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L'hommage à Si Mohand ou M'hand

Hommage à SiMohand-ou-M'hand

Dans le pays des montagnes de Kabylie où jevivais...
Naquit un grand poète du nom de Si Mohand -ou-M'hand.

De village envillage, de foyer en foyer, de
jardin en jardin, il arpentaitd'un pas lent les chemins
qui le menèrent en Tunisie. A cegrand poète nomade, j'ai
voulu rendre hommage par ce texte.

Un «youyou», auloin, se fait entendre.
Le son du «bendir» retentit de sa peaufragile.
Un air de «Gheita» — celui que tu aimes tant —
joue en ton honneur.

Naufragé d'undestin sans lendemains, portant en toi un
souffle qui respire etqui parle; tu prends le chemin de
l'exil. Seul, ta conscience etton courage comme compagnons,
tu t'embarques dans ce voyage versl'autre, que tu aimerais
tant revoir...

De chaque villageoù tu offres une poignée de
main, mille saluts te précèdent.Et de ces mille saluts
alors tu tisses un habit de sagesse, telun burnous «d'Aguelid»

Dans les momentsde tristesse,

tu sais voler lessourires de femmes cachées,

D'une complainted'autrui,

tu fais unesymphonie muette,

D'un regard laisséau hasard,

tu pêches lesecret et...

Sur chaque larmequi coule,
tu édifies une fontaine d'Amour et de Paix, mais
auxmoments de joie et d'allégresse, tu te contentes
de chanter etde rêver, puis, sur ton papier moisi, tu
graves l'histoire decet instant pour que nous
puissions construire d'autresinstants.

«—En mon âme et conscience, pèlerin des temps;
je tepardonne:

Pour tes injuresde vagabond.
Tes révoltes dérisoires.
Tes désirs d'enfant.
Tes blessures mesquines,

car aujourd'hui...

Ton encre est demiel,
et tes mots d'encens.»

Il y eut,paraît-il.

Des lieux où tusus vaincre la douleur des mots
et leur venin...

Des lieux encore,où tu sus libérer les malades
enchaînés aux pouvoirs occultesde vieux marabouts.

Il paraît mêmeque tous les vents rassemblés, du
«Djurjura» aux «Babors»,se sont tus à ton passage
pour y laisser se dérouler un tapisqui se tisse:

à chaque lutte,

à chaque douleur,

à chaque espoir,

à chaque trêve...

Dans chaqueberceau qui enfante la continuité
il y a la soif de pouvoir, neserait-ce qu'un jour,
dire qui suis-je? où vais-je? dans cemonde en transes,
qui me berce pour tout oublier...
Oublier!

oublier ?

Les douleurs de«Tanina», qui dans la montagne

pleure et lance uncri de désespoir, car elle

voitson humiliation s'agrandir...

oublier?
Le temps des cueillettes d'olives, où la jeune
mariée aufront irradié de bonheur, se penche
et remplit sa roberetroussée...

oublier,
lescontes et les chants de mon enfance qui
à travers «Setti»,embellirent ma peur.
Oublier,
que j'appartiens à ceux quiportent le nom
«Amazigh»... Hommes libres.
Non, car je suis:
L'infime racine qui lutte pour sauver
l'olivier que l'onveut abattre,
La source qui naît au matin
et meurt le soirdans le fleuve qui
s'agrandit.

Je suis:
la lumière del'aveugle
le silence du muet
le chaînon d'une prière
l'écho d'une révolte.

Je voudrais comme toi, et à montour:
fleurir sur chaque page d'histoire oubliée,
surchaque civilisation qui passe,
sur chaque berceau qui fleurit,
sur chaque front qui naît,
sur chaque main qui se tend;

Jevoudrais à mon tour,
sur chaque horizon qui hurle,
surchaque ciel qui pleure,
sur chaque saison qui se mue,
surchaque vent qui passe et qui chante

semer l'Amour et laTendresse,
la Tendresse et le Respect,
le Respect et leBien.

Lebien
C'estla semence de l'oubli,
la moisson du vent,
la récolte dusavoir.

Le «Savoir» t'appartient comme t'appartient la«Vie».
Quand tu le prends entre tes mains comme l'argile
duparadis, alors tu le façonnes comme une toile sans
âme. Tu encaresses les pourtours, tu en humes la
fraîcheur...
Puis,là...
Ton destin va guider tes doigts
d'apprenti de la vieet sur chaque
parcelle de cette argile qui prend forme,
tuteindras tes rêves,
tu raviveras les couleurs de l'immortalité,
tu traceras des chemins de rencontre.
Et ainsi
surchaque couleur
Se posera un regard qui dure, pour déjà
penser aux lendemains, ces lendemains
enfanteront lasurvivance de notre civilisation.

Car la civilisation est unpuits de richesses où
cohabitent toutes les races.
Les racessont un festin tout en étant un plat.
Les races sont une toisontout en étant le sommeil.
La richesse d'une identité est lalumière de sa
couleur. Elle se fond à d'autres couleurs, sansen
être la dominante. Elle attend que toi l'inconnu
tul'observes et t'interroges. Alors, elle rayonne
la confiance pourt'assurer; elle t'ouvre son corps
et t'invite à y pénétrer...
Pour y découvrir
le voile qui l'habille;
l'âme quil'habite.

Ellete tend
untapis pour que tu t'y assoies et te reposes
elle te tend
lacruche pour que tu t'y abreuves de tendresse,
elle te tend
unplat pour que tu te nourrisses de savoir...
Puis, dans unenouvelle «symphonie»...
Elle t'invite aux chants de lamultitude.

Si Mohand-ou-M'hand, possédait ces richesses.
Illes cueillit
dans les jardins verdoyants,
sur les places desvillages en éveil,
dans les mosquées en alerte,
dans leschaumières, en pleurs et en fête,
entre les montagnes quiveillent,
entre le refus et l'abondance,
le châtiment et lepardon,
la punition et l'offrande.
Il en fit alors un grandbouquet
et sur chaque page de son manuscrit...
Il déposa unerose sans épine.

— «Dis moi! oh porteur de mots.
Es-tuce porteur d'eau, vieux comme le chêne, qui
un jour, s'en allantremplir ses outres à la
fontaine, découvrit par un matinétrange, que l'eau
jaillissante formait cinq sources.
Pourlibérer sa vieillesse, il donna un nom à
chacuned'elles.
Ainsi il nomma:
la première émeraude, pour sapureté.
La seconde lumière, pour sa clarté.
La troisièmevie, pour sa renaissance.
La quatrième fraîcheur, pour sonécume.
Et la dernière, délivrance.

Pensantalors à tous les enfants qui naissent fragiles,
avec un peud'eau de ces sources, il remplit la plus
grande de ses outres, ets'en alla dans chaque demeure.
Au-dessus des berceaux il arrosala bouche du nouveau-né
lui donnant ainsi une goutte de jeunessepour l'éternité.

Ainsi, le porteurd'eau devint

la semence et lamoisson,

lasource d'immortalité.

Plus tard, danschaque tribu, au seuil des portes, on
déposa une cruche brisée,symbole de cette bénédiction perdue, »

De cette moissonimmortelle, aujourd'hui j'assimile:

chaque lettrefaçonnée

chaque mot gravé

chaquepage écrite.
Et de ton message qui me parvient, telle unedernière
braise, j'allumerai d'autres feux pour que naissent
d'autres pèlerinages de tes récits immortels.

— «Que toncorps blessé, se repose en paix comme se
reposent ceux de tousles poètes révoltés, dans
ce monde qui fuit.

Que sur ta tombe,oubliée, se posent mille
colombes pour bercer ton sommeilprofond.
Que sur ton manuscrit écrit à l'encre des
vents etdes rivières, se posent mille regards
en extase pour te lire.

Jete rends le premier hommage,
car pour le suivant...
J'attendraiun autre printemps.


HAMSI Boubeker – Aux éditions« Le flambeau » - Bruxelles 1994







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ADMINISTRATEUR GENERAL

L’Espace Art Gallery a le plaisir de vous présenter du 19/05/2010 au 06/06/2010 l’exposition « La Ligne comme Abstraction ». Le VERNISSAGE a lieu le 19/05 de 18 h 30 à 21 h 30 et l’exposition du mardi au samedi inclus de 11 h 30 à 18 h 30.


Marie Claude Cavagnac (Fr)

Marie-Claude Cavagnac, qui « a l'impression d'avoir toujours peint », a été l'élève de Ferrer et Desvaux ainsi que des beaux arts de Perpignan. Elle quitte rapidement le figuratif en épurant ses tableaux et se situe à la charnière de l'abstrait et du figuratif. Elle expose régulièrement dès 1995, seule ou en groupe, à travers l'Aveyron (nombreuses exposition à la galerie Foch à Rodez par exemple), la France et même à l'étranger (avec l'exposition « mot pour mot » par exemple). En 1997, elle devient peintre professionnel affiliée à la Maison des Artistes.
L'artiste épure ses tableaux, y élimine les détails pour arriver à l'essentiel de sa vision personnelle du monde et de l'Aveyron, source constante d'inspiration. Elle travaille la texture, les couleurs, jouant de sa palette d'acrylique, dispose des collages. Ses tableaux se déclinent en couleurs chaudes un choix plutôt inattendu pour un voyage à travers la campagne aveyronnaise.
La matière reste l’élément essentiel de ses surfaces - une matière douce, délicate et sensuelle « celle qui donne envie de toucher ». La forme, proche de la géométrie, donne souvent l’horizontale ou la verticale et signe ses origines terriennes. A la charnière de l’abstrait et du figuratif, l’œuvre de MC Cavagnac exhale les sensations produites par la simultanéité des choses. En travaillant sur la texture de la peinture, non seulement l’artiste se plaît à réduire l’écart entre les contraires, mais encore elle permet à la matière de dégager son énergie.

Felicia Trales Carlos (Roumanie)


Felicia Trales est née en Roumanie. Elle habite actuellement au Portugal, son pays d'élection, depuis 2002. Elle a réalisé plusieurs expositions individuelles et collectives dans divers pays d'Europe. Certaines de ces œuvres sont aussi dans des collections privées et des institutions publiques en Europe, États-Unis et Canada.
Dans sa démarche artistique elle aborde des thématiques différentes : l´abstrait d'une part, qui présente de belles compositions, des structures, ainsi qu’une harmonie chromatique bien pensée. D'autre part, elle nous fait redécouvrir la beauté de la nature. Á la manière Impressionniste; des vues de parterres de fleurs, joyeux et vibrantes et des arbres aux troncs si caractéristiques. Les contrastes harmonieux de lumières et d’ombres sont obtenus selon les lois des couleurs complémentaires. Ainsi, un jaune en combinaison avec un violet produit un effet plus réel, plus lumineux. La thématique abordée ainsi que la technique choisie, font de ce travail un hymne à la nature. Cette nature que l'ont ne regarde plus aujourd’hui…


Ya Wen Hsu (Originaire de Taiwan, naturalisée française)

Je suis toujours fascinée par ces enfants que l’on qualifie de « retardés » ou « autistes ». J’ai eu l’occasion de donner quelques cours de calligraphie à ce genre d’enfants dans un collège et dans un établissement spécialisé dans ce problème. Les enfants autistes sont des personnalités uniques comme n’importe qui. Cependant ils ont un point commun très fort et propre à eux : ce sont des tourbillons d’affection. Ils absorbent l’amour et en débordent par l’intensité et par l’immensité. La modération est un apprentissage pénible pour ces êtres directs.
Je me souviens d’un garçon qui adorait écouter mes petites histoires des caractères chinois, et qui exprimait son bonheur avec une suite de rires lents et bruyants en balançant son buste en avant et en arrière sur sa chaise. « Le soleil 日plus la lune 月est devenu le mot lumineux 明. » disais-je en griffonnant les signes avec la craie. Avant de terminer mes dernières syllabes, on entendait déjà ses rires retentir dans la classe. Le beau visage du jeune garçon illuminé souriait au tableau où se perchaient ces petits caractères chinois comme s’ils étaient des étoiles dans son ciel intérieur et secret…
Le cours suivant, un autre garçon m’a offert une de ses boîtes de bonbons probablement préparées par ses parents pour les enseignants de sa classe, car chaque boîte était inscrite le nom d’un professeur. Décidément il n’avait pas suivi l’instruction parentale ! Un cadeau touchant et précieux !
Beaucoup d’entre eux ont un visage déformé au fil du temps. Certains par contre gardent le beau visage comme un ange. Leurs belles âmes semblent-elles être enfermées derrière les barreaux invisibles. Qu’est-ce que c’est cette cage à ces anges aux ailes brisées ? Encore un mystère qui trottine dans l’océan de la vie…

Sylvestre Gauvrit (Fr)

« Comprendre l’Art à mon avis, n’à aucun sens. L’Art c’est comme un petit ruisseau qui coule le long de la montagne ou bien même un gros fleuve qui débouche sur l’océan, tout est question de courant et d’intensité. Le plus difficile c’est de naviguer, savoir se laisser porter par les courants positifs, et anticiper les courants négatifs. Les lignes qui dirigent mon travail de sculpteur sont très simples: la Sensualité, l’Harmonie, l’Humour et le Paradoxe.
La Sensualité est un synonyme de sculpture, c’est cette sensation intense qui vous prends la main jusqu’à caresser l’objet de votre désir. L’Harmonie c’est cette relation intrinsèque avec la Nature, “Pacha Mamma” ou “Mother Earth” etc… L’équilibre parfait de chaque chose, le Ying et le Yang.
L’Humour c’est ce petit truc en plus qui nous fait sourire et qui nous apporte beaucoup de bien.
Le Paradoxe c’est la petite touche finale pour que tout cela devienne de la sculpture. J’aime ce rapport métaphysique avec la matière. La transformation de la matière primaire, c’est un dialogue nous deux, chacun a son mot à dire. Le paradoxe se trouve dans le rapport entre la dureté de la pierre et la souplesse de la forme que je lui donne, le poids de la pierre et la légèreté de la sculpture finie, la rigidité de la matière et la dynamique des formes… le rapport étrange entre ces formes abstraites qui nous portent toujours à chercher un rapport quelconque avec une forme figurative connue, comme si l’esprit avait le besoin de s’accrocher à des mots pour identifier ou définir et n’arrive que difficilement à se laisser porter par les sensations pures et essentielles de la forme en elle même.
La Sculpture d’après moi se divise en deux sections. Les sculptures d’intérieur et les sculptures d’extérieur. Les “sculptures d’intérieurs” sont de petites dimensions réalisées dans un matériau délicat qui ne résiste pas aux conditions atmosphériques externes neige, pluie, pollution etc… Elles sont maniables et légères de telle façon à pouvoir jouer avec en les tournants dans tous les sens et découvrir ainsi de nouveaux points de vue.
Les “sculptures d’extérieur” naissent différemment. Elles sont le fruit d’une interprétation suite à une inspiration. Dans ce cas, il s’établit une relation directe entre la sculpture et l’espace où elle se trouve, la place public, l’architecture, un paysage ou jardin… c’est une fusion dans l’atmosphère, une alchimie intime.
Pour conclure, la Sculpture est une interaction dans l’espace, le plein et le vide, un équilibre entre le visible et l’invisible. »
Sylvestre Gauvrit

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Vergaelen Michel -Extrait 3 - L'Auberge

J’étais fatigué. Je décidai de fermer le cahier. Mes idées s’embrouillaient. Je ne pouvais me débarrasser de l’angoisse du personnage principal de mon roman. Je subissais les mots qui avaient mouillé le papier à son encontre, percé par les regards agressifs des figurants nommément cités.

Mon inquiétude grandissait à mesure qu’avançait le dévoiement de mon inspiration. Mon implication en tant qu’auteur se transformait en phobie.

Bien que j’eusse quitté le contexte de la scène livresque, je ne parvenais pas à revenir dans une situation habituelle de dépôt de stylo. J’étais assis dans le train que je croyais avoir quitté au début de l’aventure, avant de courir la campagne…

Qu’écris-je ? Je me transpose dans mon personnage… je divague. M’éteins-je en tant qu’individu de chair ? Que me faut-il faire pour revenir dans ce qui devrait être moi ?

Revenir, rester ? Tester la schizophrénie d’un personnage virtuel, au risque de me brûler les ailes ?

Qui suis-je effectivement ? Ai-je le choix entre l’auteur au travail dans son atelier, le voyageur assis dans le train et le personnage pris dans un piège absurde, dans une auberge mystérieuse ?

Le paysage qui défile à la fenêtre n’est pas celui que je connais comme étant celui que je vois habituellement lors de mes voyages en train vers Bruxelles.

Nous ne croisons aucune route ni aucun chemin, rien ne vient perturber l’immense champ de blé jaune. Il ne m’est évidemment pas difficile de faire le rapprochement avec ce que je viens d’écrire. Prémonition, auto persuasion ? Illusion créée par mon inspiration littéraire ?

Je réfléchis beaucoup trop. Le repos m’appelle, il m’invite à fermer les yeux, à…

J’entends la chanson de Jean Ferrat, « Dans le Silence » qui berce mes pensées flottantes,…c’est le soir, cela sent le thym, un bruit de charrette s’éteint, une guitare au loin s’accorde…

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L'Auberge - Extrait 2 - Vergaelen Michel

En vertu de la consigne RGN (Règlement Général des Navettes), le chef de train donna un premier coup de
sifflet pour ordonner l’ouverture du journal suivi d’un second qui donnait le départ de la lecture.

Si je ne prenais le train de temps en temps aux heures de pointe, je ne crois pas que je n’eusse jamais eu un contact quelconque avec la presse écrite. Chaque fois que je suis soumis à cette obligation, je suis choqué par la dureté des évènements qui y sont évoqués. Ils me semblent effectivement plus cruels à lire qu’à voir en images.
Est-ce à cause de la disposition des titres ou des photos qui figent les scènes les plus horribles ? Méditation…

Je tentai de me concentrer sur les faits relatés à la une. Les parties du monde traitées par ces articles semblaient se complaire dans une existence effervescente et malsaine qui m’attristait à me blesser l’âme fragilisée par mon parcours encore vierge de personnage de roman.
Pour ne pas pleurer, je tentais de me rassurer en me rappelant que tout dans ce monde n’est qu’une comédie orchestrée par celui qui tient le stylo.

J’observai les figurants assis autour de moi. Je me rendis compte de la qualité de leur jeu de scène. Chacun dissimulait son chagrin et son étonnement que suscitaient les émanations des journalistes du jour.

Pour éviter tout débordement, le contrôleur de sentiments qui nous accompagnait fit le tour du compartiment, évaluant les visages, juste avant le départ. Comme son travail devait être difficile !

Dans une chronologie parfaite, le train se mit en route. Je me sentais bien, malgré l’article qui relatait tous ces gens qui mouraient dans des souffrances atroces, dont la vie était déchirée comme une feuille de papier. Je tentais de relativiser en me persuadant que ma position d’émanation d’inspiration d’auteur ne me permettait pas de compatir pour quelle exaction que ce soit, même pour celle dont je serais l’auteur.
Transcendance… Je devais m’en tenir au rôle que moi-même m’étais attribué…

Pour jouer ce rôle, j’avais enfilé un beau costume de scène littéraire. Chaussettes vertes dans des souliers rouges, short mauve m’arrivant aux genoux, chemise assortie aux chaussettes. Je me sentais conforme à mon personnage. J’avais remonté mes lunettes de plongée au-dessus du front pour éviter qu’elles s’embuent.

Imperturbable, le train roulait vers la destination que chaque voyageur voulait rejoindre.

  • Où allez-vous ? Demandai-je à mon voisin immédiat.-
  • Je n’ai pas encore décidé. Me répondit-il en souriant. La surprise sera d’autant plus grande lorsque je le découvrirai en descendant du train. J’adore l’aventure. Et vous, Où allez-vous ?
  • À Bruxelles !


Je posai la même question à un autre voyageur qui semblait vouloir s’immiscer dans notre conversation.

  • Moi, je vais à Paris ! J’y ai un rendez-vous important. Qu’allez-vous faire à Bruxelles ?
  • Rien de particulier !
  • L’avantage du train est qu’il peut nous transporter dans des directions différentes, voire opposées, alors que nous peuvons demeurer ensemble durant le voyage.


Je ne trouvai pas utile d’ajouter quoi que ce fût à cette affirmation qui était, on ne peut plus juste. Je fermai
les yeux et simulai le sommeil du matin afin de me détacher de la conversation.
Vraisemblablement suite à une délation, le contrôleur arriva rapidement pour me réveiller. Il prit le journal qui gisait sur mes genoux et, d’un geste agressif, me le tendit pour que j’en poursuive la lecture.


Je soupirai en signe de protestation, mais me soumis à sa volonté. Je me forçai à lire un article concernant la dégradation des relations entre les Wallons et les Flamands.
Malgré le comique du sujet, je n’arrivais pas à lui consacrer mon attention.

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les coups et la douleur,

Faut s'exprimer ça fait du bien là ou on a mal..

Moi par exemple, je traite la douleur par la couleur comme certains traitent la sensation de froid aux pieds.. en portant des chaussettes rouges. Vous y croyez vous à l'influence de la couleur sur la sensation de froid..?

dessin des années 80, je le place ici car la position de cet organe (jambe décalée) sous la fesse me fait penser à la position de ma rotule..


gegoutextase-dessin-.jpg

Si je porte une genouillère rouge, la douleur se fera sentir plus que si je porte une de couleur bleue..

En fait, tout ça pour vous dire que je viens de jeter à la poubelle mes ligaments croisés du genou gauche..

Je ressens pour l'instant une forme de panique liée à l'inactivité physique que je n'ose pas projeter dans le temps ..2, 3 ou 6 mois, le corps au repos, plus de cette transpiration qui évacue les miasmes.. plus de ce souffle qu'il faut maîtriser, plus de décharges d'adrénaline dans une pente ou il ne faut pas tomber.. plus de soupapes pour l'artiste.. nu face à ce corps qui va demander beaucoup à l'esprit.

Bien sûr , j'ai la peinture et l'art , l'écriture plutôt que la lecture, d'autres passions qui me portent..


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On a pu voir à l'exposition organisée à la Bibliothèque royale, en mai 1932, quelques mois après la mort du poète, une partie de l'outillage dont Max Elskamp se servait pour établir la composition matérielle de ses livres: le banc de menuisier où il préparait les bois à graver, -la table de graveur avec ses multiples burins, couteaux, rifloirs et gouges, -le pupitre à composer dont les tiroirs contenaient un choix de caractères typographiques, -et enfin cette presse à imprimer que le poète avait surnommée "l'Alouette" et dont il avait souligné la marque de ce charmant distique:

Tirelant l'alouette
Tire à lire clair et net.

Ce matériel qui, dans l'étrange et quelque peu mystérieux "atelier" du boulevard Léopold, à Anvers, voisinait avec des instruments de physique, d'astronomie, de musique, des souvenirs de voyage, des portraits de famille, des oeuvres d'art et des bibelots de toutes espèces, n'était pas une fantaisie d'artiste; ces établis, ce pupitre à composer, cette presse étaient bien des outils d'un artisan, les instruments de travail quotidiens d'un bon ouvrier du livre.

Et cet ouvrier n'était pas un improvisateur; il avait appris son métier, -et il en était fier.
"Je connais le métier à fond, écrit-il à un ami d'enfance (1), et je pourrais même gagner ma vie en le pratiquant; le brave père Buschmann, il y a 20 ans, et chez lequel j'ai travaillé pendant 6 mois, m'a tout appris, y compris la trempe de papier. J'ai commencé par le commencement, remettre les caractères retirés des formes, "tête en haut" dans les "casses"; puis cette chose très difficile à faire: le "noeud", c'est-à-dire de réunir les lignes composées au moyen d'une ficelle, pour les mettre dans les formes; cela se fait d'une seule main et rien ne peut tomber. -Je connais tous les secrets des serrages, des hausses, de la mise en train, qui est ce qui coûte le plus cher dans la typographie soignée. "Et c'est pour cela que j'aime à contrôler le tirage de mes livres moi-même."
Si l'élève était reconnaissant à son maître des leçons qu'il en avait reçues, celui-ci se plaisait, de son côté, à reconnaître la part de collaboration du poète dans le travail d'édition de ses oeuvres. Quelques mois après la publication du "Jeu de loto dans les Flandres", l'imprimeur Buschmann communique à Max Elskamp la lettre de félicitations qu'il a reçue de M. Thibeaudeau, directeur de l'atelier de composition et d'impression de la Fonderie Peignot de Paris, et il ajoute: "Je ne puis en aucun cas agréer, sans vous en transmettre la grosse part, toutes les flatteuses appréciations que M. Thibeaudeau réserve au petit volume" (2).

Ce "petit volume" était en effet un petit chef-d'oeuvre élaboré avec quelle patience, quel goût, quel souci minutieux et délicat de l'ornementation et de l'exécution typographique! On a trouvé dans les papiers du poète deux manuscrits autographes du "Jeu de loto", quatre copies dactylographiées par l'auteur (la dernière réservant la place des bois), sans compter de multiples essais de couleurs et de mises en page et plusieurs suites d'épreuves corrigées. En vérité, Max Elskamp n'abandonnait rien à la fantaisie de l'imprimeur; il tenait à tout combiner lui-même, à tout prévoir, à tout essayer. C'est ce qu'il appelait "contrôler" le tirage de ses livres.

Ce souci de la présentation, Max Elskamp l'a eu dès le début de sa carrière d'écrivain. Ses premiers vers, reproduits par le procédé de la pâte à polycopier, n'a-t-il pas imaginé de les présenter sur des fonds d'estampes japonaises? Tiré à 15 exemplaires et dédié à son "bon ami en couleurs douces et frêles Henri Vandevelde", L'Eventail japonais, fantaisie de jeunesse -il date de 1886- que le poète semble avoir désavoué par la suite (3), est aujourd'hui à peu près introuvable.

Les trois premiers recueils de vers imprimés par J.-E. Buschmann, sont "rehaussés à la couverture d'une ornementation par Henry van de Velde" (Dominical, 1892, -Salutations dont d'angéliques, 1893, -En symbole vers l'apostolat, 1895).

C'est Henry van de Velde qui imprime, en 1895, les "Six chansons de pauvre homme pour célébrer la semaine de Flandre", mais cette fois, c'est l'auteur lui-même qui s'est chargé de graver les bois qui ornent le petit livre, -livre exquis dont la présentation provoque l'enthousiasme d'Emile Verhaeren. "Les dessins que l'écrivain tailla dans le bois, écrit-il dans l'Art moderne (4), sont d'une naïveté savoureuse et si adéquate au texte et si artistement puérils qu'on n'imagine aucun professionnel qui es eût pu traiter ainsi."
Dès lors, le poète n'abandonne plus à d'autres le soin d'orner ses livres. Pendant de longues années et, pour ainsi dire, jusqu'à la fin de sa carrière, le labeur du graveur rivalise chez lui avec celui de l'écrivain. Et c'est par centaines que les bois sortent des mains de l'artiste pour aller fleurir les pages du poète (5).
Enluminures (1898), l'Alphabet de Notre-Dame la Vierge (1901), les Commentaires et l'idéographie du jeu de loto en Flandre (1918), Sous les tentes de l'exode (1921), Chansons désabusées (1922), la Chanson de la rue Saint Paul (1922), les sept Notre-Dame des plus beaux métiers (1923), Chansons d'amures (1923), Maya (1923), -chacune de ces oeuvres est pour Max Elskamp l'occasion de multiples recherches tant au point de vue de l’ornementation que de la présentation typographique. Sur sa table de travail s’accumulent les essais de mise en pages, les épreuves de bois et quelquefois de feuilles entières tirées sur « L’Alouette », les recherches de couleurs, et ce n’est que lorsqu’il a établi de son œuvre une véritable maquette, qu’il consent à la livrer à l’imprimeur. On pourrait suivre dans les papiers que les héritiers du poète ont généreusement offert à la Bibliothèque royale les étapes successives de l’élaboration de presque tous ses livres, depuis le manuscrit original jusqu’à la maquette définitive que le travail d’impression modifiera à peine. Certaines œuvres de petites dimensions, telles que « Les sept œuvres de miséricorde » ou « Le petit dictionnaire de médecine judiciaire » de Charles Dumercy, ont été entièrement tirées sur « L’Alouette » par le poète lui-même.

Max Elskamp avait sur ce qu’il appelle « l’architecture du livre », des idées très arrêtées. Il considérait la typographie comme une « forme de matérialisation plastique de la pensée ». Partant de cette donnée que le point typographique règle tout l’établissement du livre, il en déduisait que la décoration de celui-ci doit être soumise à des règles étroites. Il n’admettait pas « l’illustration ». Le mot comme la chose lui faisait horreur. « La plus grande erreur de « l’illustration » dans le sens d’ « histoires », dit-il dans ses notes est de n’être que la compréhension d’un passage du livre par « l’illustrateur » seul. Flaubert l’avait si bien compris qu’il répudia toujours les offres « d’illustrations » qui lui furent faites. Seul l’auteur d’un livre pourrait « illustrer » son livre et encore reste à voir s’il y trouverait profit ; il matérialiserait la notation de sa pensée, lui donnerait une forme absolue dans une autre plan de notation où, pour cette raison même, il y aurait une grande difficulté d’adéquation. Seule une « illustration » qui serait un symbole de la pensée pourrait être acceptable et alors encore, il ne s’agirait plus ici que d’une ornementation et non une illustration. D’une façon générale, l’illustration donnant une précision graphique à la formulation de la pensée, ne semble être justifiée que pour les ouvrages de science, anatomie, géographie, architecture, en d’autres termes chaque fois qu’elle prend le titre de « planche » au sens étroit du mot » (6).

Ailleurs, parlant de l’ornementation de la page, l’auteur d’ « Enluminures » formule les règles suivantes : « Le bas de page doit être considéré comme le sol permettant de bâtir en élévation. C’est un point d’appui d’où l’ornementation logiquement prend racine. Pour être plus logique, c’est la dernière ligne d’une page justifiée qui est la limite de ce sol. Il y a une erreur à ce propos souvent commise, c’est d’insérer dans les livres des planches oblongues en les mettant dans le sens vertical. La décoration du livre ne peut être entendue que dans un seul sens, elle doit être vue dans la position de lecture des pages, c’est-à-dire qu’on ne doit pas pouvoir voir une illustration retourner ou pencher le livre ; le point de vue est fixé (comme en perspective) par le texte qu’on doit considérer comme l’horizon de lecture. »

Il n’est pas moins catégorique quand il parle des procédés de reproduction.
« Toute reproduction mécanique qui exige pour le tirage de l’épreuve une presse autre que la presse typographique doit être rejetée. Toute reproduction mécanique permettant pour le tirage de l’épreuve l’emploi de la presse typographique, mais exigeant pour ce faire le subterfuge d’un papier spécial, tel le papier couché pour la simili-gravure, doit être rejetée. En d’autres termes, nous considérons comme ne répondant point à la plastique typographique du livre, tout procédé ne permettant pas d’imprimer d’un même tirage l’ornementation avec le texte du livre. »
Ces notes et d’autres retrouvées dans les papiers du poète, étaient destinées à une étude sur la typographie du livre, à la publication de laquelle Max Elskamp paraît avoir renoncé par crainte de déplaire à ses « confrères ». « Quant au travail que j’ai préparé sur la typographie du livre, écrit-il à l’éditeur Van Oest (7), il n’est terminé qu’en partie, bien que tout à fait construit. Je ne crois pas qu’il soit de nature à intéresser beaucoup le public, et quant aux imprimeurs, ils n’en seront pas enchantée, pour le motif que je tombe leurs procédés les plus chers… »
Ne regrettons pas outre mesure que le poète n’ait pas cru pouvoir donner suite à son projet. Les réalisations sont là qui peuvent nous consoler de la perte de la théorie : elles attestent suffisamment que Max Elskamp fut « un des artisans du livre les plus originaux que notre pays ait produits ».
C. G.

1) M. Henri Damiens, cousin du poète. Lettre datée d’Anvers, le 9 mars 1921.
(2) « Laissez-moi en terminant, dit M. Thibeaudeau, vous exprimer toute mon admiration de technicien pour l’ensemble si artistique de votre édition. Bois des lettrines et des illustrations, caractères, mises en pages, cadre harmonieux, teintes, format, papiers, cartonnages, sont réunis là pour satisfaire pleinement la joie raffinée et délicate de l’élite de la bibliophilie. »
(3) « L’Eventail japonais » n’est rappelé dans aucune de ces listes d’ouvrages « du même auteur » que le poète aimait à placer en tête de ses livres.
(4) 12 janvier 1896.
(5) Max Elskamp a légué l’ensemble de ses bois gravés au musée du « Vleeschhuis » à Anvers .
(6) Pas plus que « l’illustration », Max Elskamp n’aimait la « mise en musique ». « J’ai toujours trouvé bon accueil chez les compositeurs de musique, écrit-il à un ami. Ils m’ont souvent demandé de mettre en musique de mes vers et je me suis souvent refusé à cela, parce que je crois que le commentaire musical ne peut rien ajouter à une pièce de vers, qui doit être complète par elle-même et doit avoir sa propre musique. »
(7) Lettre datée du 1er mars 1919.

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Des jours vagabonds

Pour des jours dits vagabonds

Des fleurs jaillissent du trottoir

Seul l’utile est nécessaire

Pour rendre hommage au devoir

Même si la vie veut encore fleurir

Dans les yeux des petits cailloux

Le rêve tout seul, marche alors

Sous la pluie des temps perdus

Aimer la vie n’est pas un choix

A faire ou à laisser

Car c’est la vie qui coule toute seule

Et on ne peut rien changer..!

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Ô, quelle gloire..!

Tout le monde cherche la gloire des temps perdus

La peine de perdre le sens du grand regard

Fuir le jour de rendre le compte rendu

Revivre comme brebis sous la peau d’un vieux renard

Faire jouir la destiné d’un avenir vendu

Pour que la chose nous devienne un pur hasard

Ceci, pour que tout le monde dit : ce n’est qu’un malentendu !

Ceci, pour que tout le monde dit : Ô, quelle gloire..!

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Dans sa « Théorie esthétique » (1970) –ouvrage d’ailleurs inachevé- Adorno l'auteur pose la question du statut de l' art moderne: il ne va pas de soi, ni en lui-même, ni dans son droit à l'existence, ni dans son rapport à la société. L'élargissement des possibilités de création entraîne, à l'inverse, un rétrécissement de leurs effets sur les oeuvres. L'irruption du "nouveau" en art a effacé jusqu'à la notion même de la tradition. L' art moderne est à l'image de la ruine; il exprime une détresse dont l'archétype est Rimbaud, qui finit par abandonner l'écriture. L'émancipation de l' art aurait-elle sapé les conditions de possibilité de toute création?

L'auteur constate, par ailleurs, que l' art moderne s'identifie à la société de consommation de l' Occident capitaliste, mais pour s'y opposer. Sa fonction originelle est donc remise en question: autrefois, l'oeuvre d'art promettait un monde meilleur. Cette intention objective était et reste théoriquement le "contenu de la vérité" de l'oeuvre, tel que la réflexion philosophique peut le mettre au jour (car, en se déployant, le "contenu" devient le "concept" philosophique). Ainsi le contenu de vérité lutte contre la souffrance et la mort, véhiculant ainsi la promesse d'un autre monde. Mais l' art moderne a oublié la souffrance; il trahit la promesse: n'est-il pas en train de signer l'arrêt de mort de l' art? Néanmoins, la nature fondamentalement contestataire (négative) de l'oeuvre pourrait sortir l'art de cette impasse. Tout n'a pas disparu après la déchéance de la beauté formelle; le sublime a survécu, intimement lié au pouvoir qu'a l'oeuvre de dire "non". Adorno est le tenant d'une esthétique du jugement de valeur, qui serait le critère de compréhension de l' art. C'est cette attitude critique qui l'amène à formuler l' aporie de l' art moderne. La "Théorie esthétique" tourne autour de cette aporie, et développe, dans une orientation formaliste, une esthétique de l'objet. L'ouvrage s'inscrit dans un projet global d'origine marxiste, d'après lequel la forme de l'oeuvre d' art est son critère de perfection. En outre, cette orientation de pensée postule le dépassement du système capitaliste. C'est dans ce sillage que se situe l'école de Francfort, dont Adorno est l'un des principaux représentants. La "Théorie esthétique" illustre le malaise de toute une époque devant un art qui boulverse jusqu'à ses présupposés, et les questions soulevées par l'auteur n'ont, aujourd'hui, rien perdu de leur actualité.

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Voltaire à Ferney

Les œufs sont tous ou presque ramassés.. ceux qui sont oubliés seront mangés par les moutons qui paissent dans le parc du château.. de Voltaire à Ferney-Rousseau.. oups.. Voltaire..! Rousseau c'est le douanier, le "gabelou.. Rousseau"

Le douanier Voltaire n'existe pas encore.. mais bon, on sait jamais avec ces artistes qui veulent devenir à tout prix quelqu'un..

Et donc pourquoi pas douanier ?

En l'an 1760 Voltaire peaufine, met la dernière touche à l'aménagement de sa demeure Ferneysienne.

Son château à de l'allure perché sur le haut du village. Il domine Genève ou ne règne pas encore le jet d'eau..

Voltaire entre dans la postérité, il se porte bien habillé de rouge pour faire le "kakou" diraient certains..!


Dessins de Lutopic pour Voltaire à Ferney

Gegout©2010

voltaire et sa canne1voltaire oublie sa canne


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« Chapelet » (1914), second recueil de la poétesse russe Anna Akhmatova représente avec "Soir" (1912) l'essentiel de l'oeuvre de jeunesse d'Akhmatova et de sa contribution à l' "akméïsme".

Akhmatova, qui commença à écrire à onze ans, rejoignit en 1910 le mouvement "akméïste" (du grec "akme" -sommet), qui s'opposait au mouvement symboliste. L'akméïsme, à l'époque des débuts littéraires de la poétesse, était animé par Nicolas Goumilev, qu'Akhmatova allait bientôt épouser. La théorie de l'akméïsme distinguait en poétique quatre disciplines principales. D'abord celle qui concerne les mots qui sont pour la poésie ce que la chair est pour l'organisme et qui constituent la matière d'une "réflexion stylistique"; puis la "composition" qui forme l'ossature autour de laquelle se distribuent les éléments d'une oeuvre poétique. La "phonétique" s'occupe du rythme, des rimes, des voyelles et des consonnes, que Goumilev compare au sang qui circule dans un organisme vivant. L'image mentale ou la motivation profonde de l'acte créateur sont le "système nerveux du poème" qui fait l'objet d' eïdologie".

Certains critiques se sont demandé en quoi, ainsi défini, l'akméïsme était différent du classicisme, lequel requérait, tout autant, un équilibre dans la distribution de matériaux verbaux et un tempérament poétique qui tend à une vision d'ensemble du monde. "En 1910, dit Anna Akhmatova dans une courte préface au recueil de ses poèmes paru en 1961, la crise du mouvement symboliste a été suffisamment marquée et les poètes débutants n'adhéraient plus à ce mouvement. Certains rejoignaient le futurisme, d'autres l'akméïsme. Je suis devenue akméïste." C'est donc sous la bannière de ce courant que la poésie d'Akhmatova se révèle héritière du classicisme russe. Mais le trait le plus personnel de l'écriture d'Akhmatova c'est sa force sous-jacente, c'est le lyrisme contenu qu'elle enferme avec un rare sens de la mesure dans des formules poétiques aussi succintes qu'évocatrices.

Fait de précision et de clarté, le discours poétique de la jeune Akmatova est harmonieux. La source d'inspiration du "Chapelet" et du "Soir", c'est le monde des émotions intimes, son sujet central est le destin de la femme. Dans ses toutes premières oeuvres, Akhmatova est déjà capable de donner une résonance universelle à un autoportrait lyrique, et ceci avec une exquise économie de moyens, avec une finesse et une précision du dessin qui font penser à une épure, bien plus qu'à un croquis. Dans une de ses poignantes poésies de la dernière époque, "l'épilogue", du recueil "Requiem", on lit: "Oui, je connais les traits qui se déforment, / Sous les paupières vient nicher la peur, / Et le profil devient cunéiforme / Sous le stylet pointu de la douleur." C'est avec "le stylet pointu de la douleur" que sont ciselées plutôt qu'écrites, toutes les poésies d'Anna Akhmatova, dont le sens inné du tragique a trouvé une matière inépuisable dans la réalité de son époque et dans sa propre biographie.

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Chanson aux Pommes



Pom Pom Pom

Pomme de terre

Pomme de l’air

Pomme d’enfer

Une pomme


Pomme d’amour

Pomme au four

Pomme toujours

Une pomme


Pomme d’Adam

Pomme d’antan

Pomme des champs

La pomme


Une pomme de cœur

Une pomme vapeur

Une pomme au beurre

Une pomme !


Patate germée

Patate râpée

Patate comblée

Patati Patata !


Une pomme frite

Une pomme cuite

Une pomme d’élite


Pomme de confiance

Une pomme d’errances

Je te la lance,

La pomme !


Pomme biblique

Pomme énergétique

Pomme pratique



Pomme sauvage

Pomme volage

Pomme de ménage


Pomme d’Afrique

Pomme d’Asie

D’Australie

Pomme d’Europe

Pomme d’Amérique

Pomme d’Api

Pommes unies

Philanthrope

Pomme pleurote


Une pomme miscible

Une pomme en cible

Et, Guillaume Tell,

Sa pomme !


Pomme arborée,

Une pomme volée

Tombée

Ridée


Pomme d'argile

Pomme fossile

Pomme fragile

Fertile


Patate enfouie

Patate pourrie

Patate avertie

...Deux Pommes !


Une pomme à la mer !

Une Pomme lunaire

Une pomme d’affaire

Tomber dans les pommes !


Pomme compote

Pomme qui barbote

Pomme et crottes !

Gros sur la patate !


Pomme croquante

Pomme craquante

Pomme filante

Chausson aux pommes !


Pomme farineuse

Pomme savoureuse

Pomme amoureuse

Charlotte aux pommes !


Patate chaude

Patate rôde

Patate fraude

Haute comme

3 pommes !


Pomme ou patate

Patati-patata

C'est pour Vot' pomme

Pom Pom !

Fabienne Coppens Sabam 2008



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Présent depuis la première édition, le Centre Wallonie-Bruxelles participe cette année encore au festival Textes & Voix. Lors de ce rendez-vous en Ile de France (6-12 avril), des comédiens renommés lisent des extraits d’œuvres faisant l’actualité éditoriale en présence de leurs auteurs.


- LE 10 AVRIL 2010 À 19 H: Marie-Christine Barrault lit Corinne Hoex.


Marie-Christine Barrault lit des extraits de Décidemment, je t’assassine et du Grand menu (réédition) publiés aux Impressions Nouvelles, en présence de l’auteur Corinne Hoex.

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Balade insolite - Musiques à Saint-Gilles

On chante derrière les fenêtres dans la rue où passe le tram 81. Et les mélodies des harpes dominent les klaxons.

Dimanche 02 Mai 2010
avec Anne Borlée, Marie-Rose Meysmans et Bernard Tirtiaux


C'est au bout du couloir !... Oui, là, vous entendez ?... Un courant d'air, une corde qui vibre ... Ne vous étonnez pas : ici, les murs ont vu passer plus d'un artisan du son, plus d'un explorateur de la voix ! La porte s'ouvre : nous voici au Harp Center, nous voilà à l'atelier voix et chansons de Marcelle de Cooman. Alors ouvrez vos écoutilles, car ici, c'est certain, les murs ont des oreilles...

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2 Départs : 15h00 et 16h00
Durée : 1h30
Prix : 6 € / adulte, 4 € / enfant
Balade sur réservation: 0497/78 20 75

contact: info@conteursenbalade.be
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Transport : Bus 48 (Parvis de Saint-Gilles) Tram 81 ( Bethléem) 3, 4, 97 (Parvis de Saint-Gilles)


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Proposition de spectacle

Bonjour à toutes et à tous!

Je suis l'auteur d'une pièce de théâtre intitulée Enquête sur Inconnu. Elle aborde, sans tabous, un problème d'actualité brûlante, celui du terrorisme. Plus précisément sous deux aspects. D'abord,comment un jeune intellectuel brillant et plein d'avenir, non fanatisé religieusement ou politiquement, est-il amené à devenir membre, en toute lucidité, d'une organisation "terroriste"? Et quelles dérives graves cette qualification entraîne-t-elle dans nos sociétés en matière de droits humains?

Cette double problématique est abordée dans un récit où le suspense est omniprésent au fil des éléments révélés.

Enquête sur Inconnu a fait l'objet d'une lecture-spectacle au Théâtre Royal du Parc, à Bruxelles, à l'initiative du Magasin d'Écriture Théâtrale de Jean-Claude IDÉE, en mai 2009.

Pour celles et ceux (metteurs en scène, directeurs de théâtre, acteurs professionnels ou amateurs...) qui seraient intéressés, je suis à leur disposition pour leur donner toutes les précisions désirées et, bien sûr, leur envoyer par courriel le texte de ma pièce.

A bientôt peut-être?

C. Du Pré


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Moment fugace ...


C'est un regard d'acier qui a tranché mon cœur,

Quelques mots endiablés, langage de caresses,

L'horizon qui s'enflamme en parfumant les heures

Qui viennent épeler des milliers de promesses...


Lumières tant espérées qui éclairent mon âme,

Envoûtante chaleur, brasier de sentiments,

Morsures involontaires venues marquer ma chair

Et transmettre à mon corps ce désir si violent...


Mais l'absence est venue, morbide fatalité

Quand les braises s'éteignent et que le froid prend place,

Incandescente plaie inventant ce passé

Qui vient pour envahir et restera en place...


Farandole de perles, douces larmes de pluie,

Tirez votre rideau de tendre humidité,

Faites naître à mes jours un impossible oubli

Pour ce moment d'amour et de sensualité...


KVR

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Extraits du CD-ROM "Le Testament des Poètes" de Robert Paul sur la poésie de William Cliff:

C’est de vivre qu’il s’agit, sinon de survivre. Avant tout le reste, toute autre occupation, tout autre souci, ou désir, il y a cette nécessité-là, quotidienne, impérieuse souvent, urgente parfois. Manger, boire, dormir, se loger : voilà, jour après jour, année après année, tout au long de l’itinéraire ici déroulé, les priorités et, en un sens, les préalables à toutes les autres activités. Importants, certes, pour William Cliff, l’amour, la rencontre, le voyage, la lecture, d’autres choses encore, mais alors, pourrait-on dire, secondairement, relativement aux impératifs précités qui toujours les précèdent, les accompagnent, les conditionnent. Importante aussi, bien sûr, l’écriture, comme expérience, et expérience majeure, mais néanmoins secondaire encore, ou plutôt subséquente, puisque mise en mots et en forme d’une expérience antécédente qui la nourrit et lui donne sens.

Bref, la donnée première ici, répétons-le encore, insistons-y bien, c’est la vie. « Il part de la vie, note très justement Roland Jaccard après sa lecture d’un des premiers recueils de Cliff, pas des mots. » Proposons à notre parcours, après avoir peut-être fait dans la lecture le chemin inverse, le même point de départ. Demandons aux mots du poète de nous conduire, si l’on peut dire, jusqu’à sa vie. Tâchons de remonter jusqu’à certains moments de cette vie à travers les mots qui les disent. Attachons-nous à tenter de ressaisir, dans sa spontanéité, dans son originalité, dans sa formulation mais donc aussi en-deçà ou en amont de celle-ci, la façon d’être au monde propre à William Cliff. Sachons gré au poète de nous faciliter ici grandement la tâche en faisant précisément de sa vie, sans détour, sans masque, la matière même de sa poésie. Une vie qu’il revendique, assume, assure, et avec des moyens qui apparaissent volontairement modestes. Il semble bien en effet que la précarité de ses conditions d’existence soit plutôt choisie par lui qu’imposée du dehors. Pour diverses raisons sans doute, liées à l’histoire personnelle. Peut-être aussi pour s’empêcher précisément d’éluder les réalités, les contraintes de la seule présence au monde. Une présence toute simple, immédiate, très concrète, on l’a compris, mais néanmoins problématique, et pas seulement matériellement. Étroitement lié aux circonstances ponctuelles de la présence, le malaise le serait aussi déjà à cette présence même, laquelle prend ici, au-delà de ses modalités particulières, toutes les apparences d’une obligation, d’une charge, d’un fardeau. Vivre ne va donc pas pour notre poète sans difficultés, quotidiennes et existentielles, pratiques et ontologiques, physiques et métaphysiques. À l’écouter, être ne va pas sans s’accompagner même, de son propre aveu, d’une « horreur d’être là ». On pourrait sans doute parler, avec un philosophe de notre temps, d’un « inconvénient d’être né ». Et, circonstance aggravante peut-être, d’être né à un certain moment, en un certain lieu, dans un certain contexte et dans certaines conditions. « Peut-être le fait que ma mère m’ait transporté dans son ventre, en évacuation, en 1940, a eu des incidences sur mon caractère, et sur ma vie postérieure. » Tentation, tentative d’interroger sa propre préhistoire, d’aller chercher dans la vie prénatale, fœtale, les « clés » d’une attitude fondamentale d’existence ? Cliff lui-même y semble assez peu disposé. Pas d’existence plus concrète, plus consciente même, en un sens, que la sienne. Être, c’est se découvrir en train d’être, ici et maintenant, et éprouver très authentiquement, dans son corps, le poids (et quelquefois peut-être aussi la grâce) de l’être-là. On devine l’importance, dans cette existence et dans cette œuvre qui refusent manifestement l’une et l’autre d’en faire l’économie, de l’expérience sensible. Vivre, à n’en pas douter, pour William Cliff, ainsi qu’il l’écrit quelque part à propos d’un tiers qu’il regarde vivre, c’est d’abord « être seul avec ses seuls cinq sens ». Le plus simple alors, le plus commode sera sans doute encore de le prendre au mot, d’emprunter la voie qu’il semble ainsi lui-même nous indiquer, de l’observer dans ses textes tout simplement sentant, entendant, voyant, touchant, goûtant. Le plus éclairant même, croyons-nous, ou en tout cas le plus tentant et le plus gratifiant pour nous, serait donc de regarder vivre le poète sur un mode pré-réflexif, de le saisir (ou d’essayer de le saisir) d’abord, comme nous l’a si magistralement montré Jean-Pierre Richard, au « niveau de la sensation pure », brute, immédiate.

Le bonheur ou le plaisir ici décrit est en quelque sorte déjà miné par la certitude de sa rareté et de sa fugacité, par la conscience très lucide qu’il n’est qu’une exception, qu’il ne durera pas, et qu’après cet instant vécu comme « hors du temps » la durée ordinaire, quotidienne, pesante, reprendra ses droits sur notre vie. Si l’on a échappé, le temps d’une étreinte ou d’une caresse, à la temporalité, au temps qui « (nous) presse, (nous) happe et (nous) avale tout entier », c’est pour y être bientôt, bien trop tôt, presque aussitôt replongé, exposé derechef. À lire ses poèmes, pas de conscience peut-être plus aiguë de notre éphémérité que celle de Cliff. Peu d’êtres plus doués que lui, si l’on peut dire, pour « regarder le temps fuir à toutes voiles ». Et non seulement pour le regarder fuir, mais pour éprouver aussi très consciemment, physiquement, concrètement, en soi-même, dans sa chair et dans tout son être, cette fuite implacable. Car « le temps dans sa mouvance entraîne l’âme humaine », et affecte aussi le corps. « Le bourreau du temps nous frappe », et s’acharne même ensuite, si l’on peut dire, sur la chair ainsi meurtrie, s’obstine sur l’enveloppe corporelle avec l’intention de la pénétrer, l’ambition d’en entamer patiemment l’épaisseur, la volonté entêtée d’en attaquer activement la substance interne : « j’en ai assez ô temps ta dent me ronge ». Extérieur et intérieur sont donc l’un et l’autre, on le voit, touchés, agressés, affectés. Et le poète alors de « sentir le temps passer dans ses artères » pour l’acheminer vers la mort : « je sens qu’elle entre et me pénètre / pour m’ancrer son Mal Majuscule ». Dans de telles conditions, que peuvent valoir les moments de grâce décrits plus haut ? On s’en doute, « la minute heureuse / qui fut celle goûtée sur un lit hasardeux » ne pèse pas bien lourd face à l’appétit du « temps atroce dans sa pente ». On ne s’étonnera donc pas de voir le poète attendre peut-être encore la venue de quelque chose, mais alors « sans conviction », sans trop y croire vraiment :

« et moi sans conviction je suis là et j’attends

j’attends le grand amour

auquel depuis longtemps je ne crois plus du tout »

Que faire alors ? Errer, sans doute, « courir le nez au sol », comme on l’a vu plus haut, « renifler pour sentir quelque promesse / de bonheur », en feignant peut-être d’y croire encore, pour se donner la force, le goût, ou des raisons d’avancer. Mais il y a les moments, les longs moments, les longues périodes de lucidité. Les moments où l’on sait s’acheminer (trop) rapidement vers l’anéantissement. Ceux où l’on assume aussi ce que nous avons appelé la néboïté, les moments où l’on regarde en face non seulement les difficultés mais aussi l’impossibilité où l’on se trouve de vivre en permanence à la hauteur de notre rêve d’amour, d’asseoir ce dernier dans la durée, de faire de lui notre pain quotidien. Reste peut-être pourtant quelque chose comme une compensation, sinon une dernière issue, déjà évoquée plus haut :

« Je désirais certaines choses de tout mon être et jamais je ne rencontrais une moindre parcelle de satisfaction. Alors j’ai écrit ce texte. »

L’écriture : voilà, à en croire ici William Cliff, l’issue. Ou tout au moins le soutien, ou une consolation. Je ne puis peut-être pas saisir et conserver ce que je désire, mais en manière de compensation j’ai ce texte, ces poèmes, ce recueil (Ecrasez-le), ceux qui suivront. Je ne puis sans doute pas accéder pleinement, durablement, mais je puis écrire. Et j’écris précisément parce que le bonheur finalement m’est toujours refusé, parce que la terre promise ne m’est jamais offerte, parce qu’elle ne m’est que prêtée, très éphémèrement, très momentanément, parce qu’elle ne m’est peut-être présentée que pour m’être aussitôt reprise, retirée. Écrire donc, comme d’autres l’ont fait avant moi, comme ils m’ont montré qu’il était possible de le faire, et de se consoler par là, d’une certaine manière, de l’interdiction d’accéder et de demeurer. Chance, ici, d’avoir rencontré sur son chemin quelques livres, et pas n’importe lesquels. Indolent, solitaire, rêveur, on l’a vu, le jeune Cliff. Pas trop bon élève peut-être. Mais cette solitude, cette indolence, cette passivité disposaient aussi à la rencontre, à la découverte de la littérature. À l’accueil des mots, de la voix d’autres solitaires, d’autres « souffrants » :

« un jour j’eus la révélation de la littérature

dans le récit que fait Chateaubriand de son enfance

de la terreur qu’il eut devant son père et de sa dure

condition d’enfant à Combourg dont la sinistre ambiance

le soir avec ce père qui n’arrêtait pas de faire

armé d’un bonnet dressé sur sa tête les cent pas

me rappelait celle qui aussi me terrorisa

dans mon enfance avec un père aussi autoritaire

j’appris par ce récit n’être plus tout seul à souffrir

ce fut comme un voile levé sur mon âme sauvage

écrire alors devint pour moi le geste qui relie

tous ceux qui ont senti au fond d’eux-mêmes ces messages

graves que le monde méprise et tourne en dérision

mais dont par la littérature on a révélation »

On songe ici à la « définition » que donnait naguère de la littérature Charles Du Bos, qui voyait en elle « le lieu de rencontre de deux âmes ». Lire, pour le jeune Cliff, selon ses propres mots, c’est « n’être plus tout seul ». C’est rencontrer autrui dans ses mots, dans les mots de lui qui sont parvenus jusqu’à nous pour nous permettre de reconnaître dans cet étranger un frère, pour que l’inconnu qu’il était encore pour nous l’instant d’avant cesse soudain de l’être. C’est donc, à la faveur de cette rencontre, faire la connaissance de l’autre, mais c’est aussi acquérir, si l’on peut dire, dans le même temps, une meilleure connaissance de nous-même. Car lire, c’est en effet aussi voir ou entendre un autre homme mettre des mots non seulement sur sa propre vie, mais aussi sur la nôtre. Et lire, c’est alors encore vouloir prolonger en quelque sorte par l’écriture le mouvement ou l’événement intérieur initié ou provoqué par la lecture, éclairer peut-être toujours plus notre vie à la faveur de la révélation ou de la lumière jetée sur elle par l’écriture d’autrui. Lire, pour Cliff, c’est donc aussi tôt ou tard, on l’a bien compris, se mettre soi-même à écrire, avec la conscience plus ou moins nette de faire de cet acte, de l’acte de lire et d’écrire, un « geste qui relie ». Peut-être cette découverte n’est-elle pas exactement contemporaine de cette lecture de Chateaubriand faite au temps de l’adolescence. Peut-être son importance n’est-elle apparue que rétrospectivement, beaucoup plus tard, avec la conscience approfondie, accrue, de la solitude, de la différence, de la néboïté. Mais la chance pour le futur poète a été de trouver sur sa route de tels livres, de faire de telles rencontres, d’entendre de telles voix et de telles confidences :

« l’auteur de la Recherche en ces années m’a révélé

que notre intime vérité c’est la littérature

Du côté de chez... c’est-à-dire où le voile est levé

sur ce qui toujours est couvert de commune imposture

et qu’on ne vienne pas me parler de “ science humaine ”

et dégrader à des concepts le chant ou la douleur

qui fut le lot de notre enfance et dont la trace hautaine

continuera de nous tenir jusqu’à la dernière heure

près du collège se trouvait un château à tourelles

hissé sur un piton rocheux qui dominait la Meuse

quand j’allais là me promener et remuer mes rêves

j’étais comme un second René dont l’âme ténébreuse

se perdait à travers pareil château ou vers des landes

mouvantes pour y prendre le poison de ses tourmentes »

Autrement dit, ce qui dans l’ordre de l’amour ou du désir m’est (ou semble m’être) refusé, ne l’est peut-être pas dans l’ordre littéraire. Si je ne puis pas rencontrer l’autre dans le monde, dans ma vie, comme je désirerais le rencontrer, cette impossibilité serait levée dans cette autre vie qu’est la littérature. Il faut lire ici ces quelques mots d’Ecrasez-le dictés à Cliff par l’échec, dans sa vie d’homme, dans sa vie quotidienne, de son désir amoureux :

« Aucune vie pourtant ne veut se confondre à la nôtre :

c’est en vain qu’on se jette dans les pas des autres. »

À moins de se jeter dans les « pas » que sont aussi, en un sens, les mots des autres. Car en lisant, constate William Cliff, je suis aussi un autre. En lisant Chateaubriand, se souvient-il, j’étais « comme un second René ». Sur le piton rocheux de mes promenades, je pouvais mettre, par la grâce de ma lecture, mes pas dans ceux de celui dont je lisais l’aventure, dont j’écoutais les confidences, avec qui je me sentais, par-delà les distances spatiales et temporelles, des affinités secrètes, une communauté de sentiments et d’expériences. Il n’est même pas exclu de joindre, d’une certaine manière, l’acte à la pensée. Les lieux où ont vécu les poètes, les écrivains, ne deviendront-ils pas pour Cliff des lieux de pèlerinage ? Ne le verra-t-on pas chercher à mettre ses pas dans les empreintes laissées par Cavafis à Alexandrie, par Conrad Detrez à Montevideo, par Rousseau à l’île de Saint-Pierre, par d’autres encore en d’autres endroits du globe ?

« dans les cuadras de Montevideo

j’ai reniflé les traces de ton être »

« j’ai vu la chambre où Cavafis est mort

dans la misère »

Une telle démarche, faut-il le dire, n’est pas dictée par on ne sait quelle curiosité. Elle a véritablement valeur de visite, de rencontre. Être présent, là, aujourd’hui, où a été présent autrefois un de mes écrivains élus, c’est en quelque sorte nouer avec lui un lien spécial, particulier, plus fort peut-être, ou en tout cas différent de la relation immédiate, concrète, physique, que je pourrais par ailleurs établir avec lui si la vie faisait se croiser ou se recroiser nos chemins. Quand Cliff, à Montevideo, « renifle les traces » de Conrad Detrez, celui-ci vit toujours, et Cliff l’a rencontré, ils ont passé de longs moments ensemble, ils sont amis, ils se reverront après le retour du pèlerin, ils parleront, ils échangeront souvenirs et expériences. Mais tout ce compagnonnage, toute cette proximité, cette intimité, on le sent bien, ne dispensent pas de l’expérience susdite, ne rendent pas le voyage, l’éloignement, la distance inutiles, superflus. Ceux-ci, à lire Cliff, étaient même sans doute indispensables. Si la lecture est rencontre, la recherche et la visite du lieu où a vécu, où est passé autrui sont elles aussi rencontre. Rencontre ici encore toute mentale. Ce qui importe, ce n’est sans doute pas tant le lieu lui-même, la terre, la maison, les briques, qu’un état d’esprit, une disposition d’accueil. On s’est préparé, disposé mentalement à accueillir, à recevoir l’autre, le souvenir ou l’essence de l’autre. On s’est rapproché de lui au-dedans de soi. Peu importe alors, en un sens, que le décor ait changé, que les maisons aient disparu.

Écrire donc, encore et toujours, inlassablement, quoi qu’il en coûte, vers après vers, poème après poème, recueil après recueil, pour dire tout « ce que (l)a vie (nous) rend de banale expérience », cette vie même et la mort, l’espoir et la détresse, la rencontre et la solitude, l’amour et sa privation, le bonheur rare et le malheur plus sûr, la terre promise et l’exil, le monde et le désert, la beauté et la laideur, la jeunesse et la décrépitude, l’être et le néant. Dire tout cela, l’écrire, le mettre dans des mots, le coucher, si l’on peut dire, sur le papier, sur la page, et en même temps le dresser, l’ériger, l’élever, un peu comme les stèles de Segalen, ou, pour prendre une image peut-être suggérée par Cliff lui-même, comme une falaise. Le moment est sans doute en effet venu de s’aviser que telle est la traduction du mot anglais choisi comme pseudonyme par le poète. Un poète dont la tâche alors serait de faire de l’œuvre, des poèmes, cette verticalité nette, d’un bloc elle aussi, debout devant l’océan, les pieds dans l’eau peut-être, prête à répondre à l’appel du large, impatiente de céder à l’attrait de cette immensité liquide et plane. Et s’y abandonner peut-être en effet, s’autoriser l’avancée favorisée par la falaise quand elle devient de surcroît promontoire, autre mot certainement lourd de sens, on vient encore de le voir, sous la plume de Cliff. Et poursuivre alors, prolonger le mouvement heureusement amorcé en glissant ensuite sur cette horizontalité lisse. Un glissement non pas exactement superficiel, épidermique, mais, en un sens, déjà profond, en quelque sorte enrichi d’emblée dans l’épreuve d’une réalité sensible, d’une consistance, d’une épaisseur. S’éprouver au contact de celle-ci, dans son accueil et dans sa résistance. Fendre l’eau comme le faisait, sous les yeux du voyageur, la coque du cargo, l’étrave du « Talavera ». Sans exclure bien sûr l’immersion, la plongée lente ou la chute brutale, « à pic », sous la surface, dans des profondeurs abyssales, ténébreuses, inhospitalières, menaçantes, effrayantes, mais desquelles on pourrait néanmoins remonter les bras ou les vers chargés de trésors ou de trouvailles. Sans écarter non plus, dans notre traversée de l’existence, à côté des freins et des obstacles divers qui balisent notre route, les adjuvances, les interventions extérieures, les soutiens venus en quelque sorte d’ailleurs, les « grâces » peut-être, bref les invitations à se tenir dans une disposition d’accueil à l’égard de ce que le ciel peut aussi dispenser comme bienfaits : tous les « souffles », vents, pluies, chaleurs, orages, lumières et autres offrandes qui tour à tour, au fil des ans, au gré des saisons, jour après jour nous frôlent, nous caressent, nous rafraîchissent, nous réchauffent, nous revigorent, « renourrissent » à la fois le corps, l’âme et l’écriture, ou nous maintiennent en vie, tout simplement.

Christian Schoenaers

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Le jury reconnaît dans un communiqué que Crowther est "une maîtresse du trait mais également de l'atmosphère", soulignant la sympathie et l'empathie dont sont empreints ses personnages.
Le président du Jury a déclaré : "C'est une véritable conteuse, sa façon de raconter promène les lecteurs entre l'imagination et la réalité".
Kitty Crowther est l'auteure de plus de 35 livres pour enfants principalement en français, parmi lesquels la série Poka et Mine, Scritch scratch dip clapote !, Annie du lac, etc.
Le prix Astrid Lindgren a été créé par le gouvernement suédois après la mort de la créatrice du personnage de Fifi Brindacier en 2002. Il se présente comme le principal prix de littérature pour enfants et pour la jeunesse dans le monde.
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