Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

peinture (239)

12273189661?profile=original

     La mode est dictée à Paris. C’est à Paris que sont installées les boutiques de luxe. Mais c’est à Dieppe (ivoiriers), et plus généralement en Normandie, ou à Sainte-Geneviève, Andeville, Méru (tabletiers), dans l’Oise, que se font les montures.
Rien que pour celles-ci, de nombreux ouvriers et artistes s’emploient pour obtenir une pièce unique. Débiteurs, Monsieur, pour le gros œuvre, puis façonneurs, polisseurs, découpeurs, graveurs, sculpteurs, ces derniers se trouvant bien évidemment au sommet de la hiérarchie, s’activent. Un teinturier, un doreur, un vernisseur, un joaillier peuvent s’y joindre pour les finitions. De l’ouvrier au maître, la division artistique du travail joue à plein.

12273190457?profile=original

Enfin, des peintres, et des plus fameux, interviendront pour embellir la feuille, rehausser le dessin de délicates touches de gouache.
Parmi les peintres spécialisés dans ce délicat travail citons, pour l’exemple, Gustave François Lasellaz (1848-1910) ou Maurice Lenoir (1853-1940).

Mais tous ou presque, de la petite main au grand créateur, longtemps resteront dans l’ombre.


« Je décorais des éventails. »,
                                                                         Pierre-Auguste Renoir (1841-1919)

12273190858?profile=original

Et Gauguin se languissait. Alors lui aussi en orna, et ne devint célèbre qu’après les Marquises.

De leur côté Katsushika Hokusai (1760-1849) ou Utagawa Kunisada (1786-1864) les faisaient rimer en de précieux poèmes visuels en réalisant des estampes sur éventail, uchiwa-eban, pendant les années de disette.

 12273191091?profile=original

 Deux carpes, ca 1833

Dans leur sillage, Monet, Van Gogh, Klimt…

Uchiwa-eban, Katsushika Hokusai (musée Guimet)


Ô temps suspend ton vol, laissez-nous savourer les rapides délices.

12273191277?profile=originalDessin de Félix Anthyme Aubert - ? - (1866-1940),
artiste membre du mouvement nommé, fort à propos, L’Art dans Tout

Ainsi Anthyme sera un peu moins anonyme

Et cependant réunis pour qu’élégantes, starlettes comme midinettes, se sentent transportées d’aise.

12273192278?profile=originalOn les retrouve aujourd’hui sur les étals de tous les pays.
Ici des modèles venus d’Asie, vus sur… les bords de la Mer Noire, en Bulgarie

Sur un Eventail de Mademoiselle Mallarmé, le poète développant un art épigraphique écrivit :


Vertige ! voici que frissonne
L’espace comme un grand baiser
Qui, fou de naître pour personne,
Ne peut jaillir ni apaiser.


Stéphane Mallarmé (1842-1898)

Le temps et les mots passant :


S’ouvre l’éventail enfoui.

Etais las, restant à t’attendre,
Le temps rongé par le malin.
Des échos se faisaient entendre.
Ensemble ont pris le dernier train.


Suzanne Walther-Siksou,
extrait de Pastiche de Eventail de Madame Mallarmé

A sa manière, Emile Gallé reprit cet art épigraphique sur ses verreries parlantes, affirmant par son savoir-faire porté au plus haut degré que « La matière pour nous est matière à poésie. »

Le vent clair
qu’est-ce donc ?
Quelque chose à aimer
sans lui donner de nom

Bienvenue au vent qui va de l’avant
Je lève ma coupe de vin à sa caresse
Je bois à la santé du vent qui va…


Su Dongpo (1036-1101)

12273192668?profile=original

Chiné… à Lyon.

 

A la santé du vent qui va, donc…

A suivre…

 

Michel Lansardière (texte et photos)

 

Retrouvez ici mes trois premiers articles de fantaisies :

La surprise de l'été :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/la-surprise-de-l-t-articles-de-fantaisie-et-mode-de-paris-1-4

Je sème à tout vent :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/je-s-me-tout-vent-fantaisies-estivales-autour-d-un-ventail-2-4

L'art, la matière et le savoir-faire :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/l-art-la-mati-re-et-le-savoir-faire-fantaisies-autour-d-un

 

Merci Suzanne, à qui j’ai emprunté quelques vers. Qu’elle me pardonne d’avoir écorné son poème, Stéphane lui m’a déjà absout pour avoir interverti deux de ses vers dans mon précédent billet.

Lire la suite...

Avec Jean ROUCH, chez les Fanti.

12273188900?profile=originalCe petit croquis comme celui en dessous, est extrait de l’une de mes pages consacrées aux pêcheurs Fanti. Avec eux, entre deux croquis ou aquarelles, j’ai ramené les filets sur la plage et poussé les pirogues sur le sable…

Mais la quête du petit objet que j’étais venu chercher ici, si elle m’a permis la découverte d’un peuple noble et courageux, m’a surtout apporté la chance d’une rencontre qui allait changer le cours de mon carnet en me révélant la route à la fois merveilleuse et initiatique sur laquelle j’étais sans même le savoir.

12273189269?profile=original

Je vous en reparlerai plus tard, mais avec le soleil qui se couche chaque soir dans une magnificence d’embrasements où l’écume des vagues se mêle au corail du ciel sous le balancement des palmiers, je ne peux m’empêcher de vous amener avec moi voir (ou revoir) ce film magnifique du cinéaste et ethnologue Jean ROUCH « Mammay water ».

Il a su mieux que personne d’autre, nous dévoiler l’âme de ce peuple à travers son sens aigu de la narration dans un récit simple et efficace.

Celui-ci nous plonge dans l’ambiance même où je me trouvais, car depuis l’époque où son film fut réalisé, en 1956, rien sur ces rivages n’a changé : une Afrique authentique et intemporelle, une musique High Life qui est toujours à la mode dans les profondeurs du pays, les jeux de surf des enfants (ces « garçons de l’écume » comme il les appelait, si fiers de nous montrer les morceaux d’écorce de kapokiers sur lesquels ils surfaient), leurs sauts périlleux et autres culbutes sur la plage, sous les remparts des châteaux forts esclavagiste, mémoires silencieuses de très terribles secrets…

Chez les pêcheurs fanti du Ghana, si la pêche est mauvaise, c'est qu'il y a une raison. Au moyen de cérémonies et d'incantations, les pêcheurs du Golfe de Guinée invoquent les génies de la mer. Il faut dire que les villageois ont perdu leur prêtresse, une vielle femme qui incarnait la déesse de la mer et offrait à la communauté la protection des génies. On assiste aux funérailles, on accompagne le cortège funèbre...

Si dans le film nulle pirogue ne prend la mer jusqu’au festival du Roi de Chama, j’ai vu les pêcheurs, entièrement habillés de rouge (couleur de deuil dans ces communautés), remonter sur les pirogues en honorant l’un des leurs qui s’était noyé.

Dans le documentaire de Jean ROUCH, le roi à l’ombre de son parasol est transporté dans sa chaise à porteur, au son d’une fanfare endiablée à l’occasion du festival. On passe devant le fort esclavagiste d’Elmina en allant vers l’embouchure du fleuve Kra où au moyen d’offrandes, de cérémonies et d'incantations, on s’adresse aux génies de la mer…

- Que va-t-il se passer ?

Vous pouvez remarquer que j'ai donné aux images que j'ai prises sur place (en fond visuel derrière moi en introduction vidéo avant le visionnage du film) l'aspect suranné des premiers documents couleur tournés par les prédécesseurs de Jean ROUCH : c'est pour mieux vous faire partager l'impression de "remontée du temps" que j'ai ressentie en arrivant, et rester en conformité avec l'esprit qui se dégage du documentaire du cinéaste.

À présent, deux photos souvenir de mon passage parmi les pêcheurs Fanti, dans celle-ci, je suis à la manœuvre pour tirer les filets, il fallait bien qu'avant chaque séance d'aquarelle je donne un coup de main, c'était plus facile ensuite, d'être accepté...

12273188694?profile=original

Dans celle-là, vous voyez ce que je fais, les croquis du début de ce billet en font partie  :

12273189670?profile=original

Lire la suite...

12273186867?profile=original

Sans davantage vouloir crâner, je ne suis pas devenu ékraventuphile, juste fan, le sujet mérite d’être déployé...

12273186892?profile=originalVenderosas de rosquillas en un rincon de Sevilla, 1881.
Manuel Wssel de Guimbarda (1833-1907)

Musée Carmen Thyssen, Malaga.

« Manœuvrer un éventail… Les Espagnoles y excellent ;
l’éventail s’ouvre, se ferme, se retourne dans leurs doigts si vivement,
si légèrement, qu’un prestidigitateur ne ferait pas mieux. »
                                                      Théophile Gautier (Voyage en Espagne, 1843)

12273021066?profile=originalRecién casados, 1905
Ricardo Lopez Cabrera (1864-1950)

Musée Carmen Thyssen, Malaga.

« L’éventail les suit partout, même à l’église où vous rencontrez des groupes de femmes de tous âges, agenouillées ou accroupies sur leurs talons,
qui prient et s’éventent avec ferveur. »
                                                                                 Théophile Gautier (1811-1872)


     L’éventail permet à la belle Andalouse comme à l’hirondelle des faubourgs parisiens de se rafraîchir, quoi de plus anodin, dans les chaleurs de l’été, au bal ou aux terrasses des cafés. Mais aussi d’échapper au carcan imposé du chaperon ou de la duègne. En toute discrétion, de solliciter la conversation ou de répondre au larron ainsi émoustillé.


12273187072?profile=originalFemme à l’éventail (Après le bal, 1908)
Pablo Picasso

Musée de l'Ermitage, Saint-Péterbourg.

« Nous les Espagnols, c’est la messe le matin, la corrida l’après-midi, le bordel le soir. Dans quoi ça se mélange ? Dans la tristesse. »

                                                                           Pablo Picasso (1881-1973)

12273186689?profile=original

     Sans chichi, sans flafla, ni lourd flabellum. Juste un léger, tout petit-petit triangle de tissu avec lequel on joue, qu’on plie et replie, qui déferle et papillonne dans un froufrou de dentelle devant le fringant fripon frissonnant.
Ainsi on pourra, dans le langage tel que codifié au XIXe siècle dont j’extrais ces cinq ou six conseils à la frétillante frivole :


Appeler à se montrer prudent,
en faisant tournoyer l’éventail dans sa main gauche :
Nous sommes épiés
Puis, le mettant devant son visage de la main gauche :
Si nous avions une conversation privée…
Alors, peut-être, l’éventail passant à main droite :
Suivez-moi !
Que déjà elle le porte à ses lèvres !
Embrasse-moi idiot !
Puis, le plaçant sur la joue droite…
Oui !…
Se pâme-t-elle aussitôt, emportée par le vent des soupirs…
… ?
Trop tard ! L’objet des désirs tournant dans la main droite :
J’aime un autre que vous !
Mon Dieu, quelle girouette, direz-vous ! Comme la plume au vent…
Mais que la coquette prenne garde, dans son courroux, de s’en battre l’œil !

12273187489?profile=original

Avec pour tout langage

Rien qu’un battement aux cieux*

... Sans ambages, Maupassant, qui connaissait les vertus et ne s’en laissait pas conter par la première bécasse venue, se pavanant, se prenant pour Vénus, inscrivit :


Sur un éventail


… Je n’écrirai rien que mon nom ;
Pour qu’en vous éventant la face,
Votre œil le voie et qu’il vous fasse
Sous le souffle frais et léger,
Penser à moi sans y songer.
                                                                             Guy de Maupassant (1850-1893)

* Nota : les deux premiers vers sont empruntés à Stéphane Mallarmé (1842-1898)

A la parade, peut-être aurait-il été mieux inspiré s’il avait pensé à un de ses devanciers :


Cinq ou six soupirs, cinq ou six fleurettes,
Cinq ou six : Hélas, je meurs d'amour...

                                                                         Jean François Sarasin (1615-1654)

Bah, « Dans la douleur, les sentiments se déploient comme un éventail. Ce que l’on vit est terrible, mais décuple aussi les sentiments. »
                                                                                   Marie Deroubaix (1953-2011)

Car « Si les plaisir du corps sont si vifs, quels sont ceux de l’âme ! Je parle de cette tendresse pure, de ces goûts exquis qui semblent faire distiller la volupté goutte à goutte au fond de nos âmes. »

Julien Offroy de La Mettrie (1709-1751)

12273189066?profile=original

Passant sur cette page, si cela vous a plu, déposez donc ici un petit mot.
Et retrouvez là mon premier billet à cet accessoire dédié :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/la-surprise-de-l-t-articles-de-fantaisie-et-mode-de-paris-1-4?xg_source=activity

Michel Lansardière (teste et photos)

Lire la suite...

Sans m’éventer, je pense avoir trouvé un sujet rafraîchissant pour cet été…

12273180074?profile=original

Et nul besoin pour cela de prendre un ton ombrageux, quand tout ne devrait être que zéphyr.

Mais... qu’est-ce là, qui volète devant vos yeux si doux, faisant écran, certes  affriolant, entre nous ?

12273180298?profile=original

L’éventail, puisque c’est bien là notre sujet, aurait été inventé en Chine,

12273181070?profile=originalFengbo, comte du Vent.
Chine (province du Fujian, fin XIXe)

Musée des Confluences, Lyon.

mais c’est du Japon que les Portugais l’ont rapporté en 1549.

12273182061?profile=originalEventail (bambou et papier)
Japon (époque d'Edo, XIXe siècle)

Musée des Confluences, Lyon.

En France, on dit qu’il arriva dans les bagages de Marie de Médicis (1575-1642), reine de France de 1600 à 1610, régente jusqu’en 1614.


Hé, c’est qu’en Italie nous avons de toutes ces choses-là dans nos coffres.

Claude-Ignace Brugière de Barante (1745-1814)

12273182677?profile=originalDanseuse tenant un flabellum
Figurine de terre cuite, Athènes ou Béotie (région de Grèce centrale),
4e siècle av. Jésus-Christ (musée de Laon)

Pourtant en Europe, l’éventail trouve son origine dans le flabellum, ce grand éventail monté sur une hampe, fait de plumes d’autruche, de larges feuilles palmées ou de plumes de paon, qui déjà servait à aérer pharaon. Que l’on retrouvera encore, agité par un suisse, pour éventer le pontife.

12273183257?profile=original Eventail écran proche de l'antique flabellum

(plumes de paon, Inde)


« Si l’empire appartenait à la beauté et non à la force,
le paon serait sans contredit, le roi des animaux »

Buffon (1707-1788)


Quoi de plus troublant que ces ocelles qui oscillent devant les yeux d’une belle en une valse à mille vents ?

12273183296?profile=original

     Toutefois, en France, l’éventail ne  se répandit qu'au XVIIe siècle, avant d’être l’accessoire indispensable à toute coquette au siècle suivant.
Henriette Louise de Waldner de Freundstein (1754-1802), dans ses Mémoires de la baronne d’Oberkirch, évoque un certain Méré, « éventailliste merveilleux », au faubourg Saint-Jacques, qui jadis fut la « voie sublime des couvents ». Cet artiste « loge dans un taudis ; il peint des sujets à la gouache de telle façon que certainement ni Boucher, ni Watteau n’ont rien fait de semblable. Sa manie est de n’y jamais mettre son nom. »


     Selon le temps, le lieu et l’usage, l’éventail servit à attiser le feu, à affrioler, comme arme de défense (taiji shan en Chine, gunsen et tessen au Japon) ou de séduction massive, chasse-mouche ou missive. L’éventail est un langage.
Et « un langage tout muet qu’il est, est d’autant plus dangereux qu’il n’est entendu que par l’esprit, et que l’esprit se plaît à l’entendre. », Jacques Boileau (1635-1716).
Langage codé, à l’instar de celui des mouches (cf. https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/une-journ-e-particuli-re-la-roche-guyon), qui évolua au fil du temps comme le verlan aujourd’hui.

12273183883?profile=original

Bon coche, je m’en vais vous guider. Ainsi, au XVIIIe siècle, en toute galanterie :


Cacher, de son éventail fermé, l’œil droit pour demander :
Quand vous verrai-je ?
Puis le porter, toujours fermé, à l’oreille gauche pour signifier :
Gardez notre secret
Les choses avançant, enhardie par tant d’audace,
dissimuler ses yeux derrière ce « paravent de la pudeur » pour dire :
Je t’aime
Voire le porter au cœur :
Je suis à toi…
Ne pas tarder car, ainsi cachée, bailler ostensiblement montrera à l’étourdi trop peu entreprenant qu’il peut s’éclipser :
Vous m’ennuyez !
Ce qu’on appelle maintenant se prendre un vent !
Vous qui auriez juré que la cause de son tourment était de vivre sans amant.

12273120296?profile=originalEventail de la première moitié du XVIIIe siècle.

Gorge d'ivoire, nacre et argent, feuille de parchemin peint à la gouache

(réserves du musée national de la Renaissance, Ecouen)

Il me reste à souhaiter que vous réserverez à ce billet meilleur accueil. Que vous y trouverez :

« Des bons mots, des saillies, quelques étincelles

(l’esprit à sa mousse comme le champagne),

mais plus encore de joie ».

«  Et que le goût du plaisir brille dans tous les yeux.

… Que toutes les voluptés viennent tour à tour,

 tantôt amuser, tantôt enchanter nos âmes.»,

 Julien Offroy de La Mettrie (1709-1751)

 

12273184873?profile=original


Bise à toutes, bon vent à tous !

Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

12273181668?profile=original

     L’éventail est aussi et avant tout un objet d’art qui fait appel aux meilleurs artistes et artisans pour les confectionner, ainsi qu’aux matières les plus nobles.
Poursuivons donc notre inventaire…

12273182092?profile=original… sur l’éventaire d’un antiquaire

Et autres souvenirs surannés, comme ce carnet de bal oublié…

Souvenirs d’une marguerite effeuillée

      Le moment est donc venu de rouvrir notre magasin des frivolités, de pousser la porte de l’atelier et nous remettre sur le métier.


      Les matériaux les plus précieux sont donc employés pour les brins (baguettes), panaches (branches extérieures), bouts ou flèches (la partie supérieure du brin, entre les branches), comme pour la feuille.

12273183058?profile=original

Les brins formant la gorge et bouts seront en bois (prunier, citronnier, ébène, santal, palissandre…), en os ou ivoire, en corne, nacre ou écaille de tortue, laque ou vernis Martin, argent ou or, pouvant enchâsser diamant, rubis, topaze.

12273182487?profile=original

La feuille pourra être de papier, tissu (taffetas, satin…), peau (vélin, peau de cygne, canepin, cabretille…), dentelles ou plumes, nacre ou ivoire... L’imagination est au pouvoir.
     On en trouvera de tout type, écran (fixe), brisé (des lamelles remplacent la feuille), squelette (à brins étroits et peu nombreux), sultane (à bouts décorés), à systèmes (à mécanismes), plié en aile de chauve-souris, palmette, cabriolet, cocarde, plein vol

On innove et lance sans cesse de nouveaux modèles stimulant ainsi tant les inventeurs que la clientèle.
Curiosité, certains sont même munis d’une lorgnette au théâtre des vanités.
Ah ! voir sans être vue tout en étant admirée…

12273183671?profile=original

D’autres, de type carnet de bal, sont munis d’un stylet, niché dans le panache, permettant de noter, au dos de chaque brin, le nom du prochain invité.


Toutefois ne comptez pas sur moi pour en éventer tous les secrets. Je sais rester discret.


Munie de ce hochet,


A toute heure, en tous lieux, la coquette se montre ;
Il n’est point de plaisir où l’on ne la rencontre :
Allez au cours, au bal, allez à l’Opéra,
A la foire, il est sûr qu’elle s’y trouvera.
                                                                                   Charles Perrault (1628-1703)

12273183871?profile=original

Les meilleurs artisans d’art seront au travail. Ce sont les tabletiers-éventaillistes, ivoiriers, dentellières, doreurs…

Je ne voudrais d’autre travail
Que d’agiter cet éventail
Pour faire une brise légère

Qui pousserait tout doucement
Le bateau vers un port charmant
Et vous seriez la passagère.
                                                                                            Paul Arène (1843-1896)


Alors,


Cet éventail si c’est lui
Aile tout bas la courrière*
                                                                              Stéphane Mallarmé (1842-1898)

12273184657?profile=original
Il va bientôt pleuvoir bergère
Allons sous ma chaumière…

Et, vous qui à la plage peut-être, profitant des deniers beaux jours, encore vous prélassez, doigts de pied en éventail, postez, je vous en prie, quelques mots sur cette page.

12273184100?profile=original

Michel Lansardière (texte et photos)

* Evente doucement la messagère (bienvenus sont les commentaires).
J’ai extrait et inversé ces deux vers de Eventail de Madame Mallarmé.

P. S. : retrouvez ici mes précédents billets autour d'un éventail :

La surprise de l'été :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/la-surprise-de-l-t-articles-de-fantaisie-et-mode-de-paris-1-4

Je sème à tout vent :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/je-s-me-tout-vent-fantaisies-estivales-autour-d-un-ventail-2-4

Lire la suite...

12273173699?profile=originalLe vihâra (monastère bouddhique) de Rajamaha, Dambulla

     Le bouddhisme s’est donc répandu depuis l’Inde où il est né, au troisième siècle avant Jésus-Christ, et s’est profondément enraciné au Sri Lanka.
L’art du Sri Lanka s’est donc naturellement inspiré de l’art indien. Et c’est particulièrement vrai à Sirigiya où les fresques de la fin du Ve siècle peuvent être comparées à celles d’Ajantâ, datant du Ve au VIIe siècles.
Mais à Dambulla, cet art s’est mêlé d’influences tamoules très marquées. Tamouls qui se répandirent d’Inde du Sud à l’île de Ceylan, particulièrement à l’est et au centre du pays.
D’où un style original, dit de l’ « Ecole kandyenne ».
      Dambulla est par ailleurs situé au centre géographique de l’île. Point culminant à 160m au-dessus de la plaine et rayonnant sur tout le territoire. Rangiri, le « Rocher doré », ainsi appelé dans les temps anciens pour ses statues recouvertes d’or, était le lieu tout indiqué pour porter la doctrine. Bien sûr, peintres et sculpteurs, tout à leur vénération, sont restés anonymes, suivant ainsi la voie du renoncement.

12273174667?profile=originalDambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle

Au 1er siècle avant J.-C., au temps du royaume d’Anuradhapura, les moines, qui déjà occupaient les grottes, offrirent leur protection au roi Vattagamani Abhaya en exil. En retour, rétabli sur son trône, il y fit bâtir un temple. Qui depuis ne cessa d’embellir et de rayonner.

12273175087?profile=originalBouddha, lors de ses pérégrinations, fit trois fois halte à Lanka.

Et trois fois par jour battent les tambours en l'honneur de Bouddha.

     L’art populaire s’est développé, que l’on retrouve notamment dans les danses et les masques.
Une tradition qui perdure et un rapprochement entre certaines peintures, ces masques, la danse et la musique kandyennes peut être pertinent. Ce que je vais tâcher de démontrer ici.
Avec ces figures de danseuses célestes au masque « princier »…

12273175665?profile=originalApsaras (déesses)

Les fleurs qu'elles tiennent semblent exprimer la fertilité de la terre.
Dambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle

12273176073?profile=originalDanseuse kandyenne

12273176457?profile=originalApsaras et ganharvas

L'influence tamoule s'y fait sentir.
Dambulla, peinture à la détrempe, XVIIIe siècle

     Les gandharvas, quant à eux, étaient les compagnons des apsaras, musiciens et chanteurs au paradis d’Indra, Seigneur du Ciel, dieu de la guerre et de la foudre, le Svarga. Le Svarga était situé au-dessus du mont Meru, montagne mythique dont, selon la légende, le sommet se serait détaché pour former le… Sri Lanka.


Mais permettez-moi de poursuivre mon interprétation…

12273176675?profile=originalMasque cinghalais

Si les masques sri-lankais sont généralement peints de couleurs vives, j’ai préféré photographier ces pièces brutes qui nous paraissent plus authentiques.

... Ou masques grimaçants (démons, des moines et des merveilles)…

12273177268?profile=originalL’armée de Mâra, l’esprit du Mal, et ses démons attaquant le Bouddha
Plafond de la grotte principale, Dambulla, XVIIIe siècle.

12273177658?profile=originalAsuras ou rakshasas (démons)
Masques traditionnels utilisés dans les danses de démons du sud de l’île.

N’ayez crainte, mes amis… laissez-vous entraîner sur la piste et entrez dans la transe…

« Tel un peintre que terrifie l’effroyable monstre qu’il vient de peindre,
le vulgaire est épouvanté par le samsâra* »
                                                                                                      Mahâyânavinsikâ

12273177476?profile=originalDanseur masqué (Kandy)
Le pouvoir des charmes sur l’enfer
et sur les 27 démons qui accablent l’humanité.

     Ces danses, rythmées au son des tambours et autres percussions (athrabane, pantheru, udekki), visent à s’attirer la bénédiction des divinités protectrices, tout en luttant contre les influences maléfiques.
Rites de conjuration issus d’un fonds ancien accordé aux usages bouddhiques qu’accompagne une musique aux motifs, là aussi, répétitifs, organiques, à la force hypnotique.
Instruments traditionnels, déjà présents dans les festivités de la Cour**, et danses exécutées par les hommes. Ces dernières s’ouvrent aujourd’hui aux femmes.


      Formellement, on peut m’objecter qu’un septième précepte bouddhique veut que l’on s’abstienne de danse, spectacle, musique et chant. Qu’il est donc peu probable que ceux-ci aient influencé la peinture d’un monastère. Mais, outre que je ne suis pas un spécialiste, il n’entre pas dans les cinq règles de base du bouddhisme (ne pas nuire aux êtres vivants ou tuer, ne pas prendre ce qui n’est pas donné, ne pas avoir une vie sexuelle désordonnée, ne pas mentir ou blesser, ne pas s’adonner aux drogues), strictement applicables à tous. Cette observance ne serait donc réservée qu’aux seuls bonzes. Les peintres n’étaient pas nécessairement moines, une certaine perméabilité aux empreintes extérieures induites possible (d’où un emprunt dans l’enduit !), n’empêchant pas de se conformer au canon. Et, comme aurait dit le Bouddha lui-même :


« L’enseignement est semblable à un radeau qui est fait pour traverser,
mais auquel il ne faut pas s’attacher. »

12273178079?profile=originalA 29 ans Bouddha renonça à sa vie princière pour l'ascèse.

Mais seule la "voie médiane", entre luxure et ascèse,

le recours à la méditation, lui permit de gagner l'illumination.


Fermez le ban !


12273178463?profile=original

     Au final, ce sont donc cinq grottes aménagées en sanctuaires abritant 157 statues et des peintures murales sur plus de 2000m2 (dont 153 représentations du Bouddha), le tout formant le Temple d’Or de Dambulla, classé au Patrimoine Mondial de l’Humanité. Les trois principales sont le « Temple du Roi divin » et son Bouddha couché de 14 mètres, sculpté à même le roc avec de subtils plis qui lui donnent grâce et mouvement. Le « Temple des Grands Rois » et ses 53 statues du Maître, dont là encore un Bouddha couché de 15m et des fresques du XVIIIe siècle. Le « Nouveau Grand Temple », toujours des statues et 1800m2 de fresques relatant les épisodes de la vie du Bouddha. Les deux autres grottes sentent la peinture trop fraîche, mais montrent que l’art est toujours vivant.
      Temps arrêté, peinture « tempérée » qui se déploie sur les parois ondulantes, ces fresques vous emballent de l’intérieur, vous enveloppent, déroulant les scènes de la destinée de L’Illuminé en autant de contes de l’anté-Christo (pardonnez ce vilain jeu de mots) qui s’attachent à l’esprit et l’invitent à méditer.

12273178286?profile=originalGrand Bouddha couché
dans l’attitude du parinirvâna
La quiétude de L’Eveillé dans un somptueux plissé.

12273178663?profile=originalSculptures à profusion et voute peinte dans le moindre recoin.

Envoûtant, non ?

     Alors certes le tracé est souvent un peu gauche, les couleurs trop tranchées, les thèmes récurrents, la lecture des œuvres difficile à appréhender, les repeints plus ou moins récents fréquents, mais l’effet d’ensemble est saisissant et j’espère vous avoir finalement montré combien ce peuple et cette culture étaient attachants.
Quoiqu’il en soit, de la visite de ce temple rupestre, le plus important du pays, se dégage une impression de grande sérénité.

12273178890?profile=original


Vous pouvez retrouver la première partie de cet article sur :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/d-ambulations-autour-de-l-art-dambulla-sri-lanka-1-re-partie

12273179061?profile=original

Ayubowan

12273179086?profile=original... Au revoir

* Samsâra : cycle sans fin des naissances et des morts, dans lequel les actes de vie antérieurs (karma) entraînent les vivants jusqu’à ce qu’ils parviennent à la délivrance finale (nirvâna). Les exégètes remarqueront par ailleurs que cette citation se rapporte au mahâyâna, le bouddhisme du « Grand Véhicule », suivi au nord et à l’ouest de l’Asie. Or le Sri Lanka embrasse l’hînayâna, la voie du « Petit Véhicule ». Mais, sans rejeter cette réfutation possible d’un revers de la main - c’est pas bien, tends-la plutôt à ton prochain -, allez trouver des citations abordant la peinture ! Qui après tout est mon sujet.


** Le dernier roi de Kandy fut déposé par les Anglais en 1815. Quant au mouvement nationaliste cinghalais, il naquit ici, à Dambulla, en 1848, un siècle avant l’indépendance du pays.


Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

"Nous construisons un monde nouveau"...

Aaah Paul Nash...Paul Nash, quoi.


C'était un enfant malheureux et solitaire, Nash ; sa mère était gravement malade psychologiquement, avec des accès de violence terrible, la maison était un caveau.
Le petit Nash prend l'habitude de fuir se réfugier dans la forêt. A l'âge de 11 ans il a une révélation : la Nature est vivante. Elle est dotée d'une pensée propre. Elle nous observe, nous les pauvres humains. Elle vit à son rythme, et si nous ne voyons pas les pierres se déplacer, c'est parce que nous sommes, nous les hommes, devenus artificiels.
Il décide de consacrer sa vie à Peindre le "Génie de la Nature".
Ado, il fuit l'Académie. Rester enfermé des heures à dessiner des modèles, très peu pour lui. Du reste, peindre l'être humain ne l'intéresse absolument pas.

Il se lance dans une oeuvre magnifique, dans ses dessins et ses toiles la Nature semble nous parler, nous révéler des choses indicibles.
Et l'AIR. L'air dans ces toiles...je ne connais pas d'autre Peintre ayant réussi à peindre la sensation de l'air, du pouvoir de respirer.
Il fallait un asthmatique pour peindre comme ça (il en mourra, de son asthme).
Et cette palette, unique...

Et puis un jour...
Un jour c'est 1914, il a 23 ans, et il se retrouve dans les tranchées...
Il ne comprend pas, Nash.
Il n'arrive pas à prendre la guerre au sérieux. Il voit ça comme un immense jeu débile, il voit avec les yeux de la Nature, il ne voit que des fourmis occupées à s'entre-dévorer, et pour quoi ?
Alors qu'il est occupé à dessiner hors de sa tranchée (Nash...), il glisse sur la boue, tombe, et se brise plusieurs côtes.
Quelques jours plus tard, pendant qu'il est à l'hôpital, c'est la triste bataille de Pasendaele qui commence. La plus meurtrière de la guerre. Un carnage sans nom. Une vision d'apolcalypse.
Plus de 200.000 morts en une poignées de journées infernales.
Toute sa compagnie est décimée.
Tous ses amis sont massacrés.

Nash s'en veut, il a honte d'avoir survécu.
Il se met à être obsédé par une chose : devenir Peintre de guerre. Il sollicite l'armée qui refuse (soyons sérieux, Messieurs. La Peinture de guerre, c'est la représentation de batailles, de hauts faits, de blessés, de héros ! Qu'est-ce qu'il veut, le paysagiste, là ?!).
A force d'écrire partout, il arrive à fatiguer les gradés.
"Ok, Nash, va donc peindre la guerre, fais-nous rire"...

Et Paul Nash va réaliser ce qui est, à mon sens, une des deux plus incroyables séries de peintures de guerre du 20e siècle.
Il va prendre la guerre "à rebours".
Pas de corps ensanglantés, pas d'actes "héroiques" à la con.
Non.
La guerre vue...par la Nature.
Le regard d'un homme qui n'en a rien à foutre, lui, des bonnes mauvaises raisons que l'humain se trouve pour avoir juste le curieux plaisir de détruire.

Et, en 1918, il peint le chef-d'oeuvre de la série.
Le sol comme un corps labouré de cicatrices, les organes sans dessus-dessous...les arbres pétrifiés, calcinés, comme des mains lancées vers le ciel...et ce soleil, blanc, froid, qui ne réchauffe plus rien.

Et Nash, que ses amis décrivent comme "incapable d'une action cynique", Nash le rêveur, Nash donne un titre terrible à son tableau.

"We Are Making a New World".

Aaah Paul Nash...Paul Nash, quoi...

Paul Nash (1889-1946)
"We are making a new world"
Huile/toile
1918.

12273178454?profile=original

Lire la suite...

12273171855?profile=originalBouddha… Bouddha… Bouddha


Le Sri Lanka est profondément marqué par le bouddhisme originel. Il en conserve la forme la plus pure et son art en est le meilleur vecteur.
      Si le Bouddha a interdit aux moines l’exercice de certains arts libéraux, la médecine comme le commerce, le tabou ne touchait pas la production et la diffusion d’images décoratives comme figuratives. Mais elles sont toujours symbolistes, idéalisées. D’où notre impression d’uniformité, de répétition, liée aux archétypes ainsi créés.
Au contraire la peinture devait être le propagateur de la foi le plus efficace. Le sittara (peintre) le véhicule le plus sûr. Peintre porte-parole, traçant la voie d’une vie meilleure pour le pécheur. Couleurs et formes menant à la connaissance, à la réflexion, à la sagesse et à l’éveil. Comme dans notre imagerie médiévale ma foi.

12273172069?profile=originalPeinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle


« Lorsque le sittara peignait un arbre sur un mur, il ne cherchait pas à représenter un arbre particulier, mais il voulait évoquer un symbole et un type idéal. Cette image était en un sens l’âme ou l’esprit fondamental de tous les arbres de l’espèce choisie par l’artiste. »,
                                                         Diyogu Badathuruge Dhanapala (1905-1971)

     Ici la peinture se déploie non pas sur la toile (bien qu’aujourd’hui elle se retrouve sur internet), mais sur la paroi rocheuse ou le mur des temples. Ce qui revient à employer deux techniques souvent confondues. La fresque proprement dite, et la peinture à la détrempe.
Dans la première les couleurs s’imprègnent dans le plâtre et s’intègrent à la surface.
Dans la détrempe, les couleurs sont peintes par couches sur la surface du plâtre.

12273172872?profile=originalScènes de la vie du prince Siddharta

- le futur Bouddha -
parti en quête de la vérité.
Peinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle

     La fresque vraie se révèlera au final plus pérenne, avec des couleurs naturelles, douces et fondues. Certes le choix des couleurs, appliquées sur l’enduit encore humide, est limité. L’ocre, le jaune, le rouge dominent, soulignés de noir. Puis le vert tendre, malachite, le bleu, parcimonieux, rehaussent les tons sourds de l’ensemble.
     Avec la détrempe, les couleurs sont plus vives, plus variées peut-être, le trait plus net. Mais ces peintures tendent, à la longue, à s’écailler. D’où les nombreux repeints ultérieurs, les couches successives qui altèrent le dessin. Et le style se perd.
     Un style primitif, sensuel et libre, tout en restant dans les canons de la foi, pour les premières.
     Un style plus tardif, naïf souvent, plus emprunté, pour la peinture à la détrempe. Ce qui trahit un certain déclin, qui correspond aussi, soutenons l’hypothèse, à l’occupation de l’île par, tout à tour, les Portugais, les Hollandais, les Anglais.

12273173458?profile=originalScènes de la vie du prince Siddharta.
Peinture à la détrempe, Dambulla, XVIIIe siècle

     Arrivé à ce moment de ma présentation, je dois vous avertir que vous ne verrez pas d’images du premier style. La raison en est simple, quoique pas toujours compréhensible !

12273173856?profile=originalPeinture à la détrempe, Dambulla


" Ceux qu’aveuglent attraction et répulsion ]…[ ne peuvent comprendre une telle Doctrine qui s’annonce à contre-courant, subtile, profonde,
difficile à saisir. "

 Sûtra bouddhique

     A Sigiraya, le Sihagiri, « Rocher du Lion », abrite dans une saillie rocheuse, à franc de falaise, d’admirables fresques, datées du Ve siècle. Les plus belles et originales qui soient, les plus connues aussi. Les photos, encore récemment, étaient autorisées. L’endroit est bien gardé, les visiteurs pas si nombreux (un escalier à la verticale y mène, par une chaleur éprouvante), la lumière naturelle suffisante. Mais j’imagine que les obsédés du flash (ici parfaitement inutile, pire néfaste) ont sévi. L’interdit s’est imposé.
      A Dambulla, le Rangiri, « Rocher doré », couvre une série de cinq grottes protège 150 Bouddhas et de nombreuses peintures à la détrempe. La pénombre règne, les peintures, pour les raisons ci-dessus expliquées, fragiles. Le flash est donc nécessaire. Là, la photographie, naguère interdite, est maintenant autorisée. Si j’ajoute que les deux sites sont protégés et inscrits au Patrimoine mondial de l’Unesco, je ne m’explique pas la logique de ces décisions (d’autant qu’au musée archéologique de Polonnaruwa, où les œuvres relèvent de la statuaire et de l’art décoratif, donc en pierre ou en bronze… les photos sont aussi prohibées) !
     Cette longue digression pour vous dire que nous ne verrons que des illustrations du second style. Je me limiterai, pour l’essentiel à Dambulla, le plus caractéristique de ce dernier, où j’ai donc pu saisir les scènes les plus explicites.
Pourtant les « Demoiselles du Ciel » de Sigiraya, princesses, servantes ou apsaras (nymphes célestes) sont si graciles, élégantes et sensuelles « La poitrine nubile et pleine, la taille mince à peine plus forte que le cou, les bras fuselés et les mains exquises comme de longues fleurs » qu’on les regarde, lascives, sans se lasser. Tout n’est vraiment ici qu’harmonie, luxe, calme et volupté, pour le poète inventé.
Regrets.

12273174067?profile=originalJeune femme en costume traditionnel cinghalais

     Arrachons-nous, je sais, c’est dur, à ces Demoiselles des nuages pour nous intéresser enfin à Dambulla, plus précisément au vihâra (monastère) de Rajamaha. Cette fois vous ne le regretterez pas.

12273174272?profile=original

Peinture à la détrempe, Dambulla

« Allez, ô moines ! et voyagez pour le bien et le bonheur d’autrui, par compassion pour le monde, pour le bien-être des dieux et des hommes. »

12273175065?profile=original

A suivre...

12273175469?profile=original

 

Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

12273166068?profile=originalatt. au Tintoret (Jacopo Robusti dit Tintoretto, 1518-1594) :
Vierge à l’Enfant (détail)

     La soif de Nélie Jacquemart ne s’étanchait pas comme cela ! Elle voyagea beaucoup, en Italie surtout, et en ramena moult souvenirs qui sont autant d’œuvres qui permettent de mieux appréhender sa personnalité. Des salles ou vitrines sont ainsi dédiées aux arts de l’Egypte, de l’Inde et de Ceylan, de Birmanie… Assemblant tous ces objets les plus personnels, réunis avec passion et patience, dans son domaine privé, intime, et cependant ouvert sur le monde, avec son jardin à la française, non-clos en son extrémité, laissant ainsi le promeneur à sa rêverie grâce aux échappées sur les champs et forêts. Rejoignant en cela par la pensée, ici précisément, René-Louis de Girardin (1735-1808), feu son voisin :


« Le jardin, le bon ton, l’usage peut être anglais, français, chinois ;
les eaux, les prés, la nature et le paysage, sont de tout temps, de tout pays. C’est pourquoi, dans ce lieu sauvage, tous les hommes seront amis,
et tous les langages admis. »


Un parc fantasque et un musée, certes un peu hétéroclite, composés pour ce faire et vous plaire « ni en jardinier, ni en architecte, mais en poète et en peintre. »

12273166652?profile=originalJacques Vigoureux-Duplessis (1680-1732) :
L’ambassade du Siam à Paris en 1686 (réalisé en 1715)

Peintures, sculptures, tapisseries, meubles… ornent les différentes salles, laissés tels que leur propriétaire les a déposés. Un fil que nous continuons à dérouler ici…

12273166891?profile=originalBarthel Bartholomaeus Bruyn le Vieux (1493-1555 ;
peintre allemand qu’un cartel nomme curieusement Bartolomeo Bruya !) :
Docteur Petrus Von Clapis

12273167274?profile=originalAttribué à Govert Flinck (1615-1660) :
Portrait d’un médecin
digne de son maître Rembrandt (il fut son élève de 1633 à 1636).

S’il arrive que l’élève égale son maître, on ne retient généralement que ceux qui les surpassent, ou divergent.

12273167495?profile=originalAbraham Susenier (ca 1620-1672 ;
que l’on a pu confondre avec Abraham Van Beijeren, 1620-1690) :
Nature morte (détails)

12273167695?profile=original


Cette nature morte, de taille exceptionnelle, est du type des Ontbijtje (« petits déjeuners ») ou des Banketje (« table servie »), alors très en vogue dans la peinture néerlandaise, alliant pompe et virtuosité.

12273168272?profile=originalDonnatien Nonnotte (1708-1785) :
Dame jouant de la vielle


12273168481?profile=originalBerger, Allemagne, 16e siècle, et
Ange de l’Annonciation, Italie, fin 14e.

     Chaalis ce sont aussi maints memorabilia centrés sur la vie et l’œuvre de Jean-Jacques Rousseau dans une galerie, récemment agrandie à l’occasion du tricentenaire de sa naissance, qui lui est réservée. Rousseau qui connut ses derniers jours heureux tout près de là, puisqu’il mourut auprès de ses hôtes, le marquis René-Louis de Girardin et sa femme, au château d’Ermenonville le 2 juillet 1778.
     Mais ce n’est pas mon sujet aujourd’hui. D’ailleurs vous trouverez concentrées des activités pour tous les goûts et pour tous les âges dans un périmètre très resserré, avec le parc de loisirs de la Mer de Sable, le parc Jean-Jacques Rousseau, la forêt d’Ermenonville… pour flâner, randonner ou vous détendre.


     Car oui mes amis, dans ce lieu exquis où se mettre au vert, « la terre offre à l’homme dans l’harmonie des trois règnes un spectacle plein de vie, d’intérêt et de charmes, le seul spectacle au monde dont ses yeux et son cœur ne se lassent jamais. », Jean-Jacques Rousseau.


12273168901?profile=originalNélie Jacquemart-André en sa dernière demeure
Gisant (bronze, 1925) réalisé par Denys Puech (1854-1942),
pour le tombeau où elle repose en la chapelle Sainte-Marie.

Nélie à la palette, en paix, pour qu'à jamais se mélangent les couleurs.

12273169452?profile=originalAutoportrait de Nélie Jacquemart à 39 ans

Pour un panorama complet, vous pouvez vous reporter au lien suivant :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/un-bis-pour-jacquemart-andr-une-bise-n-lie-1-re-partie

12273169276?profile=original

Les ruines de l’église abbatiale (au premier plan) et la chapelle Sainte-Marie construite sous Saint Louis

12273169877?profile=original

L’abbaye, fondée en 1137 par Louis VI le Gros

Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

12273161289?profile=originalNélie Jacquemart à Rome :
Henri Regnault (1843-1871)
Dessin à la mine de plomb, 1866.

Bien sûr le musée Jacquemart-André de Chaalis est un second musée. Bien sûr beaucoup des œuvres exposées sont attribuées à…, de l’école de…, entourage de…
Mais que d’éclectisme, de curiosités, de choix intimes de la part de Nélie Jacquemart qui vécut ici ses dernières années. Et puis, excusez du peu, vous y trouverez du Giotto, du Bellegambe, du Tintoret, du Van Loo, de Champaigne…
Bien sûr j’ai déjà beaucoup écrit sur Chaalis, notamment à propos des fresques du Primatice (un ensemble simplement exceptionnel) de la chapelle Sainte-Marie, édifiée sous Saint-Louis et ainsi décorée sous l’impulsion du cardinal Hyppolite d’Este dans les années 1540… Article, Un calice pour le Primatice à Chaalis, que vous pouvez retrouver ici :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/un-calice-pour-le-primatice-chaalis

Bien évidemment je n’ai pas oublié Nélie Jacquemart, œil averti, goût assuré pour l’art… Elle-même portraitiste impeccable, fort courue de son temps. Amie par ailleurs de Rosa Bonheur, peintre animalière qui connut énormément de succès, et que j’aurais peut-être le plaisir de vous présenter…
Une évocation que vous (re)découvrirez si votre cœur bat à l’unisson du mien pour cette artiste de talent et grande collectionneuse, avec Le domaine royal de Chaalis :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/le-domaine-royal-de-chaalis

Et Nélie en son domaine :

https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/n-lie-en-son-domaine-chaalis-3e-partie

     Alors laissez-moi vous délivrer quelques-uns de mes coups de cœur pour cet étonnant musée, installé dans les bâtiments d’une ancienne abbaye du XVIIIe siècle située dans la forêt d’Ermenonville.
A commencer par les maîtres anciens situés, principalement, dans la salle dite « Cuisine des moines » et la galerie haute. En premier lieu nous remarquerons ces deux rares œuvres de Giotto récemment restaurées aux ateliers du Louvre, qui naturellement intégrèrent la rétrospective Giotto e compagni consacrée au maître et à ses assistants en 2013. L’absence de ces deux panneaux majeurs fit que je fis l’impasse sur ce musée bis lors de mon premier envoi. Pas de bisbilles les voici réunis.

12273162301?profile=originalAmbrogiotto di Bodone (ca 1267-1337) dit Giotto
dont le style annonçait la Renaissance :
Saint Jean l’Evangéliste

12273163056?profile=originalPar la barbe du prophète !...
Ces deux panneaux, Saint Jean et Saint Laurent, formaient peut-être un même polyptique avec la Vierge à l’Enfant de Washington et le Saint Etienne de Florence, à l’origine exécutés pour la chapelle Pulci Berardi de l’église Santa Croce à Florence (détail)

12273163466?profile=originalGiotto :
Saint Laurent

12273164256?profile=originalJean Bellegambe (1470-1534),
le Maître des couleurs :
Saint François

12273164081?profile=originalDomenico Panetti (1460-ca 1530), de l’Ecole de Ferrare :
Saint Jérôme

12273165272?profile=originalAttribué à Nicolo Alunno (1430-1502) :
Saint Sébastien (ca 1480)

12273165673?profile=originalGiovanni di Niccolo Mansueti (1465-1527), de l'Ecole vénitienne :
Pieta (détail)

12273166257?profile=originalEntourage de Joos van Cleve (Joos van der Beke, dit ; 1484-1540) :

La Vierge aux cerises

Son modelé léonardesque, et ce sfumato léger et vaporeux qui nimbe la Madone,

ne peuvent laisser indifférent.

Nous poursuivrons cette visite dans le deuxième volet que je consacre à ce musée un peu oublié, hors des sentiers battus il est vrai.

Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

Beauté de la nature

Une aquarelle d'Adyne Gohy

Inspirée par une photo

de

Raymond Martin

12273147270?profile=original

a inspiré

un poème

de Raymond Martin

Calanche di Piana

Les Calanques de Piana

en Corse

 

Cathédrale Méditerranéenne façonnée  par les âges, aux  parures  d’ocres   de  différentes facettes 

 Selon le bon vouloir de l’astre solaire   ou du courroux sans bornes  de  Poséidon,

Tu nous  offres,  paisible, un peu des entrailles de cette sublime terre  Corse.  

 

Tes  flancs exacerbés  ressemblent aux jambes  des Titans,  dont les pieds  baignent  dans les reflets

D’un bleu profond de l’onde marine ,  calme ou intrépide de cette mer nourricière.

Onde bienfaisante calmant les esprits, face  à  l’ardeur du soleil   à son sommet. .

 

Un mélange de sons  se devine quand, fermant les yeux , on laisse libre cours à   son âme aux   

Aguets. Le dialogue du vent et  de la mer  cher à Debussy, se lie avec  les voix  venues du passé,

De Phéniciens  ou de Génois  ventant leurs marchandises  aux autochtones, myrte et pacotille.

 

Peut-être  aussi la voix allègre du pêcheur  satisfait par ses prises de rougets et  autres  mérous,

Accompagnée de la douceur  fruitée  d’un petit rosé local , pour faire  oublier la fatigue accumulée

A  manœuvrer le « pointu »,   garant d’une pêche respectueuse du  fond marin. 

                       

Nienti sta sera

nienti à punenti

nienti à l’alba

nienti

sta sera m’addurmentu in prosa

Rien ce soir

Rien au couchant

Rien à l’aube

Ce soir je m’endors en prose.

( Poème de Marianne Costa en Langue Corse )

Un partenariat d'

Arts 

12272797098?profile=originalLettres

Lire la suite...

Si vous avez aimé mon fameux article sur les Mosso...

Chères, Chers amis (es) me revoici, je vous écris cette lettre sous forme de billet, car je viens de passer quelques jours un peu compliqués (problèmes de santé à présent résolus ...il faudrait que je travaille un peu moins), mais cela m'a empêché de rouvrir mon ordinateur pour valider vos commentaires, vous répondre et vous remercier !

Voilà qui est fait.

Je suis très heureux de faire partie de votre communauté, vous remerciant pour votre dynamisme, votre créativité, votre défense des arts et de la culture francophone, votre humanisme, votre gentillesse...

Je m'arrête là car je ne voudrais pas que vous considériez mes propos plus flatteurs que sincères, en regrettant de ne pouvoir m'impliquer davantage dans Arts et Lettres (essentiellement à cause de mes déplacements incessants, et de longues périodes coupées d'Internet).

Et je reviens à mon article et vidéo consacrés à Wang, sa grand-mère, à la petite fille du lac et au peuple Mosso, qui nous ont si bien reçus en Chine.

Ce peuple est étonnant, déconcertant, touchant, nous prouvant s'il en était nécessaire que nos rapports avec des sociétés très différentes des nôtres peuvent être harmonieux, constructifs et enrichissants, dès l'instant où nos comportements obéissent à l'écoute d'autrui, le respect, la volonté d'échange, le partage, l'estime de l'être par-delà toutes les différences...

Avant tout, je vous copie cette nouvelle aquarelle d'assez grand format (65 x 78 cm) extraite des travaux réalisés "post-voyage", s'appuyant sur études de terrain et photos.

12273145883?profile=originalIl s'agit d'une de ces jeunes femmes qui nous accompagnaient dans la traversé du lac, lorsque nous embarquions sur les belles pirogues monoxyle qui nous emmenaient sur l'île sacrée de Liwubi...

   Pour m’aider en votant pour moi à partir de l’article précédent auquel je renvoyais lors de mon précédent billet : descendez en bas de page de cet article (après la vidéo), et cliquez sur http://www.easyvoyage.com/easygame (ce lien est situé au-dessus de la reproduction de mon aquarelle de la femme en pirogue au foulard rose de la fin d’article).

Quand vous arrivez sur la page d’EasyVoyage, cliquez sur "Voter", vous arrivez alors sur la première page de candidats participant au concours auquel je suis inscrit.

Passez ensuite 13 ou 14 pages (soit 14 listes environ) avant d’arriver sur la liste de candidats où se trouve la vignette de mon article (vous la reconnaîtrez car c’est l’aquarelle de Wang et de sa grand-mère) : normalement, je suis nommé "Alain" à gauche de cette vignette (le lien avec mon article étant en-dessous).

Cliquez maintenant sur "Je vote" (merci de le faire dans la « foulée » car  il ne reste pas beaucoup de jours et il me faut au moins 10 votes pour être présenté au jury).

Il vous faudra mettre votre nom, prénom + adresse e-mail dans la fenêtre de vote qui s’ouvre, et c'est tout !

Si rien ne se passe à cette étape, il vous faut remonter dans la page pour arriver à cette fameuse fenêtre qui est peut-être hors d'écran quand vous votez.


Je vous assure que si par hasard le jury appréciait ma démarche vis-à-vis des voyages, le sens que je leur donne à travers l'aquarelle et la discipline des carnets, le nombre de voyageurs (néophytes ou confirmés) que j'entraîne et forme chaque année dans mon sillage à travers le monde, le partage que j'en fais dans les réseaux sociaux …et que  je gagne, je réaliserais pour vous un carnet de voyage et un reportage vidéo - aquarelle dont je publierai ici les meilleurs extraits dans l'esprit de l’article consacré aux Mosso !

Il viendra s'ajouter aux nombreux reportages déjà consacrés ici aux voyages réussis grâce à l’art de aquarelle !

Rendez-vous donc sur EasyVoyage, votez pour mon article, je vous en remercie beaucoup :

 http://www.easyvoyage.com/easygame  !

Lire la suite...

12273142091?profile=original

« La splendeur grave et splendide des anges musiciens

de Melozzo da Forli. »,

Robert Sabatier (La mort du figuier)

Nous avons tous, ou presque, découvert Melozzo da Forli sur Arts et Lettres, grâce aux deux superbes vidéos réalisées par Robert Paul.

https://artsrtlettres.ning.com/video/la-part-des-anges-part-two-les-anges-musiciens-de-melozzo-da-forl

Pourtant Melozzo reste une énigme, un voyageur incognito du Quattrocento.
Aussi, puisque l’heure est aux réjouissances et aux vœux, qu’il me soit permis de vous présenter à cette occasion Melozzo da Forli (Melozzo degli Ambrogi, dit ; 1438-1494), ce peintre italien né à Forli en Emilie-Romagne. Ses « Anges musiciens » seront nos aimables hôtes.

12273143052?profile=original

Au printemps les anges volent
Comme de jolis papiers
En laissant leurs auréoles
Tomber à leurs pieds.
Les anges.

Claude Nougaro

Pourquoi ce choix ? Outre le sujet qui se prête particulièrement bien à la célébration de Noël, j’ai trouvé que ce peintre, bien oublié, d’une grande délicatesse et surtout d’une grande modernité, valait bien d’être lui aussi honoré.
C’est aussi un hommage au créateur de notre réseau, véritable passeur, qui appréciera, je crois, que son travail soit ainsi relayé.
Car Melozzo demeure malgré tout un quasi inconnu. D’ailleurs « La cité idéale » aux divines proportions, celle que l’on voudrait bien advenir sur terre, de Piero della Francesca, qui pose les bases de la peinture moderne, pourrait bien lui être définitivement attribuée. Mais fi d’arguties, point d’analyse stylistique comparative ici, retournons à nos putti.
« Les anges musiciens », de cette œuvre peinte à fresque qui décorait l’abside de l’église des saints Apôtres à Rome, ne subsistent que 14 fragments. Exécutée vers 1480, elle fut détruite en 1711. Mais quels fragments !
Tout est aérien, tout est joie, intériorité, lumière. Le trait est assuré et fin, la perspective sublime, le mouvement palpable. Quand la distribution dans l’espace et la lumière laissent le spectateur hors du temps.

12273143262?profile=original

« La musique met l’âme en harmonie avec tout ce qui existe. »,

Oscar Wilde

Si nous admirons, à juste titre, ses illustres contemporains, Fra Angelico, Mantegna, Raphaël, Botticelli, Pérugin, della Francesca… pourquoi Melozzo est-il si négligé ?
C’est que de Melozzo il ne subsiste sinon rien, du moins son travail, tronqué ou détruit, a vraiment subi les outrages du temps. Ainsi, outre ces fragments aujourd’hui présentés, son ultime chef-d’œuvre, son couronnement, les fresques de la chapelle Feo de San Biaggo furent anéanties en 1944 lors d’un bombardement. Il avait atteint là la perfection dans le rendu de la perspective albertienne jusqu’à atteindre l’illusion, faisant de lui un maître du trompe-l’œil qui réussit même, par sa composition, à faire mentir Cioran, « La musique est une illusion qui rachète toutes les autres. »

Subséquemment, de Melozzo, nous nous ferons l'apôtre.

12273143658?profile=original


Il a osé des contre-plongées renversantes, des angles de prise de vue inédites à l’effet cinétique saisissant.

12273143683?profile=original

« Il n’y a pas de différence entre amour et musique :
l’écoute d’une émotion authentique égare absolument. »,

Pascal Quignard (Vie secrète)

Sa formation initiale, il la doit certainement à son concitoyen Ansuino da Forli, proche par ailleurs de Fra Filippo Lippi, avec qui il collaborera.
S’il fut influencé par Andrea Mantegna (1431-1506) ou Piero della Francesca (1410-1492), dont on dit parfois qu’il aussi fut l’élève, il influença à son tour Raphaël ou Michel-Ange, ce qui, avouons, n’est pas rien !


Outre ces Amours, que reste-t-il ? Un tableau (fresque transposée sur toile) représentant « Le pape Sixte IV nommant Bartolomeo Sacchi, dit Platina, conservateur à la bibliothèque vaticane », conservé à la pinacothèque du Vatican, un « Christ bénissant » au palais du Quirinal, « Notre-Dame de l’Annonciation » et « L’Ange de l’Annonciation » aux Offices, la décoration de la basilique de la Sainte Maison de Loreto… Ou le curieux « Pileur de poivre » à la pinacothèque de Forli, qui fut probablement… l’enseigne* d’un apothicaire !
Cheveux au vent…

12273143498?profile=original

Pourtant Melozzo, en son temps, n’est pas un inconnu, loin de là. Il a bénéficié de la faveur du pape Sixte IV (1414-1484), grand protecteur des Arts et des Lettres, qui sous son pontificat, de 1474 à 1484, embellit considérablement Rome. On pense à la chapelle Sixtine, bien sûr, ou à la création du musée du Capitole, premier musée public au monde, où on peut voir, entre autres, la fameuse Louve du Capitole, le symbole même de Rome. Un grand mécène donc, et politique retors, comme le fut son successeur Jules II (1443-1513), son neveu, qui fut pape de 1503 à 1513.
Fêtons donc cet homme de l’école ombrienne, cessons un instant de tourner autour du nombril de Vénus afin qu’il soit du nombre des convives, que la joie vienne et que Forli sorte de l’ombre de Vinci !
Je souhaite à tous de bonnes fêtes placées sous les souriants auspices des anges musiciens et une année 2016 heureuse et riche de créativité. Et continuons de faire d’Arts et Lettres un creuset culturel, un vecteur d’interactivité, un espace de liberté.


« La musique chasse la haine chez ceux qui sont sans amour. Elle donne la paix à ceux qui sont sans repos, elle console ceux qui pleurent. »,

Pablo Casals

12273143858?profile=original

Alors, alors
Nous devenons tous des anges
On se réveille à midi
Dans la superbe orange
Du soleil qui luit
Quand le bon Dieu nous sourit
C’est la vie, c’est la vie.

Claude Nougaro

12273144087?profile=original

Luth en main, chantons donc leurs louanges.

12273143883?profile=original

Au doux son de cette seconde vidéo de M. Robert Paul où chaque scène peut être visionnée putto à putto.

https://artsrtlettres.ning.com/video/la-part-des-anges-part-one-filippino-lippi

Mezzo voce, Melozzo piano, les anges…

https://artsrtlettres.ning.com/video/giacomo-fogliano-l-amor-dona-ch-io-te-porto-1

A vous tous artistes, peintres, musiciens, poètes... qui faites reculer les murs de la barbarie.

12273144462?profile=original

* A telle enseigne que c'est la plus ancienne enseigne, c'est insigne.

Michel Lansardière (texte et photos)

Lire la suite...

        Mon dernier article ne s'ouvrait pas pour beaucoup d'entre-vous par le lien de ma dernière lettre d'information, alors, avec toutes mes excuses, je recommence tout !        

     Pourtant c’est dans une magnifique nouvelle aventure que je vous emmène à présent, loin des miasmes et des errances destructives de nos sociétés, pour vous replonger dans une beauté paisible, somptueuse, lumineuse et tonique.

         Pour célébrer l’espérance et l’amitié, retisser les fils ténus de la vie, et sans oublier toutes celles et ceux pour lesquels ces mots sont vains, projeter dans l’avenir une énergie de pensées constructives, généreuses, en harmonie avec la nature et nos sources les plus profondes d’accomplissement, puisque cette énergie est avant tout source de bonheur.

        L’histoire que je vous raconte à présent est celle de la très récente naissance d’une toile selon ma démarche picturale, en suivant le processus de « créativité augmentée » auquel j’ai déjà consacré plusieurs articles dans ce journal, qui a le pouvoir presque magique de nous faire basculer sans artifices de la « conscience ordinaire » à la « conscience essentielle », en décuplant les possibilités de notre imagination.

        Rien d’occulte dans tout cela, mais une démarche élaborée tout au long d’une vie, au cours de laquelle les expériences accumulées débouchent sur un acte créatif global où chaque phase préalable à l’élaboration d’un produit pictural final fait partie à part entière de ce produit.

       L’action s’est déroulée il y a quelques jours à peine au cœur des Pyrénées, face au splendide Cirque de Gavarnie depuis le refuge des Espuguettes et le sommet du Piméné, qui est le plus beau belvédère connu pour observer l’ensemble des hauts sommets qui couronnent le cirque glaciaire.

            Une plongée les yeux grands ouverts dans l'un des plus beaux bleus du monde !

ob_cfce39_google-earth-gavarnie-2.JPG

Le grandiose théâtre dans lequel se déroule cette aventure créative au cœur des Pyrénées (Image © 2015 Digital Globe — © 2015 Google).

ob_6a798a_le-pimene-olivier-lesca.jpg

Le Piméné (face ouest) et l’arrête Petit – Grand Piméné dominant Gavarnie (en fond de vallée), vus de la Serre des Tousaus : la pyramide est presque parfaite et on imagine facilement depuis ce point de vue la difficulté d’un décollage sur ce versant depuis son sommet si l’on veut respecter (ce que nous avons fait) l’interdiction de décollage et de survol côté parc National des Pyrénées (l’autre versant) : pas de droit à l’erreur !

        Elle s’est terminée par une dernière expérience créative picturale à l’atterrissage dans la vallée après un vol en parapente somptueux permettant d’approcher au plus près le bleu indéfinissable généré par l’ombre matinale des gigantesques murailles constituant le Cirque de Gavarnie.

        Produit final de l’aventure, une toile qui en exprimera « l’intériorité » sera réalisée ultérieurement en atelier.

ob_b882f8_le-bleu-gavarnie.jpg

L’indéfinissable bleu de la lumière à l’ombre des immenses parois glaciaires du Cirque de Gavarnie : ce n'est pas pour rien que cet endroit est classé au Patrimoine de l'Humanité par l'UNESCO !

         Ainsi, en ce qui me concerne dans cette nouvelle aventure, la montée au refuge des Espuguettes, les premières études à l’aquarelle réalisées en imprégnation du milieu naturel autour du refuge dans le parc National des Pyrénées, puis la montée au Piméné à 2800 m avec envol en parapente depuis son sommet suivi d’ultimes études toujours à l’aquarelle, réalisées à l’atterrissage sous les effets encore actifs de l’état de flow [ou d’expérience optimale] généré [e] par le vol le lendemain matin, sont des éléments indissociables de la toile qui en sera le produit.

         Celle-ci matérialisera la « conscience essentielle » qui se dégagera de l’ensemble de l’aventure et des émotions qu’elle aura provoquées, en exprimant particulièrement le fait marquant qui m’aura le plus inspiré.

         C’est à nouveau la quête d’un bleu extraordinaire qui est à l’origine de cette aventure, une couleur aux vibrations très subtiles ici, qui rend ce haut lieu du pyrénéisme encore plus prodigieux à contre-jour dans la lumière du matin.

        Pour conclure cette introduction aux reportages permettant de mieux comprendre ma démarche picturale globale débouchant sur la réalisation d’une toile à travers les expériences et études initiales qui en sont à l’origine, je tiens à remercier chaleureusement toute l’équipe des parapentistes du club de vol libre MJC de Rodez [fille et garçons] qui ont assuré la logistique de cette belle aventure du « vol Piméné ».

ob_3ec51f_photo-angeline-mahuas.JPG

Une partie de l’équipe qui m’accompagnait quitte la vallée, et attaque la montée vers le refuge des Espuguettes à travers la forêt... (Photo © Angeline MAHUAS)

        Ils ont permis en ce qui me concerne, la réussite d’une entreprise qui n’était pas si évidente que cela au départ puisque je devais concilier de nombreux paramètres liant pratique picturale, sportive, et connivence au milieu naturel, sans sortir du cadre législatif et de sécurité qui nous était imposé [différentes autorisations préalables, rigoureux respect des horaires, de la réglementation très stricte du parc National des Pyrénées, des règles de survol du village et de la vallée de Gavarnie, des fréquences radio obligatoires, de la réglementation aérienne locale concernant le couloir d’accès et de dégagement de l’hélicoptère du Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne, etc.].

ob_a5ca2b_photo-olivier-lesca.jpg

Enfin, la dernière pente avant le refuge : je suis plutôt content d’arriver en haut du plateau de Pailla après la cadence soutenue de cette montée, surtout chargé comme nous le sommes tous puisque le parapente se rajoute à nos affaires de montagne, au duvet, à la gourde, à la nourriture, etc. (...(et dire que nous serons presque autant chargés demain pour faire l’ascension du Piméné, la peinture mène donc à tout) ! (Photo © Olivier LESCA)

ob_b6ec07_photo-olivier-lesca-5.jpg

Le refuge des Espuguettes sur son promontoire (nous ne pourrons accéder qu'à son sas "hiver" puisqu'il est fermé en cette saison), dominé par les faces nord-est et nord des deux Astazou (3071 m et 3012 m) séparés par le fameux couloir Swan, splendide classique pyrénéenne (on remarquera qu’à leur pied leurs glaciers ont tant reculé ces dernières années à cause du réchauffement climatique qu’ils ne se réduisent plus qu’à peau de chagrin). (Photo © Olivier LESCA)

ob_90d83f_palette-pimene.JPG

Compte tenu des circonstances, mon matériel est réduit le plus possible afin de ne pas alourdir davantage mon sac (palette aquarelle de voyage Winsor et Newton 12 couleurs avec son réservoir d’eau, deux pinceaux à réservoir Pentel, crayon mine graphite 2B, gomme et petit carnet Paperblanks + pince de maintien des pages).

Ce matériel est largement suffisant pour prendre mes notes de terrain (la « conscience ordinaire ») puisque le plus important dans ma démarche n’est pas la qualité des aquarelles réalisées sur le motif, mais l’intérêt des éléments retirés du vécu de cette expérience afin d’en restituer ultérieurement dans ma toile la « conscience essentielle ».

 

        Nous entrerons par le prochain article dans le vif du sujet avec les premières notes aquarellées, puisque le schéma du projet étant à présent établi je vous donne rendez-vous dans quelques jours au refuge des Espuguettes, avec un nouveau regard sur la haute montagne, et les moments magiques qui lui sont associés en attendant l’ascension du Piméné et l’envol depuis son sommet.

Lire la suite...

       Souvenez-vous des épisodes précédents : le projet d’une expérience picturale en créativité globale avec un envol du sommet du Piméné, notre montée au refuge des Espuguettes, la rencontre avec la brebis du Pic rouge de Pailla, et notre repli nocturne dans le refuge alors que le brouillard et le vent se s’sont abattus sur la montagne...

       Et pourtant, ce matin pas un souffle, le ciel est sans nuages !

  •    Vais-je réussir cette nouvelle expérience en « créativité augmentée » ?

      Je vous laisse regarder la vidéo : la toile qui la clôture est le fruit de cette démarche : elle dit mieux qu’un long discours la beauté de cette aventure et ce que peut apporter ce type de connaissance.

    Car il ne s’agit pas d’une simple série de petites expériences entrecoupées de séquences récréatives ou sportives qui n’ont rien à voir avec l’acte pictural, au contraire : c’est une aventure créative globale, où chaque instant est vécu comme la suite du précédent et le début du suivant dans un espace – temps différent englobé dans la démarche picturale.

    La montée au Piméné, les exercices réalisés au refuge, le vol en parapente, les essais réalisés à l’atterrissage, les « échanges » avec le milieu naturel, sont autant d’éléments immatériels constitutifs du travail final. 

     Celui-ci en concentrera l’énergie à travers les vibrations subtiles du bleu évoquant les ombres de Gavarnie et différents autres éléments spécifiques de ma propre « écriture ».

Si vous voulez vous projeter dans mon reportage comme si vous y étiez et visionner ma vidéo en HD et "en grand", cliquez au début de la lecture sur l'icône de l'agrandisseur d'écran en bas à droite de cette vidéo.

...Découvrez la suite de l'article, en cliquant ici : "Les chevaux bleus de Gavarnie"

Lire la suite...

    Nous sommes donc arrivés au refuge des Espuguettes, superbe balcon dominant la vallée face au Cirque de Gavarnie (voir ici la première partie de cette trilogie)...

Tout de suite après la pub : la vidéo !

      C’est maintenant que ma nouvelle série d’expériences de « créativité augmentée » doit commencer (voir de précédents articles déjà consacrés à ce sujet dans ce journal).

        La « créativité augmentée » ?

     Je résume : c’est un état de réceptivité particulière et de conscience modifiée (je dirai « élargie »), permettant de passer d’une perception « ordinaire » du monde à une perception « sublimée » (en tout cas différente par les perspectives qu’elle offre et les horizons qu’elle dévoile — rien à voir avec sa signification dans le romantisme —) où les notions de temps et d’espace sont modifiées (généralement dilatées) et où (dans le domaine pictural qui nous intéresse ici), tout paraît d’une évidence et d’une facilité telles, que le pouvoir de l’artiste en est décuplé, puisque, s’approchant au plus près de l’essence des êtres et des choses il peut en révéler des dimensions cachées, un peu comme s’il pouvait voir au-delà des apparences et du monde matériel, se mettant en quelque sorte en état de « voyance »...

      L’état modifié de conscience dans lequel je souhaite entrer pour mes expériences de créativité augmentée n’est donc qu’un moyen pour changer de plan de réalité.

      Il est un outil et pas un état spirituel supérieur (plus proche de la définition qu'aurait pu en donner l’anthropologue Fernand Schwarz, que d’une quelconque pratique de spiritualité).

      J’utilise pour y arriver différents moyens dont l’un des plus puissants est certainement « l’expérience optimale » (ou « état de flow » bien connu des sportifs, mais dont les conditions pour parvenir à son degré le plus élevé sont généralement difficiles à réunir, comme dans le cas de situations paroxystiques liées aux sports de l’extrême).

      Mais ici et en ce moment, je dois me préparer différemment (un peu comme on le ferait en Yoga Nidra, par une mise en phase de profonde relaxation, de respiration entière et lente), mais sans me couper de l’environnement (surtout si celui-ci est naturel et paisible comme le lieu où se trouve le refuge), en entrant en fusion avec cette haute montagne, son paysage (sensation d’unifier ce qui est à l’extérieur du corps à celui-ci en percevant les deux en même temps), au moins avec d'abord un exercice simple de dessin ou d’aquarelle (sans recherche particulière de résultat) pour lier le premier sujet de son regard à sa main (en s’imprégnant de la lumière qui le révèle), enfin, en se fixant sur son (ou ses) sujet (s) définitif (s), qu’il faut intensément contempler (de façon passive et fixe avant de « lui  laisser guider le pinceau »)...

      Immense sensation de liberté et d’ouverture au monde !

      Bien sûr, je résume là un processus plus élaboré, mais facilement reproductible, surtout avec un peu d’entraînement.

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla.       Premier exercice : un simple et très rapide croquis aquarellé à contre-jour considéré comme « échauffement ».

      Il doit faire la transition entre les efforts physiques de la montée au refuge et les séances picturales suivantes plus directes et intuitives, et permettre une première immersion picturale dans le paysage montagnard.

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla.       Le but de ce premier exercice est aussi de remettre en phase le regard et la précision de la main, en créant une sorte de « laisser-aller » rapide et spontané dans lequel l’expression se libère sans réflexion particulière, pour laisser le paysage contemplé se « calquer » presque automatiquement sur le papier.

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla.       Résultat peu convaincant en ce qui concerne la qualité du travail réalisé, qui révèle un manque de concentration évident, une connivence inaboutie avec le sujet, et une faiblesse globale d’expression.

      Preuve aussi d’une fatigue physique éprouvante dont les effets néfastes (non stimulants picturalement) n’ont pas été éliminés (à éviter donc avant d’avoir récupéré).

      Selon ma propre expérience, seule une activité physique fruit d’une énergie positive où les endorphines éliminent les douleurs générées par la fatigue est favorable à une entrée en état de créativité avancée, apte à produire un travail harmonieux et intense.

      Mais exercice indispensable en préparation mentale pour favoriser la transition entre les états de conscience « ordinaire » et modifiée.

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla.       Deux autres exercices seront nécessaires pour me « reconnecter » intérieurement à l’esprit multiple de la montagne qui m’entoure (dont celui permettant de percevoir le « sublime » qui est le moyen, pour Kant — et pas seulement pour lui —, de se confronter à l’examen de la démesure)...

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla. 
      C’est la beauté du Pic rouge de Pailla illuminé par le soleil du soir qui me permet enfin d’entrer dans un champ de conscience modifiée où la connivence avec le sujet est totale dans une sorte de méditation active.

      Le gigantisme des plissements géologiques, la chaude couleur des roches constituant ce sommet, l’atmosphère pastorale d’un incroyable romantisme, la prise de conscience de sa silencieuse immensité, contribuent immédiatement à créer d’autres rapports à l’espace – temps, ouvrant une parenthèse naturelle dans laquelle il est facile de se glisser pour entrer en créativité augmentée...

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla.      Le fait marquant qui m’a le plus frappé lors de mon exercice du Pic rouge de Pailla est l’étrange attitude d’une brebis m’ayant « observé » à plusieurs reprises, jusqu’à venir me flairer de très près.

      - Peut-être me prenait-elle pour un berger prêt à lui offrir une poignée de sel ?

      Mais sa présence répétée, son insistance à m’observer en me tournant autour à moyenne et courte distance, me font à présent penser à ces expériences où dans la cosmologie chamanique, lors des premiers voyages qu’effectue le chamane, il connecte ses Esprits alliés qui sont l’Essence invisible de la nature où les animaux jouent un rôle déterminant.

      J’avais lorsque je m’en suis aperçu l’impression d’entretenir malgré moi un échange mental, naturel, mystérieux et profond avec l’animal...

     Peu importe la véritable raison du comportement de la brebis du Pic rouge de Pailla : ce que j’ai alors ressenti de cette « étrange communication » est quelque chose de magique que je ne saurai définir, mais qui me paraissait tout à fait « normal », naturel et évident en état de créativité augmentée, me prouvant par là même que les champs élargis de conscience repoussent réellement nombre de frontières, et pas seulement en matière d’expression artistique ou de créativité !

     L’enseignement que j’en retire est que, comme lors du passage du phasme sur mon aquarelle pendant les expériences du Caroux (voir les dernières séquences de ma vidéo dans l'article « Aquarelle en créativité augmentée à la Tête de braque »), l’un des facteurs de réussite les plus importants pour réaliser un changement de conscience en expérience optimale « statique » (à la différence de l’état de « flow » produit d’une expérience optimale « dynamique » où entrent en jeu d’autres facteurs physico-chimiques et neuromédiateurs déterminants pour le conditionnement mental telles l’adrénaline, les endorphines, la sérotonine, les monoamines, etc.) est de se fondre dans la nature, s’harmoniser à elle, se laisser pénétrer par elle.

      Et que cette nature soit la plus « pure » et authentique possible !

Nouvelle étape du voyage du bleu 2e partie : la brebis du Pic rouge de Pailla. 

      Mon Pic rouge de Pailla (réalisé en restant fidèle à mon intention : en quelques minutes seulement à l’aquarelle sans dessin ni repentir) n’a pas pour but de s’affirmer en tant qu’«aquarelle réussie» (d’ailleurs qu’est-ce qu’une aquarelle réussie ?), mais de prouver (au moins de le vérifier une fois de plus pour moi-même) combien l’expression est facile en état de créativité augmentée (même si elle n’atteint pas ici le niveau 4 des états de flow).

      Elle doit surtout exprimer un « contenu » sans se laisser séduire par le « contenant », c’est à dire l’aspect visuellement séduisant et superficiel du produit pictural.

      J’ouvre une parenthèse pour dire qu’en aucun cas je ne voudrais que l’égocentrisme ne prenne le pas sur la créativité, et que si je me mets en scène à travers ma démarche j’essaie de le faire sans que ce soit en me soumettant aux pulsions infantiles d’un ego aveuglant et réducteur, mais bien parce que celle-ci (ma démarche) doit être considérée dans son entièreté, afin aussi de partager mon expérience personnelle comme si j’en étais mon propre spectateur, tout en restant fidèle au sens que le veux lui donner.

       L’objectif avec ce motif était de traduire le plus rapidement possible et de façon très synthétique la masse géologique complexe de ce sommet, avec ses plissements, couloirs, parois, fissures et dièdres en les simplifiant au maximum, mais en conservant leurs lignes de force, sans trahir pour autant toute la lumière et la force se dégageant du paysage.

       Sachant que pour Jean-François Lyotard, « Tout art est re-présentatif […] : dans ce sens qu’il est renversant, qu’il renverse les rapports de l’inconscient et du préconscient, qu’il procède à des insertions du second dans le cadre du premier. » (Discours, figure, Paris, Klincksieck, 1971, p. 383), mes questionnements conservent tout leur sens puisque ces quelques exercices carnettistes (assez « basiques » somme toute), doivent prendre une nouvelle dimension dans le projet d’un travail qui symbolisera au retour la synthèse de l’ensemble de ces expériences réalisées lors du vol du Piméné, en se cristallisant autour de la quête du bleu du Cirque de Gavarnie.

      Là, on passe à une nouvelle « dimension » de la démarche picturale, car il ne s’agit pas de « re-produire » (en plus grand et en « mieux ») ce qu’on a vu, ce qu’on a rencontré, ce qui a été réalisé en « créativité augmentée » sur le terrain, mais bien de tenter de révéler non seulement l’intériorité (ou l’âme sensible) des choses et des lieux qui nous ont touchés lors de ces expériences, mais aussi d’exprimer dans son ensemble ce que l’empreinte de ces expériences nous laisse dans notre propre intériorité : une sorte d’absolu auquel on chercherait à donner un visage...

      Ici, le but de l’entreprise est (avec respect et modestie) de dire le pouvoir de l’homme, celui qui peut s’élancer dans l’espace pour saisir l’immensité, imaginer, penser, mais aussi de sentir sa propre petitesse, et cependant être la mesure du démesuré à travers l’auto-transcendance de l’œuvre, désigner le sublime qui pourrait être le pouvoir absolu de l’œuvre, mais qui lui échappe souvent en finalité, tout en lui conservant son pouvoir magique.

      ... Il faut croire qu’il n’est vraiment pas encore atteint ce but au moment où je vais rejoindre dans le refuge mes camarades pour un casse-croûte d’amitié et une bonne nuit de repos, car un épais brouillard s’est abattu sur la montagne où un vent perfide et glacial s’est levé !

      - Que sera demain notre montée au Piméné, et plus encore l’hypothétique décollage de son sommet ?

Lire la suite...

Encore une ancienne stagiaire qui réussit brillamment !

Satisfaction et vrai bonheur pour moi qui ai eu le plaisir de l’encourager et de l’aider plusieurs stages durant, de vous communiquer sa prochaine exposition et la parution de son livre « En direct des Océans ».

Elle est partie pendant plusieurs mois vivre au long cours sur les cargos sillonnant mers et océans.

Son livre, son exposition (de peintures, aquarelles et croquis de voyage) et sa projection sur cette belle aventure seront visibles à partir du 28 novembre 18 h à l’Hôtel de Ville de Rosny-Sous-Bois.

Amis (es) de la région de Rosny (ou qui passerez par-là pendant son exposition), camarades de stages vous souvenant d’elle, allez admirer  le travail de Marie-Brigitte et n’hésitez pas à lui transmettre toutes mes amitiés et félicitations !

Belle exposition, beau livre, belle réussite de Marie-Brigitte BUISSIERE

Lire la suite...

Première exposition solo de Gaétan Patenaude

     C’est toujours pour moi un grand plaisir lorsqu’un ancien stagiaire vole de ses propres ailes et expose en solo dans une belle galerie d’art, cela prouve au moins la valeur du travail réalisé ensemble à un certain moment.

     Amis (es) de Montréal, de Québec et des environs (ou qui passerez par-là ces jours-ci et jusqu’à mi-novembre), camarades de stages vous souvenant de lui, allez admirer  le travail de Gaétan à travers son exposition intitulée Ma rivière aquarelle : Repères d’un parcours.

     L’exposition se tient à la galerie L’ARTICHO, située à Québec 135, rue Saint-Vallier Est, depuis le 27 octobre jusqu'au 14 novembre 2015.

      Le vernissage aura lieu le 30 octobre 2015, de 17 h à 19 h.

    Gaétan sera présent à la galerie le soir du vernissage ainsi que les samedis après-midi 31 octobre, 7 et 14 novembre 2015.

     Cette exposition est la troisième étape d’une phase de partage plus soutenue de sa démarche d’artiste.

     La première a été la mise en ligne de son site web  www.mariviereaquarelle.com en décembre 2012 et la deuxième, la publication d’un livre numérique intitulé Ma rivière aquarelle : Parcours d’un regard. Les informations pour le consulter se trouvent à l’adresse suivante :

http://www.mariviereaquarelle.com/inscription

   N’hésitez pas à communiquer avec lui pour tout supplément d’information : info@mariviereaquarelle.com, et transmettez-lui mes amitiés et félicitations si vous le rencontrez !

     Je rajoute autre chose qui n'a rien à voir avec l'exposition de Gaétant : lors de la modification de l'article précédent, les commentaires que j'y avais déjà et auxquels j'allais répondre se sont perdus, que leurs auteurs veuillent bien me pardonner !

L'affiche de l'exposition
Lire la suite...
Aiguilles Godefroy, Déplasse et Viala au Caroux, aquarelle Alain MARCQue les choses soient très claires, cette aquarelle n'est pas une aquarelle comme nous en réalisons toutes et tous au cours de nos balades dans la nature ou nos carnets de voyage (ce qui est déjà formidable quand on peut le faire) : elle est le produit d'une expérience dont le processus commence dans une réflexion et une démarche particulières qui lui sont bien antérieures.

L'intention qui en est à l'origine n'est pas de réaliser une « belle aquarelle » ni une aquarelle révélatrice d'un talent quelconque de son auteur, ni de représenter un paysage en tant que tel, mais d'étudier, d'élaborer et de tester un processus créatif nouveau dont le prolongement ne doit pas s'arrêter à une simple expérience graphique et picturale tout aussi intéressante qu'elle soit.

Mon projet va plus loin que cela, car il touche l’individu dans son développement personnel tout en étant un formidable tremplin dans l’élaboration d’œuvres en arts plastiques comme j'ai pu le vérifier à partir des expériences qui ont suivi (étant à la fois « cobaye et chercheur » dans ce projet il y a un énorme décalage entre la publication de mes articles et les résultats que j'ai déjà obtenus).

Mais ils sont bien là, les produits picturaux de ces expériences, et ils sont loin d'être inintéressants !

Je reparlerai plus tard des phases de développement des croquis aquarellés et des aquarelles de terrain réalisés à travers ces expériences, ainsi que des implications mentales qui ont débouché sur des toiles de plus grand format à partir des méthodes que j'ai développées et qui tirent leurs enseignements du fruit de ces expériences.

Mais aujourd'hui, je témoigne de leur intérêt pour l'énergie positive, l'enthousiasme, l'esprit de réussite et le sentiment d'immense bonheur qu'elles procurent.

Ce qui était le plus difficile pour moi était de transposer la stimulation créative ressentie lors des états de « flow » (également nommés « expérience optimale » selon les psychologues, ou d'entrée dans la « zone » comme le disent les médecins du sport) à un état de conditionnement mental qui la rende si possible reproductible en dehors de tout contexte sportif.

Ce qu'il faut que je transpose de l'action sportive à l'expression picturale est très complexe (les facteurs physico-chimiques et neuromédiateurs déterminants pour le conditionnement mental dans une situation sportive donnée tels que l'adrénaline, les endorphines, la sérotonine, les monoamines, etc., ne sont à cause de mon absence de connaissances spécifiques, ni compréhensibles, ni « envisageables » dans une situation différente du contexte où ils se manifestent).

Alors, j'en relève les éléments que je considère comme déterminants au cours de l'escalade :

    • une projection dans l'objectif clair d'atteindre le sommet avec le plus de maîtrise et d'aisance possible en accumulant un maximum d'énergie positive (celle-ci apparaît sans en avoir conscience si les deux autres s'affirment en synergie),

    • une implication totale, une intense concentration tout au long de l'escalade,

    • la mise en phase dans la totalité de l'action des compétences personnelles (physiques, intellectuelles, mentales, etc.) avec les difficultés du projet (tant globales que sectorielles),

    • un véritable relâchement mental afin de se détacher de toute distraction « externe » pour se concentrer uniquement sur l'environnement immédiat et l'enchaînement des gestes d'escalade (ce que je n'ai pas toujours fait pendant ces deux dernières longueurs de corde, car je me suis souvent arrêté pour contempler, réfléchir et me « nourrir » de mon environnement),

    • une modification réelle de la perception du temps qui s'écoule (je dirai plutôt de son interprétation),

    • une maîtrise presque « absolue » du self contrôle dans l'action (je savais bien avant, que celle-ci était d'abord liée au niveau d'entraînement),

    • l'adaptation immédiate du comportement individuel face aux difficultés techniques imprévues survenues au cours de l'escalade.

 
Aquarelle en créativité augmentée à la Tête de... par Watercolourman

À partir de tout cela, entre les notes prises en analysant mon comportement dans le stade le plus élevé de l'état de « flow » (que je pense avoir vécu pendant l'action sportive), et en établissant un parallèle avec mes méthodes personnelles de concentration lors de toute action picturale, j'en dégage et étudie les différents points communs réunissant les deux actions ainsi que leurs différences, et j'en tire plusieurs analyses débouchant chacune sur des « exercices » particuliers dont l'aquarelle ci-dessus des aiguilles sommitales du Caroux est l'un des premiers produits (de même que mon « chêne vert » ou le « rocher aux lichens » sont le résultat d'autres exercices similaires, l'aquarelle réalisée dans le cours même de l'escalade ne faisant pas directement partie de ces exercices).

Cette vidéo est constituée de deux parties (il est important de bien comprendre la première pour mieux suivre la seconde, car j'y explique ma démarche, l'acte pictural ayant commencé bien plus tôt pendant l'escalade) : a priori, la première (celle de l'escalade), pourrait ne rien à voir avec la seconde (celle de la réalisation de l'aquarelle), il n'en est rien !

Les deux participent à une même expérience (entreprise depuis plusieurs épisodes, voir par exemple l'article précédent) destinée à élargir notre potentiel créatif et à optimiser de nouvelles approches dans le développement de l'expression picturale...

 

Il va sans dire que les méthodes que je suis en train d'expérimenter ne peuvent (pour l'instant) pas s'appliquer à une peinture en milieu urbain ni à un travail où on serait en permanence déconcentré.

Mais je commence à les appliquer sans implication sportive spéciale !

Par contre, les notions d'émerveillement, le rapport à la nature et la façon de se fondre en elle sont des éléments très importants : c'est par eux que passe cette chose si étrange, de l’ordre de l’essence du monde qui permet une projection de l’état intérieur en même temps qu'une interaction entre soi et l’univers (on rejoint ici certains échanges de Michel Onfray avec François-Xavier Bellamy à propos du livre « Cosmos » - et de bien d'autres penseurs présents et passés à travers leurs questionnements – échanges que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer dans un article récent)...

On touche aussi (mais d'une façon particulière) à l'existentiel. Cela nous amène à d'autres conceptions de l'art contemporain qui relèveraient non plus d'un présent créatif qui veut se différencier, mais de l'universel.

Un art « métacontemporain » en quelque sorte, qui consisterait à ne plus admettre la peinture (ou la sculpture ou toute autre forme de création actuelle) comme une fin en soi, mais comme un témoin de l'intériorité de l'être (par-delà son ego celui-ci n’existant plus dans ce rapport à l'univers) associé à un nouveau questionnement de l’essence du monde dont elle révélerait une forme de perception.

À suivre.

Article et vidéo précédents sont ici : Aquarelle et expérience de flow à la Tête de braque (3e et 4e longueurs)

Lire la suite...

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles