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administrateur théâtres

BOZAR EXPO - Antoine Watteau (1684-1721) | 08.02 > 12.05.2013

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 Ecoutez Watteau, c’est une leçon de musique !

Cette exposition est l'occasion unique de redécouvrir ce maître ainsi que certains de ses contemporains à travers une centaine d’œuvres, réunissant peintures, dessins, gravures et instruments de musique. Fragile et peu abondante, la production du peintre, conservée aux quatre coins du monde, figure au patrimoine des musées les plus prestigieux. La voici à Bruxelles, cœur de l’Europe.  Elle est le fruit d’une collaboration inédite du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles avec le Palais des Beaux-Arts de Lille, initiant un flux intellectuel et artistique de premier plan entre les deux villes. Elle est inscrite sous le haut patronage de  Leurs Majestés le Roi et la Reine des Belges, sous le Haut Patronage de Monsieur Elio di Rupo Premier Ministre et sous le Haut Patronage de Monsieur François Hollande, Président de la République française. L’esprit qui préside à son installation est inscrit dans l’interdisciplinarité chère au Palais des Beaux-Arts dont la mission est de rassembler les arts, depuis sa fondation.

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La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.

Baudelaire, Les Fleurs du mal, IV.

Le poème « Correspondances »  de Charles Baudelaire ne peut pas trouver ici  meilleur écho. Tout d’abord au cœur de l’œuvre de Watteau lui-même qui trouve son inspiration picturale dans le geste  et le corps du musicien, le galbe et les formes des instruments aux connotations souvent  érotiques. Le désir  naît dans la musique, symbole de l’amour mélancolique. Et le porte-mine à deux pointes de l’artiste ou son pinceau et sa brosse s’empressent de capter avec vivacité et réalisme ses vibrations les plus profondes. Les titres de ses toiles seront évocateurs : « La leçon de musique, la gamme d’amour, l’accord parfait….  »  Intitulés évocateurs qui suggèrent les double-sens des fêtes galantes. Car, non, Watteau n’a pas d’appétence pour les traditionnels sujets religieux, mythologiques ou guerriers. Il s’intéresse aux sentiments intimes de l’homme, et cela, c’est une véritable révolution.     En 1717 il peint l’œuvre qui signa son style : « Le Pèlerinage à l'île de Cythère ». Une scène pastorale inspirée du « Jardin d’amour » de Rubens dont il était le fervent admirateur.  Il la soumit pour son admission à l’Académie où il fut reçu comme peintre (inclassable) et désormais appelé « peintre de fêtes galantes », un titre créé expressément pour lui. La campagne semble enchantée, les paysages, italiens, un pays qu’il ne connaîtra que par la musique, car il est pauvre et a  a raté de peu l’obtention du prix de Rome.

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Non seulement la musique, celle de Couperin en particulier,  est  source d’inspiration mais la présence d’autres disciplines comme le théâtre et la danse n’a rien de fortuit. C’est l’occasion pour lui d’insister sur les duperies et les humiliations de l’amour. Ombrageux et farouche, il convient que l’amour est éphémère et ne peut durer que le temps d’un morceau de musique. Voilà la boucle est bouclée.  Gilles le niais avec son costume de satin blanc, trop large et trop court, entouré d’autres personnages de la Comédie italienne, a peu de chances de séduire une dame frivole. Pierrot de dos est l’objet de quolibets féminins et est empêché de s’assoir.   Watteau annonce le théâtre de  Marivaux. Le mouvement des idées se fait en dehors de la cour et on se réunit dans les salons mondains chez Pierre Crozat, son bienfaiteur.

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Ensuite, le poème « Correspondances »  de Charles Baudelaire trouve aussi son écho dans la conception même de l’exposition qui n’est pas une monographie mais une mise en présence de disciplines correspondantes. C’est ainsi que  William Christie, le prestigieux commissaire général de l’exposition,  a orchestré lui-même le fil conducteur  musical de l’événement en intégrant le son à la scénographie. Des points d’écoute et des alcôves musicales sont  à la disposition du public tout au long du parcours de l’exposition. Au moyen d’un casque audio, le visiteur est invité à découvrir une sélection de morceaux de musique, notamment  des extraits  de  son concert du 28 janvier 2013 au conservatoire Royal avec Les Arts florissants. Une salle accueille des concerts gratuits interprétés par les étudiants de plusieurs conservatoires supérieurs de Belgique et de France, durant les nocturnes du jeudi soir.12272863684?profile=original

 

Et  les correspondances ne s’arrêtent pas là : la littérature rejoint le concert des plaisirs du luth, de la guitare  et du pinceau. En effet, Pierre Michon, l’écrivain français, est aussi de la partie. Les visiteurs peuvent également lire et écouter durant leur visite de larges extraits de son roman « Maîtres et serviteurs, la vie de Watteau », une œuvre littéraire contemporaine centrée sur la vie du peintre mort trop jeune de phtisie.

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La structure de ses tableaux est audacieuse et raffinée. Le peintre agence des personnages sortis tels quels de ses carnets  puis les  enchâsse dans des paysages poétiques. Armé de pierre noire, de sanguine ou de craie blanche, il a croqué avec souplesse et vivacité les gestes des artistes du pont Notre-Dame et ceux  des comédiens de la Commedia Del Arte … avant l’édit de  leur expulsion par le pouvoir. Dans ces vastes paysages qui ne sont pas sans rappeler les maîtres flamands, il laisse toujours un espace vide : pour le rêve, le silence, le temps suspendu ou  le sentiment de mélancolie. Plus que de nous parler, ses toiles vibrent de murmures mystérieux et de volupté : depuis les battements de cœur d’Arlequin ou de Pierrot, aux bruissements des feuillages, des  sources et des fontaines, jusqu'aux  froissements délicats des robes de soie des dames costumées. Clin d’œil à la sévère Madame de Maintenon ? Chimères ou monde réel ?  Les compositions asymétriques ont l’air de balancer entre deux. Mais l’émotion est sertie dans la palette brillante et les jeux de lumière mystérieux autour des personnages à la pose dansante et aérienne. Au XIXe siècle, Baudelaire dans les «  Fleurs du mal » et Verlaine dans les « Fêtes galantes » n’auront de cesse que de se référer à ce jeune peintre dont la réussite n’apaisa jamais la mélancolie.

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(né en 1684 à Valenciennes, mort en 1721 à Nogent-sur-Marne)

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Commentaires

  • administrateur partenariats

    Merci Desahelle pour ce beau billet qui m'a donné l'envie d'aller visiter l'expo.

    Je reviens de Bruxelles et je ne suis pas déçue !

    Tes chroniques sont super ! merci !

    Liliane

  • administrateur théâtres

    "L'exposition invite à redécouvrir ce maître du poudroiement pictural à travers une centaine d'œuvres, signées par lui et par quelques-uns de ses contemporains. Peintures, dessins, gravures et instruments de musique évoquent l'art d'une époque et soulignent les apports de Watteau. Le thème de la musique est bien sûr le fil conducteur de l'accrochage, qui reprend notamment les nombreuses toiles de l'artiste où figurent des musiciens.

    En prologue à l'exposition, William Christie évoque la Régence, cette période de l'Histoire de France qui a suivi la mort de Louis XIV et précédé le règne de Louis XVI (1715-1723) où émergent une nouvelle classe sociale et de nouvelles esthétiques, en musique comme en peinture (le 28 janvier, avec un concert des Arts florissants).

    Antoine Watteau a participé pleinement à la vie de fêtes mondaines de cette époque «rococo» en en créant les décors ou en ornant les riches demeures qui les abritaient. Mais il n'en a pas seulement servi l'insouciante frivolité. Il lui a plutôt donné des ailes, de la grâce. Le peintre, dont il ne faut pas oublier qu'il sera éternellement un jeune artiste, puisqu'il est mort à 37 ans, de consomption, fait chatoyer les tissus, aère les prairies et les bosquets comme personne, bien avant que les artistes ne sortent peindre sur le motif. " Elizabeth Chardon

  • administrateur théâtres

    2965961994?profile=original

    Antoine Watteau (1684-1721), Deux études de musiciens et d’une chanteuse (Antonio, Paccini, d’Argenon) Vers 1720-1721. Trois crayons, mine de plomb et pastel bleu, 23,9 x 27,4 cm. Paris, Musée du Louvre

  • administrateur théâtres

    L'expo deu mois? Ou celle de l'année?

    soyez curieux de l'article   d'Olivier Madelin    dans :

     

    http://www.lespectacledumonde.fr/index.php?option=com_content&v...

  • administrateur théâtres

    lisez aussi 2965958063?profile=originalla chronique de Demandez le programme: http://www.demandezleprogramme.be/-Detail-agenda-?id_event=8425#chr...

  • administrateur théâtres

    2965958845?profile=originalL'embarquement pour Cythère

  • administrateur théâtres

    Watteau

    Au-dessus des grands bois profonds L’étoile du berger s’allume... Groupes sur l’herbe dans la brume... Pizzicati des violons... Entre les mains, les mains s’attardent, Le ciel où les amants regardent Laisse un reflet rose dans l’eau ; Et dans la clairière indécise, Que la nuit proche idéalise, Passe entre Estelle et Cydalise L’ombre amoureuse de Watteau.
    Watteau, peintre idéal de la fête jolie, Ton art léger fut tendre et doux comme un soupir, Et tu donnas une âme inconnue au désir En l’asseyant aux pieds de la mélancolie.
    Tes bergers fins avaient la canne d’or au doigt ; Tes bergères, non sans quelques façons hautaines, Promenaient, sous l’ombrage où chantaient les fontaines, Leurs robes qu’effilait derrière un grand pli droit...
    Dans l’air bleuâtre et tiède agonisaient les roses ; Les coeurs s’ouvraient dans l’ombre au jardin apaisé, Et les lèvres, prenant aux lèvres le baiser, Fiançaient l’amour triste à la douceur des choses.
    Les pèlerins s’en vont au pays idéal... La galère dorée abandonne la rive ; Et l’amante à la proue écoute au loin, pensive, Une flûte mourir, dans le soir de cristal...
    Oh ! Partir avec eux par un soir de mystère, Ô maître, vivre un soir dans ton rêve enchanté ! La mer est rose... il souffle une brise d’été, Et quand la nef aborde au rivage argenté
    La lune doucement se lève sur Cythère.
    L’éventail balancé sans trêve Au rythme intime des aveux Fait, chaque fois qu’il se soulève, S’envoler au front des cheveux, L’ombre est suave... tout repose. Agnès sourit ; Léandre pose Sa viole sur son manteau ; Et sur les robes parfumées, Et sur les mains des bien-aimées, Flotte, au long des molles ramées, L’âme divine de Watteau.

  • Billet doux pour une fête galante.

  • administrateur théâtres

    « Watteau et les muses »  la première date à retenir:

    Ricercar Consort & Céline Scheen

    Ritratto dell’amore

    Mercredi 20.02.2013 – 20 :00 | Église des Minimes

    Peut-on rêver meilleure voix que celle de Céline Scheen pour nous dresser le portrait de l’amour ? En compagnie de Philippe Pierlot et du Ricercar Consort, la soprano belge nous plonge dans l’intimité des airs de cour français, au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles. Un concert phare de la série « Watteau et les muses », dont l’atmosphère raffinée et sensuelle évoque bien sûr la période foisonnante qui vit éclore le génie auquel le Palais rend hommage tout au long du printemps.

    Philippe Pierlot viole de gambe, direction Céline Scheen soprano Ricercar Consort Œuvres de Jean-Baptiste Lully, Michel Lambert, François Couperin, Marin Marais, Jean-Philippe Rameau, Jean-Fery Rebel

    € 31 – 20

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