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femme (94)

administrateur théâtres

Feu la mère de Madame - Feu la Belgique de Monsieur

de Georges FEYDEAU - Jean-Marie PIEMME

Le vaudeville désopilant de Feydeau démarre sur l’annonce dudécès de la mère de Madame. Cette situation n’est pas sans rappeler l’incroyable soirée du 13 décembre 2006 au cours de laquelle un journaliste de la RTBF prenait son air le plus grave pour annoncer la fin de la Belgique. Ce canular (Bye bye Belgium) a fait le tour de la planète ! Jean-Marie Piemme nous livre  un divertissement impertinent qui nous replonge dans l’ambiance de cette fameuse soirée !

http://www.theatreduparc.be/

D’un coup de tonnerre à l’autre, pluies de rires

Un sas triangulaire où se déchaînent les éléments donne accès à trois éléments : chambre, cuisine et salle de bains. Le plateau circulaire expose d’abord le lit conjugal.  Quatre heures du matin, Elle est réveillée par l’arrivée tardive de son impressionnant mari, Lucien déguisé pour son amusement personnel en Roi Soleil. Il sonne désespérément, bloqué dans le sas. Il se fait magistralement saucer.  Un immense  parapluie protège difficilement  sa perruque et habits d’un autre siècle de la pluie diluvienne. Rires. Celle-ci ferait bien de  lui rafraîchir les idées avant d’affronter son épouse, rapidement transformée en harpie. La  scène de ménage ne manque pas d’éclater. Tous les travers, les petites frustrations et les plaies d’argent du couple sont jetées en pâture à un public gourmand. La bonne allemande, pas si bonne que cela, est prise à témoin et ne rêve que de regagner au plus vite  son propre lit. (Rires)  Soudain on sonne. Il s’agit du domestique de la sainte mère de Madame. Il est porteur d’une terrible nouvelle. Rires. Un spectacle dément, joué avec folie. Le public se drogue de rires.

Trois quarts d’heure plus tard. Le même sas, le même décor petit bourgeois, et dans la baignoire, une reine. Un roi sur son trône.  Imaginez la suite, à la sauce belgo-belge. Chinoise parfois. Avec les mêmes comédiens délirants.  Des histoires de convoyeurs qui attendent. Un pastiche du premier spectacle, qui coupe des pets de lapin en deux. Les comédiens chahuteurs qui tordent les réalités,  rient et pleurent à la fois, se dépensent, suent eau et sang, larmes et ironie cuisante.  Les scènes royales ont un goût de Revue de fin d’année. Et pourtant l’année débute à peine…  La Belgique a quelque chose en travers du gosier et ne sait plus à quel hymne national se vouer! Autodérision mordante, çà au moins c’est une valeur sûre !   

Allez voir. Vous jugerez par vous-même de la gaudriole politique ou domestique.  

Mise en scène: Frédéric DUSSENNE.

Décor: Vincent
LEMAIRE
.

Costumes: Lionel LESIRE.

Lumières: Renaud
CEULEMANS
.

Avec:
Philippe JEUSETTE  (Lucien - Freddy)
Valérie BAUCHAU  (Yvonne -
Sandra
)
Caroline DETEZ  (Annette –
L’aveugle
)
Othmane MOUMEN  (Joseph – Le Chinois)

 http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2012_2013_004

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administrateur théâtres

A mi-chemin entre deux réalités : Cinéma ou Théâtre ? Italie ou Europe-la-nordique ?  Comédie ou leçon de philosophie ?  Entre deux théories: le Big Bang ou la théorie de l’état stationnaire ? Entre deux visions du monde : celle de l’homme, celle de la femme ? La transhumance ou le home sweet home ?

  12272868278?profile=originalLe décor est d’un réalisme enchanteur. Nous sommes au pays du Brunello. Le village en plein ciel se situe sur une pente escarpée. Une Fiat 500 a été abandonnée par trois voyageurs étranges au pied de la colline abrupte. Un éminent cosmologiste belge Monseigneur Georges Lemaître et son collègue le britannique Fred Hoyle accompagné de sa femme Barbara Clarke, tous  personnages ayant existé, débarquent sur la place du village, au pied de l’antique  pompe à bras devant l’auberge des voyageurs.  Il n’y a  pas de téléphone, juste des cigales éreintées par le soleil de midi,  année 1957.

Virgilio, l’aubergiste a du mal à sortir de sa sieste. Mais c’est l’Italie, le bon vin et le respect de la robe, qu’elle soit ecclésiastique ou féminine, auront vite fait de lui rendre ses dons d’hospitalité. Langue locale, jovialité, bonne humeur, vin blanc, musique (de film !), voilà le début d’agapes réelles  autour de nourritures autant  terrestres que célestes. De quoi mettre en appétit le spectateur qui va assister à un duel verbal de hautes sphères, entre les deux éminences scientifiques.Chose peu commune au théâtre.

 12272868873?profile=originalMonseigneur Georges Lemaître en route pour le Vatican est à la veille d’aider le pape Pie XII à rajuster de malheureuses prises de position concordistes à propos des nouvelles théories du Big Bang. Son collègue Fred Hoyle  le taquine et de brillants échanges fusent entre  les adversaires.   Une façon indirecte  de monter que le « disputare » n’aboutit pas nécessairement à la « disputatio »Il y a  disputes et disputes.  Cela semble être une des intentions de l’auteur Jean-François Viot.

Monseigneur Georges Lemaître, père scientifique de « l’atome primitif »,  distingue la notion de « commencement » de celle de « création », la première étant une entité physique, la seconde un concept philosophique. Il ne veut en rien mêler Dieu à la science. « Dieu ne se prouve pas, il se trouve ». Sir Fred Hoyle lui, n’a pas eu l’heur de trouver Dieu, il n’a trouvé que la femme, avec qui éclatent de belles crises domestiques. En effet, « Monsieur le savant toujours absent » donne la migraine à l’hyper-sensible Barbara (Maud Pelgrims) et la fait sortir de ses gonds sous ses apparences de jeune dame rangée des années 50.  Les crises cycliques de sa femme sont bien à l’image de la  théorie de  « l’état stationnaire » prônée par son (tendre ?) mari, postulant qu’à une large échelle, l’Univers est partout le même, qu’il l’a toujours été et qu’il le sera toujours.

 Empoignades scientifiques et domestiques alternent avec des leçons de science extrêmement ludiques et illustrées. Les postures et les déplacements  et les silences éloquents des deux hommes de sciences, si opposés physiquement et mentalement, sont une source de comique inépuisable. La prestance de chat mystérieux de Alexandre Von Sivers en soutane  et  l’accoutrement du malicieux François Sikivie en costume anglais font pouffer de rire. Virgilio l’aubergiste (Grégoire Baldari), un nouveau dans la Commedia dell’Arte ?  se prête gracieusement à l’exercice de pédagogie active qui utilise ballons et grains de riz. Massimo (Michael Manconi), son  jeune neveu,  est tout aussi drôle et réaliste.  Imperturbable, Virgilio  sert généreusement  les cantucci et le vin de cette messe scientifique, comme au cinéma.

 

Une pièce savante et marrante quand même, un curé débonnaire, un mari qui ne manque pas d’airs, et l’homme toujours, comme toujours il l’espère : sur le devant de la scène, immuable tableau! Dans une Toscane de rêve.

Soulignons enfin que la mise en scène est signée Olivier Leborgne. Une aventure où l’excellente scénographie d’Edouard Laug et la construction du décor par l'équipe de Marc Cocozza, Christophe Beaugé et Mathieu Regaert sont des éléments indispensables au spectacle, sans compter la poésie des lumières de Laurent Béal.

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=496

Une production de l’Atelier Théâtre Jean Vilar et du Festival Royal de Théâtre de Spa.

Exposition Georges Lemaître présentée par les Archives Georges Lemaître (UCL) : Panneaux et vidéo sur le parcours de Georges Lemaître, accessibles lors des représentations.


Dimanche 24 février : l’ATJV soutient CAP48. Réservez vos places au profit de l’opération ! www.cap48.be

19 au 24 février 2013 Théâtre Jean Vilar
Durée : 1h30

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administrateur théâtres

C’est une heureuse  reprise. L’année dernière Jean Vilar affichait complet. Et on le comprend. Malgré les affiches criardes, c’est beau et succulent comme, Mmmm ! … de la belle nouvelle cuisine. Les plats se succèdent  sur le plateau devant trois immenses  paravents japonais lumineux qui évoquent le  bureau d’astronomie à droite, le salon au centre et la salle à manger à gauche. Quelques meubles épars, rescapés de l’époque des rois, flottent dans les savants  jeux de lumière de Jacques Magrofuoco. Le mot « savant » ici  n’est pas de trop et souligne le propos, avec bonheur. Armand Delcampe signe une  mise en scène burlesque et audacieuse. La distribution est rôdée et déborde d’énergie. 

Dès le début, le décor  surprend. C’est l’éblouissement de tout  l’univers étoilé cependant qu’une lune rousse se demande qui, du féminin ou de masculin, l’emportera. Ensuite le papier translucide  des paravents  se transforme en  aurore,  fixant  les  teintes pêche et fuchsia des robes 1920 des  doctes dames. Il enchaîne  ensuite dans  les tons vert tendre  les reflets irisés de paysages aquatiques aux lotus et chrysanthèmes stylisés. Les personnages  vont, viennent et disparaissent derrière les paravents en ombres chinoises et musicales des années folles.

Mais il n’y a pas que ce décor épuré et les costumes fauvistes de Gérald Watelet qui subjuguent le spectateur. Les amoureux d’abord :  Clitandre (Julien Lemonnier) a des allures de Gatsby le magnifique, l‘argent en moins! Et Henriette (Agathe Détrieux ) n’a de précieux que le nom, le reste est grâce et intelligence car le chouchou de Molière a tout pour plaire. 

Il y a le jeu extraordinairement puissant de l’impuissant  Chrysale, mené  par un surdoué de la scène, Patrick Brüll. ce dernier est  au mieux de sa forme et n’aurait pour rien au monde revêtu perruque à boucles, escarpins, bas blancs et pourpoint à rubans. Le voilà royalement sanglé dans une  splendide veste de velours, rouge de  la colère qui gronde  et  qu’il a bien l’intention de  troquer contre un habit sobre de son choix quand enfin, il reprendra le pouvoir usurpé. 

Car il s’agit bien de cela : de l’usurpation du pouvoir par les femmes. Le mari veut, quel que soit le siècle,  une femme dans son lit et des mets délicieux servis à l’heure pour son dîner. Il n’a cure de sciences, de latin, de grec et de philosophie. Les vers et la littérature l’emplissent de bile à tel point qu’on le verrait bientôt dépérir. Pour peu, on aurait pitié de lui !

Ce qui est vrai c’est la guerre aux extrémismes menée avec détermination et bon sens par Molière.  Qu’il s’agisse de  la préciosité ridicule des courtisans dévorés par le désir de  pouvoir ou de celle de trois péronnelles en folie qui se trémoussent devant le dieu Grammaire, la muse Poétique et les  Galimatias de tout poil, il s’agit d’une même Folie.  Nuisible à la bonne gouvernance, à la justice et au bonheur de tous. Voyez comme est traitée la pauvre Martine au naturel frappant (l’excellente Marie-Line Lefebvre) ! N’êtes-vous pas indignés ? Et Notre Monde moderne  n'a-t-il pas ajouté quelques folies en plus? La folie sexuelle, la virtuelle, la religieuse, l’économique… Mais où donc est passée la réalité ?  Et si Molière, par aventure nous revenait sur terre, il serait bien mari de  tous ces  excès  et de  ces extravagances  fantasmagoriques.  Des postures, toutes aussi ridicules. L’érotomane Bélise campée par  Cécile Van Snick décroche moquerie,  rires et gloussements à chacune de ses répliques! Le Trissotin de Pierre Poucet est en tout point odieux et exécrable à souhait,  personnage grandiloquent (au sens étymologique, s’entend), à l’affût bien sûr, du moindre profit. 

Molière  a donc raison.  Les maris en perte de pouvoir évident sont réconfortés d’entendre les  discours de Chrysale. Les filles (à marier ?) qui préfèrent l’amour à l’argent et  les plaisirs de couple et de famille  à l’érudition, sont  ravies de pouvoir faire un pied-de-nez à leur Philaminte  de mère-femme des années 80 ainsi qu' à leurs sœurs rivales ! A moins que tout ce beau monde, femmes, enfants et maris ne fassent fi du discernement, de  l’harmonie des alexandrins de l’illustre homme de théâtre  et ne soient devenus sourds à ses  savoureuses mises en garde verbales. Mmmm !

Distribution

 

Mise en scène : Armand Delcampe

Avec

Chrysale : Patrick Brüll

Armande : Morgane Choupay

Henriette : Agathe Détrieux

Vadius : Alain Eloy

Martine : Marie-Line Lefebvre

Clitandre : Julien Lemonnier

Trissotin : Pierre Poucet

Ariste : Freddy Sicx

Julienne : Julie Thiele

Bélise : Cécile Van Snick

Le notaire : Jean-François Viot

Philaminte : Nathalie Willame

Assistant à la mise en scène : Jean-François Viot

Décor et costumes : Gérald Watelet

Lumières : Jacques Magrofuoco

Régie vidéo : Quentin Huwaert

Régie lumières : Jacques Perera

Construction décor : Mathieu Regaert et Marc Cocozza

Direction technique : Jacques Magrofuoco

Une production de lʼAtelier Théâtre Jean Vilar et du Festival Royal de Théâtre de Spa, avec la participation du

Centre des Arts Scéniques.

Avec le soutien de la Province du Brabant wallon.

« Molière, l’humain parfait?

 

De la femme et de lʼhomme, il a tout observé, tout perçu ou pressenti, tout exploré et éprouvé.

Rien de la bonté, de la perversité, de la médiocrité humaine ne lui fut étranger.

Il se lança à corps perdu dans lʼaventure des désirs insensés.

Il prit tous les risques et souffrit tous les tourments. Il dit non, rusa, parla, protesta, se tut, reparla sans se démettre ou se soumettre jamais.

Dieu merci, il ne fut pas un « artiste pur ».

Il côtoya et chérit lʼimpur comme un fou, il comprit et il aima sans mépris lʼhumain plus quʼimparfait.

Poète vivant, il a, plus quʼaucun autre, fait vivre ensemble la poésie, la comédie et le drame, rires et larmes enchevêtrés, élans et faiblesses confondus, désirs infinis avec petites vérités pratiques à lʼexclusion des grands principes abstraits et des dogmes irréfutables.

Il a subi, il a enduré le calvaire des pouvoirs imbéciles, absolus et contradictoires, aux titres cumulés dʼauteur, dʼacteur et de chef de troupe… de sorte que mettre nos pas dans les siens nous paraît aujourdʼhui dʼun grand confort et dʼun incessant réconfort.  Merci au Saint Patron ! » 

 

                                                                                                                          Armand Delcampe (croyant en Molière)

 

 

 

 

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Le film de Joe Wright, "Anna Karénine"

Le film de Joe Wright, "Anna Karénine"

Fort de ses quatre millions de dollars de recettes depuis sa sortie le 16 novembre aux États-Unis, le film de Joe Wright, "Anna Karénine", est arrivé dans les salles de l’hexagone mercredi 5 décembre. Une adaptation osée du roman éponyme de Léon Tolstoï qui ne plaît pas à tout le monde… (LE PLUS, Nouvel Obs’)

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=191856.html

N’attendez donc pas une  reconstitution historique fidèle et l’illusion cinématographique, vous serez déçus !  Voici tout son contraire. Une mise en abyme théâtrale intelligente et moderne appliquant au pied de la lettre le principe de Shakespeare :

“All the world's a stage,

And all the men and women merely players:

They have their exits and their entrances…” 

12272856093?profile=originalLe gigantesque théâtre délabré de la première séquence est bien le  symbole de la Russie impériale de 1874. Il accueille des personnages virevoltants ou soudainement figés dans une chorégraphie méticuleuse (Sidi Larbi Cherkaoui). Les personnages se gèlent pendant qu’un autre prend vie. Une course de chevaux  surréaliste ébranle le théâtre bourré de spectateurs.  La locomotive est tour à tour, jouet et réalité.  Les cloisons basculent, les lumières cascadent, le plateau se transforme en vrai paysage l’espace de quelques instants de rêve, puis les personnages se retrouvent coincés en coulisses parmi les rouages et autres machines du destin. La femme impure est voilée.  Les scènes se superposent derrière la rampe lumineuse comme dans un kaléidoscope. Où est passée la réalité ? Le metteur en scène Joe Wright et le scénariste Tom Stoppard semblent attendre  intensément  les réactions du public du 21e siècle, la caméra est omniprésente. On retient l’étonnante musique,  toujours prémonitoire, de Dario Marianelli, qui n’est pas sans rappeler  l’opéra de quat’  sous de Kurt Weil ou la Valse de Ravel. « Dance with me » est entêtant et obsessionnel à souhait.

« Vanity fair » à la russe: la haute société impériale russe est décrite à l’emporte-pièce sur un mode  fortement  satyrique, on l’aura compris. Les costumes sont éblouissants, la vaisselle somptueuse,  les sourires exquis comme des cadavres. Et  tout est faux et irrespirable. Joe Wright nous fait penser à notre James Ensor et sa galerie de portraits dans sa présentation squelettique de l’œuvre de Tolstoï dont le roman foisonnant de près de 900 pages est réduit à l’ossature d’une romance cruelle.

12272856473?profile=originalAnna, (la voluptueuse Keira Knightley), plutôt que de chercher de nouvelles façons de faire revivre son mariage imposé avec Alexeï Karénine (Jude Law) désespérément blême et dénué de vie, joue la madame Bovary russe et ne résiste pas longtemps aux assauts du comte Wronski (Aaron Taylor-Johnson).  On l’aurait souhaité plus romantique et fougueux cet amant, il est un peu pâle et fade à notre goût, bien qu’excellent si l’on veut en faire un pur pastiche.  Pour Anna, bonheurs et malheurs s’accumulent dans la balance de l’amour mais les leurres de la société feront s’écrouler tous les rêves des amoureux qui semblent s’être  trouvés.  Et la mort est le prix que doit payer l’héroïne pour s’être  livrée  avec  convoitise aux jeux interdits. Comme de bien entendu, la morale du 19e siècle  sera  sauve,  surtout dans un monde fait par et pour les hommes et les pères. Ce monde clos du théâtre est devenu fou.  Le seul moyen d’échapper, pour Emma Bovary comme pour Anna, devient l’arsenic ou la morphine. Où  est la différence ? Toutes deux se  dissolvent dans l’amour chimérique. Mais pour  Joe Wright : "Tout le monde essaie d’une manière ou d’une autre d’apprendre à aimer". C'est son propos.  Et Aimer passe immanquablement par le pardon. Plusieurs situations dans le film en sont la preuve et en particulier le cri d'Anna privée de son enfant:  « Mon fils me pardonnera quand il saura ce que c’est qu’aimer.» La machinerie bureaucratique impériale est sans pardon et sans merci.

12272856877?profile=originalPar contre, le couple d’idéalistes Kitty-Levine (Domhnall Gleeson, très convainquant et la délicieuse Alicia Vikander)  qui a su reconnaître ses erreurs et pardonner s’est  échappé du décor et  vit  au grand air. Leur amour réciproque et l'amour des autres est leur nourriture quotidienne. Des scènes champêtres réelles rappellent la prairie où le couple Anna-Wronski a connu l’éphémère extase.

La verte prairie du « Golden Country » de  George Orwell dans 1984?

Une image de ce que pourrait être un monde de rêve  et de solidarité…  

Un monde qui se mettrait à vivre enfin, comme ces deux jeunes enfants élevés par Alexeï Karénine, devenu enfin un peu moins absolu?

 

 

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administrateur théâtres

12272855864?profile=originalDésopilant: dérivé de l'ancien français opiler « obstruer, boucher». Désopiler la rate, en l’occurrence, faire rire. C’est ce que « Le canard à l’orange » de Douglas-Home (« The Secretary Bird ») fait tout au long de la pièce, tant les bons mots et les situations scabreuses s’accumulent. Le maître de l’échiquier sentimental, Hugh Preston, vient de se rendre compte que sa femme Liz, après 15 ans de mariage, va partir en Italie avec John Brownlow, un bellâtre jeune et riche, marié et démarié trois fois.

Hugh est en effet le maître absolu du jeu alors que tout porte à croire que tout est perdu. « Everything under control » : il a plus d’un tour dans son sac et en particulier un appât très appétissant, « the Secretary Bird ». Avec jeu de mot, bien sûr. En effet, le serpentaire (la traîtresse) est voué à avaler le serpent (l’épouse). Ou peut-être pas. Mademoiselle Forsyth, beauté sulfureuse (« call me Pat ») est fascinante. Ce grand échassier ambitieux est né pour être amante, plutôt que femme mariée et a la finesse de le savoir. Son timbre de voix est ravissant, ses poses de mannequin irrésistibles, la peau lumineuse et belle, le maquillage soigné, le maintien altier et fragile à la fois. Juchée sur ses talons démesurés dans des tenues extra-courtes elle habite tout le plateau avec ses allures célestes.

Liz a fait 100 km pour aller se faire masser(?) ou plutôt si, mais pas comme on pourrait le croire. Hugh a tout compris et la confond dès la première scène. Ensuite il installe son piège méticuleux, il est imbattable aux échecs comme au tennis. Sens moral ou sens pratique? Qui est fou dans cette histoire?  Il invite le bellâtre chez lui avant la séparation définitive, pour arranger les termes du divorce. Au téléphone : « je vous repasse ma femme ! » Les rire des spectateurs fusent sans discontinuer, comme autant de bulles de champagne que les comédiens sifflent joyeusement. Le malheur des uns  fait le bonheur des autres: la salle est comble, on a dû ajouter des chaises. L’idée d’un canard à l’orange qui n’en finit pas de cuire sous la houlette avertie d’une vielle domestique, fait craquer de rire le spectateur à chacune de ses apparitions. Mais plus que le canard mythique, c’est le texte qui est succulent à en mourir et  dont la saveur appartient surtout à l’interprétation prodigieusement juste  des cinq comédiens qui ne cessent de se passer, corps et âme, le flambeau des réparties. L’évasion est complète avec la brillante mise en scène de Danielle Fire, les costumes chatoyants et une décoration d’intérieur savamment aménagée par Christian Guilmin.  Un spectacle de fêtes étincelant.

http://www.comedievolter.be/index.php?page=le-canard-a-l-orange

Avec : Catherine Conet (Liz Preston, un épouse fidèle? ), Michel de WARZEE (Hugh Preston, le bouffon appointé pour

amuser sa Majesté la Reine d'Angleterre), Laura SAVENBERG(Patricia Forsyth, the Secretary Bird), Laurent RENARD

(John Brownlow, le séduisant agent de change, alias lapin à bretelles) et Françoise ORIANE (Mrs. Gray, toujours gray)

 

Mise en scène : Danielle FIRE

Décors : Christian GUILMIN

Régie et éclairage : Sébastien COUCHARD

Durée du spectacle : 2h30 avec entracte

Le 24 Décembre la représentation est confirmée à 20h15 au tarif habituel.

Les 25 et 26 Décembre il n'y aura pas de représentation.

Le 31 Décembre nous ajoutons une représentation :

  • à  16h30   Prix unique 30€
  • à  20h15   Complet !

 

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administrateur théâtres

Jean et Béatrice de Carole Fréchette

 Vu pour vous au Théâtre du Blockry,  du 29 novembre au 12 décembre 2012

Mise en scène Cathy Min Jung

Avec Myriem Akheddiou, Nicolas Ossowski

 

Le jeu de l’amour et du hasard : Boucle d’Or, non, Boucle Anthracite attend au haut de sa tour (au 33ème étage) que son prince charmant vienne la libérer de sa solitude et de ses souffrances encore plus noires que ses cheveux. Elle est plus mystérieuse qu’une forêt vierge. Elle rêve de passion et de tendresse mais elle est plus secrète qu’un puits sans fond et sans eau. Lui, chasseur de prime pur et dur,  ne pense qu’à la récompense en billets de 20, promise dans la petite annonce, pourvu qu’il surmonte les « épreuves » de la dame mythomane. Il est prêt à user de tous les moyens (bonjour la sincérité des sentiments) pour tour à tour, l’intéresser, la séduire et la faire craquer. Mais au motif de toucher la prime. De l’amour, il n’en a cure ! Elle apparaît de plus en plus folle, lui coupe sans cesse la parole et lui, de plus en plus roué de vouloir la faire taire. La poursuite est délirante.  Et la pièce devient au fil des bons mots, des coups de griffes et des vérités-mensonges qui s’amoncellent, de plus en plus irrésistible.

Travaillant avec grande finesse et un sens aigu de l’observation du couple, Carole Fréchette, l’auteur canadienne de la pièce dirige le débat amoureux avec verve et causticité dans le cadre surréaliste de cet appartement improbable - Ceci n’est pas une histoire d’Ô -   meublé d’un unique fauteuil de cuir,  et parsemé de bouteilles d’eau minérale…  L’unique porte et l’unique fenêtre deviennent presque des personnages à part entière. On ne vous donnera pas la clé. Le  huis-clos amoureux, qui se mute presque en polar, question d’époque sans doute,  est bourré de suspense et de rebondissements.  Le rythme  débridé s’intensifie pour déboucher sur une clé que l’on jette dans le caniv-Ôh !  Mais où donc est la clé ? Tous les chemins de la carte du tendre aboutissent inexorablement à un mur. Le miroir aux alouettes de l’amour ne cesse de scintiller, la vérité ne cesse de se dérober. Le décalage entre l’homme indépendant et solitaire et la femme assoiffée d’amour ne cesse de s’affirmer. Mais le spectateur, bien accroché au fil du spectacle,  s’amuse follement dans les dédales du labyrinthe car il a le secret espoir que les personnages si touchants dans leurs contradictions finiront, à bout de souffle,  par se toucher enfin. Les vertus de la dispute ?  

C’est brillant, rocambolesque,  remarquablement interprété par Myriem Akheddiou  et Nicolas Ossowski totalement impliqués. Passion plus brûlante que le désert du Nevada,  action délirante sur  les quelques mètres carrés  de la scène et par-dessus-tout, un imaginaire plus  débordant que le fleuve qui sort de son lit. Vous parliez d’Ô ? « Au théâtre, il n’y a rien à comprendre, mais tout à sentir. » Louis Jouvet

Regardez la bande-annonce de la création.

 

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=490

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administrateur théâtres

12272847069?profile=originalAntigone est  une héroïne extraordinaire d’énergie juvénile, de volonté, de fidélité aux engagements, de fidélité aux lois divines qui sont au-dessus de celles des hommes. Elle symbolise la  lutte ouverte contre la dictature et la manipulation. C’est cela, l’Antigone de Sophocle, avec un chœur compatissant, ému aux larmes par le courage héroïque de la fille d’Œdipe qui voit disparaître pour toujours la lumière du jour qu'elle adore.

Jean Anouilh transforme la pièce de Sophocle. D’abord Créon superbement  incarné par Bernard Sens  expose un argumentaire détaillé des raisons pour lesquelles  il obéit à son destin  de chef d’un peuple de Thèbes ravagé par les guerres fratricides. Il a décidé d’exercer le pouvoir par esprit de service, de « faire son devoir »  et  de ramener un peu de paix à la cité. Le jeu de la folie d'Antigone par Wendy Piette  est si efficace que l’on se met à croire à la sagesse de Créon et à ses bonnes intentions. On se met, avec lui, à taxer Antigone d’égoïste et d’orgueilleuse. L'Ubris, c'est l’offense la  plus terrible chez les Grecs!   Dans des duos poignants, sa sœur Ismène (Manon Hanseeuw) qu’elle aime tendrement et plus tard son oncle, finissent par la traiter plusieurs fois de folle. C’est alors que l’on est le plus dérangé, car ils n’ont pas forcément tort.12272846896?profile=original12272847086?profile=original

Mais… la pièce fut écrite par Jean Anouilh pour réagir à l’affichage à Paris et dans tous les villages de France des « petites affiches rouges », des affiches immondes de la Propagande fustigeant les Résistants et assimilant à des terroristes dix d’entre eux  accusés d’attentats. Ils  furent  exécutés le 21 février 1944. Une rue porte leur nom à Paris: rue du Groupe Manouchian. On ressort donc de cette soirée, perplexe, dérangé, ouvert aux terroristes en herbe ?

Ou penchant vers le respect de la loi ? Même si c’est la loi de Créon, créée pour  manipuler la foule, lui donner un bouc émissaire et surtout lui donner un cadre de vie où le bonheur existe. Créon, un despote éclairé ? « La loi est d’abord pour les filles de roi ! Tu penses que tu es au-dessus des lois? »  Presque convaincue par les arguments de bon sens de Créon et l’amour qu’il éprouve pour elle, « Je t’aime bien Antigone, même avec ton sale caractère!»  Antigone a failli retourner à sa chambre et taire le crime qu’elle venait de perpétrer en ensevelissant son frère, contre la volonté de Créon. Créon veut la sauver, il est prêt à faire disparaître les témoins gênants par amour pour elle et pour son fils Hémon (Nicolas d’Oultremont), le fiancé d’Antigone. Il lui a démontré l’hypocrisie des prêtres : « Tu risques la mort pour une pantomime de prêtres ? C’est absurde ! » Il lui a révélé l’indignité écœurante  des frères ennemis qui valent moins que rien.  Mais non, tout d’un coup, elle se ressaisit et hurle qu’elle crache sur le petit bonheur sale et  sur l’espoir qu'elle trouve encore plus sale.  Cynisme héroïque et orgueilleux qui sèmera la mort autour d’elle ou résistance glorieuse par amour de la liberté ?

12272846695?profile=originalCette pièce est bouleversante comme son  décor, sorte de centrale électrique impressionante, et sa distribution magistrale.  Elle reste longtemps à flotter dans l’esprit du spectateur qui n’en finit pas de s’interroger. Le questionnement nuancé, subtil  et complexe empêche de prendre parti de façon manichéenne. Il invite tout simplement à la réflexion. D’autres éléments de la mise en scène sont très interpellants. Notamment la mosaïque de films de violence urbaine ou guerrière,  les tableaux inoubliables du reporter (Benoît Verhaert) qui va désabusé comme un  chœur omniscient et qui filme les scènes avec délectation.  De même, le tableau des foules aveugles friandes de sang et de « justice ». Et les misérables gardes auxiliaires de la « justice » … veules à souhait. Tout vous donne la nausée. Alors, tout d’un coup, d’aucuns pencheront pour Antigone!

http://www.trg.be/Public/Spectacle.php?ID=3784&saison=3772

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administrateur théâtres

 12272836281?profile=originalLe décor blanc crème est lumineux. Habit vert, maquillage d’oiseau, pied léger et aile d’Icare dans la rondeur du bras, un perroquet subversif entre par un pli du rideau et danse, en transe. Transcendance ?   Il rencontre un philosophe en costume blanc, Momo (ah les mots !) et son adversaire immédiate,  Lola, une femme africaine brûlante d’amour, fagotée dans des robes de couleur vive.12272836882?profile=original Le divan (vert perroquet),  lieu de parole, a un ennemi derrière le rideau: la vie charnelle qui vagabonde en jeux d’ombres sur un lit défait, blanc, lui aussi. Devant le rideau se balance  un trapèze pour les acrobaties verbales. La nuit, la cage se ferme, Loulou dort et Lola se dispute l’amour du philosophe. Conflit dans le triangle  à cause du monstre à l’œil vert, qui sème la pire des graines de jalousie. Toute la pièce est bâtie sur l’éclatement imminent du conflit. Il faudra que le philosophe choisisse. Choix douloureux. Ou la logique exclusive  du « ou… ou »  ou la logique  inclusive du « et.. et ». Devinez cependant qui  gagnera… Rêve d’Icare, l’envol ne peut se faire qu’à l’aide du verbe. Elémentaire, mais triste pour la partenaire  terre à terre du philosophe. Le vert vire au rouge.

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Il est si beau en scène, cet homme perroquet danseur, caqueteur, drôle et spirituel. On s’amuse à ce spectacle comme à un vaudeville. Elle, si charnelle et présente, cette compagne que le philosophe dit avoir dans la peau.

Être libre pour être enfin...

Le spectacle est étonnant, ce qui est bien pour la philosophie. Le jeu est miroitant, le verbe et les bruits d’oiseaux fusent, la forêt équatoriale même présente tous ses envoûtements.  Une heure pleine comme la lune : de la  poésie, du quotidien, du rire (Bergson es-tu là ?), de l’amour et des gestes gracieux.12272837481?profile=original

Le Philosophe et le perroquet

de Jacques Sojcher, Création

 

Avec Consolate Sipérius, Franck Dacquin, Francis Pedros

Scénographie : Dominiq Fournal

Chorégraphie : Francis Pedros

Lumière : Christian Halkin

Assistante : Fabienne Crommelynck

Mise en scène : Dolorès Oscari

Réservations au 02/538.63.58 ou à reservation@theatrepoeme.be  

Le Théâtre-Poème et les Jeunesses Poétiques A.S.B.L.
30, rue d'Ecosse - 1060 Bruxelles (Saint-Gilles)
http://www.theatrepoeme.be

 

du 27 au 30 septembre 2012

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"La Beauté de la Femme Noire"

12272798464?profile=originalLe lendemain, je la regardais encore endormie à coté de moi, j’observais ses longues tresses mélangées aux plis des draps froissés, c’était une princesse, j’étais au paradis. L'impression d’avoir enfin trouvé la femme de ma vie m’effleurait même l’esprit.

Je remontais délicatement les draps jusqu’à ses épaules un peu dénudées. Tout doucement, hésitant, je m’approchais pour lui donner un doux baiser, c’était plus fort que moi, un baiser ultra tendre pour une déesse, un câlin de qualité sur sa belle peau noire satinée.

J'aimais son odeur, l'envie de me blottir, de sentir son corps contre le mien était fort, j’aurais voulu que nos corps soient conjugués et ne forment qu'un seul Z. Je regardais ses lèvres, belles et pulpeuses, si africaine et bien dessinées, je pensais même que les stars américaines en seraient jalouses.

Au niveau de sa tempe, je voyais des petits cheveux bouclés qu'elle n’avait pu tresser car trop court sur cette partie de son visage. Ses petites boucles noires s’entremêlaient fortement à cet endroit, comme les gens au pays. Cela me rappelait son origine. J’observais ses sourcils, d’un noir intense encre de chine, lignes nettes entretenues et inimitables.

Ses mains aussi, ses longs doigts soignés, multitude de couleurs variant d’un brun foncé au ton ébène, parfois très noir, parfois cannelle et plus clair sur la paume. J’observais deux bagues en or à ses doigts, originales, j'aimais sa féminité, son style, sa fragilité. Sur la table de nuit se trouvaient ses boucles d'oreilles, deux grands anneaux, délicatement ôtés la veille.

Au milieu du lit, une forme ronde laissait apparaître ses hanches, je devinais la forme de ses fesses, elles semblaient être jolies, musclées même, surtout vers l’arrière, peut-être juste pour que mes yeux s’y posent.

Au bas du lit, les draps étaient un peu tirés, j’apercevais l’extrémité de ses pieds, ses ongles étaient ornés d’un rouge éclatant qui reluisait grâce à quelques rayons de soleil perdus par les tentures mal ajustées.

Passionné, je prenais sa douce main, cela me faisait quelque chose, je sentais une drôle de sensation au ventre, ce moment était appréciable, c’était 'Black et White', la 'Grande différence', le Contraste sublime' et ça m’allait si bien, si bien. (By Ben, extrait de "Destination Sud") 

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administrateur théâtres

L'ALLEE  DU ROI

De : Françoise Chandernagor, Jean-Claude Idée
Mise en scène : Jean-Claude Idée
Avec Jacqueline Bir
 
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Photo : ©Fabrice Gardin
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Ultimes représentations !

"Je brûle mais ne me consume"

 

A quatre siècles d’intervalle, deux génies, deux destins  s’entrecroisent. Celui de Françoise d’Aubigné, devenue  marquise  de Maintenon et celui de Jacqueline Bir, actrice. Toutes deux douées d’une rare intelligence, elles  sont de  fines psychologues qui ne  pouvaient que se rencontrer et ravir notre imaginaire.  Et nous faire tâter ce qu’est la résilience.  Jacqueline Bir manie la langue avec esprit et sensibilité   et nous conte avec connivence  le destin hors du commun  de cette  jeune fille roturière, née en prison d’un père assassin et d’une geôlière. Malgré le désamour, après un parcours étourdissant et courageux,  elle épouse  le  poète burlesque Scarron infirme et barbon dont elle est veuve à 24 ans. Elle  devint par la suite l'épouse du roi  Louis XIV après avoir été la fidèle gouvernante de ses nombreux enfants, nés de  la frivole Athénaïs, Louise de Montespan.

Jacqueline Bir  est comme l’héroïne : habile,  enjouée, solide. « Votre Solidité  »  avait coutume de dire Louis XIV à sa future épouse par analogie  avec les habituels « Votre Majesté »  ou « Votre Sainteté », marques suprêmes de respect. C’est ce que l’on ressent quand on voit  Jacqueline Bir se mouvoir  devant nous, changer de costume, parler, chanter, danser le menuet, camper une multitude de personnages, y compris le roi. Le  public  est conquis. Le  fabuleux  décor de Serge Daems et  la mise en scène  intelligente de Jean-Claude  Idée achèvent de séduire les spectateurs les plus exigeants.  

 Jacqueline Bir  fait surgir de l’histoire  et semble vivre elle-même une personnalité lumineuse, forgée dans l’adversité, une  ascension sociale extraordinaire et  une  vérité humaine profonde, au soir de sa vie: celle que « Tout n’est rien ». Mais  elle n'a jamais raté une marche. Mieux : chaque fois qu'elle montait d'un degré, elle voyait assez bien la marche d'après... Sous nos yeux et sous les yeux attendris de la statue équestre du Roi Soleil, elle se met à fabriquer un  escalier que Gide nommera plus tard « suis ta pente du moment qu’elle monte ». Mais  malgré son accession à l’amour,  au pouvoir, à la richesse, elle vivra aussi le renoncement. Elle contemple impuissante et résignée  la longue descente du règne aux abîmes avant de faire un dernier « à Dieu » au roi qui s’éteint.  

Elle n’a plus que les arbres, les livres et les enfants lorsqu’elle se retire à Saint-Cyr.  « A force de voyager entre le roi et Dieu, je suis  restée en chemin » nous confie-t-elle humblement. Elle regrette que jamais personne ne lui ait demandé si elle était heureuse, elle qui n’a eu ni père, ni mère et qui ne rêve que d'un peu de chaleur humaine.   Après Le Roi bien sûr,  il n’y avait plus que Dieu… Mais au moment ultime de sa mort elle a peur « de cette glace qui pénètre mon cœur et mon esprit. »  Une vie belle comme un chef-d’œuvre. « L'eau qui tombe goutte à goutte perce le plus dur rocher».   Une pièce jouée comme un chef-d’œuvre d’esprit et de cœur. 

 

C’est avec une sobriété majestueuse mais jamais ronflante que Jacqueline Bir joue la courtisane d’une classe imperturbable alors que souffle autour d’elle un tourbillon vertigineux de grandeur et de décadence.(Le Soir, mars 2008)

Une production du Théâtre Royal des Galeries.

Le 27 mars à 19h : conférence du philosophe Franck PIerobon (entrée libre sans réservation)


Lieu : Théâtre Jean Vilar
Dates : du 22 au 30 mars 2012
Durée : 2h20 avec entracte
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administrateur théâtres

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"J’ai quinze ans et demi, il n’y a pas de saisons dans ce pays-là, nous sommes dans une saison unique, chaude, monotone, nous sommes dans la longue zone chaude de la terre, pas de printemps, pas de renouveau."

 [...]

Ce texte marquant et inoubliable de Marguerite Duras est un  défi  de taille pour la jeune Sarah Fiorido, seule en scène au théâtre du Grand Midi.

« Très vite dans ma vie, il a été trop tard ! » L’Indochine des années 30. Elle est blanche, elle a quinze ans, des nattes sages, une robe sac en soie grège cerclée d’une ceinture, des yeux  de braise, un visage de madone et acceptera avec un certain  goût de la perversité,  la cigarette anglaise d’un chinois de deux fois son âge et  qui roule en limousine noire. La perversité, seule arme sans doute contre la douleur ?  Derrière la trame de cet amour précoce, déterminant et inachevé à jamais,  Marguerite Duras évoque en filigrane une douleur pour l’éternité. Cette douleur plonge ses racines dans  la violence et les souffrances liées à  son histoire familiale. L’absence de père, les déboires économiques de la famille, la  brutalité, la violence  du frère aîné qui vole la mère et les domestiques et  se complait dans les fumeries d’opium.  Ajoutez l’amour qu’elle voue à sa mère  mais aussi l’insuffisance de celle-ci, l'adoration pour le petit frère et la douleur de sa perte. « Comment ai-je pu aller jusqu’au bout de l’interdit de ma mère ?» se demande-t-elle. Seule l’écriture sera libératoire.

 

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L’amant, dont la servilité est l'argent de son père, est incapable d’imposer son histoire d’amour. Son père, profondément raciste, misogyne peut-être, est une   figure  tutélaire omnipotente. « Pas de mariage possible avec la petite prostituée (... tuée) blanche du poste de Sadec.» Sadec-la-sadique.

La comédienne au visage très mobile virevolte avec art dans la  narration éclatée en  «je» et «il» et «elle» et se retrouve avec grande maîtrise dans ce labyrinthe de points de vue. Sur quelques mètres carrés, dans un décor peu élaboré, elle suggère, transporte en Indochine, crée des images, vit une passion dans tous les sens du terme, raconte avec beaucoup de pudeur la découverte du plaisir physique et ses ébats aux heures de lycée. L’interprétation de la comédienne est juste, bien que légèrement dérangeante. La jeune amante est  froide, résolue à quitter celui qui, entravé par le pouvoir paternel, souffre en l’aimant comme il n’a jamais aimé. Elle est résignée et ne veut rien laisser paraître. Fière aussi de ne pas montrer ses larmes qui coulent, intarissables, sur le paquebot qui l’emporte vers l’Europe. Regards de la comédienne et texte sont bouleversants. « Elle retrouve seulement maintenant l’amour perdu comme de l’eau dans le sable et qu’elle n’aurait pas vu,» grâce à une valse de Chopin qui se répand dans le paquebot.

 

http://www.xltheatredugrandmidi.be/

 

Jusqu'au 4 février 2012

Sur les traces de Marguerite: http://belleindochine.free.fr/DurasAmant.htm

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administrateur théâtres

Une séparation (au théâtre du Méridien à Boitsfort)

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Une séparation du 15/11/2011 au 10/12/2011 à 20h30

                                 au théâtre du Méridien

Face à vous un couple silencieux, assis sur deux chaises de bois quelconque. Noir complet.

Tout a changé. Elle est debout, en pleine lumière et a décidé de se séparer. Pronom réfléchi. Pas réciproque. Il y a partout des cloisons suspendues, serties dans des cadres sobres.  Ces panneaux  de papier froissé  sont marqués de profondes fissures.  Une mise en éternité ? Des lettres non écrites et chiffonnées, des vagues d’amour séchées, des  jupons superposés, les  murailles abandonnées  d'une terre  désertifiée, les manuscrits de l’amour mort ? Tout dépend de l’éclairage.Les gymnopédies de Satie s'arrêtent.

«Je me suis arrêtée comme un train qui s’arrête en rase campagne, seule, les mains vides, j’ai continué à pied ». « J’ai décidé de te quitter pendant l’heure disparue, au changement de l’heure d’été ». Il a reçu cette déclaration de désamour dans sa boîte aux lettres, un matin  où  il descendait joyeux pour relever le courrier. Et il ne s’est pas relevé. « Je t’ai quitté car nous étions devenus deux silhouettes ». Elle ne supporte pas la grisaille, l’ennui. « Peut-on être amoureux et s’ennuyer ? ». La raison pour laquelle elle l’a aimé est la même que celle pour laquelle elle l‘a quitté. Avec lui, elle marche sur un fil, juchée sur ses hauts talons, , et  tout d’un coup elle a envie de quelqu’un de protecteur, qui n’est pas lui.

« C’est vers moi que tu aurais dû courir, pas au hasard,  pour dissiper ta colère », plaide-t-il, alors qu’elle a pris sa décision sans lui en courant dans un parc. Le cœur de Paul est réfractaire au désamour. « Toutes tes justifications pour expliquer ton désamour sont malhonnêtes.» 

Mais, incapables de couper franchement, Paul et Marie  ne peuvent se retenir d’aller l’un vers l’autre.  Surtout Paul qui refuse la séparation avec énergie. Ils  s’échangeront à contrecœur, mais cœur à cœur,  lettres, cartes postales, post-its, billets, perles du souvenir, parfums du passé avec une impatience de bon augure. On oscille entre les élans, la tendresse, les reproches, les espoirs, la solitude, les déceptions  - qui sont toujours une trahison - les pleurs.  Vont-ils trouver la juste distance ? Celle qui fait durer le sentiment ? Va-t-elle se faire dévorer par son bovarysme féminin ?  Il lui a donné toutes ses billes. Elle les ramassera et les mettra dans un grand bocal à conserves. Est-ce assez ? Au moment fatidique, après des échanges profondément vrais et émouvants, elle n’entendra pas la pluie  symbolique qui tombe sur la mer, ... à cause des doubles vitrages de son hôtel.

 

Cécile Vangrieken (Marie), typiquement femme de tête et l’attachant Laurent Bonnet (Paul) échangent des  mots brûlants, bouleversants, dits avec honnêteté, tendresse, respect de l’autre… Deux comédiens avec qui l’ennui n’existe plus. Le spectateur est captivé et entend battre son cœur car l’attente du renouveau ne cesse de faire des pirouettes audacieuses sur le fil de l’amour. Une soirée qui fut un régal. 12272772053?profile=original

 

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du 15/11/2011 au 10/12/2011 à 20h30

de: Véronique Olmi
m.e.s.: Philippe Beheydt

avec:
Laurent Bonnet
Cécile Vangrieken

 

© pour les photos: Benoît Mussche

 

Visionnez la critique de l'émission 50 degrés Nord ici (de 35'03 à 39'40)

 

Théâtre du Méridien 200/202 chaussée de la Hulpe 1170 Bruxelles

 

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administrateur théâtres

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« Diotime et les lions » d’après Henry Bauchau

Du 8 au 26 novembre 2011 au Centre Culturel des Riches Claires

La Perse antique. Diotime, fille indomptable, conte  son histoire. A quatorze ans elle se  révolte contre sa condition de femme. Elle va transgresser la loi du clan car elle veut participer au rituel du combat contre les lions sacrés,  rituel  violent et meurtrier, interdit aux femmes. Mais il n’y a pas de plus grand honneur que d’y participer et elle perd  toute envie de vivre si elle n’accomplit pas ce qu’elle sent être sa  destinée.  Elle entretient depuis très petite une relation fusionnelle avec son grand-père Cambyse, qui a d’étranges liens avec l’ancêtre lion du clan. « Cambyse ne me parlait pas beaucoup mais, si des obstacles surgissaient durant nos chasses ou nos courses au galop, je le trouvais toujours à mes côtés. Si je me débrouillais seule, il me regardait avec un sourire amusé et content. Pour ce sourire j’étais prête à surmonter mes peurs et à braver tous les dangers. » « La tradition du clan ne le permet pas ! »  lui dit sa mère. Cambyse lui promettra : " Pour toi nous inventerons une nouvelle tradition ". Elle ne se sent pas faite pour la condition féminine traditionnelle qui occupe les femmes aux travaux domestiques et aux joies du jardinage.   Elle reste néanmoins très proche de sa sœur et de sa mère, et se résout à abandonner son projet car elle a compris que  cette  dernière exécutera  sa funeste menace de quitter le père, Kiros, si elle participe à cette  guerre mythique annuelle. Mais dévastées par son désir extravagant Diotime  se meurt et est prise d’accès de folie. La mère, mue par la sagesse  et l’amour de sa fille, donne son autorisation. « Puisque tu es lion, va à la fête rituelle ! » « Je t’aime comme tu es ! ».

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 Diotime tue son premier lion. En même temps elle tombe amoureuse d’un  Grec du clan adverse, Arsès, « un grec de Grèce, au sens affiné de la mesure ». Mais celui-ci, pour pouvoir épouser Diotime devra se plier aux usages barbares et  tuer lui aussi , un lion. Le sort tombe hélas sur  l’ancêtre lion, mystérieuse incarnation de Cambyse. Arsès , le grec, a compris le piège et refuse la violence. C’est un principe. Intrépide et barbare,  Diotime s’élance elle-même à la poursuite du lion mythique. Arsès la suit. Mais le temps n’est pas encore venu pour le sacrifice. « Assez de folie Diotime » clame Kiros, son père.

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 Les voilà envoyés chez le sage au buffle noir pour un  long parcours initiatique. Cambyse déclare à leur retour : « Je suis vieux maintenant, grâce à toi je n’y avais jamais pensé. » Il lui donne sa propre lance et ses flèches. Le sacrifice du lion est accompli par le couple et le lieu devient sacré. « Si des lions et des hommes s’y rencontrent, aucun n’attaque et nul ne fuit. »  Les forces antagonistes se réconcilient dans une sage harmonie et le cœur  indomptable de Diotime s’aperçoit qu’il ne désire plus rien. Sagesse Tao.  

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Un livre de 50 grammes qui fait le poids ! Surtout sur scène avec l’interprétation pleine de sensibilité, de jeunesse et de passion de Stéphanie Van Vyve de ce texte inépuisable et poétique d’Henry Bauchau. Elle fait le poids aussi dans sa chorégraphie avec le danseur aux yeux fixes et au visage immuablement léonin, Ozan Aksoyek. Le sable vole, les corps luttent, le temps que l'on médite, comme si un choeur silencieux commentait les événements.   Et pourtant, elle ne pèse rien ou presque! Depuis le début elle est habitée par une sauvagerie étrange, et le courage décuple ses forces et sa volonté. Volonté de femme en devenir, qui choisit bravement l’autre : ce grec antagoniste,  celui qui n’appartient pas à son clan, et pour qui elle est prête à tout sacrifier par amour. Car elle est femme. Stéphanie Van Vyve est toute harmonie et mobilité, et réussit un  équilibre émouvant de la parole et des gestes. Réconciliant lumière et ombre,  forces antagonistes elle atteint la paix d’esprit après ce long combat d’éclosion.

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Du 8 au 26 novembre 2011

Du mardi au samedi à 20h30
Excepté les mercredis, représentation à 19h00

 

 

 

 

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administrateur théâtres

12272750887?profile=originalIl  y a d’un côté le public et de l'autre, les  trois murs étincelants mais  étouffants d’une  cuisine modèle impeccablement tenue. Tout juste si,  par simple illusion d’optique on ne les voit pas se pencher subrepticement pour avaler cette femme volubile encore jeune, dont la vie a été remplacée par la routine. La femme est banale mais heureusement profondément actrice.  Elle  est, malgré le cadre,  exquise, fougueuse,  incapable de rester en place, craquante de sincérité et de naturel, débordante de convivialité. Elle en est venue  au cours des années, à converser vaillamment avec le mur, le verre de vin blanc à la main, face à  son improbable interlocuteur. Peut-elle encore imaginer ce qu'il y a derrière le mur?

 

Un autre mur,  Joe, son mari lui dit bien de temps en temps «  qu’il l’aime », mais ce sésame n’ouvre paradoxalement  que sur les humiliations répétées, voire, le mépris  ou l’indifférence. Elle l'observe et le voit  en effet parler de façon bien  plus aimable à tous les étrangers qu’il rencontre!   Elle raconte avec délices  les éblouissements des débuts de vie de couple, les ravissements d’enfants en bas âge et  puis, moins drôle,  toutes les trahisons de la vie. Elle s’interroge:  va-t-elle oser sauter le pas, comme quand elle était enfant et qu’elle sautait du toit, pour partir  seule, en voyage de 15 jours en Grèce avec sa copine Jane, qui lui a maintes fois dit de larguer tout et lui a  même offert le billet de ses rêves ? Ses récits de vie et ses interrogations sont poignants, y  mêlant sans cesse le  réalisme des gestes domestiques quotidiens. Elle réalise soudain : « ma vie est un crime contre Dieu car je ne m’en suis pas servie, ne sachant pas quoi en faire ! » Elle est devenue inutile!

 

Doit-elle  « faire ce qu’elle voulait faire ou faire ce qu’elle devait faire ? » Elle découvrira que « les rêves ne sont jamais là où on les attend. »  Mais sautons  tout de suite à la fin de  l’histoire : «  Elle a subitement su qu’elle ne rentrerait pas vers Manchester avec la valise ! ». Elle a largué tous les démons qui l’enchaînaient. Elle ne traîne désormais  plus rien d’encombrant, elle se sent légère !  Elle compatit : « Joe aussi traîne sa vie comme un poids ! » Willy Russel – c’est un homme qui écrit –  a installé une  Shirley Valentine radieuse, décapée de toutes les  scories vénéneuses qui l’étouffaient, face à la mer Egée, sur un rocher … avec qui elle ne peut s’empêcher bien sûr de parler !  Question d’habitude.  Le rocher est couleur banquise, tout le reste du décor est noir.  Elle est belle comme une aigue-marine.

 

Entre l’immensité du ciel et de la terre,  elle  a enfin retrouvé sa dignité d’être humain, son identité  de « Shirley Valentine ».  V comme V Day, alors qu’elle n’était devenue qu’un avatar  oublié de grand mouvement du monde !  Là, assise buvant du vin  à  une table au bord de la mer - son égérie - elle déclarera d’une voix de star, à son mari qui vient la rechercher : « Bonsoir. La femme que tu veux voir n’existe plus. Celle qui était ton épouse  n’existe plus.  Celle qui était la mère de tes enfants, n’existe plus non plus. Celle à qui tu parles , c’est une femme que tu ne connais pas, Shirley Valentine, Amoureuse de la Vie. »

 

 C’est ce que Willy Russel veut pour la société entière : le changement, le réVeil, la ...Vie, quoi ! Au lieu de la manipulation et de  l’anesthésie générale des êtres humains en particulier, par les normes et les diktats de la consommation. Il ose brandir la liberté et souhaite que  les gens se réveillent de leur torpeur ! Et Shirley de souligner que  « les seules aventures de vacances que j’ai eues,  c’est avec moi, et je commence à m’aimer. »  Tout un Programme, une révolution,  à 42 ans !

 

Marie -Hélène Remacle, qui fonce dans cette pièce comme une météorite, nous  a offert un spectacle éblouissant d’humanité et de drôlerie. Pas étonnant que certains spectateurs ou spectatrices reviennent voir le même spectacle plusieurs fois!

 

http://www.bruxellons.net/shirley2011.html

 

http://www.comedien.be/Marie-Helene-Remacle

 





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