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Du pouvoir de la déduction

Il nous est souvent fort utile
De recourir à la raison.
Lors par instinct nous le faisons
Face à un accès difficile.

Les effets résultent de causes.
On agit pressé quelques fois
Sans avoir opté pour le choix
Qu' une habitude nous propose.

Le cerveau ne capte pas tout.
Quand noter serait nécessaire,
On peut négliger de le faire
Et se retrouver sans recours.

J'ai un grand besoin d'une adresse.
Pouvoir rejoindre deux amis,
A cessé de m'être permis
Et eux sans nouvelles me laissent.

Or leur proche parent demeure
Non loin de chez moi, je le sais.
Le contacter serait aisé.
Il me rassurerait sur l'heure.

J'ai dû trouver le nom de fille
De la soeur de ce locataire.
Grâce à la toile ai pu le faire.
Mon esprit redevient tranquille.

31 août 2015

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12273119273?profile=originalL' "Esquisse d'un tableau historique des progrès de l' esprit  humain"'est le plus célèbre ouvrage d'Antoine Nicolas de Condorcet (1743-1794), philosophe et mathématicien, écrit en 1793, alors que Condorcet, décrété d'arrestation par la Convention, se cachait à Paris, près de l'église Saint-Sulpice, rue Servandoni. Manuscrit à la Bibliothèque nationale sous la cote 885. Il ne s'agit d'ailleurs que d'un brouillon, où l'on trouve de nombreuses fautes d'orthographe et de synthaxe, et d'une introduction à un ouvrage considérable que Condorcet n'eut point le temps d'écrire. Première édition en 1795. Edition par Arago en 1857 et dernière édition française en 1933. C'est de Turgot surtout que Condorcet reçut son idée de Progrès. Celle-ci, il est vrai, était répandue depuis la Renaissance et Bossuet lui-même l'avait partiellement adoptée. Mais il s'agissait d'un progrès scientifique, de la culture. L'idée originale de Condorcet est celle d'un perfectionnement indéfini, non seulement dans l'ordre des connaissances scientifiques, mais aussi dans l'ordre de la vie morale. Cette conception du progrès fait de Condorcet un adversaire déclaré de tous les dogmes religieux, qui se fondent justement sur la finitude humaine. La finitude n'est pour lui qu'une déficience transitoire qui doit être nécessairement surmontée dans l' avenir. L' "Esquisse", en effet, ne veut pas être seulement un ouvrage historique. Condorcet ne se penche sur l'histoire que pour éclairer l'avenir et il déclare son intention de découvrir les lois du progrès humain qui rendront celle-ci plus facile. C'est par cette notion de progrès et par celle des lois de l' histoire que Condorcet aura surtout une grande influence sur le siècle suivant, en particulier sur Auguste Comte. Ce n'est pas là, il est vrai, que le but qu'il se propose: il ne l'atteint point. Son ouvrage, qui fut le premier à regarder l'ensemble de l' histoire non plus sous l'angle des faits politiques, mais sous celui des progrès de l' esprit, n'est qu'un rapide et très sommaire survol de l' histoire du monde, et aucune loi, ni générale, ni particulière, n'est tirée de cette investigation. Peut-on appeler loi de l' histoire l'affirmation simpliste, commune au "siècle des lumières", que la tyrannie et la superstition, c'est-à-dire les religions et le clergé, ont toujours retardé les progrès de l'esprit? Pour la prouver, Condorcet commet des omissions graves et s'enferme dans un parti-pris qui l'empêche, par exemple, de juger à sa valeur le moyen âge. Dans la vision historique de Condorcet, il y a place pour des régressions. Mais celles-ci ne sont que partielles et, en tous les cas, témoins de l'obscurantisme clérical et de la tyrannie des princes, elles ne sauraient altérer la loi générale du progrès. Il est d'ailleurs remarquable que cette loi n'est pas découverte par l'expérience historique. Le philosophe la pose au contraire au départ, comme une vérité d'évidence, et ne s'attache point à la fonder en raison: l'histoire ne vient alors que pour corroborer la loi du progrès, mais ce n'est pas elle qui la révèle.

La valeur de l'ouvrage tient surtout à ce qu'il ouvrit plusieurs de ses chemins à la pensée du XIXe siècle: avant Condorcet, un Bossuet par exemple avait usé de l' histoire pour éclairer le présent. Mais Condorcet est le premier à suggérer l'existence d'une loi générale de l' histoire qui pourra servir à prévoir et à maîtriser l'avenir: ce pressentiment dominera Comte dans sa recherche de la "loi des trois états". Quant à sa valeur historique, il ne faut point se montrer trop sévère à son sujet: on songera en effet que Condorcet dut écrire son "Esquisse" poursuivi par la police, qu'il n'eut à sa disposition que très peu et peut-être pas de livres. Et comment, enfin, ne pas reconnaître une certaine grandeur à cet optimisme impénitent qui poussera Condorcet, à l'aube de l' Apocalypse moderne dont il fut une des premières victimes, à consacrer ses derniers jours de liberté et de vie à écrire un hymne à la gloire du progrès humain?

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En partance JGobert

En partance pour un monde imaginaire, un petit enfant se repose dans les bras douillets  de sa mère. Atmosphère douce et familiale pour ce petit garçon naît du bon côté de la terre. Un délicieux  repos envahit  de personnages insolites sortis tout droit de sa fantaisie. De tendres rêves que son imagination fait vivre intensément.  Au moindre cri, maman, vigilante,  veille.  L’enfant connait le réconfort et le souffle chaud des baisers de sa mère. Il dort en paix.


A quelques lieux de là, sur une route sombre et froide, s'assoit un autre petit enfant que sa mère tire depuis des heures, de longues heures difficiles.  Ce petit garçon n’en peut plus, épuisé de tant de marche. Ses petites jambes ne veulent plus le porter. Les larmes sur ses petites joues rougies par le froid ne font fondre personne même pas sa mère qui a pour lui d'autres craintes, d’autres frayeurs. Ils sont sur une route, une route d’exile. Un long chemin vers l'inconnu.  Sa mère, minée d’inquiétude et de fatigue, lutte pour rester dans le groupe.
L’enfant fait preuve d’un grand courage malgré ses larmes et son jeune âge.  Sa mère en est fière. Il sera un homme. Le petit garçon s’est relevé et a repris sa marche forcée le ventre vide. Il sait que sa survie passe par ces épreuves. 

 Silencieux, il suit sa mère et le groupe. Sa mère lui prend la main pour le rassurer. Elle ne l’abandonnera pas.  Enfin un peu de repos et il s’assoupit, épuisé sur le manteau élimé et le cœur de sa mère.

Ses rêves ne sont pas les mêmes que ceux d’autres enfants. Mais il part néanmoins lui aussi vers un pays imaginaire où la vie est devenue précieuse, la liberté respectée. Un monde de justice, un monde de paix, un monde de cocagne avec peut-être beaucoup de déceptions à vivre avant de devenir un homme juste qui fera honneur à sa mère.

En partance pour ce monde meilleur, où nous sommes les acteurs actifs ou inactifs, sensibles ou insensibles devant toute cette triste misère de ces peuples en quête de paix. A nos mémoires défaillantes, au temps de nos grands-parents et parents qui ont foulé les chemins de l’exile et les chemins des camps.
Que de mains charitables, que de cœurs purs ont aidé durant ces effroyables années. Ne laissons pas les marques béantes de notre indifférence prendre place dans le cœur de ce petit garçon pas plus haut que trois pommes.

Donner l’espoir d’une vie meilleure à ce petit enfant. Ne pas le laisser devenir de la chair à canon, l’éduquer fermement de ses valeurs et des nôtres pour qu’il ne bascule pas dans la violence et la terreur.

Un jour, les deux petits garçons seront vraisemblablement assis côte à côte sur un banc d’école et ensembles résoudront le délicat problème de l’étranger par une belle amitié.

Rien n'est jamais facile à comprendre et à accepter. Le temps est venu de montrer que nous pouvons accueillir  ce petit bonhomme.

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Le baiser.

 

Coup de soleil,

de lui baiser trop fort,

sur ma peau ahurie,

apparait une écharpe pourpre  ;

la pluie séparatrice demain,

viendra me la défaire ;

de mon amant le grand soleil,

ne restera plus de trace,

ni même la moindre fébrilité,

juste un souvenir chaud,

dans un corps qui résiste,

tout de glace ;

cet été aux prémices de l'automne,

bien trop tôt s'est mêlé,

et dans l'ombre de moi se débat,

s'exaspère, balbutie le prénom du soleil,

 qui m'est si familier !

Oh, sous la tonnelle arborescente

piqué de fleurs blanches,

j'irai m'étendre silencieuse et livide,

 puis imperturbablement l'attendre, .

NINA

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R Ê V E

12273116056?profile=original 

Mais qu'est ce que c'était ce rêve tour à tour

Des couloirs infinis et sombres des détours

         Et puis ces personnages

L'un puis l'autre inconnus et connus se croisant

Sur tout cela la lune en son premier croissant

         Et puis moi tout en nage

 

 

Cherchant à démêler dans cet imbroglio

Le fil droit d'une histoire où la muse Clio

         Se perdrait elle-même

Où les vivants d'hier les défunts de demain

Dans ces rues sans but perdent tous leur chemin

         Et aussi ceux qu'ils aiment

 

 

Les retrouvant parfois au détour d'un hasard

La nuit lourde pesant sur ce sombre bazar

         Aux marchands interlopes

Puis ce décor fuyant la plaine que révèle

Un clair de lune pâle - et là qui s'échevèlent

          Ces chevaux qui galopent

 

 

Et galopent sans fin sur le tambour du coeur

Ces cris et ces combats sans vaincu ni vainqueur

         Et qui soudain s'effacent

Et là vers le matin ces oiseaux éblouis

C'est juste un peu de rêve à saupoudrer tes nuits

         Lorsque l'aube t'enlace

        

        

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12273117080?profile=original"De l'esprit des lois est un traité de philosophie politique de Charles-Louis de Secondat, baron de Montesquieu (1689-1755), dont le titre complet est: De l'esprit des lois, ou Du rapport que les lois doivent avoir avec la Constitution de chaque gouvernement, les moeurs, le climat, la religion, le commerce, etc., à quoi l'auteur a ajouté des recherches nouvelles sur les lois romaines touchant les successions, sur les lois françaises, et sur les lois féodales, publié sans nom d'auteur à Genève chez Barrillot en 1748; réédition corrigée à "Londres" (alias Paris) en 1757.

Si la genèse de ce livre fameux est l'oeuvre d'une vie, sa composition apparaît somme toute étonnamment rapide: moins de dix ans. Le célèbre livre XI sur les constitutions anglaise et romaine est sans doute contemporain, dans sa première version, vers 1733, des Considérations sur les causes de la grandeur des Romains [...], mais précède le projet précis de l'Esprit des lois, qui n'est guère antérieur à 1739 (la décision initiale remontant à la fin de 1734). Le texte de base a été composé à Paris entre 1740 et 1743, soigneusement corrigé à deux reprises entre 1743 et 1746. Le gros de l'ouvrage - derniers livres mis à part - était achevé dès 1746. On ne mettra donc pas au compte d'une interminable rédaction les contradictions, impasses ou incohérences que bien des lecteurs ont cru relever dans le plan ou le détail de cet édifice aussi génial que fuyant. De l'esprit des lois n'est pas le journal à la Montaigne d'une pensée qui se cherche et se complaît dans ses méandres. Ce n'est pas non plus, Montesquieu le dit ouvertement, un livre qui s'offre au premier venu, en dépit (ou à cause, diront certains) des trésors d'esprit et du prodigieux travail stylistique mis en oeuvre. Mais comprendre De l'esprit des lois, ce n'est pas seulement saisir la logique interne d'une chaîne de concepts; c'est aussi goûter une manière unique d'écrire la philosophie. La philosophie du droit rivale de Tacite, nul n'y avait songé!

Compris ou incompris, le livre plut: au moins quinze éditions en 1748 et 1749. Il déplut aussi vivement aux jésuites et aux jansénistes. "Ce qui semble peu croyable, dira Voltaire, c'est que Montesquieu daigna [leur] répondre": la Défense de "l'Esprit des lois" parut en février 1750, sans proposer la profession de foi catholique que l'on espérait. L'ouvrage fut mis à l'Index, mais la mort de son auteur lui épargna une censure de la Sorbonne.

Le plan de l'ouvrage a toujours fait problème. Montesquieu le résume au chapitre 3 du livre I. Mais pouvait-il en être autrement, quand il s'agit d'embrasser et d'expliquer "toutes les institutions qui sont reçues parmi les hommes"? L'oeuvre propose une division en six parties (omise dans l'édition originale) et en 31 livres (dont les deux derniers, sur les lois féodales, furent rajoutés in extremis), eux-mêmes subdivisés en chapitres extrêmement inégaux (le fameux chapitre 13 du livre V n'atteint pas trois lignes!).

Le livre I ("Des lois en général") constitue une introduction, dont la concision fait toute la difficulté (définition de la loi comme rapport nécessaire dérivant de la "nature des choses", et résumé du droit naturel).

La première partie, des livres II à VIII, s'attache aux lois qui "se rapportent à la nature et au principe du gouvernement": gouvernement républicain (démocratie et aristocratie), monarchique, despotique, se distinguent en effet par leur nature et leur principe: "L'une est sa structure particulière, et l'autre les passions humaines qui le font mouvoir." "Il est clair toutefois que Montesquieu a fait entrer dans cet exposé de la théorie des trois gouvernements des matières qui pouvaient en être séparées: les lois de l'éducation (IV), les lois civiles et criminelles (VI), les lois somptuaires (VII)", note R. Derathé.

Les lois doivent aussi "se rapporter au degré de liberté que la constitution peut souffrir". C'est l'objet de la deuxième partie (IX-XIII): lois liées à la force défensive (IX) et offensive (X), lois qui forment la liberté politique dans son rapport avec la constitution (XI), avec le citoyen (XII), avec les impôts (XIII). Le plan peut surprendre, mais c'est qu'il n'y a pas de liberté des citoyens sans sûreté de l'État.

La troisième partie (XIV-XIX) s'attache aux rapports des lois avec le climat (XIV-XVII) et avec la nature du terrain (XVIII). Montesquieu y ajoute un livre essentiel qu'il aurait pu aussi placer ailleurs: "Des lois dans le rapport qu'elles ont avec les principes qui forment l'esprit général, les moeurs et les manières d'une nation" (XIX). C'est peut-être une façon de souligner encore davantage l'importance, au milieu du livre, de la théorie du déterminisme physique, si controversée. A l'analyse de la liberté politique (deuxième partie), succède donc celle de l'esclavage et de la servitude, placée sous l'emprise accablante des forces brutes de la nature.

La quatrième partie (XX-XXIII) examine les relations des lois avec l'économie: commerce (XX-XXI), monnaie (XXII), démographie (XXIII).

La cinquième partie traite des rapports entre lois et religion (XXIV-XXV), mais y ajoute un livre de technique juridique (XXVI): "Des lois dans le rapport qu'elles doivent avoir avec l'ordre des choses sur lesquelles elles statuent". Il est clair que l'auteur ne pratique pas le culte professoral du plan, et cultive peut-être même la coquetterie désinvolte du hiatus. Car il n'était pas bien difficile, mais sans doute un peu scolaire, de coupler les livres XXVI et XXIX.

La sixième partie (XXVII-XXXI) s'intéresse aux rapports des lois avec leur origine et leur génération. Il s'agit donc de la formation des lois et de leurs transformations incessantes: matière sans fond. Montesquieu avait choisi un exemple, celui des lois romaines de succession (XXVII). Puis il décida au dernier moment, en 1748, d'y adjoindre l'exemple des lois civiles françaises (XXVIII). Ces deux livres d'histoire du droit, "espèce de méthode pour ceux qui voudront étudier la jurisprudence", devaient précéder la Conclusion, l'actuel livre XXIX ("De la manière de composer les lois"). Mais Montesquieu y ajouta, sans doute en cours d'impression, deux autres livres sur les lois féodales, d'un grand intérêt politique pour sa théorie de la monarchie, mais d'une lecture difficile; livres qui encadrent la Conclusion (XXIX) et font pendant aux livres XXVII et XXVIII. Si cette sixième partie demande un effort au lecteur, elle a beaucoup plus coûté à l'auteur: "J'ai pensé me tuer depuis trois mois..." (28 mars 1748). Il est certain que De l'esprit des lois, sur la fin, perd de son inimitable brio. Mais on mesure mieux, à le lire jusqu'au bout, quels en furent la gageure et le prix.

La première difficulté de l'Esprit des lois tient à sa qualité littéraire, inégalée en de telles matières. D'accord en cela avec Voltaire, par ailleurs si critique à l'égard de l'ouvrage et de sa méthode (de son absence de méthode), Montesquieu pense que les bons livres laissent au lecteur la moitié du travail: "Pour bien écrire, il faut sauter les idées intermédiaires, assez pour n'être pas ennuyeux; pas trop pour n'être pas entendu." Il ne s'agit pas de faire lire, mais de faire penser. Les variations de ton, de forme et de longueur, les ellipses, les tournures épigrammatiques et allusives, les détours du plan, l'immense brassage des exemples empruntés aux sources les plus diverses, aux contrées les plus reculées, aux moeurs les plus étranges, ont pu à la fois séduire et irriter, charmer et déconcerter: comme si l'évidence du génie se gaspillait en art de plaire, et la raison des lois, en esprit sur les lois. Mais il serait assez fâcheux de se laisser prendre à ces apparences. Car cette forme (rococo?), qui fait d'un grand livre de philosophie un chef-d'oeuvre absolu de la vulgarisation, porte sens. Pas seulement sur le désir qu'ont les Lumières d'aller au-devant du public, et de se constituer un public raisonnable, mais sur le coeur du projet, immédiatement sensible au lecteur même distrait: qu'il y a des raisons aux choses, que ces raisons sont des rapports, et que ces rapports sont innombrables, subtils, déroutants. On peut donc dire avec R. Derathé que le plan "adopté par Montesquieu a l'inconvénient d'aborder les mêmes sujets à différents endroits" (l'étude du droit pénal aux livres VI et XII, celle des questions financières aux livres XIII et XXII, etc.). Mais on peut aussi estimer que l'écriture de l'Esprit des lois (qui déborde largement la question du plan) oblige le lecteur à entrer dans la complexité raisonnable, sinon maîtrisable, des choses humaines, à s'aiguiser l'esprit au jeu d'une nouvelle méthode, d'une méthode pour penser l'Histoire sans recours au hasard ni aux folies. Tous les exemples seraient-ils fantaisistes, et tous les rapports aberrants, qu'il resterait le projet grandiose de soumettre les faits sociaux à une logique déchiffrable, la logique des rapports calquée sur la nouvelle définition de la loi physico-mathématique: un rapport constant entre des phénomènes dont l'essence nous échappe.

Soumettre l'invraisemblable, l'épuisante cacophonie des lois humaines à travers le temps et l'espace à l'emprise de la raison, consiste d'abord à dégager trois modes fondamentaux de fonctionnement social: le mode républicain, qui englobe la démocratie et l'aristocratie; le mode monarchique (essentiellement référé à l'exemple français); le mode despotique, défini à la fois comme gouvernement asiatique et perversion de tout régime politique. Chacun de ces régimes est animé par un principe spécifique qui colore les lois, les institutions, les comportements: "vertu" républicaine, "honneur" monarchique, ou "crainte" despotique. Principes plus politiques qu'éthiques: la vertu signifie l'identification à la patrie; l'honneur, l'attachement aux prérogatives du rang, du nom, de la réputation. La méthode consiste donc à rapporter toutes les composantes du type à la structure qui le fait être ce qu'il est (sa nature) et à la logique interne de son dynamisme spécifique (son principe), le principe l'emportant en fait sur la nature. Il y a une logique républicaine, monarchique, despotique (logique de fonctionnement viable et logique de corruption), qui seule permet de rendre leur cohérence aux lois, aux moeurs, aux évolutions.

Il s'agit ensuite d'examiner ce que deviennent, dans chacun de ces trois régimes canoniques, les grands types de rapports où se déterminent les lois: climat, religion, espace, etc. On ne doit nullement en conclure que toute société réelle répond intégralement à la pureté du modèle idéal. Car les hommes, s'ils sont pris dans la logique contraignante et spécifique du déterminisme propre à chaque type fondamental, ont droit à l'erreur, privilège de leur liberté naturelle: ils promulguent des lois, impulsent des pratiques et des évolutions qui réalisent ou corrompent l'essence idéale de leur régime. Toute société concrète obéit à une histoire particulière, et sa configuration change selon les moments de cette histoire. La plupart des sociétés mêlent sans doute, à des degrés divers et variables, mais sous la dominance de l'un d'entre eux, les trois grands principes, les trois logiques. En tout cas, Rome, la Chine, l'Angleterre apparaissent comme des régimes mixtes. Un seul régime semble échapper au temps: le despotisme, installé de toute éternité en Asie, immobile et indestructible, qui nie la liberté et la réalise comme droit à l'erreur absolue. Le despotisme, ailleurs et envers de la politique, terme ultime et presque inévitable de tous les systèmes; corruption incorruptible, le seul corps politique immortel.

Quelle que soit l'admiration de Montesquieu pour les républiques antiques, seuls les peuples européens issus des invasions barbares ont inventé la véritable monarchie adaptée aux États modernes. Elle suppose, comme tout régime modéré, un partage des trois fonctions du pouvoir, exécutif, législatif, judiciaire. Partage qui, pour être efficace, doit se distribuer entre forces sociales (en France, le roi et sa cour, les parlements, la noblesse). Montesquieu ne propose donc pas une règle purement juridique de séparation formelle des organes de gouvernement, transportable à l'identique d'une constitution à l'autre: le modèle anglais n'a pas de sens en France. Il s'agit d'une méthode d'analyse des formes politiques, qui aboutit à superposer au modèle ternaire une opposition binaire entre le despotisme, explicable mais radicalement mauvais, et les régimes modérés. La liberté est l'invariant normatif des formes politiques. Contradiction avant la lettre entre le sociologue et le libéral? Mais Montesquieu n'a jamais voulu couper le droit positif du droit naturel.

La table des matières de ce livre considérable à télécharger en format PDF

Table des matières

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VV : Tout d'abord, cher Thierry-Marie, voici trois questions dans le cadre des rapports Auteur-Lecteur.

VV : Comment définis-tu ta relation quant à tes lecteurs les plus assidus?

THM : Elle est avant tout amicale, fraternelle, et je fais en sorte que cela soit à double sens par une écoute attentive, mettant particulièrement l'accent sur la sincérité et la franchise quant au ressenti. On me lit, on s'exprime; je réponds, tentant aussi, principalement par l'intermédiaire de mes ouvrages, de jouer un rôle de passeur. D'idées, de pensées, d'émotions et dans ce dernier cas, je crois que cela fonctionne car l'on m'a déjà confirmé que je parvenais à toucher, mes deux derniers romans, "L'île joyeuse" et "Raconte-moi Mozart..." m'ayant permis de conquérir mon public de lecteurs...assidus et il y en a! Satisfaction.

VV : Si tu devais comparer la relation entre l'auteur et le lecteur à un livre ou une histoire, quels en seraient le thème et la nature?

THM : Eh bien il ne s'agirait de toute façon pas de "L'Odyssée" d'Homère: je ne suis pas un Ulysse de l'écriture, pas de pièges ni d'affrontement dans cette relation; ce serait plutôt le genre "Vous avez un message" mais je ne suis pas non plus un Tom Hanks, mon but n'étant pas la notoriété ni de faire du chiffre... Un voyage au cœur de l'humain, pas du Jules Verne, plutôt Eric-Emmanuel Schmitt, l'émotion et la sensibilité au rendez-vous, la simplicité et le sourire "tea-time" mais sincère comme ingrédients principaux avec un zeste d'humour et quelques grammes de bons mots à la clé.

VV : Quel public rêves-tu le plus d'atteindre?

THM : Je n'ai pas réellement de préférence: je touche, ou pas, quiconque m'approche par la lecture, quel que soit son origine ou sa personnalité. J'écris sans trop me préoccuper de la cible, il y a autant de sensibilités qu'il y a d'êtres humains sur terre, tout en restant lucide et conscient qu'on ne peut pas plaire à tout le monde. J'accepte la critique surtout si elle est le fruit d'une réflexion sensée. Il m'arrive d'avoir à faire à des personnes qui me demandent comment je fais pour aboutir à près de 300 pages à partir d'une simple idée; elles sont impressionnées; je leur réponds presque invariablement: "Je ne sais pas. Je le fais pas à pas, tout simplement". Un public-cible? Peut-être celui des décideurs vivant sur un piédestal, l'objectif: les pousser à réfléchir davantage aux conséquences de leurs actes.

VV : A présent voici trois questions dans le cadre de la parution de "Au fil d'Isis", ta sixième publication:

VV : Quels secrets sont à impérativement dissimuler, selon toi?

THM : Quand on se sent plutôt différent, voire fort différent des autres, faudrait-il le dissimuler au commun des mortels? Cela relèverait de toute façon du tour de force car ce que l'on est au fond de soi-même apparaît si facilement et la moquerie serait aisée. Faut-il fuir dans ce cas? Délicat car ce serait attirer davantage l'attention ! Les secrets à impérativement dissimuler? Ceux qui nous mèneraient à être jugés, catalogués, jetés! Ceux qui poseraient un tel cas de conscience qu'il serait difficile de s'en défaire car l'on se ferait à nouveau juger immanquablement ! Terribles sont les choix de vie bien des fois: quel serait le moindre mal dans telle ou telle situation? Et se présenterait toujours une personne pour vous asséner ce qu'il pense de notre choix. Certains secrets doivent donc être aussi bien gardés que des brebis dans un champ. Impérativement pour le bien de chacun!

VV : Pourquoi a-t-on tendance à dissimuler les sentiments amoureux?

THM : La peur de se dévoiler par crainte du ridicule dans certaines situations ou circonstances nous pousse à nous rétracter, à nous taire, la discrétion et/ou la pudeur entrant en compte... Dire "Je t'aime" à quelqu'un, c'est ouvrir une porte dont on perd aussitôt la clé d'une manière irrémédiable. Comment réagira l'autre? On ne peut préjuger de rien. Cacher nos propres sentiments, c'est se lancer dans un impitoyable bras de fer avec soi-même, ce qui est loin d'être bénéfique; de toute façon, notre corps parle souvent pour nous trahir: un geste, une attitude, un regard, une parole; s'en mêlent et s'emmêlent le cœur et l'esprit, des dommages en perspective, pouvant être collatéraux, mais rien à faire: on dissimule, c'est humain...

VV : Dans quels cas extrêmes, peut-on, selon toi, divulguer un secret qu'une tierce personne t'aurait confié?

THM : S'il y a un réel danger pour la personne concernée, une sorte d'état d'urgence, cela pourrait être d'ordre médical ou sanitaire, ou encore relever de la sécurité de cette personne, il faut alors parler quelles que soient les conséquences que l'on occasionne de part et d'autre. Il y aura toujours des avantages et des inconvénients au final, comme celui d'être pointé du doigt pour avoir divulgué un secret ou une vérité dérangeante. Un cas de violence conjugale répétée, par exemple, est de préférence à dénoncer mais auprès la personne appropriée; ici entre en jeu la diplomatie, également la discrétion; quant au mensonge, il se révèle malheureusement parfois indispensable s'il s'agit de se protéger ou de protéger un être cher de la critique ou de la médisance.

 

VV : Merci à toi de faire partager à ton lectorat ces pensées si personnelles, profondes et touchantes !

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Du hasard, aux effets troublants

Songerie

Soudain peut surgir en tout lieu
L'inattendu qui certes étonne.
Hasard est le nom qu'on lui donne.
Il arrive qu'il comble un voeu.

L'inattendu qui certes étonne
Peut rendre attristés ou heureux.
Il arrive qu'il comble un voeu
Or fréquemment il désarçonne.

Peut rendre attristés ou heureux.
De bien agir on le soupçonne
Or fréquemment il désarçonne.
S'est révélé pernicieux.



De bien agir on le soupçonne,
Le tient pour bon, talentueux.
S'est révélé pernicieux.
Resté en vie, on s'abandonne.

28 août 2015

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12273116501?profile=original"La profession de foi du vicaire savoyard" n'est en fait qu'un passage du Livre IV de l' Emile de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), mais ce passage constitue un tout en soi et n'a que des rapports assez lointains avec l'oeuvre dans laquelle il est incorporé: c'est en fait une oeuvre dans une oeuvre et sa portée est beaucoup plus générale que ce traité d' éducation; aussi a-t-on pris l'habitude dès le XVIIIe siècle de considérer la "Profession comme une oeuvre à part. Il importe cependant de la replacer dans son cadre. Avec le Livre IV de l'Emile, Rousseau aborde l'  éducation morale et religieuse du jeune garçon qui vient d'atteindre ses seize ans. Il examine successivement la naissance des sentiments, et plus particulièrement de l' amitié et de la pitié; puis l'apprentissage de la connaissance des hommes autour de deux thèmes, l'utilité de l'histoire si elle est bien comprise, c'est-à-dire si elle est avant tout le récit de la vie des grands hommes, et celle des fables. Il en arrive à la fin à l' éducation de l' âme et là se pose le problème: Que croira Emile? C'est dans une formule très vivante que Rousseau présente ce problème: il suppose qu'il emmène son élève sur une montagne d'où la vue s'étend sur un magnifique paysage, celui de la vallée du Pô. Là, le vicaire expose à Emile, que ce paysage porte à la méditation et à l'adoration, comment il en est venu, lui-même, à découvrir les principes de la religion naturelle. Ce personnage du vicaire savoyard est un souvenir tiré par Rousseau de sa propre vie. En effet, dans les "Confessions", il déclare que l' "original du Vicaire savoyard" est un certain M. Gaime, précepteur dans une famille aristocratique, "jeune encore et peu répandu, mais plein de bon sens, de probité, de lumières, et l'un des plus honnêtes hommes qu'il ait connus". Rousseau affirme même que "ses maximes, ses sentiments, ses avis furent les mêmes" que ceux qu'il prête à son vicaire savoyard. Devant Emile, le vicaire commence donc par exposer comment il en est venu à la recherche de la vérité et quelles voies il a suivies. Il explique les raisons qui ont mis le doute dans son âme. Il s'est d'abord tourné vers les philosophes, surpris de la diversité de leurs opinions; mais vite, il a "conçu que l'insuffisance de l'esprit humain était la cause de cette prodigieuse diversité de sentiments, et que l' orgueil était le seconde"; aussi ces contacts avec leurs oeuvres, au lieu de le délivrer  de ses  doutes, n'ont fait que les augmenter. C'est donc seulement à la lumière du principe d'évidence qu'il peut examiner ses connaissances. Il parvient ainsi à une double certitude: l'existence de l'homme qui existe non parce qu'il pense, mais parce qu'il sent; il "est" par ses sens, lesquels sont impressionnés par les choses extérieures. L'existence des sens prouve donc non seulement l' existence de l'homme qui est sensible, mais de la matière qui agit sur les sens. Poursuivant l'examen de cette dualité, le vicaire découvre que la différence essentielle qui distingue l'homme de la matière réside dans le fait qu'il est doué d'une action propre, alors que celle-ci, inerte, ne peut être mue que par une impulsion extérieure à elle. De là, il tire deux principes: le premier, c'est que, puisque l'univers est en mouvement, "il y a une volonté qui meut l'univers et anime la nature": et d'autre part, -c'est le second principe, -puisque la matière est mue selon certaines lois, il existe une intelligence suprême. En fait, on peut par le seul "sentiment intérieur" parvenir à l' existence de Dieu. C'est l'énoncé d'un credo qui suit: "Je crois donc que le monde est gouverné par une volonté puissante et sage; je la vois ou plutôt je le sens". Tout ce qu'on peut savoir se ramène à cette simple évidence, comparable à celle à laquelle peut aboutir un homme "qui verrait pour la première fois une montre ouverte, et qui ne laisserait pas d'en admirer l'ouvrage, quoiqu'il ne connût pas l'usage de la machine et qu'il n'eût point vu de cadran". Et Rousseau reprend, dans un sens beaucoup plus limité, l'argument du pari de Pascal (voir les "Pensées" de Pascal), en vue de répondre à Diderot qui affirmait que la vie et tous les êtres organisés étaient issus d'un "jet d' atomes", se fondant sur les lois de la probabilité. Il suffit donc qu'on suppose une quantité de jets suffisante pour arriver à la combinaison qui justement s'est réalisée. Mais Rousseau répond: "De ces jets-là combien faut-il que j'en suppose pour rendre la combinaison semblable? Pour moi, qui n'en vois qu'un seul, j'ai l' infini à parier contre un que son produit n'est point l'effet du hasard". A cela, se limitent toutes les connaissances métaphysiques que nous pouvons acquérir.

Non seulement, les hypothèses des philosophes et des religions sont contradictoires, mais elles sont vaines puisqu'elles demeurent invérifiables; ce qui les caractérise, c'est leur absolue gratuité. Quelle idée, cependant, pouvons-nous faire raisonnablement de l'univers et de la place que l'homme y occupe? Il nous suffit de savoir observer, pour voir que l'homme est le roi de la terre, qu'il est supérieur aux animaux puisqu'il les dompte, aux forces naturelles puisqu'il peut les maîtriser; et s'il leur est supérieur, c'est parce qu'il pense. Roi de la terre, l'homme n'est qu'un esclave dans la société, c'est là qu'est le mal et l'homme en est le seul responsable, et même le seul auteur. En tant que substance immatérielle, l'homme est libre et seul responsable de ses actes; s'il se soumet aux injonctions de la nature, il est dans la vraie voie et nul mal ne peut naître de lui. Puisqu'il y a un Dieu et que, de toute nécessité, c'est un Dieu juste, cette part immatérielle de l'homme sera récompensée par Lui selon ses mérites. Puisque les méchants ne sont pas toujours punis sur la terre, il est inévitable qu'ils reçoivent un châtiment dans l'au-delà. L' âme est donc immortelle. Mais de ce Dieu nous ne pouvons théoriquement rien dire, car sa grandeur est impossible à concevoir; nous pouvons cependant déduire du principe d'évidence ses qualités nécessaires: Dieu est créateur de toutes choses, il est éternel, intelligent, bon et juste. Ces quelques convictions bien assurées permettent au vicaire savoyard de dégager une morale. "En suivant toujours ma méthode, je ne tire point ces règles des principes d'une haute philosophie, mais je les trouve au fond de mon coeur écrites par la nature en caractères ineffaçables"; "trop souvent la raison nous trompe, nous n'avons que trop acquis le droit de la récuser, mais la conscience ne trompe jamais; elle est le vrai guide de l'homme". Il s'ensuit que "tout ce que je sens être bien est bien, tout ce que je sens être mal est mal": grâce à la conscience, c'est la pratique de la vertu que l'homme tire son bonheur. Il est inutile de chercher quelle est la nature de la conscience, de tenter de savoir, par exemple, si elle est innée ou acquise; il suffit que nous la sentions en nous-mêmes. Dans un élan mystique, le vicaire compose un hymne spontané à la conscience. Il assure que lorsque l'homme s'adresse à Dieu, il doit, non pas l'importuner par ses demandes, mais bien le louer et le remercier sans cesse d'avoir "donné la conscience pour aimer le bien, la raison pour le connaître, la liberté pour le choisir". Quelle devra être l'attitude d'Emile à l'égard des dogmes? De ce qui vient d'être exposé, résulte une religion "naturelle"; celle-ci est opposée aux religions révélées. Les révélations de Dieu, ce sont les beautés et l'harmonie de la nature, c'est la voix de la conscience; pourquoi imaginer des révélations directes, celles qu'on nous propose sont de toute évidence l'oeuvre des hommes "dès que les peuples se sont avisés de faire parler Dieu, chacun l'a fait parler à sa mode et lui a fait dire ce qu'il a voulu". D'où les contradictions, les différences qui séparent les religions. Le culte "que Dieu demande est celui du coeur"; ce culte-là est uniforme, il est universel". Toutefois les préférences du vicaire vont au christianisme: "Je vous avoue que la majesté des Ecritures m'étonne, la sainteté de l' Evangile parle à mon coeur"; pour lui, il est incontestable que si "la vie et la mort de Socrate sont d'un sage, la vie et la mort de Jésus sont d'un Dieu". Résumant son propos, le Vicaire savoyard définit en conclusion, l'attitude qui sera finalement adoptée: servir Dieu dans la simplicité de son coeur, négliger les dogmes ("le culte essentiel est celui du coeur"), s'anéantir devant la "majesté de l' Etre suprême"; vis-à-vis des autres hommes, pratiquer la tolérance, la charité chrétienne; vis-à-vis de soi-même, écouter la voix de sa conscience et pratiquer la vertu.

La "Profession de foi du vicaire savoyard" n'est donc pas seulement une effusion lyrique en face du spectacle de la nature, c'est un raisonnement bien conduit et fort rigoureux. Rousseau ne recule pas ici devant l'abstraction, la métaphysique pure, mais il le fait dans des termes pleins de simplicité et de clarté, avec une constante élévation de pensée et d'expression. La "Profession" trouve ses sources non seulement dans ce profond mouvement d'idées, issu à la fois de la philosophie déiste et de la compénétration de plus en plus profonde des sciences de la nature et de la philosophie, mais beaucoup plus encore de l'évolution de l'attitude de Rousseau lui-même sur ces problèmes. Déjà dans l' "Allégorie sur la révélation", dans la "Lettre à Sophie" et dans la "Nouvelle Héloïse", Rousseau avait posé les premières bases de ces principes qu'il devait définitivement adopter. Jamais, à l'avenir, il ne s'écartera de ses conclusions, il le signalera dans sa dernière oeuvre (voir "Les rêveries d'un promeneur solitaire"). "Emile" parut en 1762, mais il semble que la "Profession" fut écrite dès 1758; elle aurait été complètement remaniée après que Rousseau eut pris connaissance du livre d' Helvétius "De l' Esprit". La "Profession" est, en effet, dirigée directement contre les philosophes, contre Voltaire demeuré cependant vaguement déiste, mais surtout contre Diderot et ses amis. Elle est également dirigée contre les religions révélées, dont Rousseau avait été particulièrement à même, puisqu'il était un protestant converti au catholicisme, de se rendre compte. L'affirmation de cette foi dégagée de tout dogme précis, cette conviction sentimentale, toute faite d'effusions, venaient en leur temps. La "Profession" connut immédiatement un immense succès. Elle suscita un profond mouvement d'idées religieuses et ramena sinon à la religion, du moins à la religiosité, bien des âmes. Ce n'est pas seulement sur les idées religieuses que cette oeuvre exerça son influence, mais sur les moeurs et sur la littérature, et cela d'une manière très durable, puisqu'elle ne fit que grandir et se développer. Plus que ses contemporains, ce sont certains révolutionnaires, Robespierre en particulier (voir "Discours sur l' Etre humain") et surtout les premiers romantiques, qui ont véritablement vécu les principes que Rousseau avait exposés. La "Profession de foi" demeure, encore de nos jours, une des plus belles pages de Rousseau et, littérairement, une des plus réussies.

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Annette JGobert

Fatiguée et peu enclin à rigoler, son visage est tendu, ses yeux cernés.  Ses cheveux mal coiffés lui donnent l’âge qu’elle n'a pas. Ses journées se remplissent rapidement de tout un tas d’ennuis qu’elle porte à bras le corps. La vie rêvée n’a pas existé. La réalité est tout autre et la misère a commencé quand elle est entrée comme employée dans cette petite entreprise de banlieue.  Un travail de bureau facile et sans conséquence pense-t-elle.

Cela fait longtemps qu’elle n’est plus partie se promener à la campagne,  sur les flancs de cette vallée qui lui est si chère. Ses racines sont là, attachées à cette petite maison vieillissante. Que de regrets dans ses pensées dès qu’elle y songe. La vie n’est vraiment pas juste.

Des ouvriers de passage, jeunes en majorité, ne parlent pas notre langue. Elle a posé des questions au début  mais elle n’a pas reçu de réponses correctes. 

Un matin, à son arrivée, un jeune homme malade est étendu dans le hall. Son regard, attiré par la maigreur de l’homme, lui donne des frissons. Personne n’appelle  le médecin et un de ses collègues lui conseille de rentrer dans son bureau rapidement.  Intriguée, elle reste sur sa curiosité, son besoin de savoir. Mais l’homme a disparu brusquement sans explication.  Son travail terminé, elle quitte cet endroit installé dans un ancien hangar et assez vieillot.  Un garage à l’ancienne qui recèle des trésors insoupçonnés. Elle ne sait pas encore ce qu’elle va découvrir.

Son travail consiste à tenir la comptabilité à jour. Des entrées, des sorties et quelques clients parcourent cet endroit ouvert à tout vent.

Les ouvriers changent régulièrement et elle a l’impression qu’ils ne font que passer. Chaque semaine, de nouvelles têtes qui ne s’intègrent pas et qui disparaissent rapidement. Sa curiosité est activité par l’arrivée sur le parking de camionnettes bâchés qui ne déposent, ni ne prennent de colis. Un spectacle étrange que ce ballet de fourgons de passage.  

Annette veut savoir. Prétextant un surplus de travail, elle reste tard un soir et profite pour visiter l’arrière de ce hangar. Des salles closes ne sont pas accessibles, toutes fermées de gros cadenas.  Son intérêt est maintenant captivé dans des bruits sourds, comme étouffés. Des murmures que l’on veut silencieux. Une conversation inaudible traverse la cloison.

Elle est convaincue qu’il se passe des évènements bizarres dans l’entreprise où elle travaille,  des agissements qui ne sont pas honnêtes.  Elle se promet d’y revenir un soir et d’en connaître le secret.  La journée lui paraît longue, interminable. Elle est nerveuse. Des nouvelles camionnettes ont fait leur apparition ce matin. D’autres sont parties tôt.

L’angoisse l’envahit. Et si..

Arrivée enfin à la fin de sa journée, Annette s’échappe vers l’arrière du bâtiment et reste dans l’ombre. Un employé a ouvert une porte et dépose de l’eau dans un seau. Cette fois, elle va savoir.

Pénétrant ainsi dans cette salle sombre, obscure,  elle se trouve nez à nez avec des personnes en errances, des migrants fatigués. Couchés à même le sol, les plus fragiles se reposent. Tous ces allochtones sont épuisés. Chacun a un regard noir comme la nuit. La solennité des lieux donne le frisson et Annette, humble, les regarde comme dans un miroir à double face. Reflet de l’humanité déchantée, maîtres de leur destin, ces hommes cherchent une vie meilleure. Miroirs vivants, ils réinventent un autre monde. Abandonnés, largués, refusant les litanies funestes, ils sont partis vers d’autres lieux avec l’espoir comme bagages.

Annette a décidé de les aider comme le font tous les autres membres de l’entreprise. Donner son temps, son énergie pour que ces gens trouvent enfin un point d’attache meilleur que celui qu’ils ont quitté. La tâche est immense.  Ces gens sont ramassés sur le bord des chemins par des bénévoles qui les soulagent quelques jours des affres du voyage.

Réalité ou pérégrination imaginaire. Peu importe la vérité. Annette n’arrête plus depuis ce jour. Elle donne sans compter à ces gens jetés sur les routes et à la recherche de sécurité, d’une vie d’homme libre et d’un repos bien mérité.

 

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LES PERLES DE LA VIE...

Les perles de la vie

Ont un bel orient...

Les perles de ma vie

Donnent du corps au présent...

Un amour de jeunesse

Qui jamais ne mourra

Un trop plein de tendresse

Accompagne les pas...

Cette consolation

Qu'un jour j'ai décidée

Même si elle fut fiction

M'a sans nul doute aidée...

Les perles de ma vie

Ont un bel orient

Les perles de ma vie

Donnent du corps au présent!

Et puis ces deux princesses

Qu'inconsciente je conçus

Ont su mettre joliesse

Sur un cœur éperdu...

Alors au fil du temps

Des talents oubliés

Sont sortis du néant

Et ont su m'exalter...

Les perles de la vie

Ont un bel orient

Les perles de ma vie

Donnent du corps au présent!

Mais tout à coup la faim

De vérité première

Peu importe la fin

Faut juste être sincère...

Et la vie sourira

Il n'est jamais trop tard

Le bonheur surgira

Porté par le hasard...

Les perles de la vie

Ont un bel orient

Les perles de ma vie

Donnent du corps au présent

J.G.

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Fenêtre sur rue

8 heures, il est là debout au coin de la rue, avec son chapeau noir et sa canne. Il regarde la fenêtre au deuxième étage juste en face. Les gens du quartier ne le connaissent pas. Il l'appellent le "p'tit vieux du home des Lilas". Quand on le salue, il ne répond pas, il marche sur le trottoir sans voir les gens. Souvent, il parle tout seul.

Chaque matin, il est là. Il regarde toujours la même fenêtre. Il sourit, parfois une larme coule sur sa joue.

Derrière sa fenêtre, Léa l'ado a remarqué le manège du p'tit vieux. Il lui fait un peu peur. Il n'a pas le même regard que les autres mecs posent sur elle. Mais, on ne sait jamais ce qu'un homme a dans la tête, surtout un vieux.

Elle sort quand il est parti.

Une infirmière vient le chercher. Il ne résiste pas, il se laisse raccompagner au home des Lilas.

Ouf! L'infirmière a terminé ma toilette et est allée s'occuper des autres pensionnaires. Elle n'est pas commode. Elle me parle comme si j'étais un vilain petit garçon qui n'a pas fini de manger sa soupe.

C'est l'heure, j'enfile ma veste, je prends mon chapeau et ma canne. Le petit déjeuner est servi dans la salle à manger mais d'abord, j'ai un rendez-vous.

Je me dirige vers la sortie. Dehors, je respire l'air printanier, l'air de la liberté. Elle sera là.

Le coeur battant, je marche en comptant mes pas. Au vingt-troisième, je m'arrête, je lève les yeux. Je vois sa fenêtre.

Presque aussitôt, elle s'ouvre, mon coeur cesse de battre. Elle apparaît avec ses longs cheveux blonds. Elle ressemble à un ange. Elle porte la robe à fleurs qui lui va à ravir. Son parfum de rose flotte dans l'air. Elle me sourit, me fait un signe de la main et me crie:

"Bonne journée Louis!"

C'est toujours la plus belle maman du monde.

D'un pas léger et le coeur joyeux, je pars à l'école...

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Nefer-Aken-Aron

                                         Nefer-Aken-Aton

La danse était en moi depuis le commencement.

Inscrite en hiéroglyphes sur les parois du temps des Temples, mes mains s'élèvent vers le soleil et mon visage, à jamais figé pour l'éternité, respire l'extase.

Oui, je dansais devant lui, celui que l'on m'avait donné pour époux : Aménophis III, le pharaon vieillissant. J'avais quinze à peine et la Reine Tyi, grande épouse royale, originaire du pays de Mitanni elle aussi, m'avait prise sous sa protection. C'est pourquoi, malgré mon jeune âge, j'occupais une place privilégiée à la cour du Pharaon.

C'est avec joie que j'y avais retrouvé le fils d'Aménophis III. Jadis, le Roi Tousrata mon père, les avait reçus en très grande pompe et fait visiter le royaume. Je m'appelais alors Tadouchépa. Souvent, dans les jardins, nous partagions ensemble tous les jeux de l'enfance. Je l'entourais de mes bras et mon cœur éclatait de tendresse: je l'aimais plus que mes frères.

Il était mon cadet de cinq ans. Je l'emmenais au Temple où nous adorions le Dieu Unique. Malgré son étonnement, il me suivait et me racontait la Religion d'Egypte où l'on vénérait plusieurs Dieux et Déesses, 

Le Pharaon était un Dieu Vivant, détenait tous les pouvoirs et les prêtres d'Aton tenant à leurs privilèges, maintenaient le Peuple dans l'ignorance et la superstition. A présent que l'Egypte était devenue ma patrie, je continuais à vénérer le Dieu Unique et Tyi,  l'appelait Aton et son emblème était le soleil.

Aménophis IV et moi avions repris nos jeux d'antan sous le regard de la Reine Tyi.

Un jour, il m'appela "Princesse". et un chant s'éleva dans mon cœur, dans mon âme.

Lorsque tu as dit "Ma Princesse"

Alors le ciel s'est déchiré :

Ton nom était inscrit dans le sillage des étoiles

J'ai reconnu ton visage : Ta silhouette s'est transformée :

Elle est devenue l'Incandescence du Temps

Mes mains se sont tendues vers toi pour en dessiner les contours.

Elles ont été arrêtées par les parois doubles

des Silences de l'Infini.

Mon corps a éclaté dans des vibrations

de Lumière.

Tout s'est illuminé et l'Amour a transfiguré

Ton absence, ton absence, si longue.

Enfin tu étais là :

Je saisissais ton souffle, à jamais présent 

dans mon Eternité;

Voici le message qu'il m'a été donné de te transmettre :

"Si tu veux pénétrer dans le labyrinthe et connaître la jubilation de l'ivresse de mes pensées, il faudra vaincre

l'impatiente violence dont tu es encore meurtri, saisir en toi toutes les forces vives de la tendresse et de

la douceur : elles seront désormais, ta seule loi." 

Rolande Quivron

 

 

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De la rigueur de l'orthographe en poésie

Propos

Je me sentis déconcertée quand un éditeur m'apprit que les poèmes que j'écris sont émaillés
d'étourderies.
À mes yeux, les fautes font taches. Si cependant ne les vois pas, c'est qu'elles ne sont pas très graves.
Elles n'ont jamais fait obstacle au plaisir que certains ont eu en murmurant mes élégies, ignorant tout comme moi les imperfections de l'écrit.

Je fais face, par vanité peut-être, à l'urgence de détecter les négligences de ma plume. Bien souvent ne les perçois pas. Cette recherche est forte ingrate. Lors me dis pour me consoler
que toutes ces étourderies sont de petits grains de beauté.

26 août 20015

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Un renouveau

Soliloque

Je mets fin à l'ancien régime.
Un autre temps va commencer.
Aurai-je le coeur à danser
Bien protégée de la déprime?

Je veux mener mon existence
En relevant quelques défis.
À mon instinct souvent me fie
Pour attirer la douce chance.

Des habitudes qui me lient
Me mènent certes à la paresse
Et elles font que je délaisse
Tout effort sous lequel on plie.

Or l'énergie qui est en moi,
Quand je lui permets d'être active,
Me fait devenir inventive
Et nourrit un courant de joie

.

C'est pour honorer ma vieillesse
Que je prépare un renouveau.
Aurai-je la grâce qu'il faut
Pour accomplir cette prouesse?

Je laisse croître mes envies
Quand elles me semblent heureuses.
Profitables ou généreuses,
Elles m'offrent un regain de vie.

26 août 2015

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Aujourd'hui, je médite ...

Ma maison je la veux un monastère.
Depuis longtemps je rêvais d'un havre de paix,
Et pensais plus jeune à Saint Léon Sur Vézère,
Ses couleurs et ses temples enfantins m'enchantaient.

Ses statues souriantes de bonheur en tailleur assises,
Ses moinillons en rouge qui chantaient des louanges,
Priant un saint homme n'ayant pour toute chemise
Qu'une robe pour bagage dépourvue de franges ;
Et n'ayant ni toit et qu'un simple vêtement
Avec toujours le sourire et le visage rayonnant !

Prêchant au cours des siècles qu'il y avait encore du bonheur
A trouver chez l'homme, à force de recherche,
N'étant plus de ce monde mais sa subtile lueur
A bâti des dômes où l'innocence comme l'oiseau s'y perche.

N'étant plus de ce monde mais omniprésent.
Celui qui clame une vérité qui soudainement nous interpelle,
Le clairvoyant dénudé et bien souvent errant
Ne s'éteint jamais et vogue dans des sphères éternelles.

Les hommes prient donc un philosophe et non un religieux.
Et ses paroles me conviennent comme à tant de monde
Qui pensons qu'à ne plus user de bâton odieux
Il n'y a plus de douleur ni de rancoeur qui se fondent.

Ma maison je la veux un monastère.
Entrez donc mais baissez la voix,
Venez-y comme l'on vient en prière,
Et déposez sur le seuil l'aigreur de vos poids.

Venez pour y rire ou pour y chanter,
Car savez-vous j'y médite sur les années ;
Il ne m'est plus permis je l'ai enfin compris
De bondir comme par le passé tel un cabri !

Saint Léon Sur Vézère n'est pas loin,
Mon but de jeunesse est atteint,
Mais ce grand silence qui règne en son cloître fermé
Me laisse à sa porte sceptique encore de la pousser !

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12273113482?profile=originalLa "Lettre sur la tolérance" est un ouvrage du philosophe anglais John Locke (1632-1704), publié sans nom d'auteur en 1689. Il marque une étape importante dans la conquête du principe de tolérance dans la pensée moderne: Locke envisage tout d'abord la question sous l'angle religieux en soulignant le fait que la tolérance constitue le caractère essentiel de l'Eglise du Christ, laquelle est fondée sur le principe de la charité étendu à l'ensemble du genre humain, "y compris les non-chrétiens". Il en arrive ensuite à considérer la question sous l'angle juridique, en se proposant de déterminer exactement les limites des compétences respectives de l'Eglise et de l' Etat. La juridiction du magistrat est fonction du but pour lequel la société politique est constituée: tutelle des biens civils, vie, liberté, intégrité et bien-être du corps, possession des biens extérieurs; elle ne peut donc s'étendre à ce qui regarde le salut des âmes. En outre, le pouvoir du magistrat civil consiste uniquement dans la "co-action", il ne pourrait donc en aucun cas s'exercer sur la conscience par elle-même incoercible. En tout état de cause, même si l'autorité civile se révélait efficace pour plier l'esprit humain, il serait injuste d'imposer sa propre foi, professée par le prince, au détriment de la grande variété des opinions religieuses. Quant aux limites du pouvoir ecclésiastique, Locke affirme que l'Eglise, en tant que société "libre et volontaire" constituée en vue de servir Dieu publiquement pour atteindre au salut des âmes, ne peut lier personne de façon absolue; le contraire relevant exclusivement de la compétence de la magistrature civile destinée à la sauvegarde des biens extérieurs. Les seules armes, dont dispose la société religieuse envers ses propres membres, sont les exhortations, les avertissements, les conseils et enfin l'expulsion des récalcitrants, ou excommunication, pourvu que celle-ci ne soit pas accompagnée de paroles offensantes et d'actes de violence de nature à léser en quelque façon les droits civils et humains de l'individu. L'adhésion du prince elle-même ne peut conférer à une Eglise une autorité qui ne lui revient pas naturellement: lorsque cela se produit, l' Etat outrepasse ses droits. L'auteur insiste alors sur la nécessité d'une séparation nette des deux pouvoirs, en faisant remarquer que l'opinion selon laquelle le pouvoir civil serait fondé sur la Grâce et celle qui estime que la religion doit être propagée par la force, ont été de tous temps la cause d'une infinité de guerres et de violences. Le droit de gouverner les peuples ne donne pas au magistrat la faculté de désigner la vraie religion et, partant, d'attribuer à une Eglise donnée la prérogative de l' orthodoxie. Quant aux articles de la foi, qui se partagent en dogmes spéculatifs et en principes de morale, Locke estime que la croyance aux premiers ne peut être imposée du fait qu'il ne dépend pas de notre volonté de croire ou de ne pas croire: les seconds, en revanche, étant donné que les actions morales se réfèrent à la vie civile, ressortent de la compétence du magistrat, avec cette limitation précise toutefois: que le pouvoir civil doit s'opposer uniquement aux doctrines qui se révèlent contraires aux fins desquelles il a lui-même constitué, et en général, au bien de l' Etat et aux bonnes moeurs. Parmi ces doctrines, la plus dangereuse pour la paix de l' Etat, est précisément celle de l' intolérance, qui tend à violer "les droits de l' Etat, les biens et la liberté des citoyens". Mais parvenu à ce point du raisonnement, Locke, en contradiction flagrante avec le reste de son oeuvre, procède à une restriction singulière à l'égard de l' Eglise catholique, laquelle, dit-il, ne peut être tolérée par le magistrat civil, car "ceux qui y adhèrent passent de ce fait même sous le pouvoir d'un autre Prince", le Pape, qui réunit en lui les qualités de chef de l'Eglise et de souverain d'un Etat. On ne peut également tolérer les athées pour qui "les promesses, les contrats et les serments, liens de la société civile, ne sont ni sacrés, ni inviolables", par le seul fait que, sans croyance en Dieu, "toute chose se corromprait dans le monde". L'auteur conclut en revendiquant l'égalité des droits pour toutes les confessions (y compris la Romaine) et sans exclure "ni les païens, ni les mahométans, ni les juifs". Le principe de la tolérance est donc entendu ici avec une largeur de vues jusqu'alors insolite: ce principe apparaît comme essentiel dans la conception politique de Locke, fondée sur le droit de libre-association, doctrine dont il avait tenté une application pratique en 1669, lorsqu'il fut chargé d'établir un projet de constitution pour la colonie nord-américaine de la Caroline.

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12273118893?profile=originalLes "Pensées sur la comète" est un ouvrage critique de Pierre Bayle (1647-1706), publié en 1683. Son titre exact est: Pensées diverses écrites à un docteur de Sorbonne à l'occasion de la comète qui parut au mois de décembre 1680. Partant du phénomène céleste qui avait soulevé de nombreuses discussions parmi ses contemporains, Pierre Bayle saisit le prétexte qui lui est ainsi offert pour faire prévaloir certaines idées qui firent alors scandale. Trop de préjugés séculaires, remontant principalement au moyen âge, ont accordé une valeur pseudo-scientifique à l'influence des comètes sur la terre et sur les événements de l'histoire. Mais cette erreur doit être reléguée avec les autres; elle n'est que l'un des nombreux effets de la superstition. Bayle démontre qu'il faut considérer plus les choses en elles-mêmes que leur nom, et que, si l'on y réfléchit bien, de tant de maux, l' athéisme est peut-être  moins nuisible que l' idolâtrie. En tout domaine, il est nécessaire de conserver une entière liberté d'opinion, y compris celle de penser qu'il n'existe peut-être aucun Dieu, tout au moins tel que les religions révélées ont l'habitude de l'entendre. L'importance de cet écrit, qui mérite qu'on lui fasse place à côté du monumental "Dictionnaire historique et critique", réside dans le fait que Bayle s'y fait le défenseur intransigeant de la liberté de discussion: c'est grâce à cette liberté que, graduellement, après tant de luttes religieuses et de conflits de pensée, se forma l'esprit du siècle des lumières dont naîtra l'Europe modenre. Cet écrit, imprimé en Hollande, fut interdit en France, et l'auteur fut accusé d' athéisme.

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