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La battue

Ils dansent au petit matin, la vie que ce jour leur offre...

Délivrance offerte au destin et qu'en eux ils portent.

Sur le tapis immaculé, la débandade hivernale,

la valse des rescapés. Enfin s'éloigne l'infernal,

le clairon du meurtrier.

Que siffle la bise dans les buissons!

Caracolent fous les fanfarons!

Bravant l'arme pointée aux détours des chemins,

Ils fêtent, seuls survivants des plaisirs humains,

la battue des sangliers.

Joelle Diehl

10/01/2014

Avec tous nos remerciements.

Un partenariat

Arts

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Lettres

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LES MAINS DE MA MERE

Elles avaient raclé les miettes sur les tables,

grapillé le charbon au flanc des terrils,

ramassé branches et planches  pour allumer

                                        un feu de pauvre.

Mordues par la vie, elles restaient pourtant des mains d'enfant

qui habillaient des poupées imaginaires

et dessinaient des soleils sur des bouts de carton.

Entre la lessive et le devoir d'écolière, 

elles avaient gratté d'irréelles guitares

où leur âme se fendait en notes secrètes

                                          Entrte leurs gerçures,

elles avaient étouffé des colères de rebelle

et, mouillées de larmes, s'en étaint allées

cueillir la fleur rare, éclatée d'une graine aventureuse

                                          entre deux pavés.

Captives dans un atelier et tirant l'aiguille,

elles semblaient sur les taffetas, satins, broderies,

deux papillons voletant de corolle à corolle.

Du lot des meurtrissures, elles émergeaient aériennes

comme si leur vocation était d'apprivoiser les tourterelles. 

Un jour d'amour, elles déposèrent leurs fines nervures

                                           dans les poignes d'un ouvrier.

Les unes et les autres avaient de longues racines

gorgées de la houille du Sud et des sables du Nord.
Elles se nouèrent au temps des primevères, dans le souvenir commun

                                           du pain noir. 

Quand elles caressèrent mon premier battement de paupières

je reçus leur grâce au plus profond de ma chair.
Quand elles m'apprirent à cueillir un myosotis

ce fut pour le piquer dans mon coeur, que vivant

il y demeure à travers doutes et trébuchements.

Du langage des mains, elles me montrèrent tous les signes,

                                            puissants et délicats.

La tendre pression d'amour et la forte pression d'espoir,

le signe de l'adieu et celui du baiser,

les mains qui prient, s'offrent, maudissent,

                                           et le signe dur

du poing fermé pour la lutte finale,

les mains sur les yeux écrasant les larmes,

celles se frappant l'une l'autre dans l'enthousiasme,

et celles qui se creusent en coupe pour recevoir l'ondée,

ou s'écartent en croix ou dressent le flambeau,

tous ces signres, enfin, qui fusent du coeur...

                                           Les mains, les siennes,

sculptées dans la glaise des corons,

ne se refusant jamais à l'appel d'une détresse,

multiples et uniques, comblées de prodiges

                                           et de poignantes tendresses.

Elles sont vieilles aujourd'hui, traversées de veines bleues,

belles, comme le combat du blessé contre la mort,

comme une justice qui se montrerait nue,

comme l'obstination de l'aveugle à voir le jour

                                            dans sa nuit.

                                             Barbara Y. Flamand 

Extrait de "Les mauvais esprits et le crocodile vert".

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            REFLETS D’UNE AME QUI SE CHERCHE : L’ŒUVRE DE MIHAI BARA

Du 28-09 au 15-10-17, l’ESPACE ART GALERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) vous convie à une exposition axée sur l’œuvre du peintre roumain, Monsieur MIHAI BARA, intitulée REFLETS DE L’AME.

Les reflets de l’âme ont ceci de particulier qu’ils permettent, une fois exprimés sur la toile, sur la pierre ou sur la page blanche, la possibilité de briller sous l’astre de la folie créatrice. Cette folie trouve sa liberté dans l’étreinte unissant l’artiste au Monde. L’âme projetée sur l’espace scénique fait s’unir les rires, les fautes et les folies en devenant l’assise soutenant la comédie humaine.

L’univers de MIHAI BARA est constellé de créatures fantasmagoriques évoluant dans une atmosphère à l’esthétique ludique. Cet univers se caractérise par sa puissance constituée de couleurs vives, issues du fauvisme: rouge, vert, jaune, bleu à outrance dans une théâtralisation qui propulse le sujet au cœur du regard. L’artiste renoue ainsi avec l’héritage pictural du passé. Sur base d’une écriture néo expressionniste élégante, il aborde tout à la fois l’expressionnisme tourmenté de conception allemande classique ainsi que le primitivisme, au sens où les néo expressionnistes du début des années ’80 l’entendaient : un retour à la nature (à la fois le biotope et l’humain) par le biais du mythe exprimé par un chromatisme rappelant celui d’un Gauguin. Mais il y a aussi une volonté cubiste dans sa façon de « replier » ses personnages en plusieurs fractions dans la conception du volume, particulièrement en ce qui concerne les visages dans le but de les déformer. En cela, il redevient expressionniste dans la déformation critique de l’événement narré. Il est impossible pour le visiteur de passer devant n’importe quelle toile de l’artiste sans remarquer le traitement extraordinaire de la couleur nourrie d’une matière extrêmement travaillée. Un sentiment de « froissé » envahit le paysage. L’arrière-plan des toiles est généralement noir (ou foncé) visant ainsi à propulser le sujet du néant au devant du regard. La conception des visages est axée sur le modèle du « masque ». Un masque qui contribue à déformer le visage, amplifiant ainsi son humanité originelle dans un déchirement. Nous voyageons au cœur d’un carnaval absurde dans lequel grimaces, yeux exorbités et traits déformés redimensionnent l’humain en le replaçant au centre de sa propre tragédie. Néanmoins, le visage n’est pas le seul témoin du reflet de l’âme. Le traitement des mains participe également du portrait psychologique.

Elles assument le rôle d’alter ego par rapport masque dans son expression. Le sujet occupe la totalité de l’espace, à un point tel que la conception du volume, sous toutes ses facettes, confère à ce dernier des dimensions architecturales. A titre d’exemple, LES SILTIMBANQUES (100 x 100 cm-technique mixte)

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présente un personnage dont le corps est l’édifice, partant de la base de la toile jusqu’à atteindre, par la tête et les mains, les limites du ciel.

Dans l’œuvre de l’artiste, comédie et tragédie se mêlent dans une distorsion qui fait de la forme le témoin de la condition humaine. Avec son visage atrocement déformé par le mensonge, LE MENTEUR (100 x 100 cm-acrylique sur toile)

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se retourne dans toutes les directions pour semer ses calomnies. La torsion de gauche à droite et de droite à gauche se produit par duplications de la bouche, terminant le visage ainsi que par le regard coupé en deux, multipliant les axes directionnels, l’ensemble étant appuyé par un nez constitué de deux losanges séparés par une arête en diagonale, laquelle fracture le visage en une myriade de facettes au chromatisme vif, garantes du déséquilibre vital de l’œuvre. Seul le statisme de l’ensemble témoigne de la lucidité du menteur face à son mensonge. Car il s’agit de l’acte conscient de l’homme qui ment et non du délire pathologique du mythomane. Bien qu’il s’agisse de couleurs fauves, à aucun moment elles ne deviennent criardes ou agressives. Il y a chez l’artiste une véritable science des couleurs : quelle note utiliser, où la placer, comment la composer.

A CHAQUE FOU SON OISEAU (60 x 60 cm-acrylique sur toile)

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est la fusion de deux folies, forgée dans l’image de l’oiseau pénétrant le visage de l’homme. Ici, le déséquilibre fait office d’assise : le visage se passe du corps pour tenir debout. A partir d’une dominante verte structurant à la fois le visage ainsi que l’oiseau et le point sur lequel le personnage est posé, quelques brèves notes jaunes, rouges et bleues éclatent ça et là, accentuant la folie de l’ensemble. L’arrière ainsi que l’avant-plan constituent une opposition chromatique forte entre le noir intense et le rose-ocre terreux. Aux dires de l’artiste, cette toile lui a demandé beaucoup d’essais. Le résultat est une peinture extrêmement travaillée. Nous avons ici un ensemble pictural répondant à l’esthétique primitiviste dans la pure veine du néo expressionnisme des années ’80.   

 

SAINT GEORGES EN TUEUR DE DRAGON (180 x 150 cm-acrylique sur toile)

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L’artiste prouve sa connaissance de l’icône orthodoxe. Traduite dans son écriture personnelle, le corps du cheval ne se déploie qu’à partir de l’avant. Un bref raccourci laisse apparaître sa patte gauche arrière, provocant une intéressante variation rythmique. C’est à partir de cette variation rythmique que se produit le bond en avant de l’entité Saint Georges/cheval, assurant la victoire sur le dragon. On ne peut pas parler de « cinétisme » à proprement parler. Néanmoins, au fur et à mesure que le regard se promène sur la toile, des détails apparaissent (tels que les pattes avant du cheval émergeant d’un fond noir intense, esquissant le piétinement de la bête), mettant en exergue les particularités narratives de la mise en scène : Saint Georges résulte d’une stylisation issue d’une vision mystique. Son visage, mince se terminant en pointe est compris entre l’auréole et le vêtement (tous deux dorés) qui lui confèrent sa puissance. Nous retrouvons le jeu extrêmement parlant des mains stylisées. La droite tient les rennes du cheval. La gauche tient la lance qui transperce la bête. Cette stylisation des mains donne le sentiment que le Saint ne fait que tenir les rennes et la lance par le bout des doigts. Observez la façon dont la lance est tenue : on dirait l’archet délicat d’un violoniste. De même que son visage, tourné vers le ciel, atténue l’action guerrière pour atteindre la plénitude. La stylisation des rennes ainsi que de la lance participent du message mystique exprimant la victoire du bien sur le mal. La tête du cheval est conçue en un bloc compact tombant vers le bas. Le museau de l’animal définit la partie vivante de l’ensemble du corps (dont nous ne voyons, en réalité, qu’une partie). Par l’intrusion d’une fente faisant apparaître une série de dents puissantes serrant les rennes, l’artiste insuffle la vie à sa création. Nous retrouvons, ici encore, la puissance chromatique de l’arrière-plan noir faisant ressortir le sujet du fond d’un abîme originel. Le personnage de Saint Georges oscille entre histoire de l’Art proprement dite et l’iconographie chrétienne à but spécifiquement prosélytique. Ne perdons jamais de vue qu’au Concile de Nicée, en 787, l’art (plus exactement la présence de la figure humaine) ne fut toléré que comme vecteur d’enseignement théologique à destination du peuple. De conception théologique orientale, l’iconographie de Saint Georges a été particulièrement étudiée par l’art russe de tradition orthodoxe.

MIHAI BARA a parfaitement réinterprété cette culture iconographique et iconologique en jouant sur les composantes jaune/rouge qui dominent la composition. Le jaune : l’or – symbole de puissance depuis l’Antiquité classique et proche-orientale, parce que considéré comme métal incorruptible. Le rouge : symbole de chaleur, de feu régénérateur. Mais surtout, symbole du sang de la vie dans la mystique chrétienne. A certains moments de l’Histoire, le rouge devient pourpre, particulièrement dans la philosophie néo platonicienne, représentant l’image du pouvoir en relation avec la cherté du produit (la pourpre) extrêmement difficile à obtenir, que l’on extrait à partir d’un gastéropode. Ce qui en fait une couleur réservée à une élite sociale jusqu’à son passage symbolique vers la tunique rouge enveloppant le Christ. La couleur rouge devient alors le symbole du pouvoir temporel et spirituel. L’artiste a tenu compte à la fois de l’histoire et de la symbolique politique des couleurs. Cette œuvre témoigne de l’intérêt du peintre pour l’art sacré. MIHAI BARA nous avoue qu’avec un groupe d’amis artistes Roumains, il pense explorer les sujets bibliques dans un futur proche.      

LES SALTIMBANQUES (cité plus haut) présente un personnage campé dans différentes attitudes : jeu de mains qui jonglent (en bas, à droite et à gauche, la balle revient comme un leitmotiv) faisant de chaque élément un personnage de l’histoire. L’arrière-plan est divisé en deux parties : le noir partant de la base pour signer la ligne d’horizon, à partir de laquelle débute le bleu recouvrant l’ensemble de l’espace.

LA RUMEUR (80 x 80 cm-acrylique sur toile)

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nous convie dans l’esthétique allemande de l’expressionnisme historique, d’avant la Première Guerre Mondiale jusqu’à la République de Weimar.

Nous avons une série de masques à la Otto Dix ou à la Emil Nolde, présentant des visages tordus et grimaçants. Le pers à l’avant-plan, à droite se distingue par sa bouche grande ouverte permettant à la rumeur de se répandre. Une fois encore, les mains régissent la composition en structurant l’espace. Tel un beffroi, la main sortant de la base de la toile à droite, déploie ses doigts sur lesquels repose le visage du personnage, en haut. Tandis que la main de gauche (en haut) « recouvre » la tête du personnage. Les trois masques répondent à trois situations différentes. La main de droite partant de la base pour atteindre le haut, rappelle la façon architecturale de procéder pour concevoir le corps du personnage des SALTIMBANQUES.  

LA NUIT (62 x 50 cm-acrylique sur toile)

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est un jeu chromatique savant entre le noir et le bleu foncé. Il s’agit d’une vue nocturne qui renverse le discours sur la façon de concevoir ce type de vue. D’habitude l’arrière-plan est noir car il représente la nuit. Tandis que la ville garde des bribes de couleurs. Ici, c’est le contraire : la nuit est bleue et la ville est noire, malgré quelques ersatz de brun (en dégradés), de bleu, de vert, de rouge et de rose, conçus de façon à imaginer qu’ils ne font que passer. LA NUIT est, comme l’indique l’intitulé de l’exposition, l’expression d’un reflet de l’âme. Un état mélancolique qui tenaillait l’artiste une nuit dans sa vie. Abstrait à ses débuts, l’artiste n’en finit pas de poser son abstraction comme un sceau sur son écriture néo expressionniste. Avec cette œuvre, son abstraction se caractérise dans cette vision nocturne qui brise les conventions esthétiques. Nuit et ville se fondent tout en s’opposant. Sans doute nuit et ville se complètent-elles dans la mélancolie onirique qu’engendre l’ensemble.

Plusieurs étapes ont parsemé le parcours créatif de l’artiste. Nous avons indiqué, plus haut, ses débuts dans l’abstraction. Cela se retrouve dans le traitement des surfaces, comme brouillées par une brume hachurée. La place de la figure humaine se retrouve dans le rôle, social et politique qu’elle joue, à savoir le réceptacle de l’âme incarnée dans ses états. La dialectique qu’elle dégage est celle de l’acceptation de soi qui se retrouve dans l’Autre. Un dialogue qui se perpétue dans le labyrinthe intérieur qui mène à l’introspection par rapport à son propre regard et à la société qui impose le sien. Nous sommes plongés en pleine dialectique néo expressionniste : la figure humaine se dématérialise pour devenir conscience.

L’artiste est fasciné par le sentiment du regard intime, de la conscience individuelle par rapport à ce que la société laisse apparaître d’elle-même : l’image d’une société spectacle. La figure humaine occupe la position d’un personnage multi facial, lequel n’est qu’une petite pièce dans le puzzle social. Bien que son écriture soi dirigée vers le néo expressionniste, l’artiste est radicalement contre les étiquètes, en se posant au-delà des expressions. Car l’expression est basée sur le sentiment intime du Monde. Le visiteur ne manquera  certainement pas d’être interpellé par la haute qualité technique de ces œuvres. Précisons, d’emblée, le fait qu’il n’y a aucune forme de collages dans ses réalisations.

Ce côté froissé (évoqué plus haut) est le résultat d’un savant ajout d’apports divers, tels que le latex liquide, le papier ou du matériau textile, en ce qui concerne la phase d’élaboration du support. L’artiste a de l’œuvre une idée quant à la composition des lignes de forces. Chacune de ses œuvres est anticipée par un dessin préparatoire, mettant en exergue son grand talent de dessinateur. La toile est conçue comme une fresque dans l’étymologie technique de la Renaissance italienne : « l’affresco ». La toile est badigeonnée de latex sur lequel l’artiste dépose plusieurs couches d’acrylique, avant d’ajouter les supports précités pour créer ce côté « froissé ». Nous avons noté, plus haut, le très grand talent de dessinateur de l’artiste. Cela se remarque aisément dans LE BATEAU DES FOUS (65 x 50 cm),

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une composition où le blanc contraste avec le fond noir. Le Roi, reconnaissable à sa couronne tombante est mort. Deux personnages, situés à l’opposé l’un de l’autre, regardent vers deux directions différentes. La question que pose cette œuvre est celle de savoir quelle voie il convient désormais de prendre. Nous voilà confronté à une œuvre politique dans le pur style expressionniste allemand. Le bateau étant synonyme de la société, la question est donc de savoir dans quel chemin la société est prête à s’engager. Les dessins sont réalisés au crayon aquarellable, lequel a la particularité de pouvoir dessiner des traits précis sur une surface sèche. A l’intérieur de ces traits précis, l’artiste étale la couleur. Ce type de crayon permet de jouer avec l’humidité si la surface du support est humidifiée. Terminons l’analyse de ce travail en précisant que le peintre affectionne également la peinture sur foulard, à partir de tissus recherchés.

MIHAI BARA qui a suivi une formation de huit ans au Collège d’Art de Brasov en Roumanie, est un artiste côté qui a subi l’influence de peintres roumains, détenteurs d’une tradition picturale propre à sa culture. Il est aussi extrêmement sensible à l’œuvre de peintres tels que Tapiès, Dali, Breughel (l’Ecole flamande) mais aussi Klimt pour ses couleurs joyeuses. Le néo expressionnisme est, de par ses diverses influences, extrêmement difficile à définir. L’artiste pousse d’un cran son exploration créatrice pour atteindre des terres inconnues, éclairs chatoyants et déformés du reflet de son l’âme. 

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Frannçois Speranza et Mihai Bara interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

(Octobre 2017) photo Jerry Delfosse)

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UN THEATRE DE COULEURS ET DE FORMES : L’UNIVERS D’EDOUARD BUCHANIEC

Du 08 – 02 au 19 – 02 -17, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) a consacré une exposition dédiée à l’œuvre de Monsieur EDOUARD BUCHANIEC, un peintre français qui vous dévoilera l’univers décapant de sa fantaisie. 

Ce qui fait la signature de cet excellent artiste, c’est avant tout, la conception physique qu’il confère à ses personnages, à savoir un corps volumineux surmonté d’un visage qui rappelle la conception du masque. Le tout présenté comme une sorte de terrain délimité par une suite de zones chromatiques parfaitement indépendantes les une des autres. Un jeu de mains extrêmement évocateur anime l’entièreté de son œuvre exposée. Ceci est présent à un point où les mains sont si vivantes qu’elles pourraient, par la matérialité de leur gestuelle, remplacer la parole pour former un langage.

Il y a manifestement un dialogue entre la couleur et la forme. Celle-ci se définissant dans une hypertrophie du volume opposée à un vocabulaire chromatique composé de couleurs tendres, se signalant par une unité dans chaque zone considérée. Couleurs et forme s’interpellent, s’enserrent l’une dans l’autre comme des poupées russes : LA LISEUSE AUX POISSONS (100 x 81 cm – huile sur toile),

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le fauteuil dans lequel est assise la femme, sert en quelque sorte, de « soutien », encadrant le personnage dans son volume, le faisant ainsi ressortir. Dans ce tableau, quatre plans se superposent l’un sur l’autre :

1)    la table (zone brune)

2)    le personnage féminin (dominé par le bleu, en dégradés, et le blanc)

3)    le fauteuil (note verte)

4)    l’arrière-plan (dominé par le bleu, en dégradés clairs et foncés, pour signaler les poissons)

Masculins ou féminins, le traitement des visages présente une constante, à savoir qu’ils sont bouffis et plongés dans une même attitude procédant de la même technique : COUPLE A LA CRAVATE ROUGE (97 x 130 cm – huile sur toile),

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le balayage au pinceau délimite parfaitement les zones chromatiques. Le burinage laissé sur le visage par le pinceau lui confère une luminosité reprise dans la totalité de l’ensemble pictural, composé de vert, de bleu, de blanc, « dilués » dans un balayage savant, faisant ressortir la lumière d’une âme tout intérieure.       

La conception du visage concernant le personnage de gauche – la femme – témoigne d’une influence (même indirecte) avec Francis Bacon. La bouche « en cœur », le nez proéminent, les yeux alignés sur le même plan et le menton se terminant presque en « colimaçon », terminent ce visage empreint d’un expressionnisme interrogatif, lequel nous renforce dans l’idée qu’il y a effectivement une signature « Buchaniec », témoignant de l’identité de l’artiste. Il y a dans son art une dimension « brut » en révolte contre tout académisme.

PORTRAIT DE GROUPE (114 x 145 cm – huile sur toile),

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nous propose, à titre d’exemple, le personnage de droite dont le visage est totalement désaxé par rapport au tronc : les trois boutons (de couleur blanche) fermant son manteau (de couleur verte), axés verticalement, accentuent ce déphasage.

NU AU FAUTEUIL (100 x 81 cm – huile sur toile)

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est une apologie du volume et de la couleur à l’origine de la forme. Par sa translucidité, le corps nu de la femme anime la toile. Le trait circonscrit le volume en englobant la cuisse gauche du personnage jusqu’au pied, conférant au corps une dimension « naissante » du moment, lequel ne devient « présent » que par l’arrêt du visiteur sur l’image. Comme pour LA LISEUSE DE POISSONS (mentionné plus haut), l’œuvre se structure sur quatre plans :

1)    le sol sur lequel repose les pieds de la femme (« encadrés » par les deux pattes avant du fauteuil)

2)    le corps blanc de la femme irradiant l’ensemble de la composition

3)    le fauteuil « enveloppant » la femme de son chromatisme noir

4)    l’arrière-plan - vert foncé - se distinguant du vert plus clair de l’avant-plan

Le visage, penché sur sa droite, fixe le visiteur du regard aux orbites oculaires rapprochées. Est-ce la blancheur de son corps qui irradie sa féminité ? Est-ce cette même blancheur qui irradie le regard du visiteur ? Les deux questions s’entrecroisent car il s’agit ici d’une « féminité » au-delà des canons esthétiques conventionnels.

L’artiste s’efforce de retrouver la perception originelle de la « féminité » par une luminosité mystique ainsi que par l’hypertrophie d’un volume mettant en exergue l’identité iconique de la Femme issue de la pensée « primitive ».

Il y a rencontre entre le diaphane du chromatisme corporel et le regard du visiteur à l’intérieur d’une étreinte épiphanique.

Les mains reposent chacune sur les deux côtés du fauteuil (la zone noire « enveloppante »), attestant d’une possession totale de l’espace qui propulse l’image vers le regard.

Les deux pieds, tournés vers la droite, « déstabilisent » le corps (tronc de face, cuisses de profil) pour rencontrer le visage, tourné dans la même direction. Une légère excroissance du ventre se perçoit du côté gauche de sa personne ainsi qu’un court avancement de son bras droit par rapport au gauche, créant une torsion presque imperceptible des épaules, à l’origine d’une esquisse du mouvement dans son amorce, sa suspension ou son accomplissement.

Pour l’artiste, la couleur détermine la forme et vice versa. De même qu’une couleur peut en déterminer d’autres quitte à les retravailler pour rétablir un équilibre avec la forme. Forme et couleurs se répondent mutuellement. Un détail n’échappera point au visiteur, à savoir le rapprochement stylistique dans la conception à la fois sculptée et peinte du corps chez l’artiste. En effet, ce dernier pratique également la sculpture et cela se ressent à la vue d’une telle masse volumineuse pour affirmer le physique notamment dans la conception des mains. Depuis le début du 20ème siècle, bien des artistes pratiquant la peinture en même temps que la sculpture ont associé les deux techniques pour concevoir le traitement du corps dans la volonté d’un dépassement représentatif. Poursuivant ce procédé, l’artiste « peigne en sculptant » ses sujets pour mieux en dégager les voluptés. Comme tous les créateurs, il ne se pose pas forcément certaines questions. A titre d’exemple, nous avons fait allusion plus haut, à une symbiose entre les visages qu’il peint et le traitement apporté aux masques. Il n’y voit pas de lien direct, bien qu’il adore les arts de l’Afrique Noire, surtout lorsqu’il constate la capacité des artistes africains à animer une pièce en bois avec peu d’éléments. L’artiste est principalement autodidacte et parmi les influences qu’il a pu absorber, il convient de signaler, notamment, Matisse ainsi que les Impressionnistes pour la couleur et Picasso pour la forme.

Nous avons fait allusion, plus haut à Bacon, et c’est flagrant surtout dans la conception des visages. Néanmoins, Bacon n’est là que comme simple objet d’une influence – au demeurant, parfaitement honorable – mais ça s’arrête là, puisque la création de ses visages se signale par l’épanouissement des traits et non par la déconstruction et le pourrissement des chairs, comme souvent chez Bacon. Il y a, néanmoins, une filiation directe entre son écriture et l’art « brut » dont nous avons fait mention plus haut. Le fait que l’artiste soit un autodidacte apporte un complément explicatif à son attachement vital à la couleur et à la forme dans leur conception « primitive », dans le sens de leur idéalisation conçue, il y a des millénaires par l’esprit humain. De plus, chose insolite, il refuse que sa signature soit visible sur la toile, estimant qu’elle encombre la composition. Un jeu d’épreuve fascinant à jouer, consiste à dénicher sa signature, cachée dans les méandres de l’espace pictural. A peine visible entre deux couches de couleur. Par ce geste, l’artiste ne s’ « efface » pas face à sa création. Il met son ego de côté et laisse la place à la peinture.

L’artiste travaille à l’huile sur toile. Il pose une couche en épaisseur et la laisse sécher ensuite pour y rajouter une autre couche plus fine dans le but de faire transparaître celle qui est au fond et assurer à l’ensemble la luminosité qui fait son cachet.

EDOUARD BUCHANIEC est un peintre pour qui forme et couleur sont les portes absolues de son univers joyeux. Il nous l’offre pour que nous nous y plongions et nous laisse le théâtre de ses formes et de ses couleurs en guise de méditation.

François L. Speranza.

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N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

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A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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François Speranza et Edouard Buchaniec: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

(8 février 2016 photo Robert Paul)

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                                                Signature de Edouard Buchaniec

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Exposition Edouard Buchaniec, à l'Espace Art Gallery en février 2016 - Photo Espace Art Gallery

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Nos amis peintres et photographes 

nous offrent une vision du monde au travers de leur créativité.

Ils explorent les couleurs, les magnifient, 

les jettent à nos regards dans une symphonie joyeuse 

dont les notes chaudes 

nous font rêver à un monde meilleur.

En voici, choisies parmi les photos des membres,

elles resplendissent en jaune, orange et rouge.

Ensemble dégustons-les.

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Une sélection d'oeuvres

des artistes Arts et lettres.

Vignal Jean-Claude dit Ben-Kâ, Serge Lesens, Vigreux Marie-Françoise,

Danielle Bellefroid, Liliane Magotte,Sylviane Joséphine Tirez, Marie-Josèphe Bourgau,

Blanchet Odile, Olga Guyot,Claudie Capdeville, François Tapiezo,

Olga Patricia Chaparro,Mehu, Françoise Buisson, Claude Carretta,

Michel Calembert, Busset Marie-France,De Wit Charles, Grazyna Takowska,

Louis Van Cappellen, Jean-François Husson, 

Andrée Hiar, Angela Magnatta, Roger Jacky, Claude Hardenne, Plasschaert Daniel.

La chapelle du lac aux fées

"La chapelle du lac aux fées"

par Vignal Jean-Claude dit Ben-Kâ 

Portrait de fleur

"Portrait de fleur"

par Serge Lesens 

amarante 40x40 yupo

"amarante"

par vigreux marie-françoise 

Ici la terre , m'entendez vous !!!

Ici la terre , m'entendez vous !!!

par Danielle Bellefroid

"Papillon du jour, amour"

"Papillon du jour, amour"

 par Liliane Magotte

A river of mellow yellow

 Floats in the girl's gaze, 

Sorrows  flown  away

With the sun rise.

Watch the  perfect butterfly

Landing softly

In  the flaming landscape 

Of  liquid golden  leaves.

A perched village or a mediaeval town

Melts into soap and perfume  along the lassie's leg,

Singing a symphony of foaming  bluebells...

 And round the square one:

That same river of mellow yellow

That turns orange,

Welcoming a new night.  

Purple reds  will return

To saffron pearls of joy

And happiness.

Just give it a try!  

Deashelle

ST.5.SOUS UN CIEL FLAMBOYANT hUILE 70X50 400euros

"Sous un ciel flamboyant"

par sylviane josephine tirez

petite sortie

"Petite sortie"

par Marie-Josèphe BOURGAU

soleil couchant

"soleil couchant"

par Blanchet odile

Mille parfums

"Mille parfums"

par Olga GUYOT

Allégresse et ravissement.

Blonde et tendre,

C’est une rivière qui  flotte

Dans les yeux de la jouvencelle,

Chagrins envolés

Avec le lever du soleil.

Contemplez ce papillon parfait

Il vient se poser doucement

Dans le paysage flamboyant

De feuilles liquides et dorées.

Joue sur la jambe de la jouvencelle,

Un village perché ou une ville médiévale,

Dans la caresse du savon

Et le parfum

De la toilette matinale.

Murmure à mon cœur,

Cette symphonie oubliée

De myosotis et  parfums

De mousses d’antan.

La rivière jaune doux

Se fait flamme orange,

Dans la  nuit nouvelle.

Et de ses rouges pourpres,

Naissent des perles safran, 

Allégresse et ravissement.

Traduction en français du poème

de et par Deashelle.

 

la forêt

"la forêt "

par Claudie Capdeville

art_peinture_pigment_homme_vitruve_action_legerete_tapiezo

"art_peinture_pigment_homme_vitruve_action_legerete"

par françois TAPIEZO

abstraction

"abstraction"

par olga patricia chaparro

"36-4"

"36-4"

par MEHU

Lever de soleil au Der

"Lever de soleil au Der"

par Françoise BUISSON

Perché !

"Perché ! "

par Claude Carretta

XR6 III_Composition carrée (St Yrieix 2015)

XR6 III_Composition carrée (St Yrieix 2015)

par Michel Calembert

LE-COQ-A-L'OPERA

LE-COQ-A-L'OPERA

par BUSSET Marie-France

La Tentation du désir Charnel

La Tentation du désir Charnel

par De Wit Charles

Je t'aime quand même

Je t'aime quand même

par Grazyna TARKOWSKA

Un disque d'or

Un disque d'or

par  Louis Van Cappellen 

Abstrait 20 X 24 Acry

"Abstrait"

JeanFrançois Husson

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"Nuit chaude"

Andrée HIAR

Rouge

" Rouge" 

Angela Magnatta

Le petit berger N° 02 DS 01

" Le petit berger"

ROGER Jacky

Etude d'après modèle

"Etude d'après modèle"

Claude HARDENNE

pissenlit

"Pissenlit"

Plasschaert Daniel 

Un partenariat

Arts

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Lettres

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Une réalisation Actu TV à l'initiative d'Arts et Lettres

Et Voyez donc aussi le billet de François Speranza sur l'exposition de ce beau peintre:

BERNADETTE REGINSTER : DE L’EMOTION A LA VITESSE

Du 26-09 au 14-10-12 se tient à l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles) une exposition intitulée BERNADETTE REGINSTER, ARTISTE PLURIELLEqui ne manquera nullement de vous séduire.

Plurielle, elle l’est assurément et lorsqu’on lui demande dans quel style elle se sent le plus à l’aise, l’artiste met en avant la caractéristique majeure qui anime, selon ses dires, le signe des Gémeaux : l’empressement, carrément vital, à tout faire vite et bien ! En effet, tout ressort à fleur de peau chez Madame BERNADETTE REGINSTER. Cela est perceptible tant dans ses tableaux basés sur la technique du collage que sur ses œuvres en technique mixte.

Cela se ressent aussi et surtout dans l’émergence qui s’exprime dans la résurgence de cette « image-fantôme » représentée dans la plupart de ses tableaux centrés sur des vues de New-York, à savoir l’ombre des Twin Towers. L’artiste les fait, en quelque sorte, rejaillir de Ground Zero, pour les faire revivre sur la toile.

Le 11 septembre 2001 demeure une date phare dans la vie de l’artiste. Depuis longtemps, elle désirait se rendre à New-York pour voir le World Trade Center, à Manhattan. Malheureusement, Ben Laden s’est interposé entre elle et son rêve…Et depuis lors, BERNADETTE REGINSTER ne cesse de le ressusciter, non pas comme une réalité tangible mais à l’état de silhouettes vaporeuses, existant par leur présence tout en s’effaçant dans un improbable lointain que restitue la toile, terrain fertile de notre mémoire.

L’artiste ne systématise jamais. Tout est dans l’émotion. Ses collages en témoignent le mieux.BOWERY(2010 – 100 x 100 cm – technique mixte)

 

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associe passé et présent dans le même cadre. Le passé est symbolisé par des vieilles torpédos des années ’30 qui rappellent l’atmosphère, à la fois glauque et envoûtante, des films noirs. Le présent, lui, se concrétise par des stries faisant office de déchirures. Pour l’artiste, New-York est une ville déchirée qui garde une plaie béante.

BERNADETTE REGINSTER entretient une dialectique particulière avec les sujets de ses toiles.

Elle ne peut s’empêcher de les déplacer en les permutant de toile en toile. Il arrive aussi qu’elle les reprenne à l’intérieur d’une même œuvre, à l’instar de TIMES SQUARE(2010 – 1OO x 100 cm – technique mixte) dans laquelle l’axe vivant de la ville est repris plusieurs fois dans des angles différents.

 

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Cette volonté de « faire revivre » New-York témoigne également d’un travail d’archéologie sur la mémoire collective. En effet, au cours d’une précédente exposition tenue dans cette ville, l’artiste a soulevé la curiosité de certains newyorkais qui ignoraient jusqu’à l’existence de certaines photographies, tellement celles-ci étaient anciennes – quelques unes remontent à la fin du 19èmesiècle ! L’artiste utilise des documents qui vont de 1890 à 1930. De quoi donner à la mémoire collective matière à réflexion!

Artiste plurielle, BERNADETTE REGISTER l’est également dans la délicatesse du trait. Cela se perçoit dans ses petites encres intitulées OPUS(1998 – 24 x 30 cm), lesquelles mettent en exergue son grand talent de graphiste dans l’extrême finesse du rendu résultant du noir et blanc, ainsi que dans le savant mélange du rouge et du noir, obtenant ainsi un juste balancement chromatique.

 

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L’artiste est aussi sculptrice. A partir de tuyaux d’arrosage elle a conçu des silhouettes filiformes campées en couples enlacés. Et lorsqu’on lui demande si, de près ou de loin, elle a été influencée par ALBERTO GIACOMETTI, l’artiste que la question semble surprendre, confesse qu’elle n’y avait jamais pensé, même si elle adore l’œuvre du sculpteur suisse. Elève à l’Académie de Woluwé St. Pierre, elle poursuit sa formation en sculpture. Le groupe d’œuvres exposées présentent une étude de variations sur le mouvement. Chaque sculpture est « figée » dans une torsion, présentée comme un « moment » définissant l’attitude des personnages. Les titres qui les accompagnent sont extrêmement évocateurs : REGARDSENLACEMENT,INTIMITE….ils sont, en quelque sorte, des réminiscences remontant à l’adolescence de l’artiste, lorsque celle-ci étudiait la danse classique.

 

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A partir d’une clé usb, BERNADETTE REGISTER sélectionne des photos (notamment celles qui ont servi pour les TWIN TOWERS, à New-York), et travaille sur grand format. Toujours poussée par son empressement à aboutir à la vitesse de la lumière, elle privilégie l’acrylique car elle sèche très vite au détriment de l’huile, trop lente à se fixer.

Le visiteur le constate aisément dans BRUME(2012 – 80 x 80 cm - acrylique).

 

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Cette œuvre présente essentiellement deux zones (une rouge et une blanche) s’entrechoquant, créant un embrasement chromatique, à l’origine d’une brume incandescente. Technique et rendu coïncident car l’émotion que cette œuvre dégage ne peut se créer que par fusion instantanée.

BERNADETTE REGINSTER, qui a fréquenté les Ateliers Malou, en plus d’avoir entrepris des études artistiques d’Architecture d’intérieur au C.A.D Brussels (Private College for Advertising and Design in Brussels) , lesquelles ont grandement contribué à maîtriser le dessin ainsi que les mises en couleurs, est assurément une grande artiste. Une créatrice qui, au travers de ses œuvres, se cherche constamment au détour d’une émotion, véhiculée par la nécessité de la vitesse.

 

François L. Speranza.

 

Une publication

Arts 
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Lettres

N.-B.:
Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

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administrateur théâtres

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 Ecoutez Watteau, c’est une leçon de musique !

Cette exposition est l'occasion unique de redécouvrir ce maître ainsi que certains de ses contemporains à travers une centaine d’œuvres, réunissant peintures, dessins, gravures et instruments de musique. Fragile et peu abondante, la production du peintre, conservée aux quatre coins du monde, figure au patrimoine des musées les plus prestigieux. La voici à Bruxelles, cœur de l’Europe.  Elle est le fruit d’une collaboration inédite du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles avec le Palais des Beaux-Arts de Lille, initiant un flux intellectuel et artistique de premier plan entre les deux villes. Elle est inscrite sous le haut patronage de  Leurs Majestés le Roi et la Reine des Belges, sous le Haut Patronage de Monsieur Elio di Rupo Premier Ministre et sous le Haut Patronage de Monsieur François Hollande, Président de la République française. L’esprit qui préside à son installation est inscrit dans l’interdisciplinarité chère au Palais des Beaux-Arts dont la mission est de rassembler les arts, depuis sa fondation.

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La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.

Baudelaire, Les Fleurs du mal, IV.

Le poème « Correspondances »  de Charles Baudelaire ne peut pas trouver ici  meilleur écho. Tout d’abord au cœur de l’œuvre de Watteau lui-même qui trouve son inspiration picturale dans le geste  et le corps du musicien, le galbe et les formes des instruments aux connotations souvent  érotiques. Le désir  naît dans la musique, symbole de l’amour mélancolique. Et le porte-mine à deux pointes de l’artiste ou son pinceau et sa brosse s’empressent de capter avec vivacité et réalisme ses vibrations les plus profondes. Les titres de ses toiles seront évocateurs : « La leçon de musique, la gamme d’amour, l’accord parfait….  »  Intitulés évocateurs qui suggèrent les double-sens des fêtes galantes. Car, non, Watteau n’a pas d’appétence pour les traditionnels sujets religieux, mythologiques ou guerriers. Il s’intéresse aux sentiments intimes de l’homme, et cela, c’est une véritable révolution.     En 1717 il peint l’œuvre qui signa son style : « Le Pèlerinage à l'île de Cythère ». Une scène pastorale inspirée du « Jardin d’amour » de Rubens dont il était le fervent admirateur.  Il la soumit pour son admission à l’Académie où il fut reçu comme peintre (inclassable) et désormais appelé « peintre de fêtes galantes », un titre créé expressément pour lui. La campagne semble enchantée, les paysages, italiens, un pays qu’il ne connaîtra que par la musique, car il est pauvre et a  a raté de peu l’obtention du prix de Rome.

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Non seulement la musique, celle de Couperin en particulier,  est  source d’inspiration mais la présence d’autres disciplines comme le théâtre et la danse n’a rien de fortuit. C’est l’occasion pour lui d’insister sur les duperies et les humiliations de l’amour. Ombrageux et farouche, il convient que l’amour est éphémère et ne peut durer que le temps d’un morceau de musique. Voilà la boucle est bouclée.  Gilles le niais avec son costume de satin blanc, trop large et trop court, entouré d’autres personnages de la Comédie italienne, a peu de chances de séduire une dame frivole. Pierrot de dos est l’objet de quolibets féminins et est empêché de s’assoir.   Watteau annonce le théâtre de  Marivaux. Le mouvement des idées se fait en dehors de la cour et on se réunit dans les salons mondains chez Pierre Crozat, son bienfaiteur.

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Ensuite, le poème « Correspondances »  de Charles Baudelaire trouve aussi son écho dans la conception même de l’exposition qui n’est pas une monographie mais une mise en présence de disciplines correspondantes. C’est ainsi que  William Christie, le prestigieux commissaire général de l’exposition,  a orchestré lui-même le fil conducteur  musical de l’événement en intégrant le son à la scénographie. Des points d’écoute et des alcôves musicales sont  à la disposition du public tout au long du parcours de l’exposition. Au moyen d’un casque audio, le visiteur est invité à découvrir une sélection de morceaux de musique, notamment  des extraits  de  son concert du 28 janvier 2013 au conservatoire Royal avec Les Arts florissants. Une salle accueille des concerts gratuits interprétés par les étudiants de plusieurs conservatoires supérieurs de Belgique et de France, durant les nocturnes du jeudi soir.12272863684?profile=original

 

Et  les correspondances ne s’arrêtent pas là : la littérature rejoint le concert des plaisirs du luth, de la guitare  et du pinceau. En effet, Pierre Michon, l’écrivain français, est aussi de la partie. Les visiteurs peuvent également lire et écouter durant leur visite de larges extraits de son roman « Maîtres et serviteurs, la vie de Watteau », une œuvre littéraire contemporaine centrée sur la vie du peintre mort trop jeune de phtisie.

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La structure de ses tableaux est audacieuse et raffinée. Le peintre agence des personnages sortis tels quels de ses carnets  puis les  enchâsse dans des paysages poétiques. Armé de pierre noire, de sanguine ou de craie blanche, il a croqué avec souplesse et vivacité les gestes des artistes du pont Notre-Dame et ceux  des comédiens de la Commedia Del Arte … avant l’édit de  leur expulsion par le pouvoir. Dans ces vastes paysages qui ne sont pas sans rappeler les maîtres flamands, il laisse toujours un espace vide : pour le rêve, le silence, le temps suspendu ou  le sentiment de mélancolie. Plus que de nous parler, ses toiles vibrent de murmures mystérieux et de volupté : depuis les battements de cœur d’Arlequin ou de Pierrot, aux bruissements des feuillages, des  sources et des fontaines, jusqu'aux  froissements délicats des robes de soie des dames costumées. Clin d’œil à la sévère Madame de Maintenon ? Chimères ou monde réel ?  Les compositions asymétriques ont l’air de balancer entre deux. Mais l’émotion est sertie dans la palette brillante et les jeux de lumière mystérieux autour des personnages à la pose dansante et aérienne. Au XIXe siècle, Baudelaire dans les «  Fleurs du mal » et Verlaine dans les « Fêtes galantes » n’auront de cesse que de se référer à ce jeune peintre dont la réussite n’apaisa jamais la mélancolie.

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(né en 1684 à Valenciennes, mort en 1721 à Nogent-sur-Marne)

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   LA FEMME CELEBREE DANS LA FORME : L’ŒUVRE DE CATHERINE FECOURT

Du 10 – 03 au 27 – O3 - 16, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) a le plaisir de vous faire découvrir TEMPETE SOUS LE CRANE, une exposition consacrée à l’œuvre de Madame CATHERINE FECOURT, une peintre et dessinatrice française qui ne manquera pas de vous stupéfier.

A travers toute une suite de pérégrinations linéaires que l’esprit du visiteur pourrait qualifier de « mystérieuses », apparaissent les premières esquisses d’un discours traduisant un univers personnel, intime et profond, axées sur un langage morcelé, construisant et déconstruisant à la fois, cette réalité que l’on nomme la « forme ». Passer devant un dessin de cette artiste, s’y arrêter pour repartir aussitôt, participe de l’inconscience ! Le pourrait-on d’ailleurs ? Car, une fois que le regard, prisonnier de la beauté de ces formes, décide d’entrer dans cet univers onirique, il ne peut que s’y enfoncer comme l’on s’enfonce dans une terre inconnue pour le besoin vital de s’y perdre.

CATHERINE FECOURT nous livre ainsi diverses facettes de son panthéon intime, peuplé de créatures fantastiques, révélant la complexité de sa mythologie personnelle. Qu’est-ce que cet assemblage d’éléments disparates créant la « forme » ? Le visiteur ne pourra qu’être étonné par ces rendus traduisant un « surréalisme » personnel, sorti des sentiers battus que l’histoire de l’Art a rendu conventionnel.

S’agissant de visages essentiellement féminins, l’on remarquera le contraste saisissant entre la fluidité de certains plans avec la rigidité de divers attributs de conception géométriques.

Au contact visuel avec PENSEES FAKIRIENNES (29 x 21 cm – encre de Chine/pastel),

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une sensation insolite titille le visiteur à la vue de ces deux visages de femme. Une fois désimbriqué visuellement chaque élément constituant la forme, nous remarquons que l’artiste nous offre deux visages superposés l’un au-dessus de l’autre, contrastant avec des éléments géométriques dans le bas de la composition. Ce qui, d’emblée, frappe le visiteur c’est la présence des seins, placés à chaque extrémité du corps. A partir de ces seins s’élancent les bras démultipliés en quatre temps, soutenant la tête surplombant la seconde. La tête du bas (comportant des seins à chaque extrémité) est agrémentée d’une large bouche aux lèvres proéminentes, un nez à peine esquissé et de gros yeux, lesquels ne sont, en réalité, que les seins du personnage du dessus.

A la gauche de la composition (à droite par rapport au visiteur), un visage dominé par un œil écarquillé apparaît de profil. Des éléments sinueux, des formes géométriques, remplissent l’espace, conférant à ce dernier la dynamique nécessaire à son existence.

Un trait stylistique commun à  l’œuvre de l’artiste est le fait que les couleurs usitées ne sont généralement pas agressives. Que du contraire. Elles sont tendres et discrètes au point de sembler subalternes à la folie engendrée par la forme.

L’ARBRE DE VIE (29 x 21 cm – encre de Chine/pastel)

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représente un corps à la fois déstructuré et ramassé, associant plusieurs éléments placés de façon « disparate », tels qu’un doigt courbé à côté d’un sein (dans la partie inférieure de la composition). En réalité, à la lecture de cette œuvre, nous voyons apparaître quatre visages : le premier, au milieu partageant un œil avec le second visage de droite (à gauche par rapport au visiteur), situé de profil. Le troisième visage n’est autre que l’arbre (souriant) adoptant la forme humaine dont le feuillage est conçu comme une coiffure. A la gauche de l’œuvre (à droite par rapport au visiteur), la moitié d’un cadran d’horloge apparaît. Le quatrième visage, situé vers le bas, à droite, par rapport au visiteur, est extrêmement stylisé, ne dévoilant qu’un profil surmonté d’un œil clos, un nez crochu ainsi que d’une bouche ronde. Le tout faisant penser à une flûte à bec. Cet enchevêtrement de visages est ponctué par un thème récurrent dans l’œuvre de l’artiste : celui du sein. On le retrouve exprimé, sous bien des formes, à plusieurs reprises. Etant donné qu’il s’agit, en définitive, d’une ode à la Femme, le sein, tributaire de toute une mythologie porteuse de vie, devient un organe transcendé par des millénaires de culture, indissociable, dès les origines de l’humanité, à la manifestation de l’Art.

Le titre de l’exposition est pertinent au plus haut point : TEMPETE SOUS LE CRANE. Il s’agit de l’animation d’images issues d’un onirisme (celui de l’artiste) à la recherche d’un autre onirisme (celui du visiteur).

TEMPETE SOUS LE CRANE, titre repris par l’exposition (29 x 21 cm – encre de Chine/pastel),

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est une œuvre dont la caractéristique est celle d’associer dans un hybridisme décapant, des vestiges humains épars avec, à l’avant-plan, l’esquisse d’une façade. Cette disposition architecturale se retrouve également (quoiqu’exprimée différemment) dans PENSEES FAKIRIENNES (mentionné plus haut), en ce sens qu’il y a déjà dans cette œuvre une dimension « portante », (le visage féminin du dessous « supportant » celui d’en haut).

La géométrie fait d’ailleurs partie intégrante de l’œuvre de l’artiste. Ces espaces fluides dans lesquels sont composés les visages rencontrent toujours l’élément géométrique comme une sorte de répondant antithétique, traduisant l’intérêt que l’artiste éprouve pour l’architecture.

Dans TEMPETE SOUS LE CRANE, la fonction architecturale portante est soulignée, notamment, par la présence de murs. Cet hybridisme, extrêmement original pour notre époque, n’est pas sans rappeler (toutes proportions gardées !) les créatures mythologiques de l’antiquité classique et proche-orientale, telles que le « centaure », association entre l’homme et le cheval en un tout harmonieux. Il y avait alors le désir de traduire plastiquement une symbiose, non seulement mythique mais aussi économique, dans la domestication du cheval par l’homme, d’où cette unité morphologique entre ces deux créatures. Ici, nous pourrions nous risquer à prendre en considération le titre du dessin pour associer mystiquement la maison qui est l’habitat de l’homme avec le crâne lequel est l’habitat de la pensée ainsi que le donjon du rêve. Remarquons que le crâne se termine par le téton d’un sein, ce qui en dit long sur l’impact de la pensée féminine dans la construction de l’Homme. 

CATHERINE FECOURT est une dessinatrice autodidacte qui crée depuis des années sous l’impulsion de l’écriture automatique, à la manière des surréalistes. Influencée, notamment, par la bande dessinée, elle aime apporter un côté androgyne à ses personnages spécifiquement féminins dans leur consistance émotive. Ceci, pour affirmer sa croyance en l’égalité des sexes. Cette tempête qui bouleverse l’intérieur du crâne n’est autre que la puissance créatrice qui anime tout artiste. Elle souffle sur le chemin du visiteur qui par le regard s’immerge dans ses œuvres. Car ce n’est que par le regard parcourant ces dessins que le visiteur s’abreuve au rêve de l’artiste pour atteindre son propre rêve.

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza


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Catherine Fécourt et François Speranza:  interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

(9 mars 2016 - Photo Robert Paul)

                                      

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Exposition Catherine Fécourt à l'Espace Art Gallery en mars 2016 - Photo Espace Art Gallery

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administrateur partenariats

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Robert Paul

et les membres d'Arts et Lettres

ont le plaisir de vous inviter à la première

Rencontre d'automne entre les membres d'Arts et Lettres

Ce vendredi 25 octobre dès 19.30 h

au Restaurant Yen à Bruxelles

Afin de permettre à chacun de rejoindre la joyeuse assemblée à son aise,

un apéritif sera organisé dès 18.30h à

 Espace Art Gallery by Jerry Delfosse

Rue Lesbroussart 35, 1050 Bruxelles

(+32 497 57 71 20)
situé à deux pas du restaurant.

Jerry Delfosse met gracieusement sa galerie à notre disposition pour l'occasion.

A cette occasion, et afin de donner un caractère festif et convivial

à cette manifestation, chaque convive est invité à se munir d'un petit présent

humoristique et original qui sera offert par tirage au sort

à un autre convive au cours de la soirée !

Le prix du menu unique est de 50 euros par personne.

Assortiment d’entrées.

Assortiment de quatre plats : poulet, bœuf, canard et crevettes.

Dessert : choix entre beignets bananes ou pommes.

Thé, café

Une demi bouteille de vin par personne. Eaux


La réservation ferme se fera exclusivement

par le virement au compte bancaire    

BE18 0358 6853 0765

BIC GEBABEBB

au nom de Liliane Magotte

pour le 22 octobre au plus tard, en mentionnant

le nom du participant et le nombre de menus réservés.

Plan d'accès pour le restaurant

Restaurant Yen

Rue Lesbroussart 49, 1050 Bruxelles

(+32 2 649 07 47 )

Parking payant à proximité, Place Flagey

 

Pour tout renseignement complémentaire,

envoyer un message privé à Liliane Magotte

Au plaisir de vous rencontrer !

Voici le lien des photos de la soirée

Succès pour la première " Rencontre d'automne "

entre les membres d' Arts et Lettres.

Une organisation

Arts  12272797098?profile=original

Lettres

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Prélude aux combats

Le royaume des Pays-Bas, création des puissances victorieuses de la France napoléonienne, était miné par des maux graves. Des observateurs bienveillants, les diplomates de la Sainte-Alliance, ne cachaient pas les périls qui menaçaient cette union de deux peuples qu'opposaient les intérêts et les passions. Belges et Hollandais avaient été séparés par trop de conflits depuis le XVIe siècle pour qu'ils puissent, en quelques années, être réunis dans un ensemble barmonieux. Un génie politique n'aurait sans doute pas échoué dans cette tâche. Mais Guillaume 1er, financier avisé, certes, homme d'affaires connaissant les facteurs économiques de la vie des peuples, manquait de sens politique. Dans un monde où le libéralisme triomphait, ce despote éclairé, attardé dans le XIX. siècle, ne pouvait réussir à rapprocher les frères ennemis. A mesure que les années passaient, que la prospérité matérielle se développait, l'espoir de réaliser « l'amalgame » s'éloignait. Dans l'aisance et la puissance économique, les Belges trouvaient de nouvelles raisons de réclamer une part plus grande du pouvoir, que le roi, absolutiste étroit et obstiné, leur refusait.
La Révolution de 1830 a des causes profondes. Les rivalités commerciales, la fermeture de l'Escaut et l'exploitation systématique de nos provinces avaient laissé de l'amertume au coeur des Belges. Les catholiques et les calvinistes, depuis le XVIe siècle, ne s'étaient jamais rapprochés. Ils se haïssaient cordialement. Une évolution divergente depuis plus de deux siècles avait profondément marqué le caractère et l'esprit des populations du Nord et du Sud. Les moeurs, les traditions, le genre de vie étaient très différents dans les deux pays.
Dans les provinces du Sud, le régime français avait accentué la suprématie de la langue française au sein des milieux aristocratiques et bourgeois, classes dirigeantes de l'époque.
Même en pays flamand, le français était la langue des hommes qui avaient quelque influence dans la vie politique et sociale. Le prestige de cette langue, au XVllIe siècle, à travers toute l'Europe cultivée avait été énorme et les mesures administratives de la République et de l'Empire en avaient intensifié l'usage.
Au cours des quinze années de vie commune, aux Etats-Généraux, Belges et Hollandais s'étaient fréquemment dressés face à face. Cependant, les vieux libéraux belges, foncièrement anticléricaux, souhaitant le monopole de l'enseignement pour l'Etat, avaient à plusieurs reprises apporté au gouvernement leur appui Mais ils furent bientôt bousculés par une jeune équipe d'écrivains et d'avocats qui considéraien avec crainte les progrès de l'autoritarisme royal. Ces lecteurs du Globe. organe du néo-libéralisme français, songeaient plus à attaquer le empiètements et les conquêtes des ministériels qu'à combattre les « apostoliques ». qui réclamaient une application sincère de la Loi fondamentale et demandaient la responsabilité ministérielle, l'établissement d'un régime vraiment représentatif et l'inamovibilité des juges. Les journaux constituaient le meilleur moyen de diffusion de leurs idées. Or, la presse était toujours soumise, en fait, à un régime de contrôle très gênant. Les poursuites contre de Potter manifestaient bien le péril que courait cette liberté essentielle. Aussi la liberté de presse devint-elle une revendication formelle de ces jeunes libéraux.
Ces journalistes, ces avocats, ces bourgeois, qui étaient de langue et de culture françaises, étaient en outre menacés dans leurs habitudes et leurs intérêts par les arrêtés ministériels en matière linguistique. Aussi firent-ils valoir un autre grief: le mépris du gouvernement pour la liberté des langues.
Hommes jeunes, n'ayant pas connu l'Ancien Régime où l'Eglise détenait en fait le monopole de l'enseignement, ils se résignaient aisément à renoncer au monopole scolaire d'un pouvoir, néerlandais et autoritaire. Ils étaient prêts à un compromis avec les catholiques, qui, depuis 1815, n'avaient cessé de s'élever contre la domination gouvernementale protestante en matière d'enseignement. Dès lors, l'accord des libéraux et des catholiques devenait possible. L'union des oppositions était d'autant plus réalisable que, chez les catholiques, en Flandre surtout (fait quj prouve bien la diffusion du français dans les milieux intellectuels), les idées de Lamennais en faveur d'un catholicisme libéral, avaient fait de grands progrès.
Le rapprochement se précise de plus en plus. Le 8 novembre 1828, de Potter lance son fameux cri de ralliement: « Jusqu'ici, on a traqué les Jésuites. Bafouons, honnissons, poursuivons les ministériels! ». Le danger de cette Union est grave pour la stabilité du royaume. Sans doute, les catholiques du Brabant septentrional et du Limbourg «hollandais » se joignent à leurs coreligionnaires belges dans leurs revendications religieuses, sans doute, quelques libéraux hollandais commencent à réagir contre l'impitoyable fonctionnement du régime de Van Maanen, mais il s'agit là d'une minorité peu influente.
C'est essentiellement entre Belges et Hollandais que la lutte est ouverte. Les premiers se plaignent de l'accaparement des fonctions publiques par leurs adversaires. En 1830, n'y avaitt-il pas mille neuf cent quatre-vingts officiers hollandais, alors qu'il n'y avait que trois cent quatre-vingts belges?
Il n'est guère possible au roi de donner satisfaction aux opposants, car son Etat ne peut subsister que sous le régime rigoureux qu'il a imposé. Relâcher la pression administrative, céder aux demandes de l'opposition, c'est ruiner son oeuvre; admettre la représentation aux Etats-Généraux d'après la population, c'est provoquer l'écrasement des Hollandais qui ne sont qu'un peu plus de deux millions contre quatre millions de Belges. Aussi les Hollandais, comme par instinct, sont derrière le souverain de leur glorieuse dynastie d'Orange-Nassau.
I..e divorce idéologique entre les Hollandais immobiles et les Belges passionnés de libertés, se renforce de profondes oppositions entre les deux économies que le roi a tant fait pour amalgamer. La conciliation des intérêts divergents est délicate. En matière fiscale notamment, les Belges protestent contre les impôts de consommation sur le pain et la viande. Le roi s'est heurté à l'obstination du haut commerce hollandais et au dédain du grand capitalisme d'Amsterdam pour les Belges. Pendant que la Hollande refusait de s'adapter au monde nouveau qui naissait, les Belges développaient et modernisaient leur industrie, profitaient des créations bancaires de Guillaume 1er et Anvers, libre, renaissait magnifiquement. Aussi les Belges supportaient-ils de plus en plus difficilement de jouer un rôle secondaire dans l'Etat. Le fossé se creusait toujours davantage entre les deux parties et, au cours des années 1829 et 1830, les froissements se multiplient. Le fameux message royal du 11 décembre 1829, ouvre les yeux à de nombreux Belges sur les intentions de Guillaume. Message anachronique dans un monde porté par une puissante vague de liberté, il proclame les droits quasi absolus du souverain. Guillaume 1er cimente lui-même le bloc de ses adversaires.
De plus, les dernières mesures politiques du roi sont prises dans une conjoncture économique défavorable. L'Europe, en effet, depuis 1811-1817 est entrée dans une phase de baisse des prix et elle y restera jusqu'au milieu du siècle. Il en résulte de pénibles conséquences pour les finances publiques et pour les entreprises privées. Cette Europe, d'autre part, s'industrialise, la mécanisation fait des progrès. Sur le Continent, c'est en Belgique que ces progrès sont les plus rapides. Les crises du capitalisme industriel et financier se succèdent à un rythme régulier. Après les années difficiles de reconversion qui ont suivi la fin des guerres napoléoniennes, l'économie anglaise a été secouée en 1825 et 1829 et les répercussions en ont été sévères de ce côté de la Manche. La guérison est lente et 1830 n'est une année de prospérité, ni en Grande-Bretagne, ni en France, ni aux Pays-Bas. Dans ce dernier pays, la politique royale de soutien de l'industrie novatrice a provoqué un développement trop rapide de l'appareil de production. En mars et en juin 1830, la place de Verviers est brutalement frappée: faillite de banquiers, d'industriels. A Liège, en juin, « les nouveaux malheurs survenus dans le commerce rendant l'argent rare », le banquier de Sauvage réduit ses crédits. Cockerill, au printemps, est pressé par ses créanciers et implore l'aide du gouvernement. Les grands fabricants de tapis Overman et Cie de Tournai réclament aussi du secours et, en juillet, les fabricants de cotonnades gantois s'inquiètent de l'accumulation de leurs stocks. Enfin, la Révolution parisienne du mois de juillet a provoqué un choc néfaste au commerce et la confiance disparaît. A ce ralentissement d'activité, au cours du printemps et de l'été 1830, s'ajoute l'effet d'une hausse cyclique du coût de la vie depuis 1824. L'indice des produits végétaux indigènes est passé à Anvers de 65 en 1824 à 113 en 1829 et à 122 en 1830. L'hectolitre de froment qui valait 5,43 florins en 1824, vaut 10,93 florins en 1830. Aussi le pain a quasi doublé de prix. L'indice des prix des mercuriales est passé de 64,2 en 1824 à 97,3 en 1829 et à 107,5 en 1830. En outre, « un hiver aussi rigoureux que prolongé est venu accabler une grande partie de la population, multiplier ses besoins et naturellement occasionner une grande cherté dans les objets de première nécessité ». (Exposé de la situation de la province de Brabant méridional, juin 1830).
Dans cette économie qui n'est point encore moderne, le coût élevé des céréales est dû à la médiocrité des récoltes. Il n'entraîne pas la prospérité de l'ensemble de la classe agricole, mais des seuls gros producteurs. Les journaliers et les petits cultivateurs ne profitent guère de ce renchérissement des céréales.
En 1830, enfin, la soudure fut difficile et l'appréhension d'une production insuffisante poussait les fermiers à dissimuler leurs réserves. Les premières évaluations étaient pessimistes et, dans les tout premiers jours de septembre, les autorités en Hesbaye, dans le Limbourg et le Luxembourg, ne cachaient pas les très mauvais résultats de la récolte.
Les salaires n'ont point suivi le mouvement de hausse du coût de la vie. En 1827, le tisserand verviétois gagne le même salaire qu'en 1820, 1,48 franc par jour, et c'est un haut salaire. Sa fille gagne 42 centimes et son fils 52. Une femme se plaint amèrement, en septembre 1828, de ne recevoir que 85 centimes par jour. Si le chômage vient réduire le salaire réel, on peut aisément comprendre le malaise profond de la classe ouvrière.

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Telle était l'atmosphère lorsque va éclater la nouvelle des « Trois Glorieuses ». Les réactions sont diverses.
Les libéraux sont ravis de la chute de Charles X, mais certains catholiques sont effrayés par la crise d'anticléricalisme qui secoue Paris, car l'exemple est contagieux et les liens avec la France sont nombreux. Les journaux français sont lus avec avidité et les contacts personnels entre certains hommes politiques des deux pays sont fréquents. Toutefois,il n'y a point imminence de crise révolutionnaire: Gendebien partira pour Paris le 21 août, chargé d'aviser ses amis français de la remise à plus tard de toute action violente. Cependant, le 25 août au soir, la représentation de la Muette de Portici, l'opéra d'Auber, est l'occasion d'une émeute. L'air, repris de la Marseillaise « Amour sacré de la Patrie » déchaîna l'enthousiasme dans la salle, tandis que sur la place de la Monnaie, la foule se massait. Déjà avant la fin du spectacle, un groupe se dirigea vers les bureaux du National, le journal exécré, rédigé par Libry-Bagnano, un homme fort méprisé. Quelques pierres furent lancées dans les vitres. Puis, renforcé, le groupe alla piller rue de la Madeleine, la maison particulière de ce scribe, ancien forçat. Celle du directeur de la police P. de Knyff est ravagée. Vers onze heures du soir, un autre groupe d'environ deux cents hommes bien armés, composé de gens du peuple, se dirigea vers l'hôtel du ministre de la Justice, Van Maanen, au Petit Sablon. Il commença par y démolir tout, méthodiquement, puis, à deux heures du matin, mit le feu à l'immeuble.
Des fusils, des sabres, des pistolets, des munitions avaient été enlevés de force chez des armuriers, chez des marchands de poudre, de plomb et de fer. D'autres armes furent arrachées à la maréchaussée, aux pompiers ou à des bourgeois. Les policiers et les gendarmes furent impuissants à rétablir l'ordre, tandis que de faibles détachements de troupe, grenadiers et chasseurs, -1200 hommes étaient cependant disponibles -patrouillèrent à partir de minuit, mais sans intervenir sur les lieux de pillages. A cinq heures du matin, des patrouilles et des groupes d'insurgés échangèrent des coups de feu. Puis, l'armée se concentra au Sablon et le 26 à midi, elle se retira à la place des Palais, tandis que les faibles effectifs laissés à la caserne des Annonciades et à la caserne Ste-Elisabeth furent désarmés par les émeutiers. Maîtres du centre de la ville, les mutins pillèrent au Grand Sablon la maison du généraI de Wauthier, commandant la Place, et, à huit heures du matin, un groupe de quatre cents hommes, drapeau rouge en tête, saccagea
l'hôtel du gouvernement provincial, rue du Chêne.
La Régence, c'est-à-dire l'autorité communale, (hormis le bourgmestre de Wellens, absent de la ville), le gouverneur de la province Van der Fosse, le directeur de la police et le commandant de la garde communale, réunis à l'hôtel de ville, donnèrent à la police des ordres qu'elle était incapable d'exécuter.
Déjà à six heures du matin, des bourgeois n'apercevant pas l'ombre d'un garde communal -la schutterij, la garde civique régulière de l'époque, récemment organisée, fonctionnait mal -avaient demandé des armes pour créer une garde et réclamé le retrait de l'armée afin d'éviter des frictions sanglantes entre le peuple et la troupe. L'autorisation leur fut accordée et le matin les premières patrouilles furent formées. Mais les bourgeois n'étaient pas en nombre et ils durent renoncer à disperser les attroupements. A trois heures de l'après-midi, sur la Grand'Place, Ducpétiaux attacha au réverbère placé au-dessus de la porte d'entrée de l'hôtel de ville un drapeau aux trois couleurs, rouge, jaune et noire, que Mme, Abts négociante du Marché-aux-Herbes -venait de confectionner en cousant des bandes de mérinos disposées horizontalement.
Pendant l'après-midi, dans des cabarets de la rue Haute, des meneurs instiguèrent des ouvriers, surtout des fileurs, à aller détruire, à l'exemple des Anglais de Manchester, les fabriques de la banlieue qui utilisaient des machines. A huit heures du soir, les fabriques de Rey et Bosdevex-Bal, à Forest, de Wilson à Uccle, industriels novateurs qui avaient installé des mécaniques, avaient été dévastées.
Mais le peuple était fatigué de ses longues courses et déjà des bourgeois avaient réussi à lui racheter ses armes. La nuit du 26 au 27 fut calme. Huit cents bourgeois montaient la garde. Le lendemain, le peuple, massé place Royale et place des Palais, menaça la troupe. Une intervention de la garde bourgeoise se termina par une fusillade: force resta à la garde. Dès ce moment, les attroupements cessèrent. La garde bourgeoise était maîtresse de la ville. Le commandement en chef en fut assuré par le baron Emmanuel Vanderlinden d'Hooghvorst. Un état-major fut constitué, un Conseil formé. Dans la ville, tous les insignes royaux avaient été brisés, les cocardes orange foulées aux pieds. Une « mauvaise farce d'écoliers » comme l'écrivit Gendebien avait donné le pouvoir à la garde bourgeoise.
Les bourgeois devenaient ainsi maîtres de la situation, mais bourgeoisie et peuple bruxellois étaient unis quand même dans la volonté d'empêcher l'entrée de nouvelles troupes. Le 28, l'annonce que des renforts sont arrivés à Vilvorde a excité la population bruxelloise. Le 31 août, les princes royaux envoyés par leur père pour rétablir l'ordre à la tête d'une armée imposante firent connaître leur intention d'entrer dans la ville avec leurs troupes et leur exigence de l'abandon par les bourgeois des drapeaux et des cocardes brabançonnes. Cette menace déchaîna le patriotisme. Bruxelles, toutes classes mêlées, s'apprêta au combat. Des barricades furent dressées, des arbres abattus. La garde fut mise sur un véritable pied de guerre. Le prince d'Orange céda aux supplications d'une seconde députation de notables et accepta d'entrer avec son seul état-major et sans troupe. Le lendemain, ler septembre, il fit donc son entrée dans la ville. Aux cris répétés de « vive la liberté» répondirent quelques « vive le roi ». Grand'Place, le bourgmestre lui adressa quelques mots, puis, au galop, le prince se rendit à son palais...

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L'occasion initiale, la Révolution de Juillet à Paris, est ainsi suivie, à moins d'un mois d'intervalle, de l'émeute bruxelloise. L 'allure de celle-ci fait réfléchir. Des étrangers ont participé aux bris de vitres, aux incendies, aux destructions. De l'argent a été distribué. Il y a eu des meneurs. Sont-ce des Français, voire des Anglais? Les témoignages sont imprécis et les enquêtes de police incomplètes. Faut-il admettre la thèse d'un policier hollandais, Audoor? Pour lui, tout aurait été soigneusement préparé, machiné, monté dans le détail. Ce seraient les bourgeois de Bruxelles qui auraient excité le peuple, auraient lâché la populace, pour avoir l'occasion de s'emparer du pouvoir réel dans la cité, d'évincer l'armée et la police. Cela nous paraît une explication a posteriori, car ces bourgeois craignaient réellement le peuple et étaient trop avisés pour jouer le rôle d'apprenti sorcier.
Le bris des machines, les « luddites » d'Uccle, de Forest, d'Anderlecht, sont le meilleur indice d'un malaise social. Dès avant la crise commerciale consécutive aux troubles politiques, les ouvriers avaient déjà attaqué les ateliers, mouvement spontané en grande partie, encore qu'il faille retenir l'intervention d'agents provocateurs.
A Verviers, le caractère social du mouvement révolutionnaire est évident. Depuis longtemps les ouvriers se plaignaient de la lourdeur des impôts de consommation et de l'introduction de nouvelles machines. Le 27 août au soir, les événements de Bruxelles furent connus et le lendemain la foule se porta devant l'hôtel de ville en criant « brisons les machines! » « à bas les employés du gouvernement! ». Un drapeau tricolore français fut planté sur le perron, des cris furent poussés « vive Napoléon! à bas Guillaume! ». Après qu'elle eut désarmé la garde communale, la foule envahit l'hôtel de ville, s'empara des armes entreposées dans les greniers, puis se dirigea vers les maisons des agents des contributions et des accises qu'elle pilla. La maison du notaire Lys fut saccagée. Le lendemain, les mutins voulurent incendier le Montde-Piété et clamèrent leur intention de se rendre dans les fabriques. D'autres allèrent dans la banlieue et y pillèrent les demeures des agents du fisc et les boulangeries. Pour calmer la masse déchaînée, le président de la « Commission de sûreté », qui avait remplacé l'autorité communale débordée, promit la remise au peuple des machines à tondre, une baisse du prix du pain de dix cents et la restitution gratuite par le Mont-de-Piété, de tous les objets garantissant des prêts inférieurs à dix florins.
Le 30 août, le Pays de Herve fut sillonné de bandes de pillards qui ramenèrent triomphalement à Verviers des charrettes de blé. Partout, ces insurgés arboraient les couleurs françaises, lacéraient les couleurs hollandaises, brisaient les armes royales. A Verviers, les officiers de la garde urbaine, constituée pour rétablir l'ordre, portaient une ceinture aux couleurs françaises, les gardes une cocarde et les onze postes de garde étaient ornés d'un drapeau français.
Les Verviétois furent imités par les ouvriers d'Aix-Ia-Chapelle qui détruisirent les machines chez Nélissen, fabricant de drap et pillèrent la maison de James Cockerill. A Dusseldorf on assista aussi à une explosion de rage populaire. A Lierre encore, chez Van den Berghe de Heyder, grand imprimeur de cotonnades, les ouvriers s'agitèrent à la fin d'août. Des bruits de pillage dans des fabriques d'Eindhoven et de Tilburg, qui circulèrent à la même époque, témoignent, quoique erronés, de l'agitation sociale. Rappelons qu'à Paris, l'agitation ouvrière n'a pas cessé au cours de l'été 1830.
Il y a donc un mouvement prolétarien, qui trouve l'occasion de son déclenchement dans des faits politiques: c'est à Bruxelles, le 25 août, que l'étincelle a jailli et c'est de là que l'explosion a gagné de proche en proche. Au surplus, certains avaient sans doute quelque avantage à ces désordres. Des agents provocateurs voulaient effrayer les bourgeois et les exciter à une répression de l'élan populaire, tandis que, nous dit Gendebien, « des intrigants laissèrent faire, pour masquer une onzième ou douzième faillite; on vit des industriels indiquer à leurs propres ouvriers les pièces de leurs machines à briser afin d'arrêter momentanément leur marche et légitimer la suspension des travaux et des paiements ». Enfin, à Bruxelles comme à Paris, on accusa des agents anglais d'avoir poussé à la destruction des machines par avidité et mercantilisme.
Ce mouvement social est violent, mais sans lendemain. Car les possédants ont pris peur. « Toute la propriété était menacée, elle a dû s'armer pour se soustraire aux suites funestes de l'effervescence populaire », écrivait le journaliste Levae à son ami de Potter, le 4 septembre. A Bruxelles, la bourgeoisie a désarmé le peuple et rétabli l’ordre. A Bruges, à Verviers, elle agit de même. Partout où l'ordre est menacé, des gardes bourgeoises sont constituées. Il est frappant de constater, dans la première semaine qui a suivi l'émeute de Bruxelles, l'identitédes réactions bourgeoises dans les différentes villes. Aux mouvements populaires désordonnés, dont les buts sont immédiats (relèvement des salaires, demande de travail, suppression d'impôts sur les produits alimentaires) répondent la constitution de gardes bourgeoises et la satisfaction partielle, dans les limites du possible, des revendications de la masse par la mise en chantIer de travaux publics, la fixation d’un maximum du prix du pain et l'abolition des impôts communaux sur l'abattage. A Verviers, l'arrêt momentané de certaines machines est même ordonné.
Le comte de Mercy-Argenteau retiré dans son château, décrit bien au chef du Cabinet du roi, Hofmann, le 31 août 1830, les convulsions sociales dans les centres industriels avec leurs répercussions dans la grande banlieue: « Pour comble d'adversité, le besoin de pain se fait sentir. Une multitude d'ouvriers est sans travail à Verviers. A l'heure où je vous écris deux à trois mille gens sont sur les quais de 'Liège criant pour du pain et repoussant si bien les forces armées que la régence a dû baisser le prix de 28 à 20 cents par carte à délivrer par le comité de secours. Verviers est dans un état épouvantable, les campagnes environnantes de même. On s'arme dans cette ville pour la défense autant qu'on le peut; à Herve, à Battice, à Dison on pille. Un seul moment de confusion ou de relâche dans l'activité des gardes amènerait d'épouvantables catastrophes à Liège ».


* * *

Les événements qui ont suivi la représentation de la Muette de Portici à Bruxelles, sitôt connus dans les provinces, ont donc provoqué des remous. Dans de nombreuses villes, des gardes sont constituées. Des organismes nouveaux sont créés: des « Commissions de sûreté », corps municipaux, que les autorités régulières appellent à l'existence ou tolèrent. A Liège, Huy, Thuin, Dinant, Ciney, toutes bonnes villes de l'ancienne principauté de Liège, le drapeau
liégeois jaune et rouge est arboré. Mais l'esprit local triomphe à Verviers où ce sont le vert et le blanc qui, le 30 août, remplacent les couleurs françaises, symbole à la fois de libertépolitique, de sympathie française et d'aspirations sociales.
A Liège, le 26 et le 27 août, à Verviers, lors des troubles, la Marseillaise a été chantée par le peuple comme elle l'a été à Aix-la-Chapelle où le drapeau tricolore avait été également hissé. A Bruxelles, le drapeau français a été remplacé par le drapeau brabançon, appelé dès lors à une singulière fortune. Les couleurs des anciens Etats Belgiques sont adoptées par la garde et la population bruxelloises et imposées au prince d'Orange. Les couleurs de la ville de Bruxelles qu'on avait aussi arborées ont été abandonnées. Signe de ralliement des opposants au gouvernement de Guillaume 1er, les drapeaux brabançons rouge, jaune et noir sont hissés à Louvain, Nivelles, Namur, dans le Brabant wallon, en Hainaut, dans le Luxembourg et dans plusieurs villes des Flandres, à Ninove, Grammont, Courtrai, Wervicq, Harlebeke; mais en Flandre orientale, elles sont traquées par la police énergique du très ferme gouverneur Van Doorn.
Un drapeau, c'est un signe extérieur d'une importance capitale. Les autorité légales en sont pleinement conscientes. Pendant les entretiens qui précèdent l'entrée du prince héritier à Bruxelles le 1er septembre, la question des drapeaux et des cocardes tricolores est à la base des discussions et, au cours du mois de septembre, la chasse à ces emblèmes, organisée par les ministériels dans les centres où ils ont conservé la haute main, est aussi significative.
Un drapeau, des drapeaux plutôt, voilà le signe de ralliement de beaucoup d'habitants des provinces méridionales. Ont-ils un programme? A Liège, dès le 27 août, une députation est chargée de demander au roi le redressement des griefs, clairement exposés dans une remarquable pétition remise à la « Commission de sûreté » le 27 dans l'après-midi et que cette nouvelle autorité, créée par le gouverneur de la province, a adoptée. Le problème capital des rapports entre le roi et ses ministres préoccupe les Liégeois. « Nos réclamations en peu de mots les voici: Changement complet du système suivi jusqu'à présent; exécution franche de la loi fondamentale. Renvoi du ministère antipopulaire, dont les actes ont spécialement frappé la Belgique. Son remplacement par des hommes qui sachent enfin concilier les intérêts de toutes les provinces du royaume; qui acceptent, telle qu'elle doit l'être, sous un gouvernement représentatif, la responsabilité pleine et entière de leurs actes, seul moyen de retenir intact le principe de l'inviolabilité du Roi. L'organisation de la responsabilité ministérielle par une loi spéciale. Répudiation complète et sincère du système spécialement consacré dans le funeste message du 11 décembre 1829 ». Les Liégeois réclament en outre le jury en matières criminelles et surtout dans les procès de presse et autres procès politiques, la liberté entière de la presse et un nouveau système électoral. Mais ils veulent encore: « la liberté illimitée de l'enseignement consacrée par une loi », et une « loi consacrant la liberté du langage en toutes matières administratives et judiciaires ». Ils exigent des réformes économiques: l'abolition du million de l'industrie, la diminution des impôts et l'économie dans les traitements des fonctionnaires publics. Ils font valoir aussi des revendications nettement nationales, l'établissement de la Haute Cour dans une des villes de Belgique, la répartition égale des emplois publics entre le Nord et le Sud. La convocation immédiate des Etats-Généraux -que le roi
d'ailleurs a décidée le 28 -permettrait la réalisation de ce programme.
A Bruxelles, les bourgeois réunis et armés dans une garde qui a rétabli l'ordre et sur qui repose le maintien de la tranquillité publique, formulent eux aussi des revendications politiques. Elles sont énumérées d'une manière concise pour frapper le peuple dans un tract répandu par le Courrier des Pays-Bas que l'on trouve dans les corps de garde dès le 28 au matin. Ce document est moins complet que la pétition liégeoise. Il n'y est point question de liberté de l'enseignement, ni des langues. Mais des soucis immédiats apparaissent: soucis d'ordre politique, (cessation des poursuites intentées aux écrivains libéraux, annulation des condamnations en matière politique), et d'ordre social, (demande de suspension provisoire de l'abattage, distribution à tous les ouvriers infortunés de pain pour subvenir à leurs besoins jusqu'à ce qu'ils puissent reprendre leurs travaux). Le soir du 28, une assemblée de notables bruxellois a envoyé au roi une délégation pour lui exposer ses griefs. La pétition liégeoise, un vrai modèle, sera copiée par les bourgeoisies d'autres villes qui feront parvenir au souverain des adresses fermes et respectueuses.
Le meilleur moyen d'assurer le triomphe des libertés est évidemment de régler entre Belges seuls les problèmes politiques. La séparation apparaît vite comme le but dont la réalisation assurera les libertés essentielles. C'est de Paris, semble-t-il, que l'idée de séparation est venue. Le 29 août, Tielemans, un des exilés, parle déjà dans une lettre à son ami de Gamond « de gouvernement provisoire, de Belgique entièrement séparée, entièrement indépendante de la Hollande et gouvernée d'après une constitution qui lui convienne et qu'elle ait librement faite ou acceptée ». Deux jours plus tard, de Potter s'exprime très nettement dans une missive à ses amis de Bruxelles, Gendebien et Van de Weyer : « Pourquoi ne voulez-vous pas la séparation parlementaire et administrative de la Hollande dans laquelle se trouve nécessairement tout ce que vous demandez? » S'il faut en croire Gendebien, il aurait préconisé la séparation dans une entrevue confiante avec le prince d'Orange, le 1er septembre au soir. Mais le prince, le lendemain, ne songeait encore qu'à la démission de Van Maanen.
Le 2 septembre, quatre députés aux Etats Généraux, le comte de Celles, Charles Le Hon, François de Langhe, Charles de Brouckère, revenus de Paris où ils avaient vu les bannis et où ils avaient été électrisés au contact des vainqueurs de Juillet, en discutent avec Gendebien. Admis auprès du prince d'Orange le 3 au matin, Charles de Brouckère lui déclara que ses collègues partageaient l'idée qu'une séparation entre les parties septentrionale et méridionale du royaume était devenue nécessaire et que la démission du ministre Van Maanen n'était plus regardée comme suffisante pour calmer les esprits. Le ministre van Gobbelschroy vint confirmer ce fait au prince. La commission constituée par celui-ci le 1er septembre et présidée par le duc d'Ursel était réunie à ce moment au palais. Elle émit le voeu que pareille séparation pût être effectuée. Entretemps, le commandant et les chefs de section de la garde bourgeoise s'étaient assemblés au palais du prince d'Orange et ils manifestèrent aussi le désir de séparation, tout en acceptant la souveraineté de la dynastie des Nassau. Ils se prononcèrent en même temps avec force contre une réunion à la France.
Le prince exprima la crainte que les formes prescrites par la Loi fondamentale n'empêchassent le roi de donner à l'égard de la séparation une réponse positive, mais il se déclara prêt à appuyer sincèrement les voeux émis, en même temps qu'il acceptait la retraite en dehors de la ville des troupes qui bivouaquaient Place des Palais et dans les cours intérieures du palais depuis le 26 août.
Si la formule de la séparation « sous les rapports législatifs, administratifs et financiers» rallia beaucoup de Belges, elle eut cependant des adversaires farouches: les ministériels, magistrats, fonctionnaires et les amis du pouvoir, certains industriels et hommes d'affaires qui avaient trop reçu du régime pour ne point souhaiter qu'il durât. Dans les centres commerciaux comme Anvers, le projet de séparation est mal accueilli et une pétition se couvre de centaines de signatures de négociants, de propriétaires et de bourgeois, les 8, 9 et 10 septembre. La Chambre de commerce, le 11, proteste également contre ce voeu, tandis que la Régence appuye la requête des habitants. « Messieurs, du commerce et de l'industrie ont peur que le divorce accompli, les Hollandais ne mettent l'Escaut en bouteilles », écrivait le professeur Ph. Lesbroussart le 9 septembre. Gand proteste également et à Liège, à Bruxelles, à Mons, il y a des grands bourgeois qui verraient avec rage l'effondrement du royaume. Il en est aussi qui sans être « orangistes », le premier moment d'enthousiasme passé, réfléchissent aux inconvénients de briser une unité économique qui n'a pas été sans avantages. Et la perte du marché des Indes rend songeurs les gens pondérés. Le 5 septembre, une séparation obtenue par les voies légales satisferait la grande majorité des opposants. Mais comme ces Belges craignent une action énergique de l'armée royale, un retour brusque des troupes qui anéantirait tout espoir de voir accepter par le souverain le moindre changement, ils veulent rester armés. Ainsi la garde bourgeoise, à l'origine rempart de l'ordre, est devenue le bastion de la liberté. Cette attitude est strictement défensive. Si l'armée royale ne tente pas de rentrer dans la capitale, les chefs de la garde ne recourront pas aux armes. Cependant, il faut mettre la ville à l'abri d'un coup de main, car « la méfiance est mère de la sûreté ». Les ingénieurs Roget et Teichmann font élever des barricades. Le 8, une commission de défense, chargée de la direction des travaux militaires, est créée par l'état-major et le Conseil de la garde bourgeoise.
Puisqu'on reste sous les armes pour éviter la terrible éventualité d'une « agression » royale que font présager les articles violents de la presse hollandaise et les mouvements de troupes, car la concentration de l'armée du prince Frédéric se prépare minutieusement, ne convient-il pas de renforcer l'armature militaire de cette garde? Ainsi, insensiblement, à l'état major et au Conseil de la garde bourgeoise, certains songent à l'organisation d'une véritable petite armée. Le besoin d'hommes, de fonds, d'armes, exige l'établissement de relations avec les autres villes. La ligne Louvain-Liège est capitale pour la fourniture des armes. Liège est un des grands centres de l'armurerie en Europe; le gouverneur de la province Sandberg y évalue à cent mille les armes disponibles. Grâce au travail des ouvriers liégeois, maîtres en art de tourner les canons, les sarraus bleus ne devront point se battre avec des piques comme leurs frères polonais, quelques mois plus tard.
Le peuple de Louvain a chassé la garnison le 2 septembre et le rideau des troupes du général Cort-Heyligers, installé le 11 septembre, ne coupe pas complètement les communications. Dès le 7 septembre Charles Rogier et Florent de Bosse de Villenfagne sont entrés à Bruxelles à la tête du principal contingent de volontaires liégeois fort de 250 hommes. Des petits groupes d'hommes décidés de Namur, de Tournai, d'Alost, de Roulers (la troupe Rodenbach), des isolés de divers endroits sont aussi accourus.
Ainsi se constitue un noyau d'hommes armés. Ce sont des gens souvent démunis d'argent et la ville de Bruxelles doit les nourrir. Ils ont des chefs qui veulent parfaire l'équipement et l'armement de leurs hommes. Et où trouver les fonds nécessaires, sinon dans un renversement radical des institutions? Il faut se rendre maître des caisses publiques, ou du moins exiger la libre disposition des recettes de l'Etat, de la Province et de la Ville. Une tendance révolutionnaire se dessine donc nettement.
Le Conseil de Régence, à l'hôtel de ville, est évidemment effrayé de la tournure des choses. Mais il est impuissant et son pouvoir disparaît en fait. La « Commission de sûreté» formée le 11 septembre et où siègent Van de Weyer, Gendebien, Félix de Mérode, Rouppe et F. Meeus le remplace. Ce n'est pas un Gouvernement provisoire. Organisme bruxellois, cette Commission de sûreté n'a qu'un mandat limité: maintenir la dynastie, l'ordre public et défendre le voeu de séparation. Mais ses efforts furent médiocres et Gendebien se plaignit amèrement de son inertie.
Quant aux députés aux Etats-Généraux, convoqués à La Haye pour la session extraordinaire qui doit s'ouvrir le 13 septembre, ils ont, après hésitation, décidé de répondre à l'appel du roi. Leur absence de Belgique dans ces semaines agitées prive l'opposition de conseillers avisés. Avant leur départ, certains ont manifesté sans ambiguïté leurs sentiments patriotiques, tels le baron de Stassart, mais d'autres sont plus timides et Raikem, le 26 août, dans une lettre au gouverneur Sandberg, affirmait clairement ses sentiments parfaitement royalistes. Leur départ pour La Haye a d'ailleurs donné lieu à de très vifs débats et les extrémistes leur reprochèrent amèrement leur soumission au roi. Ces hommes mûrs, sages et prudents, décidèrent de se rendre à La Haye pour y faire triompher par les voies légales la séparation. Ils n'étaient pas du parti de l'aventure.

* * *

Parmi les leaders patriotes, on compte principalement des avocats et des journalistes, rédacteurs des feuilles de l'opposition. Lesbroussart, Van Meenen, Jottrand, P. Claes, Ducpétiaux, Van de Weyer, J.-B. Nothomb, collaborateurs du Courrier des Pays-Bas, Levae du Belge, Lebeau et les frères Rogier, du Politique, D. Stas et Kersten du Courrier de la Meuse, Van Meenen, d'Elhoungne et Roussel du Journal de Louvain, Beaucarne du Catholique des PaysBas, l'abbé Buelens de l'Antwerpenaer, Barthélemy du Mortier du Courrier de l'Escaut, Braas et Lelièvre du Courrier de la Sambre sont les adversaires intelligents et tenaces du gouvernement. Sont-ce là les hommes qui ont préparé l'émeute du 25 août? Il ne semble pas. Jean-Baptiste Nothomb, collaborateur du Courrier des Pays-Bas, est parti en vacances à la mi-août pour Pétange, après avoir écrit son bel article du 9 sur la responsabilité ministérielle, et les autres rédacteurs ont été surpris par l'événement. Le 14 et le 15 août, Gendebien et Van de Weyer avaient participé à des conversations secrètes avec des confrères, mais rien n'y avait été décidé. Cependant ces hommes ont su tout de suite tirer parti des événements. L'occasion était trop belle pour ne pas la saisir. Leurs journaux deviennent les organes du séparatisme et le ton des articles hausse singulièrement. Que surviennent, cependant, les grenadiers du roi et leur situation deviendrait périlleuse. Aussi, certains restent prudents. L'attitude de Jottrand et de Claes, les 13 et 14 septembre à Bruxelles, lors des discussions à l'hôtel de ville sur le projet de formation d'un Gouvernement provisoire, est significative: ils s'opposent à la constitution immédiate d'un tel organisme. Charles Rogier est plus avancé. Il est poussé par ses volontaires et à Bruxelles, il fait figure d'homme d'avant-garde. Quant à Van de Weyer, installé à la Commission de sûreté, il manifeste déjà ses talents de diplomate, mesuré et réservé.
On retrouve donc, parmi les chefs du mouvement, les journalistes qui n'ont pas ménagé les coups au gouvernement de Guillaume 1er depuis 1828. A eux se sont joints des avocats (à Liège, par exemple, Edouard Vercken, A. Bavet, Muller, Wauters), des notaires(Delmotte à Mons, Adolphe Jottrand à Genappe, Lefebvre à Mariembourg), des rentiers, des industriels.
D'anciens militaires qui se sont déjà signalés dans les campagnes de l'Empire ou qui ont servi sous Guillaume 1er, mais ont été découragés par un avancement trop lent, les hauts grades étant réservés aux Hollandais, sont aux postes de commande de la garde. Pletinckx, lieutenant colonel de la garde bourgeoise, est un ancien capitaine de l'armée des Pays-Bas. Dégoûté de l'accueil qu'il reçut en 1827, à son retour de la colonie, il avait démissionné. Aujourd'hui, il brûle d'une ardeur étonnante d'en découdre avec l'armée de Frédéric. Joseph Fleury-Duray, major de la garde bourgeoise, avait servi l'armée de 1819 à 1822. Le comte Van der Meere, autre major de la garde, avait été capitaine aide de camp du général Van Geen, tandis que le major Vander Smissen, commandant en second la garde bourgeoise, avait fait la campagne de Russie et commandait l'artillerie de la 3e division sous Chassé à Waterloo.
Fait remarquable, ces hommes sont jeunes: Charles Rogier a vingt-sept ans, Sylvain Van de Weyer vingt-huit, Félix de Mérode trente-neuf ans. Alexandre Gendebien a quarante et un ans mais un enthousiasme juvénile. Dans l'équipe du Politique, Firmin Rogier est l'aîné et il a trente-neuf ans, Paul Devaux vingt-neuf, Henri Lignac trente-trois. Jean-Baptiste Nothomb a vingt-cinq ans, le comte Van der Meere trente-trois ans, Joseph Pletinckx trente-trois, Joseph Fleury-Duray vingt-neuf, Bruno Renard de Tournay vingt-six et Félix Chazal vingt-deux.
En général, les patriotes investis par les circonstances de graves responsabilités ne songent pas encore à une rupture décisive, à une véritable révolution. Ils restent sur la défensive. Mais il y a aussi les partisans des solutions extrêmes. Ce sont des têtes chaudes, des aventuriers. Excités par le succès des révolutionnaires parisiens, ils désirent se battre. Ils sont sûrs de vaincre les troupes hollandaises. Par la force, ils veulent arracher l'indépendance nationale. Ce sont souvent des personnages étranges, pittoresques, quelquefois de véritables énergumènes, qui se battront bravement à l'heure du combat. Hissés sur le pavois, ils en retomberont vite. De ces « éphémères de la révolution », selon l'exacte expression de Louis Leconte, l'histoire a surtout retenu les noms de Van Halen, Stieldorff, Ernest Grégoire, Borremans, Mellinet. Ils n'ont pas peur d'exposer leur vie. Dès le début, ils sont de tous les coups durs. Ils s'affairent dans les sections de la garde, s'occupent d'armement, de formation de corps francs. Ils organisent des sorties de Bruxelles vers les avant-postes ennemis, car pour eux l'armée du roi, est une armée hollandaise, une armée ennemie. A leurs yeux la guerre a commencé. Il faut transformer Bruxelles en un camp retranché, multiplier les barricades, armer le peuple, constituer un véritable arsenal. Ils s'appuyent sur les volontaires arrivés de province, qui constitueront les cadres de vraies troupes de choc. Enfin, dans la population bruxelloise, les extrémistes trouvent une aide précieuse. Le bas peuple de Bruxelles est résolu à empêcher coûte que coûte la soumission de sa ville. Le petit bourgeois partage aussi ce sentiment. Une véritable passion animera ces hommes à l'heure de la lutte; cette masse bruxelloise s'emparera de l'hôtel de ville le 19 septembre et formera la grosse majorité des combattants des «journées ».
Il y a aussi le groupe pro-français: le comte de Celles, beau-frère du général Gérard et le baron de Stassart, anciens préfets de Napoléon, ainsi que Alexandre Gendebien, s'y distinguent. Ces hommes soulevés par la victoire bourgeoise à Paris, veulent-ils la réunion à la France? Comme Cartwright, le chargé d'affaires anglais à Bruxelles, l'écrira à son gouvernement, le 4 octobre 1830, il y a un parti français qui souhaite, sinon la réunion à la France, c'est-à-dire le retour au statut diplomatique de 1795-1815, du moins une dépendance de fait des provinces belges, une suzeraineté française par la présence sur le trône, à Bruxelles, d'un prince de la maison d'Orléans.
En août, le comte de Celles, accompagné de trois autres députés, est allé à Paris. Gendebien, le 21, s'apprêtait à s'y rendre. Mais les conseils de prudence donnés dans les milieux gouvernementaux les ont calmés. Sans doute, le parti du mouvement, les sociétés populaires parisiennes, sont décidées à porter secours aux insurgés belges, mais leur aide, nous le verrons, ne viendra qu'assez tard. Il était normal, d'ailleurs, que des Belges aient regardé avec anxiétévers Paris, tourné les yeux vers le nouveau gouvernement français, car, dans la conjoncture internationale, c'était de là que pouvait venir à l'époque le seul appui.
Les partisans de la France sont nombreux dans certains milieux industriels. A Verviers, par exemple, ils seront longtemps influents. Mais c'est après octobre seulement, en hommes d'affaires avisés, qu'ils révéleront leurs opinions. De même chez les politiques, il faut bien distinguer les véritables partisans de la France, des Belges qui se résigneraient, faute d'indépendance nationale dans l'Europe de 1830, à passer sous la coupe française plutôt que de retomber sous la domination de Guillaume 1er et de Van Maanen.
En septembre 1830, dans cette période confuse que nous cherchons à éclairer, ceux-là même qui passent pour les partisans les plus dévoués du rattachement à la France, se contentent de travailler avec leurs collègues des Etats-Généraux ou des Commissions de sûreté en vue de réaliser la séparation. Peut-être n'est elle à leurs yeux que la première étape de la fusion avec la France? En tout cas, dans le présent, ils joignent leurs efforts à ceux des Belges qui veulent se séparer des Hollandais pour obtenir dans l'ensemble des Pays-Bas les libertés nécessaires.
Les efforts des agents français en vue de déclencher un mouvement de réunion à la France n'ont pas eu grand succès. Les drapeaux français n'ont pas longtemps flotté dans les villes insurgées et les traces de souhaits de réunion ont disparu. Mais chaque fois que l'avenir redevenait incertain, la tendance française reprenait force. Ainsi, lorsque le peuple à Bruxelles a connu la proclamation royale du 5 septembre, qui ne redressait immédiatement aucun des griefs, le gouverneur du Brabant écrira: « on parle assez ouvertement d'appeler le duc de Nemours, second fils du duc d'Orléans Louis-Philippe, au trône de la Belgique. On voit, dit-on, le ruban tricolore français remplacer les couleurs brabançonnes que beaucoup de Belges commencent à abandonner », tandis qu'à Liège, au 10 septembre, le gouverneur Sandberg constate : « qu'il y a évidemment un parti qui pousse vers la France: l'insubordination de l'armée française est pour beaucoup là dedans, cela nourrit les espérances et un lieutenant en garnison à Givet écrit à son frère ici, que les soldats veulent à toute force marcher sur la Belgique ». Le 8 septembre, d'ailleurs, le Politique a fait paraître un article sur la possibilité d'une réunion à la France. C'est une menace non déguisée au gouvernement, au cas où il résisterait.
A l'action des journalistes et des extrémistes, aux manceuvres du parti français, s'opposent les forces de résistance au mouvement révolutionnaire. De plus, à la mi-septembre, la majorité des adversaires du roi ne rêve encore que de séparation et non de renversement de la dynastie. C'est le roi qui par son recours à la force va provoquer la rupture, déclencher la révolution.

Voir aussi:

Histoire de la révolution belge chapitre 1:

Histoire de la révolution belge de 1830: chapitre 2: Du côté de La Haye

Histoire de la révolution belge de 1830: chapitre3: Les divisions dans les camps des patriotes

Histoire de la révolution belge de 1830 -Chapitre 4: Le glas du régime

Histoire de la révolution belge de 1830 Chapitre 5: L'aube d'un Etat

Histoire de la révolution belge de 1830 Chapitre 6: Le soulèvement national

Histoire de la révolution belge de 1830 Chapitre 7: La Révolution et l'Europe

Histoire de la révolution blege Chapitre 8: Conculsion

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administrateur théâtres

La très jeune commissaire, Laura Neve* s’est penchée sur les magiciens de l’art qui ont contribué à faire naître Paul Delvaux au génie de sa maturité. L’exposition se décline en neuf temps artistiques, chaque fois un éblouissement pour Delvaux qui se frotte aux influences, pour finalement secréter ses propres secrets artistiques. Lui et Magritte ont reçu tous deux l’empreinte du symbolisme de Montald à l’académie de Beaux-arts de Bruxelles. Mais tout commence dans la forêt de Soignes, au Rouge-Cloître, où l’artiste peint tous les jours et nous livre cette merveilleuse …. « Source de l’empereur », une œuvre pénétrante par la magnifique lumière qui s’en dégage. Delvaux est tributaire de ce groupe de pleinairistes sous la houlette d’Hippolyte Boulenger. Nous découvrons l’école de Tervuren. On peint la nature, avec réalisme, on est à la recherche du vrai, mais voilà que la toile de la source explose de beauté, d’une lumière presqu’impressionniste.

De sources en sources Laura Neve qui a imaginé toute cette exposition, met chaque fois en présence les affinités artistiques de Delvaux et ses œuvres produites dans l’effusion du moment. De ces dialogues picturaux naissent de très belles émotions. Nous pouvons ainsi saisir des couleurs fauves dans son « Paysage mosan », peint en 1925, entrevoir une influence de Cézanne dont il a sans doute vu des toiles lors de voyages à Paris, avec les aplats de couleurs dans son « Intérieur de Forêt ». Delvaux dit de lui : « Il a allié le style à la couleur, à l’idée ». Le parallèle des deux œuvres vibre comme de l’amitié.

Vint la période Renoir. « Le portrait de famille » de Delvaux dialogue avec « Les fillettes » de Renoir. Mêmes rythmes, mêmes incandescences, mêmes volutes picturales. Emotions partagées entre « Nus dans la forêt » et « Les baigneuses » de Renoir. Le détachement d’avec la réalité apparaît, les corps sont idéalisés, on pénètre dans une sorte de paradis terrestre fort éloigné des réalités industrielles, l’imaginaire parle avec la lumière. Et voici une nouvelle inclination, avec Modigliani, les visages ovales, les formes élongées, les grands yeux en amandes, les bouches en cœur et le regard absent. Tourné vers l’intérieur ou baigné d’absolu. « Les jeunes filles à la campagne » sont emplies de rêve et d’une lumière évanescente, sur un début de grisaille de plomb. Toute sa vie Delvaux idéalisera la figure féminine, souvenir cuisant d’un amour malheureux, mais qu’il finira par épouser… en 1952.

Il sera ensuite intrigué par le monde grotesque et caricatural de James Ensor. Il visite le musée Spitzner, les monstruosités d’une baraque foraine de la Gare du Midi, et c’est le choc. Les œuvres de squelettes se côtoient mais les squelettes de Delvaux vivent, dansent, s’amusent, ils ont des expressions très humaines, fort ludiques.

C’est maintenant la force primitive et la palette de Permeke qui le fascinent, malgré des préoccupations d’artiste divergentes. Ensuite c’est l’engouement pour le mysticisme et le raffinement de Gustave Van de Woestijne: même mélancolie raffinée dans « L’attente » et « Le rideau rouge » de Delvaux. En 1933, à la mort de sa mère plus d’une centaine d’œuvres disparaissent dont une Maternité.

« Les noces à Antheit » : son village natal est presque un noir et blanc avec quelques touches de couleur, le photographe est à l’avant plan, il a gelé les personnages dans une pose très guindée. La mariée est figée dans les interdits. On y voit probablement le peintre et sa première femme dont il divorcera après avoir retrouvé Anne-Marie Demartelaere en 1947, par hasard.

Mais en 1934 arrive la révélation du surréalisme avec la découverte de Giorgio De Chirico. Elle lui ouvre grand les portes de l’universalité et de la poésie. Dans les toiles de l’artiste italien, Delvaux se laisse emplir de silence, cloue l’angoisse dans les paysages déserts, sème des éléments d’architecture antique, fait naître l’étrange. Il se livre enfin au monde de ses rêveries intérieures, au culte du nu féminin. Il a trouvé sa voie. Côtoyer Magritte ne fait que le confirmer dans ses choix.

Les neuf étapes de la genèse de son œuvre sont accomplies. Multiple, il devient unique. Il ne se joint à aucun mouvement artistique, fuyant les –ismes et toute espèce d’étiquette. Une influence princière d’Ingres traverse aussi toute ses œuvres : la recherche de la perfection formelle, très classique, qui soutient son style inclassable, … et resplendissant.

Visiter cette exposition, c’est comprendre, aller de surprises en découvertes, c’est voyager dans le temps et les correspondances, c’est faire le plein d’émotions, se laisser porter et rêver…L’affiche est sublime, mais il n’y a pas qu’elle qui vous ravira!

http://www.ixelles.be/galerie/2010/20100930delvaux/

Jusqu’au 16 janvier 2011

Musée d’Ixelles, Van Volsem 71, 1050 Bruxelles

http://www.museedixelles.be

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La peau de chagrin est un roman d'Honoré de Balzac (1799-1850), publié à Paris en fragments dans la Caricature en décembre 1830, la Revue de Paris et la Revue des Deux Mondes en mai 1831, et en volume sous la signature Honoré de Balzac (première apparition du de) chez Gosselin et Canel en 1831.

 

Premier succès de Balzac, deuxième roman paru sous son nom (après les Chouans, signés Balzac sans particule), ce texte relie, selon son auteur, les Études de moeurs aux Études philosophiques. La veine fantastique, aboutissement des récits précédents, exprime et illustre par ses symboles une vision de la société, sans verser dans un ésotérisme où résideraient les ultimes vérités: c'est ce que toute une critique balzacienne a appelé le «fantasme social».

 

 

La Peau de chagrin.
Fin octobre 1830, ayant perdu son dernier napoléon au jeu, un jeune homme, Raphaël de Valentin, décide de se donner la mort. Il entre par hasard chez un vieil antiquaire, qui lui offre une peau de chagrin magique: ce talisman, figurant la vie de son possesseur, lui permettra de réaliser tous ses désirs mais se rétrécira à chaque voeu exaucé. En sortant de la boutique, Raphaël rencontre trois amis et participe à une orgie chez le banquier Taillefer, notamment en compagnie de la courtisane Aquilina. Pressé par son ami Émile Blondet, il raconte les événements qui l'ont conduit à envisager le suicide («le Talisman»).

 

Après avoir hérité une petite somme à la mort de son père, Raphaël avait voulu se consacrer à une Théorie de la volonté. En 1826, ayant loué une chambre au Quartier latin, il s'était lié avec Pauline, la fille de la maison. Trois ans plus tard, Rastignac, qui lui vantait les vertus de la «dissipation», lui fit rencontrer la riche veuve russe Foedora. Il idéalisa cette comtesse froide et calculatrice qui le tint à distance. Il se lança alors dans la débauche et s'endetta. Après la soirée chez Taillefer, un héritage lui parvient: il est riche, mais la peau a rétréci («la Femme sans coeur»).

 

Raphaël retrouve Pauline, devenue riche elle aussi. Ils vivent un temps heureux, mais la peau, cet objet dont il ne peut se débarrasser, en dépit des savants les plus illustres, va diminuant toujours. Malade, Raphaël se retire à Aix, puis au Mont-d'Or, menant une vie végétative. A la dernière extrémité, il revient à Paris. Un soir, pris d'un dernier désir pour Pauline, il meurt sur son sein. Pauline devient folle, mais Foedora, ou «si vous voulez, la société», continue de briller («l'Agonie»).

 

Fascinant paradoxe du roman: la possession de la mystérieuse peau ornée d'un texte arabe, censé être du sanskrit, allant s'amenuisant comme la vie de son détenteur, le fait accéder au plus profond de la terrifiante société réelle du Paris de 1830, qui se révèle être le véritable lieu du fantastique moderne. Ainsi le regard de Raphaël, unique protagoniste au début du récit, métamorphose-t-il la maison de jeu en cauchemar et l'orgie en champ de bataille.

Homme de science et de poésie, solitaire, doué comme Louis Lambert, cet autre philosophe balzacien de la volonté, d'une intuition qui confine à la seconde vue, Raphaël est pris au coeur d'un tragique dilemme: vivre à l'économie, sans plaisirs, et ainsi durer, ou exister intensément en dépensant son capital d'énergie. Essentiellement conservatrice, la société pratique l'égoïsme généralisé, du faubourg Saint-Germain aux curistes d'Aix, de Foedora aux créanciers et à Raphaël lui-même, soucieux de repousser l'échéance que lui avait d'ailleurs prédite l'antiquaire: «Votre suicide n'est que retardé.» L'or et les prestiges de l'illusion matérialisent cet égoïsme social, d'où l'importance symbolique de la séduisante et fascinante Foedora, cette inaccessible «statue d'argent».

 

Ce dilemme est d'autant plus insoluble que la négation du désir, qui finira par emporter Raphaël, équivaut à refuser la vie même. Voilà pourquoi le roman ne saurait conclure: vivre c'est mourir, ne pas vivre revient au même. Comme Sarrasine, Raphaël est confronté aux inconciliables exigences de la création et de l'amour. Croisement de mythes romantiques, de Manfred à Faust en passant par Melmoth (voir ci-après), cette contradiction exprime aussi le désenchantement de 1830, nouvelle forme du mal du siècle. L'ancrage dans l'actualité suffit à articuler l'impuissance dont souffre Raphaël au thème politique mettant en scène une société vouée aux seuls calculs d'intérêt.

 

D'une certaine façon roman à thèse, bien que totalement exempt des inconvénients ou des lourdeurs du genre, la Peau de chagrin s'ordonne autour d'un mythe. Jouant en virtuose de l'ambiguïté, le romancier se garde bien d'attribuer au fantastique tout ce qui concerne la peau elle-même. Des explications rationnelles, ou le hasard, qui peuvent rendre compte de ses effets, se mêlent au constat de son très réel rétrécissement. Surtout, pour exprimer le drame d'un individu tenté et effrayé par une société soumise à l'implacable loi de son propre développement, Balzac fait de la peau la preuve tangible que vouloir et pouvoir n'aboutissent qu'à la destruction: «Vouloir nous brûle, pouvoir nous détruit.» Dans ce contexte, le savoir, fût-il scientifique, se trouve dévalorisé par le jeu fictionnel et compte peu face à la comptabilité des besoins et désirs de Raphaël. Toute décision se révèle irréversible: la peau n'est que la somme des possibilités offertes à un homme donné. L'argent condense alors le temps: le dépenser, et donc vivre, accélère le rythme fatal. Ce fatalisme, provisoire dans la pensée balzacienne, est daté et s'oppose aux élans romantiques d'après 1830.

 

Foisonnant, baroque par certains aspects, le roman, ou plutôt cette «fantaisie» pour reprendre le terme de Balzac, développe une esthétique des contrastes. Recourant fréquemment aux prestiges de la poésie, de la couleur orientale, aux bouffonneries rabelaisiennes (plus nombreuses dans la version originale), célébrant la volupté (ainsi la mort de Raphaël intervenant à l'acmé d'une scène fortement érotique), il oppose aussi deux figures féminines, la douce et évanescente Pauline et l'inaccessible Foedora. Toute frémissante de la jeune énergie de son créateur, la Peau de chagrin se déploie à l'orée, mais aussi hors de la Comédie humaine, non seulement parce que ses principaux personnages ne réapparaîtront guère, mais aussi parce que le Rastignac apologiste de la «dissipation» ne ressemble guère à l'ambitieux calculateur sorti de la pension Vauquer (voir le Père Goriot). Le thème central parcourra le grand oeuvre balzacien, qui peut se définir aussi comme une réécriture continue et sans cesse approfondie de la Peau de chagrin.

 

D'autres textes de la Comédie humaine exploitent la veine fantastique. En dehors des grandes oeuvres à vocation philosophique comme la Recherche de l'absolu (1834) ou la mystique Séraphîta (1835), on peut citer trois récits.

 

L'Elixir de longue vie est publié à Paris dans la Revue de Paris en octobre 1830, et en volume dans les Romans et Contes philosophiques chez Gosselin en 1831.

 

L'Élixir de longue vie.
A Ferrare au XVe siècle, Bartolomeo Belvidere a composé un élixir de longue vie, dont il a appris le secret. Sur son lit de mort, il demande à son fils don Juan de l'enduire de cet élixir dès qu'il aura expiré. Le fils enduit l'oeil du cadavre, puis l'écrase en constatant qu'il le regarde, et conserve l'élixir pour lui. Plus tard, sentant la mort venir il donne à son fils Philippe le même ordre que lui avait donné son propre père. Philippe ne parvient à ressusciter que la tête avant de briser le flacon dans son épouvante. On crie cependant au miracle, et un abbé décide de canoniser le duc don Juan. La tête, débitant des impiétés, se détache du corps et mord le crâne de l'abbé.

 

 

Jésus-Christ en Flandre, «conte philosophique», est publié à Paris chez Gosselin en 1831 et, fondu avec un autre conte (l'Église, initialement paru en 1831) pour son entrée dans la Comédie humaine en 1845. Proche des idées de Balzac lui-même, ce texte étrange affirme la nécessité de défendre l'Église pour le bien de l'ordre social.

 

Jésus-Christ en Flandre.
Après la révolution de juillet 1830, sur les lieux d'une histoire légendaire située dans la Flandre du XVe siècle, un narrateur fait un rêve, où lui apparaît une Église ruinée, dont l'incarnation sous les traits d'une belle jeune fille lui ordonne de voir et de croire.

 

Melmoth réconcilié, publié dans le collectif Livre des conteurs en juin 1835, et dans les Études philosophiques, emprunte, cas unique dans la Comédie humaine, un de ces héros à un autre écrivain: Maturin, auteur du célèbre Melmoth the Wanderer, traduit dès sa parution en 1820. A l'instar de la Peau de chagrin, ce récit relie les oeuvres fantastiques au réalisme des Études de moeurs, en introduisant un pacte avec le démon au coeur de la maison Nucingen.

 

 

Melmoth réconcilié.
Nouveau Faust, Melmoth parvient à vendre ses pouvoirs acquis auprès du diable à Castanier, caissier de la banque Nucingen. Castanier, pris entre sa femme et Aquilina, sa maîtresse, qui a pour amant de coeur un des «quatre sergents de La Rochelle» (voir laPeau de chagrin), se lasse de ses pouvoirs surnaturels, et veut les restituer à Melmoth. Ce dernier, «réconcilié» _ autrement dit sauvé _ vient de mourir. Castanier transmet alors ses pouvoirs au financier Claparon _ que l'on retrouvera mêlé à la spéculation immobilière de César Birotteau (voir Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau). Celui-ci paie ses créanciers, mais revend son pouvoir à un notaire. Ainsi sauvé à son tour, Castanier peut mourir assisté des secours de la religion.

 


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Le blé en herbe

12272810262?profile=originalLe blé en herbe  est un roman de Sidonie-Gabrielle Colette, dite Colette (1873-1954). D'abord publiés de loin en loin dans le Matin du 29 juillet 1922 au 31 mars 1923, les chapitres du roman étaient alors pourvus d'un titre et chacun se présentait comme un texte indépendant. Après le quinzième chapitre, la direction du Matin, jugeant que l'oeuvre risquait d'être considérée comme trop immorale par ses lecteurs, ordonna à Colette d'interrompre la publication. Le dernier tiers environ du roman était donc inédit lors de la parution du livre à Paris chez Flammarion en 1923.

 

Les parents de Philippe et ceux de Vinca sont depuis longtemps liés par l'amitié et cet été, comme chaque année, ils partagent pour les vacances une maison en Bretagne. Philippe et Vinca s'aiment depuis toujours mais leurs rapports sont devenus difficiles: «Toute leur enfance les a unis, l'adolescence les sépare.» Philippe rencontre par hasard une jeune femme, Mme Dalleray. Celle-ci initie bientôt l'adolescent à l'amour. Philippe se sent coupable à l'égard de Vinca, qu'il aime profondément, mais Mme Dalleray l'envoûte malgré lui par le luxe qui l'entoure et le plaisir qu'elle lui fait découvrir. Mme Dalleray quitte bientôt la région. Philippe s'aperçoit que Vinca sait tout et souffre. Avant le retour à Paris, la jeune fille se donne à son ami.

 

Colette avait tout d'abord songé à intituler le Seuil, ce roman d'apprentissage. Le titre finalement retenu par l'auteur, plus riche de suggestions, met l'accent sur la juvénile vivacité de Philippe et de Vinca. Auprès de ces jeunes héros, les lointaines figures d'adultes, réduites à des «ombres» sous le regard des adolescents, paraissent bien ternes. Ainsi, l'odeur du blé, attribuée à Vinca, traduit la fougue du personnage: «La colère avait exprimé, de cette fillette surchauffée, une odeur de femme blonde, apparentée [...] au blé vert écrasé, une allègre et mordante odeur qui complétait cette idée de vigueur imposée à Philippe par tous les gestes de Vinca.» Le titre souligne en outre l'étroit rapport qui lie l'enfance et la nature, cette nature que Vinca porte en son nom qui signifie «pervenche». Les plages bretonnes sont le royaume de Philippe et Vinca qui en connaissent tous les secrets et les plaisirs. L'approche de l'âge adulte fait vaciller l'univers sauvage et innocent qui était jusque-là le leur.

 

Le titre impose enfin l'idée d'un devenir dont l'issue demeure pourtant incertaine. La métaphore, qui suggère un processus de maturation, invite à penser que la récolte future promise aux jeunes gens est celle du bonheur partagé: Philippe et Vinca s'aiment depuis toujours et leurs familles ne pourront que se montrer favorables à leur mariage. Les derniers mots du livre sonnent toutefois davantage comme un constat d'échec. Après son union avec Vinca dans «un plaisir mal donné, mal reçu», Philippe constate amèrement: «Ni héros ni bourreau... Un peu de douleur, un peu de plaisir... Je ne lui aurai donné que cela... que cela...» Quant à la joie matinale de Vinca, elle est explicitement menacée: «Dans quelques semaines l'enfant qui chantait pouvait pleurer, effarée, condamnée, à la même fenêtre.»

 

Le propos de Colette n'est toutefois nullement moralisateur, et le livre ne fait pas sien l'adage qui recommande de ne pas manger son blé en herbe. Bien au contraire, ce qui rend Vinca et Philippe si attachants, c'est justement cette ardeur qui les habite et les pousse à aller tout de suite jusqu'au bout de leur amour. Pour l'instant, cette consommation précoce et irréfléchie les sauve de la médiocre banalité. Mais bien des signes laissent présager qu'ils deviendront vite semblables à leurs parents. D'ores et déjà, Vinca et Philippe, en dépit de leur acte audacieux, sont totalement imprégnés des valeurs de leur milieu petit-bourgeois. Ainsi, ils approuvent sagement la décision parentale de ne pas faire suivre des études à Vinca, qui restera auprès de sa mère pour apprendre à tenir une maison. Philippe, moins frileux que son amie, a bien parfois des élans de révolte à l'égard du monde adulte, mais ils se limitent à quelques démonstrations verbales plus théâtrales que réellement senties.

 

Philippe et Vinca sont donc des héros ambigus, à la fois grands et banals, tragiques et dérisoires. A travers eux, Colette montre que la passion et l'éveil de la sensualité sont des drames chaque fois singuliers et pourtant universels, humains en somme. Dans le Blé en herbe, elle peint ce drame en psychologue subtile, avec tendresse mais sans complaisance.

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Du 29 – 04 au 17 – 05 – 15, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) a le plaisir de vous présenter SPIRALES, l’œuvre abstraite de Madame LILIANE MAGOTTE, une peintre Belge dont la relation qu’elle entretient avec l’abstraction ne manquera pas de vous interpeller.

LILIANE MAGOTTE nous entraîne dans les tréfonds d’une aventure qui secoua l’Histoire de l’Art, particulièrement à partir de l’après-guerre : celle de l’abstraction dite « lyrique ». Les premiers exemples de cette forme abstraite remontent au début du 2Oème siècle avec des peintres tels que Kandinsky. Si cette abstraction fut qualifiée de la sorte, ce fut pour la différencier d’une autre forme abstraite, à tendances géométrique ou constructiviste, de laquelle l’émotion ne transparaissait pas. Mais ce ne fut qu’à l’Après-guerre que cette forme d’abstraction nouvelle se développa avec bonheur, à partir de l’Ecole de Paris, sous l’égide de peintres tel que Georges Mathieu.  

Entre abstraction « lyrique » (dominée par la seule couleur) et abstraction « florale » (dominée par la présence du motif- en l’occurrence, la fleur), LILIANE MAGOTTE se cherche en nous offrant des bouquets de couleurs, plongés dans un arrière-plan dont la luminosité particulière fait ressortir le sujet représenté de façon saisissante.

Au contact avec son œuvre, le visiteur peut se demander si l’artiste veut entretenir un rapport sentimental avec la forme, associée à un référant faisant intimement partie de notre vie quotidienne.

Dans le cas qui nous occupe, ce référant c’est l’univers floral. Elle le propose au visiteur en interpellant son souvenir dans la moindre réminiscence sensuelle. Sont-ce des fleurs ou des aperceptions rappelant l’univers des fleurs ?

Mais ces bouquets ne se suffisent pas tels quels : des stries de couleurs viennent les enrober et les porter au regard.

En réalité, tout chez cette artiste est une question de couleurs et de celles-ci surgit la forme dans toute la magie de son abstraction. Concernant l’univers floral, cette abstraction est « matérialisée » par une technique acquise en Histoire de l’Art, au début du 20ème siècle, dans le but de brouiller l’acuité du regard, en projetant le sujet dans une dimension « photographique », à savoir le pointillisme, obligeant le regardant à « faire le point » sur le sujet regardé.

De là, s’accomplit la mise au point laquelle n’est autre qu’un problème de perception rétinienne. Mais à ce stade, intervient le phénomène de la subjectivité, laquelle guidée par le chromatisme de l’artiste, conduit le regardant à fabriquer une image à cette aperception. Car ce n’est que par la couleur que la forme survient dans son œuvre.

Par la présence de l’émotion, LILIANE MAGOTTE nous laisse, non pas deviner mais bien créer des choses car l’interprétation (subjective par excellence) revient au visiteur, cocréateur de l’univers qui le submerge. L’artiste (et c’est en cela que son œuvre est totalement « abstraite ») n’impose rien.

La portée même de l’émotion se retrouve exprimée dans le titre conféré aux œuvres. Ainsi, que vient faire parmi cette myriade de couleurs aux silhouettes florales, cette composition largement dominée par le noir ? NOIR DESSIN (50 x 50 cm – acrylique sur toile)

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a été dicté à l’artiste par les tragiques événements survenus à Paris le 7 janvier dernier, lesquels ont couté la vie à la presque totalité de la rédaction du magazine Charlie Hebdo. Malgré quelques petites étincelles dorées, c’est le noir qui est le sujet de cette œuvre. Le noir, allégorie d’une tragédie.  

A la lecture des titres, l’on s’aperçoit que beaucoup d’entre eux ont des réminiscences révolutionnaires évoquant une finalité régénératrice, telles que MESSIDOR (70 x 70 cm –acrylique sur toile),

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PRAIRIAL (40 x 100 cm – acrylique sur toile),

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REVOLUTION (70 x 70 cm – acrylique sur toile)

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ou VENDEMIAIRE (40 x 100 cm – acrylique sur toile).

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La phase florale n’est, en fait, qu’une étape dans l’œuvre créatrice de l’artiste. Cette exposition nous dévoile le parcours qui l’a conduite de l’abstraction florale à l’abstraction lyrique. Ce parcours se caractérise par un refus progressif (mais inconditionnel) d’un savant pointillisme. MESSIDOR (cité plus haut), laisse apparaître sur la toile, l’idée de pétales comportant de par son traitement pictural (la forme), les attributs nécessaires à la création d’une image, susceptible de s’inscrire dans le système cognitif du visiteur. PRAIRIAL (cité plus haut), offre également une « évocation » de fleurs que le visiteur peut interpréter au gré de sa sensibilité.

 

VENDEMIAIRE (cité plus haut) est sans doute la seule œuvre abstraite laissant apparaître la possibilité de formes florales précises. Des œuvres telles que REVOLUTION (cité plus haut), associent les discours floral et abstrait dans une série d’entrelacs mêlés à une végétation à peine transparente.  

Les trois derniers tableaux exécutés par l’artiste témoignent d’une rupture par étapes avec le discours floral pointilliste. Ainsi, la forme se déploie sur un fond uniformément blanc par rapport aux autres compositions, largement dominées par une série de couleurs créant parfois une atmosphère à la fois lumineuse et nocturne, telles que le vert ou le bleu associées.  

FRIMAIRE (40 x 100 cm – acrylique sur toile),

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accuse encore son goût pour un pointillisme extrêmement fourni.

Par contre, VENTOSE (70 x 70 cm – acrylique sur toile) réduit ce même pointillisme à sa plus simple expression. Contrairement à FRIMAIRE, les taches, plus amples dans leur volume, s’avèrent moins présentes. De plus, elles subissent un changement chromatique radical : du bouquet multicolore, elles passent au jaune-or, bleu-foncé et vert.

LUMINESCENCE (50 x 100 cm –acrylique sur toile)

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est l’aboutissement de cette quête vers une abstraction plus dégagée de ses contraintes chromatiques pour n’adopter que les spirales du trait.

Comme nous l’avons précisé, l’intitulé de cette exposition est précisément SPIRALES. Cela sous-entend une maîtrise du trait que l’artiste domine jusqu’à le faire tourbillonner dans l’espace, le faisant sortir carrément de la toile comme pour aller au-delà du geste.

Qu’est-ce qui crée la magie des toiles de LILIANE MAGOTTE ? « L’ensemble de la composition », direz-vous. Certes. Néanmoins, ce qui porte véritablement la forme au seuil du regard, c’est avant tout, l’arrière-plan de la toile, conçu comme un monde où couleurs et translucidité s’enveloppent l’une dans l’autre, plongeant l’œuvre dans une sorte de silence. De cet arrière-plan originel, la forme s’ouvre à la lumière.

L’artiste qui expose maintenant depuis six ans, a fréquenté les Beaux Arts. Elle a suivi les Humanités en Arts Plastiques et elle est titulaire d’un Régendat dans le même domaine.

Elle est aujourd’hui professeure d’Arts Plastiques dans une école technique. A vingt ans, elle découvre l’art abstrait avec, notamment, les œuvres de Jackson Pollock. Etant dans le figuratif depuis vingt-cinq ans, elle décide de franchir le pas vers un abstrait parsemé de pointillisme dans une perspective essentiellement « lyrique ». Ce n’est que récemment qu’elle décide de l’abandonner pour aborder une abstraction plus pure. Cette pureté est exprimée par le blanc. FRIMAIRE, VENTOSE et LUMINESCENCE, sont réalisés au blanc de zinc et de titane.  

D’un très grand éclectisme, elle pratique l’acrylique, l’huile, l’aquarelle, le fusain et le pastel avec le même bonheur.

Peinture essentiellement allégorique, les titres de ses tableaux renforcent l’éclairage de leur connaissance. Ils sont d’ailleurs agrémentés par des textes reproduisant des poèmes écrits par les poétesses : Sandra Dulier, Joelle Diehll et Suzanne Walther-Siksou, membres du groupe Partenariat Poésie-Peinture du réseau Arts et Lettres.

LILIANE MAGOTTE, par la délicatesse de son pinceau, nous prouve que, contrairement à ce que d’aucuns imaginent (ou craignent), l’abstrait fait transparaître et triompher l’humain.

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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François Speranza et Liliane Magotte: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(29 avril 2015  -  Photo Robert Paul)

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Liliane Magotte - Vue d'ensemble (photo Espace Art Gallery).  

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L'arrache-cœur de Boris Vian

12272728292?profile=originalC’est un roman de Boris Vian (1920-1959), publié à Paris aux Éditions Vrille en 1953.

 

Le titre du dernier roman de Boris Vian renvoie à l'un de ses premiers, l'Écume des jours, dans lequel Alise usait d'une arme étrange, "l'arrache-coeur", pour se venger de Jean-Sol Partre et des libraires qui vendaient ses oeuvres au crédule Chick. Ici, l'intitulé n'évoque plus un objet, mais un comportement: celui d'un village où chacun, à sa manière, s'est vidé de tout sentiment d' amour du prochain...

 

Première partie. Ce 28 août, Jacquemort, psychanalyste de son état, aide Clémentine à accoucher de "trois jumeaux", les "trumeaux" Joël, Noël et Citroën... A Angel, le père, en butte à l'hostilité de l'accouchée, Jacquemort confie son projet de "psychanalyse intégrale": se nourrir des passions et des désirs d'autrui. Au village, les paysans organisent de sordides "foires aux vieux" et maltraitent les jeunes apprentis. L'idée de honte les insupporte et ils s'en délivrent en rémunérant avec de l'or qui a perdu toute valeur d'échange, La Gloïre voué à récupérer avec ses dents "les choses mortes" qu'ils jettent dans un étrange "ruisseau rouge". Le curé fustige le matérialisme paysan et organise des messes à grand spectacle: la religion doit être "un luxe". Quant à Jacquemort, il doit se contenter de lutiner la bonne, Culblanc, à défaut de pouvoir l'analyser.

 

Deuxième partie. Clémentine comprend que ses enfants deviennent autonomes. Jacquemort, toujours en quête de clients, entre dans la peau d'un "chat noir". Le "27 juinet", il surprend le brutal maréchal-ferrant en train de copuler avec un androïde, réplique exacte de Clémentine, à l'heure même où celle-ci connaît l'extase solitaire chez elle. Angel prend la mer sur un bateau à pattes de son invention. Et Clémentine décide de se dévouer corps et âme à ses "trumeaux".

 

Troisième partie. Quelques années plus tard, les enfants s'amusent dans le jardin: ils avalent des chenilles bleues qui leur permettent de s'envoler. Au village, le curé organise des matches de boxe pour prouver l'existence de Dieu: il se bat contre son sacristain diabolisé pour la cause et le vainc par tromperie. Clémentine, de plus en plus angoissée, imagine les dangers qui guettent Citroën et ses frères, jusqu'aux plus invraisemblables. Elle fait abattre les arbres du jardin, puis finit par enfermer les "trumeaux" dans des cages douillettes pour qu'ils ne puissent plus s'envoler. Jacquemort a enfin trouvé un client à psychanalyser: La Gloïre dont il prend bientôt la succession.

 

Curieux village qui tient lieu d' utopie négative (enfants maltraités, vieillards humiliés et vendus, violence primaire incontrôlée, etc.) et à l'orée duquel s'étend le jardin de Clémentine, petit paradis où les "trumeaux" s'adonnent à la découverte de la nature et vivent des expériences "fantastiques"; jusqu'au moment où leur mère croit déceler dans ce hâvre de paix les pires menaces pour ses enfants, imaginant, par exemple, "[qu'ils] creusent un peu trop profondément dans le jardin, que le pétrole jaillisse et les noie tous". Comportement de mère abusive qui, pour préserver la vie de sa progéniture, en va jusqu'à les priver de liberté. Démonstration qui, selon une pratique chère à Vian, pousse une logique jusqu'à l'absurde.

 

Un absurde qui se teinte aussi bien des couleurs de la fantaisie - la néologie botanique, le merveilleux enfantin, etc. - que de l'horreur - la "foire aux vieux" - et qui permet à l'auteur, comme dans la tradition du conte philosophique, de délivrer un message sans en avoir l'air. A ce jeu-là, Vian excelle: un coup pour l'Église, ridiculisée en la personne d'un curé bonimenteur, boxeur et tricheur, et qui n'a aucune valeur à incarner; un autre pour la psychanalyse, moderne religion, réduite à la figure d'un voyeur lubrique, "capacité vide" en quête de quoi se remplir; un troisième pour l'amour abusif qui n'est qu'un masque à l'égoïsme et au désert affectif. A la fin de ce chamboule-tout, que reste-t-il? Une vision qui serait désespérante si l'écriture de Vian ne suscitait sans cesse rire et sourire.

 

Du calendrier en folie - "39 juinaoût", "73 févruin", "347 juillembre", etc. - au décor que poétisent les fleurs et les oiseaux aux noms-valises - "brouillouse", "béca-bunga", "maliette", etc. -, tout est fait, comme dans les contes merveilleux, pour gommer la réalité: rien de surprenant que l'on croise dans le roman un chat noir comme échappé de chez Lewis Carroll. Il n'en reste pas moins que, dans cet univers imaginaire comme dans le nôtre, dès lors que les valeurs manquent et laissent la place au vide, l'état de nature reprend le dessus - et il n'a rien de la vision paradisiaque qu'en donne un Rousseau!

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« L'amour de la poésie » (1929) , d’Eluard : ce "livre sans fin" est dédié "à Gala", la compagne du poète.

Nous retrouvons dans les premiers poèmes du recueil l'inspiration amoureuse qui avait embrasé la fin de "Capitale de la douleur".

Maintenant, l' amour a exorcisé l'univers contre les puissances malfaisantes et rendu "la confiance dans la durée". Dès lors vivre est possible, tout est possible: "Mes rêves sont au monde/Clairs et perpétuels/Et quand tu n'es pas là/Je rêve que je dors je rêve que je rêve."

Apparaissent alors quelques-uns des plus beaux poèmes d' amour de la poésie française, tel "Je te l'ai dit: "Je te l'ai dit pour les nuages/Je te l'ai dit pour l'arbre de la mer/ (...) Je te l'ai dit pour tes pensées et tes paroles/Toute caresse toute confiance se survivent."

Cependant, cette vision d'un monde transparent et amical, suscité par l' amour, ne saurait, de même que l' amour, être immuable, assurés, possédée définitivement. Aussi le recueil contient-il à côté des clairs poèmes du bonheur nombre d'autres poèmes où le désespoir a retrouvé son ancienne puissance.

Mais, au fond même de l'amertume, le poète reste constamment passionné, conscient de l'urgence qu'il y a à exprimer les révoltes encore muettes: "Entendez-moi/Je parle pour les hommes qui se taisent/Les meilleurs."

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administrateur partenariats

 

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Chers membres,

J'ai réuni ici les billets d'info concernant l'administration des partenariats.

En espérant pouvoir de cette façon vous renseigner au mieux.

Amicalement,

Liliane Magotte

 

Petit rappel de grande importance:

Afin d'éviter la répétition de titres ou de thèmes qui pourraient désorganiser la cohérence des partenariats lors de leur publication, je rappelle très aimablement qu'il est indispensable de me contacter préalablement lors de la mise en place d'un partenariat poésie-peinture. 

L'image et le texte devront être présentés en message privé et feront l'objet d'une vérification, il est interdit de partager des photos ou textes ne provenant pas du site.

D'avance je vous remercie.

Je souhaite entrer en partenariat , comment dois-je faire ?

 

 

Aux membres désireux d'entrer en partenariat avec un autre membre.

 

 

Les partenariats plume-pinceau ou pinceau-plume,

partenariats du coeur....en voulez-vous ?

 

 

Une sélection des beaux partenariats d'Arts et Lettres, première saison.

Florilège des partenariats poésies-peintures d'Arts et Lettres

 Livret contenant l'ensemble des partenariats,

une petite édition de 75 feuillets , réalisé par Robert Paul

 

Les partenariats d'

Arts

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Lettres

 

 

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Maeterlinck entame sa carrière littéraire par la poésie avec Serres chaudes; suivront le recueil Douze Chansons (qui deviendront Quinze Chansons en 1900), puis le silence: Maeterlinck abandonne alors définitivement cette forme
d'écriture.
Ce recueil mûrit dans les serres d'Oostakker où son père, longtemps avant lui, s'interrogeait sur l'intelligence des fleurs. Dans Bulles bleues, en 1948, Maeterlinck dira de Serres chaudes qu'elles n'eurent "d'autre retentissement
qu'un coup d'épée dans l'eau". Verhaeren fit pourtant dans le Mercure de France un compte rendu élogieux du recueil, où il saluait l'auteur de "n'avoir pas eu peur de son inspiration adolescente".

La solitude, la captivité et la douleur de l'âme dominent l'ensemble du recueil: "O serres au milieu des forêts / Et vos portes à jamais closes!" Mais à travers la prison transparente de la serre, le poète perçoit parfois l'activité du monde; il lui vient alors des regrets: "O mon âme vraiment trop à l'abri", et des désirs de sentir la vie pénétrer son univers clos: "Mon Dieu, mon Dieu, quand aurons-nous la pluie, / Et la neige et le vent dans la serre." Son renoncement au monde, imparfait, ne lui apporte pas la sérénité escomptée et la serre lui est un lieu aussi inconfortable que le monde des hommes: "Seigneur, les rêves de la terre / Mourront-ils enfin dans mon coeur? / Laissez votre gloire seigneur / Éclairer la mauvaise serre."

A côté des poèmes réguliers, composés d'octosyllabes à rimes le plus souvent croisées, Serres chaudes contient également des proses poétiques et des vers libres, où des images hétéroclites renvoient une vision chaotique du monde extérieur: "On dirait une folle devant les juges, / Un navire de guerre à pleines voiles sur un canal..." Ces vers qui témoignent d'une extrême sensibilité, disent aussi la peur d'autrui, de l'homme en général: "Oh! j'ai connu d'étranges attouchements! Et voici qu'ils m'entourent à jamais." Et plus loin: "Il y avait des figures de cire dans une forêt d'été... / Oh! ces regards pauvres et las!"

De tous les recueils du symbolisme, Serres chaudes est sans doute le plus fidèle à cette école. Seule l'âme du poète habite ces pages; aucune passion forte, malgré l'expression d'une souffrance et d'une pitié pour le genre
humain, aucun homme tangible ne peuplent ces vers. Le "je" qui se plaint dans ces poèmes monotones est une âme solitaire, gagnée par la mélancolie.
Maeterlinck a la tête dans les étoiles; il est épris de comètes, de nébuleuses, de nuages, mais il s'enferme aussi dans des lieux clos dont les serres sont sans doute les plus étouffants qu'il ait jamais imaginés. Elles
symbolisent ici la captivité de l'âme, la prison transparente; elles évoquent les touffeurs et les langueurs de l'ennui. Déjà toute la mythologie du théâtre de Maeterlinck est en place: princesses évanescentes, vierges pleurant au fond
des grottes humides, petites filles solitaires dans un univers hostile.

A travers ces poèmes de l'introspection décadente, traversés d'images fulgurantes qui jouent d'une savante et délicate musicalité, Maeterlinck veut par le surnaturel appréhender la nature même de la condition humaine. Le
symbolisme chez lui est une réponse à la vie et non un simple décor.

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