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administrateur théâtres

12273071091?profile=originalIrvin Yalom (°1931), professeur américain émérite de psychanalyse, a écrit une œuvre importante sur la psychothérapie existentialiste, et voici un de ses romans  de fiction historique qui évoque les débuts de la thérapie psychanalytique.  Les  personnages historiques (1880) sont réels : le médecin viennois Josef Breuer,  précurseur de la psychanalyse et ses déboires conjugaux avec son épouse Mathilde,  le philosophe Friedrich Nietzsche et ses  douloureuses souffrances  sentimentales et le jeune Sigmund Freud et ses théories novatrices.

 Michel Wright, le metteur en scène belge, a fait de la  rencontre imaginaire entre Breuer et Nietzsche une adaptation théâtrale  percutante. Ce spectacle fort possède une intrigue saisissante, très bien construite et extrêmement vivante.  L’écriture très enlevée et  particulièrement alerte pour le sujet,  fourmille de réflexions intéressantes empruntées au "Gai Savoir"  dont la principale est peut-être que  nous sommes  souvent  incapables de voir dans l'autre, même dans  ceux dont nous nous soucions profondément.

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A travers le chantier de  dialogues spirituels et passionnés,  on recueille un bon nombre de perles Nietzschéennes qui ne peuvent que susciter au moment du spectacle et dans les jours qui suivent, des interrogations persistantes.  La phrase la plus interpelante est sans doute « Deviens qui tu es ! »  Quant à la création artistique, elle ne peut, on en a la preuve sur scène, qu’exister dans un espace de liberté. 

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Voici donc, tous affects dehors, un cocktail d'intelligence et de profondeur, joué avec une sincérité et une justesse effarantes. Art des nuances et de la tension dramatique poussé dans les sommets, une mise en scène éblouissante et un quatuor de comédiens sublimes! Comment font-ils pour retomber dans la vraie vie après une telle performance? La belle voix chaude et raffinée de Jean-Claude Frison et sa maîtrise théâtrale irréprochable, la présence sauvage d’Yves Classens au top du gymkana intellectuel, la présence élégante, féminine et passionnée à la fois de Rosalia Cuevas et l’étincelante complicité …admirative des plus grands, du jeune comédien Benjamin Thomas contribuent à faire de cette soirée, un brasier théâtral de toute grande envergure. 

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Progressivement et de plus en plus intensément, on se laisse  happer  par les exercices de psychothérapie en live, source de multiples rebondissements. On n’a plus qu’à se laisser porter et savourer le texte qui n’en finit pas de toucher juste, au cœur de l’humain. On rit beaucoup et souvent, alors que des plages d’émotion et d’intimité dévoilées se dessinent de façon de plus en plus dramatique. Vers la fin, on est cloué par un moment de tension impressionnant. À tout le moins, vous vous trouverez à réfléchir à  de nombreuses questions philosophiques pendant que vous observez le déroulement de duels verbaux et d'expériences fascinantes d’introspection, de projection et d’aide thérapeutique où on se demande un moment qui soigne l’autre et pour quel profit. Avec à la clé, la conclusion Nietzschéenne que la véritable amitié se trouve dans  la recherche commune  de vérités supérieures.  Et que le théâtre est un  lieu révélateur de vérité. 

http://www.comedievolter.be/saison-2014-2015/les-larmes-de-nietzsche/

Du 25 février au 8 mars
du Mardi au Samedi à 20h15, le Dimanche à 16h
Comédie Claude Volter  98 avenue des frères Legrain
1150 Woluwé St Pierre
 02/762 09 63

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Ce jour où février s'achève

 

 Songerie

 

Ce jour où février s'achève

 N'est pas ordinaire du tout

J'accueille comme dans un rêve

 Des souvenirs qui me sont doux

 

 Ma grande soeur va s'ajouter

Un an, c'est son anniversaire.

Elle mérite de goûter

Une grâce non éphémère.

 

Je sais qu'elle vieillit comblée,

Certes non pas par pure chance.

Elle est devenue adulée,

Par tendresse et reconnaissance.

 

À ses enfants qui la chérissent

 Elle a donné beaucoup d'amour,

 Bien des joies qui les attendrissent

 Ils la remercient en ce jour.

 

La neige éblouit au soleil.

Le ciel d'un bleu clair est tendresse.

Un courant d'ailleurs me caresse

Me tient en un joyeux éveil.

 28 février 2015

 

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" La dernière utopie. Naissance de l'Europe démocratique" est un livre de Dominique Wolton paru en 1993 (Flammarion)

 

Si l' Europe est qualifiée de dernière utopie, c'est qu'il est difficile de faire adhérer les masses (340 millions d' Européens) au rêve de quelques intellectuels, et aux projets de quelques technocrates. Il est difficile, autrement dit, de passer d'une Europe technocratique à une Europe démocratique. Les réticences ou refus de certains pays, au traité de Maastricht, l'ont bien montré. Comment surmonter cette difficulté?

Le livre pense celle-ci suivant trois axes.

Sur le plan politique, il montre la pluralité des projets: Europe fédérale, confédérale, modèle communautaire, Europe des nations, Europe par les nations, Europe des régions. Y a-t-il une identité nationale européenne?

Sur le plan culturel, il n'est pas facile de définir "une" identité européenne.

Sur le plan de la communication, l'espace public (intermédiaire entre la société civile et l' Etat) reste national.

 

La dernière aventure?

 

Qualifier l' Europe de "dernière utopie", c'est dire qu'au temps du déclin des religions -voire, selon Gauchet, de leur fin-, du naufrage des eschatologies politiques, de l'affaiblissement des idéologies, de notre entrée collective dans "les basses eaux mythologiques" (Edgar Morin", elle est peut-être le seul projet politique susceptible de faire rêver les hommes. "La seule aventure politique d'envergure en cette fin de siècle", estime Dominique Wolton.

La question est alors la suivante: s'il fut possible à quelques intellectuels d'imaginer das "Eine Europa" (Nietzsche, 1885), l' Europe une, ou l' Université européenne (comme déjà dans son "Tractatus" de 1664, le roi de Bohème Jiri Podiebrad), et d'en réactiver le mirage de siècle en siècle (de Leibnitz à Rousseau, Romain Rolland, Stefan Zweig, Husserl, Raymond Aron, pour ne citer que certains noms illustres, il n'est pas facile d'y faire adhérer les peuples européens pour lesquels l' Europe n'est qu'entité abstraite. Utopie, si l'on veut, mais au sens négatif et péjoratif du terme: chimère, illusion, rêverie vague.

Ou, au contraire, réalité simplement économique, grand marché d' échanges, construit par 50000 fonctionnaires et hommes politiques, par-dessus la tête et les aspirations de 340 millions d'habitants.

Un grand marché prometteur certes, mais aussi inquiétant, en particulier pour certaines catégories menacées (paysans, pêcheurs). Un ensemble auquel l'effondrement du communisme soviétique, symbolisé par la destruction du Mur de Berlin, semble enlever tout caractère d'urgence et vider d'une partie sa signification politique (union des démocraties attachées aux Droits de l'homme face aux totalitarismes).

 

De l' Europe pensée à l' Europe vécue

 

La question posée par Dominique Wolton, est alors la suivante: comment passer de l' Europe économique -voire technocratique- à l' Europe démocratique? Comment faire pour que les 340 millions d'habitants n'acquièrent pas la citoyenneté européenne, parce que des textes négociés entre spécialistes le décrètent, mais se sentent effectivement citoyens de l'Europe? Ou encore: comment réussir le pari démocratique de l'Europe? Comment la démocratie, qui a toujours existé au sein d' Etats-nations, peut-elle naître au plan européen, dans un cadre beaucoup plus large, et surtout dans un contexte restant abstrait parce que ne résultant pas d'un vécu commun effectif?

Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, directeur du laboratoire "Communication et politique" et de la revue "Hermès", s'est fait connaître par son "Eloge du grand public" (1990), qui prolongeait un livre plus ancien sur les médias, rédigé avec J.-L. Missika ("La folle du logis, la télévision dans les sociétés européennes", Galimard, 1983.

Ces deux ouvrages peuvent sembler éloignés de l'interrogation actuelle sur l' Europe. Mais, déjà, se posait un problème et étaient définis des concepts dont se servira la troisième partie de "La dernière Utopie". En effet, la question centrale (le passage d'une Europe économico-technocratique à une Europe démocratique) est divisée en quatre questions plus simples: celle des institutions, des idéologies, de la culture, de la communication (à quelles conditions -sur ces plans successivement envisagés- le passage souhaité est-il favorisé, ou, au contraire, entravé?)

 

Les institutions politiques

Maastricht

 

Le traité de Maastricht, signé le 7 février 1992, est une tentative pour remédier au "déficit démocratique" antérieur, pour engager l' Europe sur les voies de la démocratie. L' Acte unique, signé en 1985, prévoyait la réalisation du marché intérieur pour la fin 1992. Maastricht compensait ses visées trop strictement économiques. Ne faisait-on pas, d'ailleurs appel à l'adhésion populaire par le recours au suffrage universel? L' Europe devenait l'affaire de chacun.

Le contenu du même traité atteste cette visée politique, même si les clauses monétaires sont importantes (monnaie unique, politique monétaire commune): instauration d'une citoyenneté unique permettant la liberté de circulation, le vote et l' éligibilité dans le pays de résidence, le droit de pétition devant le Parlement européen; diminution des pouvoirs de la Commission de Bruxelles: le Conseil européen (les chefs d'Etat et de gouvernement) définit les orientations générales, et la Commission, organe permanent désigné par les gouvernements et confirmé par le Parlement, est chargée d'appliquer les décisions du Conseil; de plus, en vertu du "principe de subsidiarité", la Commission ne peut se saisir de ce qui peut être fait au niveau des Etats membres.

Or, l'accueil reçu par le Traité (le non danois, le presque non français, le oui mais britannique, etc.) servit de révélateur à ce qui constitue la thèse centrale du livre de Wolton: les opinions publiques sont restées chacune dans leur Etat-nation, le projet n'a aucune assise sociale et/ou populaire, parce que les citoyens n'ont aucune expérience (autre que touristique) de l' Europe.

Le fameux "déficit démocratique" tient à cette absence d'expérience effective (et affective).

On ne le comblera pas simplement en inventant d'autres institutions, ou en ouvrant des débats inédits. "L' Europe, c'est quoi? Quelque chose de lointain, d'abstrait et souvent de menaçant...".

Ce qui fait que:

"sans cadre concret de perception, la plus grande partie des citoyens appréhendent l' Europe au travers de ce qui peut constituer leur identité: la nation".

Ainsi s'explique le quiproquo du débat: conçu pour desserrer l'étau technocratique, le Traité fut au contraire perçu comme un renforcement de celui-ci. D'autant que si la volonté démocratique était claire, le projet politique restait flou, indéterminé, comme si l'on remettait toujours à plus tard le souci de le préciser (ce n'est pas encore le moment, ce n'est pas de cela qu'il s'agit, on verra bien).

Plusieurs modèles d'organisation s'affrontent en fait, mais à fleurets mouchetés:

-le modèle confédéral;

-le modèle fédéral;

-La Communauté;

-L' Europe des nations;

-L' Europe par les nations;

-L' Europe des régions.

 

Le modèle confédéral

 

Pour les juristes, une confédération est une association d' Etats indépendants qui ont, par traité, délégué certaines de leurs compétences (diplomatie, défense...) à des organes communs sans constituer cependant un nouvel Etat superposé aux Etats membres" (Serge Guinchard et Gabriel Montagnier, "Lexique des termes juridiques").

Les Etats s'associent mais conservent leur souveraineté. La confédération est, au fond, une alliance confortée. Les règles juridiques ne valent pas pour l'ordre interne des Etats.

François Mitterrand a évoqué l'idée d'une Confédération européenne. Pensait-il à une solution d'avenir, ou à un mode provisoire d'organisation permettant d'accueillir les pays d' Europe de l' Est? La Communauté européenne semble "un entre-deux indéfinissable", entre la confédération et la fédération.

 

Le modèle fédéral

 

Le "Robert" propose cette définition: "Se dit d'un Etat dans lequel les diverses compétences constitutionnelles sont partagées entre un gouvernement central et les collectivités locales qui forment cet Etat".

Trois principes valent, selon J. Gicquel: superposition du super-Etat aux Etats, autonomie des Etats associés dans certains domaines, participation par collaboration du Tout et des parties (cf. J. Gicquel, "Droit constitutionnel et Institutions politiques", Montchrétien, 1991). Système à géométrie variable, la fédération a son centre de gravité en celles-ci ou celui-là. Jean Monnet (1888-1979) en rêvait, comme, peut-être, tous les vrais européens.

 

La communauté

 

Certains se battent pour cette forme floue, cet ensemble "indécidable", peut-être parce qu'il reste ouvert à tous les avenirs possibles, et légitime les politiques les plus diverses: "C'est la Communauté des nations de la Grande Europe" (Alain Lamassoure, discours à l'Asemblée nationale, le 6 mai 1992).

Pour les fonctionnaires européens, la "méthode communautaire" est déjà à l'oeuvre. Son indétermination permet une Europe à plusieurs vitesses (la Grande-Bretagne, par exemple, est exempte de l' union monétaire).

 

L' Europe des nations

 

Défendue en France, par J.-P. Chevènement et Philippe Seguin: déléguer le moins possible à la Commission, refuser tout abandon de souveraineté dans les domaines essentiels (défense, monnaie, justice).

 

L' Europe par les nations

 

L' Europe est souvent un anti-européanisme qui ne s'avoue pas comme tel. L' Europe par les nations est une position différente défendue par Paul Thibaud dans un livre où il débat avec Jean-Marc Ferry ("Discussion sur l' Europe", Calmann-Lévy, 1992).

Paul Thibaud croit à une possibilité d'européanisation des nations, progressive, "appuyée sur la légitimité maintenue des nations" (op. cit. p. 88), seules susceptibles de fournir aux citoyens leur identité, mais "rendant possibles diverses modalités de participation à l'Europe" (ibid. p. 891).

 

L' Europe des régions

 

Il s'agit de:

"contrebalancer le pouvoir accru donné aux instances du haut (l'Europe) par une autonomie accrue des instances du bas (les régions), suite à la disparition progressive de l'instance du milieu (l' Etat-nation)".

Celui-ci est trop petit pour les grands problèmes, trop grand pour les petits problèmes. Le déficit démocratique de l' Europe serait comblé par le surplus démocratique de la région. La difficulté de l' Europe des régions vient de ce que toutes les nations ne sont pas également décentralisées, qu'il est "impossible de définir à l'échelle européenne ce que serait une région tant les expériences sont différentes".

 

L'identité culturelle

 

Une Europe?

 

Au flou des projets politiques, que les campagnes électorales ne contribuent pas toujours à éclaircir, s'ajoute la difficulté de définir une culture européenne. De nombreux "intellectuels" ont cru à l' Europe une, "das Eines Europa" (Nietzsche, 1885):

"Le chemin des philosophes conduit donc à l' Europe. Leibniz, Rousseau et Voltaire, Bentham auteur du "plan de pacification permanente pour toute l' Europe" en 1789, et Saint-Simon, le père du Parlement européen, Novalis et Nietzsche, Husserl, Ortega y Gasset et Benedetto Croce face aux fascismes" (Jacques Delors: préface à Jean-Pierre Faye, "L' Europe une, Les philosophes et l' Europe", Gallimard, 1992).

Mais, cette "route des philosophes", si d'illustres écrivains et penseurs s'y retrouvent, les peuples ne l'empruntent pas, ou ne la fréquentent qu'en touristes. La foi en l' identité culturelle européenne n'appartient pas à la culture de masse. Sur ce plan, le déficit démocratique n'est pas éloigné de la faillite ou du dépôt de bilan.

Où trouver, d'ailleurs, l'identité? A l'époque médiévale, l' Europe était la Chrétienté, et le pape Jean-Paul II voit encore dans les valeurs chrétiennes et humaines ce qui peut constituer son ciment.

Si l' identité est d'abord morale, certains en placent plutôt la source dans la croyance aux droits de l'homme et la valeur de la démocratie. Même l'unité géographique fait problème: où finit, où commence cette petite péninsule de l'Asie?

La communauté de destin que certains invoquent est, d'abord, celle de guerres incessantes entre nations rivales. L' Europe réalise-t-elle vraiment la synthèse, rêvée par Paul Valéry, de ses trois origines (la philosophie et les mathématiques grecques, le droit romain, le christianisme)?

Ne devons-nous pas plutôt, reconnaître, comme Edgar Morin, que cette difficulté de penser l' Europe, c'est d'abord "la difficulté de penser l'un dans le multiple, le multiple dans l'un", ou "l'identité dans la non-identité", autrement dit la complexité? (E. Morin, "Penser l' Europe", Gallimard, 1987).

Pour l'historien hongrois Jeno Szucs, il vaut mieux renoncer à l'idée d'une Europe unique, car il y a, en fait, trois Europes: L' Occident, l' Europe de l' Est, et, coincée entre ces deux espaces, l' Europe du Centre-Est, comprenant notamment la Hongrie, la Pologne et la Bohême. (Jeno Szucs, "Les trois Europes", 1985).

A moins de ne trouver l'unité que dans la différence avec l'autre: l' Occident est l'autre de l' Orient, la chrétienté fut l'autre du monde musulman, la chrétienté latine fut l'autre de la chrétienté byzantine (avant de se diviser elle-même en catholicisme et protestantisme).

Mais, alors, le risque est de considérer qu'il y a des degrés dans l' "européanité":

"On est plus ou moins européen. Ainsi, si le monde protestant me semble tout aussi européen que le monde catholique, l'appartenance à l'Europe du monde oriental, de tradition grecque et orthodoxe, me semble moins nette..." (Bretten, "Identité européenne, une et multiple", in Lenoble J., Dewandre N., l'Europe au soir du siècle". Esprit-le Seuil, 1992.)

Comment la foi européenne serait-elle partagée par l'ensemble des citoyens? Comment ceux-ci y trouveraient-ils leur identité, une identité qui se révèle, comme on vient de le voir, si difficile à définir?

Les pères de l' Europe sont tombés à ce propos dans "l'illusion moderniste": tout ce qui est moderne étant synonyme de progrès et de changement, il suffirait de construire des structures économiques européennes, celles-ci favoriseraient la croissance, provoqueraient alors des transformations sociales, entraîneraient une réorganisation des institutions politiques, favoriseraient finalement une prise de conscience européenne, voire une "religion" de l' Europe facteur de Progrès.

Or les masses n'ont pas suivi, attachées à leur identité nationale, la nation seule nourrissant l' eurocratie comme hostile ou du moins étrangère à la Nation. Ce dont profitait l' extrême-droite qui s'auto-proclamait propriétaire des valeurs traditionnelles prétendument délaissées.

Wolton propose de mette fin à cette dérive, ce cesser d'opposer identité européenne et identité nationale:

"Plus d'espace politique européen s'élargit en nombre de pays, plus il est nécessaire de valoriser les identités de départ. Toujours selon le principe élémentaire selon lequel il ne peut y avoir de nouvelles identités sans intégration des précédentes".

Mais comment réaliser ce nécessaire dépassement, sans en faire comprendre la nécessité? Sans le communiquer, autrement dit, afin que se réalise une Europe enfin démocratique, avec l'accord de tous?

 

La communication

 

La communication est d'autant plus éloignée du véritable dialogue démocratique qu'elle se fait dans un contexte social qui ne favorise pas, c'est le moins qu'on puisse dire, un tel dialogue: celui de la "démocratie de masse", ou de la "société individualiste de masse", de la "foule solitaire", pour employer l'expression de David Riesman. Celui-ci met au jour une contradiction centrale: promotion de l'individu d'un côté, triomphe du nombre et de la massification (et donc de l'anéantissement des individualités) de l'autre.

"Pour le dire d'un mot, le citoyen d'aujourd'hui est un géant en matière d'information et de consommation, et un nain en matière d'action. Il peut tout savoir et tout consommer, mais il ne peut agir sur la réalité, trop compliquée, trop organisée. Il est trop éloigné des lieux de décision".

Or l' Europe ne résout pas les contradictions de la "démocratie de masse". Elle les aggrave au contraire, puisqu'elle est distance croissante entre l' individu et les centres du pouvoir, bureaucratisation et réglementation à la fois plus importantes et plus difficiles à bien comprendre, élargissement de l'ensemble collectif au détriment de cet ensemble.

Ces difficultés ou contradictions aident à comprendre les problèmes de la communication, dont elles constituent le contexte social.

 

Les limites de la télévision

 

Poursuivant des analyses qu'il avait commencé d'entreprendre dans son "Eloge du grand public" (Flammarion, 1980), Dominique Wolton explique qu' "information et communication ne sont pas forcément des alliées de l' Europe démocratique à construire", le moyen de renforcer l'adhésion. Beaucoup y ont cru: la communication fait reculer les préjugés.

Si elle aida la démocratie dans les différents Etats-Nations, elle devrait pouvoir rendre le même service au niveau de l' Europe. Et, s'appuyant sur ce raisonnement, on souhaite que le médium le plus largement utilisé (la télévision) vienne en aide à la démocratie européenne défaillante.

Un tel espoir rencontre de nombreuses objections. D'abord, si la télévision standardise, homogénéise, "massifie" les individus au niveau national, elle devrait jouer un rôle similaire -et peu souhaitable-, dans le cadre européen plus vaste.

Ensuite, si la télévision peut favoriser la technocratie, l'économie, elle n'est pas apte à entraîner l'adhésion de tous. Au contraire, au lieu d'accélérer le consentement, elle peut provoquer un sentiment de rejet, une réaction à la menace constituée par un surcroît de communication. Il ne suffit pas de posséder les outils de communication pour espérer entraîner l'adhésion: ils peuvent être en avance sur les attentes de celui qui reçoit la communication, et, ainsi, tourner à vide.

Le débat sur Maastricht a apporté sur ce plan plusieurs leçons:

1. Les récepteurs n'avaient pas l'expérience de bien recevoir l' information. "Plus il y avait de communication, moins celle-ci avait d'impact". Le rôle des récepteurs est capital: ou bien ils ne peuvent pas recevoir le message (le cadre d'interprétation manque), ou bien ils ne veulent pas, par choix idéologique.

2. Il est faux de croire que les médias ont une influence incontournable sur l' opinion publique: "sinon cette influence aurait joué ici en faveur de Maastricht", puisque de printemps 1992 à fin juin 1992, les médias épousaient la thèse du oui.

De ce point de vue, ce serait une erreur de croire qu'il suffirait d'une chaîne européenne pour accélérer l'unification européenne.

3. Pour que le débat sur l' Europe soit lui-même immédiatement européen, il faudrait un espace public qui ne soit pas lui-même national. Or il n'y a pas actuellement d'espace public européen: l' identité et la communication restent nationales.

L'espace public s'est constitué, selon Jürgen Habermas, au XVIIIe siècle, comme une sphère intermédiaire entre la société civile et l' Etat. Il peut être défini comme le lieu, accessible à tous les citoyens, où ceux-ci peuvent se concerter, se confronter. Dans les petites cités grecques, il était localisé dans l'espace collectif: l' "agora". Dans les immenses nations modernes, la sphère des débats collectifs ne se tient plus en un endroit déterminé.

 

L' Europe des coeurs

 

Le livre de Dominique Wolton recense donc les difficultés de passer d'une Europe encore technocratique à une Europe vraiment démocratique, voulue par tous, et non quelques-uns: une poignée d'illustres penseurs, et quelques milliers de technocrates. Les difficultés sont politiques (le flou des projets institutionnels), culturelles (les ambiguïtés de l' identité européenne, et de sa prise de conscience), "communicationnelles" (les limites et cloisonnements nationaux des espaces publics).

Si certains n'y voient qu'un marché enfin à la mesure de l'immense marché mondial, voire un simple rafistolage du capitalisme, d'autres lui reprochent d'aller trop loin, de sous-estimer l'importance des Etats-Nations, d'autres au contraire de ne pas aller assez loin, de n'être qu'un nationalisme élargi, étranger à la conscience planétaire de la "Terre-patrie".

Double reproche contradictoire qui rend compte de deux mouvements inverses mais complémentaires: l'un "qui nous fait dépasser la nation, l'autre qui nous réduit à la province" (Edgar Morin, op. cit., p. 199). La province d'une communauté humaine universelle, assumant son destin planétaire.

De même qu'il n'y a pas de conflit entre l' identité nationale d'un Européen et son identité européenne, il ne saurait y en avoir entre celle-ci et son identité humaine, puisque l'Europe est le laboratoire où elle se forme:

"L' identité européenne et l' identité planétaire sont l'une et l'autre sous-développées, mais elles ne sont nullement contraires l'une à l'autre, elles se lient justement dans la conscience qui lie l'idée de Méta-Nation et celle de Province Europe" (Edgar Morin, ibid., p. 200).

Encore faut-il, pour que l'Europe soit vraiment démocratique, que cette conscience soit celle de la majorité des 340 millions de citoyens.

 

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Histoire ....

Histoire de passer le temps, même si cela est une histoire sans importance , je vais vous raconter une histoire sans en faire toute une histoire.

C'est l'histoire d'une femme qui n'est pas une histoire sainte , ni une histoire fabriquée de toutes pièces...

A 20 ans de son histoire, elle croyait mener une vie sans histoire , elle ignorait qu'elle allait s'attirer des histoires...

Elle connut une histoire courte qui fut une histoire compliquée , la morale de cette histoire fut qu'elle prit conscience qu'elle avait enjolivé l'histoire qui n'était pourtant pas une histoire à dormir debout .

Si elle eut des histoires à pleurer, elle eut aussi des histoires drôles, des histoires amusantes, des histoires de dingues, des histoires étranges ...mais jamais elle n'eut de sales histoires.

Et aussi de belles histoires d'amour , des histoires qui se répètent ...

Aujourd'hui, elle attend une nouvelle histoire ,peut -être le plus beau de l'histoire , mais cela l'histoire ne le dit pas encore puisque c'est une autre histoire ...

Liliane.

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Les victimes sans assistance

Méditation

 

Je me sens lointaine, isolée.

Je sais ce qui trouble mon âme,

Le sort de milliers d'immolés

Et des agissements infâmes.

 

Les pandémies sont redoutables.

La médecine en vient à bout.

L'actuelle est incomparable,

Différente du tout au tout.

 

À l'abri du présent carnage,

Dont je recueille les échos,

Je crois entendre d'un autre âge,

 Mais distinctement quelques mots.

 

Victimes d'un crime odieux,

Mourant, des croyants étonnés

Ont sans doute dit à leur Dieu:

Pourquoi m'as-tu abandonné?

 

27 février 2015

 

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Le prince du temps.

 

Une fleur joyeuse chante au gai printemps,

Sa  joie de revivre  dans l’eau pure et rose,

Sous un soleil rieur caché bien trop longtemps.

 

Au chaud dans les caisses  des  orangeries,

Les navels* dansent  leurs futurs  carnavals,

En s’éclatant d’avance de bruits et singeries.

 

Carrousel de rocailles, les bergénias roses,

Colorent  la terre  pour la joie des savetiers,

Qui  tannent  le cuir  sans mesure  ni prose.

 

Les sourires brillent sur le toit des maisons,

Les  réjouissances  de  carême-prenant,

Ont balayés enfin les tourments de l’horizon.

 

Jouvence des amours le prince du temps vient,

Adoucir  le  réveil  des  marmottes  frileuses,

Par son show arc-en-ciel de l’univers  disneyen.

 

 

Claudine QUERTINMONT D’ANDERLUES.

 

 

 

 

 

*Navel : variété d'orange à fruit secondaire interne

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FINALEMENT!

Tu t'étais lové dans le moule

Que la vie t'avait suggéré.

Ainsi, à l'aise dans la foule

Tu t'y étais laissé porter!

Pas à pas et non sans courage

Tu t'efforçais à progresser

Au fond de toi était la rage

De tes désirs trop ignorés!

Alors un beau jour de septembre

Que Dame Nature avait doré

Quand dans tes yeux brillait de l'ambre

Tu as décidé d'innover!

Finis sagesse et sacrifices

Bonjour à toi jolie folie!

Peu importe les édifices

Ne compte plus que les envies!

Et ce destin est bien étrange

Qui, après coup, te rend unique.

A quoi donc sert-il d'être un ange?

Aux certitudes tu fais la nique!

Au creux de tes mains, je vois des lignes

Parcours étrange, enchevêtré...

J'y lis qu'aujourd'hui tu es digne

D'être tout simplement aimé!

J.G.

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Je me suis offert un bouquet

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Empotées, de pourpres rosettes

Émergent de feuilles vernies;

Cinq fleurs, deux boutons réunis,

En immobilité parfaite.

 

Ce délicat tableau vivant,

Est d'une grâce savoureuse.

Il m'émeut et me rend songeuse;

Je pense à des bouquets d'antan.

 

Le tout premier, incomparable,

Vingt roses rouges d'Épernay,

Que j'avais reçues fascinée.

Il est resté inoubliable.

 

Puis bien plus tard, au cours des ans,

Messagers d'amour, de tendresse,

Arrivèrent à mon adresse,

D'énormes bouquets émouvants.

 

Les années font, en s'écoulant,

Se transformer notre existence.

Les désirs n'ont plus d'importance,

Suite à des drames désolants.

 

Or, on peut éprouver l'envie,

Quand ont disparu ceux qu'on aime,

De se faire plaisir, soi-même,

Façon d'égayer la survie.  

 

26 février 2015

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administrateur théâtres

Un triomphe pour une pièce sublime, « L’affrontement » joué  au Centre Culturel d’Auderghem avec un duo de choc : Francis Huster et Davy Sardou ! Où C C C ne veut pas dire Cellules Communistes Combattantes mais Crises du Catholicisme Contemporain. Le pitch : « Comment Choisir entre la liturgie et le  MUSIC-Hall » Et dans ce débat ardent, ce sont évidemment les questions qui vont au-delà  du catholicisme et concernent directement  le cœur de l'être humain, qui donnent à cette œuvre une valeur universelle.

Tim Farley, celui que l’on doit appeler « mon père » (Francis Huster)  a  recours à la flatterie de  ses paroissiens et les divertit avec des sermons qui contournent les problèmes inquiétants afin de protéger sa Mercedes, ses voyages  en Uruguay et l'offre généreuse de vins fins qui ornent  le double fond de sa bibliothèque. Son monde bien ordonné est perturbé par l'arrivée de Mark Dolson (Davy Sardou), un jeune séminariste intense et idéaliste que le Père  accepte à contre cœur de prendre sous son aile. Il y a un conflit immédiat entre les deux,  alors que  le jeune homme remet en question le mode de vie luxueux du prêtre âgé, celui-ci  est consterné par la confession de Mark qui a mené une vie de promiscuité  bisexuelle avant de choisir la prêtrise.

Le drame psychologique oppose deux sortes de sacerdoce. D’une part celui du vieux curé irlandais, retraité de la foi,  installé confortablement dans une paroisse riche et prospère, un homme qui ne veut pas de vagues et dispense un discours de guimauve, se soumet hypocritement à l’autorité hiérarchique et aux  compromissions, un homme  qui  frémit de déplaire à  une congrégation docile et béate  mais fort loin des béatitudes chrétiennes.  De l’autre, celui du jeune séminariste, une âme perdue et retrouvée, courageuse, ferme et déterminée qui a connu les citadines, les citadins et même le trottoir pour survivre, dès l’âge de 17 ans. Cela a des vibrants accents de Gilbert Cesbron…

en-tournee-francis-huster-et-davy-sardou-joueront-quot-l-affrontement-quot-mardi-3-mars-a-l-opera-theatre.jpg?width=500 Le débat  récurrent remet en question l’accession des femmes au sacerdoce toujours refusée dans l’Eglise Romaine.  Rien non plus, selon Mark Dolson, n’interdit à deux hommes de s’aimer! Débats à l’évidence  toujours d’actualité, alors que la pièce « Mass Appeal » de Bill C. Davis avait été écrite en 1981 et fut traduite et jouée par  Jean Piat et Francis Lalanne en 1996, une version tragique, provocatrice et sulfureuse. Si le fond de la pièce n’a pas changé, l’attitude du public du XXIe siècle  a évolué. On accepte désormais de nouveaux codes et le rire dénonciateur est devenu un Credo omniprésent, ressenti comme la meilleure parade aux tentatives totalitaires ou intégristes.  

 

En effet, 20 ans après, la nouvelle version qui déferle sur les planches du CCA est une nouvelle adaptation signée par Jean Piat et sa fille Dominique Piat. Elle est bourrée d’humour explosif. C’est une mise en scène  de Steve Suissa. Le  décor dynamique de Stéfanie Jarre permet le passage habile de la chaire au  presbytère. Les jeux d’ombre et de lumières  évocateurs sont  signés Jacques Rouveyrollis et les costumes, Edith Vesperini. Steve Suissa a ourlé son travail de chansons d'amour émouvantes -  américaines pour la plupart - qui séparent chaque scène, faisant chaque fois accéder à plus de bonheur spirituel et plus d’amitié, ce qui est un autre thème puissant développé avec grande intelligence tout au long de la pièce. La musique ne facilite-t-elle pas l’accession à ce monde invisible par lequel on existe ? Le jeune-homme bourré d’insolence et de sincérité veut que l’église se remette en question, remettant au centre de ses préoccupations la seule chose importante, l’amour et sa variante: l’amitié. Et son rire, joint au nôtre, remet les choses en perspective.

 Notre siècle ne  permet-il pas à présent de rire de tout ?  Le rire ouvre à  la réflexion, y compris celle qui demande pourquoi on se pose telle ou telle question. C’est la  liberté de parole plus vivante que jamais, qui  creuse le sillon de l’humain. L’affrontement des deux hommes les met face à face avec  eux-mêmes. Chacun finit par devenir ce qu’il est, et la question Shakespearienne de « to be or not to be »  prend toute sa pertinence. Les deux rôles collent littéralement à la peau des deux comédiens et les spectateurs - pris pour des paroissiens - eux aussi, se transforment et tentent de trouver leur propre vérité avec eux-mêmes.  La magie théâtrale  a sondé l’humain avec une profondeur et une habileté qui met les larmes aux yeux.   Et qui n’a pas eu envie d’entonner Alleluia, Alleluia… en fin de spectacle, au nom de la vérité de chacun?   

Au cœur de sa programmation, la saison Paris-Théâtr...e présente le meilleur du théâtre français en général et parisien en particulier. 7 pièces à ne pas manquer, faisant passer le public du rire aux larmes et où l’émotion et la surprise sont toujours au rendez-vous. Une saison basée sur le divertissement, les coups de cœurs et la diversité !

http://www.cc-auderghem.be/index.php/component/redevent/details/270.html

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Dates
24.02.2015 - 01.03.2015 20.30 h - 15.00 h

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12273075485?profile=original"Les sept piliers de la sagesse" est l'oeuvre de l' aventurier et écrivain T.E. Lawrence (1888-1935) dit "Lawrence d' Arabie). Le premier manuscrit ayant été perdu, l'auteur réécrivit le livre avec beaucoup de remaniements; l'ouvrage parut en 1926, dans une édition à tirage limité, aussitôt épuisée et qui atteignit des prix fabuleux. L'année suivante, sous le titre "Revolt in the desert", fut publiée une édition abrégée et expurgée. Une réédition de l'oeuvre intégrale eut lieu en 1935. Ces mémoires constituent un document essentiel sur la sensibilité de l' aventurier contemporain.

En 1914, Lawrence, jeune archéologue en mission dans le Moyen Orient, refusé dans l'armée active pour raisons de santé, réussit à se faire accepter comme agent de l' "Intelligence Service". Un renouveau du nationalisme arabe s'étant produit dans les années  précédant immédiatement la Grande Guerre avec le mouvement des "Jeunes Turcs", l' Angleterre, et particulièrement Lord Kitchener, eut l'idée de gagner à la cause alliée les forces turques de Mésopotamie et de susciter une révolte, capable de provoquer  le démembrement de l'empire de Constantinople. Pour préparer ce soulèvement, Lawrence fut dépêché auprès de Feycal et de Hussein, grand chériff de la Mecque, rallié à la cause anglaise. Il s'agissait, naturellement, d'une mission destinée à servir les seuls intérêts anglais. Mais elle provoqua chez Lawrence le réveil d'un vieux rêve de jeunesse, poursuivi depuis les années d' Oxford. L'agent de l'Intelligence Service cessa bientôt de voir dans la révolte un simple moyen. Elle devint à ses yeux une fin prestigieuse, et qui se suffit à elle-même. Il s'agissait de "forcer l' Asie à prendre la forme nouvelle qu'inexorablement le temps poussait vers nous" ou, comme l'auteur l'explique dans une Introduction à son livre publiée dans ses "Lettres", "de créer une nation nouvelle, faire revenir au monde une influence perdue, donner à vingt millions de sémites les fondations sur lesquelles bâtir un château de rêve avec les inspirations de leur pensée nationale". Manoeuvrant à sa guise, Lawrence ne tarde point à donner aux Arabes des avis, fort éloignés des buts de la politique anglaise. Non qu'il renie son pays: il en conserve toute la vanité. Mais d'une part, c'est un être naturellement indiscipliné: il dénonce la discipline militaire, "servitude qui, pour être volontaire au début, n'en est pas moins abjecte". Et surtout, il a décidé de se faire arabe parmi les Arabes: l'effort qu'il poursuit en ce sens l'a, dit-il, dépouillé de sa "personnalité anglaise: j'ai pu ainsi considérer l' Occident et ses conventions avec des yeux neufs, -en fait cesser d'y croire".

A vrai dire, l'entreprise échoua et, de cet échec, Lawrence prend une grande part de responsabilité: il n'a point détrompé les Arabes et a continué ainsi, malgré et contre ses voeux, de servir la politique anglaise: "L' honneur, écrit-il mélancoliquement, ne l'avais-je pas perdu l'année précédente, quand j'avais affirmé aux Arabes que les Anglais tenaient leurs engagements?" Mais, plus profondément, le rêve d'une résurrection politique du monde arabe ne fut qu'un rêve, que Lawrence ne se soucia guère d'asseoir sur de fortes bases historiques. Il a pu s'évader de l' Occident: malgré ses efforts, il ne s'est point créé une nouvelle vie arabe. Dans l'aventure qu'il a tentée, moins qu'un accord avec de grandes forces historiques, il avait recherché l'âpre sentiment de la totale indépendance que lui donnait cette force guerrière cimentée par une pure idée: "Nous étions une armée concentrée sur elle-même, sans parade, ni geste, toute dévouée à la liberté, la seconde des croyances humaines". Pour gagner les Arabes, Lawrence avait voulu les imiter: mais cette substitution de personnalité sociale était-elle possible? Réfléchissant sur l' aventure, il faut bien que Lawrence le reconnaisse: "Comment se faire une peau arabe? Ce fut de ma part affectation pure. Il est aisé de faire perdre la foi à un homme, mais il est difficile ensuite de le convertir à une autre. Ayant dépouillé une forme sans en acquérir de nouvelle, j'étais devenu semblable au légendaire cercueil de Mohammed".

Lawrence est resté un étranger. La solitude est bien en effet un des traits caractéristiques de son destin: elle engendre un sentiment de mépris intense "non pour les autres, mais pour tout ce qu'ils font". Pourquoi se complaît-il en récits ignobles ou atroces, flagellations, meurtres, exécutions de prisonniers (coupables eux-mêmes d' atrocités)? Il semble que Lawrence veuille ainsi exacerber cette impression d'étrangeté, d' indépendance complète par rapport aux hommes et au monde: son ascétisme n'aura pas d'autre but: bourreau de son corps, nous le voyons passer des jours et des nuits sur un chameau, sans manger, sans boire. Dépouillé de lui-même, il est bien alors, comme l'a défini Louis Gillet, un de ces "individus qui trouvent moyen, dans le renoncement total, d'exercer le pouvoir sans limites". Pour cette âme libre, mais prisonnière d'elle-même, la politique et l'histoire deviennent les formes d'un rêve intérieur. Lorsque Lawrence convient que la révolte arabe n'était qu'un jeu supérieur, nous sentons bien qu'avec l' aventurier anglais, nous atteignons un point extrême de la rêverie politique romantique.

Lawrence est de la race des Chateaubriand et des Barrès: "Les rêveurs du jour, écrit-il en songeant à lui-même, sont des hommes dangereux, car ils peuvent jouer leur rêve les yeux ouverts et le rendre possible". Si son entreprise lui plaît, ce n'est point tant pour le bonheur à venir d'un peuple, que comme la plus belle figure de ses songes: "Je t'aimais: c'est pourquoi, tirant de mes mains ces marées d'hommes, j'ai tracé en étoiles ma volonté dans le ciel, afin de gagner la liberté, la maison digne de toi". On se demande alors si l'échec n'a pas été volontaire, et destiné à préserver la pureté du rêve: moins que la conquête, c'est l' effort qui exalte Lawrence, l'active contemplation de la pure énergie: "Quand une chose était à ma portée, je n'en voulais plus. Ma joie était dans le désir".

Cette passion, plus d'un conquérant ou d'un politique, est d'un intellectuel. L'auteur est trop lucide pour ne pas se l'avouer: ma guerre était trop méditée, parce que je n'étais pas soldat, mes actes étaient trop "travaillés", parce que je n'étais pas un "homme d' action". C'étaient autant d'efforts intensément conscients, accomplis sous les yeux et sous la critique latérale d'un moi désintéressé. Désintéressement typique d'un esprit marqué des décadences modernes. L' aventure pour  Lawrence, ressemble beaucoup à ce salut pour l' art qui tentait les écrivains à la fin du XIXe siècle et c'est encore, au sein de la plus brûlante réalité, le "Réfugions-nous dans l' artificiel" d'un Barrès. Lawrence n'édifie point l'empire arabe. Mais, qu'importe le succès ou l'échec de son entreprise, si cette dernière lui permet de façonner quelque oeuvre d' art? "Je n'avais eu, dit-il, qu'un grand désir dans mon existence -pouvoir m'exprimer sous quelque forme imaginative, - mais mon esprit trop diffus n'avait jamais su acquérir une technique. Le hasard, avec un humour pervers, me jetait dans l' action, m'avait donné une place dans la Révolte Arabe... m'offrant ainsi une chance en littérature, l'art-sans-technique!" Que l'exemple de Lawrence puisse être considéré comme type de cette race d'esprits hautains, proies du nihilisme métaphysique, au fond assez désintéressés de la vie, une affirmation du moi plus vaste que cette que peut réserver la littérature, les expériences parallèles d'un Malraux, d'un Drieu la Rochelle, d'un Ernst von Salomon l'attestent suffisamment.

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Vous aimer,

 

Vous écrire,

vous aimer tout en grand,

dans une chambre minuscule,

bleue ciel et claire,

n'Est-ce pas là, cette étoile

éprise du firmament oh combien courtisé,

muet et sombre ?

De cet inconditionnel amour,

s'en amuse le soleil,

le grand élu !

Vous écrire,

vous aimer obstinément,

n'Est-ce pas là, cette musique

murmurante, balbutiante,

s'adressant à votre profond silence ?

Aimer est l'œuvre de toute

une vie, grâce à cette

petite écharde dans le cœur plantée,

d'où fleurira un blanc rosier.

 

NINA

 

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Quand viendra l'instant...

12273074488?profile=originalPeinture de l'Artiste peintre Ljubomir Ivankovic

Dans ma sorgue d'encre, le vide et le froid
me phagocytent et la charge énergétique
me soumet à la folie fantomatique de son monde.
Sur ce chemin alternatif, mes intimes profondeurs
deviennent alors la proie des desseins qui se composent
sur mon lit de cendres.
Dans les coulisses du temps qui renouvelle les heures
qui s'écoulent, je deviens l'instrument d'un rayon pâle
que le ciel balance au clavier de mes sens.
Dès lors, un miel divin, lisse, soyeux, s'accroche
à mon drap de suaire et son étroite possessivité
fait vibrer d'un érotisme troublant le relief de mon corps,
trainant ainsi sur le mur l'ombre de longues filandres
avant que la porte de l'aube ne s'ouvre
et crie ma délivrance.

Nom d'auteur Sonia Gallet
recueil © 2015

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Nos rendez-vous spirituels

Songerie

 

À la Fac, puis dans les rues,

Un autre jour avions vécu;

Des heures douces ou intenses, 

En ce temps de notre jouvence.

 

Nous nous quittions dans la soirée.

En laissant voir notre regret.

Parfois je me souviens, rêveuse,

D'Alger, où j'étais amoureuse.

 

Il me donnait un rendez-vous,

Cela aurait pu sembler fou,

 En  me désignant l'astre unique,

Pour une rencontre idyllique.

 

Mon âme s'élevait vibrante,

Vers les étoiles scintillantes,

Jusqu' à la lune, îlot du ciel.

L'espace avait un goût de miel.

 

25 février 2015

 

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Le baiser,

le baiser est un mot

qui dévêtu se donne,

aphone, bouleversant,

qui s'écrit sur la peau,

s'y inscrit,

y demeure invisible,

le temps de toute une vie.

Je parle d'un baiser,

infiniment sacré,

ce grand mot solitaire

qui ne recherche que vous.

Le baiser est un mot

qui se brise sans vous,

aphone, agonisant,

qui s'étiole dans le vide,

s'y asphyxie,

y demeure orphelin,

le temps d'une survie.

Je parle d'un baiser,

infiniment cassé,

ce grand mot solitaire

qui désespère de vous.

Mais ce baiser de moi à vous,

sur une page blanche,

s'est métamorphosé en une rose claire,

murmurante et bleue ;

voilà son grand destin !

NINA

 

 

 

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Frère lointain

Il a franchi la distance et le temps,
N’a pas oublié l’enfance, les tourments.
Ce frère-là n’a pas son pareil
Tel un saint qui fut touché d’éveil !

Pas plus que l’âge ou un semblant de paresse
Se glissant à son insu dans sa vie difficile,
Pas plus, non, encore moins la faiblesse
Dictant l’ennui de sa vie infertile.

Ce frère-là a rassemblé des forces inconnues,
Les découvrant soudain au hasard d’un matin,
A pris une vieille valise pour un voyage soudain
Et s’est jeté confiant et fier au devant de la rue.

La rue est comme un voyage qui fait peur,
Accroché à elle il n’avait plus de vue.
Mais ce moment ainsi qu’une divine lueur
Lui cria sa vérité devenue absolue.

Oh, il n’en rit pas toujours, ce ne fut pas facile.
Il dormit par terre et croisa des brigands,
Se recroquevilla de froid sur des bancs,
Mais ses yeux pour une fois lui semblaient utiles.

Ne sachant où aller il alla n’importe où,
Aller lui semblait un facile enchantement.
La valise, il l’avait donnée à un mendiant,
Voilà qu’il aima être devenu fou !

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Une larme,

Cette larme de moi,

glissant contre votre absence,

est une bombe dans ma tête,

dans mon corps une déflagration sombre.

Pour vous, mon Ami,

il n'y a que silence, l'invisibilité d'un cœur

pourtant si pourpre !

Cette larme de moi,

glissant  contre votre absence,

est une ondée glacée,

tombant en vain,

 sur votre ensoleillement radical, continuel ;

dans ma saison ce grand absent.

Dans ma tête obstinément,

je le crée, le dessine, l'enracine ;

Son île me voici devenue,

d'où j'écris tout le temps,

en bleu de préférence,

 avec un vague à l'âme

de temps-en-temps.

Ne dit-on pas que l'écriture

est un cheminement bleu

solitaire et secret,

un brin d'enfance encore ?

 

NINA

 

 

 

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Du rire

 

Soliloque

 

Le rire est un besoin facile à reconnaître,

Vite contagieux, même s'il est discret.

Or tous les bons vivants se sentent toujours prêts  

À partager la joie que quelqu'un a fait naître.

 

 

Abaisser son prochain semble faire plaisir.

Des malins avertis emploient la moquerie

Pour ridiculiser une catégorie

De gens, que de choisir ils ont eu le loisir.

 

 

Faiblesses et défauts inusités amusent.

Ce qui semble grotesque entraîne le gros rire.

Le mépris ressenti peut entraîner le pire

Mais nul, en s'esclaffant, n'en conçoit la mesure.

 

 

Les méchants dénoncés cessent d'être amusants.

 Lors, seuls les plus naïfs demeurent leurs complices.

Ceux, qui ont reconnu leur néfaste malice,

Ne trouvent plus risible un humour malfaisant. 

 

 

Il est des arroseurs qui se font arroser.

Quand, par leur maladresse, le tuyau leur échappe.

Le hasard  quelques fois intervient et il frappe.

Certains pensent à tort qu'ils peuvent tout oser.

 

 

Si j’avais du talent, j’écrirais une farce,

Ce qu’il est advenu à qui voulait duper.

Tout comme à Patelin, certainement futé,

Se retrouvant pourtant le dindon de la farce.

 

24 février 2015

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l'étincelle JGobert

Une étincelle jailli et apparu un personnage de conte de fée. Tout en sourire, il descend les marches du présent et tourne son regard vers l’assistance. Rayonnant comme dans une comédie musicale, je m’attends à ce qu’il se mette à voler, à danser, un peu comme Fred Astaire ou Gene Kelly. Parti dans un pas de danse chimérique, mon imagination ne le quitte plus et je le vois sur scène, en haut de l’affiche et célèbre dans le monde entier.

Il m’obéit et en moins de temps que je le pensais, je deviens son mentor, son guide, sa muse, sa route, sa vie. Notre duo s’établit et nous sommes bien ensemble. Une paix intérieure que je n’ai jamais connu m’envahit à sa pensée et m’autorise enfin à un peu de repos. L’angoisse me quitte un soir et me laisse un peu désarmée. Un tel vide m’apeure. Je cherche les occasions de m’alarmer, de me contrarier afin de retrouver cette sensation oppressante qu’elle m’a apprise. Ma vie a pris un tout autre chemin et ce personnage de conte de fée remplit ma vie, m’apporte un bien-être un peu étrange puisqu’irréel, imaginaire.  Il m’accompagne partout et apprécie mes sorties, mes activités. Nous partageons nos rêves.

Cet être au caractère bien trempé, vit lui aussi une autre vie, dans un autre monde. Il ne reconnait que ce qu’il veut bien, ne prenant que le meilleur pour toujours avoir le beau rôle, le premier rôle. D’instinct  parfois, je le trouve prétentieux, apprêté, fier mais sans jamais le lui dire, ni interrompre ce beau duo.

Les années passent et remplissent l’histoire. A certain moment, nous reprenons notre chemin seul. Je l’abandonne sans jamais le quitter.  Il me manque, m’exaspère et finit par réapparaître plus présent que par le passé. Je n’ai jamais le sentiment de l’avoir laissé et notre belle complicité renait. L’étincelle revit et nous replonge dans un monde toujours fabuleux où chacun a sa partie à jouer.

Cette fois, il n’est plus l’artiste éclatant que je connais mais un clown triste, désabusé qui se laisse vieillir. Le mal l’a touché et il me faut un long moment pour l’en sortir et réussir à le rassurer enfin. Les années passent trop vite et laissent trop de cicatrices, trop de blessures profondes qu’un personnage de conte de fée ne peut supporter. Mais il reprend courage et regagne sa joie de vivre.  A nouveau, des moments extraordinaires que la maturité a libérés de tous les sentiments inutiles.

Je me crois paisible, tranquille, à l’abri, mais ce héros change d’attitude et finit par me délaisser.  J’avoue mon étonnement. Ma prétention à le gérer m’échappe et je m’aperçois que mon imagination s’est laissé berner par mon propre inconscient. Ce personnage a une vie et ne veut plus de la mienne. Il a mué et modifié son cadre loin de moi. Je suis perdue dans cet abandon que je ne comprends pas. Vexée de n’avoir plus d’intérêt pour ce personnage que j’ai créé, dépossédée d’une part de moi-même et je lui en veux un peu.

Beau seigneur, il m’inclue toujours dans les instants de sa vie mais je reste loin, à distance, au-dehors. Je ne veux plus approcher de son monde. L’étincelle a vécu ce que vivent les roses et nos routes prennent une autre direction se séparant peut-être cette fois pour de bon.

Ma fantaisie  voulait que ce personnage soit parfait. Personne n’est jamais parfait, la vie est une imposture constante qui laisse croire à un tas de choses, de tours qui ne sont que des apparences, des leurres.

 

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