Voici un texte qui figurait dans le recueil "La part des anges", où les ébats amoureux tournent à la chorégraphie intime et sans fin...
La longue valse
À déguster sans modération...
Au son du piano, à la lueur des bougies, je cueille sur toi quelques frissons… mes lèvres passent sans bruit là d’où je viens de faire glisser tes sous-vêtements. Bref haussement d’épaules… tu as un peu froid. Je t’allonge doucement sur notre lit, te couvre de mon corps et de la couette… Les yeux mi-clos, tu fais mine de t’endormir, mais je te sais attentive: le souffle se fait soupir, puis murmure, et moi je te susurre à l’oreille tout ce que je voudrais faire de toi, de ton corps de Sirène que je voudrais transfiguré de plaisir, de ton âme que je voudrais en ce merveilleux moment fusionner avec la mienne.
Et à mon appel, je te sens venir à moi. Tes mains parcourent mes cheveux, mes épaules, mon cou. Je veux te submerger de sensations. Faire le bien, donner la jouissance qui transcende, transporte, qui éblouit. Je te le dis à l’oreille et tu acceptes. Tu te laisses faire. Ma bouche te parcourt, explore, s’attarde. Elle monte, descend, et entreprend d’embrasser le territoire de Vénus.
Déjà.
Et tu m'acceptes pourtant.
Mes mains partent à l’assaut de tes reins alors que je colle mes lèvres à celles de ton bas-ventre en une si belle étreinte que ton dos ondule avec lenteur. Je veux encore et encore t’aimer comme cela, soumis corps et âme à la juste loi du plaisir à donner sans retenue aucune, et j’étouffe de bonheur à la sensation de ton abandon, Petite Sirène qui m’offre son intimité, dont les mains s’accrochent à mes épaules, et qui vibre doucement de mes caresses.
Tes mains attirent ma tête entre tes seins. Ton buste dénudé, abandonné par la couette durant mes caresses, tout tiède, accueille ma tête toute chaude. A tâtons, tu me saisis doucement. Sous la chaleur de tes doigts, mon désir s’épanouit doucement. « Partageons », murmures-tu en me faisant glisser en toi comme par magie.
Éternelle émotion retrouvée des recommencements : me reviennent toutes les merveilleuses sensations qui m’avaient envahi lors de notre première fois. Nous étions vierges l’un de l’autre, et nous sommes laissés dériver vers un tourbillon de bonheur. Nos bouches s’épousent lentement, s’attirent et se soudent alors que plus bas, nos reins semblent danser doucement. Merveilleux rythme qui nous conduit lentement mais sûrement vers la lumière.
Nous nous prenons sans ménagement, maintenant. Nous luttons l’un contre l’autre, travaillant à tour de rôle, avec fougue mais sans violence, laissant la force de nos corps se rassasier l’un de l’autre. Comme deux athlètes qui s’affrontent en un pugilat tantôt rapide, tantôt profond, nos voix se croisent sous l’effort. La tienne me dit « viens », la mienne ne peut articuler. Elle monte cependant. Je voudrais me calmer, mais je sens ton corps qui veut le mien, et j’explose en un feu d’artifice de frissons, foudroyé par notre désir et notre amour en répandant au fond de ton ventre toute la jouissance de l’univers.
Sous tes yeux clos, comme en un religieux recueillement, ta bouche semble figée en un sourire comblé.
Mais je ne quitte pas ma petite protégée. Sous moi, à l’abri, je ramène doucement tes jambes l’une contre l’autre. Tu m’enserres d’autant plus fort ainsi, et je reste prisonnier au fond de ton ventre comme jamais prisonnier ne sera aussi heureux. Mes bras te tiennent la taille, mes jambes autour des tiennes, je bascule sur le dos et je t’entraîne sur moi.
Là, mes mains et ma bouche entreprennent de te rechercher. Sur ton dos, tes fesses, mes doigts écrivent un roman. Ta bouche explore la mienne. Je suis toujours au fond de ton ventre, où je grandis à nouveau. Notre position nous ranime tous deux : toi couchée sur moi, les jambes jointes, jolie missionnaire sur son amant couché sur le dos, jambes écartées. Qui est qui ? A qui le tour de faire l’amour à son amant ? Les yeux plantés dans les miens, tu me sens si grand à nouveau, si ferme qu’en nous laissant aller nous nous violerions sans retenue.
Mais tu as d’autres idées. Tu m’assieds au bord du lit, et t’imposes à moi, à califourchon sur mon désir dressé. Tu sais combien cette position a le don de me rendre fou, et, l’air coquin, me saisis les poignets, et guide mes mains vers tes reins. Doucement, c’est tout ton corps qui remonte dans un soupir, puis redescend pour m’envelopper, dressé dans ton ventre et...
Et… progressivement, tu te prends à ton propre jeu. En voulant m’exciter, tu te laisses doucement aller et ravive la flamme dans ton ventre.
Et moi, ravi, j'entreprends de t'attendre.
Je sens tout autour de moi une vague de douceur vibrer encore et encore, lorsque tout à coup tes reins s’emballent ils battent la mesure et vont et viennent alors que ta tête se jette en arrière et que tes mouvements s’accélèrent encore et toujours tes seins s’agitant au même rythme bondissant devant mes yeux émerveillés et toujours ton ventre vibre dans un concert d’encore un goût de trop peu et de cris qui me disent que cela ne finira jamais et notre amour nous transporte au ciel au paradis où nous nous faisons encore et toujours un amour éternel qui se déchire en une explosion chaude et fertile.
Foudroyés, nous retombons au hasard du lit
Comme pour dormir
Mais nous ne dormons pas
Je suis dans ton dos, immobile. Mes bras autour de toi, mes mains qui se rejoignent sur ton ventre chaud, qui semble ronronner comme on dirait d’un chat. Nos corps au repos s’épousent et demeurent un instant sages.
Mais le répit est de courte durée
Nous sommes gourmands et épuisés
Couchés de côté, tu m’attires une fois encore, doucement, avec une infinie délicatesse qui me ravit à m'en donner le vertige. Nous faisons un amour comme on marche sur la lune, avec cette lenteur des praticiens de Taï-Chi, et poussons à la quintessence du désir nos mouvements de ballet. Le monde se résume à nous deux, à nous seuls, à l’union sacrée et spirituelle de nos âmes et de notre chair qui résonne de mille jouissances.
Nous retombons enfin, à demi morts et pleinement vivants, et sans attendre un sommeil mauve nous enveloppe. L’un contre l’autre, recueillis en nous-mêmes, nous nous enfonçons ensemble vers le Grand Repos qui nous ouvre les bras.
Et ce n’est qu’un début.