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Le soleil s’est fendu

L’horizon s’est enfoui

Et les arbres ont gueulé

« On ne poussera plus » !


La mer s’est déchirée

Toutes les fleurs ont vomi

Des nuages pourris

L’aversion est tombée !


Les saisons dégoûtées

Ont abattu le vent

Les montagnes essoufflées

Cimentent les océans…


L’abondance pleure sa conque

Aux deals des gens quelconques

Par qui le mal arrive ?

Les pies, les merles, les grives ?


Que faire des souvenirs

Les meilleurs et les pires ?

Que faire de nos affaires

Et les jupes de nos mères ?


On caressait l’espoir

Mais il ne sentait rien !

Ce mot n’a rien à voir

Plus personne ne sent rien !


Volontaires de carrière

Gorilles des atmosphères

Usent encore de leur flair

D’allégories pour distraire !


Avoir et être pèsent

Mais on joue au trapèze

Et entre deux falaises

On panse nos antithèses…


Mais de la vie en rose

Aux périls imaginaires

Il s’en passe des choses…

Réalité n’est que Bière…



Fabienne Coppens

Sabam
30 03 98

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La page de silence





Ma page est de silence, vers et rimes s'enlisent,

Ma voix se pose nue, et l'hiver la peint.

Les mots restent muets, ils cherchent leur devise

Sauront-ils revivre dessinés de ma main?


Pourrais-je les tisser, les broder en exil,

Les atteler au vent qu'ils survolent tes jours,

Les mouiller de soleil, les poser sur tes cils,

Les coucher sur ton coeur et les border d'amour?


Ma page reste blanche aux regrets de ma main,

Le regard embué de brisures d'espérance,

Mon âme à fleur de doigt guette déjà demain,

Quand les mots cèderont leurs masques de silence ...


KVR


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Fils de lin

Le matin, tisser des fils de lin, de soie, de satin
croisement des chemins
de notre destin
Fils d'Ariane, d'opale,
Chants de l'aube,
fils de la vie qui nous suggère de transmettre nos oeuvres, nos talents
ourle nos pas de mousse et de sable
le long des rivages
d'un autre temps.



Un jour de printemps, 25 mars 2010
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Le manque de Lui ...


"Jade" toile de 2008



Mon cœur a éclaté, tranché, ensanglanté...

Le sabre du mensonge a bien fait son office

Puisque je suis à terre, puisqu'il vient de tuer

L'âme de cet amour, cruel sacrifice...


Et voilà que je sens s'écarteler mon corps

Par trop de souvenirs, trop d'images floutées...

Et sa voix que j'entends, et que j'entends encore

Me dire et me redire ces mots les plus sucrés


Qui posent sur ma peau les frissons les plus doux...

Je me sens bien vaincue, perdue de déraison,

A cent lieues de penser qu'il pouvait après tout,

Me caresser du souffle de la trahison ...


Comment aurais-je pu croire à une triste fin

Quand son regard était le plus beau des miroirs,

Et que ses mots chantaient comme un alexandrin;

Comment aurais-je pu croire qu'il peindrait tout en noir...


C'est un manteau de larmes qui baigne mon désir

De perdre la raison et qui me fait trembler

Du froid de l'abandon.Où est-il ce délire

Qui enflammait mes jours? Je me croyais aimée...


Je le cherche à présent au fond de mon silence.

Douloureux pèlerinage, rencontre de l'oubli,

Je devrais le haïr, je pleure son absence,

Je pleure sa chaleur, je pleure le manque de Lui ...


KVR





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Gueule de Flamme

GUEULE DE FLAMME


La photo du bonheur

Chiffonnée dans tes yeux

A repris ses couleurs

Et son toucher soyeux


Te voilà, Gueule de flamme

Au parfum de sésame

T’as le cœur en diamant

Et le corps endiablé


On ne se refait pas rien qu’en claquant des doigts

Moi, je te l’avais dit : « le temps est un ami »


Qui connaît des peines immenses

Peut vivre des joies bien plus denses

Qui crie « au secours, plus d’amour ! »

Sera bien étonné, un jour…


Tu fais plein de projets

Avec elle, c’est complet !

Te voilà tout transi

Et tout te réussit


Quand tu penses au passé,

Il reste si peu de choses !

Non, ne sois pas gêné

De m’avoir dit tant de choses !


La chance dépose en toi

Son nid de nirvana

Et elle te redit « le temps est un ami » !


Fabienne Coppens Sabam 1994

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Je t'écris mes couleurs ...

Le rose de tes mots est venu me bleuir,
Me bleuir dans les mauves avec de l'indigo;
Et puis je deviens pourpre, je rougis de plaisir,
D'un rouge alizarin, c'est pour moi le plus beau...

Dans le vert de mes yeux se trouvent mes aveux;
Emeraude et phtalo pour avouer la passion,
Un peu tendre ou amande c'est le vert amoureux,
Vert antique un peu sombre, çà c'est pour la fusion...

Et ces rêves qui sont blancs, ces contes enneigés,
Les nuages et les lys, les cygnes et le vent
Qui parfois vient casser ce blanc immaculé,
Le voile, les dragées et le rire des enfants...

Qu'ai-je donc oublié? Ah! Oui, c'est volontaire,
Ces tristes demi-tons allant du gris au noir,
Ternes et sans chaleur, si proches de l'hiver
De notre fin de vie, couleurs de désespoir...

Si tu étais mon Ange, bien sûr tu serais d'Or,
Mais d'un or très orange, proche de mandarine,
Avec des reflets jaunes et très peu d'incolore,
Un ton près du soleil tel que Râ le sublime!

Que ferions-nous, pauvres de nous sans les pigments
Sans ces mille couleurs qui peignent notre vie?
Colorants d'émotions, témoins de sentiments,
Animant nos décors, nos multiples envies...

C'est dans mon arc-en-ciel que je t'invite ici.
Ces couleurs sont ma vie, je te les offre toutes,
Sauf une seule que pour toi, par amour, j'ai bannie,
L'aurais-tu deviné ? C'est la couleur du doute ...

KVR


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Tout

Tout tout tout vous saurez tout…

J’ai énormément de difficulté à me tenir sur une seule toile.

Alors, j’en commence trois ou quatre à la fois, créant ainsi un thème. Lorsque j’estime mon travail terminé, j’exploite d’autres horizons.

J’expérimente de nouvelles techniques. J’aime beaucoup les matières structurées. Je ne fais jamais une seule esquisse ni aucun projet. Je travaille spontanément, et après, la toile me parle. Les formes, les couleurs se présentent à moi et j’essaye de les dominer. Ce n’est pas une chose facile, je fais énormément d’erreurs. Lorsque l’œuvre ne me parle plus, je l’enlève du chevalet et je commence autre chose. Il est extrêmement rare qu’une toile arrive à son aboutissement d’un seul coup. Ca arrive parfois mais là, c’est un coup de pot.

J’avais fait une toile en 1994 que j’ai exposé à plusieurs reprises et qui avait été choisie pour me représenter sur une affiche du salon du Cercle des Beaux-Arts de Verviers, et chaque fois que je la regardais, quelque chose en moi me disait « elle n’est pas terminée, elle attend un geste de toi, il faut aller plus loin… » et 10 ans après, je l’ai je crois terminée. En tous cas, elle a l’air plus heureuse.

Un critique d’art a dit de moi : « D’une grande séduction, les huiles, collages et acryliques de ce peintre créent une impression d’équilibre et de sérénité qui se distille sans effet de répétition ». Ca m’a drôlement encouragé.

J’ai de longues périodes de doute ou rien ne se passe, où j’ai l’impression d’avoir tout dit, où la vue d’un simple tube de couleur me hausse le cœur. Puis un rayon de soleil sur un objet que je vois tous les jours attire mon attention, et c’est le déclic, c’est reparti.

Au début, j’étais figuratif et quand je suis passé à l’abstrait, j’ai ressenti une impression de liberté de découvrir un monde inconnu et passionnant, de me trouver comme disait un autre critique, « entre ciel et terre », de gérer l’espace de la toile sans me poser trop de questions, comme un enfant qui dessine et c’est là que j’ai retrouvé la spontanéité que j’avais perdue étant figuratif.

Il ne faut pas provoquer les choses, ces dernières viennent d’elles-mêmes. Il faut parvenir à les maîtriser et les rendre belles.

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Je veux aujourd'hui vous parler de ma peinture...

Je veux parler de l'absolue nécessité

D'être avec elle dans l'atelier aux étroits murs,

Lui raconter toutes mes heures accumulées...


Lui faire vivre mes blessures, calmer mes peines,

Décolorer mes bleus à l'âme et mes noirceurs,

Lui dérouler mes rêves et devenir sereine,

Parler de mes attentes, dépeindre mes humeurs...


Je veux vous raconter nos rendez-vous secrets,

Toutes nos causeries que nous avons ensemble

Quand nous nous retrouvons chaque début de journée,

Et que devant la toile blanche ma main tremble...


Je sais qu'elle m'attend, j'aime son exigence,

Je lui confie mes gens et mes questionnements,

Elle dirige mes spatules sans aucune complaisance,

Je lisse alors la pâte en un seul mouvement...


Elle est la réflexion de toutes mes émotions,

Loin du désir de plaire, elle me met à l'aise.

Elle fait de ce dialogue une méditation,

Elle est sans condition et son action m'apaise...


Qu'importe la critique, elle se veut authentique,

Mais elle déteste plaire au premier des regards,

Elle aime apprivoiser le côté artistique,

Et fait analyser jusqu'à rendre bavard...


Je lui donne mes pensées, elle fusionne mes couleurs,

Elle me fait ressentir la moindre maladresse,

Et ma main recommence pendant de longues heures,

Pour qu'enfin, je vois poindre le fruit de ses promesses...


C'est une intimité que nous nous partageons,

Elle est mon coeur, mon âme, ma créativité;

Sans elle, je ne suis rien; elle est mon éclosion,

Mon impulsion, mon évasion, ma vérité...


KVR

















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Le sang noir de Cripure au niveau de sa douleur

En 1935, Louis Guilloux publie « Le sang noir ». On pourrait penser que Cripure, le héros de ce roman, n'est qu'un vieil homme au coeur débordant de haine et qui, dans son impuissance, rêve d'épouvantables vengeances. S'il n'est que cela, comment expliquer l'émotion, la sympathie, l'admiration que sa tragique figure éveille? Qui est-il? un martyr, un génie, un fou, un être brisé par la souffrance, un révolté, un saint? Il est laid, ridicule, sale avare, lâche, hypocrite, mais il est aussi capable d'extrême courage, d'attaquer tous les conformismes, de se battre, de risquer sa vie, d'être désespérément fidèle au souvenir de la seule femme qu'il ait aimée et qui a trahi son amour. On ne peut pas définir Cripure. Dès les premières pages du livre, il s'empare du lecteur, le fascine sans qu'il puisse démêler la part de la haine et la part de l'amour dans son regard captif. Le vrai nom de Cripure est Merlin, mais les élèves du lycée déshérité où il enseigne la philosophie lui ont donné ce sobriquet de Cripure (à cause de la "Critique de la raison pure" que ses élèves appellent "la Cripure de la raison tique"). Dans son dos ils scandent: "Crip... Crip... Cripure!". Bien plus, ces potaches le torturent de mille manières, par exemple en dévissant les roues de sa bicyclette. Depuis longtemps il n'a plus aucune autorité. Le drame est plus grand: ses collègues le détestent, le calomnient. Toute la population rit de lui. Quand on le croise on se touche le front: il est fou! En vérité son comportement peut le laisser croire. Il y a son allure d'abord, cette peau de bique qu'il porte en toutes saisons, son gilet taché. Il y a son regard inquiétant; il y a ses pieds immenses dans lesquels il s'empêtre: il y a enfin sa déchéance sociale: ce professeur est marié à une virago "ramassée" à Marseille, ignoble gothon au coeur généreux peut-être mais qu'il n'apparaît pas tant la vulgarité le cache. La société peut-être pardonnerait et baptiserait tout cela originalité. Mais Cripure est prodigieusement intelligent -au point qu'on pense à lui parfois comme à un Monsieur Teste affronté à l'univers réel et non plus au monde abstrait dans lequel Valéry plaça le sien, comme aussi Monsieur Ouine de Bernanos. Son intelligence a le dangereux pouvoir de rendre manifestes tous les ridicules et la bêtise. Il est dangereux. On se moque de lui parce qu'on le craint. Un jour pourtant, un choc va se produire. Du fond de sa détresse, Cripure sera soulevé, révélé par la révolte. Lui le faible, le craintif, trouvera le courage fou de provoquer la bêtise et l'absurdité générales incarnées dans un autre professeur, Nabucet. Au cours d'une scène d'une violence inouïe, il va entamer le combat qui le mènera à la mort, mort grotesque et tout ensemble grandiose que Louis Guilloux nous décrit avec un incroyable talent de peintre fantastique. Vision inoubliable que celle du cadavre de Cripure conduit tout le long des rues, dans un antique fiacre d'où dépassent et se balancent ses grandes jambes avec, tout autour, la foule stupide qui se presse et qui répète, terrifiée l'incroyable nouvellle: "C'est Cripure! Cripure est mort!".

Le "sang noir", lors de sa publication, portait cette bande désespérée: "La vérité de cette vie, ce n'est pas qu'on meurt, c'est qu'on meurt volé." Les plus méprisables créatures de ce roman, aux yeux de leur auteur, ont une excuse dans la souffrance de vivre. Et cependant, le livre tendu et déchirant qui mêle à des fantoches misérables des créatures d' exil et de défaite, se situe au-delà du désespoir ou de l' espoir. Nous sommes avec lui au coeur de ces terres inconnues que les grands romanciers russes ont tenté d'explorer. Les êtres y courent à leur fin, à la fois solitaires et confondus, identiques et irremplaçables. Placés au-delà de la justification, ils se détachent alors avec la puissance de la vie, assez semblables à nous pour que nous les reconnaissions, mais portés au-dessus de nous, agrandis par la souffrance qui fixe leurs attitudes dans la mémoire du lecteur et les rend exemplaires: ce sont les grandes images de la compassion.

Voilà le grand art de Guilloux qui n'utilise la misère de tous les jours que pour mieux éclairer la douleur du monde. Il pousse ses personnages jusqu'au type universel, mais en les faisant d'abord passer par la réalité la plus humble. "Le sang noir", tenu par Gide pour l'un des tous premiers romans de ce siècle, justifie pleinement ce jugement. Outre la chaleur et la vérité humaine qui s'en dégagent, outre les pages d'une exceptionnelle beauté dramatique, il y a dans ce livre des énigmes que l'on sent essentielles et qu'inlassablement on interroge. Qui dira pourquoi Cripure se suicide? Est-ce par folie, pour tuer l'être infernal qui s'agite en lui? est-ce par désespoir ou parce que ainsi seulement viendront le repos et la paix? Peut-être se tue-t-il pour retrouver sa dignité perdue et nous donner la conscience de la nôtre, à nous qui sommes ses frères. Mais le personnage de Cripure, s'il est d'une importance extrême, ne résume pas tout l'intérêt de ce roman, qui dresse par ailleurs un tableau obsédant de l'atmosphère de la Grande Guerre, de l'écroulement des valeurs bourgeoises et de cette mort absurde à laquelle toute la jeunesse d'alors se sentait inutilement promise. Malraux a d'ailleurs souligné: "La mort, immédiate et lente, celle des soldats tués ou celle de Cripure... La mort est le personnage principal du "Sang noir". C'est d'elle qu'il tire malgré son désordre son étonnante unité... Elle qui permet à l'auteur...de chuchoter tout au long du livre sa vérité tâtonnante, sa vérité à la fois indignée et désespérée d'aveugle: "Les hommes ne sont pas au niveau de leur douleur - Les hommes ne sont pas dignes de leur mort"... car il y a dans ce livre l'éternelle rancune, contre le réel, du poète que la nature de son talent contraint à s'exprimer non par le lyrisme, mais par le réel même."

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Ecris !

...E C R I S !



Ecris à l’encre des pieuvres
Tant acculent les chefs-d'oeuvre

A s’y noyer, noyer, noyer, noyer

Ecris pour les durs de la feuille
Les marguerites que l’on effeuille
A s’y lover, lover, lover, lover

Comme un oeuf, à eux
Pour tes ifs, tes fi !

Ecris à Fan-Fan la tulipe
Coq à l’âne et disciples

A te parler, parler, allié, à lier, allez !


Ecris, de ta plume d’avalanche
Qui te pousse des hanches
A tout voir, te mouvoir, t’émouvoir

Comme un jeu, à Je
Tes pages..
.Tapage !...

Ecris pour être l’âme patente
Des éprouvettes de la chance

Où tout baigne, tout saigne et enseigne

Ecris à attirer les chouettes
Vers le cœur de ta couette


A s’étendre, s’éprendre et tout tendre

Comme une tuile, à toi
Et que briquent tes voies !

Fabienne Coppens

Sabam 1998
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Portraits

Passionnée de peinture et de dessin, j'ai réalisé beaucoup de portraits au cours des dernières années.

Voici le blog où vous pourrez en découvrir une grande partie:

http://cycling-collection.skynetblogs.be/

Ayant beaucoup évolué depuis ma plus tendre enfance dans le milieu cycliste, c'est la raison pour laquelle vous retrouverez principalement sur ce blog des portraits de ces sportifs.

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Vernissage le 31 mars à l'ISELP

MARIE BEAUDRY-CÉRAMIQUE
FRÉDÉRIQUE COOMANS-BIJOUX


Marie Beaudry propose des pièces en porcelaine où les contenants et contenus s’entremêlent, où les lignes et les angles droits se marient aux courbes dans une harmonie géométrique. Nous sommes loin des bols ou assiettes à ranger dans nos vaisseliers car l’artiste compose des sculptures d’objets uniques à exposer.


Alors que les perles s’enfilent, Frédérique Coomans préfère habiller les pierres de textile. Comme une seconde peau, la créatrice opte pour un jeu de mailles souples qui révèlent, sous leurs trames, des formes organiques; galets, pierres semi-précieuses ou plexiglas dépoli.
Portées, ses parures se tendent et se détendent au gré des mouvements du corps et le contraste des matières exprime une sensualité incisive qui se fait remarquer.

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Qu' est-ce que le Paysan parvenu (roman publié en 1734 et 1735)? Impossible de s'y tromper: le plus grand récit comique français depuis Rabelais. Sa verve et sa virtuosité étourdissantes consacrent un thème majeur du roman moderne, l'ascension sociale, qui mène ici "un gros dodu" de la ferme à la finance, des champs en jachère aux femmes en chaleur.

On ne sait rien, comme d'habitude, de la genèse, ou plutôt du surgissement, dru et droit, de ces "Mémoires" entre la deuxième (janvier 1734) et la troisième partie (novembre 1735) de la Vie de Marianne, parallèlement aux pièces de théâtre, qui continuent leur train inépuisable, et aux onze feuilles du Cabinet du philosophe, presque entièrement rédigées avant l'automne 1734. On ne peut que se taire et s'étourdir devant une fécondité, mieux vaudrait dire une inventivité aussi prodigieuse, devant un tel bonheur de plume dans des genres aussi divers.

Première partie. Riche et retiré du monde, Jacob, le narrateur de ces "Mémoires" se garde bien de cacher son origine, affichée dans le titre, glosée dans un "petit préambule" et l'histoire de ses neveux "trop glorieux". Cadet du fermier d'un opulent propriétaire champenois, le jeune paysan, "beau garçon" de dix-huit à dix-neuf ans, décide de rester à Paris lors de sa première livraison de vin; il devient valet d'un enfant, neveu de son seigneur. Celui-ci entend le marier de force avec une suivante, Geneviève, grosse de ses oeuvres, mais sa mort délivre Jacob et sa ruine le jette à la rue. Il rencontre, sur le Pont-Neuf, une fraîche dévote de cinquante ans, Mlle Habert la cadette, qui l'embauche comme valet.

Deuxième partie. Son arrivée semant la zizanie, attisée par leur directeur de conscience, M. Doucin, entre les deux soeurs dévotes, Mlle Habert emménage avec Jacob dans un meublé tenu par Mme d'Alain et sa fille Agathe, auxquelles le jeune homme ne déplaît pas. Six jours après leur rencontre, Mlle Habert, appétissante rentière de plus de 4 000 livres, propose à Jacob, ébloui, de l'épouser.

Troisième partie. A l'instigation de Mlle Habert l'aînée, Jacob, devenu M. de La Vallée, doit s'expliquer devant un magistrat, M. le président. Il sort victorieux de l'épreuve, et ne manque pas d'y plaire à une fausse dévote quinquagénaire, Mme de Ferval. Son mariage, encore retardé par sa participation involontaire à un assassinat passionnel, a enfin lieu. Habillé, métamorphosé, il veut devenir financier.

Quatrième partie. Sur la recommandation de Mme de Fécour (Mme de), deuxième femme de condition séduite en deux jours, Jacob se rend à Versailles solliciter un emploi auprès de M. de Fécour. Mais touché par les plaintes de Mme d' Orville, qu'il y rencontre, il renonce à occuper la place de son époux malade.

Cinquième partie. Jacob ne peut jouir de ses deux liaisons: Mme de Ferval lui est volée, lors d'un rendez-vous galant, par un chevalier qui reconnaît Jacob sous La Vallée; Mme de Fécour se croit mourante. Mais la fortune lui revient par la rue. Volant au secours d'un homme attaqué par trois autres, il sauve le comte d'Orsan, neveu du Premier ministre, qui lui raconte son histoire et l'emmène à la Comédie.

La sixième partie devait faire le portrait de "la grande actrice [...] qui jouait Monime [...] et celui des acteurs et des actrices qui ont brillé de mon temps".

Il n'est pas bien difficile de rattacher le Paysan parvenu à l'oeuvre antérieure. La veine comique irrigue les premiers récits de jeunesse, et elle triomphe dans les comédies. On trouverait sans peine dans le roman des passages qu'on dirait sortis tout droit de la bouche d'Arlequin (par exemple dans la première et la troisième partie). Comment s'en étonner, dans un récit qui donne une telle place au diable, à ses oeuvres et à ses ruses? Jacob, Arlequin et le diable: le trio, qui n'entend pas finir sur une croix, mériterait un portrait. Car Jacob, comme Marianne, est une créature "dangereuse" (le mot revient dans les deux romans, dans ses divers sens).

Mais il est plus séduisant de confronter les deux romans de la maturité, tant ils transcendent les tentatives juvéniles, tant ils semblent faire couple dans leurs visées divergentes et complémentaires: lente gestation, sur plus de dix ans / jaillissement vigoureux et compact; voix féminine et aristocratique / voix masculine et populaire; tonalité sentimentale et héroïque / tonalité libertine et comique; rêveries du coeur / pulsions du désir; aspirations angéliques / transpirations du diable. Comme si un registre servait de délassement et de contrepoint à l'autre. Comme si ces deux voix chantaient ensemble la mélodie humaine, sa double postulation conjointe, et donc la gémellité romanesque, les deux sexes du roman, pour reprendre la belle formule de F. Deloffre.

Car ces deux récits nous proposent bien une théorie implicite du roman, ou plutôt des genres du roman, à la fois croisés et distincts, selon le choix qui oriente l'écriture. Théorie qui parfois affleure à visage presque découvert, sous les traits, par exemple, de Mme d'Alain, hôtesse bavarde et indiscrète, ou dans tel propos sur Mme de Fécour, qui "aimait tout le monde et n'avait d'amitié pour personne; vivait du même air avec tous, avec le riche comme avec le pauvre [...]. Lui disiez-vous: J'ai du chagrin ou de la joie [...] elle n'entrait dans votre situation qu'à cause du mot et non pas de la chose [...]. En un mot, c'étaient les termes et le ton avec lequel vous les prononciez qui la remuaient" (quatrième partie, où, est-ce vraiment un hasard, Marivaux s'explique sur les livres en général et la satire des siens, par Crébillon en particulier).

Tout est donc affaire de style: la Vie de Marianne et le Paysan parvenu ont en commun la forme pseudo-autobiographique; l'écart temporel et social entre le héros et le narrateur, qui autorise un regard amusé et complice sur soi-même, la mise au jour des roueries intimes, retardée mais révélatrice d'une qualité innée, la trajectoire qui permet à un individu apparemment démuni et isolé de trouver sa place, de s'éduquer et de se reconnaître à l'épreuve du jeu social, avant de se retirer de la mascarade pour mieux se retrouver et se dévoiler; l'inachèvement, une fois remémorées et approfondies les premières expériences fondatrices (étirées sur quelques mois dans le Paysan parvenu); l'optimisme, sans illusion, ambigu autant qu'on voudra, mais d'évidence dépourvu de toute noirceur tragique à la Prévost ou à la Crébillon, qui baigne ces deux romans de la conscience. Conscience apparemment point trop malheureuse, et même plutôt contente d'elle et du monde comme il va. Car même Dieu, assez bon romancier, ne peut exclure le diable des affaires d'ici-bas. C'est une question de morale, de rapport au monde, mais aussi d'esthétique: "Ce lecteur, explique Marivaux à Crébillon, aime pourtant les licences, mais non pas les licences extrêmes, excessives; celles-là ne sont supportables que dans la réalité, qui en adoucit l'effronterie; elles ne sont à leur place que là, parce que nous y sommes plus hommes qu'ailleurs; mais non pas dans un livre, où elles deviennent plates, sales et rebutantes" (quatrième partie).

Tout est dit dans la célèbre formule: "L'âme se raffine à mesure qu'elle se gâte".

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Voir ce qui est beau

J O K E R



Voir ce qui est beau

S’y laisser prendre

Voir ce qui est beau

Et puis attendre…

Voir ce qui est beau

Sans doute comprendre

Voir ce qui est beau

Voir ! Enfin prendre…


JOKER…


Aimer le vide

Et les trompe l’œil

Sentir le fluide

D’un clin d’œil

De ses cinq sens,

Saisir sa chance

Et, du septième,

Faire ce qu’on aime…


Jouer les fous

Jouer tout doux

Danser debout

Dans les égouts

Ne jamais croire

Qu’on perd son temps

Aux assommoirs

Des jours branlants


Au carrousel

Des sentiments

Sous les contrastes

Eblouissants

Les jours de faste(s)

Ou de tourment

Voir la vie belle

Décidément


Corriger le tir

Dans le cortège

En ligne de mire,

Son privilège

Faire fortune de son talent

Prendre la lune avec ses dent

Voir ce qui est beau

Voir, enfin prendre



Fabienne Coppens Sabam
7 07 95

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guitare manouche

je cumule ... je joue également de la guitare manouche. Ce samedi 20 mars à 18h30, au Centre Culturel, av de Scailmont 96 à 7170 Manage, j'animerai la clôture de "la journée de la culture", avec mon groupe les "Latcho Niglo" ...
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« Les fleurs du mal » se divisent en six parties: "Spleen et idéal", "Tableaux parisiens", "Le vin", "Fleurs du mal", Révolte", "La mort". Certains ont voulu voir, dans cette présentation, l'intention de donner au livre la rigoureuse construction d'un poème, d'illustrer l'histoire d'une âme dans les divers moments de son expérience intérieure. C'est ainsi que le spectacle décevant de la réalité et les expériences sans issue qui fournissent les thèmes dans les deux premières parties, auraient conduit le poète, après avoir en vain cherché, pour oublier son angoisse, une consolation dans les "paradis artificiels", dans l' ivresse, à une réflexion sur le mal, sur les attraits pervers et sur l'horrible désespoir qu'il engendre. C'est alors que le poète aurait lancé ce fameux cri de révolte contre l'ordre de la création, avant de trouver un refuge et un aboutissement dans la mort. Tout nous autorise à penser que, si ce dessein ne fut pas totalement étranger au poète, il va, ainsi exprimé, à l'encontre de l'idée même que Baudelaire se faisait de la poésie: si, selon lui, les préoccupations morales ne devaient pas en être absentes, en aucun cas elles ne pouvaient en commander l'ordonnance et la réalisation. Il s'agit plutôt d'une évocation, à proprement parler symbolique, de cette dualité fondamentale qui se partageait son âme et qui le poussait irrésistiblement tour à tour vers les sommets de l' extase et les abîmes du péché, -dualité dont il a parfaitement conscience que, s'il fut le premier à la ressentir avant tant d'acuité, il ne la partage pas moins avec tout homme, en cela son "semblable" et son "frère", ainsi qu'il le proclame hautement dans son arrogante apostrophe "Au lecteur" qui ouvre le livre.

C'est pour avoir préservé et cultivé cette dualité essentielle, pour l'avoir élevée à la hauteur d'une ascèse que Baudelaire fut revendiqué par les esprits les plus divers, les plus opposés, et que son oeuvre est allée en s'imposant, carrefour d'idées et de sentiments, point d'aboutissement et point de départ.

L'expérience poétique de Baudelaire s'inscrit tout entière entre les premiers vers du "Voyage" et le voeu qui l'achève: "Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe? -Au fond de l'inconnu, pour trouver du nouveau!" S'il fallait donner à tout prix un sens à l'aventure intérieure du poète, c'est sans nul doute, dans ce poème qu'il conviendrait de le chercher, Amour, gloire, bonheur, désir, tous les thèmes chers à Baudelaire s'y trouvent résumés, rassemblés, sans oublier "le spectacle ennuyeux de l'immortel péché", partout rencontré, "du haut jusques en bas de l'échelle fatale"; sans oublier non plus la mort, "vieux capitaine", éternelle compagne. Certes, l'idée que Baudelaire se fait du destin du poète reprend les termes traditionnels du romantisme: le poète est venu sur terre pour interpréter la réalité à la lumière de son rêve; il s'insurge contre les conventions, demeure, en dépit de tout un inadapté, trouble la conscience et le coeur de ceux à qui il offre ses sublimes mirages ("Bénédiction", "L'albatros", "Le guigon"); mais, tout en reprenant à son compte ces revendications, il leur en adjoint de nouvelles, qui font de lui le premier des poètes modernes. C'est ainsi qu'à la question: "Tout commence donc à Baudelaire?", on peut répondre avec Jean Cassou: "Tout, non! mais quelque chose"; en effet, "Baudelaire est devenu représentatif d'un certain nombre d'éléments qui manquaient au visage spirituel de la France et qui nous apparaissent devoir être désormais maintenus, affirmés et défendus, avec une vigueur combattive, sans cesse renouvelée".

C'est lui, Baudelaire, qui a formulé cette loi première à partir de laquelle s'organisera désormais consciemment toute poésie: la loi de l' analogie universelle, sur laquelle il s'est expliqué en maints endroits et notamment dans son fameux sonnet des "Correspondances". Si on les prive de cette perspective, des poèmes comme "La chevelure", "L'invitation au voyage", "La vie antérieure" et tant d'autres deviennent de simples allégories littéraires, certes fort belles ou émouvantes, mais dénuées de cette vérité absolue en dehors de laquelle la poésie demeure un jeu ou un exercice. Or, les poèmes de Baudelaire sont "vrais", essentiellement vrais. Un vers comme: "Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues", doit être éprouvé, ressenti comme un rapport absolu, inconditionnel, entre les "souvenirs dormant dans cette chevelure" et l'immensité du ciel, azur fait de ténèbres. Or, c'est bien de ce rapport absolu, et de lui seul, qu'est né ce vertige qui s'empare de nous; et ce vertige, quel est-il? Sinon la poésie elle-même, hors de laquelle ces cheveux ne sont plus qu'un objet quelconque de notre univers, émouvant sans doute, mais déchu.

On ne peut d'autre part oublier que Baudelaire fut un de ces artistes qui rêvèrent de "découvrir les lois obscures en vertu desquelles ils ont produit, et de tirer de cette étude une série des préceptes dont le but divin est l'infaillibilité de la production poétique".

Poète moderne, Baudelaire le fut par l'effort volontaire que déploya sa merveilleuse intelligence critique pour s'assurer des pratiques nécessaires à la naissance de la poésie: n'est-ce pas lui encore, qui nous dit: "L' inspiration vient toujours quand l'homme le veut, mais elle ne s'en va pas toujours quand il le veut. -De la langue et de l'écriture prises comme opération magiques, sorcellerie évocatoire".

Assumant et transposant dans son rêve toutes les expériences de la vie et toutes les apparences du monde, il n'est pas une de ses évocations qui n'ait un caractère irréductiblement original, allant bien au-delà du simple réalisme. "Dans certains états de l'âme presque surnaturels, la profondeur de la vie se révèle tout entière dans le spectacle, si ordinaire qu'il soit, qu'on a sous les yeux. Il en devient le symbole". Les poèmes abondent, qui révèlent, dans un symbolisme transparent, leur substrat intellectuel ou qui ne semblent être au contraire que grâce du langage, mystère et simplicité, et où chante seule la poésie: "Harmonie du soir" et, surtout, "Recueillement" peuvent être cités parmi les exemplse les plus parfaits de tout le recueil. "L'invitation au voyage" se résout, elle, en une musicalité pure qui transcende, en quelque sorte par anticipation, tous les développements possibles du poème dans un climat magique. Cependant le "Rêve parisien" atteint, avec l'aisance la plus naturelle, à certaines audaces dont Rimbaud ou les surréalistes se souviendront.

Poète de la grande ville, aimant le bitume et le bruit de Paris, il en a chanté les rencontres boulversantes ("A une passante": "O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!"), les déchets d'humanité qui la hantent: les ivrognes, les petites vieilles, les aveugles, les chiffoniers. Maître du paysage urbain, il a créé une seconde nature, où l'architecture remplace les arbres et la verdure, où les "petites vieilles" s'en retournent à la terre comme les feuilles d'automne. Pour orgueilleux et solitaire qu'ait été l'univers où il se situait d'emblée, dominant les hommes et les choses, le poète n'a point cessé d'être solidaire de cette triste humanité, dont il a revécu les douleurs, la souffrance, les erreurs, le péché et le mal. "Le poète jouit de cet incomparable privilège, qu'il peut être à la fois lui-même et autrui...et si de certaines places paraissent lui être fermées, c'est qu'à ses yeux elles ne valent pas la peine d'être visitées".

Ses chants d'amour, où il approfondit avec une fatale obstination les mouvements les plus secrets du coeur, depuis les rares instants de sérénité jusqu'aux troubles les moins avoués, refusent toute complaisance envers soi-même et rendent un son inimitable. Cela est vrai, soit qu'il reprenne dans "Le balcon" le thème classique de l'inexorable fuite du temps, soit qu'il rêve, avec une simplicité plus boulversante encore (dans le "Chant d'automne"), de fraternels abandons de l'âme; soit enfin qu'il élucide, avec un courage presque sacrilège et une complaisance tenace, les liens secrets de l'amour et de la haine, du désir et de la vengeance, de la volupté et du crime (voir les célèbres "Pièces condamnées", celles que lui inspira Jeanne Duval, la "Vénus noire" et cet original ex-voto "dans le goût espagnol": "A une madone"). Mais jusque dans les rêveries les plus enchanteresses sur la grâce féminine, on retrouve, insistant et douloureux, l'appel de la misère humaine ("A celle qui est trop gaie" et surtout "Réversibilité": "Ange plein de gaîté, connaissez-vous l' angoisse...?). Dans les plus suaves et mélancoliques images, demeurent présents le sens d'un commun destin, la douloureuse vision d'un paradis perdu que le poète saura évoquer dans des termes d'une simplicité antique et définitive ("Moesta et errabunda": "le vert paradis des amours enfantines").

On en arrive ainsi aux trois poèmes qui composent "Révolte" et aux pièces qui portent en propre le titre de "Fleurs du mal" (et notamment les "Pièces condamnées"). C'est dans ces morceaux, que s'affirment, bien plus important que tout satanisme, le sentiment de la fatalité du péché en même temps que celui du juste châtiment, inévitable et immanent à nous-mêmes. Cette conception fondamentalement baudelairienne, le poète l'exprime de la manière la plus concise, en recourant au mythe du Péché originel. "Désir, vieil arbre à qui le plaisir sert d'engrais, -Cependant que grossit et durcit ton écorce, -Tes branches veulent voir le soleil de plus près": ces vers, tirés du "Voyage", expriment assez bien la nécessité et, par là, la quasi-légitimité du mal: mais la fatalité du péché n'est pas autre chose, dans la vie morale, que la nécessité de la souffrance. Cette certitude se résout, dans les moments de la plus haute inspiration, en un sentiment de charité universelle, en une grande pitié pour soi et pour les autres. Baudelaire, cet esprit toujours en mouvement, qui ne renonça point au droit de se contredire et dont les attitudes variées ne peuvent être réduites à quelque doctrine traditionnelle, n'est jamais plus lui-même que dans les moments où il porte son jugement sur la vie humaine: en lui, un drame se déroule, qui dépasse toute complaisance personnelle, la douleur d'un homme, -la sienne, -devenant, sans le secours de la moindre métaphysique, la douleur de chacun.

Ce déchirement de tout un être trouve son expression la plus accomplie et la plus universelle, dans des pièces allant de la délicate et douloureuse fantaisie du "Cygne" jusqu'aux graves accents des deux confessions intitulées: "Je nai pas oublié, voisine de la ville" et "La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse", en passant par les poèmes sur "Les sept vieillards", "Les petites vieilles", "Les aveugles" (déjà cités), ainsi que "Crépuscule du matin", "Crépuscule du soir" et "La mort des pauvres".

Telle sont les raisons qui ont fait dire que Baudelaire prolongea le romantisme jusqu'à ses extrêmes conséquences, le purifiant et le perfectionnant à un tel point que, tout comme un classique, il en vint à identifier son drame avec l'éternelle tragédie de tous les hommes. Cette position ressort clairement de son style, qui ne veut renoncer à aucune des subtilités qu'il a entrevues, ni à ce renouveau de classicisme le plus authentique. Mais ce qu'il chercha avant tout, ce fut de briser les cadres de la rhétorique et du discours où s'enlisait la poésie traditionnelle, en la libérant du carcan des expressions usuelles. Un dessein aussi ambitieux, et aussi nouveau (Baudelaire est un de ces "horribles travailleurs" dont parle Rimbaud), ne pouvait se réaliser sans courir de nombreux dangers et sans quelque dispersion: incertitudes de style qui passent comme des ombres et masquent parfois certaines des ses miraculeuses illuminations, insistance un peu lassante sur certains thèmes. Son existence si malheureuse, sa terrible clairvoyance se cristallisèrent dans un atroce pessimisme, dans ce triste jugement qu'il portait sur la destinée humaine, à jamais symbolisée à ses yeux par le mythe du Péché originel: ainsi fut-il un analyste horrifié, mais fasciné du vice et de la perversion. C'est cet aspect particulier de son oeuvre qui fit tenir l'homme et sa poésie pour scandaleux, blasphématoires ou sataniques. Mais cette interprétation est manifestement incomplète, unilatérale: elle ne tient nul compte de cette autre moitié de ce monde idéal d'où la première reçoit sa lumière et sa signification. Certes, il y a la "Vénus noire", Jeanne Duval, "bizarre déité brune comme les nuits"; mais il y a aussi son "analogue" sa "correspondance" dans le divin, "la très-belle, la très-bonne, la très-chère": Mme Sabatier. Plus loin encore, les réunissant au-delà de leurs apparences, il y a cette "maîtresse des maîtresse": la Mémoire, -cette mémoire qui fit de Baudelaire un de nos plus grands poètes.

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« L'amour de la poésie » (1929) , d’Eluard : ce "livre sans fin" est dédié "à Gala", la compagne du poète.

Nous retrouvons dans les premiers poèmes du recueil l'inspiration amoureuse qui avait embrasé la fin de "Capitale de la douleur".

Maintenant, l' amour a exorcisé l'univers contre les puissances malfaisantes et rendu "la confiance dans la durée". Dès lors vivre est possible, tout est possible: "Mes rêves sont au monde/Clairs et perpétuels/Et quand tu n'es pas là/Je rêve que je dors je rêve que je rêve."

Apparaissent alors quelques-uns des plus beaux poèmes d' amour de la poésie française, tel "Je te l'ai dit: "Je te l'ai dit pour les nuages/Je te l'ai dit pour l'arbre de la mer/ (...) Je te l'ai dit pour tes pensées et tes paroles/Toute caresse toute confiance se survivent."

Cependant, cette vision d'un monde transparent et amical, suscité par l' amour, ne saurait, de même que l' amour, être immuable, assurés, possédée définitivement. Aussi le recueil contient-il à côté des clairs poèmes du bonheur nombre d'autres poèmes où le désespoir a retrouvé son ancienne puissance.

Mais, au fond même de l'amertume, le poète reste constamment passionné, conscient de l'urgence qu'il y a à exprimer les révoltes encore muettes: "Entendez-moi/Je parle pour les hommes qui se taisent/Les meilleurs."

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Les "Lettres à un jeune poète" (1929), qui peuvent être comptées parmi les plus belles oeuvres de Rilke, forment une sorte de "guide spirituel" d'une valeur inestimable. Répondant à son jeune correspondant, Rilke ne traitera dans ces lettres que de questions essentielles, celles-là même que connaît inévitablement tout poète et, plus généralement, tout être dont la vocation est de créer. Une affirmation centrale, sur laquelle Rilke ne cesse de revenir, confère à ces lettres une étrange gravité: à savoir que nous devons sous abandonner sans réserve à cette nécessaire solitude que nous découvrons en nous-mêmes, car c'est d'elle que jaillit toute clarté. En effet, il n'est d'autre certitude que cette réalité première, et rien de ce que nous entreprenons ne sera promu à un avenir durable, si nous ne l'avons tout d'abord éprouvé en ce lieu retiré de nous-mêmes que n'atteignent point les bruits du monde.

Etes-vous poète? Interrogez-vous sur les mobiles qui vous poussent à écire; déterminez avant toute autre chose s'ils sont d'une importance absolument vitale pour vous; "Etre artiste... c'est croire comme l'arbre qui ne presse pas sa sève, qui résiste, confiant aux grands vents du printemps, sans craindre que l' été puisse ne pas venir. L'été vient. Mais il ne vient que pour ceux qui savent attendre". On mesurera l'importance de ces phrases, si l'on se souvient qu'elles sont le fait du poète des "Elégies de Duino", ces élégies dont il désespéra de venir à bout et qu'"une étrange puissance" lui dicta soudain, en moins de quelques jours. Mais comment ne pas affirmer, parallèlement à cet ordre profond de la solitude, cette autre loi qui nous gouverne: celle de l' amour. Et c'est tout naturellement que Rilke passe du problème de l' art à celui de la sexualité. Comme Platon l'avait déjà fait dans le "Banquet", Rilke reconnaît une égale valeur à la fécondité de la chair et à celle de l'esprit; leur origine est la même; la volupté de la chair ne nous offre-t-elle pas une connaissance illimitée, totale, une prise de possession de l'univers tout entier. "En une seule pensée créatrice, revivent mille nuits d'amour oubliées qui font la grandeur et le sublime". L' amour est connaissance et si, pour l'homme, engendrer est une manière d'enfanter, n'est-ce pas enfanter que de "créer de sa plus intime plénitude"? Estimant que les sexes sont plus parents l'un de l'autre qu'on ne le pense généralement, Rilke développe ici cette idée, qui sera appelée à tenir tant de place, par la suite, dans son oeuvre, et qui constitue à penser que le renouvellement du monde sera le fait d'une attitude nouvelle de l'homme en face de la femme: pour lui, l'un et l'autre, oubliant leurs erreurs, ne se rechercheront plus pour s'opposer, mais uniront leurs solitudes, conservant ce respect mutuel, cette distance nécesaire à un développement parallèle de tout leur être. Dans les dernières lettres, Rilke revient avec une insistance accrue, sur cette notion de solitude que le poète, plus que tout autre, se doit de préserver intacte (lettre VIII notamment). Certes, la solitude n'est pas sans faire lever en nous un cortège de tristesse, mais pourquoi s'effrayer? Nos regards porteraient-ils au-delà des limites de la connaissance, peut-être alors percevrions-nous que ces tristesses sont comme des "aubes nouvelles" "où l'inconnu nous visite". Et le poète, parvenu au seuil de ce monde mystérieux, d'abandonner son correspondant à lui-même. Il apparaît donc que se dessinent tout au long de ces "Lettres", comme en filigrane, la plupart des thèmes qui formeront les "Elégies de Duino" ou les "Sonnets à Orphée"; à ce titre, les "Lettres à un jeune poète" sont peut-être la meilleure introduction à l'oeuvre poétique de Rilke.

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AILLEURS JE 18.03 // 12:30 > 13:30 - Palais des Beaux-Arts
avec Stéphane Lambert

Les couleurs de la nuit, La Différence

Tuyêt-Nga Nguyen

Soleil fâné, Le Grand miroir
Lectures Anne-Sophie Wilkin

Entrée libre


Ailleurs, ce pourrait être une certaine définition de la littérature, une certaine manière de quitter ce décor pour en évoquer d’autres. Stéphane Lambert nous emmène à Prague, sur les traces de Nathaniel Bodler pris dans l’écriture d’un livre sur un peintre italien du XIVème siècle qui le mènera jusqu’à ses propres gouffres. Tuyêt-Nga Nguyen, lauréate du Prix des lycéens pour son précédent livre Le journaliste français, nous revient avec un nouveau roman qui toujours plonge ses racines dans ce Vietnam qu’elle a vu se détruire sous ses yeux.

JAMES ENSOR

JE 22 .04 // 12:30 > 13:30 - Palais des Beaux-Arts
avec Colette Lambrichs

James Ensor, Dame peinture toujours jeune, La Différence

Hugo Martin

James Ensor, Mes écrits, Espace Nord, Luc Pire

Entrée libre


« Les suffisances matamoresques appellent la finale crevaison grenouillère. » Si on connait bien le peintre ostendais qui fit du masque grotesque une manière d’emblème, plonger dans sa prose inspire un plaisir au moins aussi grand. Discours de circonstance pour la plupart, les écrits de James Ensor sont jubilatoires à plus d’un titre : ils ne s’attachent ni à la bienséance ni à la rigidité d’une langue française que leur auteur prend un évident plaisir à faire éclater à coups de néologismes hilarants. Pour évoquer cette figure secrète des lettres belges, Colette Lambrichs, éditrice d’un récent choix de textes, et Hugo Martin, anthologiste et critique du recueil paru dans la collection Espace Nord.

LE MOT DE L'IMAGE

JE 27.05 // 20:00 > 22:00 - Palais des Beaux-Arts
avec Luc Delisse

L'atelier du scénariste, Impressions Nouvelles

Olivier Smolders

Voyage autour de ma chambre : notes pour un film immobile

Impressions Nouvelles

Dick Tomasovic

Kino-Tanz, l'art chorégraphique du cinéma, PUF
Entrée libre

Si le cinéma est avant tout une affaire d’images en mouvement, il se nourrit également de mots, en amont de ses productions par le travail du scénariste qui informe l’image comme l’illustre Luc Dellisse, mais également en aval par les réflexions qu’il inspire et qui sont autant de prolongations des films achevés, lueurs parfois fragmentaires surgissant en même temps que les lumières de la salle qui nous rendent au réel, comme chez Dick Tomasovic et Olivier Smolders. Une soirée faite d’images et de mots entrecroisés.


(communiqué Bozar)

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