Quelques unes de mes toiles (Acrylique) Je pensais que c'était plus facile que l'huile, et bien pas du tout du tout ! A chaque toile c'est un challenge. Ces 3 dernières sont dans l'esprit du peintre Anglais TURNER. j'espère qu'elles vous plairont !
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Il était né au milieu de la mer
Sur une île de granite rose recouverte de genêts jaunes.
Parfois il prenait un bateau ivre pour partir au bout de ses rêves
Et affronter sa peur et tous ses démons intérieurs.
Il partait sous un ciel bleu quand le vent était fort
Et naviguait des jours durant
Se laissant bercer par l’océan, ses vagues et son chant.
Quand il avait dépassé tous les horizons
Et que ses voiles s’étaient perdues dans la nuit du temps
Il mettait le cap sur son île.
Dans les petits matins blafards celle-ci surgissait soudain de la brume,
Masse de granite rose surmontée de genêts jaunes.
Alors il accostait lentement et laissait sur le sable humide
Son bateau échoué, ses rêves et tous ses espoirs.
Il est cinq heures, peut-être plus. Antoine s’éveille doucement avec un sentiment étrange, il flotte dans son lit mais avec l’impression sournoise d’être enfermé dans une pièce où l’oxygène viendrait à manquer !
Normalement en sortant d’un rêve, l’humain ouvre les yeux, revient à la réalité et se pose des questions sur les pensées qui l’assaillaient quelques instants plus tôt :
cauchemar peuplé d’êtres plus horribles les uns que les autres, sanguinolents ou au moins… cassés,
chiens qui cherchent à mordre sans raison apparente et vous courent après la bave aux coins des crocs,
rêve érotique avec des mannequins de porcelaine, tout droit sortis du Crazy horse saloon ou d’une plage de Malibu,
ou tout simplement, un rêve fou mélangeant des situations toutes plus délirantes les unes que les autres.
Mais ce matin là, Antoine ne se réveille pas tout à fait. Il se laisse flotter dans cette étrange ambiance peuplée de zones froides et opaques. Des ombres grises passent dans un silence irréel, des ombres qui se croisent, semblent s’éviter entre elles, mais font demi-tour et reviennent frôler Antoine. Une image vint à son esprit s'imposa et lui dit :
- Chasses-les ! Elles ne sont rien. C’est toi qui leur as demandé de venir, tu as besoin de créer donc de souffrir, pour cette raison tu pioches sans cesse dans la zone grise de ton mental ! Je dis bien mental pas cerveau, tu sais ce que tu dois faire, tu es le seul à pouvoir gérer cette situation de stress dans lequel tu es à cet instant. Chasses-les, elles ne sont pas méchantes, simplement venues à un endroit où elles n’ont rien à faire car elles sont le passé, et souviens-toi, seul le présent compte, l’avenir n’existe pas encore ! Chasses-les !
Antoine s’éveilla un peu plus, sentant enfin le drap sous son corps. Alors commença une séance de respirations contrôlées apprise avec Anne. Quand ce rituel fut sur le point de s’achever, Antoine vit passer une ombre grise qui semblait chuchoter, une autre vint à son tour avec un sourire… étrange pour une ombre ! Antoine décida de parler à son tour !
Que voulez-vous ? Laissez-moi ! Retournez à votre place, mon présent n’a pas besoin de vous, je ne vous chasse pas, je vous demande de partir. Toi là ! Oui toi la plus grise de toutes, pars s’il te plaît ! Et toi aussi éloignes-toi, allez en paix, laissez-moi me réveillez sans vous, au présent !
Une par une, Antoine chassa les ombres et le volume de la chambre sembla redevenir plus grand, plus libre, il avait réussi à vaincre ses propres angoisses, sans savoir d’où et pourquoi elles avaient envahi une fois de plus son mental. Ses paupières allaient s’ouvrir quand une ombre grise, presque blanche s’avança.
- Pourquoi es-tu restée, pars, toi aussi, laisses-moi ! Pensa Antoine.
Je ne peux pas partir.
Pourquoi ne pars-tu pas, rien ne te retient ici ?
Si, toi, tu me retiens. Tous les humains me retiennent dans ton monde. Ils me chassent au lever puis me rappellent quelques instants après pour n’importe quelle raison, le café trop froid, la confiture trop sucrée, le temps qui ne convient pas. Ils rient devant une image drôle, tournent les pages du livre et m’appellent en pensant aux arbres abattus pour le fabriquer. Ils savourent un plat qu’ils apprécient par-dessus tout, et après le repas m’appellent pour me faire voir les produits chimiques qui ont servi à la culture de ce qu’ils viennent de manger. Ils sont prêts à changer le monde politique actuel car le dirigeant en place est plus que décevant, et ils m’appellent car ils ne trouvent pas ou plus de remplaçant. Ils sont compliqués les humains, alors je suis sans cesse obligé de partir et de revenir. Tu as pu chasser tes autres ombres, mais moi tu ne pourras pas, je partirai quand tu le voudras vraiment, et puis tu me demanderas de revenir, alors je reviendrai. Mais maintenant que tu me connais, tu pourras me demander de partir plus vite. J’avoue que je ne sers à rien mais c’est vous les humains qui me demandez sans cesse d’exister ! Ne pourriez-vous pas me chasser pour toujours ? Vous vivriez mieux et je pourrais enfin me reposer, cela fait des millions d’années que vous m’obligez à être présente !
Antoine était perplexe. Une ombre qui lui parlait, enfin qui… communiquait ! Une ombre, ou une pensée ? Un souvenir, un elfe, un ange gardien ou un ange tout court. Une entité, une création de l’esprit ?
Mais qui es-tu ? Demanda Antoine. Tu me parles depuis un moment, je sens que tu n’es pas méchante, que tu sembles... ennuyée d’être là, mais qui es-tu, ombre presque blanche ?
Vous m’appelez tristesse !
Tristesse ! Oui, en effet, je te connais ! C'est gentil de t'être présenté à moi. Tu ne m'en voudra pas si je t'oublie le plus souvent possible ?
Non, au contraire je serai contente de pouvoir me reposer un peu, mais si tu veux m’aider, dis à celles et ceux qui t’entourent de faire de même. Je voudrais bien moi aussi pouvoir sourire un peu.
Je te promets Tristesse de faire passer le message dès maintenant, après tout pourquoi ne pas essayer d’avoir une pensée un peu moins grise que d’habitude. Si Sagan a écrit Bonjour tristesse, pourquoi ne pas essayer de penser le contraire ? Alors.... Au revoir Tristesse !
Merci Anne, pensa Antoine.
CONCILIABULE
et
SAUVE-QUI-PEUT
deux aquarelles
d'ADYNE GOHY
ont été inspirées
par
UN VERS PAS SOT !
de
RAYMOND MARTIN
Un problème sans gêne se promène dans l’allée ensablée, où des passereaux sont réunis autour d’un frêle vermisseau au regard effaré, comptant sur l’aide du problème sans gêne pour ne pas être le fruit de la becquée !
« Ce n’est pas mon problème » dit le problème sans gêne - à l’heure de la sieste, tout m’est égal. Résiste, et après ma sieste je jugerai ce que je peux faire pour toi. »
« Et combien de temps peut te prendre la sieste ? » demande le vermisseau.
« Cela dépend !» répond le problème sans gêne.
« Dépend de quoi ? » demande le vermisseau très inquiet.
« Cela dépend du problème que j’ai eu à régler avant ma sieste » répond le problème sans gêne.
« Assez discuté » disent en chœur les passereaux réunis – nous en avons assez de votre discussion stérile, nous avons faim !
« J’ai trouvé le problème ! » dit le problème sans gêne.
« Et alors, et moi dans tout ça ? » demande le vermisseau, « est-ce bon pour moi ? »
« Exact » répond le problème sans gêne - tu es trop minus, minuscule, pour satisfaire toute la bande de passereaux grassouillets, d’ailleurs ! »
- Tu es sûr ?
- Oui – lui répond le problème – car le temps qu’ils se disputent pour savoir qui va commencer le repas en premier, tu auras eu le temps de te cacher !
- Alors maintenant qu’ils discutent, je me sauve ! dit-il en serpentant vers une motte de terre.
Tout à coup, les passereaux se trouvent dans l’obscurité.
« Mais, nous sommes en pleine journée » dit un passereau.
C’est le problème sans gêne qui, ayant retrouvé sa gêne, en a recouvert les passereaux !
Un bruit sec se fait entendre.
« Oh, Le tonnerre !» dit le vermisseau – il commence à pleuvoir !
« Hâte-toi » lui crie la motte de terre – je vais te protéger.
Et il s’engouffre dans cette île salvatrice !
Raymond MARTIN
2015
Un partenariat d'
Arts
Songerie
Tourne la terre où la vie bat!
Son énergie semble éternelle,
En chaque lieu se renouvelle.
La création n'arrête pas.
Le bonheur est au tout début
Exceptionnellement perdure.
Paraissent rares ceux qui n'endurent
Que des chagrins et rien de plus.
Les terriens certes se transforment
Face à la magie du progrès.
Ils veulent vivre bien malgré
Les dangers devenus énormes.
Lors, ils prennent des habitudes,
Faisant oublier comme il faut,
Compensant ce qui fait défaut.
Rendant douce la solitude.
Là où prédominent des fous,
De se retirer d'un espace,
De se faire une carapace,
N'est pas concevable du tout.
Je m'aperçois avec regret
Que se dissout mon innocence.
Je ne trouvais de l'importance
Qu'à mon présent vécu de près.
11 juin 2016
Ce soir j'ai franchi votre regard,
sous l'ombre entrebâillée par un croissant lunaire,
mes yeux mariés aux vôtres sont devenus lumière,
mes lèvres gouteuses de vous,
de l'instant à nous seuls consacré,
ont murmuré des vers,
un chant profond et bleu, des mots tout à l'envers,
créés juste pour nous ;
s'aimer à ce point là est un acte créatif,
une douce rébellion contre l'heure tapageuse,
ces étreintes trop pressées, sans visage,
dans le noir d'un soir !
Sous l'ombre entrebâillée par un croissant lunaire,
Nos corps ne font que suivre nos deux cœurs partenaires,
nos gestes méticuleux mais fous,
s'accordent et se répondent !
NINA
Qu'on n'me dise pas que c'est de l'art
De montrer plate réalité
Veux autre chose pour mon regard
Un peu d'esprit et de beauté!
Au creux des jours et de l'ennui
On les connait toutes les défaites!
Alors, venir preuves à l'appui...
ça fait bailler, loin de la fête!
Grand Dieu! On a besoin de rêver
Plutôt que d'se gratter les poux!
C'est ennuyeux et dépravé
Et l'art se doit d'être un peu fou...
Transcender les réalités
Flirter avec ses fantaisies
Redécouvrir le goût d'aimer
Oui, Charlot avait du génie!
Arrêter le pont des soupirs
Et découvrir des joies réelles
Aussi réapprendre à sourire
C'est sûr la vie peut être belle!
Fi, du ciné-réalité
Faisons booster l'imaginaire
Ne voulant plus être agressé
Par un quotidien suicidaire!
Alors, parfois quelques joyaux
Pourront surgir des caméras
Les recevrons tel un cadeau
Qu'on veut serrer entre ses bras!
J.G.
ABSURDITE DE L'ABSURDE…
A: Endogène-Bear1 - PATRICK
…Vois-tu le monde change
Il éternue derrière son masque à gaz
Des millions de tonnes de pesticides
Jetés par-dessus bord de nos têtes
Nos mers ne sont plus nos mers
Nos rivières, nos ruisseaux, nos pluies
Tout est contaminé par l'horreur
*****
Et on décide d'emboîter le pas
De créer des zones de guerres
On vend les armes pour les expérimenter
On tue, on incarcère, on détruit…
Et notre monde change sans se plaindre
Toi, ami tu te révoltes
Tu clames tes mots derrière les ombres
On ne fait plus le poids
Puisqu'ils décident à notre insu
Ils n'ont nullement besoin de nos signatures
Ni de nos identités lavées dans l'indifférence
*****
On n'a pas besoin d'isoloir, d'urne
Nos votes ne valent rien
Nos cris ne les frôlent jamais
Nos meetings, slogans enflammés
Ne sont que des passes partout
Puisque nous sommes encadrés par des milices
Nos syndicats des joueurs de l'absurde
Il suffit d'une balle anonyme
D'un mot pour la camisole
Nous sommes des voyants dans les ténèbres
Ils décident de combler notre vide
Par des séries de feuilletons à l'eau de rose…
*****
" Le ciel par-dessus le toit " n'est plus bleu
Il conjugue les erreurs des hommes
Crie ami, le monde est sur un cratère
Il suffit d'un faux pas pour tout éjecter
Les miasmes des déchets sont au pôle nord
Ils sont dans les bras du pôle sud
Le Mont Everest, le Mont Blanc, l'Annapurna…
La Seine est dérangée par les vapeurs
Et Paris, Londres, Rome… sont asphyxiées
Ecris, je ne fais que passer
Demain je serai un autre voyageur
Avec un autre crâne, un être masqué qui étouffe
Sous l'amas de l'avancée des progrès…
***
© * kacem loubay *
Mercredi 18 Octobre 2006
00 H 45
Khénifra – Maroc
Le poète de l'autre rive
« Je ne te servirai plus de poupée gonflable… »
Tout commence par ce qui semble être un massage cardiaque, à moins qu’il ne soit d’une autre nature… La comédienne est belle à ravir : frange bombée de poupée, casque de cheveux aux reflets auburn et dorés intenses, parfaitement peignés, joues roses, bouche en cœur ravissante sur une dentition parfaite. Lascivité mécanique. Un corps musclé et souple, beau de partout et sous tous les angles. Des habits d’écolière comme Alice et presque une princesse égyptienne, pour le maquillage. La diction est exquise, les mouvements, de vrais miroirs de l’âme. Symboliquement infantile. Son nom : Daphné Huynh, prononcez Win. And she won, believe me!
Comment l’esprit vient aux filles… et aux femmes de ce début du 21e siècle est la question innocente posée par Naomi Golmann, la jeune auteur du spectacle dont c’est le premier opus. A l’heure où le foulard et la burqa risquent de mettre en danger les faibles acquis du mouvement féministe (une goutte dans l’océan de l’histoire), voici Daphné et Naomi transformées en équipe féminine de choc pour faire la peau à la Walt niaiserie qui encombre le corps et l’esprit de tant de jeunes filles et femmes modernes. Ce n’est pas que ces deux complices nient l’utilité des contes, bien au contraire. Enfants, elles ont aimé les contes et savouré plus tard la lecture complexe de la « Psychanalyse des contes de fées » de Bruno Bettleheim où chacun peut se retrouver dans la symbolique de l’un ou l’autre personnage de Perrault ou d’Andersen. Ces contes, racontés et lus aux jeunes enfants, relus à l’aube de l’école primaire, avaient un caractère fondateur sur la notion de bien et de mal, sur la cruauté qui existe et sur les épreuves que chacun doit s’attendre à surmonter pour accéder à la maturité et devenir des adultes équilibrés et heureux.
Ils avaient un impact symbolique considérable sur l’évolution des enfants jusqu’à… l’avènement des générations Disney. Malgré quelques plantes et monstres bien effrayants, la représentation cinématographique, quoique très esthétique et merveilleuse a quelque chose d’enfermant, et semble avoir ôté aux contes lus ou racontés leur mystérieux pouvoir de développement de l’imaginaire et de l’introspection. Le modèle édulcoré et univoque de la princesse belle à ravir, gonflée de partout, semble avoir vidé les contes de leur sens et de leur substance. Le cœur de la nouvelle princesse – mais est-elle une princesse ? est un trou béant. « Qu’on m’arrache le cœur, qu’on l’enferme dans une boîte et qu’il s’arrête de me battre! » se plaint la jeune comédienne. La princesse n’est plus qu’une coquille vide en attente de panoplies de Barbie et d’un hypothétique prince charmant.
Le texte de BABYDOLL écrit par Naomi Golmann est le résultat d’un questionnement personnel intime et profond, d’une écriture très forte, cathartique sans doute, lentement distillée sur une période de trois ans. Féroce, sexy et pudique à la fois, cette écriture dénonce les dérives de notre imaginaire dans un langage cru et parler vrai, truffé de double-sens en séries. A notre époque, tout d’abord la princesse n’existe pas, elle est la boulimie des hommes comme Nabilla Benattia et autres consœurs, un fantasme ambulant créé pour lui plaire, et si possible aussi vide qu’une poupée de porcelaine qui aurait perdu son mécanisme. Ou alors, totalement cynique. De plus, le prince n’est qu’un Peter Pan fétichiste, « puer aeternus », enfant-roi qui refuse de grandir et qui, lorsqu’il rencontre la jeune fille, a souvent déjà derrière lui une solide exposition à la pornographie. Vivent les nouvelles technologies! Nous sommes à l’envers du conte! Les syndromes de Cendrillon, Belle-au-bois-dormant, Blanche-Neige et autres sont disséqués avec humour et raison. Car la réification de la femme, quoi qu’on en dise, va bon train! Parodiant Simone de Beauvoir, Naomi Golmann déclare « On ne naît pas femme, on pratique les hommes et on le devient. »
Sur scène et dans la mise en scène au scalpel percutante et poétique de l'auteur, l’esprit, le corps et les cinq sens en éveil se confondent et se répondent comme dans une série harmonieuse de haikus. Lewis Carroll est l’esprit frappeur, et Walt Disney l’esprit frappé. Pole dancing verbal et écriture physique se croisent en un ballet fulgurant de vérités. La parodie des dérives modernes : le jeunisme obligé, la séduction féminine codifiée à outrance, l’hyper sexualisation dès le plus jeune âge, bat son plein pour devenir à son tour, une sorte de conte post-moderne, raconté avec verve par deux jeunes femmes désenchantées. Est-ce ainsi que les hommes vivent?
Bbdoll
Par : Daphné Huynh
Ecriture et Mise en scène : Naomi Golmann
Lumières : Arnaud V. Acker
Musique originale : Witold Bolik
Crédit photos spectacle : Antoine Lanckmans
Crédit photo affiche : Christian Laloux
mercredi 8, jeudi 9 et vendredi 10 juin 2016 à 20h30
AU THEATRE DE LA CLARENCIERE
Rue du Belvédère 20-1050 Bruxelles
Infos Réservation : 02 / 640 46 17
Presse :
- L'économie du matin - http://www.economiematin.fr/news-theatre-crowdfunding-bb-doll-zuckerfree-cie-bruxelles
Helpline?
C'et la mode... et c'est efficace pour soutenir dans leur envol les toute jeunes compagnies: PLUS QUE 8 JOURS :https://www.kisskissbankbank.com/projects/71402 Ne les laissez pas tomber en panne!
La lumière issue du soleil
Rend mieux perceptibles les choses.
Les ombres se métamorphosent,
Forment des dessins sans pareils.
Quand l'être ressent un émoi,
Toujours de durée éphémère,
Son esprit libéré qui erre
Le fait soliloquer parfois.
Or si l'immense ciel est blanc,
La joie enfouie ou perdue,
Toute activité suspendue,
Il peut demeurer chancelant.
Il choisira l'indifférence
Et le repos qu'elle procure.
De se dépenser n'ayant cure,
Optera pour la somnolence.
Cela dépend de l'énergie
Qui en ce même instant l'anime
Car c'est sa puissance qui prime
Et qui engendre les envies.
Le poète se veut existant
Capte les mots qui lui arrivent,
Emplis d'images affectives.
Il connaît la langue du temps.
9 juin 2016
Passé – Présent – Futur. Comme à l'école !
Lire ce court billet entre les lignes, écrit ... je le suppose... En écriture automatique sur un petit carnet hier pendant un voyage.
Si nous partons de NOTRE temps présent en reculant dans LE passé, celui-ci n'ayant aucune limite connue il est impossible d'en mesurer la longueur, la durée, car l'infini ne se mesure pas. A l'opposé, toujours en partant du même temps présent, si nous dirigeons nos pensées dans le futur, nous ne pouvons évidemment pas en déterminer la fin, car la fin des temps nous est inconnue. Le temps présent se retrouve donc comprimé entre passé et futur dont nous ne pouvons en déterminer, ni le début, ni la fin. Deux hypothèses s'offrent à nous !
Où, le temps présent tel que nous le concevons, n'existe pas, le passé n'étant pas modifiable, et ayant un avenir inconnu ! Ou le temps présent est le temps primordial, celui qui permet à un esprit éveillé de créer SON futur proche en analysant SON passé vécu!
... J'avoue qu'en le recopiant tel quel ce matin, j'ai un peu de mal à "voir" le fond de mes pensées ! Y a t-il un Psy dans la salle ? ...
Songerie
Je me sens lasse, tristounette.
Ce matin, j'ai planté des fleurs,
Plutôt de fragiles fleurettes,
Tout une gamme de couleurs.
Elles paraissent languissantes,
Sans doute en manque d'énergie.
Sont restées longtemps en attente,
Maintenue faiblement en vie.
Le soleil rayonnant ailleurs,
Reste assombrie ma solitude.
J'aimerais voir ma rue en pleurs,
Recevoir une certitude.
L'eau de pluie tombant en douceur,
Apporte fraîcheur et brillance.
M'a causé nombreux coups de coeur.
Ô suaves réminiscences!
8 juin 2016
A l’entrée d’un parc, une vision étrange, un lutin tire laborieusement une vieille besace. Lourde et bien remplie, il peine à avancer. Il la traine cruellement derrière lui depuis des lustres. C’est son travail, son boulot sur la terre comme d’autres ont une destinée bienveillante. Un sac de vieilles lettres entassées, non distribuées, non remises. Elles sont fermées et enferment des mots par millier. Certaines n’ont pas de destinataires et pas d’expéditeurs. Pleines de ratures, de non-dits, de mots cruels, de sentiments inhibés, refoulés, dérisoires, imparfaites, incomplètes, elles sont un poids lourd à porter.
Il tracte cette charge et traverse le parc par tous les temps. Peu de gens le voient. Et ceux qui l’aperçoivent ont peur. Ils ne veulent pas l’aider, le soulager, le débarrasser de ce fardeau étrange. Ces envois sont vieux, obsolètes, désuets. Nul ne se sent concerné et ne veut prendre sa part dans ce jeu insolite et accepter ce qu’il a écrit dans le passé. Certain craigne, appréhende ce qu’ils recèlent et pensent parfois n’avoir pas été à la hauteur à un moment de leur vie.
Le lutin me tend une lettre. Etonnée, je la refuse. Elle n'est pas à moi. Je n'ai jamais écrit de lettre. Je ne connais pas ce destinataire. Mon esprit fouille vainement cette mémoire faillible et refuse tout net de reconnaître cet acte passé. Quelle idée de me rendre cette vieille missive jaunie. Subitement je me souviens de cet écrit, de cette histoire. Il y a si longtemps, il y a trop longtemps. Je n’ai rien oublié mais refermé fermement mon cœur et rejeté au loin ce vécu de ma mémoire.
Cette lettre n’est donc pas parvenue à son destinataire. Peut-être est-ce la raison de son silence ? Tout aurait été différent. Le destin a choisi. Lutin, reprend ton courrier, il n’a plus de raison d’être. Ma réalité est ailleurs. C’est un passé qui n’a pas existé et que je ne veux pas imaginer.
La quête du lutin est souvent sans succès. Il sait depuis longtemps que ces lettres renferment des peurs, des tourments, des vérités, des mensonges. La plupart du temps, il n’insiste pas auprès des hommes qui renient ainsi leurs pensées passées. Il fait quelques pas, trébuche et part avec son lourd fardeau de mystère, de secrets, de larmes.
Le lutin connaît les lettres sans les avoir lues. Celles écrites sur du papier pelure pour en alléger le poids n’ont ni nom ni date et parlent d’amour impossible. Celles écrites d'une main d’enfant sont terribles. Elles recèlent, révèlent des faits insensés, des cris étouffés, des silences lourds. Les mots que les adultes ne veulent pas entendre. Celles écrites au crayon renvoient à la souffrance, à la mort et n’annoncent que des larmes et des pleurs.
Le lutin connait toutes ces litanies par cœur et accepte que personne ne veuille les reprendre, les récupérer, les vivre. Les douleurs, les souffrances sont trop nombreuses, exprimées avec pudeur ou énoncées avec cris.
Le vieux lutin passe dans les âmes, dans les cœurs, ramasser ce courrier comme un facteur. Il hésite et revient vers moi. Insiste. Non, je ne veux pas la reprendre, la compléter, l’envoyer, et remplir les blancs que j’y ai laissés. Je sens une douleur étrange. J’ai le cœur qui se serre.
Le lutin continue sa course et cherche un autre preneur qui le déchargera de son fardeau. Un homme devant lui, troublé, ne comprend pas cette démarche. Il prend une lettre, l’ouvre et d’un geste brusque, la jette dans le caniveau. Il a des larmes dans les yeux. A peine lue et effleurée de la main, une souffrance intense lui comprime le corps. Il ne veut pas revivre son histoire, ni recommencer cette bataille une nouvelle fois. Il a tiré un trait sur cette époque. Il est tourné vers l’avenir.
Le génie n’en a pas fini avec ces messages venus pour ramener et confronter les hommes à leur réalité. Le monde est une faille, une fêlure que l’humanité entretient avec des mots et des actes déloyaux.
Alain conserve l'habitude
De prendre des photos de moi.
J'y ai les mêmes attitudes,
Éprouvant de nouveaux émois.
Je suis le témoin des saisons,
Chacune toujours surprenante.
Sublime apparaît l'horizon
Quand l'astre effectue sa descente
.
Les suaves tableaux qu'il capte
Montrent des grâces non perçues
On peut les contempler sans hâte.
On ne se sent jamais déçu.
Au parc Dorval en ce matin,
Les allées sont déjà fleuries.
Le vent fait son petit malin,
Sa fraîcheur me regaillardit.
6 juin 2016
La houle des mots imbibe à son flux le visage
d'un amour métissé qui se dolente sous le jardin d'un ciel illuné.
Sur le remous onduleux gorgé de soleil et de parfum ambré,
un vent soupiré berce leur dilection de ses murmures cadencés.
Ô chant mesuré, scarifie de tes pulsations les flots de ces syntagmes appariés
afin d'empreindre sur leur robe de soie convulsée, leur passion sucré.
Que de la caresse échevelée de leur inclination à l'union
de leur âme altière sourde et se déchaîne sur la crête frangée
de fraisil, l'harmonie incoercible d'un nous qui s'épouse.
Ainsi fidélisées sous des rayons dorés pour horizon,
les coulées miellées de grains d'amour viennent alléguer
du parfum de leurs serments, l'hyménée.
Nom d'auteur Sonia Gallet
recueil © 2016
Espace Art Gallery vous présente son sommaire :
1.4 Actuellement à EAG
2.4 Prochainement à EAG
3.4 Informations diverses :
Adresse, liens, …
4.4 En pièce jointe : Bruxelles Culture juin
1.4 Actuellement à EAG
Lysianne MATISSE dit Lys MATISSE (Be) bic
« Traces d’évidences »
Danielle Davin dit DIELLE (Be) peintures à l’huile
« Ondes de formes »
Shasha SHAIKH (franco-indienne) peintures batiks
« Oies sauvages »
Anne CANNEEL (Be) sculptures et digital art
« Arborescences »
Le FINISSAGE les 04 & 05 juin 2016 de 11h 30 à 18h 30.
2.4 Prochainement à EAG
Philippe MEIER (Fr) peintures
« Voyages intérieurs »
Huguette LECOMTE (Fr) peintures
« Les élégantes »
Rodrigue VAN HOUTTE (Be) peintures
« Triangle de Karpman »
Le VERNISSAGE a lieu le 08/06 de 18h 30 à 21h 30 et l’exposition du mardi au samedi inclus de 11h 30 à 18h 30. Et sur rendez-vous le dimanche.
Le FINISSAGE les 25 & 26 juin 2016 de 11h 30 à 18h 30.
La galerie est fermée en juillet pour vacance annuelle sauf pour les dates suivantes :
Oscar B. (Fr) peintures
« Une re-construction poétique »
Vernissage : le 09/07/2016
Exposition : les 09 & 10/07 et 30 & 31/07/2016
Finissage le 30 & 31/07/2016
Marie-Claire HOUMEAU (Fr) peintures
« Transparences »
Vernissage : le 09/07 et 07/09/2016
Exposition : les 09 & 10/07 et 30 & 31/07/2016 et du 08/09 au 25/09/2016
Finissage le 30 & 31/07/2016 et 24 & 25/09/2016
ATELIER JÖRG (Ch) peintures
« Voyages entre voile et vignes »
Le VERNISSAGE a lieu le 03/08 et 07/09 de 18h 30 à 21h 30 et l’exposition du mardi au samedi inclus de 11h 30 à 18h 30. Et sur rendez-vous le dimanche.
Le FINISSAGE les 24 & 25 septembre 2016 de 11h 30 à 18h 30.
3.4 Informations diverses
Espace Art Gallery 35 rue Lesbroussart 1050 Bruxelles. Ouvert du mardi au samedi de 11h 30 à 18h 30. Et le dimanche sur rendez-vous. GSM : 00 32 497 577 120
Infos artistes et visuels sur :
Site de la galerie : http://www.espaceartgallery.eu
Le site de l’Espace Art Gallery se prolonge également sur
Le Réseau Arts et Lettres à l'adresse: http://ning.it/KUKe1x
Voir: https://artsrtlettres.ning.com/ (Inscription gratuite)
Diaporama des plus belles expositions de l'Espace Art Gallery:
Voir: http://ning.it/KHOXUa
Les critiques de François Speranza sur Arts et Lettres :
Voir : http://bit.ly/265znvq
La galerie est devenue éditrice d’art pour fêter ses 10 ans :
Voir : http ://www.espaceartgallery.eu/editions/
4.4 En pièce jointe : Bruxelles Culture
Découvrez en pièce jointe « Bruxelles Culture » le magazine qui facilite la vie culturelle des amateurs d’arts.
Au plaisir de vous revoir à l’un ou l’autre de ces événements.
Bien à vous,
Jerry Delfosse
Espace Art Gallery
GSM: 00.32.497. 577.120
Sable
Le sable de la plage est comme une ardoise
Que la mer efface jour après jour
Et toujours les pas des amoureux disparaîtront
Dans les profondeurs océanes.
Quand il ne reste rien que quelques grains de sable
Que le vent emporte en tourbillons improbables
Comment croire encore que Roméo et Juliette ont pu se rencontrer
Et marcher ici même dans la brise marine ?
Comment imaginer qu’ils ont pu s’aimer devant l’immensité du monde
Et se faire des promesses éternelles sous le vol blanc des grands oiseaux de mer ?
A l’horizon passe un bateau en partance vers un Orient lointain.
Bientôt il aura disparu et il ne restera de lui qu’un souvenir
Qui s’effacera petit à petit dans la mémoire des vieux marins.
Et voilà la marée qui monte encore une fois à l’assaut de la plage
Et efface pour la millième fois les traces de tes pas.
Seule demeure la profondeur océane et la brise marine qui emporte tout
Absolument tout
Même les grands oiseaux blancs de nos rêves.
Fin d'une nostalgique attente.
Un moment des plus émouvants,
Le sable où s'alignent des tentes,
Face aux vagues de l'océan.
La dame âgée semble ravie.
Révolu le temps de la nage,
De la fabuleuse énergie.
Mais elle est là, sur une plage.
Respire le parfum des algues,
Marche les pieds dans l'eau salée,
En voyant arriver les vagues.
Le poids des ans s'en est allé.
5 juin 2016
Le temps qui passe,
qui se fait lisse,
sur nous qui glisse,
tel un malingre lys,
pour un corps, un esprit,
assoiffés de reliefs,
de verdure et de bleu,
est un profond supplice !
Alors, prenez vos crayons,
vos couleurs ou votre encre,
pour faire chanter ce lys,
le nourrir de vous, jusqu'à
ce qu'il grandisse,
devienne radieux et fou ;
Créer déleste du non-vivant,
pérennise l'instant,
qui s'étend sous nos yeux ;
ainsi l'instant donné,
a pris la dimension de la vie
de cet autre.
NINA
,
Vauvenargues. Introduction à la connaissance de l' esprit humain. ; 1746.
Réflexions et Maximes. Essais moraux de Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues (1715-1747), publiés à Paris chez Antoine-Claude Briasson en 1746; réédition revue et corrigée en 1747.
Où le ranger? Philosophe de la volonté de puissance, précurseur de Nietzsche? Moraliste préromantique annonçant Rousseau? On retient en général son opposition aux moralistes classiques, ses attaques contre La Rochefoucauld, par exemple, qui ne voit qu'égoïsme dans les affaires humaines; contre les jansénistes, Pascal en tête, qui n'ont de cesse d'insister sur la vanité du monde et sur la nécessité pour l'homme de s'en détacher. Pour Vauvenargues, en effet, «la morale austère anéantit la vigueur de l'esprit, comme les enfants d'Esculape détruisent le corps, pour détruire un vice du sang souvent imaginaire» (maxime CLXVII).
Mais comment appréhender l'originalité d'un auteur qui déclare d'emblée que tout est dit, que «les meilleures vérités courent les rues» et qui se propose simplement d'en faire l'inventaire, de les amasser au sein d'un tout qu'il nomme «système raisonnable»? Un tel projet jure en son siècle, d'autant que Vauvenargues rejette l'éclectisme et l'idée de progrès, tous deux liés nécessairement au relativisme. S'il veut «concilier tant de vérités [venant] d'une infinité d'hommes différents qui envisageaient les choses par divers côtés», en effet, c'est contre «le bel esprit moderne» qui prétend «parler de tout sans rien savoir» (Essai sur quelques caractères). Une telle science superficielle ne peut servir qu'à contenter la vanité. Le ton, on le voit, est bien celui d'un moraliste.
L'édition posthume de 1747 comprend l'Introduction à l'étude de l'esprit humain, suivie de «Fragments», de «Réflexions critiques sur quelques poètes» et de 330 «Réflexions et Maximes» numérotées en chiffres romains (les maximes des Oeuvres posthumes sont numérotées en chiffres arabes). Une brève «Méditation sur la foi» et une «Prière» terminent l'ouvrage (Vauvenargues les donnait lui-même pour de purs exercices rhétoriques).
L'Introduction à l'étude de l'esprit humain est composée de trois livres qui traitent de l'esprit en général, des passions, du bien et du mal moral. L'organisation des trois livres témoigne de l'originalité et de la modernité intellectuelles de Vauvenargues. Son objet est de «faire connaître, par des définitions et par des réflexions, fondées sur l'expérience, les différentes qualités des hommes qui sont comprises sous le nom d'esprit». Imagination, réflexion et mémoire, puissances «vides», sont très vite éliminées et Vauvenargues peut adopter le ton d'un moraliste pour traquer et saisir l'esprit dans l'invention, l'éloquence, le caractère et le sérieux, le sang-froid et l'esprit de jeu, etc. Les passions sont envisagées d'un même point de vue. Vauvenargues s'intéresse entre autres à la passion des exercices, à l'amitié que l'on éprouve pour les bêtes.
Après Abbadie (l'Art de se connaître soi-même ou la Recherche des sources de la morale, 1692) et Malebranche (Traité de l'amour de Dieu, 1697), mais avant Rousseau, Vauvenargues distingue nettement l'amour-propre de l'amour de soi. Ainsi de l'amour de la gloire: la vie imaginaire qu'achète l'homme qui meurt pour la gloire au prix de son être réel traduit une préférence incontestable pour le jugement d'autrui. «Avec l'amour de nous-mêmes, on peut chercher hors de soi son bonheur; on peut s'aimer davantage hors de soi que dans son existence propre; on n'est point à soi-même son unique objet. L'amour-propre au contraire subordonne tout à ses commodités et à son bien-être.»
Impossible de résumer la diversité des sujets abordés par les «Fragments», les «Réflexions critiques» (qui passent en revue divers auteurs, parmi lesquels Corneille, Racine et J.-B. Rousseau occupent l'essentiel) et les «Maximes». On peut néanmoins souligner la discrète mélancolie qui clôt l'ouvrage: «Quiconque a vu des masques dans un bal, danser amicalement ensemble, et se tenir par la main sans se connaître pour se quitter le moment d'après, et ne plus se voir ni se regretter, peut se faire une idée du monde» (maxime CCCXXX). L'éloge de la familiarité, quant à lui, surprendra de la part de celui qu'on présente volontiers comme un moraliste aristocratique et hautain: «Il n'est pas de meilleure école que la familiarité [...]. Là paraît la stérilité de notre esprit, la violence et la petitesse de notre amour-propre, l'imposture de nos vertus. Ceux qui n'ont pas le courage de chercher la vérité dans ces rudes épreuves sont profondément en dessous de tout ce qu'il y a de grand» (fragment XVII).
Enfin, de la Préface de l'ouvrage aux différentes «Réflexions et Maximes», se laisse deviner le projet «systématique» de Vauvenargues. Il faut retrouver l'unité et l'harmonie de l'esprit. Tout choix excluant un contraire dans nos appréciations serait alors signe d'abandon, d'impuissance à embrasser toutes ses variétés. Vauvenargues postule qu'«il n'y a pas de contradictions dans la nature» (maxime CCLXXXIX). Aussi nous faut-il renoncer à l'idéal d'une vérité unique et pure. «Nous avons grand tort de penser que quelque défaut que ce soit puisse exclure toute vertu, ou de regarder l'alliance du bien et du mal comme un monstre et comme une énigme. C'est faute de pénétration que nous concilions si peu de choses» (maxime CCLXXXVII). Se dévoile alors la méthode qui inspire l'écriture fragmentaire: «On ne saurait trop tôt rapprocher les choses, ni trop tôt conclure. Il faut saisir d'un coup d'oeil la véritable preuve de son discours et courir à la conclusion. Un esprit perçant fuit les épisodes et laisse aux écrivains médiocres le soin de s'arrêter à cueillir toutes les fleurs qui se trouvent sur le chemin» (maxime CCXIII). L'esprit n'atteint au grand que par saillies, passant de la sorte sans gradation d'une idée à une autre qui peut s'y allier. Il saisit les rapports des choses les plus éloignées. Mais «les hommes frivoles ont besoin de temps pour suivre ces grandes démarches de la réflexion, ils sont dans une espèce d'impuissance» (Introduction, livre I). C'est qu'en effet il n'y a guère d'esprits capables d'embrasser à la fois toutes les faces d'un même objet: c'est là la source la plus ordinaire des erreurs des hommes. Vauvenargues emprunte à Crouzas (Traité du beau, 1715), cette définition du génie comme puissance synoptique. Le génie tient moins aux facultés intellectuelles qu'à la force de l'âme, du coeur. Et réciproquement, ce que l'esprit ne pénètre qu'avec peine ne va pas souvent jusqu'au coeur. Finalement, l'esprit cherche à se saisir lui-même à travers la visée esthétique, dans la manifestation de sa puissance. On retrouve ainsi cette idée leibnizienne que toute joie esthétique se fonde sur une élévation de l'être, le plaisir de ce sentiment pouvant bien l'emporter sur l'aversion qu'inspire l'objet, comme en témoigne ce fragment au ton déjà très rousseauiste (voir le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité): «La vue d'un animal malade, le gémissement d'un cerf poursuivi dans les bois par les chasseurs, l'aspect d'un arbre penché vers la terre et traînant ses rameaux dans la poussière, les ruines méprisées d'un vieux bâtiment, la pâleur d'une fleur qui tombe et qui se flétrit, enfin toutes les images du malheur des hommes réveillent la pitié d'une âme tendre, contristent le coeur, et plongent le coeur dans une rêverie attendrissante.»
«Les choses ne font d'impression sur nous que selon la proportion qu'elles ont avec notre esprit. Tout ce qui est hors de notre sphère nous échappe.» Pour Vauvenargues, le moi n'est pas un théâtre d'idées; il est leur source même, toujours déjà engagé dans un rapport au monde. Il n'est pas continuité de fait, mais de volonté, et l'élargissement de son expérience, qui culmine dans la possession de l'être par l'être, dans la participation au rythme du monde, est, en un sens romantique déjà, action. «Le feu, l'air, l'esprit, la lumière, tout vit par l'action. De là la communication et l'alliance de tous les êtres. De là l'unité et l'harmonie dans l'univers. Cependant, cette loi de la nature si féconde, nous trouvons que c'est un vice dans l'homme. Et parce qu'il est obligé d'y obéir, ne pouvant subsister dans le repos, nous concluons qu'il est hors de sa place» (maxime CXCVIII). Vauvenargues, aristocrate ambitieux et déçu, lancé non sans donquichottisme dans la carrière des armes, annonce clairement cette vision de l'action comme réalisation et affirmation de soi dans le dépassement de soi que consacrera la philosophie romantique.
L'homme s'identifie avec son univers mental et sa nature profonde repose en ses passions. Le cogito est la conscience d'une force positive en laquelle on se reconnaît conforme aux lois qui régissent l'existence universelle. Pour Vauvenargues, comme pour Wolff (Psychologia rationalis), le phénomène primitif de l'âme est non pas dans un pâtir (l'impression subie) mais dans l'action. Contre une psychologie des facultés, il faut saisir les directions et expressions divergentes de l'âme comme liées à une seule puissance active qui est force de représentation, génie propre. Le sujet n'est pas en face de l'objet, coupé de lui et devant réformer sa vision pour se soumettre à son ordre: «C'est dans notre propre esprit et non dans les objets extérieurs que nous apercevons la plupart des choses. Les sots ne connaissent presque rien parce qu'ils sont vides, et que leur coeur est étroit; mais les grandes âmes trouvent en elles-mêmes un grand nombre de choses extérieures [...], elles n'ont qu'à se replier sur elles-mêmes, et à feuilleter, si cela se peut dire, leurs propres pensées» (maxime 366). Vauvenargues en tire une doctrine des types d'esprits, doctrine forcément systématique si l'activité de l'esprit est elle-même essentiellement synthétique.
L'esprit, ainsi, ne sera pas décomposé en facultés mais décrit en différentes figures, en types, en degrés: «Les hommes ne sentent les choses qu'au degré de leur esprit, et ne peuvent aller plus loin» (fragment XII). L'esprit sera peint en mouvement, en situation, dans ses modalités d'investissement. On comprend ainsi l'intérêt tout particulier de Vauvenargues pour les saillies, le goût, le langage et l'éloquence ou encore pour la passion du jeu, ou pour l'amitié que l'on donne aux bêtes.
Contre une psychologie de l'impersonnalité, dépouillant le sujet du discours de son statut privilégié, Vauvenargues met le dynamisme du moi à l'honneur; en ceci, il annonce l'égotisme d'un Rousseau ou d'un Stendhal. Sa psychologie s'ouvre sur l'idée de personnalité sans en avoir le mot (Vauvenargues parle de «caractère»). L'ego est à la fois transcendantal _ condition de possibilité de son propre monde _ et génial, l'accent étant mis sur son originalité créatrice. C'est que l'unité de l'esprit n'est pas point de départ mais exception. C'est l'apanage de l'«esprit étendu», du génie, qui «consiste, en tout genre, à concevoir son objet plus vivement et plus complètement que personne» (maxime 422). La nature est spectacle et la saisie du phénomène comme tel est la pensée la plus profonde. Un préjugé nous fait croire que l'abstrait est d'un accès plus difficile que le concret. L'enjeu, en fait, est celui d'un «retour aux choses mêmes»: le romantisme est là, et avec lui ce que l'on nommera bientôt la phénoménologie (le mot fait son apparition avec Lambert dans son Neues Organon, 1764). S'impose le souci de saisir des phénomènes dans leur dynamisme propre: c'est ce que rend possible une vision attentive aux formes et aux qualités. Car «l'extérieur distingue tous les divers caractères aux yeux d'un esprit attentif», dit Vauvenargues; il faut voir au lieu d'analyser, en considérant que le phénomène tire ses formes de son propre fonds. Car «tout ce qui existe a de l'ordre», c'est-à-dire une certaine manière d'exister qui lui est aussi essentielle que son être même. Deux ans plus tard, dans le «Premier Discours» de l'Histoire naturelle, Buffon dira des choses très semblables.
La phénoménologie naïve de Vauvenargues découvre ainsi la nature comme compréhension et participation. Comprendre, en effet, c'est assumer toute la réalité de l'être et dans cette découverte, que Vauvenargues nomme «amour» ou «amour de l'être», la personnalité s'affirme et se crée. Cet amour conjoint le coeur et la réflexion, lie intellection et passion. Car «on ne s'élève point aux plus grandes vérités sans enthousiasme; le sang-froid discute et n'invente pas; il faut peut-être autant de feu que de justesse pour faire un véritable philosophe» (maxime 335). Le sentiment exprime cette spontanéité de l'âme et doit donc être très nettement distingué de la sensation comme deux modes totalement différents de la relation à l'objet. Le sentiment fait le monde à notre mesure.
L'évidence «pathique» est alors la vivante vérité. Son contraire est l'inauthenticité: le mot comme simple vêtement, la compréhension abstraite et désincarnée, le savoir mécanique. «La plupart des hommes honorent les lettres comme la religion et la vertu, c'est-à-dire comme une chose qu'ils ne peuvent ni connaître, ni pratiquer, ni aimer» (Introduction, II); «Faites remarquer une pensée dans un ouvrage, on vous répondra qu'elle n'est pas neuve; demandez alors si elle est vraie, vous verrez qu'on n'en saura rien» (maxime 341). Et encore: «Un ouvrage véritablement barbare, c'est un poème où l'on n'aperçoit que de l'art» (Essai sur quelques caractères).
En regard, l'herméneutique de Vauvenargues _ qui veut de la vraisemblance jusque dans les fables et affirme que toute fiction qui ne peint pas exactement la nature est insipide _, se prolonge dans une morale de la profusion, tout inspirée d'amour du réel et refusant la modération, laquelle «naît d'une espèce de médiocrité dans les désirs et de satisfaction dans les pensées». «Les sages se trompent en offrant la paix aux passions. Ils vantent la modération à ceux qui sont nés pour l'action et pour une vie agitée.» Il y a des vices qui n'excluent pas de grandes qualités. Il y a donc de grandes qualités qui s'éloignent de la vertu: «Je serai très surpris qu'une imagination forte et hardie ne fit pas commettre de très grandes fautes.» Mais «il faut permettre aux hommes de faire de grandes fautes contre eux-mêmes, pour éviter un plus grand mal: la servitude» (maxime CLXII). C'est le défaut d'ambition qui, chez les puissants par exemple, peut être la source des plus grands vices. Le goût de l'ordre et des règles, le désir de pureté, l'incapacité à supporter le réel dans son achèvement et son imperfection, la sévérité _ que Vauvenargues abomine par-dessus tout _, tout cela est l'indice d'un manque de vitalité, tout cela a sa source dans l'ignorance de la nature et donc dans l'étroitesse, l'impuissance du coeur. Il est difficile de ne pas penser à Nietzsche ici et en particulier à ces phrases de l'Avant-propos d'Ecce Homo: «Quelle dose de vérité un esprit sait-il supporter, sait-il risquer? Voilà qui, de plus en plus, devint pour moi le vrai critère des valeurs. L'erreur n'est pas aveuglement, l'erreur est lâcheté.»
Vauvenargues, pour qui «toutes les grandes pensées viennent du coeur» (maxime CXXVII), annonce le mouvement qui, après 1750, avec les Éléments de métaphysique tirés de l'expérience de l'abbé de Lignac notamment, va ramener au coeur. Si l'idée même est action, c'est-à-dire puissance d'affirmation, inséparable de la volonté qui la pose, sa force est dans le coeur, c'est-à-dire dans les passions. L'esprit n'est que l'oeil de l'âme (voir maxime CXLIX), les passions ont appris aux hommes la raison et il n'y a de solide esprit que celui qui prend sa source dans le coeur. De sorte que ceux qui ne sont ni assez faibles pour subir le joug de leurs idées ni assez forts pour l'imposer se rangent volontiers au pyrrhonisme (se justifie ainsi la méfiance de Vauvenargues envers le relativisme).
Mais l'originalité de Vauvenargues est surtout d'arriver à une toute nouvelle conception de l'esprit par la réhabilitation des passions: nous sommes nos passions, elles ne se distinguent pas de nous-mêmes. Elles participent de notre caractère. «Il y aurait de la folie à distinguer ses pensées ou ses sentiments de soi.» La nouveauté, ainsi, c'est qu'entre passion et raison on ne puisse plus choisir. L'homme n'est pas esprit d'une part et passion de l'autre, soumis comme tel aux dérèglements du corps. La raison n'est pas non plus rabaissée à l'étage des passions. Vauvenargues ne cherche pas, à l'instar d'un Condillac ou d'un Hume, le principe régulateur de l'esprit dans quelque chose de plus naturel, de plus intime que lui. S'il envisage la raison au risque des passions, c'est pour trouver leur commune unité, dans une conception élargie de l'esprit capable de rendre compte de toutes ses manifestations. Plus de cinquante ans plus tard, Jean Esquirol, l'un des grands fondateurs de la psychiatrie et du traitement de l'aliénation mentale, fera le même chemin (Des passions, 1805).