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comédie (193)

administrateur théâtres

 

 Sylvie NICOLAÏ  est  Clara SCHUMANN  

dans Clara et Robert SCHUMANN 


de l'auteure belge Sylvie Nicolaï

 

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spectacle créé par LE THEATRE DU GRAND MIDI à L'XL THEATRE

 dans le cadre du  FESTIF'FESTIVAL 2011 - La parole est aux Jeunes Artistes  du 15 au 19 novembre à 20h30

 

 

                                                            &

 

 

 

Emilie DUVIVIER  est La MALIBRAN 

dans UNA VOCE POCO FA 

de  l'auteure belge Sandrine WILLEMS

 

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spectacle créé par LE THEATRE DU GRAND MIDI à L' XL THEATRE


 

du 15 au 19 novembre à 20h30

 


  

 

                                                    Deux destinées extraordinaires: Clara et Maria,

Deux femmes extraordinaires. 

 

Elle s’appelait Clara. Femme de tête et de cœur,  amante et mère incomparable. Une princesse sombre. Elle s’appelait  Maria. Irrémédiablement belle, riche et intensément jeune. Une princesse blanche.

Toutes deux vivent la passion d’un homme entre tous et de la musique. Toutes deux subissent la tyrannie de  pères autoritaires. Pour l’une la passion devient constructrice, pour l’autre destructrice. Le spectateur est captif entre ces deux faces de la féminité qui lui sont tendues comme un miroir, fondement du théâtre.

 

Les deux interprètes de cette rencontre poétique et musicale sont habitées par la fougue du  romantisme. Toutes deux, anciennes élèves de Bernard Damien, ont accompli un travail magistral   de création et d’interprétation. La création de Sylvie Nicolaï est un patient  travail d’assemblages des lettres  enflammées qu’échangèrent Clara et  Robert Schumann. L’ensemble est  mis en scène avec vivacité et amour palpable. Ce texte volubile retrace leur histoire d’amour avant que le compositeur ne sombre dans la folie, la laissant à la tête d’une nombreuse progéniture.

 

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 Emilie Duvivier reprend le texte splendide et touchant de Sandrine Willems,  jeune auteure belge vivant à Nice, qui retrace la vie éphémère de Maria Felicia Malibran. E.E Schmitt dirait « chacun sait qu’une biographie est une autobiographie sincère. En croyant parler d’une autre, on parle sans fard de soi ». Les deux comédiennes mettent tant de cœur dans leur interprétation qu’on ne peut pas les imaginer étrangères au texte et uniquement interprètes. Ou alors elles possèdent un talent hors du commun. 

Toutes deux nous livrent ce qui se passe  au-delà des mots et nous tendent ce miroir dans lequel elles et nous, pouvons nous voir. Toutes deux pénètrent avec talent ce que ces deux personnages féminins extraordinaires éprouvent. Clara : « Je veux vivre et vous chérir et me souvenir ! » Maria : «Je te donne ma vie, mais je ne vis plus ! ».  Puis au bord du désespoir : « Encore vivre, encore chanter ! » alors qu’elle agonise à 28 ans après une chute mortelle à cheval. « Un amour, enfin à sa hauteur ! »



 

Il y a  un formidable crescendo entre les deux parties du spectacle. Emilie Duvivier ajoute tout son corps rayonnant sur le plateau. Et une lumière incandescente. « De ma voix, je pouvais faire n’importe quoi. Trois octaves balayées d’un souffle. » Tout en elle est vibrant, intense et juste. Sa voix souffle des confidences à des spectateurs assis au premier rang devant un décor éblouissant de blancheur. Des bribes de  mélodies inoubliables de Maria sont ressuscitées avec une justesse  surprenante. Elle avoue que l’acharnement du succès et l’angoisse l’ont fait vivre comme une bête traquée aux côtés d’un père tyrannique. Que « les jours les plus heureux de sa vie » étaient avec Bellini, qui ne la désirait pas. Elle soupire avec amertume que les gloires de l’art lyriques « sont aimées pour ce qu’elles font, pas pour ce qu’elles sont ». Une question qui nous vrille le cœur. Tout son corps « impossiblement beau »  et rose de féminité palpite, bondit et se terre  comme un  animal en souffrance, l’émotion nous étreint. Le sourire se perle, la bouche frémit, les ongles écarlates agrippent sa tunique vaporeuse  de déesse.  Ses yeux radieux nous transpercent, et  tout en elle confesse avec passion  son histoire malheureuse à cet enfant mort en son sein. Les noces de la scène et de la comédienne lui font tout donner d’elle-même.  Le spectateur est subjugué. Par le texte et par l’actrice.  « Qui a goûté à l’ovation d’un public ne peut plus s’en passer ». Ce spectacle d’exception le prouve en tout cas.

 

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Confidences trop intimes  de Jérôme Tonnerre

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Parce qu'elle s'est trompée de porte, Anna s'est retrouvée à confier ses déboires conjugaux à un conseiller fiscal, William Faber, coincé, cravaté et blême. Touché par sa détresse - troublé aussi - l'homme n'a pas le courage de lui avouer qu'il n'est pas psy, contrairement à son voisin de palier. De rendez-vous en rendez-vous, de confessions en confessions, un étrange rituel s'instaure entre eux, les rendez-vous s’amoncellent. L’addiction mutuelle s’installe. William est à chaque fois ému par la jeune femme, et fasciné d'entendre ce qu'aucune femme ne livre jamais.  Qui est donc Anna ? Qui est dupe ? Qui joue  quel jeu ? Le  psy qui habite à côté, finit par faire une thérapie d’Anna par procuration en recevant William contre espèces sonnantes et trébuchantes.  Ce sont les moments les plus savoureux ! Le psy est point pour point celui qu’on imagine dans les caricatures les plus délirantes.  Le psy : « N’oubliez pas, le premier organe sexuel, c’est l’oreille ! » Et alors que William veut soudain abandonner son aventure amoureuse à peine amorcée…il lui souffle : « La pureté analytique vous interdit de changer de rôle ! » Et autres balivernes succulentes de psy.

 

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Ce sont donc les deux personnages secondaires  qui donnent du relief à ces rencontres: l’ex- femme de William : Jeanne, chaleureuse, et gentiment jalouse de la mystérieuse visiteuse, et ce psy magnifiquement campé, caustique à souhait  et interprété avec excellence par Michel Israël.

Mais à la manière des thérapies, la pièce piétine, barbotte un peu. Il y a de bons mots, de fines réparties, des mystifications. Mais la succession des scènes alternativement dans le même décor des appartements jumeaux dotés des mêmes meubles - une fois chez le psy une fois chez le fiscaliste - rendent l’affaire un peu monotone. Soulignons par contre la qualité de la musique : entre valses de Vienne, Hitchcock et «  in the mood for love », celle-ci donne à l’ensemble   un modelé pittoresque.

 La valse hésitation de William s’éternise cela fait rire intérieurement ou attire la compassion sur ce  personnage grave qui a oublié de vivre.   Affublé d’une cravate sévère, vieux garçon rangé  et méthodique,  il ne se départit que rarement de son sérieux d’enfant sage et triste, comme s’il était  puni par la vie et  imperméable au désir.   Deux fenêtres blêmes deviennent presque des personnages à part entière. Elles l’ont vu naître,  le surveillent et  le feront enfin sortir de ses gonds.

 L’air de rien, sans y toucher,  c’est quand même lui, William, qui  a  patiemment reconstruit Anna, incapable de se passer de ses cigarettes jusqu’à sa guérison. Anna est  son Pygmalion, mais on  aurait  néanmoins souhaité à William une rencontre avec une fille de plus d’épaisseur, de verve et de charme, pour faire drôle plutôt que doux-amer. Qu’elle eût été  plus malheureuse de sa relation perdue avec son mari, plus affolée, plus désespérée aurait donné  un peu de sauvagerie à ce vaudeville de divan par ailleurs bien mené.  

 

CONFIDENCES TROP INTIMES

de JÉRÔME TONNERRE d’après le film de PATRICE LECONTE
Mise en scène: BERNARD YERLÈS / avec ALAIN LEEMPOEL, CATHERINE CONET , HÉLÈNE COUVERT et MICHEL ISRAËL

 

DU 27/10/11 AU 03/12/11

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12272763279?profile=original« La source des femmes» sortie en Belgique le 9 novembre (avant- première aux Beaux Arts de Bruxelles le 5 octobre)

 

Fils d'un journaliste juif déporté et sauvé Radu Mihaileanu  est né à Bucarest en Roumanie le 22 Avril 1958. A  22 ans, il fuit le régime politique de son pays et s'installe en France.  Il signe en 1992 son premier film, Trahir, comme réalisateur et scénariste. Ce film narre le combat d’un individu contre une puissance totalitaire.   Son  deuxième film, Train De Vie reçoit un très bon accueil au Festival de Venise. En 2005, avec Va, Vis Et Deviens, Radu Mihaileanu devient producteur, et remporte le prix du Public et le prix Européen à Paris. Une histoire réelle de réfugiés juifs éthiopiens rapatriés par Israël  dont le protagoniste est un jeune garçon échappé d’un camp de réfugiés au Soudan et  qui réussit à se proclamer  juif et orphelin et est accueilli dans une famille adoptive française en Israël. Ce long-métrage plein d’humanité évoque les problèmes d’intégration, le racisme, les différences culturelles, la perte des racines.  En  2006 il reçoit le César du Meilleur Scénario Original pour ce troisième film. En 2009, Radu Mihaileanu signe la mise en scène du film  Le Concert, long-métrage avec Mélanie Laurent.

 

 Le voici maintenant  à Cannes pour le film La Source Des Femmes présenté en Compétition du 64ème Festival International Du Film De Cannes 2011 avec 5 nominations :

- Palme d'Or (Radu Mihaileanu)

- Grand Prix (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury Oecuménique (Radu Mihaileanu)

- Prix de la Jeunesse (Radu Mihaileanu)

 

Leïla Bekhti et Biyouna  jouent à la perfection le rôle de deux femmes de générations différentes,  qui vont entamer une guerre contre le machisme, l’inégalité profonde des femmes, dans la société médiévale qui sévit dans ce petit village marocain sans eau et sans électricité. Du Maroc à L’Afghanistan c’est dans doute le même combat : une révolution à accomplir. Parfois une étincelle, infiniment petite,  suffit à allumer un brasier de changements.  Elles sont déterminées, malgré l’opposition de quelques unes et la crainte justifiée de leurs maris.   Elles veulent dénoncer des pratiques qui n’ont rien  à voir avec l’Islam, mais tout à voir  avec cette supériorité masculine atavique, le corvéage sans merci des femmes, les mariages forcés à un âge indécent,  le droit de les violer, de les répudier, de les battre et de leur refuser l’accès à l’éducation… sous prétexte de sorcellerie.

L’idée géniale de ces femmes  c’est  donc de faire la grève del'amour et du sexe tant que les hommes ne s’arrangeront pas pour amener de l’eau au village. Eux qui  forcent leurs femmes à se transformer en bêtes de somme, pour transporter tous les jours, l’eau que l’on ne peut trouver qu’à une source perdue dans la montagne, n'imaginaient pas qu'un jour elles puissent se rebeller et trouver un tel moyen de pression.

Les porteuses d’eau se sont épuisées sur les chemins arides de ce pays « où coule une source d’eau qui  se tait. » Au propre et au figuré. « Mais l’eau  qui apporte la vie emporte aussi  la vie, déplore l’une d’entre elles, qui a malheureusement glissé et  perdu  sur le chemin caillouteux, le bébé qui allait naître.  Et le cœur des hommes est sec et sans amour,   à cause du chômage et de la sécheresse de l’environnement. Les conditions de vie font qu’ils  ne participent plus du tout à la vie économique du village et se prélassent à ne rien faire.  Cela doit changer. Le village est en train de mourir, il s’agit de survie, comme de celle des infiniment petits, ces insectes en voie de disparition  qu’un entomologiste au cœur aussi sec que le leur,  est venu étudier sur place.

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Le film s’accomplit comme une sorte de conte, fourmillant d’humour, d’inventivité, non sans rappeler celle des mille et une nuits. La danse, le chant lancera la première offensive. Les hommes sirotant leur thé à une terrasse seront ahuris devant la montée des exigences qu’ils nommeront aussitôt sacrilèges et se défendront bec et ongles pour garder leurs privilèges. Le ton est malicieux, déterminé, dicté par l’amour et non par la tradition. Les femmes sont généreuses, belles, pétillantes d’intelligence et armées de courage, comme dans un conte. Les images sont superbes, le cœur du spectateur se nourrit de l'allégresse communicative de ces femmes qui croient à la justice de  leur combat.  

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Tout le propos du film sera celui d’une source d’eau qui parle et se fait entendre, enfin. Et la source des femmes, c’est l’amour, qui lui aussi doit se faire entendre, enfin. L’être humain n’est pas fait pour vivre à genoux et est capable de merveilleux. Voilà pour ce conte oriental réaliste et contemporain de l'infiniment petit. Comme les femmes le disent dans l’histoire, «  beaucoup de fourmis tirent un lion ». Le lion c’est l’histoire de l’humanité.

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"Le pain dur " de Paul Claudel au Théâtre Jean Vilar

12272763084?profile=originalLe pain dur  au Théâtre Jean Vilar

 

De : Paul Claudel , première  mise en scène en 1949 par le théâtre de l’Atelier à Paris : André Barsack

Mise en scène 2010 : Agathe Alexis, Alain Alexis Barsacq

Avec Agathe Alexis, Robert Bouvier, Grégory Fernandes, Georges Goubert, Carine Baillod, Hervé Van der Meulen

 

Le plateau est âpre et presque vide à part une pile de livres imposants que personne n’ouvrira et qui sert parfois de perchoir aux personnages féroces, comme autant d’oiseaux de proie. Quelques chaises  en forme de cadres vides viennent parfois s’abriter derrière une table qui ressemble à celle d’une  dernière scène d’une époque vidée de sa substance. Il y a du vin, mais pas de pain, même dur. Dieu brille par son absence. Sur le côté droit de la scène il y a un Christ à l’humanité saillante, mais  mutilé de ses membres qui sera vendu au poids du  bronze, quatre francs le kilo. Car nous sommes dans une ancienne abbaye, acquise par  le cynique Turelure (Hervé van der Meulen),  vieillard avare, dénué du moindre sentiment, et qu’il veut transformer en  papeterie.

 

 Il y a un mal-aimé qui débarque. C’est son fils, Louis (Robert Bouvier) qui s’est engagé dans l’aventure colonialiste algérienne et se transformera en fils parricide pour dix mille francs,  guidé par deux femmes avides. L’une, c’est Sichel (Agathe Alexis) juive athée rêvant d’une terre juive où elle aurait  enfin des attaches. C’est la maîtresse de Turelure, ce capitaine de l’industrie et de la finance dont l’histoire n’est faite que de compromissions et de retournements de veste. Elle est aussi  la fille d’un financier avec qui l’âpre vieillard  fera affaire peu honnête. L’autre, c’est Lumir (Carine Baillod), la ravissante  jeune  polonaise politiquement engagée, sapée dans une redingote  de terroriste en herbe,   fascinée par la réunification de la Pologne à accomplir, une vraie Jeanne d’Arc illuminée, mais privée elle aussi de Dieu.  Toutes ces marionnettes qui campent l’époque  ont le cœur vide comme le plateau. Le rythme des  dialogues butte ad nauseam sur une seule chose : Mes, Tes, Ses, Les dix mille francs, véritable pierre d’achoppement.

 

La description clinique de cette époque malade de spiritualité se développe avec des allures de gangrène. Il n’y a pas une goutte d’amour parmi ces personnages, tout est sec et dur. On est dans une froideur matérialiste, scientifique, progressiste mais qui va où ? Vers la mort du père, sûrement, lui qui croyait tirer les marrons du feu !  Vers une sorte d’inceste, puisque le fils épousera la maîtresse du père. Vers la fuite du seul idéal, puisque la jeune polonaise après une magnifique scène d’ultimatum mi-amoureux, mi-politique,  fuira à la poursuite de son idéal nationaliste. La coupe est donc amère à boire pour le spectateur qui ne trouve aucun personnage à qui s’attacher. Il ne peut que constater à quel point  la société de 1830 (et la nôtre) se cassent les dents sur un pain plus dur que la pierre!

 

Le jeu des comédiens, virtuoses de la langue et du geste, est  diabolique et sûr. Totalement  épanoui, il  rassasie les amoureux de la scène et du texte bien dit. Mais préparez-vous à une marche dans le désert de l’amour.  Car Paul Claudel, dans ce deuxième volet d’une trilogie historique écrite entre 1908 et 1916  s’ingénie à  nous rendre sensible cet abandon des valeurs de la spiritualité qui mine les personnages bien qu’ils s’en défendent, attise leurs tourments, dévie l’objet de leurs désirs,  provoque la violence et tue les sentiments. Il n’existe nulle part d’eux-mêmes où pourrait s’enraciner de l’amour.

 

Une coproduction Compagnie Agathe Alexis et Compagnie des Matinaux - compagnies conventionnées par le Ministère de la Culture - DRAC Ile-de-France.


Lieu : Théâtre Jean Vilar
Dates
: du 18 au 28 octobre 2011
Durée : 2h15 sans entracte

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=461

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12272763266?profile=original« Grand ECArt » de Stephen Belber mis en scène au théâtre de la Madeleine à Paris et maintenant à Bruxelles au CENTRE CULTUREL D’AUDERGHEM

 

Une pièce où l’on parle de A comme Amour ou  A comme Art ;  du contrôle de soi, du travail et de la discipline de la danse, « c’est sidérant, bouleversant, la rigueur » ; de ce que peuvent bien se dire un flic et un danseur (homosexuel à ses heures),  de haschisch et autres substances hallucinogènes (c’est l’époque),   des années soixante et particulièrement de l’année 1963, «  période de défoulement total »; des milieux artistiques, « tout le monde couchait avec tout le monde ! » ; du merveilleux métier qu’est l’enseignement,  « voilà pourquoi j’enseigne: accoucher la magnificence de l’esprit humain »; de sexe, de tricot et de danse « qui sont interchangeables » ; de l’usure des couples ; du rêve de vie de chaque individu,  et du grand écart, figure de danse, et  phénomène qui sépare tant les fils et les pères que les individus dans les couples mariés ou non. On dirait presque un titre canadien !  Foule sentimentale, sortez vos mouchoirs et riez de bon cœur.

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Un spectacle désopilant, mais absolument  pas pour enfants, nous prévient Thierry Lhermite lui-même ! Cela se passe dans l’appartement 52, dernier étage d’un gratte-ciel Newyorkais. On y parle beaucoup de la prestigieuse Julliard School. Cette comédie dramatique et  psychologique  touche à la fois nos fibres profondes et nous fait sincèrement rire tant le jeu des acteurs et le décor fantaisiste se liguent pour accumuler une tension  merveilleusement bien menée qui interroge ce fameux grand écart, dans tous les sens du terme.

 

À New York, Toby, ce célèbre chorégraphe excentrique et solitaire, devenu professeur de danse à la Julliard School suite à un accident qui brisa sa carrière de danseur étoile, reçoit donc  la visite d'un étrange couple de Seattle venu l'interroger sur le milieu de la danse dans les années soixante. Une banale  enquête sociologique qui va le distraire de sa solitude  croit-il. Mais cette  rencontre devient très vite  explosive.   Comment ces trois protagonistes mus au départ par la seule curiosité,  peuvent s’engouffrer dans une hostilité réciproque et sauvage… est révélateur de la nature humaine et montre à souhait qu’il suffit de très peu pour déclencher une guerre.

 
L'interview prend  une tournure très inquisitrice car elle porte sur les mœurs sexuelles très libres de l’époque hippie mais surtout sur les partenaires variés et  nombreux du chorégraphe. De quoi créer un malaise de plus en plus désagréable pour le vieux danseur.   A vous de découvrir  les motifs  secrets  de cette visite déterminante, en présence des protagonistes, servis par  des comédiens magnifiques sur  les planches du centre culturel d’Auderghem. On ne voudrait en aucun cas vendre la chandelle d’une pièce finalement fort émouvante. Vous serez servis en surprises et en vérités psychologiques et artistiques.


Auteur : Stephen Belber
Artistes : Thierry Lhermitte, Valérie Karsenti, François Feroleto
Metteur en scène : Benoît Lavigne

Du lundi 17 au samedi 22 octobre 2011 à 20h30 et dimanche 23 octobre à 15h30

http://www.cc-auderghem.be/index.php/nos-spectacles/paris-theatre-1112.html

 

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La fille dans le bocal à poisson rouge / Girl in the Goldfish Bowl

Et si on gardait le titre en anglais ?

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L’histoire : 1962, crise des missiles de Cuba, une pension de famille dans un petit port de pêche au Canada. Iris, 11 ans, bouddhiste et très imaginative, est fermement convaincue que son poisson rouge Alakermaisse, (c’est là qu’on le lui a acheté) récemment disparu, est revenu sous la forme de l’énigmatique M. Lawrence qui débarque dans la pension alors que la famille est en pleine crise de couple. Le poisson ainsi réincarné aura une mission : réparer les tensions entre Owen et Sylvia, les parents d’Iris, sous le regard narquois de Mlle. Rose, cette mauvaise fée-poison, lubrique, alcoolique et méchante qui travaille à la conserverie. Redonner à leurs parents  désunis le goût de vivre, c’est le  rêve de tous les enfants victimes de mésententes.  Voici la cueillette subtile  des derniers instants d’enfance et d’innocence de la petite Iris. 

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Tout touche: le texte  inédit est de Morris Panych, la  mise en scène de Georges Lini et l'interprétation de  France Bastoen, Marc De Roy, John Dobrynine, Nicolas Ossowski et Wendy Piette.

 

Histoire d’eau : l’eau c’est la vie, l’enfance heureuse. Le bocal est vide. Alakermaisse the goldfish est mort. Le décor est quelque peu lugubre pour une fillette de 11 ans. Des murs de papier peint à larges rayures vert/gris. Des meubles inconfortables. Une table roulante chargées d’alcools et une table à dessin chimérique appartenant au père. Lieu géométrique de ses rêves inaboutis et de sa désolation. Sa femme ne l’aime plus. Trop de parallèles qui ne se rejoignent jamais, des angles pas assez ronds. La petite fille au début esquisse des mouvements de nage joyeuse, avec palmes et tuba dans la family room. L’eau c’est la vie, l’enfance heureuse. Son seul compagnon, Alakermaisse the goldfish  est mort. Elle est prête à le faire se réincarner sous les traits de Lawrence, le mystérieux inconnu. Et quand fera-t-elle le pas, quand sautera-t-elle  hors de la prison-bocal ? En attendant, elle saute et bondit partout avec une joie de vivre communicative, qui pourrait ramasser les morceaux épars du couple si sa mère n’avait pas une incapacité chronique à être heureuse. Si le sort n’avait pas fait du père un rescapé de guerre sans emploi et sans avenir.

 

La magie de cette pièce réside dans  la transformation précoce de l’enfant à la jeune fille, qui se déroule  là juste sous nos yeux, comme mise en bocal. La mise en scène est pleine de  finesse, de poésie et de justesse. La palette des comédiens est convaincante, à part cette méchante fée antithèse du poisson. La jeune Iris est délicieuse de vivacité, d'humour et de jaillissement spontané. "Ma petite est comme l'eau, elle est comme l'eau vive..."dit la chanson.

 

La mort du personnage mystérieux aura ressoudé la famille un instant, mais la vie séparera ceux qui sont incapables d’amour réciproque. La vie est injuste et le bonheur pour un adulte, aux dires de la mère désillusionnée, sèche et froide, c’est se souvenir de l’enfance heureuse. « L’enfance est le moment où l’on est heureux. Et être adulte, c’est repenser à ces moments où l’on était heureux » Pauvre Iris, au nom de fleur aquatique et qui ne rêve que de bulles... devant son bocal vide.

 

http://www.theatredumeridien.be/

 

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Du  Mardi, 20 septembre  2011  Au Samedi, 15 octobre  2011

 

Extrait:

IRIS. -   J'habite dans un pays où il ne se passe jamais rien. Dans une ville où il ne se passe jamais rien. Dans une maison où il ne s'est jamais vraiment rien passé. Jusqu'à aujourd'hui. Octobre. Nous sommes à la veille de mon onzième anniversaire. Il y a du brouillard qui rampe dans la rue. Qui se cache dans les fossés. Qui regarde par les fenêtres. Je suis partie marcher au bord de l'eau. Tenant en équilibre sur ma tête le missel du dimanche, introduction de l'Évêque Sheen, je marche prudemment sur les rochers, posant gracieusement un pied devant l'autre. L'aisance est essentielle dans de telles circonstances. Je m'entraîne à être un des membres de la famille royale. Plus loin, il y a des feux et des pêcheurs d'éperlan qui jettent leurs filets, encore plus loin, les coques métalliques cognent contre l'appontement, mais ici, tout est calme. Je commence la cérémonie. La lune fait une brève apparition. Et je sais qu'il y a des crabes cachés sous les rochers, mais en dehors de ça, je suis seule. Là, sous l'arbousier, je prie pour sa petite âme. Quand on veut que son poisson rouge aille au paradis, on évite de le flanquer aux ouatères en tirant la chasse. C'est pourtant ce que ma mère a fait. Et pourquoi j'enterre ce bâtonnet de poisson pané en son honneur.
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"Désordre public" (pièce d' Evelyne de la Chenelière)

 

Désordre public ou désordre mental ?  Voici une pièce sans prétention de la canadienne Evelyne de la Chenelière, jouée avec humour, dérision, et pétillements. Les acteurs sont jeunes, dynamiques, et il y a même un surdoué. L’action se passe dans un autobus. "Max dans l’autobus", le comble de l’anti-héros, a été lâché par sa femme et son boulot. Il a perdu même sa voiture, c’est pour cela qu’il prend désormais l’autobus, et se retrouve tout-à-coup sur le pavé.

 

 Et soudain, alors qu’il commence tout doucement à ne plus se sentir exister, il perçoit les bruits des autres, les bruits d’âme et du cœur des autres passagers de la vie. Est-il en train de devenir fou, schizophrène, à devoir  ainsi  être le témoin de leurs transports intérieurs ?  Les gens anonymes qui roulent autour de nous soudain deviennent audibles. Egoïste dans l’âme, il rejette cette nouvelle faculté, sous-entendant qu’il a déjà bien assez  à faire avec ses 5 sens pour survivre. Mais il ne peut s’empêcher de parcourir ce chemin obligé de la compassion. On tombe donc avec lui dans la cour des miracles de notre société contemporaine, faite de solitude et de « foule sentimentale assoiffée d’idéal ». Il y a tous les paumés de la vie  qui se trompent de reflet dans le miroir.  Dans le kaléidoscope, on rencontre des personnages cocasses, dont l’enfant surdoué.  Mais on se serait aisément passé des allusions à la politique belge puisque tout  se passe au Québec, terre de rêve. Laissez-nous donc rêver ! …  Les allusions par contre au métier d’acteur font mouche.  On remonte dans le temps avec des chansons phares comme "Let the Sunshine in",  "Unbreak my Heart !" ," I will survive!", chorégraphiées comme au Club Med ! On invite même des spectateurs à danser. Tout cela est très peace and love. Le matériau est donc souvent décousu, hétéroclite ou expérimental, mais la vie n’est-elle pas que chaos et expérience ?

 

On retiendra en revanche le très beau monologue final de Max qui donne une certaine  profondeur humaine à la pièce. « Plus j’entends, plus je disparais. Je suis le réceptacle de tous leurs maux. On traîne tous les échos superposés de ce qui s’est dit. Je suis devenu les autres, (rires). Suis-je devenu un grand acteur, enfin ? Mais je n’ai plus de vanité. Personne ne fait le poids de centaines d’ êtres humains. Le monde m’envahit, j’entends tellement loin que je n’entends plus rien. Tout se superpose, tout s’empile pour me rendre sourd. Je ne peux plus rien dire, je n’ai plus de mots. Tous ces balbutiements… quelque chose dont je ne trouve pas le sens !  »

DESORDRE PUBLIC

d’ÉVELYNE DE LA CHENELIÈRE
Mise en scène: Olivier Coyette / avec Benjamin Boutboul, Olivier Coyette, Sophie Jonniaux, Virgile Magniette, Mirabelle Santkin et Emilienne Tempels

 

DU 16/09/11 AU 05/11/11

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=284&type=2

 

 

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Ils auront le pompon (du bonnet bien sûr),  ces six acteurs éblouissants qui nous ont fait rire aux éclats hier soir au festival « Bruxellons » au château du Karreveld. C’était une comédie de boulevard,  ou plutôt une comédie de sable et de plage. Avec beaucoup de sable dans les yeux, car Dieu que ce spectacle est corrosif et décapant ! Feydeau lui-même applaudirait s’il était encore de ce monde. 

 Tout y passe, depuis les aléas de la cohabitation entre soi-disant « amis », la dictature consentie ou non du chef de groupe, le problème de la cagnotte, le port du pull savamment jeté sur les épaules,  l’éducation des enfants, le travail au noir, la cuisine modèle,  les jalousies conjugales, les thérapies,  la mort des chiens et leur ensevelissement…

En effet, trois couples d'amis ont loué ensemble une villa pour les vacances au bord  de la Grande Bleue. En trois coups de caméra, l'ambiance se gâte rapidement. Question de logement, qui aura la plus belle chambre, la plus belle vue ? Le public est du côté  mer avec ses rochers: « la tortue »,  «  le béret du berger », « la limace »… Personne n’y voit goutte, seul l’organisateur, outrancièrement méticuleux, esclave de son bracelet-montre et des guides touristiques, repère lesdits rochers. Mais il est imperméable aux ressentiments grandissants de ses « amis ». Du côté chambres, les  couples se lancent dans des tirades où la critique mutuelle va bon train, inconscients que tout un public les regarde.  Les motifs de conflit sont innombrables. La mesquinerie est reine. Au dîner final et fatal, sonnera l'heure des règlements de comptes... Du jamais-vu ! Et ils iront jusqu’au bout !

Sommes-nous ces rochers immuables aux noms peu évocateurs  ou des passagers clandestins ? Tout pousse à croire qu’on a réellement passé les huit jours ensemble avec ces couples diaboliques tant l’ambiance de mésentente est palpable malgré les innombrables non-dits, et  tant le rendu des estivants  et de leurs réactions est juste. Une petite semaine de vacances virtuelles à la fin de l’été, il y a vraiment de quoi lever son verre… aux artistes. Les dialogues sont  percutants, la mise en scène est vive, le jeu des acteurs et les mimiques ne sont jamais exagérés, mais  juste en forme de mille feuille  d’observations délectables de la vie quotidienne en vacances.  Voici une comédie de sable, rythmée et ébouriffante. Il n'y a plus qu'à sabler le champagne avec les artistes!

 

«Le béret de la tortue», écrit en 2000 par Gérald Sibleyras et Jean Dell.

 

http://bruxellons.net/beret.html

 

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administrateur théâtres

"Les hommes préfèrent mentir"

 ( pièce d'Eric Assous)

 

du 14 septembre au 9 octobre 2011

au théâtre Royal des Galeries

 

Réveil féroce de sept personnages au cours d’un dîner mondain. Et pourtant l’un d'eux, Sam/ Frederik Haùgness, homosexuel  est adversaire du « Coming out ». Tout n’est pas bon à dire. Les hommes préfèrent mentir…

 Le casting du théâtre des Galeries a tout pour plaire avec Simon / Michel Pigeolet , visage bien connu*, en tête de liste. Il est d’une vérité fracassante même si soi-disant « les hommes préfèrent mentir ». A travers son emphase, on le voit vulnérable, lâche, désabusé, et coureur impénitent quand même. Il est terrassé, le pauvre,  par « la dictature du choix ! » (sic)

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En second, nommons, non sa femme, Olivia/ AylinYay, la femme trompée qui devient impitoyablement pragmatique et cynique, mais Anne-Catherine/ Maria del Rio, la femme fatale casquée de noir jais, galbée dans une tenue qui ne laisse rien ignorer,  par qui tout arrive, et  qui dès son arrivée dans l’encadrement de la porte, jette l’émoi dans le public et donne à la pièce une saveur toute diabolique et  sulfureuse. 

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 La troisième nomination va équitablement aux deux autres : Aurélie/ Catherine Claeys,  alias «  in vino veritas» qui sème à tous vents son mal d’amour, ses quarante ans nostalgiques et ses gaffes à répétitions, et la jeune  Madison/ Fanny Jandrain alias « I am mad about you » casque blond à la Jeanne d’Arc moderne, montée sur talons aiguilles - rouges sans doute, et plus froide et sûre d’elle que l’argent de son père.

Au-delà des portes du salon bourgeois, il y a ces cris incessants des enfants en bas âge de chacun, puisque, signe des temps, on a échafaudé dans cette comédie de boulevard actuelle, le modus vivandi des familles recomposées. Cri d’alarme ? Ainsi les thèmes éternels roulent dans tous les sens : la trahison, la jalousie, le couple dans tous ses états mais aussi des thématiques actuelles : l’adoption des enfants, l’alcool, l’homosexualité, la course à la gloire éphémère, l’illusion générée par les médias , les nouveaux pouvoirs de la femme…

 

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Malgré quelques lourdeurs liées au genre, dans les situations comiques, les mimiques un peu appuyées ou des réflexions parfois téléphonées,  Eric Assous, loin de s’aligner sur le titre de sa pièce, a réussi une peinture sociétale véridique. Il rapelle l'approche de Simenon : “quand je peins un personnage, je tente toujours de montrer, non pas ce qui le différencie des autres, mais ce qui le rapproche des autres”. A travers cette intrigue qui ménage un petit suspens policier, j’ai voulu traiter de personnages qui nous ressemblent ou qui ressemblent à ceux que nous croisons. Les ordinaires, ceux qui n’ont rien d’exceptionnel. Ni petits, ni grands, ni laids, ni beaux, ni forts, ni faibles. Tout ce qu’ils montrent demeure on ne peut plus humain. La jalousie, la rivalité, l’usure des sentiments, les petites trahisons du quotidien, les arrangements boiteux avec sa conscience. Le ton est à la comédie qui reste selon moi le mode de représentation le plus efficace. » (extrait du programme)

A cet égard le rôle de paumé joué par Richard/Bernard Vens  est fort représentatif et on passe une soirée aigre-douce fort délassante. 

 

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Conversation avec Eric Assous

http://www.trg.be/Public/Page.php?ID=3395&ancestor1=3194&saison=3180

 

Pour en savoir plus:

http://www.trg.be/Public/Page.php?ID=3392&ancestor1=3194&saison=3180

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administrateur théâtres

L’ECUME DES JOURS de Boris Vian (A l’atelier 210)

12272756691?profile=originalL’ECUME DES JOURS de Boris Vian

A l’atelier 210 (jusqu'au 8 octobre)

Un monde monté  sur des roulettes: voici l’univers imaginaire et déroutant  de Boris Vian, où la fantaisie et le merveilleux sont omniprésents, présenté par Emmanuel Dekoninck.  Le texte de Vian est resté en partie au vestiaire.  Les mots swinguent moins. On n’entend pas les pas des amoureux clapoter sur le parquet de l’appartement de Colin, qui ne cesse de rétrécir et de s’assombrir au fur et à mesure des progrès du nénuphar.  Pas de narrateur mais un piano et une jeune chanteuse habillée Courrèges. Rien que des dialogues vifs et bien enchaînés, neuf comédiens-musiciens juvéniles  bondissants, le swing de la musique d’aujourd’hui, toute une grammaire d’éclairages, de la chorégraphie, des scènes muettes (le mariage, la nuit de noces). On applaudit en plein milieu du spectacle devant les  jeux de scène délirants, tirés à l’extrême  et les accessoires et ustensiles loufoques dignes du salon  des inventions, qui ont un pied dans le réel, un autre dans l’imaginaire.

Et  le tout marche comme sur des roulettes. Emmanuel Dekoninck a réussi le défi de   montrer un univers parallèle que l’on peut réellement voir, un monde qui jongle  avec la vitesse et avec la mort. Une façon efficace d’appréhender le réel. Dénonciation moderne  de tout ce qui tue: le travail érigé en valeur plutôt qu’en moyen, la guerre, la pauvreté, la maladie. La folie de l’administration. La folie religieuse qui tue le plaisir. La folie du culte de la personnalité avec ce personnage délirant, lui aussi monté sur roulettes, et pas des moindres,  représenté comme un philosophe grotesque présentant ses échantillons de vomi lors de ses conférences de presse. Rapport à la Nausée.  Allusion à son meilleur ami  Jean-Paul Sartre. Pardon, Partre.  Dérision. Tout roule n’est ce pas ? Est-ce vrai ? Et de méditer tout aussitôt sur  la magnifique phrase d’entrée de jeu :

 «Dans la vie, l’essentiel est de porter sur tout des jugements a priori. Il apparaît, en effet, que les masses ont tort, et les individus toujours raison. Il faut se garder d’en déduire des règles de conduite: elles ne doivent pas avoir besoin d’être formulées pour qu’on les suive. Il y a seulement deux choses: c’est l’amour, de toutes les façons, avec les jolies filles, et la musique de la Nouvelle-Orléans ou de Duke Ellington. Le reste devrait disparaître, car le reste est laid, et les quelques pages de démonstration qui suivent tirent toute leur force du fait que l’histoire est entièrement vraie, puisque je l’ai imaginée d’un bout à l’autre.  Boris Vian, La Nouvelle-Orléans 10 mars 1946. » Jamais, il n’est allé en Louisiane.

Et pendant ce temps là,  l’immense nénuphar  de  tout ce qui bloque l’homme, se développe, mortifère et imperturbable,  se nourrissant du fleuve de nos émotions et de notre angoisse. Les hommes sont des souris pour le chat. Roulette russe. Colin, au contraire de ce monde, est ce jeune homme aisé  et rêveur, qui aime le jazz, la vie et l’amour et qui déteste la violence et le travail. La délicieuse, la frêle et douce Chloé incarne la féminité et la beauté. Celles-ci sont vouées à un bien triste destin. A la fin, Colin pleure et son amie la souris, incapable de contenir sa douleur,  mi-animale, mi-humaine,  préfère se précipiter dans la gueule du chat sous nos yeux. La lutte pour le bonheur est vraiment trop  inégale.

 

Jetez un coup d’œil sur la vidéo :

http://www.telebruxelles.net/portail/emissions/les-journaux/le-journal/15871-lecume-de-vian-sur-scene-et-en-musique

distribution et infos pratiques :

http://www.atelier210.be/programme_information-A210-82.html

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administrateur théâtres

Cinéma: Le dernier Woody Allen

12272755286?profile=original« This is unbelievable… » Dans ce film, Toute la féerie d’un « Américain à Paris » envahit d’un coup notre esprit, sans la musique de Guershwin bien sûr, mais rien qu’avec les images et les souvenirs littéraires. Un tour de magie du réalisateur. Et oui, comme le protagoniste Gil, qui a 30 ans -  non 42 comme l’acteur, non 75 comme le réalisateur - on se laisse prendre à la rêverie et à la séduction de la ville comme un hareng dans un filet. Foin des responsabilités d’un couple à bâtir dans les turbulences de la vie moderne et les exigences autoritaires d’une future épouse! A la première apparition de la voiture mythique  de Gatsby le Magnifique sur le coup de minuit, on a compris qu’on allait faire un extraordinaire voyage dans le temps et dans la culture de toute l’avant-garde  artistique des années 20. Et on se laisse glisser dans cette comédie avec bonheur à la rencontre des plus grands : Zelda, Scott Fitzgerald, Hemingway, Dali, Picasso rassemblés chez Gertrude Stein. « Rose is a rose is a rose is a rose. » Quand survient le retour de la Belle Epoque, c’est aussi un plaisir exquis  de revoir les fiacres, les crinolines,  la gaité parisienne, Degas, Toulouse Lautrec…. Woody Allen en fait certes un peu  trop quand on recule jusqu’au siècle des lumières… mais heureusement cette séquence est fort courte. Point besoin d’insister, on aurait pus s’en passer.Cela tue un peu la magie pour des européens. Mais il faut bien revenir sur terre. Et rien ne vaut une promenade sous la pluie, à minuit, sur le pont Alexandre  entre amoureux. Les dialogues sont merveilleux, surtout si vous percevez le velouté de la langue anglo-saxonne, les intonations particulières, l’humour des mots. La sonorité même du titre du film!  Un délice de tonalités  tantôt amoureuses, tantôt sarcastiques. Elle: « You’re in love with a fantasy » Lui: « I’m in love with you ! ». L’intonation particulière de « pedantic » restera dans les mémoires pour qualifier Paul, cet américain « pseudo-intellectual » qui a su éblouir sa future femme! Le couple des parents de la future épousée est croqué de façon exemplaire.

Mais ce film est en premier lieu bien sûr, une ode extraordinaire à la Ville-Lumière. Les images sont extraordinaires, depuis les effets presque sépia jusqu’aux prise de vues dramatiques, on ne peut qu’être ravis.  Poser les yeux sur ces lieux et une chose qui éblouit et qui apaise,  qui fait rêver et nourrit l’émotion.

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L’âge d’or. A toutes les générations, il y a cette nostalgie bien compréhensible du passé. La peur du présent iconoclaste en est la cause…  Et quoi de plus merveilleux que de flotter dans ce qui surnage du passé, le plus beau : la fleur de sel quand on ne cesse de rêver d’une autre vie que la sienne? Cette fleur devient à son tour, germe de création pour le jeune auteur désemparé. De quoi s’enivrer.

L’angoisse de la page blanche du jeune auteur ?  Qu’il reste à Paris et Paris fera le reste… ou la jeune libraire de 20 ans!

Années 20 disiez-vous?

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Toutes les interprétations des acteurs sont ciselées, justes, vivantes, même pour les fantômes d’artistes. On ressort de ce film, ré-initié et  nimbé  de plaisir artistique.

 

 


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administrateur théâtres

                                

   12272732654?profile=original                                    Le Public ouvre sa saison avec La vie devant soi

de Romain Gary

   Belleville. Momo, 10/14 ans,  a été recueilli par Madame Rosa, une très vieille dame juive. C’est la seule personne au monde qu’il aime. Il fera tout pour l'aider afin qu'elle puisse rester chez elle, lui évitant ainsi d’atterrir à l'hôpital, sa plus grande crainte après la rafle du Vel d’hiv.

 

Extraits :

" Je m'appelle Mohammed mais tout le monde m'appelle Momo pour faire plus petit. Pendant longtemps je n'ai pas su que j'étais arabe parce que personne ne m'insultait. On me l'a seulement appris à l'école.

La première chose que je peux vous dire c'est qu'on habitait au sixième à pied et que pour Madame Rosa, avec tous ces kilos qu'elle portait sur elle et seulement deux jambes, c'était une vraie source de vie quotidienne, avec tous les soucis et les peines. Elle nous le rappelait chaque fois qu'elle ne se plaignait pas d'autre part, car elle était également juive. Sa santé n'était pas bonne non plus et je peux vous dire aussi dès le début que c'était une femme qui aurait mérité un ascenseur.

Madame Rosa était née en Pologne comme Juive mais elle s'était défendue au Maroc et en Algérie pendant plusieurs années et elle savait l'arabe comme vous et moi. Je devais avoir trois ans quand j'ai vu Madame Rosa pour la première fois. Au début je ne savais pas que Madame Rosa s'occupait de moi seulement pour toucher un mandat à la fin du mois. Quand je l'ai appris, ça m'a fait un coup de savoir que j'étais payé. Je croyais que Madame Rosa m'aimait pour rien et qu'on était quelqu'un l'un pour l'autre. J'en ai pleuré toute une nuit et c'était mon premier grand chagrin.

Au début je ne savais pas que je n'avais pas de mère et je ne savais même pas qu'il en fallait une. Madame Rosa évitait de m'en parler pour ne pas me donner des idées. On était tantôt six ou sept tantôt même plus là-dedans. Il y avait chez nous pas mal de mères qui venaient une ou deux fois par semaine mais c'était toujours pour les autres.

Nous étions presque tous des enfants de putes chez madame Rosa, et quand elles partaient plusieurs mois en province pour se défendre là-bas, elles venaient voir leur môme avant et après. Il me semblait que tout le monde avait une mère sauf moi. J'ai commencé à avoir des crampes d'estomac et des convulsions pour la faire venir.

On était tout ce qu'on avait au monde et c'était toujours ça de sauvé. Plus tard elle m'a avoué qu'elle voulait me garder le plus longtemps possible alors elle m'avait fait croire que j'avais quatre ans de moins.

Maintenant le docteur Katz essayait de convaincre Madame Rosa pour qu'elle aille à l'hôpital. Moi, j'avais froid aux fesses en écoutant le docteur Katz. Tout le monde savait dans le quartier qu'il n'était pas possible de se faire avorter à l'hôpital même quand on était à la torture et qu'ils étaient capables de vous faire vivre de force, tant que vous étiez encore de la barbaque et qu'on pouvait planter une aiguille dedans. La médecine doit avoir le dernier mot et lutter jusqu'au bout pour empêcher que la volonté de Dieu soit faite. Madame Rosa est la seule chose au monde que j'aie aimée ici et je ne vais pas la laisser devenir champion du monde des légumes pour faire plaisir à la médecine.

Alors j'ai inventé que sa famille venait la chercher pour l'emmener en Israël. Le soir j'ai aidé Madame Rosa à descendre à la cave pour aller mourir dans son trou juif. J'avais jamais compris pourquoi elle l'avait aménagé et pourquoi elle y descendait de temps en temps, s'asseyait, regardait autour d'elle et respirait. Maintenant je comprenais. »

 

 

Rien ne sonne faux. Tout est dit et non dit.

 

Par le texte et par l’interprétation poignante des deux protagonistes. Janine Godinas, actrice belge sublime,  que l’on a vu jouer  l’année dernière dans « Les Grecs »,  est époustouflante de rigueur, de justesse et d’humanité. Quel métier !   Itsik Elbaz (« L’échange » de Claudel) est criant de vérité dans son hymne à l’amour.

 L’attachement mutuel de ces deux épaves de la vie est d’une force tellurique, charnelle, viscérale. Le tableau, symbolisé par un tumulus d’objets disparates jamais ne sombre dans le misérabilisme, tant l’humour est une constante et l’ironie un mode d’emploi de la vie. A notre  tour on se prend à aimer personnages et acteurs. Le spectateur moderne porte certes en lui les  héros de Dickens, Zola, Daudet et Jules Renard, mais ici on est soufflé par le  puissant désir de vivre de Rosa et de Momo. Quelles que soient les religions et les races en présence, tous deux choisissent LA VIE.

Et pourtant c’est une longue agonie qui se fait jour peu à peu sur la scène aux lumières tamisées du Public. C’est un optimisme forcené qui  a  imposé le titre du roman sans doute, car il n’y a que la tragédie de la mort qui attend ces deux rescapés, comme nous tous d’ailleurs. Tous deux la souhaitent, la plus digne possible. C’est donc toute la tragédie humaine qui est mise en scène, celle de l’inévitable. Avec lucidité, et un humour très juif en guise de  lance-pierre contre La Dame à la Grande Faux.

 

 

LA VIE DEVANT SOI

de ROMAIN GARY (Emile Ajar)
Mise en scène: Michel Kacenelenbogen / avec Janine Godinas, Itsik Elbaz, Nabil Missoumi et Benoît Van Dorslaer    DU 03/09/11 AU 22/10/11

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=282&type=1

 

 

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administrateur théâtres

"La fausse suivante" de Marivaux (Théâtre Le Public)

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LA FAUSSE SUIVANTE

de MARIVAUX
Mise en scène: Patricia IDE / Avec Serge DEMOULIN , Baptiste BLAMPAIN , Xavier DELACOLETTE , Jeanne KACENELENBOGEN , Caroline KEMPENERS et Chloé STRUVAY

 

DU 09/09/11 AU 19/11/11

 

 Aucune fausse note dans cette partition  féroce et magnifiquement écrite de Marivaux.  La langue est succulente, la vérité empoisonnée. Si on s’attendait à une pièce célébrant l’amour et picolant dans le marivaudage, on a tout faux. Il s’agit d’une éducation sentimentale tout à l’envers. La mélodie est plutôt une impitoyable farce en sous-sol. Le décor romantique est pourtant bien planté : ajoncs, mare au diable, barque retournée, chant d’oiseaux et de batraciens,  mousses, lichens, lierres dont la devise  est « je meurs ou je m’attache. » Eh non !  La devise c’est le louis d’or, l’écu, l’euro. Une mine d’or dans la tête et rien dans le cœur. Modernité ?   Tout  est pur calcul sordide : comment augmenter mon bénéfice ? La grille du château est là, entr’ouverte, face aux spectateurs, et personne ne s’aventurera dans les paysages bleus de l’amour.   Et ce magnifique décor représente à lui seul l’illusion d’optique voulue entre les sentiments et  la rouerie, l’art de feindre et de dissimuler.

Confusion des sentiments, des valeurs et des sexes. Déguisements. Une belle aristocrate  s’est déguisée en chevalier pour tenter de connaître les intentions  réelles de Lélio qu’elle doit bientôt épouser. «J'ai du bien ; il s'agit de le donner avec ma main et mon cœur ; ce sont de grands présents, et je veux savoir à qui je les donne. » C’est une femme de caractère.

Elle découvrira bien vite que ce dernier, mû par l’arrivisme et l’appât du lucre plus que par les nobles sentiments, est  déjà engagé auprès d’une comtesse avec laquelle il a signé un dédit. Selon ce contrat, sorte d’avenant à leur promesse de mariage, le premier qui trahit l’autre devra lui verser en dédommagement une rente de plusieurs milliers de livres. Or, pour Lelio, la comtesse vaut moins que l’aristocrate de Paris et son choix est vite fait. Comment donc se défaire noblement de la comtesse sans payer le dédit ! Il utilisera le chevalier à ces fins. « Le chevalier, à part. Ah ! L’honnête homme ! (Haut.) Oui, je commence à te comprendre. Voici ce que c'est : si je donne de l'amour à la Comtesse, tu crois qu'elle aimera mieux payer le dédit, en te rendant ton billet de dix mille écus, que de t'épouser ; de façon que tu gagneras dix mille écus avec elle ; n'est-ce pas cela ? »

Et la comtesse, légère,  tombera follement amoureuse du mystérieux chevalier. Cela vaut son pesant d’or! Mais, elle non plus, n’a pas envie de payer un dédit.

Qui est le plus fourbe, le séduisant Lelio aussi froid que la mort ou le chevalier si habile au complot ? Avant de révéler sa véritable identité, la parisienne fortunée se sera fait passer pour chevalier, et ensuite comme servante de ladite Parisienne. « Je suis fille assez jolie, comme vous voyez, et par-dessus le marché, presque aussi méchante que vous. »

 Pour souligner la poursuite effrénée du gain il y a deux autres personnages, des valets, presque des gueux, prêts à tout pour une obole, et qui n’arrêtent pas de courir dans tous les sens. Trivelin : qui porte bien son nom,  sorte de SDF truculent, manipulateur et rapace. Arlequin : moitié elfe, moitié laquais  affamé, qui vit sans doute de la cueillette d’escargots quand il ne peut pas noyer sa misère dans le vin. Ils rendent tous deux  le propos encore plus cru, les scrupules encore plus inexistants. Lelio accumule les formules à l’emporte-pièce : «  Lelio : Est-il besoin d'aimer sa femme ? Si tu ne l'aimes pas, tant pis pour elle ; ce sont ses affaires et non pas les tiennes. » Le public gronde.

 

Le mot de la fin est chanté par le guitariste.

Cet amour dont nos cœurs se laissent enflammer,

Ce charme si touchant, ce doux plaisir d'aimer

Est le plus grand des biens que le ciel nous dispense.

Livrons-nous donc sans résistance

À l'objet qui vient nous charmer.

Au milieu des transports dont il remplit notre âme,

Jurons lui mille fois une éternelle flamme.

Mais n'inspire-t-il plus ces aimables transports ?

Trahissons aussitôt nos serments sans remords.

Ce n'est plus à l'objet qui cesse de nous plaire

Que doivent s'adresser les serments qu'on a faits,

C'est à l'Amour qu'on les fit faire,

C'est lui qu'on a juré de ne quitter jamais.

 

Lorsque l’on remonte du sous-sol, on emporte avec soi,  l’art sûr de ces jeunes  comédiens talentueux qui excellent dans leur jeu, dans leurs poses, leurs regards,  dans la transmission de la vivacité de la langue de Marivaux. Un exploit.  On a été éblouis et confondus.

 

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=283&type=1

 

 

 

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administrateur théâtres

12272750887?profile=originalIl  y a d’un côté le public et de l'autre, les  trois murs étincelants mais  étouffants d’une  cuisine modèle impeccablement tenue. Tout juste si,  par simple illusion d’optique on ne les voit pas se pencher subrepticement pour avaler cette femme volubile encore jeune, dont la vie a été remplacée par la routine. La femme est banale mais heureusement profondément actrice.  Elle  est, malgré le cadre,  exquise, fougueuse,  incapable de rester en place, craquante de sincérité et de naturel, débordante de convivialité. Elle en est venue  au cours des années, à converser vaillamment avec le mur, le verre de vin blanc à la main, face à  son improbable interlocuteur. Peut-elle encore imaginer ce qu'il y a derrière le mur?

 

Un autre mur,  Joe, son mari lui dit bien de temps en temps «  qu’il l’aime », mais ce sésame n’ouvre paradoxalement  que sur les humiliations répétées, voire, le mépris  ou l’indifférence. Elle l'observe et le voit  en effet parler de façon bien  plus aimable à tous les étrangers qu’il rencontre!   Elle raconte avec délices  les éblouissements des débuts de vie de couple, les ravissements d’enfants en bas âge et  puis, moins drôle,  toutes les trahisons de la vie. Elle s’interroge:  va-t-elle oser sauter le pas, comme quand elle était enfant et qu’elle sautait du toit, pour partir  seule, en voyage de 15 jours en Grèce avec sa copine Jane, qui lui a maintes fois dit de larguer tout et lui a  même offert le billet de ses rêves ? Ses récits de vie et ses interrogations sont poignants, y  mêlant sans cesse le  réalisme des gestes domestiques quotidiens. Elle réalise soudain : « ma vie est un crime contre Dieu car je ne m’en suis pas servie, ne sachant pas quoi en faire ! » Elle est devenue inutile!

 

Doit-elle  « faire ce qu’elle voulait faire ou faire ce qu’elle devait faire ? » Elle découvrira que « les rêves ne sont jamais là où on les attend. »  Mais sautons  tout de suite à la fin de  l’histoire : «  Elle a subitement su qu’elle ne rentrerait pas vers Manchester avec la valise ! ». Elle a largué tous les démons qui l’enchaînaient. Elle ne traîne désormais  plus rien d’encombrant, elle se sent légère !  Elle compatit : « Joe aussi traîne sa vie comme un poids ! » Willy Russel – c’est un homme qui écrit –  a installé une  Shirley Valentine radieuse, décapée de toutes les  scories vénéneuses qui l’étouffaient, face à la mer Egée, sur un rocher … avec qui elle ne peut s’empêcher bien sûr de parler !  Question d’habitude.  Le rocher est couleur banquise, tout le reste du décor est noir.  Elle est belle comme une aigue-marine.

 

Entre l’immensité du ciel et de la terre,  elle  a enfin retrouvé sa dignité d’être humain, son identité  de « Shirley Valentine ».  V comme V Day, alors qu’elle n’était devenue qu’un avatar  oublié de grand mouvement du monde !  Là, assise buvant du vin  à  une table au bord de la mer - son égérie - elle déclarera d’une voix de star, à son mari qui vient la rechercher : « Bonsoir. La femme que tu veux voir n’existe plus. Celle qui était ton épouse  n’existe plus.  Celle qui était la mère de tes enfants, n’existe plus non plus. Celle à qui tu parles , c’est une femme que tu ne connais pas, Shirley Valentine, Amoureuse de la Vie. »

 

 C’est ce que Willy Russel veut pour la société entière : le changement, le réVeil, la ...Vie, quoi ! Au lieu de la manipulation et de  l’anesthésie générale des êtres humains en particulier, par les normes et les diktats de la consommation. Il ose brandir la liberté et souhaite que  les gens se réveillent de leur torpeur ! Et Shirley de souligner que  « les seules aventures de vacances que j’ai eues,  c’est avec moi, et je commence à m’aimer. »  Tout un Programme, une révolution,  à 42 ans !

 

Marie -Hélène Remacle, qui fonce dans cette pièce comme une météorite, nous  a offert un spectacle éblouissant d’humanité et de drôlerie. Pas étonnant que certains spectateurs ou spectatrices reviennent voir le même spectacle plusieurs fois!

 

http://www.bruxellons.net/shirley2011.html

 

http://www.comedien.be/Marie-Helene-Remacle

 





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administrateur théâtres

« Nous ne  s o m m e s  pas toute la misère du monde ! »

 

 Joué devant des dizaines de milliers de spectateurs en Europe, au Canada, à la Guadeloupe…  et en Afrique, le spectacle «  UN FOU NOIR AU PAYS DES BLANCS » a dépassé les 1500 représentations. L’Européen a coutume de dire : « on ne peut quand même pas accueillir toute la misère du monde ! »  Pie Tshibanda rétorque courageusement :

« Nous ne  s o m m e s  pas toute la misère du monde ! » Et de nous conter avec verve son histoire personnelle, celle de son pays, celle de son exil, celle de sa réussite …Et de nous prouver que le genre humain  est à la fois unique et multiple. Que les attitudes xénophobes ne tiennent pas l’analyse rationnelle. Voici un spectacle tout en humour et en finesse conté avec une volubilité généreuse et sans failles. C’est l’occasion de réviser nos jugements à priori, de mettre à la poubelle certains stéréotypes tenaces.  C’est un spectacle qui fait mouche car il est fort toxique pour nos  attitudes sécuritaires et notre repli habituel sur nous-mêmes. 

 

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Il a des armes : de la ténacité, la conscience d’exister malgré toutes les rebuffades, un sourire touchant, une façon d’oser aborder l’autre sans brusquer, convainquant l’autre de ses bonnes intentions et de sa bonne foi. Une pépite d’humour dans le cœur, il désarmera nombre de citoyens Belges majoritairement hostiles à l’arrivée des sans-papiers. Il a aussi une bonne étoile.

Et il est intarissable.

 

Il va démêler avec tendresse  les  questions cruciales posées par son fils : « Papa, pourquoi sommes-nous les autres ? » «  Papa pourquoi t’es tout seul ?  » En Belgique il a découvert ce que c’était d’être « noir », de ne pas être d’abord « un homme ».  Il va démonter les causes lointaines de son exil, les rapports viciés Nord-Sud, les guerres tribales qui faisaient rage en 1992. Ce qui nous est donné à entendre est atroce et effarant. Et si on se bouchait les oreilles?

 

Il va prouver que la misère est dans les villages désertés,  là où il n’y a plus de boulangerie, plus d’emploi  et plus personne qui parle avec les autres.

A l’accusation courante de « Vous venez manger notre pain », il répond finement « Pourquoi pas ? ». Du pain, il en a donné, il a créé une école des devoirs à Court St Etienne, sa maison est ouverte à tous,  il a même créé des emplois.  Si on ajoute un couvert au réveillon, est-on plus affamé, ou bien y a-t-il un peu moins dans la poubelle ?  

 

Un petit détour par Wikipedia nous rassure : ce n’est pas un sorcier, ce n’est pas un funambule, encore moins un fou… En résumé, la famille de Pie Tshibanda est originaire du Kasaï et fait partie des nombreux Congolais amenés au Katanga pour y travailler dans les mines.

Après des études de psychologie à l’université de Kisangani, de  1977  à  1987, il est  professeur en humanités, conseiller d’orientation scolaire et directeur des études dans divers établissements scolaires du Katanga. Il est  enfin psychologue d’entreprise à la Gécamines (Union Minière) à Lubumbashi.

Mais en 1992 une épuration ethnique à l’encontre des Zaïrois originaires du Kasaï se met en place  au Katanga. Mobutu ferme les yeux. Les Kasaïens qui échappent aux massacres, après avoir tout perdu, se trouvent parqués durant des semaines dans des conditions épouvantables dans divers lieux dont la gare de Likasi, en attente d’évacuation. Un train de l’infortune doit ramener les rescapés. Il faut un mois pour couvrir les 1000 km qui les séparent du Kasaï d’origine. Les décès sont journaliers.   Pie Tshibanda nous conte son vécu sans aucun  pathos, avec une dignité remarquable. Néanmoins il estime devoir dénoncer les massacres dont il a été témoin. Il réalise un film vidéo, publie une bande dessinée et écrit plusieurs articles. Devenu un témoin gênant, Pie est contraint d’abandonner sa famille  et le Congo où il est en danger de mort. Il obtient finalement l’asile politique en Belgique.

Il y a « les gens respectable et les bousculables » Nouvelles humiliations et tribulations tout aussi angoissantes. Existe-t-il seulement ? Il en arrive à se poser la question. D’intellectuel estimé, le voilà passé au statut de réfugié. A 44 ans, il se trouve alors confronté à l’exil et à la solitude, aux problèmes de communication et aux différences culturelles apparemment insurmontables. Mais, intrépide, il surmonte  les difficultés, fait  venir son épouse et ses six enfants et fait reconnaître ses diplômes. La suite, c’est sur les planches, devant des milliers de spectateurs stupéfiés, la réconciliation et la générosité brandies en étendard !

 

Pie n’a rien d’Hamelin, il a tout de l’humain. Il est la très belle voix des sans-voix.

 

http://www.bruxellons.net/founoir.html

 

Spectacle présenté dans le cadre du festival « Bruxellons » au château du KARREVELD, le 23 juillet 2011, malgré la pluie !

http://www.tshibanda.be/

 

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administrateur théâtres

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 "Pensez-vous, Maître qu'il ne faut pas rire? "(Adso)

 

Le titre « Le nom de la rose »  fait rêver certes mais n’est pas une des clés du roman d’Umberto Eco.  Le premier titre, « l’Abbaye du Crime » eût été bien plus approprié mais ne fut pas accepté par son éditeur, étant trop explicite ou trop polar.   Eco choisit alors  « le nom de la rose » parce que cela sonnait bien, cela fait moyen âge, mystère, inaccessibilité, …labyrinthe ?

 

Dans cette création mondiale sur scène, dont le texte a été soigneusement revisité par Umberto Eco lui-même,  on retrouve un concentré de l’aspect divertissant du roman détective : introduction, intrigue, conclusion. Les  détails de la mise en scène magistrale et des costumes nous plongent dans l’époque avec des allures de grand spectacle, tout en frémissant sous la  parole silencieuse des pierres et  le charme mystique des ruines de l’abbaye de Villers-la Ville. Car elle est bien plus qu’un décor !

 

 La deuxième partie du spectacle, située au cœur de l’Abbatiale  vous coupe le souffle : nous plongeons dans la dictature de l’église et  l’obscurantisme comme si on y était. Le fanatisme religieux et le cynisme de l’inquisiteur Bernado Gui,  rival de Guillaume  et personnage historique, est un morceau d’anthologie. Le spectateur  est totalement révolté par sa manière tronquée d’aborder le procès des malheureux  Salvatore et Rémigio,  tous deux inculpés sans preuves, où l’inquisiteur ne s’encombre d’aucune vertu de l’église, ni charité, ni  pitié, ni même de sens de la justice. Scène inoubliable et forte.

 

 Et surnage l’éblouissement des citations  d' Umberto Eco. Ses références littéraires grésillent dans tous ses personnages. Des références à Lucien, St Thomas d'Aquin...

Le personnage de Guillaume de Baskerville est inspiré à la fois de Guillaume d’Ockham, moine franciscain, célèbre rationaliste et disciple de Roger Bacon, et du célèbre détective Sherlock Holmes du roman d'Arthur Conan Doyle « The Hound of the Baskervilles ». Selon sa théorie, les hypothèses les plus simples sont les plus vraisemblables, principe de base des sciences et de l’art du détective.   « Il ne faut pas multiplier les explications et les causes sans qu'on en ait une stricte nécessité ».

 Le novice Adso est un raccourci phonétique du Docteur Watson qui pose sans relâche des questions très astucieuses à son maître.  

 Jorge de Burgos, le  vénérable personnage aveugle, gardien du livre interdit, est directement inspiré de l’écrivain argentin Jorge Luis Borges.

 La bibliothèque, construite comme un labyrinthe complexe magnifiquement décalqué sur les ruines dans la troisième partie du spectacle, est un personnage en soi. Représente-t-il l’importance de ce trésor qu’est notre culture, l’importance du mystère, comme à Stonehenge ou à Chartres? Représente-t-il la complexité de l’univers, celle de notre spiritualité ?  

Le risque que cette bibliothèque mythique prenne feu, confrontée à la folie humaine, est grand. A chacun de choisir son chemin dans ce labyrinthe, outil de méditation, ou de rester en dehors. … Guillaume Baskerville, aidé  son jeune et fidèle assistant, aura jusqu’à la fin la passion dévorante  de découvrir la vérité cachée dans la salle secrète et interdite de la bibliothèque, nommée «  Finis Africae ». Le savoir ne demande-t-il jamais autre chose qu'à être découvert ?

 

Mais surtout on assiste aussi à une excommunication du rire, un enjeu idéologique de première importance au Moyen Age. Jorge de Burgos, la véritable âme de cette abbaye le condamne, ... sans coup férir. A voir! 

Depuis le début, ce  vieillard repoussant et  intransigeant cherche à tout prix à interdire l'accès au livre inédit d'Aristote dans lequel le philosophe grec aurait prononcé l'éloge irrévérencieux du rire. Celui de la vie ?  Jorge de Burgos ne veut pas que les hommes se croient autorisés à rire: il faut, pense-t-il, les tenir ployés sous la terreur. Le rire est source de doute. Le rire, selon lui, anéantirait la crainte de Dieu et amènerait la ruine de L’Eglise.
Le Christ riait-il ? Rien dans ses paraboles ne prête au rire. Dieu voit et punit. Rien de drôle. Le Christ possédait-il, en propre, sa tunique? Une paire de lunettes est-elle ou non un outil du Diable?

Sarah a ri !

Guillaume émettra l'hypothèse que " Le diable, c'est la vérité qui n'est jamais effleurée par le doute".

 

 

Ceci ne manquera pas de nous rappeler un autre polar, moderne celui-ci, très  documenté et divertissant : « le rire du Cyclope » sur le même thème de l’infaillible subversivité  du rire. Et de méditer.  En tous cas cette représentation théâtrale est  une manière d’aborder de façon humoristique et efficace  les conflits intellectuels, religieux et politiques du début du 14e siècle et du nôtre. 

 C’était une première, la mise en place des personnages dans la première partie est un peu rocailleuse surtout avec le personnage loufoque et peu crédible de Salvatore, mais le reste du spectacle devient de plus en plus passionnant. La seule figurante féminine est craquante et les moines idéalement croqués.

 

http://www.deldiffusion.be/prochaines_productions/prochaines_productions.asp

 

 

  • Quand ? Du 13 juillet au 13 août 2011
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administrateur théâtres

Les mercredi 8, jeudi 9, vendredi 10 juin 2011 à 20h30
Les mercredi 15, jeudi 16 et vendredi 17 juin 2011
à 20h30

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La Dame au Violoncelle est un hymne à l’Amour et aux Passions.
En accord avec le violoncelle, la dame entretient un rapport charnel avec son instrument.
Sans pudeur, elle se dévoile et nous conte sa quête du bonheur. A la poursuite de ses rêves, elle affronte ses peurs, ses manques, ses difficultés. Elle nous raconte les chemins qu’elle emprunte, le pourquoi de ses choix dans une histoire de crime d’amour... Une vie réelle ou fantasmée? La frontière est floue.
Cette pièce nous intrigue, au point qu’on ne sait plus la définir. Comédie ou tragédie? Une certitude toutefois, elle parle à tous et ne laisse personne indifférent.

                         

 

Théâtre de la Clarencière  

20 rue du Belvédère - 1050 Bruxelles

Situation géographique

près de la Place Flagey et de l'Eglise Sainte-Croix, dans la petite rue parallèle arrière à l'ancien bâtiment de l'I.N.R. devenu aujourd'hui Radio Flagey.

Accès

bus 38/59/60/71/366 Trams : 81

Foyer et jardin

ouverts 30 minutes avant le spectacle, soit 20h00 ou 15h30

 

 

"On n’est sincère qu’avec ses rêves. Et la comédie commence quand les rêves s’achèvent."

 

 Il y a ce long moment appuyé et  suspendu au théâtre de la Clarencière, où l’on renaît  à chaque fois,  dans le noir absolu, avant que la pièce ne commence. C’est comme  une hésitation, un basculement.

 

Soudain sous le jet de lumière,  apparaît le dos nu de la  tunique noire que porte la  femme qui va s’offrir en spectacle, elle et son violoncelle dans un registre d’expressions et de gestuelle d’une variété inouïe. On pense d’emblée aux toiles de Picasso, à l’érotisme des instruments de musique, dont le violoncelle est sans doute le plus profond : « seul capable de mimer les cris rauques et les souffrances de l’homme. »   Peu à peu, elle, la silencieuse qui faisait semblant,  va libérer la parole, et entonner sur tous les tons une ode désespérée aux rêves personnels. Elle nous fera l’aveu  qu’avec son partenaire-objet,  enfin, elle existe. Qu’elle n’est plus une femme potiche que l’on sort comme une plante. Qu’elle est capable de mettre des mots sur ses fantasmes et qu’elle arrive à l’extase avec son puissant  compagnon de résonnance. Démonstration.  Au début elle ne donnait  que  la face cachée de son visage : ses cheveux blonds coiffés  en carré sage. Puis elle s’anima : « Je fais semblant, comme vous. Vous ne trouvez pas que tout est faux ? » et devint « elle ». « Elle est violoncelle. »

 

Dès l’entrée de jeu elle fera tout pour engluer de l’empreinte du faux, tout ce  qui couvre le vide intérieur, de soi et de l’autre. Elle refuse catégoriquement de n’être qu’un miroir du monde.

 

Elle accentue sur son  formidable numéro  d’agression lascive,  cette épure de  fausseté  qui marche si  bien pour d’aucuns, comblés rien qu’en  tombant dans le piège de la séduction factice. Quitte à irriter  d’autres, souverainement : les  adeptes de la spontanéité, de la  sincérité, de la générosité, de la relation à l’autre. Donc elle séduit mais elle irrite.

 

Le « faire semblant » est le fil conducteur de cette pièce, cela irrite et cela séduit. La comédienne veut jouer autrement le jeu de la vérité, et le rendre aussi vrai que la vraie vérité : faire semblant n’est pas du mensonge, ne rend pas coupable. On va la juger pour la disparition tragique de son mari. Le meilleur ami du mari  (qui a toujours  chanté faux), attend son faux-pas pour la démasquer.  Le juge se tait. “Je suis innocente! Innocente! Puisque je fais semblant. On  n’est pas coupable quand on fait semblant!”  Maudite d’avance,  elle est pourtant  très habile et se lance dans un plaidoyer  fort bien ficelé, déroutant par sa logique  féminine absurde. « Tout mot dit est souffrance et toute note est plainte.»  Ca y est, même les réfractaires aux manières de femme fatale, rentrent dans sa logique : «  Chaque homme, chaque femme cache un violoncelle. » plaide-t-elle, et  le cher disparu a voulu tuer  le sien de violoncelle… voilà des circonstances  bien atténuantes.  

 

http://www.laclarenciere.be/

 

 

 

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administrateur théâtres

Une superbe vidéo aquatique  nous plonge dans l’Histoire du Titanic,  vieille de 99 ans. En ce jour fatidique  du 14 avril 1912, le puissant monde occidental se brisait comme une poupée de porcelaine et s’engouffrait au fond de l’Atlantique Nord pour toujours. On le sait, c’est le  péché  d’Hubris, tant dénoncé par les tragédiens grecs,  qui  fit disparaître  pour toujours ce bâtiment réputé insubmersible, dans "le  crissement d'un patin sur la  glace." Ce navire, aussi  haut que le plus grand des gratte-ciel américains, sombra en quelques heures par  une nuit sans lune, en frôlant l’iceberg meurtrier. Symbole tragique des limites de l’homme et de la dislocation du Vieux monde.

 

La pièce de THIERRY DEBROUX fut écrite quelques mois avant la sortie du film de Cameron en 1996, lui aussi une description d’une catastrophe qui ne cesse d’interroger notre mémoire collective.  Ainsi furent fracassés brutalement, le luxe extrême, le délire du progrès technique et les classes sociales…. Coup de semonce divine? En tout cas, une catastrophe internationale et ici dans la pièce, une catastrophe intime d’une petite fille séparée de sa mère dans des circonstances étranges. De l’immensément grand à l’immensément petit.

 

 Le décor est un vaste plan incliné blanc, le souvenir de l’iceberg,  sur lequel apparaissent - elle,  dans toute sa vivacité, et lui, dans son immense bonhommie - la grande actrice Jacqueline Bir et son merveilleux compagnon, Marc Olinger  jouant Edward, le mari flegmatique. Ils ont tout du beau couple de noces d’argent,  s’intéressant, l’un aux étoiles et aux questionnements de Einstein, et  l’autre à l’infiniment petit : les  pucerons  dévorants le robinier du jardin.

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 Maggy est mystérieusement protégée de ses souvenirs de petite fille par une amnésie infantile  qui a recouvert  les événements du 14 avril 1912.  La surface polie du couple sera fracassée par la  visite soudaine d’un jeune compositeur d’opéra, tout comme le destin fracassa subitement le bateau mythique. Edward, le mari  astronome ne veut pas réveiller les vieux souvenirs. Il traine derrière lui un fardeau aussi lourd que le Titanic. Par amour pour sa femme, Maggy,  il n’a jamais voulu dévoiler les secrets qu’il détient.

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Un douloureux travail de mémoire  pour Maggy s’engage dans un duel avec le jeune compositeur, figure très dramatique. Celui-ci s’est  passionné pour un travail de mémoire palpitant et c’est ainsi que les deux destins se croisent. Il est en effet fasciné par la photo d’une femme, trouvée dans un livre ayant appartenu à son grand-père. Pourquoi ressemble-t-elle tant à cette mère fermant les bras sur son enfant, qu’il a retrouvée dans des documents d’archive du  Titanic? Une énigme familiale qu’il ne peut s’empêcher de vouloir résoudre. Maggy, devenue la proie de réminiscences  troublantes, qu’elle croyait enfouies à jamais,  finit par se prêter au jeu … qu’elle porte élégamment, avec une justesse de ton, une vigueur et une émotion magnifiques.

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A la fin, c’est la catharsis salutaire et l’émergence de la sérénité et de la paix. La petite fille souriante de la vidéo mélangeant subconscient et fonds marins,  apparaît sur la scène en sautillant. Applaudissements vifs et chaleureux.

 

 

        THÉÂTRE ROYAL DU PARC  28 Avril 2011 >> 28 Mai 2011

MISE EN SCÈNE   Thierry Debroux , COMPOSITION MUSICALE de PASCAL CHARPENTIER, 

SCÉNOGRAPHIE ET COSTUMES   Catherine Cosme

 

 

AVEC   Jacqueline Bir,  Anouchka  Vingtier,  Marc  Olinger,  Hervé  Sogne

                                   Le texte est paru aux éditions Lansman.

 

 

 http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2010_2011_005

 

 

 

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administrateur théâtres

12272735895?profile=original12272732654?profile=originalPrintemps dans un jardin de fous   D'après Henri-Frédéric Blanc

Mise en scène de Christian Leblicq

Avec Alain Eloy

 

Ecrivain marseillais dans l’âme, Henri-Frédéric Blanc, auteur truculent, ironique et bienveillant dans sa lucidité est un fidèle compagnon de pensée de la Compagnie Hypothésarts, et avant tout un auteur qui ne mâche pas ses mots. Son interprète Alain Eloy nous envoie à travers son spectacle inoubliable un texte jubilatoire. On n’a qu’une envie c’est  de courir le commander immédiatement dans une librairie. H-F Blanc est également rédacteur en chef de « la Revue des Archers ». Les Archers : « ces promeneurs rêveurs des hauts-fonds de l’âme humaine qui ne manquent pas de garder l’esprit en balade et qui travaillent à rejeter la bêtise loin au fond du néant des futilités d’où elles n’auraient jamais dû sortir. »

Après avoir entrepris  des études à la faculté des Lettres d’Aix-en-Provence, H-F Blanc  s’épargne la douloureuse expérience du service militaire en simulant la folie, histoire que l’on retrouve dans sa nouvelle « Printemps dans un jardin de fous ». Il renonce résolument à « à jouer à ce grand jeu tragique et théâtral qu'est la guerre». A la sortie des études, après une thèse de doctorat, il décide de consacrer l’essentiel de son temps à l’écriture tout en vivant de petits boulots : guetteur d’incendie en été, veilleur de nuit ou encore guide touristique. En 1989, son premier roman « L’Empire du sommeil » est publié aux Editions Actes Sud. Par la suite, tous ses romans ont fait l’objet de traductions à l’étranger et d’adaptations cinématographiques et théâtrales.

Il est considéré comme la figure de proue de la nouvelle littérature marseillaise, autrement nommée « overlittérature » : littérature crue, iconoclaste, qui se caractérise par son naturalisme burlesque, son irrespect total et le recours méthodique aux armes de la dérision et de la satire.12272736290?profile=original

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 Avec humour et conviction intense, Alain Eloy tous muscles et voix plurielles dehors, nous entraîne  sur le chemin de la subversion, un peu comme … dans « Vol au-dessus d’un nid de coucous ». On ne peut s’empêcher d’y penser. Il met méthodiquement en miettes notre petit confort occidental et  remonte aux sources: l’effroyable grande guerre qui répandit  la violence absolue dans le monde et fit  le lit du nazisme et du fascisme. Notre belle démocratie serait calquée point par point sur l’organisation de l’armée  avec son recours à l’émotionnel, aux humiliations,  à la  soi-disant solidarité de masse, à la hiérarchie où la personne humaine n’est que grain de poussière méprisable. Cette poussière est la source de  son « allergie » totalement vraie et totalement feinte.   Le fascisme n’a pas été pulvérisé après la deuxième guerre, mais il ressort un peu partout, plus perfide : intériorisé. La culture est une liberté en conserves, la littérature une langue de feu contre une langue de bois omniprésente. Et de chanter en chœur : « On ne censure pas, Ah non ! »

 

Catch a Falling Star. « Un cri sincère peut faire tomber une étoile », lui souffle le Capitaine des anges, 70 ans, espadrilles, regard intense et bleu,  interné lui aussi dans cet asile où la grandeur passionnée des pensionnaires « semble ô combien plus humaine que les rabotés ayant asphyxié en eux la folle du logis ». «Le vrai monde est caché » ajoute-t-il mystérieusement. « Le petit moi est si infime par rapport au grand tout, et la mort n’est pas grand-chose quand on se dévêt de ce tout petit moi ».

 

Le jeu de l’acteur, extrêmement physique et agile, fascinant de diversité, de nuances, d’inventions… vous attache par le cœur et vous fait goûter aux poisons perfides de  « la marmite à illusions ». Un spectacle fort, dont on ressort comme frappé de foudre, les poches pleines d’étoiles.

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11 Mai 2011 >> 25 Juin 2011

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=268&type=2

 

 

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administrateur théâtres

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LA CONFUSION DES SENTIMENTS de Stefan Zweig

 
Mise en scène: Michel Kacenelenbogen / Avec Muriel Jacobs, Nicolas d'Oultremont et Pierre Santini

DU 17/05/11 AU 25/06/11

Comédie dramatique

 

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La double vie : celle du vieux professeur divisé par deux, entre la réalité et l’œuvre monumentale de Shakespeare qu’il possède comme une deuxième peau et  enseigne avec ivresse et passion. Il est encore divisé par deux entre les convenances de la société et ses désirs autres. Les éclairages changent. Un savant tissage de doubles bandelettes élastiques verticales à travers laquelle les acteurs apparaissent et s’évanouissent au gré des réalités qu’ils vivent, marque ces plongeons d’un monde à l’autre.  Mise en abîme  et dualité encore: le réel, noir et blanc, donne la main à de chatoyants extraits de sonnets de Shakespeare, de Hamlet, d’Othello. Interprétations pleine de ferveur, chaque mot est égrené comme une pierre précieuse.

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 Roland, le jeune étudiant impétueux initialement épris des joies du libertinage et de la paresse estudiantine à Berlin est envoyé par son père dans une petite ville de province où il fait la rencontre éblouie de ce professeur de littérature anglaise, un monument d’enthousiasme, partant, de passion. Le voilà qui plonge éperdument et avec délectation dans l’océan romantique du grand dramaturge anglais, à en perdre le sommeil. En parallèle, cette jeune âme sensible perçoit un  lourd secret qui ronge le couple du professeur. Epris, il veut démêler le fil de ce nœud de sentiments fort complexes qui étrangle le couple.  Disparitions soudaines du professeur. Incompréhension, souffrances. Fatalisme de sa femme,  qui semble lire dans les pensées de chacun et semble aussi lire l’avenir.   Passionnée de  nage, elle plonge des heures durant dans les lacs purs… elle aurait rêvé d’avoir un enfant. Elle entraîne le jeune étudiant dans une escapade nature.  Les livres craignent l’eau ! Elle prend les airs tragiques de Charlotte Rampling. L’ironie et le sarcasme régissent les rares échanges du couple. Admiration sans bornes, inquiétude, souffrance, jalousie, trahison jaillissent  inéluctablement des extraits de Shakespeare qui surgissent  comme autant de spectres annonciateurs de drame. Roland est aussi duel.  Le spectateur est ballotté entre les différentes réalités dans un rythme de plus en plus accéléré, la tension grandit jusqu’au paroxysme des sentiments. Le drame d’une vie est là et  une phrase très belle donne le dénouement.

 

Les trois comédiens sont très émouvants tant leurs rôles respectifs leur collent à la peau. Le violoncelle, sorte de voix off, commente chaque action comme un chœur antique… le public sent que les atmosphères se chargent progressivement de vibrations troublantes, qu’un orage passionnel est sur le point d’éclater.  La mise à nu des sentiments se fait de plus en plus intense, sans concessions. De très belles voix, du très beau théâtre: chaque acteur a donné toute sa vérité et sa substance au jeu. 

 

 


VIVRE PAR PASSIONS

 


Ouvre-toi, monde souterrain des passions !

Et vous, ombres rêvées, et pourtant ressenties,

Venez coller vos lèvres brûlantes aux miennes,

Boire à mon sang le sang, et le soufle à ma bouche !

Montez de vos ténèbres crépusculaires,

Et n’ayez nulle honte de l’ombre que dessine autour de vous la peine!

 

L’amoureux de l’amour veut vivre aussi ses maux,

Ce qui fait votre trouble m’attache aussi à vous.

Seule la passion qui trouve son abîme

Sait embrasser ton être jusqu’au fond ;

Seul qui se perd entier est donné à lui-même.

Alors, prends feu ! Seulement si tu t’enflammes,

Tu connaîtras le monde au plus profond de toi !

Car au lieu seul où agit le secret, commence aussi la vie.


 


Stefan Zweig


 

 

 

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