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SPECTACLES

Spleen, absurdité et  tout le drame de la guerre…un Eugène Oneguine profondément humain à la Monnaie

29 janvier 2023, une première saisissante de l’oeuvre de Tchaïkovski.

Eugène Onéguine est le héros du roman d’ Aleksandr Pushkin, écrit en vers en 1833. C’est  un dandy de Saint Petersbourg, un aristocrate  désillusioné par les oisives futilités de la capitale russe. Il a environ 26 ans quand il  débarque à la campagne chez son ami  naïvement confiant, Vladimir Lensky, un jeune poète rêveur, d’environ 18 ans, plus passionné par l’Art que par la Vie. Onéguine se montre cynique, arrogant, égoïste, vidé de toute passion et fatigué du monde. Childe Harold, vous connaissez?  Ensemble, ils vont rencontrer deux sœurs, filles de propriétaire terrien. Elles sont  fort différentes, l’une, Tatiana Larina, distante, timide et  renfermée, mais passionnée de lectures romanesques, un personnage obsédant  qui semble  voguer dans un monde imaginaire et se nourrit de littérature romantique anglaise. L’autre, Olga, primesautière, ancrée dans la vie. Elle est insouciante et espiègle même si elle ne trouve aucune joie dans sa jeunesse passée aux champs. Et pourtant , lors de la rencontre, chacun des amis choisira paradoxalement celle qui lui ressemble le moins. Premier coup du sort. A l’Art ou à la Vie ?

Surprise étonnante au lever du rideau ! Point de  soleil d’hiver russe,  de champs fraichement moissonnés, de moulin à eau,  de datcha lumineuse à la Tourgueniev, de femmes  vaquant  aux tâches  domestiques comme on pourrait s’y attendre.  … Le plateau est vide,  comme un radeau ivre sur un océan d’émotions et de vagues de passion.  C’est que ce décor unique et étrange,  intemporel,  est animé de vie, il semble même parler comme parlent les livres… Et pourtant, il n’est constitué que d’une immense carré de parquet  en bois blond, mystérieusement articulé et  posé sur un axe… Toute une cosmologie? Les Chinois ne représentent-ils pas la Terre  par un carré, comme les champs qu’ils cultivent ? Le  spectateur du monde que nous sommes peut donc  observer  les  choses:  tandis qu’elles vont, se font et se défont.  Aux quatre coins, tels ceux d’une rose des vents,  siègent,  chacune sur sa chaise rustique, quatre femmes  sans âge en robes simples, de couleurs pastel : Tatiana en bleu tendre, Olga en rose pâle,  Larina, leur mère (la mezzo-soprano Bernadetta Grabias) en vert tilleul et la  vielle nourrice Filippievna (Cristina Melis) en  bleu gris argent.  

© Karl Forster

Et voici que notre folle du logis, ce pouvoir immense de l’imagination, est subitement convoquée - presque à notre insu - tant la musique, le chant, les mouvements et le jeu scénique se correspondent.  La mise en scène  très créative  de Laurent Pelly saisit l’esprit et le cœur par  la mouvante beauté des différents tableaux. Et l’émotion artistique  est à son comble,  à chaque fois qu’une extraordinaire  chorégraphie s’empare des protagonistes et du superbe chœur. Sans doute, l’anecdotique a été complètement gommé, mais ce,  tout au  profit de l’essence et du  symbole.  De savants  jeux de lumière de Marco Giusti  et l’interprétation orchestrale se combinent harmonieusement   pour habiller le texte  de profondeurs insoupçonnées. Il est vrai que le chef de l' Orchestre Symphonique de la Monnaie, Alain Altinoglu, est  comme à l'accoutumée, un très vibrant créateur de climats et d’échos dans sa sublime interprétation de la « vérité lyrique » chère à Tchaïkovski. Il annonce et souligne avec incomparables nuances, les moindres émotions qui ballottent  tous ces  passagers de la vie, et  avec une intensité et un  sens aigu du drame et de ses prémonitions. Il prolonge tous les états d’âme des protagonistes,  par une  très délicate orchestration. Complémentarité du visible et de l’invisible. Il n'empêche,  le folklore, la danse mondaine et des épisodes de rires joyeux  alternent  avec la vérité des sentiments et des frustrations qui mèneront à la débâcle finale.  


 Car  voici que sur le plateau,  l’aveuglante  folle du logis, celle qui fait perdre la tête, s’empare des deux amis !  Ainsi en va-t-il  de l’immonde jalousie qui soudain saisit  Vladimir, en voyant Olga  enchaîner les danses  avec Onéguine et qui va faire basculer un monde de paix vers celui de la guerre et de la désolation. « Vous n’êtes plus mon ami ! … Je n’ai pour vous que du mépris ! » Pire,  la querelle dégénère et  Lenski  ne peut s’empêcher de  provoquer Onéguine en duel. Toute l’assemblée est scandalisée ! ( Finale « V vashem dome! V vashem dome! )

Mais surtout voici les paroles fatidiques qui déclenchent  l’hostilité des deux frères…dans le tableau 18 de l'acte II «  Ennemis, mais y a-t-il longtemps que le désir de tuer nous sépare ? Y a-t-il longtemps que nos plaisirs, nos pensées , nos soucis, et nos loisirs étaient les mêmes ? Aujourd’hui cependant, comme des ennemis héréditaires, perfidement, nous préférons nous taire , prêts de sang-froid à nous entretuer » Onéguine ajoute pourtant «  Mieux vaudrait en rire, avant qu’il ne soit trop tard, avant que nos mains ne soient rougies de sang, mieux vaudrait se quitter à l’amiable…» Hélas, l’un après l’autre ils déclarent : « Mais non ! mais non !» 

        Niet!                                                                                                  Niet!
                                 
нет                                                                                              нет!

 
Le  désastreux duel aura eu lieu, et dans  le troisième acte,  la douleur consumera Tatiana et Onéguine, les protagonistes maudits. Oui, elle l’aime, c’est tragique mais se refuse à lui, comme lui l’a fait dans le premier acte, non  par vengeance, mais   dans un accès de vertu et de soumission aux règles de la société.  Au tomber du rideau,  Onéguine, ce  héros byronien, un Don Juan à sa manière, n’osant pas être émotionnellement vulnérable, est devenu cet  homme, perclus de désespoir, qui aura  tout eu, qui l’aura gaspillé et qui aura vécu pour le regretter. Pathétique et brisé, il a ... à peine 26 ans.  Une très belle prise de rôle par le baryton Stéphane Degout.

Star power: c’est un  casting d’excellence qui  interprète cette  magnifique  œuvre. Partout des sans-faute. Bogdan Volkov est un Lenski hors compétition, qui met les larmes aux yeux par sa résignation devant le destin qui l’attend, la musique en témoigne.  C’est en effet  déjà un  poignant adieu à la Vie que Lensky chante avant le duel, comme s’il écrivait une ultime lettre à ceux qui restent,   où il oppose les jours heureux de sa jeunesse à sa situation actuelle, dans un scandale que ni lui ni Onéguine ne souhaitaient véritablement. Quelle absurdité ! Dire que la  querelle portait sur les attentions  maladroites d’Onéguine pour Olga.  Surtout,  c’est la perte d’Olga que Lensky regrette le plus, se souciant désormais peu de savoir  quelle sera l’issue du  duel imminent.  Il  est salué par des applaudissements nourris et enthousiastes.


Et autant d'applaudissements, bien sûr, pour  la Tatiana délicieusement chantée par la soprano britannique Sally Matthews:  sans la moindre affectation, avec de vertigineux émois et de subtiles nuances pianissimo. Une réussite majeure.  Cette célèbre scène de la chambre à coucher, lorsque Tatiana, éprise d’un amour impulsif pour Onéguine,  exprime ses sentiments dans une lettre, incarne de manière touchante l’étourderie féminine du personnage.

C’est fait. Je ferme cette lettre,

L’effroi, la honte au fond du coeur…

Mais mon garant est votre honneur,

J’ai foi en lui de tout mon être.

Olga, ici chantée par la chaleureuse  mezzo-soprano Lilly Jørsta, est très naturelle, pleine de joie de vivre et  très  convaincante. Soulignons également le charisme et l’ardeur résonnante  du riche prince Gremin  que chante  Nicolas Courjal  et la merveilleuse et rafraichissante bouffonnerie – Molière es-tu là ? – de Christophe Mortagne  dans le rôle de Monsieur Triquet.  Quant au fabuleux  chœur, une masse parfois oppressante, toujours en mouvement, sous la direction de Jan Schweiger,   il  est à la fois radieux  et bouleversant dans  les multiples atmosphères qu’il incarne.

Dominique-Hélène Lemaire, Deashelle pour Arts et Lettres

Avec l' Orchestre symphonique et chœurs de la Monnaie Jusqu’au 14 février.

https://www.lamonnaiedemunt.be/fr/program/2313-eugene-oneguine

DISTRIBUTION

Direction musicale

ALAIN ALTINOGLU

Mise en scène & costumes

LAURENT PELLY

Décors

MASSIMO TRONCANETTI

Éclairages

MARCO GIUSTI

Chorégraphie

LIONEL HOCHE

Collaboration aux costumes

JEAN-JACQUES DELMOTTE

Chef des chœurs

JAN SCHWEIGER

Larina

BERNADETTA GRABIAS

Tatyana

SALLY MATTHEWS
NATALIA TANASII (1, 4, 10, 14.2)

Olga

LILLY JØRSTAD
LOTTE VERSTAEN ° (1, 4, 10, 14.2)

Filipp’yevna

CRISTINA MELIS

Yevgeny Onegin

STÉPHANE DEGOUT
YURIY YURCHUK (1, 4, 10, 14.2)

Lensky

BOGDAN VOLKOV
SAM FURNESS (1, 4, 10, 14.2}

Prince Gremin

NICOLAS COURJAL

Captain Petrovitch

KRIS BELLIGH

Zaretsky

KAMIL BEN HSAÏN LACHIRI °

Monsieur Triquet

CHRISTOPHE MORTAGNE

Guillot

JÉRÔME JACOB-PAQUAY

 Precentor

 CARLOS MARTINEZ
HWANJOO CHUNG (31.1 & 2, 5, 7, 9.2)

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administrateur littératures

Espace Art Gallery, la soirée littéraire du 27 janvier réussie au-delà de toutes espérances ? Parfaitement : chaleur, convivialité, animation, plaisir, que demander de plus ? Les auteurs - intervenants : Anne Marie Delbecq : posée, appliquée ; Pierre Ost : inspiré, investi ; Leïla Zerhouni : claire, limpide ; Gaëtan Faucer : souverain, en verve ; Sita Leval : impériale, intérieure ; José Mangano : accrocheur, théâtral. Six prestations magistrales tout en contrastes.

Les mots ont repoussé l'hiver, les pensées à fleur de peau, sensibilité et émotion au rendez-vous de cette Soirée Lectures de Bruxelles, la séance de dédicaces bien animée, le drink de Nouvel An moussant sans conteste les coeurs et les âmes. Les ouvrages présentés dont des extraits ont été lus par leurs auteurs :

Anne Marie Delbecq: "Les Sabots de Jeanne, "L'As de pique mon coeur" ;

Pierre Ost : "Le Cargo", "Meurtre à la place Flagey" ;

Leïla Zerhouni : "Femmes empêchées", "Le Luthier de Bagdad" ;

Gaëtan Faucer : "Des maux de midi", "Molière", "Le Hasard n'arrive pas à l'improviste" ;

Sita Leval : "Point critique" ;

José Mangano : présentation d'un sketch "L'échevin alcoolo".

En début de soirée, Thierry-Marie Delaunois, l'organisateur et animateur des Soirées, nous a présenté ses voeux, des voeux de lumière adressés à tous.

La prochaine soirée ? Le 24 mars... à noter qu'une série de photos très expressives de la soirée du 27 janvier seront prochainement visibles sur la page "Soirées Lectures de Bruxelles" créée sur Facebook. Haut les coeurs, haut les mots! 12273428682?profile=original

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administrateur littératures

Mais oui, les soirées de lecture publique de la galerie se poursuivent cette année, suivant la nouvelle formule initiée en novembre dernier, qui a rencontré un vif succès, les sourires, l'enthousiasme et les applaudissements nourris indéniable preuve de ce succès qui ne peut que se renouveler.

Notre prochaine soirée "Livr'étincelles" se déroulera le vendredi 27 janvier, elle débutera à 19h15 et accueillera un nouveau panel d'auteurs de qualité en tous genres. Ils seront au nombre de six, à raison d'un quart d'heure par intervenant, à présenter et à lire des extraits de leur production ; se mêleront poèmes, nouvelles, citations et romans. Une véritable vitrine de notre littérature :

 - Leïla Zerhouni, poète et romancière, avec "Femmes empêchées" (roman) et "Le Luthier de Bagdad" (nouvelle) ;

 - Anne Marie Delbecq avec "Les Sabots de Jeanne" et "L'As de pique mon coeur" (romans) ;

 - Sita Leval poète avec "Point visible" (recueil) ;

 - Pierre Ost, écrivain et romancier, avec "Le Cargo", "Meurtre à la place Flagey" et "Une idée en l'air" (nouvelle) ;

 - Gaëtan Faucer, dramaturge et nouvelliste avec "Molière" (Article), "Des Maux de midi" et "L'Année des d(i)eux" (citations et bons mots) ;

 - José Mangano, artiste, poète et philosophe, avec ses poèmes et pensées ensoleillées.

La soirée se clôturera avec Bernard-Massard en personne ! La vie est nulle sans bulles.

Lieu de l'événement : Espace Art Gallery, 83 rue de Laeken, 1000 Bruxelles

L'équipe sur le pont : Anita De Meyer, Jerry Delfosse, José Mangano et Thierry-Marie Delaunois.

A bientôt pour le meilleur de nos mots !

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Bonjour, Chères et Chers amis (es), d'Arts et Lettres,

Pardonnez mon long silence pendant tout ce temps où tellement de choses se sont passées. J'apprends seulement maintenant la disparition de Monsieur Paul (n'étant revenu ici depuis tout ce temps), personne remarquable dont je déplore la disparition, espérant que sa mémoire reste toujours profondément liée à ce réseau. Je suis heureux que le lien auquel il s'était tant donné revive, repris comme un flambeau par Jerry Delfosse, qui le transmettra peut-être un jour à celles et ceux qui nous suivent et porteront plus loin sa lumière et sa chaleur...

Comme je le dis dans une réponse à des commentaires qui me touchent profondément, 2019, 2020, 2021 sont passées à toute vitesse, presque en apnée pour moi, où j'ai focalisé toute mon énergie pour développer le lien initié lors de mon dernier billet ici, entre l’œuvre physique et numériquement "augmentée" que je développe. Débordé par tout ce que je faisais, écartelé entre mon atelier où je m'enfermais à double tour pour mieux me concentrer sur mon travail, les expositions, salons et les voyages incessants qui y étaient associés, j'ai ciblé mes publications en les limitant au journal en ligne de mon site Web, et ai raté l'hommage que j'aurais aimé rendre à Paul, autant que les échanges que nous avions dans cet espace, veuillez bien m'en excuser . Si vous ne m'en voulez pas trop de ce long silence, j'essaierai de repartager avec vous ce qui me fait vivre (des fois que cela vous soit utile aussi), et regarderai mieux vos publications chaque fois que je le pourrai ?

Heureusement qu'en réorganisant les centaines de marque-pages de mon navigateur j'ai retrouvé votre adresse URL que j'avais perdue !

En attendant, je voulais simplement vous souhaiter une bonne fin d'année et de très belles fêtes, en toute amitié.

Alain MARC

P.S.: Mon "Anthropoïde divinité" ci-dessous est la sublimation à travers cette petite sculpture en inclusion inspirée des figures préhistoriques féminines, de nos désirs de dépassement. Elle est doublée d'une Réalité Augmentée qui s'affirme comme son aura identifiant la puissance de l'esprit sur la matérialité de la matière et du corps...

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Mon Or

Mon or à moi n’est pas en lingot.12273405852?profile=original
Il n’est pas impérissable.
C’est une beauté passagère,
qui m’éblouit pour un court temps

et puis se laisse désirer tout un an.
Il n’a pas d’autre valeur que cette attente.

Mais c’est lui qui me comble.

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Dixième promenade - Le presbytère.

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Un signe de tête, un sourire esquissé, elles sont bien polies!
Elles les regardent d’un air hautain et dédaigneux
Peut-être est-ce parce qu’elles sont habitées par Dieux.
Ou bien qui sait, est-ce le doute ou la mélancolie.

Elles vont, elles viennent, silencieuses, la tête penchée.
De crainte d’affronter un regard elles ont les yeux baisés.
Elles devront acheter des indulgences papales à bon prix
Si elles veulent aller directement au paradis.

Tout laisse à penser qu’elles ont besoin de considération,
A quel titre, à quel mérite, professionnel ou bien bonté ?
Professionnel sûrement mais pour la bonté, point d’interrogation?
Ah ! Si seulement elles connaissent la courtoisie et la charité.
 
Elles vont, elles viennent, toujours avec la même façade.
L’œil habituellement triste brille dans la méchanceté et la sottise
et puis l’éclat se ternit et le regard redevient maussade,
Pour ces Filles là nous ne sommes capables que de dire des bêtises.

Abandonnons les sans remord à leur réserve et à leur médiocrité,
C’est un réconfort de penser qu’elles ne seront pas à nos côtés au paradis.
Si elles continuent, le paradis n’est pas gagné, ne dite pas de méchanceté.
Le jour venu les gens de cœurs et de qualités prieront. De pronfondis…

Elles pourraient être Coptes, elles sont Catholiques,
Elles ont été baptisées sans le vouloir, selon un rite antique
Pourquoi, parce que c’était ainsi dans leurs villages.
Et puis il y a eu la première communion avec ceux du patronage.

Elle est toujours là pour assister les personnes endeuillées
La voilà avec ses livrets contenant les textes circonstanciés,
Doucement elle guide, elle oriente, en tenant compte des personnalités
Et le fils, seul, égaré, la nimbe et ne sait comment la remercier.

Et puis il y a les autres, les faux culs condescendants
Ceux que l’on ne voit qu’aux enterrements, les compatissants.
Et sa spécule et sa commente: A, tout de même hein…
Laisse les, vient vite derrière le cimetière, dans les sapins.

Et puis il y a l’époux qui déclame, hypocrite, se croyant un modèle
Qu’ils ont été mariés quarante deux ans et qu’il a toujours été fidèle
Le pleutre, le sot, oublie de dire combien de fois il l’a fait pleurer.
Mais c’est un bon catholique, tous les dimanches il va communier.

Pourquoi as-tu aidé à préparer la messe pour ce jean-foutre sans consistance
C’est un criminel passif il l’à détruite par sa suffisance, par son indifférence.
Je t’en prie, je t’en supplie dit moi que tu l’as fait pour elle, pas pour lui
Tu as raison, elle est heureuse maintenant, elle refait sa vie au paradis.

Jani

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Féeries

Tu m’entraînes vers des paysages féeriques12273414879?profile=original
aux bien étranges couleurs.
Mais là où tu vas, je vais.
Car je ne vois de couleurs que dans ton sillage.
Partout ailleurs, où que je regarde,
il n’y a que triste grisaille d’un éternel hiver.

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Le penseur, l'orateur et le bâtisseur




Trois individus qu’ils soient hommes ou femmes,

Avançant sur leur chemin tels des étrangers,
Comme des nageurs en des couloirs séparés,
Se querellent sur la valeur de leur âme.

” - Je suis au départ de toute création.
Comme inspirée par une voix divine,
Ma pensée vers le nouveau s’achemine
Et tisse la toile de toutes inventions !

- Vrai ! mais que seraient-elles sans la parole,
Sans elle, ne pouvant être révélées,
Ne seraient-elles pas telles des idoles
Vouées à n’être que par soi encensées ? ”

Quant au bâtisseur, l’homme du bout de chaîne,
Si le penseur a pensé pour lui tel projet,
Si l’orateur a parlé pour qu’il comprenne,
Il pleure pour un clou qu’il ne peut enfoncer !

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administrateur littératures

De l'enthousiasme et de l'effervescence ce vendredi 25 novembre 2022 à l'Espace Art Gallery qui accueillait huit talents de notre sphère littéraire et artistique, tous investis dans leur art. Des Mozart des mots et de l'écrit ! Une soirée réussie ? Jugez-en par vous -mêmes !

Auteur, chroniqueur et collaborateur culturel, l'animateur et organisateur de la soirée a développé, en ouverture, les bienfaits de la lecture qu'elle soit silencieuse ou publique : stimulation du cerveau, ralentissement de maladies (Alzheimer, démence,...), diminution du stress, amélioration des connaissances, du vocabulaire, de l'écriture, de la mémoire, de la capacité d'analyse, relaxation, paix intérieure, divertissement,... Lisez, bon Dieu !

Toutes les deux poètes membres de L'Auberge littéraire, Tatiana Gerkens et Edith Henry ont ensuite pris place face au public pour nous livrer en duo une fascinante lecture d'extraits de leurs ouvrages respectifs "Incandescence" et "J'ai 70 ans et je danse la sardane". Tout feu tout flammes, elles ont admirablement capté l'attention, plaisir des mots assuré, réussite totale.

Auteure de "Redevenir", ouvrage autobiographique à caractère ésotérique, Florence De Smedt Dumont s'est lancée avec calme et assurance dans la lecture du passage-phare de son oeuvre, touchant un public très attentif, son propre vécu posé sans réserve à l'aide de mots précieusement choisis, authenticité et belle sensibilité.

Artiste, peintre, sculpteur, poète et philosophe, José Mangano nous a lu plusieurs poèmes enjoués de son cru, souriant, surprenant, et récité en finale un poème qu'il aime particulièrement, nous faisant traverser le temps et l'espace. Oubliés les Plaisirs d'hiver qui débutaient le même soir à quelques centaines de mètres de nous !

Poétesse née dans les Carpates fille d'un éminent écrivain roumain, Taya Léon (Tamara Frunza) suivait Mangano ; concentrée, elle nous a fait investir "La Terre travestie" (éditeur : Daniel Simon), titre de son diversifié et bouleversant recueil de poèmes, avant de nous présenter quelques inédits de sa plume. Everest de poésie singulière !

Ecrivain et professeur de français publié notamment aux Editions Encre Rouge, Manuel Verlange nous a, quant à lui, livré avec coeur et esprit un bel extrait de "Portrait de ma mère en fuite", l'un de ses ouvrages, puis présenté "Changer le cours des fleuves", l'odyssée d'un riche industriel parti de peu, contraste manifeste avec les talents qui le précédaient mais de bien belle teneur. Qualité de fond et de forme au rendez-vous !

Photographe professionnelle, artiste plasticienne et comédienne auteure de scénarios et de sketches, Anita De Meyer, c'est la singularité, les mots au service de l'esprit, l'humour au premier plan. Une force fragile associée à un élan tout en nuances. La scène, une de ses passions !

Poète et peintre auteure de nombreuses publications, Jacqueline Gilbert, pour qui le roman, la poésie et la nouvelle semblent ne plus avoir de secrets; nous a, en clôture, plongé dans son propre univers très diversifié aux mots accrocheurs, enchanteurs, vigueur et enthousiasme à la clé malgré l'heure tardive !

Une soirée plus que réussie ? En témoignaient les regards, lumineux, les sourires, les applaudissements nourris, signes manifestes pour le présentateur et organisateur d'un petit bonheur de rencontres à réitérer, la prochaine soirée : le vendredi 27 janvier 2023 à 19h15.

Thierry-Marie Delaunois

auteur, chroniqueur et collaborateur culturel

organisateur et présentateur des "Soirées Lectures de Bruxelles" de la galerie.

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Tristes et bons vivants




Ces deux-là, vous le verrez, n’ont rien en commun :

L’un étant pincé comme un gardien de prison,
L’autre qu’on appelle un bon épicurien,
Bref, chacun chez lui accroché à sa raison !

” - Je vois que rien ne vous fait perdre l’appétit,
Que des guerres ensanglantent la planète,
Que des enfants creusent pour un pauvre penny,
Ne vous gêne et vous mène à la diète ! ”

- ” Je ne suis pas à l’affut de la misère,
De nature gaie la vie m’émerveille,
Je glane ma petite part de la terre
Avant que sous elle je trouve le sommeil ! ”

Nos deux sbires ne se mettront jamais d’accord,
C’est ainsi depuis que le monde est monde.
Car l'un, triste, plaindra les malheurs de tous bords,
Quand l'autre boira le meilleur à la ronde !

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                                              DANS LES SPHÈRES DU DÉSIR : L’ŒUVRE DE CAROLINE DANOIS  

Du 08-10 au 31-10-21, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken 83, 1000 Bruxelles) vous convie à une exposition consacrée à l’artiste belge, Madame CAROLINE DANOIS, intitulée : KISS ME, SI JE VEUX.

L’on remarque, dès la première approche avec son œuvre, que CAROLINE DANOIS se situe entre plusieurs cultures. Plusieurs cultures est synonyme de d’un ensemble de discours esthétiques aux racines multiples. D’origine vietnamienne, élevée en Occident, ayant beaucoup voyagé, sa peinture témoigne d’influences culturelles diverses et importantes. Cela se remarque, notamment, dans l’attitude culturelle de certains de ses personnages, particulièrement en ce qui concerne le langage amoureux dont nous parlerons plus loin. Toujours est-il que ses personnages sont, d’un point de vue physique, de conception orientale. Ceci précisé, ne perdons pas de vue la thématique principale de cette exposition, à savoir le discours, à la fois, sur le désir et sur l’art d’aimer. Néanmoins, le désir est ici pris sous l’angle du désir de l’Homme pour la Femme. Le titre de l’exposition est très explicite sur la philosophie du discours de l’artiste : il s’agit d’une approche amoureuse et sensuelle du masculin vers le féminin, laquelle ne pourra, en définitive n’avoir lieu, uniquement que si le Femme le consent, permettant ainsi à la fusion spirituelle et charnelle de s’accomplir pleinement. Et cela devient l’ordre d’entrée des manifestations amoureuses : le spirituel précède le charnel lesquels devront conduire à l’étreinte épanouie. D’un point de vue chromatique, chaque scène érotique s’inscrits sur deux plans de couleur différente, toujours tendre, créant une belle harmonie : même DANS LES BRAS DE MORPHÉE (que nous évoquerons plus loin), répond à cette esthétique car le contraste saisissant entre les couleurs rouge et blanc, ne perturbe nullement le regard.

TEMARI KISS (huile sur toile-huile sur toile)

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L’attitude amoureuse des personnages dérive directement de l’art érotique japonais que l’on retrouve dans les Shungas de la fin du 17ème siècle, jusqu’au milieu du 19ème siècle (bien que les Shungas soient, dans l’ensemble, plus « osées » par rapport aux œuvres de l’artiste). Cette œuvre présente, en l’occurrence, un baiser langoureux conçu dans le cérémonial de sa pose sur la bouche de l’autre ainsi que dans l’attitude physique qui prélude à l’étreinte. Dans l’art érotique japonais, les bouches de l’Homme et de la Femme s’alignent sur le même plan.

Ici, l’on constate un léger déphasage dans l’alignement des personnages, ce qui a pour résultat que le visage de l’Homme étant plus décalé par rapport à celui de la Femme, sa bouche s’imprime en superposition sur la sienne. La tête de la femme ainsi que les épaules, les mains et le pied (à peine esquissé) contrastent avec le vert de la robe et le pantalon gris à fleurs noires et rouges. Cela est dû au fait (devenu une constante dans l’œuvre de l’artiste) que les corps sont d’une blancheur immaculée. Ce qui a pour effet de les envisager dans une sorte d’évanescence charnelle.

La tête, les mains et le pied de l’homme contrastent harmonieusement avec le vert de la chemise ainsi qu’avec le bandeau qu’il porte sur la tête. La boule de laine qu’il tient dans la main (le temari) est utilisée dans un jeu faisant partie de la tradition thaïlandaise.

Notons que c’est également le vert qui domine l’ensemble chromatique. On le retrouve, notamment, à l’avant-plan largement dominé par le bleu-foncé ainsi que dans l’arrière-plan conçu en vert-clair. Les fleurs, sur le pantalon de l’homme attirent le regard, amplifiant l’intensité de la scène.

FIN DE JOURNÉE (100 x 50 cm-huile sur toile)

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Même si, dans l’œuvre précédente, l’homme est en léger décalage face à la femme, force est de constater, après lecture de l’image, qu’elle occupe une position légèrement dominante sur l’Homme, en ce sens qu’elle le dépasse en hauteur de quelques centimètres. FIN DE JOURNÉE nous donne une image, non pas de domination mais presque de « protection » vis-à-vis de l’Homme. Par sa façon d’être penchée sur lui, la femme donne le sentiment de le « couver » amoureusement. Néanmoins, elle se trouve physiquement sur lui. Ce qui, dans l’art érotique japonais duquel ces œuvres dérivent, est parfaitement impensable. L’Homme a toujours le « dessus » sur la Femme. Inutile d’insister sur le fait que cette chorégraphie sexuelle a été usitée par l’artiste précisément pour « contrebalancer » cet état de choses.

KISS ME, SI JE VEUX (100 x 70 cm-huile sur toile)

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Cette œuvre reprend le titre-même de l’exposition, laquelle est centrée sur la tempérance entre les désirs des deux sexes. Nous sommes ici dans un moment d’incertitude. Va-t-elle se donner à ces hommes? Va-t-elle se refuser à eux? Son corps, immaculé, semble vouloir se donner par l’image de ce soutien-gorge en forme de papillon rouge (couleur à la symbolique érotique de surcroît), lequel ne tient qu’à un fil. Les baiser n’existe, à la fois, que dans l’attente de sa matérialisation ainsi que dans le contact charnel entre la bouche du personnage masculin (en bas à droite) qui embrasse goulument les doigts de la femme. Le cadrage de cette œuvre a été longuement pensé. Il se décline en trois étapes : deux étapes régies par le noir. Un premier carré -noir - sur le périmètre de la toile (extérieur). Ensuite, en partant du bas, un deuxième carré également noir, enserrant le buste ainsi que les jambes du couple, jusqu’au personnage (conçu à moitié corps), embrassant les doigts de la Femme. Le deuxième carré (également noir) s’élance jusqu’aux épaules de la Femme – à l’intérieur. Et ce n’est qu’à partir des épaules de celle-ci que se conçoit la troisième étape dans un troisième carré - couleur or – encadrant les personnages masculin et féminin, dans la partie supérieure de la toile. Il s’agit d’un cadrage intérieur « ouvert », en ce sens qu’il permet simultanément à la main du personnage féminin ainsi qu’au coude du personnage masculin du bas, à droite de la toile, de sortir su cadre. Ce qui permet à l’œuvre de s’amplifier dans un élan d’élasticité. Comme pour l’ensemble de l’œuvre de l’artiste, le jeu des mains constitue un véritable dialogue gestuel : il souligne l’abandon dans les bras baissés de la femme offrant sa main à la bouche du personnage du bas, à droite qui l’embrasse. Mais il indique également la possession dans le geste de l’homme serrant passionnément la taille de la femme. De même que pour TEMARI KISS (mentionné plus haut), un léger déphasage s’opère dans la position des visages de l’homme et de la femme, en ce sens que celui de l’homme est en retrait par rapport à celui de la femme. 

FIN DE JOURNÉE (cité plus haut)

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L’œuvre reprend la même thématique amoureuse. Comme nous l’évoquions précédemment, le jeu des mains (et des pieds dans ce cas-ci) est capital. Mais ici, nous assistons à une sorte de danse « statique », tellement le jeu des membres est agité, à l’intérieur d’une lenteur rituelle. Les mains s’inscrivent dans un fabuleux enchevêtrement des formes. A’ tel point qu’il permet toutes les audaces : remarquez la torsion extrêmement allongée du bras gauche du personnage masculin entourant la femme et ressortant de la gauche de celle-ci. Cette audace, nous retrouverons dans l’œuvre suivante. L’Art permet de transcender la réalité dans l’audace d’une licence artistique. Car dans la réalité, cette extension du bras est physiquement impossible.

Le dialogue des corps se forme dans une danse lente au cours de laquelle le corps de la femme se « glisse » littéralement entre les jambes de l’homme.

Dès lors, par rapport à l’art érotique de culture japonaise, duquel l’artiste s’inspire, les « règles » sont inversées, en ce sens que dans la tradition érotique japonaise, l’homme, de par sa position physique dans l’espace, « domine » la femme, en se plaçant sur elle. Dans cette œuvre, le désir fougueux de l’homme est atténué par la tendresse. Dès lors, cette posture de la femme, embrasse la dialectique qui anime le discours pictural de l’artiste, selon lequel c’est la femme qui a le dernier mot. Par sa posture, elle indique son consentement à la fusion physique, assurant ainsi l’harmonie charnelle. 

BAISER DE MORPHÉE (100 x 100 cm-huile sur toile)

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Situé entre de deux plans par rapport à un chromatisme opposé formé de blanc (vers le bas) et de rouge (vers le haut), le couple s’enlace.

Nous assistons à un splendide jeu de contrastes. Le blanc immaculé de la femme fait de sorte que de par sa blancheur, elle émerge de l’avant-plan, également blanc.

Tandis que l’homme, dans un souci de contrepoint pictural, est revêtu d’un manteau à fleurs de couleur verte. Sa décoration est constituée de quatre notes harmonieuses, à savoir le blanc, le jaune, le bleu et le noir. Une légère note bleu-pâle parsème le bras gauche de la femme et se termine dans sa main. Le jeu des mains est d’ailleurs très intéressant. L’artiste nous démontre par un tour de force qu’en Art, TOUT est possible! Observez la main de l’homme enlaçant la femme, conçue en plan : on la voit dépassant le torse de la femme. Il s’agit toujours d’une licence picturale que l’artiste se permet. Elle consiste à (dé)montrer que l’Art dépasse la réalité, en ce sens que cette extension du bras de l’homme enlaçant la femme est, dans la réalité, tout à fait irréalisable, le bras de l’homme étant trop court pour y arriver. Ce n’est que par une cassure de rythme que l’artiste nous fait croire à l’impossible : le bras, occulté par le corps de la femme, fait apparaître de derrière son dos, une main massive, comme par enchantement. La main de la femme, elle, venant par en-dessous, saisit doucement l’homme par l’épaule. Pour la première fois, concernant les œuvres présentes dans l’exposition, la femme, à l’instar de l’homme, est chauve.

L’artiste renoue, une nouvelle fois, avec la tradition bouddhiste, en ce sens que les cheveux sont considérés comme une perruque. Dès lors, leur rasage constitue une étape vers la simplicité, non dépourvue de sensualité.

La femme porte sur son front un symbole dont le dessin est inspiré de l’art traditionnel thaïlandais. L’homme est  graphiquement affirmé dans le champ visuel par un trait noir, autant appuyé que discret, sur les contours de son vêtement au chromatisme prononcé, le séparant à la fois de son propre visage d’un blanc immaculé ainsi que de la femme. Par contre, aucun trait noir ne délimite le corps de celle-ci face à l’arrière-plan de couleur rouge, devenant ainsi évanescente par rapport à l’homme. Il s’agit, à l’instar de l’ensemble de l’œuvre de l’artiste, d’une vision mystique du désir. Une vision partant d’une ritualisation scénique de préliminaires érotiques conduisant à l’extase du rapport charnel. Ne perdons jamais de vue qu’il s’agit, selon l’artiste, d’un acte-pacte lequel ne peut être approuvé que par la Femme.

FÉLINE (38 x 30 cm-huile sur toile)

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Cette toile est la synthèse d’une typologie de regards englobant délicatesse et désir. Mais ici, un stade supplémentaire a été franchi dans l’image de la séduction. De plus, on la retrouve sur le visage des deux personnages. Le visage de l’homme, posé sur les reins de la femme, semble l’ausculter comme l’on écoute les vibrations de la terre. Cette œuvre est un triptyque reprenant le corps de la femme exposé sur les trois parties de la toile. Celle-ci offre une série chromatique basée sur trois couleurs : le blanc (pour le corps de la femme et le visage de l’homme), le bleu clair (pour le vêtement de l’homme) et le vert de l’arrière-plan.      

LE DIALOGUE DES VISAGES ET DES MAINS

Les visages, issus comme nous l’avons précisé, de la tradition picturale japonaise, dérivant de l’art érotique, parcourent l’œuvre de l’artiste. Ils ont pour fonction d’instaurer un dialogue amoureux et s’ils se font face, c’est pour délimiter le champ de leur désir. Car tout, dans leur nature, est une question d’impulsion directionnelle. Les visages, d’un blanc immaculé à l’instar des corps, souvent penchés et plongés dans la plus sainte douceur, conduisent vers le corps de l’autre par l’intermédiaire du regard qui semble être « à l’écoute ». Les mains, elles, assurent une continuité dans les liens entre les personnages. Elles vivent, comme dans les danses thaïlandaises, en scandant le rythme.

LE DIALOGUE DES VÊTEMENTS

Les vêtements des personnages sont, en réalité, des costumes de scène. Car nous sommes ici dans un vaste théâtre, celui du désir. Notre désir. Car ce sont les costumes qui habillent et dénudent simultanément les personnages, en ce sens qu’aucun d’entre eux n’emprisonne les corps mais le libère en laissant transparaître la blancheur essentielle à son Etre. De plus, ils sont, dans une large mesure, amples, permettant aux membres de s’étirer à souhait.

Ce qui accentue le sentiment de liberté qui anime l’œuvre de l’artiste. Ils sont animés par le contraste, à la fois, pictural et symbolique, qu’ils entretiennent autant entre eux ainsi qu’avec la blancheur des chairs. Il y a, en plus d’une mise en scène de l’esthétique, un érotisme du costume dans sa dimension symbolique. Cette  dimension symbolique se retrouve, notamment, dans la façon dont l’artiste « enveloppe » l’homme, blotti entre les bras de la femme, dans MORPHÉE. Porte-t-il un vêtement ou est-il enroulé dans une couverture le maintenant bien au chaud, au sein d’une chaleur à la saveur presque maternelle? Les costumes sont également l’instrument instaurant le lien affectif avec les différentes cultures dans lesquelles l’artiste a évolué : l’Orient et l’Occident se retrouvent, faisant partie d’un TOUT. Ils habillent geishas et notables mais aussi Vierges de tradition européenne. Ils évoluent au rythme des courbes enrobant les personnages dans le chemin de cette mystique sensuelle.   

 

LES TROIS « MADONNES »  

C’est par cette appellation que l’artiste les nomme après que nous lui ayons fait remarquer la ressemblance stylistique de l’une d’entre elles avec le thème de la « Vierge à l’Enfant » dans la peinture de la Renaissance italienne.

ADOPTED (70 x 60 cm-huile sur toile)

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Tout comme les deux autres, cette œuvre témoigne d’une influence européenne. Comment séparer le symbolisme d’une telle scène d’avec une Vierge à l’Enfant de la Renaissance italienne? L’enfant, placé à la gauche de la mère, est entouré d’une aura rappelant l’auréole chrétienne. La position du visage de la femme, elle-même entourée d’une aura dorée, regarde au loin. Celui de l’enfant regarde vers sa mère. Elle porte une coiffe sortie de l’imagination de l’artiste, néanmoins fort proche de certaines coiffes féminines de la Renaissance italienne.

L’arrière-plan est divisé en une zone dorée incluant une deuxième zone bleue, elle-même incluant la coiffe de la femme. A’ l’instar de KISS ME, SI JE VEUX (mentionné plus haut), le cadre est « ouvert », permettant au bras droit de la femme de s’exposer brièvement vers un extérieur fictif. Le jeu des mains entre la mère et l’enfant témoigne d’une infinie douceur. Insistons, néanmoins, sur le fait que pour l’artiste, aucune inspiration strictement « religieuse » n’est à rechercher dans ce tableau. Il s’agit d’une œuvre de plénitude totale. Œuvre « autobiographique » ? En un certain sens si l’on tient compte que l’artiste, d’origine vietnamienne, a été elle-même adoptée. Cette œuvre est, en fait, une réminiscence d’un épisode majeur de sa vie. 

PETITE MARIE : LA JEUNESSE DE MARIE ON N’EN PARLE PAS (70 x 60 cm-huile sur toile)

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Nous sommes face à une œuvre à l’atmosphère festive et désinvolte. Remarquons que cette fois, le nom de « Marie » est prononcé. Il n’y a donc aucune ambigüité sur le propos. A’ la question : «s’agit-il d’un même et unique personnage féminin représenté deux fois, à deux moments différents de son existence? », l’artiste répond : « pourquoi pas? ». La question reste ouverte. Il s’agit surtout de représenter une fillette qui se penche, au de-là du cadre, conçu comme une fenêtre ouverte sur le Monde. Sa mère la retient doucement, en la mettant gentiment en garde d’un geste contrôlé de la main. Cette main, comprise entre celles de la fillette, forme une entité directrice car on peut y voir la volonté d’une diagonale (à peine perceptible) accompagnant, de façon rythmique, la posture penchée vers la fenêtre de la jeune fille. Remarquez la présence de la coiffe sur la tête de la mère ainsi qu’une copie de celle-ci, conçue de façon géométrique (un rien plus rude) portée par la fillette.

BB NELSON. LE GRAND AVENIR DE NELSON M. (70 x 60 cm-huile sur toile) 

12273396267?profile=original« Nelson M. » est, en fait, Nelson Mandela. Retenons la remarque de l’artiste à propos de cette toile : « Le comble, pour Nelson Mandela, s’il avait eu une maman « européenne »…..aurait-il entrepris la même bataille pour le respect des Noirs? » On peut se le demander. Et, tout en se le demandant, l’on peut remarquer que l’enfant n’est plus « blanc », selon les conventions occidentales de l’art sacré mais bien « noir ». Le jeu des mains de l’enfant dont l’une saisit le sein de sa mère est très émouvant. Notons, concernant ces trois tableaux, la conception du cadre, extrêmement fleuri dont le décor rappelle l’esprit « art déco » que l’on trouve sur les vêtements des personnages.

READ MY LIPS (150 x 100 cm-huile sur toile) 

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Nous sommes en présence d’un diptyque dont la dominante chromatique est vert. Le visage humain se limite aux narines et aux lèvres, rendues charnues par l’artiste.

L’on a le sentiment de se trouver face au totem de quelque société traditionnelle, tellement l’atmosphère qui s’en dégage traduit la pensée « primitive ».

Des motifs végétaux, dérivés de la tradition thaïlandaise, ornent les coins supérieurs ainsi que le bas du visage. Une série d’autres motifs agrémentent le haut et le bas de la composition. Ce sont principalement des bandes horizontales et verticales garnies de motifs géométriques. La bande centrale verticale du bas nous revoie à la dialectique principale de l’œuvre dans la conception de quatre visages antagonistes, l’un présentant un faciès de couleur rouge faisant face à une figure de couleur noire, de profil, sur fond vert (en haut). Ils sont prolongés, en bas, par le même schéma sur fond noir, présentant un visage de couleur verte face à un visage de couleur jaune (tous deux en silhouette). Qu’il soit positif ou négatif, le motif antagonique, symbolise en Histoire de l’art, l’émergence d’un rapport. Par conséquent d’un échange. Mais que vient faire ce bambou, posé horizontalement, entre les deux panneaux du diptyque? Nous remarquons qu’il « coupe » littéralement le visage en deux, à hauteur des lèvres, rendues pour l’occasion, extrêmement charnues. La tige de bambou « bloque » pour ainsi dire la parole, en fendant le visage. En le fendant, il exprime l’impossibilité du personnage d’exister. Le traitement chromatique du visage ne déroge pas de la façon dont l’artiste peint les chairs du corps humain : il est blanc, presque translucide.       

ANALYSE DES DESSINS PRÉPARATOIRES

Celles ou ceux qui n’ont jamais vu les dessins préparatoires de Michel-Ange ne peuvent comprendre leur importance dans la réalisation picturale. Il y a les ajouts et il y a les manques. Les indications techniques qui révèlent, in fine, les allongements et les raccourcis, conduisant aux motivations psychologiques de l’artiste. L’intimité du chef-d’œuvre dévoilée.

CAROLINE DANOIS éveille par ses dessins préparatoires, le même sentiment de curiosité face à la complexité de certaines de ses œuvres.  

PETITE MARIE

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La conception spatiale ne varie pas par rapport au résultat pictural. Le jeu des mains, formant une diagonale (à peine perceptible) est néanmoins présent. Il assure l’inclinaison amorcée par la position de la jeune fille. Les deux personnages portent la même coiffe. Celle-ci structure la gestion de l’espace sur les trois-quarts de la toile. Les vêtements sont laissés vides de motifs ornementaux.

BB NELSON

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Dans le résultat final, les mains de l’enfant tâtent la mère. Elles sont parfaitement positionnées sur le sein gauche de la mère (droit par rapport au visiteur). Dans le dessin, le tâtonnement est très incertain. Les mains de l’enfant semblent presque trouver leur chemin avec difficulté. 

ADOPTED  

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Le jeu des mains semble tout aussi incertain, en ce sens que celles de l’enfant ne sont pas « traversées » par les mains de sa mère. En fait, elles se touchent. Les regards ont été modifiés. Les deux personnages se regardent. Tandis que dans le rendu pictural, celui de la mère fixe le lointain. La conception du cadre est intéressante, en ce sens que la bordure est parsemée de toutes petites fleurs. Dans la toile, il est polychromé (bleu-chromatisme dominant-brun et rouge).

READ MY LIPS

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Le dessin préparatoire va droit au but! Il s’agit d’aller à l’essentiel. L’œuvre s’inscrit, non pas sur un diptyque mais bien sur une entité, malgré le bambou traversant la bouche. Le visage n’a pas encore été scindé. Deux zones bi-chromées (jaune sur la gauche, rouge sur la droite) séparent le bas du visage. Un anneau est accroché à la narine droite (gauche par rapport au visiteur) du personnage. Ce détail est absent dans le rendu pictural. Le bambou, traversant la bouche est prolongé vers les limites du cadre. La dimension « totémique » évoquée plus haut, n’est en rien envisagée dans l’esquisse. Tout s’est accompli lors de la création.

FIN DE JOURNÉE

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Ce dessin est, sans doute, le seul qui « colle » le mieux au rendu pictural. Le couple occupe la zone gauche de l’espace. Le jeu des mains ne diffère nullement de celui de la toile. Il en va de même pour le jeu des pieds. La femme se glisse, à l’instar du rendu final, entre les jambes de l’homme. Comme dans la toile, le couple est laissé entre deux espaces chromatiques (non encore précisés par la couleur), fixant l’avant et l’arrière-plan.   

 

Née à Saïgon, adoptée dès l’enfance par une famille belge, citoyenne du Monde par conviction, elle est issue de plusieurs cultures. CAROLINE DANOIS a passé son enfance à New-York et a fait ses études à l’Ecole Internationale de Bangkok.

Elle a, par la suite, entrepris ses études artistiques à l’Université des Beaux Arts de Silapakorn, en Thaïlande où elle a étudié l’art traditionnel thaïlandais ainsi que le graphisme.

Elle a d’ailleurs enseigné cette matière à la Faculté des Lettres en Côte d’Ivoire. Elle est titulaire d’un Master en Thérapie de Famille et Sexualité.

CAROLINE DANOIS peint à l’huile. Sa peinture, faite d’une matière délicatement étalée sur la toile, est lisse. Cette artiste est riche d’un enseignement traditionnel qu’elle conjugue avec une esthétique résolument contemporaine. Sa peinture peut être qualifiée de « distinguée », à la fois dans le sens premier du terme mais aussi parce que tout se distingue dans l’espace pictural qu’elle parcourt. Rien n’est surchargé. Aucune lourdeur ne vient perturber cette douce harmonie faite de rites et de couleurs. Indépendamment de son univers féerique, son œuvre est avant tout militante, nourrie d’un féminisme lumineux et progressiste. Un humanisme centré sur l’équilibre naturel entre l’Homme et la Femme, blottis à l’unisson du désir. 

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2021 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste CAROLINE DANOIS et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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administrateur partenariats
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Disponible le jeudi de 9.30h à 12.30h ?
Envie d'écrire, de s'exprimer avec des mots, des textes, dans une ambiance conviviale, courtoise et bienveillante ? Envie de prolonger les mots avec de la créativité, des réalisations artistiques ?
Sensation Art organise un atelier d'écriture créative pour tous, vivant, animé et accessible aux manieurs de mots, tout comme aux débutants, adultes ayant l'envie de renouer avec les contacts sociaux que nous avons peu à peu perdus.
Renseignements gsm ou messenger Liliane Magotte.
Réservation obligatoire, nombre de places limitées.
Masque obligatoire, pas de CST requis.
Chaussée de la Seigneurie, 84 à Petit-Rechain 4800.
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" L'art d'être grand-père" est un recueil poétique de Victor Hugo (1802-1885), publié à Paris chez Calmann-Lévy en 1877.

Derniers vers de Victor Hugo (les Quatre Vents de l'esprit, publiés par la suite, furent écrits auparavant), ce recueil apparaît comme son testament poétique. Conçu avec la naissance de Georges et Jeanne, les enfants de Charles Hugo, apparition survenue dans le vide créé par la mort de l'épouse de Victor, celle de ses fils et l'internement de sa fille Adèle, cet ensemble fut trop souvent réduit à quelques poèmes un peu mièvres pour anthologies thématiques. Il redistribue pourtant les thèmes développés dans les Châtiments et les Contemplations. Composé de 18 sections comprenant de une à douze pièces où Hugo utilise une grande variété strophique, le recueil développe l'art du grand-père, soit celui d'«obéir aux petits». Loin du sentimentalisme familial chevrotant, il s'agit de rendre évidente la complicité des âges extrêmes dans leur relation avec l'au-delà. Naissance et mort sont deux aurores et le grand-père apparaît parfois comme un vieux gamin vaguement anarchiste, dispensateur de dons, ceux de la lune ou de friandises. Hugo donne le monde à ses petits-enfants.

Le cycle du «Jardin des Plantes» (IV) raconte de nouveau la Genèse. Dans ce microcosme de la Création, où se définit l'immanence divine, le bien compose avec le mal. Cet ancien Jardin du roi, devenu Muséum national d'histoire naturelle, allégorise à sa façon l'Histoire et se peuple de misérables. Enfin, il s'y mêle l'«infiniment grand» et l'«infiniment charmant» dans l'unité de la variété libre, cet ordre véritable. Infini et néant, mixte d'idéal et de chimère, esthétique du labyrinthe: le Jardin des Plantes rassemble enfer et paradis et laisse entrevoir une «lueur dans l'énorme prison». «Pêle-mêle de branchages augustes», le poème du "Jardin des Plantes", où la Genèse se combine aux fables de La Fontaine ou au matérialisme philosophique, rassemble la pensée hugolienne sur la nature et l'Histoire. Passé et présent s'y fondent, annonce de l'avenir.

A ce don poétique de l'univers s'ajoute celui de l'écoute: «Le babil des marmots est ma bibliothèque» (XV, 7). C'est que les enfants parlent une langue d'avant Babel, bégaiement d'avant la poésie, comme «les Griffonnages de l'écolier» (VIII) le sont du dessin. Ces arabesques figurent les combinaisons de l'infini. Le rapport à l'enfance s'énonce dans «Grand âge et bas âge mêlés» (VI). Relation privilégiée, cette complicité de la sagesse et de l'innocence conduit à rejeter tout autant le républicanisme athée que le cléricalisme obscurantiste. De là le refus de la dure loi des pères et de l'écrasement par le péché originel («l'Immaculée Conception», VII). Il faut en finir avec Satan. En attendant le triomphe des petits, le grand-père poète chante «l'Épopée du lion» (XIII), «Enfants, Oiseaux et Fleurs» (X), «Deux Chansons» (XVI) et le «Laus puero» (XV). Au-delà des contradictions et des antithèses, un chant d'amour et d'espérance se construit, reprenant les accords des harmonies poétiques précédentes: confiance dans les pouvoirs illimités de la poésie et éclosion de la lumière dans les ténèbres.

La dernière partie, «que les petits liront quand ils seront grands», conclut et ouvre. Si le progrès boite, si le poète est humilié en ces temps d'imposture, le jour succédera à la nuit, et il faudra bien accepter l'aurore. La justice, c'est-à-dire la pitié, triomphera, et le pardon à venir se lit dans l'ordre du monde: l'âme est «à la poursuite du vrai» (XV, 5).

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PUEBLO

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ASCANIO CELESTINI - DAVID MURGIA, une FABULEUSE symbiose

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Pueblo, dans la lignée de Discours à la nation et Laïka, chante l’authenticité de ces vies oubliées, les perdants, ceux que l’on s’obstine à ne pas voir. Cela donne des portraits attachants, nourris de rêves, de leurs légendes propres, reconnaissants à la vie de ses moindres cadeaux. Dans la bouche de David Murgia qui raconte encore et encore, ils font foule, se croisent, se répondent. On les découvre dans le quotidien avec leur dignité, leur code de l’honneur, les affabulations qui les nourrissent, leur candeur parfois ou leur résignation.

C’est enlevé, plein de grâce en dépit du contexte sordide. Ce sont les petites gens à qui on jette des miettes, des restes périmés de nourriture, un coin au bout d’un parking pour y planter une tente. Ils exercent des activités éphémères, ils vivent dans la rue. Il y a Léonore, la caissière, qui joue à la reine derrière son banc au supermarché et retrouve le soir le fantôme de son père sublimé, Saïd, le manutentionnaire sans-papiers, la tenancière de bar incollable sur les machines à sous, le gamin de huit ans - caché parmi les spectateurs - un petit gitan livré à lui-même depuis la mort de son père, Dominique la clocharde qui n’a pas son pareil pour concocter des festins avec des produits destinés au rebut et qui vit une histoire d’amour avec Saïd.
Tout un peuple silencieux, non revendicateur, qui vit à deux pas de nos maisons et appartements et que l’on peut voir de nos fenêtres pour autant que l’on aille à leur rencontre et que l’on délaisse la télé.

 

Plaidoyer politique, la trilogie de Celestini est une véritable prouesse théâtrale. David Murgia nous guide dans ce peuple aux ramifications infinies avec un bagou à vous filer le tournis. Empruntant le débit des bonimenteurs, il s’infiltre parmi ce peuple, les observe, se fond en eux, commente, digresse, camarade avec le public qui le suit dans ce souffle de 90 minutes presque sans respiration. Son rythme rejoint l’accompagnement sonore assuré par Philippe Orivel, lui-même sur scène avec son accordéon ou son clavier. Ensemble, ils nous transportent dans cette chevauchée fantastique au pays des écorchés, là où l’humour pallie la misère mais où la tragédie et la séparation ne sont jamais loin. Rapatriement ou noyade, l’actualité rattrape la fable.

 

Ascanio Celestini, rappelons-le, est le meilleur représentant de cette veine artistique appelée théâtre-récit, née à la fin des années 80 dans le prolongement de l’art de la narration de Dario Fo. On retrouve chez Celestini la même virtuosité à traiter des sujets graves sur le ton de la farce.

À voir sans modération.

 

Palmina Di Meo  

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HOME - morceaux de nature en ruine

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PERFORMANCES D’ACTEURS AU NATIONAL

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3 acteurs sur scène dans un décor de réfectoire minimaliste de maison de retraite.

3 acteurs non grimés. Ils sont jeunes mais leurs corps sont habités du maintien et des rictus de vieillards. C’est hallucinant, un rien dérangeant...
Des tics et des succions aux crispations et aux tremblements de leurs membres, ils sont asservis à leur rôle de pensionnaires en fin de vie.

 

Tout obéit à une temporalité suspendue. La vie s’écoule au rythme de la progression de ces corps fatigués, voûtés, dans un ralenti souligné par l’immense horloge donnant l’heure en temps réel.

Un temps qui s’étire entre la gestion des déplacements et l’attente des rituels quotidiens, les repas, les visites régulièrement annulées.
Une attente perceptible dès le début qui fait écho à celle des spectateurs, pressentis comme des visiteurs. Une observation réciproque où le moindre mouvement, le moindre bruit devient événement et suscite des réactions non pas verbales mais des pincements de lèvres, des haussements interrogatifs de sourcils, obligeant l’assistance à une concentration sur ces mouvements imperceptibles.

Paradoxalement, les accidents majeurs, les chutes, la dégradation de l’environnement sont dédramatisés, dilués dans l’indifférence générale, ce qui introduit une forme d’humour défensif.

 

Pour obtenir un tel résultat, les acteurs ont côtoyés des personnes âgées dans une maison de retraite d’Ixelles et ont créé avec eux des liens par une véritable rencontre. Imprégnés de l’atmosphère de lente décrépitude de ces lieux d’assistance pour personnes à mobilité réduite qui ne sont autre que des mouroirs, ils ont parfait la maîtrise de leurs mouvements au moyen de la méthode Feldenkreis. Sans copier quiconque, sans caricaturer, ils ont créé des personnages originaux avec les résistances de leur propre corps, nous renvoyant à une lecture documentariste.

 

Diplômée de l’Insas, Magrit Coulon, la metteuse en scène, s’intéresse à la gestion du temps comme outil d’architecture scénique depuis son mémoire de fin d’études. « Home - morceaux de nature en ruine » a été récompensé du prix Maeterlinck de la meilleure Découverte. Sur une dramaturgie de Bogdan Kikena avec qui elle a fondé sa compagnie Wozu ?, elle capte avec une maestra incontestable les infimes soubresauts de vies en suspension et nous aspire lentement, le temps d’une représentation, dans ces espaces temporels que l’on a instinctivement tendance à éviter.

 

Chapeaux bas à ces artistes, Carol Adolff, Alice Borgers, Anaïs Aouat et Tom Geels qui ont physiquement disparus dans l’incarnation de ces personnages qui nous attendrissent malgré eux, empruntant les voix par des moyens techniques les voix des pensionnaires du Home Malibran.

 

Palmina Di Meo

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administrateur théâtres

Prix d’excellence pour Notre Dame de Paris, d'après Victor Hugo au théâtre du Parc, janvier 2022

 

Le directeur du magnifique théâtre Tristan Bernard à Paris avait  décidé de présenter le spectacle de Thierry Debroux, Notre Dame de Paris d’après Victor Hugo,  du 7 mars au 30 juin  2020. Ils ont pu  jouer trois petits soirs, et puis … l’épidémie de Covid a  foudroyé toute  la  beauté de ce magnifique travail de transmission !

Enfin,  voici que  le 13 janvier 2022, après une longue errance à travers  les aléas du drame sanitaire mondial,  le spectacle revient sur les planches du théâtre Royal  du Parc à Bruxelles  et c’est un véritable triomphe. Musical, visuel et théâtral. 


Le texte, Notre D(r)ame, publié  aux éditions Lansman,  est  inspiré par la terrible catastrophe de l’incendie de Notre Dame du  16 avril 2019.  L’hubris démesuré de l’homme moderne fut incapable d’empêcher la  toiture, la charpente et la flèche conçue par Violet Leduc de se transformer en  brasier. Restaient seulement le désespoir des pierres,  les voix effarées des gargouilles et des chimères de la cathédrale  dont  Thierry Debroux  semble avoir pu surprendre les  mystérieuses conversations et les craintes d’une reconstruction hâtive.

 L’univers  imaginaire inventé par l’auteur est magique: les époques conversent ensemble comme si elles étaient au paradis. Le temps est  dilué, l’immortalité de l’œuvre de Victor Hugo et  de la Cathédrale, se confondent avec une histoire d’amour  contemporaine d’une jeune danseuse hip hop en mal d’amour, prête au suicide et qui n’a jamais entendu parler de la Belle Esmeralda. L’œuvre de Victor Hugo bondit  sous les yeux de la  vivante cathédrale qui trône au centre du plateau : on se gorge d’émotions à chaque tour de la cathédrale sur elle -même, entendez, chaque fois que  l’une de ses façades égrène heures et jours différents.  Non sans rappeler les façons de Monet, le  grand maître des lumières impressionnistes. Ah quelle superbe rosace!

Dans une harmonie à tomber, les comédiens jouent dans la joie, avec une énergie décuplée par les privations subies depuis deux ans. On assiste à une espèce de renaissance sur ce plateau où ils se montrent franchement éblouissants.

Comme si, l’espace d’un spectacle, on pouvait jusqu’à oublier la pandémie.

Les changements de scène se font sans le moindre bruit, ils sont d’une fluidité remarquable et de même pour les passages entre le jeu et le narratif. On se trouve au cœur de l’art vivant.  Prenez le mouvement imprimé à la corde qui meut la cathédrale, ne fait-il pas  fait penser à des gestes de batelier ? Ne  sommes nous pas, à Paris ou à Venise,  tous sur une nef des fous?  A moins que l’on soit plus d’humeur à y voir le mythe de Sisyphe.

Un art consommé de la concision et de la polysémie  anime le créateur.  L’œuvre fleuve de Victor Hugo  se retrouve exposée en 1H25 SANS ENTRACTE. Tout y  est.  Oui, on est  gratifié d’un authentique  élixir de magie théâtrale.

  D’un côté, il y a le peuple de pierres séculaires, les chimères de Violet Leduc, avec  le dénommé  stryge, le « démon pensif », sous l’apparence d’un buste de femme oiseau aux yeux en escarboucles, et de l’autre les antiques gargouilles du Moyen-âge gothique. Ces impressionnantes marionnettes se font la conversation avec les voix des personnages principaux. Didier Colfs papillonne entre le détestable  prêtre lubrique Claude Frollo, le Stryge, un rat de la cour des miracles, un juge répugnant, et … un quidam de la foule des manants.  C’est un bouleversant Stéphane Fenocchi qui s’empare du personnage monstrueusement attachant de Quasimodo, il  fait la gargouille 23, se mue en corbeau maléfique avant de  rejoindre lui aussi  lui aussi la foule. Le vaniteux Phoebus, sous les traits de Mickey Bicar, se transforme en gargouille 52 , ramasse les oripeaux de Clopin Trouillefou et fait un innommable avocat de la défense qui ne trouve rien à dire.   Enfin, Marc Laurent,  le Poète Gringoire en grand échalas égaré dans la cour des miracles se glisse dans la gargouille 37 – allô mademoiselle 36-37, votre prénom c’est bien Juliette –  avant de tomber pour la très radieuse, l’incomparable Marie Phan qui  a accepté de jouer le rôle stupéfiant d’Esméralda, avec son adorable chèvre, ton sur ton avec ses jupes de bohémienne. L’énergie de ce spectacle est au zénith,  vous fait un bien fou et vous raccommode avec toute la tristesse du monde.


Dominique-Hélène Lemaire pour Arts et Lettres , le 878e billet culturel depuis la création du blog

 

Du 13 janvier au 12 février 2022

Théâtre Royal du Parc
Rue de la Loi, 3 1000 Bruxelles

thttp://www.theatreduparc.be
info@theatreduparc.be
+32 2 505 30 30

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Simone de Beauvoir

On peut dater de l'année 1970 une transformation irréversible du rapport des femmes à la littérature. Jusqu'alors l'opinion commune considérait les femmes artistes comme des exceptions. On s'intéressait parfois aux «images de la femme» dans l'histoire des textes littéraires, mais on ignorait presque totalement la pratique des femmes écrivains. Femme image ou reflet d'un désir masculin, voilà ce que le féminisme de la seconde moitié du XXe siècle aura violemment contesté, sous une forme ou sous une autre, au moment même où, dans un système économico-politique qu'il faudrait qualifier plutôt à présent d'«antisexuel» que de «mâle», les médias, la publicité, l'organisation du travail et de la production mettent plus que jamais peut-être en circulation l'objet d'échange et de commerce «femme». Si bien que l'on se trouve devant le paradoxe suivant: on ne peut parler correctement des textes féminins sans prendre pour point de départ le nouveau féminisme, alors qu'il n'est pas sûr que ce dernier ne soit pas lui-même rapidement devenu l'objet d'un commerce particulièrement lucratif (réel ou symbolique), notamment dans l'édition.

Vers 1970, le nouveau mouvement féministe, né principalement aux États-Unis (au Women's Rights Movement réformiste des années soixante succède en 1968 le Women's Liberation Movement, beaucoup plus radical), n'expose plus seulement, comme les rassemblements précédents, des objectifs de lutte contre l'inégalité des sexes, mais s'efforce aussi d'affirmer et de représenter la «différence féminine», différence, disent les féministes, de sexualité, de perception du corps, d'expérience et de langage, si bien que la question culturelle se trouve d'emblée au centre du mouvement. Le nouveau féminisme produit ses propres écrivains et ses propres artistes, dont l'art se définit en fonction d'un a priori féministe, comme Kate Millett ou Adrienne Rich, aux États-Unis, Monique Wittig, Xavière Gauthier ou Hélène Cixous, en France. Il affirme par ailleurs la nécessité de réévaluer les pratiques féminines, traditionnellement mineures: journaux intimes, broderies, couture, cuisine, etc. Le mouvement réactualise enfin les grandes oeuvres féminines et en permet une relecture qui prenne en compte le point de vue spécifique d'après lequel elles ont été réalisées: c'est le cas, par exemple, de l'oeuvre de Virginia Woolf, ou même, dans une certaine mesure, en France, de celle de Gertrude Stein. Le «féminin» dans la culture n'apparaît ainsi plus seulement comme une fonction négative mais aussi comme un élément dynamique, voire novateur.

 

 

1. L'édition féministe

 

Parmi les causes (entrée massive des femmes dans le monde du travail, débats publics et lois nouvelles sur l'avortement, la contraception, l'égalité des droits civiques et sociaux, etc.) qui ont fait de la question féminine un sujet d'actualité de grande ampleur, l'apparition d'une «édition féministe», consacrée exclusivement aux interventions des femmes, est loin d'être négligeable. Cette édition féministe rend en effet possible un regroupement de textes féminins, crée un foisonnement extrêmement important et ressuscite certaines oeuvres (par exemple, des romans américains du XIXe  siècle tels que The Awakening, de Kate Chopin, ou Ethan Frome, d'Edith Wharton; en Italie, Una donna, de Sibilla Alleramo, etc.). Elle a enfin incité les maisons d'édition traditionnelles à ouvrir à leur tour des collections réservées aux femmes. Il en a résulté depuis 1974 environ une prolifération tout à fait extraordinaire de textes écrits ou prononcés par des femmes, dans des domaines aussi différents que l'ethnologie ou la poésie, le témoignage ou le pamphlet, etc.

Issue du mouvement féministe, cette édition révèle la réussite des femmes à se faire entendre. Cela commence aux États-Unis: aux innombrables pamphlets des premières années du Women's Lib succèdent vers 1969 les journaux, remplacés ou secondés vers 1972 par les revues, les magazines, etc., puis pris en charge vers 1973 par les maisons d'édition, avec les livres, dont la publication devient de plus en plus large. La présentation, la mise en pages, les contenus des journaux initiaux (It Ain't Me Babe, Of Our Backs, Every Woman...) indiquaient déjà l'orientation principale des publications féministes futures: plus que de littérature, ou même de journalisme, il s'agit de prises de parole et de témoignages.

En France, les options sont parfois différentes, ou même hostiles au féminisme américain. C'est ainsi que les éditions Des femmes ont refusé le terme de «féminisme» comme sujet à des emplois suspects ou trop limités et ont créé, à partir du groupe Psychanalyse et politique, ce qu'elles appellent le Mouvement des femmes. On retrouve néanmoins dans l'édition française les grands traits de l'édition féministe américaine. Des titres comme Dire nos sexualités (Xavière Gauthier), Parole de femme (Annie Leclerc), L cause (titre d'une revue), La Ventriloque (Claude Pujade-Renaud), Les Mots pour le dire (Marie Cardinal), Les Parleuses (Xavière Gauthier et Marguerite Duras), Les Doigts du figuier, Parole (Jeanne Hyvrard), etc., indiquent assez comment, pour les femmes françaises aussi, la première fonction de l'écriture est de permettre la communication, l'explosion d'une parole enfin libérée du silence ou d'un «bavardage» rendu à ses droits. L'accent est mis sur les caractères «spontané», «direct», prosaïque, ordinaire de cette parole: les femmes écrivent pour parler, simplement, à la première personne, entre elles ou pour se faire entendre d'un destinataire absent. Leurs écrits sont des confessions, proches en cela des journaux intimes qu'elles tenaient avant que n'existe une édition féministe (et qui accèdent parfois eux-mêmes à la publication, tel ce recueil américain d'extraits de diaries of women édité par Mary Jane Moffat et Charlotte Painter). La répétition, de livre en livre, de témoignages et d'expériences identiques, presque interchangeables, l'importance du facteur quantitatif, l'accent mis sur l'expérience quotidienne (dans le film de Chantal Akerman, Jeanne Dielman, le spectateur assiste de bout en bout aux activités ménagères de Jeanne), la dominante «gynécologique» (récits de grossesses, d'avortements, etc.) sont  autant d'éléments qui contribuent à créer une sorte d'«effet de foule», d'un genre très nouveau. L'édition féministe nous montre, en effet, ce que nous n'avions jamais vu ; ces «couloirs obscurs de l'histoire» aurait dit Virginia Woolf, où une foule, constituée non plus d'hommes au travail mais de femmes, s'occupe à traiter, dans l'anonymat, les problèmes individuels ou familiaux de la vie quotidienne. Il arrive que ces récits consolident la tradition, comme L'histoire est un tricot, d'Annie Leclerc, mais ils parviennent aussi parfois, plus positivement, à interroger cette «identité anonyme» des femmes à laquelle sont consacrées depuis longtemps les grandes oeuvres féminines. Certains de ces textes nés du nouveau féminisme présentent néanmoins le danger de la confusion de l'oral et de l'écrit, de l'usage non critique d'une «langue de femme» (mais une telle langue est-elle possible?) et du recours, d'un narcissisme souvent naïf, à un «je» qui semble signifier une adéquation parfaite du sujet à lui-même.

 

 

2. Contre-culture

 

Les premiers livres publiés ont été pour la plupart, en particulier aux États-Unis, des ouvrages théoriques, le mouvement féministe étant d'abord un rassemblement politique et idéologique. Qu'il s'agisse de rééditions des grands classiques de l'analyse féministe (essentiellement, Le Deuxième Sexe, de Simone de Beauvoir, The Feminine Mystique [La Femme mystifiée], de Betty Friedan, ou encore, sur un autre plan, L'Origine de la famille, de la propriété privée et de l'État, de Engels) ou d'études nouvelles dont la réputation a grandi très vite (Sexual Politics [La Politique du mâle], de Kate Millett; The Dialectic of Sex [La Dialectique du sexe], de Shulamith Firestone; The Female Eunuch [La Femme eunuque], de Germaine Greer; et aussi en Angleterre, Psychoanalysis and Feminism [Psychanalyse et féminisme], de Juliet Mitchell; en Italie, Dalla Parte delle Bambine [Du côté des petites filles], d'Elena Gianini Belotti, etc.), ou encore d'anthologies regroupant des interventions variées de femmes (par exemple, le recueil américain de Robin Morgan, Sisterhood Is Powerful) et révélant par là, de manière tangible, l'existence du «mouvement» comme tel (cf. en France, des numéros spéciaux de revues republiés en livres comme Les femmes s'entêtent ou des recueils de textes étrangers comme Écrits, Voix d' Italie), ces textes doivent nous être présents à l'esprit, si nous voulons être en mesure de lire dans leur histoire les fictions féministes qu'ils ont précédées. Malgré des différences sensibles d'analyse ou d'option, ils finissent tous par constituer une contre-culture.

La phrase célèbre écrite par Simone de Beauvoir dès 1949 dans Le Deuxième Sexe: «On ne naît pas femme, on le devient» indique sans doute le point central de toute théorie féministe. Le livre d'Elena Gianini Belotti, Du côté des petites filles, analysant les conditions répressives de l'éducation des filles, va dans le même sens. De là découlent, schématiquement, deux tendances de l'analyse féministe: d'une part, celle qui accorde aux phénomènes socio-historiques la première place et demande, comme le déclaraient en novembre 1977 les femmes de la revue Questions féministes, le droit pour les femmes aussi «au neutre [à la définition non sexuée], au général»; et, d'autre part, celle, dominante au moins sur le plan des publications, qui, tout en tenant compte constamment de l'histoire de l'oppression des femmes, met en avant dans une thématique de la différence quelque chose qui serait comme une «nature féminine». Mais dans tous les cas l'écriture féministe est amenée, de manière plus ou moins principale, à mettre en lumière un aspect de la condition faite aux femmes, et à dénoncer les expériences négatives de viol, d'exclusion ou d'oppression. Celles-ci ne constituent pas, néanmoins, le sujet unique de l'écriture, qui fait aussi écho à une attitude globalement et explicitement théorique du féminisme comme critique et analyse du «patriarcat». De ce point de vue, le livre de Valerie Solanas, S.C.U.M. Manifesto (Society for Cutting Up Men, c'est-à-dire Société pour la castration des hommes), a marqué en son temps (1968-1971), sous la forme du scandale, l'histoire du mouvement: l'auteur, qui était au même moment en prison pour avoir agressé l'artiste Andy Warhol, proposait pour dénouement d'une fiction délirante où les femmes devenaient les «maîtres du monde» l'assassinat de tous les hommes. Dans la théorie, c'est le patriarcat comme entité politique et idéologique qui est mis en question. Aux États-Unis toujours, des livres comme celui de Kate Millett (La Politique du mâle) s'attachent à décrire les modes de répression sexuelle et culturelle à l'égard de la femme, tels qu'on peut les repérer dans la littérature «masculine», en analysant les principes d'un «pouvoir mâle». Les féministes américaines ont encore créé, dans la plupart des universités, des women's studies, où sont étudiés les schémas littéraires dominants, ainsi que des revues de critique littéraire et culturelle (telle la revue Signs à Chicago). Si, enfin, l'essai-fiction de Virginia Woolf intitulé Trois Guinées (1938) a rencontré un succès tel qu'il a été traduit et publié à nouveau dans la plupart des pays où existe une édition féministe, c'est parce qu'il met violemment en procès un ordre patriarcal qui conduit à la guerre et au fascisme et interdit aux femmes les possibilités matérielles et symboliques d'accéder à la culture.

L'unité des différentes tendances du féminisme réside dans l'affirmation constante de ce point de vue critique, c'est-à-dire différent. À cet égard, l'évolution du mouvement est à peu près partout identique. D'une manière générale, on constate vers 1974 un déplacement des préoccupations sociopolitiques vers des objectifs plutôt culturels; c'est le cas très nettement en France, avec les éditions Des femmes. L'Italie, où le féminisme demeure assez «violent», fait un peu exception. Dans tous les cas, le phénomène de mondialisation de l'édition féministe aboutit à la constitution d'un nouveau champ culturel construit sur un principe de sororité (sisterhood, sorellanza, etc.) qui fait que tous les grands livres du féminisme, qu'il s'agisse d'essais ou de fictions, sont traduits dans presque toutes les langues.

La revue belge Les Cahiers du G.R.I.F. présente dans un de ses numéros intitulé «Créer» un exposé assez clair de l'analyse féministe de la question culturelle. C'est la notion même de création qui s'y trouve critiquée: «On peut se demander [...] si la hantise de la création [...] ne relève pas de la conception propre de l'Occident industriel, qui consiste à définir l'homme par sa capacité de produire des objets.» Cette condamnation de l'objet -et donc notamment de l'«objet d'art» -est un élément fondamental des réalisations féministes, en particulier dans le domaine de la littérature. Le mot même de littérature apparaît comme suspect, et on lui préfère celui d'écriture, qui met l'accent sur une pratique et semble éloigner le danger fétichiste dénoncé dans la culture dominante. Les textes féministes rechercheront les caractères de l'«éphémère», du «non-art»: inachèvement, refus de la «phrase», et souvent de tout travail de formalisation esthétique, réévaluation de la communication aux dépens du «langage poétique». Il s'appliqueront surtout à privilégier un rapport direct de l'écriture au corps, comme on peut le voir par exemple dans Le Corps lesbien de Monique Wittig: tout dans ce livre, la présentation, la mise en page, la typographie, semble fait pour produire l'illusion d'une identité absolue du livre et du corps. Par analogie avec la notion de «négritude», Simone de Beauvoir avait posé celle de «féminitude» : elle voulait désigner par là un ensemble de qualités acquises dans l'oppression. C'est bien ainsi qu'il faut envisager la contre-esthétique de l'écriture féministe, et c'est pourquoi on peut aussi parler à son propos de contre-culture. Ce faisant, on prend également en compte un «sous-développement» tendanciel des textes féminins.

Bien que dans un «féminisme» de type américain et un «mouvement» de type français, les axes de l'élaboration théorique soient les mêmes (Marx et Freud, repris et critiqués dans une pensée féministe), les analyses, et leurs conséquences sur les productions littéraires, sont assez radicalement différentes. La tendance américaine impose en effet une théorie principalement négative (critique universitaire du patriarcat) et privilégie les expériences de révolte et d'engagement. Les textes de fiction qui en résultent sont en majorité des poèmes, qui retranscrivent directement un lyrisme oral de revendication ou d'amour (telle l'oeuvre d'Adrienne Rich) ou des romans de style classique rapportant des situations d'oppression ou des relations sentimentales (par exemple, Sita, de Kate Millett). Dans l'ensemble, la langue proprement dite n'est pas remise en question, à la différence du mouvement des femmes en France, pour lequel «le rapport au corps et aux images maternelles» reste principal, produisant une réévaluation non seulement des contenus du discours «phallocentriste», mais de la langue elle-même, dans le jeu de ses signifiants et de ses hiatus esthétiques -s'il est vrai que «la fonction maternelle est liée au processus pré-oedipien et, par cela même, à la réalisation esthétique» (Julia Kristeva). C'est dire que le mouvement français est solidaire de la culture contre laquelle il pose une contre-culture qui serait de l'ordre du refoulé.

 

 

3. Héroïnes

 

«Ont-elles jamais existé, ces fabuleuses nations de jeunes filles, ces démons montés, galopant dans tous les coins du monde en faisant gicler de tous côtés glace et sable doré?...» se demande Helen Diner dans Mothers and Amazons: The First Feminine History of Culture. Le féminisme tend en effet à inventer une histoire mythique des femmes, puisque, comme le notait Virginia Woolf, «nous ne savons rien d'elles, excepté leur nom, la date de leur mariage, le nombre d'enfants qu'elles ont portés». Sans parler des féministes célèbres de l'histoire (Mary Westmacott, Flora Tristan, Louise Michel, Alexandra Kollontaï...) dont les écrits, romanesques ou théoriques, sont réédités, toute femme dont le nom est demeuré, pour une raison ou pour une autre, dans notre culture, peut faire figure d'héroïne: par exemple, Anna O, la «première hystérique» de Freud, symbole d'une parole différente, formulée non pas sur le mode d'un discours, mais au lieu même du corps (par les symptômes); ou encore, Lou Andréas-Salomé, inspiratrice des premiers psychanalystes et d'écrivains comme Nietszche ou Rilke, retirée quant à elle dans une expérience de recherche de l'origine et de la différence des sexes vécue sur son propre corps; il y aurait encore Elizabeth Packard et Zelda Fitzgerald, empêchées toutes deux d'écrire, malgré leur talent, par la vanité d'un homme, ou Colette et Anaïs Nin, figures d'une expérience littéraire typiquement féminine. On réédite parfois les oeuvres de ces héroïnes. On publie des biographies et des commentaires de leur vie ou de leurs écrits. On redécouvre des textes plus ou moins «féministes» qu'elles ont pu écrire, comme ce recueil de textes d'Anaïs Nin intitulé Être une femme. Les héroïnes du nouveau féminisme sont aussi des personnages romanesques conçus par des femmes, telle la «Lol V.Stein» de Marguerite Duras, emblème de la féminité comme absence, oubli de soi, ou encore ce personnage d'un roman très populaire de Sylvia Plath, The Bell Jar (La Cloche de détresse), que son auteur conduit à la découverte de son exploitation sexuelle et de son oppression sociale et culturelle. Enfin, quelques grandes fictions féministes (Trois Guinées, Une chambre à soi, de Virginia Woolf, La Cloche de détresse, etc.) prennent fonction de textes sacrés. Car, et Virginia Woolf le montre exemplairement, il ne suffit pas à une femme qui veut écrire de reconnaître dans sa mémoire un héritage spécifiquement féminin, maternel («Car nous, c'est à travers la pensée de nos mères que nous pensons, si nous sommes femmes...»), il lui faut encore inventer une généalogie nouvelle d'artistes femmes, une histoire culturelle féminine, un précédent non plus seulement familial mais social.

Cette nécessité de revendiquer un héritage au moins double (sinon triple, puisque bien sûr il faudra tenir compte aussi de l'intertexte culturel au sens large, représenté, par exemple, chez Virginia Woolf par la fascination pour la bibliothèque paternelle) indique d'ailleurs une des articulations contradictoires de l'«écriture féminine». Celle-ci est en effet amenée, de manière explicite ou non, à mettre en scène un rapport de rivalité entre une tendance «maternelle», tournée vers le don, la dissolution d'identité, l'anonymat, la ritualité, et une tendance culturelle qui en est dans une certaine mesure l'antithèse. Comme le dit encore Virginia Woolf, «il est significatif que, des quatre grandes romancières -Jane Austen, Emily Brontë, Charlotte Brontë, George Eliot-, aucune n'a eu d'enfants, et deux sont restées célibataires». La reconstruction d'une histoire des femmes par le nouveau féminisme est tributaire elle aussi de cette contradiction: d'un côté, les mères en général sont les héroïnes méconnues des temps passés, les femmes dont il faut lever l'oppression ; mais, de l'autre, les héroïnes sont aussi Amazones (comme dans le livre de la féministe américaine Ti-Grace Atkinson, Odyssée d'une Amazone) ou sorcières (voir le groupe américain Witch ou la revue française Sorcières), femmes stériles, homosexuelles ou frigides qui ont créé, dans le refus de la normativité sexuelle et dans la folie, les éléments de leur propre histoire.

 

 

4. Suicidées de la société

 

«Toute femme née pourvue d'un grand don au XVIe siècle serait certainement devenue folle, se serait tuée ou aurait terminé ses jours dans une chaumière solitaire à l'orée du village, à demi sorcière, à demi magicienne, crainte et faisant l'objet de moqueries...» (Virginia Woolf, Une chambre à soi.) «Elle parle la langue des marécages. Pourquoi s'étonner qu'on ne la comprenne pas? Quelquefois, par mégarde, le patois. Mais tu ne dois pas. La sorcière au châle noir éructe...» (Jeanne Hyvrard, Les Prunes de Cythère.)

Si la «sorcière», déjà louée au XIXe siècle, dans des termes grandioses, par Michelet, a pu apparaître aux nouvelles féministes (et tout particulièrement en littérature) comme un archétype de figure féminine revendicatrice, c'est sans doute par la force de négativité qu'elle représente. Personnage d'une mythologie noire opposée aux mythologies «familialistes», nantie d'un pouvoir parallèle au pouvoir social, liée à cette nature mystérieuse et sans parole que notre idéologie associe à la féminité, elle rassemble les traits d'un irrationnel où la maternité productive et positive se renverse en une puissance de mort. Or tel est bien le problème central de la réflexion féministe contemporaine. En effet, si dans la fonction maternelle une femme peut ressentir, en tant qu'individu, le risque d'un clivage opéré sur son corps et d'une perte d'identité, si la maternité ne dit pas le tout de la féminité, cette dernière sera renvoyée, par un principe d'exclusion, à l'espace négatif de la sorcière: solitaire, mutique, asociale, improductive, repliée sur une féminité en absence, confrontée à l'image persécutrice de sa propre mère, une telle femme sera projetée dans un processus de déconstruction de type psychotique, que souvent l'écriture, ce «garde-fou» (LaraJefferson, Folle entre les folles), ne suffira pas à détourner ou à objectiver.

De ce point de vue, l'histoire d'un certain nombre de femmes écrivains pourrait être racontée comme celle de «suicidées de la société» (pour reprendre la formule d'Artaud à propos de Van Gogh). Un grand nombre des meilleurs auteurs féminins du XXe siècle ont en effet vécu et sont morts dans des conditions tragiques, traversés et  détruits par cette «folie» qui n'est jamais qu'un bord assigné par le système social. Virginia Woolf, divisée toute sa vie entre l'écriture et la maladie mentale, se noie dans la rivière proche de sa maison en mars 1941, à l'âge de cinquante-neuf ans. Sylvia Plath, poète (Ariel) et auteur de La Cloche de détresse, roman paru en 1963, se suicide un mois après la sortie de celui-ci, à l'âge de trente ans; Anna Kavan (Neige, Demeures du sommeil), Sophie Podolski (Le pays où tout est permis), ainsi que Danièle Collobert (Il donc) mettent aussi fin à leurs jours. Unica Zürn, dessinatrice et écrivain, auteur de deux très beaux livres, L'Homme-Jasmin et Sombre Printemps, après avoir été internée à plusieurs reprises dans des cliniques psychiatriques, se suicide le 19 octobre 1970, à l'âge de cinquante-quatre ans. Toutes ces femmes ont expérimenté sur leur propre corps ces traits de la maladie et de la douleur dont notre société a fait, depuis la parole de la Bible («Tu enfanteras dans la douleur»), un apanage de la féminité. De cette déchirure physique et mentale, leurs textes ne cessent de rendre compte: L'Homme-Jasmin se présente comme le journal clinique d'une malade qui jouit des images colorées, des rêves, des symboles et des rites étranges de son délire; Demeures du sommeil met en scène l'alternance fascinante de la veille et du sommeil, de la douleur et du rêve peuplé de fantasmes et de fantaisies; La Cloche de détresse est le récit de la crise psychique grave qu'a subie vers l'âge de vingt ans Sylvia Plath elle-même.

On retrouve dans les textes littéraires à proprement parler féministes, mais cette fois-ci sous une forme le plus souvent idéologique, cette même représentation de la folie: des femmes comme Jeanne Hyvrard, Emma Santos, Hélène Cixous, Madeleine Gagnon revendiquent un droit au délire. «Ils disent qu'ils vont me guérir. Mais c'est pour me normaliser. Ils disent que je suis folle. Mais c'est pour ne pas entendre ma voix», explique Jeanne Hyvrard dans Mère la mort; «La folie me fait peur et me séduit. La folie me fait danser», raconte Madeleine Gagnon dans Retailles. Enfin, d'une manière plus générale encore, on peut dire que le discours psychiatrique ou psychanalytique est une référence systématique des écrits féministes. Nombreuses sont, par exemple, les fictions de femmes qui se présentent comme un récit de maladie mentale, une correspondance avec un psychanalyste, etc. À cet égard, deux livres ont peut-être plus particulièrement fait date dans le contexte du féminisme: celui de Lara Jefferson, Folle entre les folles, et celui de Mary Barnes et Joseph Berke, Mary Barnes, un voyage à travers la folie. Tous deux retracent le combat authentique que deux femmes aliénées et internées ont mené, par les moyens de l'art (pour Lara Jefferson, l'écriture, pour Mary Barnes, la peinture), contre leur propre maladie. Associé à l'antipsychiatrie moderne, le féminisme a ainsi permis la publication de textes traditionnellement privés, relégués dans les dossiers médicaux, et a par là même contribué à révéler le lien historique de la féminité et de la psychose.

 

 

5. Le «continent noir»

 

À propos de la sexualité féminine, Freud emploie la formule désormais bien connue de «continent noir» de la psychanalyse. À peu près à la même époque, un jeune Juif viennois, Otto Weininger, publie un livre raciste, mysogine et antisémite, Sexe et Caractère, et se suicide quelques mois plus tard après avoir déclaré à un ami: «As-tu déjà pensé à ton double? et s'il arrivait maintenant! Le double est cet être qui sait tout de chacun, qui sait même ce que personne jamais n'avoue!» Et Freud encore disait: «La pénétration dans la période pré-oedipienne de la petite fille nous surprend, comme dans un autre domaine, la découverte de la civilisation minoé-mycénienne derrière celle des Grecs.» Dans ces trois exemples apparaît la même image: celle d'une étrangeté (sexuelle) de la femme, décrite en termes de race. Cette étrangeté est aussi proximité violente d'un «double» de soi-même: autre côté, autre race, métaphore du dehors ou du différent au plus profond de soi, cette image raciste, qui fait référence à l'organisation colonialiste des sociétés occidentales, confond dans la même exclusion la femme et le «colonisé» (Juif, Noir...). Or cette confusion est revendiquée par les féministes elles-mêmes, de la même manière qu'elles peuvent revendiquer une définition négative par la «folie».

Le mouvement américain a ainsi parfois repris à son propre compte le slogan des Noirs: I am black and I am beautiful; Simone de Beauvoir, on l'a vu, forge le mot de «féminitude» sur le modèle de «négritude»; Hélène Cixous, juive française de mère allemande et originaire d'Afrique du Nord, fait, elle, l'éloge du «continent noir»; dans Les Prunes de Cythère, Jeanne Hyvrard écrit l'histoire d'une colonisation dans les «îles», et dédie son livre «au Nègre inconnu». Les exemples de ce retour par les féministes modernes à un imaginaire «africain» ou plus largement d'exotisme et de sauvagerie pourraient être multipliés presque à l'infini. De manière peut-être plus troublante, on le retrouve aussi avec la même fréquence chez des auteurs qui n'ont pas de rapports directs avec le mouvement ou, du moins, avec sa théorie et ses axes de revendication. Pour Marguerite Duras, l'écriture est ainsi le moyen d'un retour aux images de l'enfance en Indochine et d'une réflexion sur un passé colonial désormais clos, où la pauvreté côtoyait la richesse et où la maladie, la perte de soi, la mort étaient les fondements mêmes où se relançait la vie des femmes (Un barrage contre le Pacifique, Le Vice-Consul, India Song). La question coloniale est encore centrale chez Doris Lessing qui consacre une partie de son oeuvre principale, Le Carnet d'or, à des scènes rhodésiennes à travers lesquelles l'analyse politique en termes de lutte des classes tenue par les personnages masculins apparaît à la fois dérisoire face à l'oppression plus tragique des Noirs rhodésiens, et illusoire du point de vue des personnages féminins. Enfin, on ne saurait oublier que le premier roman de Virginia Woolf, La Traversée des apparences (The Voyage Out), a également pour cadre un pays tropical et que c'est dans la région centrale de la forêt, vierge comme Virginia, que l'héroïne, Rachel, rencontrera sa féminité, sa sexualité et, du même coup, sa destruction et bientôt sa mort.

Si cette métaphore «africaine» est si insistante, ce n'est pas seulement par dénonciation du système politique colonialiste mais aussi parce que le colonialisme lui-même est porteur d'associations imaginaires riches en irrationnel. Les méthodes de colonisation, par exemple, renvoient à des images de viol; la justification économique (alimentaire) traite d'autre part le Tiers Monde comme un grand corps maternel nourricier dont les trésors sont saisis par les colons, alors que lui reste affamé: images de la mère affamée, de la mère sans mère, de la fille sans mère (on pense au personnage de la mendiante dans les romans de Marguerite Duras). Tel est bien le grief féminin inconscient que le nouveau féminisme met au jour: dans une organisation symbolique qui privilégie historiquement (au moins depuis l'invention de la figure de la Vierge mère...) le rapport de désir du fils et de la mère, qu'en est-il de la fille? Freud insistait sur l'importance de la phase pré-oedipienne de relation à la mère chez cette dernière. L'«Afrique» est à la fois la fille et la mère: la fille dépossédée de l'aliment, de l'amour, nécessaires à sa vie et à la reconnaissance de soi, et la mère au ventre plein des trésors merveilleux que la fille revendique (images, couleurs, sons sauvages, rythmes, etc.). C'est pourquoi on trouvera dans la plupart des textes féminins sinon un éloge de la nature comme espace sauvage, miraculeux (par exemple dans La Prisonnière des Sargasses de Jean Rhys), du moins la tentation d'une écriture au plus près des sensations, des rythmes simples, des euphonies (Hélène Cixous, Jeanne Hyvrard, Virginia Woolf...), une écriture «jubilatoire» où souvent le plaisir de la profération des sons et des mots l'emporte sur la narrativité, comme on peut le voir notamment dans l'oeuvre de Gertrude Stein.

L'écriture est le plus souvent pour les nouvelles féministes le moyen d'une régression vers des «épousailles» (Annie Leclerc) avec le corps maternel. De là provient le déploiement d'une thématique du corps qu'on retrouve de texte en texte: éloge d'une sensualité diffuse, prégénitale ou polymorphe (Luce Irigaray, Ce sexe qui n'en est pas un), fétichisme du mot aux dépens de la phrase, qui indiquerait une articulation de type phallique (Virginia Woolf jugeait déjà la phrase «masculine» trop «lourde» pour une femme), définition d'une écriture-flux à l'image du sang menstruel (Marie Cardinal, Emma Santos, Jeanne Hyvrard...) ou, au contraire, d'une écriture éclatée, morcelée, fragmentaire, lapidaire (Agnès Rougier, Danielle Collobert, voire l'Américaine Joan Didion), hostile aux effets d'unité ou d'unicité stigmatisés dans l'écriture masculine, insistance, au total, sur l'idée d'une multiplicité spécifiquement féminine.

 

6. L'autobiographie de tout le monde

 

Le trait peut-être le plus frappant de cette écriture féminine que le nouveau féminisme des années 70 met en avant soit dans les textes qu'il produit, soit dans ceux dont il permet la redécouverte et la relecture, c'est son caractère à peu près systématiquement autobiographique. Sans parler des textes féministes, dont on a pu dire qu'ils étaient souvent très proches de la confession ou du journal, les grands textes féminins contemporains apparaissent tous, de près ou de loin, traversés par un projet d'autobiographie ou du moins de biographie écrite (reformulée sur un mode artistique). En cela, ils appartiennent aussi -et sans doute en premier lieu -à la littérature moderne.

Certaines fuient cette biographie écrite, comme Sylvia Plath, qui compose des poèmes pour reculer le moment du roman, qu'elle juge «sale», cruel, trop près de l'intimité des événements vécus. Pourtant, elle rédige La Cloche de détresse, et son dernier travail aura été un projet de roman. D'autres, en revanche, n'y résistent pas, comme Unica Zürn ou Anna Kavan rapprochées dangereusement par l'écriture de leurs fantasmes les plus implacables. Doris Lessing, Marguerite Duras, Gertrude Stein, ou même Colette ou Anaïs Nin, s'y adonnent avec tout leur art. Virginia Woolf y parvient, après le long détour d'une vie et d'une oeuvre: ce sont ses derniers textes, les plus beaux peut-être, regroupés après sa mort dans un recueil intitulé Instants de vie (Moments Of Being).

L'autobiographie conçue par les femmes présente une qualité spécifique ou, du moins, nouvelle: celle de ne pas être la construction, par les moyens complexes de l'écriture, d'un sujet à peu près unifié, ou aspirant à l'être, même dans les plus grandes contradictions, comme dans les textes contemporains «masculins». Le sujet d'une oeuvre féminine n'existe pas, n'existera pas. Il se perd, se multiplie, se diffracte dans les multiples figures, les mouvements minuscules du quotidien. «Autobiographie de tout le monde», ce texte féminin vaut pour une autre vie, d'autres vies -bien vite la question même de la «féminité» ne se pose plus. Cette autobiographie insignifiante, ou plutôt non inscrite dans une logique de la représentation du sens (qu'on lise, par exemple, les absurdités algébriques de Gertrude Stein, sa manière de construire une poétique des lieux communs de la communication verbale), trace un parcours durable, mais fragmenté, accidenté, discontinu, pour des femmes qui rêvent de «flotter avec les bouts de bois à la surface de la rivière» (Virginia Woolf).

 

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Prix littéraires de l’Académie : les premières sélections

L’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique (Arllfb) décerne chaque année des prix littéraires. Les premières sélections viennent d’être dévoilées.

Les prix de l’Arllfb

L’année dernière, à l’occasion de son centenaire, l’Arllfb a repensé en profondeur l’organisation de ses prix littéraires. Jusque-là, les prix portaient les noms des fondations qui les dotaient (prix Bosquet de Thoran, prix Georges Garnir, prix Sander Pierron…). Ces appellations, déconnectées de l’objet du prix, n’étaient pas toujours claires pour le grand public, et plusieurs dotations se sont en outre éteintes au cours du temps. Pour pérenniser son travail de repérage et de reconnaissance des talents littéraires, l’Académie a donc créé de nouveaux prix. Elle remet désormais – entre autres – le prix du Roman, le prix de Poésie, le prix de l’Essai, le prix des Arts du spectacle ou encore le prix Découverte.

Les finalistes de l’édition 2021 sont connus dans trois premières catégories.

Le grand prix des Arts du spectacle

Ce prix annuel doté de 1.500 € récompense une oeuvre théâtrale, mais aussi éventuellement un scénario de cinéma ou de télévision, un seul en scène, etc.

En 2020, le lauréat du prix était Stanislas Cotton, pour Mes papas, l’ogre et moi (Lansman).

Les finalistes :

Noémie Carcaud, Take care, Les oiseaux de nuit

Geneviève Damas, Quand tu es revenu, Lansman

Zenel Laci et Denis Laujol, Fritland, Les oiseaux de nuit

Florian Pâque, Etienne A., Lansman et Avec le paradis au bout, Les Cygnes

Anne-Cécile Vandalem, Kingdom précédé de Tristesses et Arctique, Actes Sud-Papiers

Le grand prix de Poésie

Prix annuel doté de 1500 €, le prix de Poésie est attribué pour l’ensemble d’une œuvre ou un recueil remarquable d’un.e poète belge.

L’édition 2020 avait couronné Christian Hubin pour L’intemps (L’étoile des limites).

Les finalistes :

Jan Baetens, Après, depuis, Les impressions nouvelles

Karel Logist, Soixante-neuf selfies flous dans un miroir fêlé, L’arbre à paroles

Serge Meurant, Empreintes, Le cormier

Francesco Pittau, Épissures, L’arbre à paroles

Jacques Richard, Sur rien mes lèvres, Le cormier

Le grand prix du Roman

Récompense annuelle dotée de 1.500 €, le prix du Roman couronne un auteur ou une autrice belge, pour un ouvrage (roman, nouvelles, fictions en prose, etc.) publié durant l’année.

Le ou la lauréat.e succédera à Stéphane Malandrin, récompensé en 2020 pour Je suis le fils de Beethoven (Seuil).

Les finalistes :

Hubert Antoine, Les formes d’un soupir, Verticales

Sophie d’Aubreby, S’en aller, Inculte

Zoé Derleyn, Debout dans l’eau, Le Rouergue

Emmanuelle Dourson, Si les dieux incendiaient le monde, Grasset

Antoine Wauters, Mahmoud ou la montée des eaux, Verdier

Source: Le carnet et les instants

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                                               DU CARRÉ A’ L’INFINI : L’ŒUVRE DE MARIE CÉLINE BONDUE

Du 02-04 au 30-04-21, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a le plaisir de vous présenter l’œuvre du peintre belge, Madame MARIE CÉLINE BONDUE, intitulée : CHEMINS INCONNUS

Il y a dans l’œuvre de MARIE CÉLINE BONDUE la volonté infatigable d’un esprit de recherche. Un équilibre rigoureux entre abstrait et figuratif exprimé dans le mystère de la « forme ». Il y a des architectures inconnues soutenues par une géométrie axée sur le carré. Un carré conçu à l’instar d’une fenêtre donnant sur un infini qui se fait infime, comme situé à l’autre bout d’une lorgnette. Il y a des paysages baignés par des brumes à la blancheur diaphane. Il y a des jeux chromatiques du plus bel effet, destinés à mettre en exergue cet ensemble onirique. L’artiste nous expose une variation d’états d’âme, basés sur un jeu de couleurs et de lumière, en passant par une douce mélancolie jusqu’à la matérialisation de la joie la plus expressive.

BARRICADES (100 x 100 cm-huile sur toile)

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L’espace est construit de façon abrupte, en ce sens qu’aucune progression tangible ne scande la voie au regard, comme pourrait la scander une suite définie de plans, conduisant l’oeil vers un but déterminé. Nous sommes face à un chaos abstrait qui trouve son élément dans la ville, pensée comme le décorum dramatique à la mesure d’un chantier urbain. Le visiteur est mis devant le fait accompli d’un acte dans son déroulement présent, celui de la destruction irrévocable d’un moment. En laissant promener le regard, un univers fantasmagorique se profile, à l’arrière-plan : celui des silhouettes fantomatiques et spectrales d’immeubles, enserrées à l’intérieur d’un brouillard à dominante blanche. Ils ne sont repérables qu’à travers la présence noirâtre, effacée de leur structure. Sont-ils là? Étaient-ils là? Sont-ils en passe de disparaître? Ils deviennent des souvenirs en devenir. Sur la partie supérieure gauche, une forme indéfinissable que seule l’artiste est à même de définir : un carré d’un très beau noir dans lequel s’inscrit une grue conçue en une série de traits rouges. L’avant-plan de l’image nous montre un terrain labouré par les travaux en cours. C’est à ce stade que le titre de l’œuvre prend toute son importance : deux barricades, toujours à l’avant-plan, l’une perpendiculaire à l’autre, « barrent » symboliquement l’accès au visiteur face à cette vision apocalyptique où le silence des couleurs opaques règne en maître. D’un point de vue technique, ces deux barricades dévoilent l’intérêt indéfectible de l’artiste pour le collage.

En effet, cette particularité régit la totalité de son œuvre exposée, en ce sens que dans chacune de ses toiles, l’on trouve un ou plusieurs éléments de collage galvanisant l’esthétique de l’œuvre.

FUSION AUTOMNALE (95 x 70 cm-huile sur toile)

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Nous sommes transportés dans l’abstraction totale, tant dans le rendu graphique que dans le rendu de l’idée originelle. L’œuvre grâce à son chromatisme rend parfaitement le sens  à son titre. L’idée de la Nature est littéralement transfigurée pour atteindre l’incandescence des notes verte, rouge, jaune et noire, offrant au visiteur l’image transcendée de la forêt à l’heure de l’automne. La note rouge, au centre de la toile, s’avère être d’un fauvisme exacerbé. Néanmoins, à aucun moment elle n’écrase les autres. Ce qui est d’ailleurs une constante notoire dans l’œuvre de l’artiste : aucune couleur ne l’emporte sur l’autre, même la plus vive. Dans cette œuvre, se distingue en outre la présence (assez discrète) de la figure géométrique, évoquée plus haut, par la vision (confuse de prime abord) du carré. La zone centrale de l’œuvre, flamboyante et attirant le regard, conçue en rouge vif, est axée sur un carré travaillé au couteau sur sa partie supérieure. Cet espace accapare le regard en le conduisant au loin, vers un arrière-plan qu’une légère trouée jaune rend à peine perceptible. Sur la droite de la toile, une sorte de tourbillon réalisé en vert assure une continuité dans le rythme. Tandis qu’une série d’élongations au noir symbolisent une volonté de verticalité associée à celle de l’arbre, comme pour stabiliser ce même rythme dans un dialogue cosmique entre les saisons. Car l’automne offre ce qui reste de l’été dans un délire de couleurs fusionnelles. Comme spécifié plus haut, même dans les teintes les plus vives, nous vivons la présence d’une harmonie ontologique, en ce sens qu’aucune couleur n’est là pour en occulter une autre. Tout s’accorde à l’unisson dans la même partition chromatique. Notons que le cercle vert, évoquant l’idée du tourbillon, sur la gauche de la toile constitue la dernière étape de la réalisation.   

                        

ROUGES (73 x 100 cm-huile sur toile)

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Cette œuvre est non seulement un excellent exemple de la maîtrise du chromatisme par l’artiste mais aussi la preuve de l’amour pour les couleurs de celle-ci. Car elle les aime et cela se voit par l’acharnement que le peintre met à les travailler au couteau et au chiffon. Cette toile est un travail sur le rouge dans une dialectique constante entre la puissance de la couleur et la lumière la mettant en exergue ainsi que sur l’élaboration du rouge dans son exploration. Elle se décline sur quatre variations. 

Cette toile risque fort de déséquilibrer le visiteur, car ce qu’il pourrait interpréter comme faisant partie des différentes étapes créatives pour atteindre le but, se révèle être, en dernière analyse, un jeu de dupes destiné à l’égarer dans l’hypothèse d’une analyse rationnelle. En réalité, l’artiste a élaboré son travail en six étapes :

  • mise en place d’une couche rouge de fond
  • encadrement en rouge de Venise sur le périmètre de la toile
  • couche d’ocre/rouge orangé
  • renforcement de l’intensité chromatique par une couche de rouge vif
  • application d’un collage en carton (en bas de la toile)
  • réalisation d’un carré rouge rehaussant l’intensité chromatique

C’est précisément cette sixième et dernière étape, ce carré rouge conçu « comme point final», terminant l’œuvre, qui donne au visiteur l’illusion immédiate qu’il s’agit de  la première étape chromatique par laquelle l’artiste a abordé son exploration de la couleur rouge. Des stries dynamisent le carré rouge vif. Réalisées au couteau, elles diffèrent de par leur forme à celles présentes sur un autre carré, de petites dimensions, en haut sur la gauche du carré central, lesquelles témoignent d’une géométrie rigoureuse, à l’opposé de celles figurant sur le carré rouge vif, lesquelles sont conçues de façon anarchique. Notons que le collage en carton dans le bas de la toile présente également des stries, naturelles celles-là car elles reprennent les ondulations de la matière originale. Elles sont légèrement rehaussées de blanc et s’accordent parfaitement au rythme de l’ensemble. Cette œuvre rassemble à elle seule les composantes esthétiques de l’écriture picturale de l’artiste.

FENÊTRE 2 (50 x 50 cm-huile sur toile)

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Une de ces constantes esthétiques est l’image de la fenêtre. Celle-ci, concrétisée par le module du carré, est l’image d’une porte donnant sur le Monde. Si, dans l’œuvre précédente, le rouge est à l’honneur dans un éventail de variantes, nous sommes à présent dans l’univers du bleu.

Une couleur qui se marie mythologiquement avec l’image de la fenêtre, puisqu’elle annonce symboliquement le ciel. Toujours à l’instar de l’œuvre précédente, la fenêtre s’inscrit dans le module du carré démultiplié. Cette composition est un ensemble de cinq carrés augmentée d’un rectangle au bas du second carré.

  • le carré de départ se décline sur un bleu clair
  • il est suivi par un carré en bleu plus foncé
  • un carré d’un bleu plus clair confère à la composition un côté « brouillard », plongeant le regard dans une atmosphère presque irréelle
  • le bleu plus prononcé annonce la dernière étape :      
  • une zone ressortant discrètement au centre de la toile, à peine perceptible, agrémentée d’un blanc saillant, sert d’ « ouverture » à la fenêtre, laquelle, telle la fente d’une serrure, invite le regard à s’y plonger pour s’y perdre
  • un collage en forme de rectangle blanc termine la composition. Il est conçu en toile de jute, il s’agit d’une matière très épaisse, étalée à la spatule

Comme nous l’avons spécifié plus haut, le quadrilatère (qu’il soit carré ou rectangle) régit la presque totalité de  l’œuvre de l’artiste.  

L’artiste aime terminer une composition en se lançant une sorte de « défi », en ce sens qu’elle « jette » à la face de la toile quelque chose qui la singularise tout en la mettant « en péril » car cet acte décide de la réussite ou de l’échec de l’œuvre. C’est le cas des collages placés au bas de la toile en ce qui concerne ROUGES et FENÊTRE 2 (cités plus haut). Quant à FUSION D’AUTOMNE (également mentionné plus haut), il se termine par ce tourbillon vert en forme de cercle, comme la signature de son Etre créateur, jeté à la face du créé comme le joueur jette les dés sur le tapis du hasard. L’artiste qui a fait de l’abstraction son mode d’expression, a d’abord commencé par l’aquarelle. Son abstraction se définit par la recherche d’une réalité concrète qu’elle retransforme à sa guise, convaincue du fait que la forme est partout. La forme omniprésente, est comme nous l’avons spécifié, souvent mise en relief par le carré. Or, le carré, à cause de sa spécificité géométrique, nous ramène, temporairement, hors de l’abstraction en l’atténuant légèrement. Il devient le symbole concret au sein d’une perspective abstraite.

Quelque chose de matériellement tangible (voire de rationnel), une porte ou…une fenêtre, nous révélant chez l’artiste la volonté d’une recherche d’absolu dans la possibilité d’un ailleurs qu’elle porte en elle-même.

Précisons que les titres, si évocateurs accompagnant ses œuvres, lui viennent toujours après leur création. L’artiste a fréquenté l’Académie de Wavre.

Sur les conseils de son professeur, elle délaisse les petits formats pour évoluer dans les grands. Précisons qu’elle est à la base de la  création de toutes ses couleurs. Elle peint exclusivement à l’huile.

MARIE CÉLINE BONDUE nous a exprimé son désir de continuer à évoluer dans les grands formats mais également d’explorer la figure transcendant de tous temps la mythologie figurative, à savoir la figure humaine. A’ la vue de deux œuvres non exposées montrant deux formes longilignes glissant tout en longueur au centre d’un brouillard réalisé en teintes douces, la présence humaine, comme cachée aux profanes, s’est révélée tel un fantôme encore pris dans sa chrysalide….

François L. Speranza.

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  Collection "Belles signatures" © 2021 Robert Paul

                                       

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                                                       Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

 

 

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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MARIE CELINE BONDUE et François Speranza:  interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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      12273376098?profile=original   Photos de l'exposition de MARIE CELINE BONDUE à l' ESPACE ART GALLERY                               

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