Cécile Bouillot Charlotte Barbier Camille Blouet Juliette Chaigneau Laure Coignard Julie Roux Clément Bertani Mikaël Teyssié Musicien Alain Bruel
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Quel talent ! Patricia Ide se transforme soudain en gallinacée emplumée, montée sur des échasses pour mieux dominer son avorton de mari. Et de vitupérer, enjôler, glousser, ourdir et saccager tout ce qui croise son chemin. Un oiseau rare aux cris de panthère qui a su ravir le cœur malade du pauvre Ottavio, perclus, cassé en deux , vêtu de pourpre familiale et de la  honte d’avoir jeté son propre fils à la porte. Un comédien d’à peine trente ans, Grigory Collomb interprète ce rôle  … à s’y méprendre !  Va-t-il échapper un jour aux griffes acérées de son engeôleuse de femme qui le domine de trois coudées et demie ? C’est ce que Goldoni,  nous explique dans « La Serva amorosa », une pièce où fusent les apartés psycho-moraux de la servante rédemptrice, Corallina,  avec le public.   

C’est la non moins excellente Joëlle Franco, poids plume bondissant, surmonté d’une queue de cheval en ananas -  quelle nana ! – qui assume ce rôle délirant. Elle a  l’esprit aussi acéré que généreux pour son tendre frère et maître  Florindo (Quentin Minon, en héros romantique). Elle  donne à chaque prototype qui peuple la pièce  des répliques aussi bouillonnantes que mimées à l’extrême. Arlecchino, Pantalone… des personnages-types du Théâtre Italien comme on disait à l’époque.  Elle ravit  par sa mobilité, son ingénuité et ses réparties inventives. Ne serait-on pas dans l’improvisation pure et simple ? C’est du grand art théâtral totalement contrôlé. Quand les situations se corsent, ce sont  les sifflets, trilles et onomatopées et piaillements en tout genre qui remplacent le verbe.  La coquine contrôle tout !  Tous les moyens seront bons pour venir à bout de la paranoia familiale et rétablir l’équilibre et la justice. La crapuleuse Beatrice a appelé un croque-vif (disons, un notaire) pour se rendre (on s’en serait douté !) légataire universelle de son  futur défunt mari et évincer à jamais le fils légitime au profit de son stupide rejeton Lelio, le niais. Encore un rôle sublimement joué, cette fois par Maroine Amimi, autre talent éblouissant de justesse et de dynamisme.

La suite est une pantalonnade jouissive du plus bel effet. Les visages sont grimés, nous sommes en période de Carnaval. Le théâtre est partout, au balcon, par-dessus les toits, à la fenêtre, dans l’antichambre, au boudoir,  dans la rue… Les tréteaux tanguent et tremblent sous les la chorégraphie turbulente et drôle des comédiens. Quitte à  se démantibuler à maintes reprises et faire voler le mobilier afin de symboliser la déliquescence familiale et sociale ! La patte créative et acérée de Pietro Pizzutti  s’amuse, virevolte, nous assaille de jargon franco-italien, évoque l’origine napolitaine de gestes si italiens et semble s’amuser comme un  fou à nous balancer sa version moderne de la Commedia dell’arte. Une mise en-scène qui déchire littéralement le rideau dans lequel on semble avoir taillé le costume d’Ottavio. Mise en abyme stupéfiante, les personnages sortent de boîtes d’illusionnistes, échappent de paravents, sombrent dans des trappes et se balancent sur des cordes comme au cirque. Et  Rosara, (Flavia Papadaniel, dans toute sa beauté) la future mariée est un joyau de naïveté et de fraîcheur. Scènes exquises de déclaration amoureuse. Molière ou Marivaux ? C’et les deux à la fois, C’est Goldoni en personne.  Avec l’accent !

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Et les masques de Venise (vous disiez, Carnaval ?) sont là, pour démasquer l’hypocrisie, le désamour et les faux-semblants. La scénographie de Delphine Coërs et les costumes sont de haute voltige, avec une  connivence  artistique omniprésente. L’excès force le trait, le spectateur médusé devant ce grand Guignol ne peut soudainement plus se retenir de rire. Et  de se tenir les côtes tout au long du spectacle! Le plaisir théâtral percole, perfuse et se répand comme une vague de bonheur à l’aube d’un mois de févier fait pour le Carême !

Précipitez-vous !

Au théâtre Le Public

La Serva amorosa de CARLO GOLDONI Mise en scène : Pietro Pizzuti Avec: Patricia Ide, Maroine Amimi, Grigory Collomb, Joëlle Franco, Pietro Marullo, Quentin Minon, Flavia Papadaniel et Réal Siellez Grande Salle - Création - relâche les dimanches et lundis

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=320&type=1

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12272873460?profile=originalOn s’attend peut-être à un spectacle morbide, bourré de jérémiades convenues sur le temps qui passe. A 20h 15, on pénètre dans la salle des Voûtes, transformée en bonbonnière rose et bleu pastel. C’est l’immense lit, version impériale, installé au milieu du plateau qui a revêtu les couleurs  pêche de l’aube. Les fauteuils de style  sont  assortis. Au fond, une lucarne dans les murs bleus, qui regarde  le ciel ?

Extinction des feux  puis le tableau s’éclaire sur trois femmes assises dans les fauteuils. L’une, magistrale, faisant salon, l’autre, divine,  cousant une couverture en patchwork, l’autre, sérieuse à en mourir,  s’affairant dans un dossier, genoux serrés.  Trois âges bien mensurés : 90 /50/30.   Trois perruques à boucles et crans,  dignes des photos de National Geographic années 50. Toutes trois, savamment maquillées, teint clair, regard profond,  le rouge à lèvre s’articulant autour des mots avec gourmandise. Une mise en bouche parfaite.

 L’espace mis en scène par Véronique Dumont diffuse une tension extraordinaire. Il invite à la fois à la confrontation et à la confidence, il n’y a rien d’autre à faire  pour ces dames que de causer en boucles dans ce huis-clos où fusent les absurdités. On apprend tout sur la vie glorieuse de l’irrésistible vieille et sur les tracas de sa vie présente. Toutes trois sont joyeusement cyniques – ah! quels beaux masques – sur ce que l’on devient, hommes ou femmes avec l’âge, cet intrus. La vielle dame, vêtue d’un déshabillé de satin bordé d’un voluptueux renard règne, despotique et lucide, malgré ses colères désespérées contre la nature qui défaille. Elle « nous » confiera tout sur ses moments de honte, de plaisir, de regret et satisfaction et sa relation avec les hommes. « Ils nous mentent tous ! »   Un voile pudique referme la première partie.  

Assez de l’imposture du théâtre de représentation! La deuxième partie fait magistralement voler le temps en éclats et découvre ce qui se passe dans l’âme de ces femmes.   Il reste une seule femme, ou son double, - allez savoir-  ligotée par l’espace de ce lit immense, démultipliée en trois âges façon Picasso. Voici la Force, faite Femme. C’est surréaliste, c’est intelligent, c’est d’une justesse psychologique surprenante.  Les visages ont perdu leurs couleurs et leurs artifices, la vérité joue à cache-cache avec les grandes questions sur le bonheur. Les pronoms « je » lancinants du début  ont fait place à un « nous », pluriel de majesté ou celui du « nous » qui rassemble toutes les femmes, ou simplement le « nous » du trio féminin. Les différents Visages ont trouvé une douce architecture qui révèle des  vérités intérieures déchirantes.

Sans âge, elles virevoltent autour du lit, à dire leurs attentes, à retrouver leurs  GRANDS moments de bonheur pour croiser enfin une vérité qui apaise.  Le jeu de Jeanine GODINAS, comédienne que l'on admire, n’a pas pris une ride. Le personnage qu’elle interprète se sent invulnérable. A-t-elle trouvé le bonheur ? Elle a séduit, a été riche. Elle a tout vendu, même ses bijoux, mais elle regrette de  ne se souvenir que de ses souvenirs. Elle laisse la parole à la plus jeune (Isabelle DEFOSSE), si inquiète de trouver le bonheur, si touchante dans ses souvenirs de l’innocente  première communion. Telles des pythies bienveillantes les deux autres femmes expliquent  à la plus jeune comment on change, inexorablement. Isabelle Defossé alors s’insurge avec une violence juvénile contre la perte d’innocence qu’elle entrevoit. Contre la méchanceté qui fait place à l’amour, contre  l’incapacité de pardonner. Contre  vents et marées: « Je ne deviendrai pas toi ! Je te renie. » Et moi donc! de renchérir la presque centenaire! « Je vous renie toutes autant que vous êtes !»  Au temps que vous êtes... Quel écho! Une scène extraordinaire. Non moins que ces tirades passionnées, aussi houleuses que celles d’une chatte sur un toit brûlant, de Marie-Paule KUMPS, transfigurée par son rôle de femme conservatrice qui a renié son fils gay, parti de la maison à 18 ans.  

 Revenons à Janine Godinas, le socle absolu de la pièce. Très contradictoire, touchante, irritante, pathétique parfois, mais si digne et forte d’elle-même. Elle, une femme, aura le dernier mot. Trois femmes. Trois grandes femmes pour un seul lit. Le  vaste lit du fleuve de  la Vie qui s’enfuit.

Trois grandes comédiennes. On sort de là comme lavés...dans  un bain de Jouvence.

TROIS GRANDES FEMMES

de EDWARD ALBEE* adaptation très réussie  de Isabelle Anckaert

Mise en scène (géniale) : Véronique Dumont    

   Avec trois stars : Janine Godinas, Marie-Paule Kumps, Isabelle Defossé (et Simon Thomas).

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=324&type=1

DU 14/02/13 AU 06/04/13

*l'auteur de Qui a peur de Virginia Woolf ?

Sur le plan personnel et privé, c'est dans des circonstances bien différentes de celles que connut Genet qu'Albee s'assume comme figlio-di-nessuno (fils de personne). Il est connu qu'il fut adopté par une famille qui avait fait fortune dans le monde du spectacle, qu'il fut élevé dans le luxe des Rolls-Royce et des leçons particulières, et qu'il lui fallut bien du talent pour se retrouver malgré tout, à vingt-deux ans, sur le pavé de New York, à gagner sa vie comme garçon de courses, vendeur ou barman, dans la meilleure tradition du self-made man. Il faudra une crise dépressive, résultant de la cassure avec ce mode de vie, pour qu'Albee se mette à écrire une pièce, Zoo Story, montée à Berlin en 1959 avant de l'être off-Broadway, en 1960, par Alan Schneider. (la suite sur: http://www.universalis.fr/encyclopedie/edward-albee/1-l-introduction-de-l-absurde-aux-etats-unis/ )

 

 

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Parfois, il faut avoir le courage de ses opinions!

Parfois, il faut avoir le courage de ses opinions!

 

Envoyé le : Samedi 16 février 2013 1h00 Objet : sortie de scène   

Pas pour les annales
Jean-Claude Idée s’est laissé embarquer dans une aventure peu piquante cette fois-ci. Alors que nous avions savouré ses mises en scènes exceptionnelles dans Amen, Démocratie, L’allée du roi et Don Camillo en 2012 et Autant en emporte l’argent ou La nuit de l’audience en 2011, on se trouve ici devant un mur d’interrogations. Le spectateur se demande vraiment ce qu’il est venu voir.
La pièce de Nicolas Bedos a parcouru la France il est vrai mais on s’interroge sur ce que l’on peut y trouver. Théâtre « digestif » ou « comédie de boulevard piétinée » ? Tout y sonne creux, comme la toux caverneuse du protagoniste principal, vieil écrivain misanthrope et narcissique, rabâcheur à souhait à qui on a interdit de fumer. Même le goût parisien de la formule n’y est pas. On sourit du bout des lèvres à certaines saillies tantôt lourdes tantôt plates, qui à peine sorties sont déjà éventées. Passez-moi le sel s’il vous plaît !
On reconnait certes à Nicolas Bedos l’intention d’avoir voulu créer un personnage crédible, en hommage à son illustre père … à travers ce grincheux médisant et amer, qui est supposé dire l’ennui et la désillusion de fin de siècle, dans la tradition d’Alfred de Musset. Hélas, la transmission ne s’est pas faite et nous sommes en début de siècle, que diable!    Rien de cette intention louable n’apparaît dans la pièce, ni dans le fond ni dans la forme. celle-ci se résume à une série décousue d’éructations d’un homme de théâtre qui va mourir, après avoir tourné volontairement ( ?) le dos au succès et s’être enfermé dans une tour d’ivoire où il brasse ses agacements. Il croit impressionner avec ses bordées d’injures d’une platitude à vous faire fuir. Ce que son ex-femme a fait d’ailleurs. Ce que l’on ferait aussi,  si c’était un film.
Il n’est que sa très brave servante au grand cœur, à la solide composition, jouée par la savoureuse Marie-Hélène Remacle, époustouflante dans Shirley Valentine, qui sauve les quelques meubles qui n’ont pas été pris par les huissiers. Oui, elle est bien dans la tradition des servantes fines, généreuses et intelligentes qui peuplent le théâtre classique français. Son accent du midi et ses postures de femme mûre et sereine sont irrésistibles. Lisa Debauche, la jeune nièce à la recherche d’un père, est pour sa part gauche,  incertaine et peu convaincante dans son rôle de jeunette dorée déboussolée qui taquine des idées suicidaires. Et les deux autres personnages, joués sans grand enthousiasme par Damien De Dobbeleer et Frédéric Nyssen, semblent se  demander ce qu’ils sont venus faire  dans cette galère. Tout comme Jean-Claude Frison dans le rôle principal qui met son énergie au service d’un personnage dont il n’endosse pas vraiment le profil. Heureusement que sa nièce lui passera une fumette ou deux! Les décors et les costumes sont de la même eau blafarde de l’ennui tandis que les appuis musicaux ne semblent reposer sur rien.
Un mot encore: on aurait adoré que le Chat de l'écrivain, personnage hargneux à l'image de son maître,  qui griffe et qui mord  à chaque instant  fut  réellement  sur le plateau, pour nous égailler un peu! 
Bref, on efface et on recommence, chacun peut se fourvoyer. Le théâtre des Galeries qui, de la comédie de boulevard aux pièces sérieuses, passionne ses fidèles spectateurs, n’inscrira sans doute pas cette pièce dans ses annales.
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Sortie de scène

de Nicolas Bedos - du 13 février au 10 mars 2013

http://www.trg.be/saison-2012-2013/sortie-de-scene/en-quelques-lignes__3982

 
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administrateur théâtres

Feu la mère de Madame - Feu la Belgique de Monsieur

de Georges FEYDEAU - Jean-Marie PIEMME

Le vaudeville désopilant de Feydeau démarre sur l’annonce dudécès de la mère de Madame. Cette situation n’est pas sans rappeler l’incroyable soirée du 13 décembre 2006 au cours de laquelle un journaliste de la RTBF prenait son air le plus grave pour annoncer la fin de la Belgique. Ce canular (Bye bye Belgium) a fait le tour de la planète ! Jean-Marie Piemme nous livre  un divertissement impertinent qui nous replonge dans l’ambiance de cette fameuse soirée !

http://www.theatreduparc.be/

D’un coup de tonnerre à l’autre, pluies de rires

Un sas triangulaire où se déchaînent les éléments donne accès à trois éléments : chambre, cuisine et salle de bains. Le plateau circulaire expose d’abord le lit conjugal.  Quatre heures du matin, Elle est réveillée par l’arrivée tardive de son impressionnant mari, Lucien déguisé pour son amusement personnel en Roi Soleil. Il sonne désespérément, bloqué dans le sas. Il se fait magistralement saucer.  Un immense  parapluie protège difficilement  sa perruque et habits d’un autre siècle de la pluie diluvienne. Rires. Celle-ci ferait bien de  lui rafraîchir les idées avant d’affronter son épouse, rapidement transformée en harpie. La  scène de ménage ne manque pas d’éclater. Tous les travers, les petites frustrations et les plaies d’argent du couple sont jetées en pâture à un public gourmand. La bonne allemande, pas si bonne que cela, est prise à témoin et ne rêve que de regagner au plus vite  son propre lit. (Rires)  Soudain on sonne. Il s’agit du domestique de la sainte mère de Madame. Il est porteur d’une terrible nouvelle. Rires. Un spectacle dément, joué avec folie. Le public se drogue de rires.

Trois quarts d’heure plus tard. Le même sas, le même décor petit bourgeois, et dans la baignoire, une reine. Un roi sur son trône.  Imaginez la suite, à la sauce belgo-belge. Chinoise parfois. Avec les mêmes comédiens délirants.  Des histoires de convoyeurs qui attendent. Un pastiche du premier spectacle, qui coupe des pets de lapin en deux. Les comédiens chahuteurs qui tordent les réalités,  rient et pleurent à la fois, se dépensent, suent eau et sang, larmes et ironie cuisante.  Les scènes royales ont un goût de Revue de fin d’année. Et pourtant l’année débute à peine…  La Belgique a quelque chose en travers du gosier et ne sait plus à quel hymne national se vouer! Autodérision mordante, çà au moins c’est une valeur sûre !   

Allez voir. Vous jugerez par vous-même de la gaudriole politique ou domestique.  

Mise en scène: Frédéric DUSSENNE.

Décor: Vincent
LEMAIRE
.

Costumes: Lionel LESIRE.

Lumières: Renaud
CEULEMANS
.

Avec:
Philippe JEUSETTE  (Lucien - Freddy)
Valérie BAUCHAU  (Yvonne -
Sandra
)
Caroline DETEZ  (Annette –
L’aveugle
)
Othmane MOUMEN  (Joseph – Le Chinois)

 http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2012_2013_004

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administrateur théâtres

A mi-chemin entre deux réalités : Cinéma ou Théâtre ? Italie ou Europe-la-nordique ?  Comédie ou leçon de philosophie ?  Entre deux théories: le Big Bang ou la théorie de l’état stationnaire ? Entre deux visions du monde : celle de l’homme, celle de la femme ? La transhumance ou le home sweet home ?

  12272868278?profile=originalLe décor est d’un réalisme enchanteur. Nous sommes au pays du Brunello. Le village en plein ciel se situe sur une pente escarpée. Une Fiat 500 a été abandonnée par trois voyageurs étranges au pied de la colline abrupte. Un éminent cosmologiste belge Monseigneur Georges Lemaître et son collègue le britannique Fred Hoyle accompagné de sa femme Barbara Clarke, tous  personnages ayant existé, débarquent sur la place du village, au pied de l’antique  pompe à bras devant l’auberge des voyageurs.  Il n’y a  pas de téléphone, juste des cigales éreintées par le soleil de midi,  année 1957.

Virgilio, l’aubergiste a du mal à sortir de sa sieste. Mais c’est l’Italie, le bon vin et le respect de la robe, qu’elle soit ecclésiastique ou féminine, auront vite fait de lui rendre ses dons d’hospitalité. Langue locale, jovialité, bonne humeur, vin blanc, musique (de film !), voilà le début d’agapes réelles  autour de nourritures autant  terrestres que célestes. De quoi mettre en appétit le spectateur qui va assister à un duel verbal de hautes sphères, entre les deux éminences scientifiques.Chose peu commune au théâtre.

 12272868873?profile=originalMonseigneur Georges Lemaître en route pour le Vatican est à la veille d’aider le pape Pie XII à rajuster de malheureuses prises de position concordistes à propos des nouvelles théories du Big Bang. Son collègue Fred Hoyle  le taquine et de brillants échanges fusent entre  les adversaires.   Une façon indirecte  de monter que le « disputare » n’aboutit pas nécessairement à la « disputatio »Il y a  disputes et disputes.  Cela semble être une des intentions de l’auteur Jean-François Viot.

Monseigneur Georges Lemaître, père scientifique de « l’atome primitif »,  distingue la notion de « commencement » de celle de « création », la première étant une entité physique, la seconde un concept philosophique. Il ne veut en rien mêler Dieu à la science. « Dieu ne se prouve pas, il se trouve ». Sir Fred Hoyle lui, n’a pas eu l’heur de trouver Dieu, il n’a trouvé que la femme, avec qui éclatent de belles crises domestiques. En effet, « Monsieur le savant toujours absent » donne la migraine à l’hyper-sensible Barbara (Maud Pelgrims) et la fait sortir de ses gonds sous ses apparences de jeune dame rangée des années 50.  Les crises cycliques de sa femme sont bien à l’image de la  théorie de  « l’état stationnaire » prônée par son (tendre ?) mari, postulant qu’à une large échelle, l’Univers est partout le même, qu’il l’a toujours été et qu’il le sera toujours.

 Empoignades scientifiques et domestiques alternent avec des leçons de science extrêmement ludiques et illustrées. Les postures et les déplacements  et les silences éloquents des deux hommes de sciences, si opposés physiquement et mentalement, sont une source de comique inépuisable. La prestance de chat mystérieux de Alexandre Von Sivers en soutane  et  l’accoutrement du malicieux François Sikivie en costume anglais font pouffer de rire. Virgilio l’aubergiste (Grégoire Baldari), un nouveau dans la Commedia dell’Arte ?  se prête gracieusement à l’exercice de pédagogie active qui utilise ballons et grains de riz. Massimo (Michael Manconi), son  jeune neveu,  est tout aussi drôle et réaliste.  Imperturbable, Virgilio  sert généreusement  les cantucci et le vin de cette messe scientifique, comme au cinéma.

 

Une pièce savante et marrante quand même, un curé débonnaire, un mari qui ne manque pas d’airs, et l’homme toujours, comme toujours il l’espère : sur le devant de la scène, immuable tableau! Dans une Toscane de rêve.

Soulignons enfin que la mise en scène est signée Olivier Leborgne. Une aventure où l’excellente scénographie d’Edouard Laug et la construction du décor par l'équipe de Marc Cocozza, Christophe Beaugé et Mathieu Regaert sont des éléments indispensables au spectacle, sans compter la poésie des lumières de Laurent Béal.

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=496

Une production de l’Atelier Théâtre Jean Vilar et du Festival Royal de Théâtre de Spa.

Exposition Georges Lemaître présentée par les Archives Georges Lemaître (UCL) : Panneaux et vidéo sur le parcours de Georges Lemaître, accessibles lors des représentations.


Dimanche 24 février : l’ATJV soutient CAP48. Réservez vos places au profit de l’opération ! www.cap48.be

19 au 24 février 2013 Théâtre Jean Vilar
Durée : 1h30

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administrateur théâtres

C’est une heureuse  reprise. L’année dernière Jean Vilar affichait complet. Et on le comprend. Malgré les affiches criardes, c’est beau et succulent comme, Mmmm ! … de la belle nouvelle cuisine. Les plats se succèdent  sur le plateau devant trois immenses  paravents japonais lumineux qui évoquent le  bureau d’astronomie à droite, le salon au centre et la salle à manger à gauche. Quelques meubles épars, rescapés de l’époque des rois, flottent dans les savants  jeux de lumière de Jacques Magrofuoco. Le mot « savant » ici  n’est pas de trop et souligne le propos, avec bonheur. Armand Delcampe signe une  mise en scène burlesque et audacieuse. La distribution est rôdée et déborde d’énergie. 

Dès le début, le décor  surprend. C’est l’éblouissement de tout  l’univers étoilé cependant qu’une lune rousse se demande qui, du féminin ou de masculin, l’emportera. Ensuite le papier translucide  des paravents  se transforme en  aurore,  fixant  les  teintes pêche et fuchsia des robes 1920 des  doctes dames. Il enchaîne  ensuite dans  les tons vert tendre  les reflets irisés de paysages aquatiques aux lotus et chrysanthèmes stylisés. Les personnages  vont, viennent et disparaissent derrière les paravents en ombres chinoises et musicales des années folles.

Mais il n’y a pas que ce décor épuré et les costumes fauvistes de Gérald Watelet qui subjuguent le spectateur. Les amoureux d’abord :  Clitandre (Julien Lemonnier) a des allures de Gatsby le magnifique, l‘argent en moins! Et Henriette (Agathe Détrieux ) n’a de précieux que le nom, le reste est grâce et intelligence car le chouchou de Molière a tout pour plaire. 

Il y a le jeu extraordinairement puissant de l’impuissant  Chrysale, mené  par un surdoué de la scène, Patrick Brüll. ce dernier est  au mieux de sa forme et n’aurait pour rien au monde revêtu perruque à boucles, escarpins, bas blancs et pourpoint à rubans. Le voilà royalement sanglé dans une  splendide veste de velours, rouge de  la colère qui gronde  et  qu’il a bien l’intention de  troquer contre un habit sobre de son choix quand enfin, il reprendra le pouvoir usurpé. 

Car il s’agit bien de cela : de l’usurpation du pouvoir par les femmes. Le mari veut, quel que soit le siècle,  une femme dans son lit et des mets délicieux servis à l’heure pour son dîner. Il n’a cure de sciences, de latin, de grec et de philosophie. Les vers et la littérature l’emplissent de bile à tel point qu’on le verrait bientôt dépérir. Pour peu, on aurait pitié de lui !

Ce qui est vrai c’est la guerre aux extrémismes menée avec détermination et bon sens par Molière.  Qu’il s’agisse de  la préciosité ridicule des courtisans dévorés par le désir de  pouvoir ou de celle de trois péronnelles en folie qui se trémoussent devant le dieu Grammaire, la muse Poétique et les  Galimatias de tout poil, il s’agit d’une même Folie.  Nuisible à la bonne gouvernance, à la justice et au bonheur de tous. Voyez comme est traitée la pauvre Martine au naturel frappant (l’excellente Marie-Line Lefebvre) ! N’êtes-vous pas indignés ? Et Notre Monde moderne  n'a-t-il pas ajouté quelques folies en plus? La folie sexuelle, la virtuelle, la religieuse, l’économique… Mais où donc est passée la réalité ?  Et si Molière, par aventure nous revenait sur terre, il serait bien mari de  tous ces  excès  et de  ces extravagances  fantasmagoriques.  Des postures, toutes aussi ridicules. L’érotomane Bélise campée par  Cécile Van Snick décroche moquerie,  rires et gloussements à chacune de ses répliques! Le Trissotin de Pierre Poucet est en tout point odieux et exécrable à souhait,  personnage grandiloquent (au sens étymologique, s’entend), à l’affût bien sûr, du moindre profit. 

Molière  a donc raison.  Les maris en perte de pouvoir évident sont réconfortés d’entendre les  discours de Chrysale. Les filles (à marier ?) qui préfèrent l’amour à l’argent et  les plaisirs de couple et de famille  à l’érudition, sont  ravies de pouvoir faire un pied-de-nez à leur Philaminte  de mère-femme des années 80 ainsi qu' à leurs sœurs rivales ! A moins que tout ce beau monde, femmes, enfants et maris ne fassent fi du discernement, de  l’harmonie des alexandrins de l’illustre homme de théâtre  et ne soient devenus sourds à ses  savoureuses mises en garde verbales. Mmmm !

Distribution

 

Mise en scène : Armand Delcampe

Avec

Chrysale : Patrick Brüll

Armande : Morgane Choupay

Henriette : Agathe Détrieux

Vadius : Alain Eloy

Martine : Marie-Line Lefebvre

Clitandre : Julien Lemonnier

Trissotin : Pierre Poucet

Ariste : Freddy Sicx

Julienne : Julie Thiele

Bélise : Cécile Van Snick

Le notaire : Jean-François Viot

Philaminte : Nathalie Willame

Assistant à la mise en scène : Jean-François Viot

Décor et costumes : Gérald Watelet

Lumières : Jacques Magrofuoco

Régie vidéo : Quentin Huwaert

Régie lumières : Jacques Perera

Construction décor : Mathieu Regaert et Marc Cocozza

Direction technique : Jacques Magrofuoco

Une production de lʼAtelier Théâtre Jean Vilar et du Festival Royal de Théâtre de Spa, avec la participation du

Centre des Arts Scéniques.

Avec le soutien de la Province du Brabant wallon.

« Molière, l’humain parfait?

 

De la femme et de lʼhomme, il a tout observé, tout perçu ou pressenti, tout exploré et éprouvé.

Rien de la bonté, de la perversité, de la médiocrité humaine ne lui fut étranger.

Il se lança à corps perdu dans lʼaventure des désirs insensés.

Il prit tous les risques et souffrit tous les tourments. Il dit non, rusa, parla, protesta, se tut, reparla sans se démettre ou se soumettre jamais.

Dieu merci, il ne fut pas un « artiste pur ».

Il côtoya et chérit lʼimpur comme un fou, il comprit et il aima sans mépris lʼhumain plus quʼimparfait.

Poète vivant, il a, plus quʼaucun autre, fait vivre ensemble la poésie, la comédie et le drame, rires et larmes enchevêtrés, élans et faiblesses confondus, désirs infinis avec petites vérités pratiques à lʼexclusion des grands principes abstraits et des dogmes irréfutables.

Il a subi, il a enduré le calvaire des pouvoirs imbéciles, absolus et contradictoires, aux titres cumulés dʼauteur, dʼacteur et de chef de troupe… de sorte que mettre nos pas dans les siens nous paraît aujourdʼhui dʼun grand confort et dʼun incessant réconfort.  Merci au Saint Patron ! » 

 

                                                                                                                          Armand Delcampe (croyant en Molière)

 

 

 

 

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administrateur théâtres

Je pense à Yu

  • "Le visage immense du pouvoir, on peut le regarder en face, on peut l'éclabousser" Dans l'appartement désordonné où elle vient d'emménager, Madeleine est attirée par un entrefilet dans le journal. Le journaliste chinois Yu Dongyue est libre. Après 17 ans passés derrière les barreaux. Son crime: avoir jeté de la peinture sur le portrait de Mao, place Tian'anmen en 1989. Délaissant son travail, ses obligations, Madeleine se lance dans la reconstitution de l'histoire de Yu. Dans sa quête, elle entraîne une étudiante chinoise à qui elle donne des cours de français et un voisin énigmatique et bienveillant. Arpenteur des écritures de la francophonie, depuis peu directeur du Théâtre du Peuple à Bussang, Vincent Goethals (Le cocu magnifique au Rideau en 2009) nous revient avec ce texte boulversant de la Québécoise Carole Fréchette. à 20h30, sauf les mercredis à 19h30
  • Jusqu'au 9 février 2013 Le Rideau de Bruxelles @ l' XL Théâtre

Le décor est insolite : quelques caisses de déménagement, une minuscule table roulante rouillée sur laquelle trône un ordinateur portable. Un répondeur et un interphone. Une bibliothèque en morceaux. Madeleine s’éveille péniblement d’un cauchemar sur fond blanc.

Le personnage féminin qui la harcèle  dans son cauchemar lui pose une question très embarrassante : Qu’êtes-vous venue faire ici ? C’est que Madeleine se mêle de la destinée de Yu, ce jeune chinois iconoclaste arrêté et emprisonné en 89 pour 17 ans. Puis fuse la question cruciale : Que faisiez-vous en mai-juin 1989 ? Que faisaient les individus de par le monde pendant ce moment historique ?  On a envie de répondre. En ce qui me concerne, je montrais les reportages de la BBC sur les événements de la place Tienanmen à des rhétoriciens  occidentaux sensés apprendre l’anglais. Que sert l’apprentissage d’une langue si ce n’est pas pour s’ouvrir au monde ?  Et vous, que faisiez-vous ?

 La pièce de Carole Fréchette est une lame de fond. L’auteur se prend passionnément au jeu de réveiller le passé historique et les consciences. Le drame psychologique va défier le drame historique. Madeleine, l’héroïne,  lâche tout pour se jeter dans sa recherche à propos de Yu, un inconscient ? un dissident ? un fou ? Veut-elle à son tour créer une figure mythique ?  Elle parcourt aussi les carnets intimes de ce que fut sa propre vie, pleine de participes passés nombrilistes, un procédé qui  finirait par lasser sans  l’arrivée de la vibrante jeune Yuangyuan Li et de Philippe Vauchel.  

Pourquoi Yu a-t-il du passer 17 ans de sa jeune vie en prison ? La question qui émeut Carole Fréchette est limpide pour un occidental, sans objet pour l’Asiatique. Madeleine est tellement retournée par la question qu’elle ne supporte  même plus de rencontrer Lin, son élève chinoise,  et « son enthousiasme forcé, son sourire trop radieux, son regard trop confiant, tourné vers le futur, de l’indicatif. »

Avant de partir en Asie, on croit avoir tout lu sur l’inévitable « culture shock » qui attend l’expatrié, mais il n’en est rien. Avec le recul, on se rend compte que la révolution sanglante de Mao est considérée par les Chinois comme une  simple goutte d’eau dans l’océan de l’histoire chinoise. Cyclique par ailleurs.  Ainsi donc un jet de peinture rouge dans une coquille d’œuf  sur une image vénérée parait encore plus dérisoire. A voir.

Nous sommes maintenant  en 2012. Là-bas, on enterre aujourd’hui avec fastes le roi du Cambodge, pays dont le tiers de la population a été assassiné par les  Khmers Rouges. La population  à genoux suffoque de douleur, implore et prie son roi-Dieu, nouveau mythe dont la dépouille mortelle est exposée depuis des mois sous son dais funéraire. L’âme asiatique est ainsi faite que profaner une image sacrée est un meurtre. Personne n’oserait, sauf un fou.

Excitée par son  violent désir d’apprendre le français et acculée par le questionnement de Madeleine,  Lin lâche quelques commentaires en dépit de sa réserve obstinée: « Le parti ne tombe jamais, il ne faut pas se faire remarquer ». « Etre contre-révolutionnaire est le pire des crimes, on perd tout ! » me disait ma  mère. « Tout le monde doit sauver sa vie. »

 Mais Madeleine hurle sa vérité  au conditionnel : « S’il n’y avait pas le courage, la folie, il n’y a rien qui changerait.» Philippe Vauchel le comédien irrésistible d’humour, d’humanité, de relativisme et de compassion apparaît dans le personnage de  Jérémie, le mystérieux voisin. Cela permet au spectateur d’échapper un peu à la tension hitchcockienne. Son regard lucide finit par identifier avec finesse le plaisir cynique que procure la pulsion de mort à ceux qui ont le goût du pouvoir, comparant Mao avec… son prof de math. La révolte selon lui ne peut rien changer. Bribe par bribe il a livré les secrets de son drame personnel à Madeleine.  Les docteurs sont impuissants et Dieu absent. « Il n’y avait rien à faire » devant le handicap de son fils et l’abandon de sa femme en 89.  Il n’y a que la sagesse de  l’acceptation et la résilience.  Madeleine n’en a cure,  dans sa quête insatiable de vérité elle  le provoquera jusqu’à la limite du supportable et lui fera bien malgré lui jeter un coup de pied homérique dans le château de cartes. Est-ce le non-sens de la Dame de Cœur de Lewis Caroll qui parle lorsque la voix féminine  invisible harcèle encore Madeleine dans son cauchemar et  rit aux éclats en concluant « vous êtes inutiles et ridicules »?

 Mais la jeune Lin, née après 89 ne retournera pas en Chine. Elle apprend maintenant le conditionnel présent en français et s’adresse à la figure mythique de Yu: « Et si vous n’aviez pas lancé le peinture sur l’image de Mao… » Je ne serais pas la même, murmurent les deux femmes presque ensemble.

Et tout le monde de savourer assis en tailleur une soupe chinoise qui a cuit pendant douze heures, pour vivre la vie au futur antérieur. Le temps des rêves ? On n’a pas fini de penser à Yu.

Avec Anne-Claire, Yuanyuan Li, Philippe Vauchel.

http://www.rideaudebruxelles.be/index.php?option=com_flexicontent&view=items&cid=3:programmation&id=66:je-pense-a-yu

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administrateur théâtres

12272855864?profile=originalDésopilant: dérivé de l'ancien français opiler « obstruer, boucher». Désopiler la rate, en l’occurrence, faire rire. C’est ce que « Le canard à l’orange » de Douglas-Home (« The Secretary Bird ») fait tout au long de la pièce, tant les bons mots et les situations scabreuses s’accumulent. Le maître de l’échiquier sentimental, Hugh Preston, vient de se rendre compte que sa femme Liz, après 15 ans de mariage, va partir en Italie avec John Brownlow, un bellâtre jeune et riche, marié et démarié trois fois.

Hugh est en effet le maître absolu du jeu alors que tout porte à croire que tout est perdu. « Everything under control » : il a plus d’un tour dans son sac et en particulier un appât très appétissant, « the Secretary Bird ». Avec jeu de mot, bien sûr. En effet, le serpentaire (la traîtresse) est voué à avaler le serpent (l’épouse). Ou peut-être pas. Mademoiselle Forsyth, beauté sulfureuse (« call me Pat ») est fascinante. Ce grand échassier ambitieux est né pour être amante, plutôt que femme mariée et a la finesse de le savoir. Son timbre de voix est ravissant, ses poses de mannequin irrésistibles, la peau lumineuse et belle, le maquillage soigné, le maintien altier et fragile à la fois. Juchée sur ses talons démesurés dans des tenues extra-courtes elle habite tout le plateau avec ses allures célestes.

Liz a fait 100 km pour aller se faire masser(?) ou plutôt si, mais pas comme on pourrait le croire. Hugh a tout compris et la confond dès la première scène. Ensuite il installe son piège méticuleux, il est imbattable aux échecs comme au tennis. Sens moral ou sens pratique? Qui est fou dans cette histoire?  Il invite le bellâtre chez lui avant la séparation définitive, pour arranger les termes du divorce. Au téléphone : « je vous repasse ma femme ! » Les rire des spectateurs fusent sans discontinuer, comme autant de bulles de champagne que les comédiens sifflent joyeusement. Le malheur des uns  fait le bonheur des autres: la salle est comble, on a dû ajouter des chaises. L’idée d’un canard à l’orange qui n’en finit pas de cuire sous la houlette avertie d’une vielle domestique, fait craquer de rire le spectateur à chacune de ses apparitions. Mais plus que le canard mythique, c’est le texte qui est succulent à en mourir et  dont la saveur appartient surtout à l’interprétation prodigieusement juste  des cinq comédiens qui ne cessent de se passer, corps et âme, le flambeau des réparties. L’évasion est complète avec la brillante mise en scène de Danielle Fire, les costumes chatoyants et une décoration d’intérieur savamment aménagée par Christian Guilmin.  Un spectacle de fêtes étincelant.

http://www.comedievolter.be/index.php?page=le-canard-a-l-orange

Avec : Catherine Conet (Liz Preston, un épouse fidèle? ), Michel de WARZEE (Hugh Preston, le bouffon appointé pour

amuser sa Majesté la Reine d'Angleterre), Laura SAVENBERG(Patricia Forsyth, the Secretary Bird), Laurent RENARD

(John Brownlow, le séduisant agent de change, alias lapin à bretelles) et Françoise ORIANE (Mrs. Gray, toujours gray)

 

Mise en scène : Danielle FIRE

Décors : Christian GUILMIN

Régie et éclairage : Sébastien COUCHARD

Durée du spectacle : 2h30 avec entracte

Le 24 Décembre la représentation est confirmée à 20h15 au tarif habituel.

Les 25 et 26 Décembre il n'y aura pas de représentation.

Le 31 Décembre nous ajoutons une représentation :

  • à  16h30   Prix unique 30€
  • à  20h15   Complet !

 

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administrateur théâtres

12272855266?profile=originalPour "vraissemblance" on dit en anglais : verysimilitude…  le terme est évocateur. David Hare est passé maître en dialogue psychologique complexe et profond. Il nous livre un feu d’artifice émotionnel dans « Skylight »,  une  intrigue  très bien ficelée avec un point culminant saisissant de vérités plurielles.

Le théâtre est ici plus qu’une illusion, on dirait qu’il a volé le feu de la vie. Les personnages sont campés avec brio par les trois comédiens si attachants qu’on ne sait quel parti prendre. Le jeu du spectateur, car il y en a un,  est à celui qui attrapera le plus d’étincelles qui jaillissent de cette série de rencontres-choc. On aurait pu tomber dans la mièvrerie sentimentale  mais les trois personnages cherchent avec passion leur vérité, c’est ce qui fait l’intérêt majeur de la pièce.  Le jeu de l’adolescent est saisissant par sa colère, son inventivité et sa tendresse juvénile. Son intransigeance.  Il est tout simplement craquant.

12272855067?profile=originalMais que dit l’histoire ? Kyria (Erika Sainte)  a quitté le milieu des limousines pour vivre la vraie vie. Et la jeune prof idéaliste de mettre tout son talent au service de jeunes défavorisés d’une  banlieue de Londres. Marre de voir le potentiel de toute une série de gens rayé de la carte. Expierait-elle quelque culpabilité ?  Elle vit seule et  sobrement, dans un appart’ glacial d’une joyeuse couleur vert hôpital, pauvrement équipé, style récup’ et corrige ses cahiers. Le brouillard et les bruits de trafic s’infiltrent partout, on n’est pas dans une belle propriété arborée à Wimbledon. Quatre ans ont passé depuis qu’elle vivait avec Tom et Alice, un couple qui avait accueilli son errance à  Londres à l’aube de ses 18 ans. Mais le jour où Alice apprend l’histoire d’amour secrète entre Kyria et son mari, Kyria prend aussitôt la fuite, sans donner la moindre explication. Entre temps, Alice se meurt  d’un cancer et refuse avec grandeur les bouquets de fleurs de son mari. « Les roses, c’était pour quand on s’aimait. »  Tom, inconsolable, a le sentiment d’être minable. Aussi, après la mort de sa mère,  leur fils, Edward (Toussaint Colombani) qui regrette les jours heureux, a fugué et vient supplier Kyria de faire quelque chose. Touchant.  Son père est devenu insupportable, dépressif ou violent. Le tribut de la culpabilité ?

12272855452?profile=originalUn fossé sépare les ex-amants : « Je suis devenue ma colère ! » rugit Kyria.  Kirya veut faire un métier auquel elle croit et vit comme une missionnaire. Le spectacle très rythmé débouche sur une querelle idéologique, puissante comme une lame de fond. Tom ne comprend pas comment elle gaspille ainsi ses talents. Le combat des deux idéaux est  très convaincant. L’arrogance du bonheur quotidien  assuré, face à l’idéal solidaire pur et dur laisse le spectateur dans le doute total. Le spectateur quitte la soirée théâtrale en laissant flotter toutes les questions dans son esprit. Il part avec le pétillement spirituel, les silences et sourires éloquents et les blessures de l’émouvante actrice qui a pris des dimensions de grande tragédienne. Elle a des airs brûlants  d’Antigone ou de Jeanne d’Arc, avec sa quête d’absolu et son intransigeance.  Il part avec la fausse arrogance de l’homme de 50 ans magnifiquement interprétée par  Michel Kacenelenbogen  en homme d’affaire qui a tout réussi, sauf sa vie intérieure et est venu chercher le pardon. Il part en emportant l’espoir maladroit et la fougue  rédemptrice de la jeunesse sous les traits de Toussaint Colombani.

 Pour mémoire, un « skylight » est une  sorte de lucarne découpée dans une toiture qui permet une illumination interne. A méditer.

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=317&type=1

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administrateur théâtres

Jean et Béatrice de Carole Fréchette

 Vu pour vous au Théâtre du Blockry,  du 29 novembre au 12 décembre 2012

Mise en scène Cathy Min Jung

Avec Myriem Akheddiou, Nicolas Ossowski

 

Le jeu de l’amour et du hasard : Boucle d’Or, non, Boucle Anthracite attend au haut de sa tour (au 33ème étage) que son prince charmant vienne la libérer de sa solitude et de ses souffrances encore plus noires que ses cheveux. Elle est plus mystérieuse qu’une forêt vierge. Elle rêve de passion et de tendresse mais elle est plus secrète qu’un puits sans fond et sans eau. Lui, chasseur de prime pur et dur,  ne pense qu’à la récompense en billets de 20, promise dans la petite annonce, pourvu qu’il surmonte les « épreuves » de la dame mythomane. Il est prêt à user de tous les moyens (bonjour la sincérité des sentiments) pour tour à tour, l’intéresser, la séduire et la faire craquer. Mais au motif de toucher la prime. De l’amour, il n’en a cure ! Elle apparaît de plus en plus folle, lui coupe sans cesse la parole et lui, de plus en plus roué de vouloir la faire taire. La poursuite est délirante.  Et la pièce devient au fil des bons mots, des coups de griffes et des vérités-mensonges qui s’amoncellent, de plus en plus irrésistible.

Travaillant avec grande finesse et un sens aigu de l’observation du couple, Carole Fréchette, l’auteur canadienne de la pièce dirige le débat amoureux avec verve et causticité dans le cadre surréaliste de cet appartement improbable - Ceci n’est pas une histoire d’Ô -   meublé d’un unique fauteuil de cuir,  et parsemé de bouteilles d’eau minérale…  L’unique porte et l’unique fenêtre deviennent presque des personnages à part entière. On ne vous donnera pas la clé. Le  huis-clos amoureux, qui se mute presque en polar, question d’époque sans doute,  est bourré de suspense et de rebondissements.  Le rythme  débridé s’intensifie pour déboucher sur une clé que l’on jette dans le caniv-Ôh !  Mais où donc est la clé ? Tous les chemins de la carte du tendre aboutissent inexorablement à un mur. Le miroir aux alouettes de l’amour ne cesse de scintiller, la vérité ne cesse de se dérober. Le décalage entre l’homme indépendant et solitaire et la femme assoiffée d’amour ne cesse de s’affirmer. Mais le spectateur, bien accroché au fil du spectacle,  s’amuse follement dans les dédales du labyrinthe car il a le secret espoir que les personnages si touchants dans leurs contradictions finiront, à bout de souffle,  par se toucher enfin. Les vertus de la dispute ?  

C’est brillant, rocambolesque,  remarquablement interprété par Myriem Akheddiou  et Nicolas Ossowski totalement impliqués. Passion plus brûlante que le désert du Nevada,  action délirante sur  les quelques mètres carrés  de la scène et par-dessus-tout, un imaginaire plus  débordant que le fleuve qui sort de son lit. Vous parliez d’Ô ? « Au théâtre, il n’y a rien à comprendre, mais tout à sentir. » Louis Jouvet

Regardez la bande-annonce de la création.

 

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=490

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administrateur théâtres

Jusqu’au 22 décembre et le 31 pour fêter le Nouvel An, au Théâtre Royal du Parc

 

                          Le monde est fou? Venez vous plonger dans un monde magique et drôle, celui du « Maître des illusions » sous la houlette de Lewis Carroll, ou presque. Non, sous la plume moderne et déjantée de Thierry Debroux, nouveau Maître des illusions. Au théâtre Royal du Parc.

                         « La magie te rend fou » déclare à son mari Fantin, la tête de Marguerite déposée sur la table. Pour sa part, Marguerite, trop grosse, comme la Reine de cœur, n’entre plus dans ses costumes de scène. Le ton est donné : « Qui a osé éternuer et me tirer de mes songes?», clame soudain le magicien-commandeur, beau- père de son état et veuf éploré, pour l’histoire.

                       12272848472?profile=original   Fantin, (Pierre Dherte, acteur et magicien) poursuit son rêve enfantin. Celui d’éblouir père et public dans un nouveau spectacle dont son père détient le secret. Un secret d’alcôve, par ailleurs…écrit dans un carnet noir. Fantin avoue s’être senti piétiné par le monstre paternel toute sa vie. Freud es-tu là ? Un monstre de la scène lyrique l’incarne : rien moins que José Van Dam en personne. C’est tout chanté: « Le chant est la seule façon d’amadouer la mort.» Vraie parole de cygne.

                         12272849099?profile=original Et voilà la jeune Alice, échappée de l’asile où sa famille l’a fait enfermer. Camille Claudel, où es-tu ? Elle est poursuivie par le Docteur Munch,(l'excellent Benoît Van Dorselaer) bientôt transformé en lapin. On hésite entre la référence au Baron Münchhausen de la littérature allemande ou au Baron Perché de Calvino. Mais Marguerite (Pascale Vyvere, femme du diable?) n’a pas chanté son dernier mot ! Elle rugit de jalousie avec la dernière énergie car Fantin a décidé de prendre la frêle Alice pour assistante. Détail  plutôt sordide: cette dernière se plaint au passage d’un oncle Edouard qui est venu un soir dans sa chambre et lui a planté un arbre qui pousse dans son ventre…

                       12272848896?profile=original   Pour se venger et se débarrasser de la jeune intrigante, Marguerite libère de sa cage à oiseaux le docteur-lapin qui poursuivait Alice : c’est le monde à l’envers ! Elle se jette à son cou : « Je plais, je plais … » chante-t-elle avec délices, saisie par le démon de minuit : encore le monde à l’envers ! Et ainsi de suite, on est au cœur de l’Absurde, au tréfonds des fantasmes, de plain-pied avec de vrais illusionnistes qui enchaînent les tours de magie sur une scène de théâtre. Le lieu même de l’illusion. Et le verre se casse finalement, comme dans le Tambour de Günter Grass. Mais on ne vous dira pas par qui, ni comment.

                           A vous de venir découvrir ce spectacle total avec des musiciens dans la fosse bourrée de citations musicales, une très belle partition originale de Pascal Charpentier, avec notre prince lyrique en personne sur les planches et de la magie à tous les étages…y compris le découpage de femmes en quatre. Mais ce n’est pas le plus surprenant des tours de magie. Il y a encore plus spectaculaire, courrez voir ! Sybille Wilson est la maîtresse d’une somptueuse mise en scène poétique et grinçante des affects profonds et du dérisoire. Ce spectacle  a vraiment tout pour plaire ou séduire.

http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2012_2013_002

 

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administrateur théâtres

12272847097?profile=originalJusqu'au 16 décembre 2012 (20h30) au centre culturel d'Auderghem:

 

Ensemble et séparément , comédie de Françoise Dorin

dans le cadre des spectacles Paris-Théâtre

Françoise Dorin est la compagne de Jean Piat depuis 1975. A-t-elle écrit par quelque heureux hasard sa dernière pièce pour lui, particulièrement? On n’en doute pas !

« Tout est toujours possible, le meilleur comme le pire », voilà son credo. Voici une pièce qui flingue toutes les idées noires. Elle présente un face à face brillant et sensible de deux solitudes qui se rencontrent  sous le signe du hasard le plus pur. Mais le hasard est-il pur? Ainsi donc la réussite de cette rencontre accidentelle d’un éditeur à la retraite et d’un écrivain pour la rubrique jeunesse, irrésistible et née à peine plus tard que lui. Elle le séduit totalement par sa malice, lui qui croyait avoir tout lu, tout vu et tout vécu. Elle est « écouteuse d’imprévisible». Malgré son optimisme de naissance - elle ne se souvient que des hauts, jamais des bas - elle avoue avoir peur de  l’Avenir, peur de la mort qu’elle frôle de justesse tandis que le vieux cœur de l’éditeur bat la chamade comme celui d’un adolescent. Les  citations de grand classiques fusent, l’art de la conversation bat son plein.  De son  côté, elle ne rêve que d’une chose : lui offrir en cadeau le coup de tonnerre, la suite  attendue du coup de foudre… aux sens décrits avec finesse par madame de Staël. Elle lui apporte clé sur porte, les surprises de l’amour et de l’étonnement, en un mot, elle s’ingénie à lui faire prendre la réalité pour ses désirs. Et quoi de plus sage ?   

Voici  donc nos deux indépendants endurcis mais infiniment curieux qui vivent ensemble et séparément le paradoxe d’un amour-amitié et vivent 364 jours de non-anniversaire où ils conjuguent sous nos yeux étonnés le verbe surprendre, étonner et aimer au présent progressif. Ils se font tour à tour un jeu de cache-cache de plus en plus  invraisemblable et de plus en plus amoureux.  Déjà, dans « Le lit à une place » Françoise Dorin insiste avec lucidité : « C'est logique dans la vie ... il y a juste une suite, ou plutôt des suites, avec des hauts, des bas, des bonnes surprises et des mauvaises, des hasards invraisemblables, des joies inespérées, des déceptions inattendues, des échecs incompréhensibles et des réussites inexplicables.» Sagesse.

La mise en scène de Stéphane Hillel est fine et intelligente car tout se passe dans la bibliothèque mythique de l’éditeur et tout semble être une question de fenêtres ouvertes ou fermées, de jumelles ou de lorgnettes malicieuses. Jean Piat vedette à la voix troublante et adorée du public et Marthe Villalonga tout aussi populaire font merveille dans ce duo beau comme un conte de Noël. L’humour, la vivacité de ton, l’ironie solide mais aimable, la politesse joyeuse pour contrer la morosité et la peau de chagrin, rendent  ce spectacle emballant et touchant  par sa sensibilité et sa délicatesse. Le talent de scène de Martha Villalonga ne s’arrête pas à la comédie de soubrette futée… par deux fois elle s’installe au piano pour interpréter ses émotions. Pas facile pour la pianiste, vu la piètre qualité de l’instrument perdu dans les livres en trompe-l’œil. Mais Debussy livre une bouffée supplémentaire de tendresse au public et à l’éditeur qui offre à sa cadette passionnée la clé du bonheur : ensemble et séparément pour vivre une non-fin. Comme un conte de Noël. Et le public de basculer dans de généreux applaudissements de bonheur.

http://www.artemis-diffusion.com/en_tournee/ensemble_separement/telechargement.html

http://www.cc-auderghem.be/index.php/nos-spectacles/paris-theatre-1213.html

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administrateur théâtres

HUIS CLOS de Jean-Paul SARTRE du 3 au 26 octobre (Petite Salle) à L’XL Théâtre

« Voilà, voilà, c’est comme ça ! » : la première phrase (anodine ?) de  Huis clos. Close-up : sur les personnages car à l’XL Théâtre. Théâtre de proximité, l’espace théâtral s’est transporté là où les spectateurs se cachent d’habitude dans le noir, et les personnages  qui évoluent dans l’arène improvisée inondée de lumière entrent pratiquement dans votre « bulle ». Décor : trois divans de couleur, simplifiés en chaises de paille et bois. Tu ne jugeras point! Et pourtant on est dans l’enfer du jugement tout au long de la pièce. Le débat s’articule autour de la culpabilité, des actions qui nous définissent ou non. Au centre une table et une horloge en bronze qui ne parle pas d’heure dernière mais de la première dans le monde d’après, interminable. A chaque roulement de tambour - quel cirque !- les personnages sont catapultés avec violence sur le plateau. Puis ils se relèvent et cherchent des explications.  Cela donne une  prise directe avec la violence des affects phénoménaux des comédiens. C’est du théâtre de l’élan vital, mis en scène en trois semaines nous dit Bernard Damien, homme aux multiples talents, à l’engagement artistique et politique incandescents. Pas le temps de disserter sans fin sur le texte. Trois semaines  pour se concentrer sur le jeu théâtral brûlant,  la pertinence des moindres mouvements. C’est le premier spectacle de Vanessa Mauro dans le rôle d’Estelle. Quel débuts fulgurants! Et quelle chance de pouvoir jouer avec Raffaele Giuliani qui a  joué un soir sur deux « l’Etranger » sur la même scène et la mystérieuse et captivante Amélie Segers dans le rôle d’Inès! 12272841855?profile=original 

C’est vif, c’est dynamique et mouvementé, on ne s’endort pas en enfer et on ne s’en évade pas. Sauf par le rire. D’ailleurs, « Pourquoi dormir si on n’a plus besoin de sommeil ? Bonheur perdu : avec leurs paupières, les habitants de la terre se faisaient 4000 petites évasions à l’heure ! »  Maintenant il est trop tard ! Doute : « Peut-être, n’avons-nous jamais été vivants ? » Une mise en scène saisissante de simplicité: les comédiens montent sur les chaises sur la pointe des pieds pour contempler leur vie d’avant et retrouver le contact avec ceux qui ont la tête à rire plus qu’à pleurer. C’est d’une efficacité inouïe.

 Le vivant est symbolisé par la sexualité et la séduction qui  inondent la scène infernale sur laquelle il n’y a pas de trace de bourreau. Un homme, deux femmes, le trio infernal se poursuit. Cela suffit.  Question: « Pourquoi nous a-t-on réunis ? Le hasard : ils casent les gens où ils peuvent, selon leur ordre d’arrivée. Je vous dis qu’ils ont tout réglé ! Alors tout est prévu ! Tout. Nous sommes assortis. Est-ce qu’il ne vaut pas mieux croire que nous sommes là par erreur ? Ils font l’économie du bourreau : c’est chacun de nous pour les deux autres ! Evidence : Aucun de nous ne peut se sauver seul ! Il faut juste de la bonne volonté.

 Tout est dans le mouvement et le rythme infernal. Cela se termine comme un carrousel  mythique de chevaux de bois liés les uns aux autres. Pas d’échappatoire, tension dramatique maximum. Nous avons affaire à des  planteurs d’émotion brillants: les jeunes comédiens donnent tout, leur corps et leur âme. Leur humanité, en bloc ou au détail.  Ils sont ahurissants de vérité. Le jaillissement théâtral fuse de toutes parts et  ravage la scène. Pas le temps de s’appesantir sur le texte, les graines germeront plus tard… dans le bon humus du rire.  

avec Raffaele Giuliani qui a joué tous les soirs en alternance « l’Etranger »  - Amélie Segers - Vanessa Mauro et Tanghi Burlion

mise en scène Bernard Damien / assistante Anne-marie Cappeliez

12272842087?profile=original12272842666?profile=originalRéservez le prochain spectacle :

du 6 au 10 novembre à 20h30: "Sous le ciel de Paris"

http://www.xltheatredugrandmidi.be/index.php?pid=1

 

 

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administrateur théâtres

12272838865?profile=original

On juge les pièces de Frank Wedekind indésirables à l’époque de  l’Allemagne de Bismarck. Et pour cause : elles sont crues, sauvages, sensuelles et vilipendent la morale hypocrite  de la bourgeoisie bien-pensante.  L’Eveil du Printemps fait scandale en 1891 et est censuré. Cette époque-là apparemment  si opposée à la nôtre, est-elle révolue? Pas si sûr. Si le sexe, depuis mai 68,  est devenu obsessionnel et formaté, pour mieux le contrôler, l’utiliser et le  proposer à la consommation, les peurs sont toujours présentes. Des tabous ont disparu, le vocabulaire a changé, la position sociale de la femme a évolué, mais certainement pas partout.  La montée des intégrismes en témoigne. A quoi il faut ajouter la nouvelle  crainte, justifiée, du sida.

Mélange de lieux et  d’époques: Wendla regarde  le film « Le  ballon rouge (1956) » à la télé. Sur scène il y a  une cabine de téléphone désaffectée, des tonnes de livres croulent devant un lit suspendu, un banc public tagué trône sur le toit, échappées de musique techno, des vieux postes télé, épars. C’est  la société  des parents aveugles et des maîtres souverains qui  porte la responsabilité du drame...Quel drame attend donc notre société mortifère? 

12272839287?profile=originalDès la deuxième scène, on plonge dans un monde à part, obscur, lumineux et ludique, celui d’une bande d’adolescents qui déferle à tous les étages du décor  vivant avec stupeur l’éclosion de sa sexualité… jusqu’au bord de scène. On pourrait croire que c’est «Rebel with a cause » (1955) ou l’Amérique de James Dean qui déferle.  Ou celle de « The  Virgin suicides » (1999).  L’époque  imprécise  replonge certes les  babyboomers dans leurs premiers émois. Ils avaient aussi des parents engoncés dans leur vertu, muets sur « la chose », hypocrites,  inquiets de grossesses non voulues, soupçonneux et accusateurs et à l’extrême, despotiques au possible. Espérons que les enfants des babyboomers, les  générations X ou Y,  se sentiront peut-être  moins concernés par la pièce. Quoique … leur éducation sexuelle a peut-être été aussi malhabile et inquiète. Quant aux générations futures…, les Z, nul ne sait. On ne peut leur souhaiter que le bonheur d’Être : bien dans sa peau et dans son être. Le repli sur soi menace  toujours, les intégrismes montent,  la jeunesse qui se veut toujours  secrète et rebelle désespère parfois. Sur  Facebook, les très jeunes déferlent : besoin de rassemblement, de recul vis-à-vis des parents ? Leurs pulsions de vie et de mort restent identiques.

 Pulsion de mort : Moritz, un  jeune garçon guindé,  fasciné par la réussite scolaire et soumis à ses parents se suicide par peur de ne pas être à la hauteur de leur attentes. Le rythme est incessant entre Eros et Thanatos, entre le  léger et le tragique.  Pulsion de vie : Wendla, 14 ans  épanouie et débordante de vie entreprend sa mère sur les questions de la naissance et de la reproduction. Ingénument voluptueuse et richement dotée par la nature, Wendla est sans complexes – une fille de maintenant ?  Elle se donne naïvement au fougueux Melchior, symbole de la force vitale du corps.  Joue-t-elle un jeu ambigu avec sa mère hors-jeu ? L’innocence et la pureté n’existent pas.  Elle désespère néanmoins  de se faire expliquer les choses de la vie et succombera à un avortement non annoncé. Scène glaçante où quelqu’un plante une croix au pied de son divan après ses dernières paroles : « Vous m’apporterez des primevères ? ». Prémonition lugubre d’un printemps coupé et volé?

12272838676?profile=originalCette « Kindertragödie » mouvante et débordante est d’une grande richesse théâtrale. La bande de jeunes se cherche et cherche sa place dans le monde. Melchior s’en veut. Il a deux morts sur la conscience.  On fait de lui le responsable de la mort de son ami Moritz.  Les parents de Melchior s’affrontent. Des morceaux satiriques de la plus belle espèce génèrent le rire. Entre-deux : infusions habile de chorégraphies suggestives et poétiques. Texte iconoclaste, qui par la voix de Melchior tourne en dérision la Vertu et la Compassion, arguant à la manière de Nietzsche ...et de Saint-Paul que la détresse des uns ne doit pas être le faire valoir des autres.

 http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=314&type=5

de FRANK WEDEKIND.  Adaptation: Jacques Dedecker et Jasmina Douieb Mise en scène: Jasmina Douieb.  Avec : Guy Pion(Mr Gabor), Béatrix Ferauge(Me Bergman), Delphine Bibet(Me Gabor), Réhab Benhsaïne(Ilse), Claire Beugnies(Professeur), Julien De Broeyer(Ernst), Agathe Détrieux(Martha), Vincent Doms(Moritz), Alexis Julemont(Melchior), Agnieszka Ladomirska (Théa), Nicolas Legrain (Jeannot), et Sherine Seyad(Wendla)

"L’Eveil du Printemps"                 DU 04/09/12 AU 20/10/12                         au théâtre le Public

 

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administrateur théâtres

12272837680?profile=originalLe théâtre est vibration. L’illusion théâtrale: illusions d’optiques ?  

Et si… le théâtre était avant tout une " cérémonie ", une  création multiple résultant  de la volonté du dramaturge, de la mise en valeur du metteur en scène, du jeu des comédiens, de l'appareillage technique des lumières et des sons et de la complicité d'un public ? Une illusion où le jeu est le centre vital ? Et  non plus le « je ». Un lieu où l’imagination éclaire le monde. Un chef d’œuvre  a-temporel.

 Et si… dramaturge et metteur en scène ne faisaient qu’un(e)? Puisqu’il s’agit ici  de Christine Delmotte, fascinée par des méthodes de spiritualité qui imprègnent la nature de l’homme depuis la nuit des temps?

12272837869?profile=originalEt si… Christine avait rencontré deux comédiens  de ravissement : Stephanie Va Vyve  et de Patrick Brüll, capables d’inviter le spectateur à mettre en doute ce qu'il voit, et, plus encore, à voir autrement ? Cette mise en jeu irait  jusqu'à la magie. Magie théâtrale  au centre du jeu. Miroitements infinis, Œuvre d’art surprenante.

 

Christine Delmotte rompt avec toutes les traditions et nous fait sur scène une proposition pour chatouiller notre imaginaire et nous entraîner dans les dédales de l’illusion.

12272838265?profile=originalEt si… : est-ce le ton de la fiction ou de la réalité ?  Illusion théâtrale, illusions d’optiques, illusion du temps qui régit tout mais que Christine Delmotte fait éclater magistralement. Christine Delmotte explore.  Le spectateur est soufflé par l’intensité du jeu, on pénètre dans une sorte de transe qui voyage d’un personnage à l’autre. L’amant et la femme, le disciple et le maître, le patient et son psy…, le… la ,  Stephanie Va Vyve  et de Patrick Brüll. Jusqu’à l’évocation de doubles, de triples de multiples personnalités.  Ou d’événements alternatifs? «Le temps est ce qui permet aux choses de ne pas arriver simultanément?

Puisque cette recherche théâtrale est dans le sillon peu fréquenté  du Temps quantique. Le temps ne s'écoule pas de comme à notre échelle. Il semble même, tout simplement, qu'il ne s'écoule pas. Les frontières bien établies se sont effacées. Il n’existe plus. Les facettes de la réalité se révèlent, autres. Comme dans les romans de Kundera. Des tiroirs mystérieux que l’on ouvre. Des plongeons osés dans l’inconnu.  Et si….on pouvait choisir un passé différent et donc un futur différent ? Et si… le temps n’existait pas ?     

 

12272838474?profile=original« …On continue ? » Les images et les scènes infusent l’une dans l’autre. Les miroirs réfléchissent d’improbables reflets, tous troublants. «  A rose is a rose is a rose…» Et l’on revient à la source première du théâtre : le jeu, Et si…. Le jeu brûlant  et habité  de l’exquise Stephanie Va Vyve  et de Patrick Brüll  est presque palpable. La salle est petite et les comédiens sont proches. Les vibrations sont intenses, inoubliables,  on ressort envoûté. Du jamais éprouvé, une découverte magique des contours de l’illusion. Et comment savoir ce qui est illusion et ce qui ne l’est pas.  

 

http://www.theatredesmartyrs.be/pages%20-%20saison/atelier/piece1.html

écriture, mise en scène et scénographie de Christine Delmotte

compagnie Biloxi 48

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administrateur théâtres

12272835689?profile=originalVous avez jusqu’au 20 octobre pour COURIR  voir « LES SENTIMENTS PROVISOIRES »  de Gérald Aubert à la Comédie Claude Volter. Jeu de cache-cache sentimental et spirituel entre trois comédiens de  carrière éblouissante : la sémillante Stéphanie Moriau,  Jean-Claude Frison, – qui ne se souvient pas de son éblouissant Mazarin au théâtre Royal du Parc l’an dernier ? – et l’incontournable bon vivant,  Michel de Warzee, le pilier de la  Comédie Claude Volter en personne. C’est ardent, bien mené, incisif, désopilant en diable, admirablement bien  joué et serti dans un décor bucolique sur scène à en faire pâlir bois,  lacs et jardins de la Woluwe.  Le propos semble éculé : une rupture, …une de plus. Mais ô combien intelligemment  actualisée dans son hystérique cuvée 2012. Hystérique et lâche ? Oui et totalement égocentrique comme c’est si souvent le cas. Cynique, même dans sa jolie critique du siècle qui voit un mariage sur deux s’évanouir sans l’ombre d’un regard en arrière et rivalise de créativité pour recomposer des familles en l’air.

Ici, heureusement pas d’enfant en jeu. Quoique…

La rupture qui vient du fond de l’horizon  arrive à Marc, un homme charmant (Jean-Claude Frison), séducteur impénitent, écrivain bien installé dans son  décor champêtre. Félix, son  meilleur ami d’adolescence, qui déteste les petits week-ends à la campagne, les feux de bois, les parasols, les promenades en shorts, est l’affreux coupable.  Le courageux Félix attend que ce soit Hélène qui  annonce la rupture. Michel de Warzee excelle dans son rôle d’amant bougon. 12272836662?profile=originalMais ce qui est particulièrement intéressant c’est que les 10 ans d’amour sont contés à travers une série de duos qui se jouent à trois. L’originalité est que  celui ou celle qui se raconte est absent des dialogues qui se jouent deux par deux,  les trois personnages ne quittant jamais la scène.  A la Tchékov ? Tour de force théâtral qui invite dans la psychologie profonde de chaque personnage et fait constater, de auditu, qu’il y a en permanence un double langage et  un fossé immense  entre ce que les personnages pensent, rêvent et ressentent … et les actes et paroles qu’ils posent  « in real life » comme on dit à l’heure actuelle.  Il faudra  d’ailleurs toute une bouteille de champagne à Hélène pour oser se lancer dans la scène sublime  d’enfant gâtée où elle se sépare. Dès cet instant le personnage de Marc effondré devient bouleversant de vérité et d’autodérision. Marivaudage moderne, l’aguicheuse  Hélène a joué  avec les sentiments  pour s’élancer dans une liberté toute  illusoire. On ne saura pas si l’issue est la solitude moderne ou un bonheur simple et compliqué à la fois, à la Jules et Jim. En définitive seul le rire est salvateur et le verbe aimer est très fragile, sauf en amitié.

12272836678?profile=original

 http://www.comedievolter.be/    

 

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