huile (3)
"Nous construisons un monde nouveau"...
Aaah Paul Nash...Paul Nash, quoi.
C'était un enfant malheureux et solitaire, Nash ; sa mère était gravement malade psychologiquement, avec des accès de violence terrible, la maison était un caveau.
Le petit Nash prend l'habitude de fuir se réfugier dans la forêt. A l'âge de 11 ans il a une révélation : la Nature est vivante. Elle est dotée d'une pensée propre. Elle nous observe, nous les pauvres humains. Elle vit à son rythme, et si nous ne voyons pas les pierres se déplacer, c'est parce que nous sommes, nous les hommes, devenus artificiels.
Il décide de consacrer sa vie à Peindre le "Génie de la Nature".
Ado, il fuit l'Académie. Rester enfermé des heures à dessiner des modèles, très peu pour lui. Du reste, peindre l'être humain ne l'intéresse absolument pas.
Il se lance dans une oeuvre magnifique, dans ses dessins et ses toiles la Nature semble nous parler, nous révéler des choses indicibles.
Et l'AIR. L'air dans ces toiles...je ne connais pas d'autre Peintre ayant réussi à peindre la sensation de l'air, du pouvoir de respirer.
Il fallait un asthmatique pour peindre comme ça (il en mourra, de son asthme).
Et cette palette, unique...
Et puis un jour...
Un jour c'est 1914, il a 23 ans, et il se retrouve dans les tranchées...
Il ne comprend pas, Nash.
Il n'arrive pas à prendre la guerre au sérieux. Il voit ça comme un immense jeu débile, il voit avec les yeux de la Nature, il ne voit que des fourmis occupées à s'entre-dévorer, et pour quoi ?
Alors qu'il est occupé à dessiner hors de sa tranchée (Nash...), il glisse sur la boue, tombe, et se brise plusieurs côtes.
Quelques jours plus tard, pendant qu'il est à l'hôpital, c'est la triste bataille de Pasendaele qui commence. La plus meurtrière de la guerre. Un carnage sans nom. Une vision d'apolcalypse.
Plus de 200.000 morts en une poignées de journées infernales.
Toute sa compagnie est décimée.
Tous ses amis sont massacrés.
Nash s'en veut, il a honte d'avoir survécu.
Il se met à être obsédé par une chose : devenir Peintre de guerre. Il sollicite l'armée qui refuse (soyons sérieux, Messieurs. La Peinture de guerre, c'est la représentation de batailles, de hauts faits, de blessés, de héros ! Qu'est-ce qu'il veut, le paysagiste, là ?!).
A force d'écrire partout, il arrive à fatiguer les gradés.
"Ok, Nash, va donc peindre la guerre, fais-nous rire"...
Et Paul Nash va réaliser ce qui est, à mon sens, une des deux plus incroyables séries de peintures de guerre du 20e siècle.
Il va prendre la guerre "à rebours".
Pas de corps ensanglantés, pas d'actes "héroiques" à la con.
Non.
La guerre vue...par la Nature.
Le regard d'un homme qui n'en a rien à foutre, lui, des bonnes mauvaises raisons que l'humain se trouve pour avoir juste le curieux plaisir de détruire.
Et, en 1918, il peint le chef-d'oeuvre de la série.
Le sol comme un corps labouré de cicatrices, les organes sans dessus-dessous...les arbres pétrifiés, calcinés, comme des mains lancées vers le ciel...et ce soleil, blanc, froid, qui ne réchauffe plus rien.
Et Nash, que ses amis décrivent comme "incapable d'une action cynique", Nash le rêveur, Nash donne un titre terrible à son tableau.
"We Are Making a New World".
Aaah Paul Nash...Paul Nash, quoi...
Paul Nash (1889-1946)
"We are making a new world"
Huile/toile
1918.
Téthys la mémoire de la mer (huile sur toile) - Chantal Roussel
Tête-à-tête incantatoire
Envoutant jeu de miroirs
Qui passe du je au jeu,
Du quant-à-soi en spéculation noueuse
Evocation magique que je voue à
Toi petite Téthys têtue, vertueuse
A tu et toi avec la vie,
Te battras-tu cahin-caha
Du tu à tue le vous,
pour le nous qui vous noue il en elle
Et former ils, d'îles en ailes.
Michel Lansardière
J'ai d'abord souhaité ancrer cette toile dans sa modernité, au-delà du mythe (que j'ai largement commenté sur la page de Chantal), du classicisme bourgeois.
Ensuite j'ai voulu, par un effet de sonorités répétitives, évoquer la vague, l'incessant va-et-vient. Sac, ressac, érosion... Eros. Flèches d'amour. Passion dévorante. Convulsive beauté.
Cette huile de Chantal renouvelle, à mon sens, complétement le genre (je pense notamment aux Vénus de Botticelli, insurpassable il est vrai, Bougereau, Cabanel, remarquables mais trop statiques, conventionnelles). Eternité de l'océan, de la féminité. La qualité picturale s'efface au profit du dynamisme, la chair palpite, la vague déferle et nous submerge, ou de l'illusion, insaisissable tel un mirage.
Elle m'a littéralement interpellée.
Et le dialogue s'est engagé...
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