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AVEC TOI...

Avec toi j'ai le corps qui parle à cœur ouvert

Et je renonce à sentir le froid de l'hiver

Nos lèvres se retroussent ébauchant un sourire

Il est question de vivre et non plus de mourir!

La passion est une arme de construction passive

Et les regards sont purs si les poses sont lascives...

Quand la maturité se confond avec joie

Il n'est rien de plus vrai que le goût de l'émoi...

J.G.

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En tant que Community manager du réseau Arts et Lettres, je vous rappelle que les billets de blogue autorisent 100 000 caractères (html), ce qui est assez considérable: vous avez donc de larges et généreuses possibilités de faire de beaux billets bien illustrés et commentés.

Ces vastes espaces d'édition vous sont offerts, servez-vous en donc.

Si vous désirez éditer des textes plus longs, vous pouvez vous adresser à Robert Paul, notre fondateur et administrateur général qui, cas par cas, examinera d'autres possibilités.

 

Arts 
12272797098?profile=originalLettres

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                                        L’ÉCHO : CHRYSALIDE DE L’IDÉE. L’ŒUVRE DE JOHANN DAMOISEAU        

Du 03-05 au 26-05-1919, l’ESPACE ART GALLERY (83 Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir d’organiser une exposition autour de l’œuvre de l’artiste belge, Monsieur JOHANN DAMOISEAU, intitulée : ECHOS FORMELS.

« Echos » et « Formels ». Voilà les tenants d’un titre extrêmement évocateur, en phase totale avec son sujet.  

« Echos ». Comme la musique d’une écriture restée à l’état de trace. D’empreinte fossilisée sur la surface d’un sédiment protecteur. On peut parler d’ « écriture » comme une suite de variations à partir de cette sémantique personnelle, à l’instar de celle proposée par Christian d’Outremont, laquelle, en son temps, fit office de « référent ». Car ces traces démultipliées matérialisent des « signes » sortis de tous les champs sémantiques possibles. Tant par la délicatesse de leur calligraphie que par leur portée symbolique. Hasardons-nous même à dire que cette écriture picturale s’avérerait être l’écriture intime que l’artiste utiliserait dans chacune de ses lettres s’il en avait la possibilité culturelle.  

Cette écriture est constituée de segments minuscules, formant un immense réseau dont la particularité réside dans le fait de tenir dans l’espace circonscrit d’un petit format. Paradoxalement, cette caractéristique procure un sentiment d’ « agrandissement », en ce sens que ce foisonnement graphique associé à un espace réduit, fait que l’imaginaire du visiteur, submergé par cette dynamique cinétique, la fasse « déborder » du cadre. Ouvrant à l’œuvre les grilles de sa prison formelle pour se perdre vers d’autres espaces.  

« Formels ». Puisque, aussi minuscule soit-elle, cette écriture participe de la forme, prise à la fois dans le sens plastique mais également dans son expression symbolique. Car le dénominateur commun à l’œuvre demeure, comme nous le verrons plus loin, une interprétation philosophique de la Nature. Par « forme », il faut entendre un univers sans volume apparent, constitué d’un « bouillon de cultures », mis à plat sur la surface de l’espace pictural. Le chromatisme est globalement monochrome, bien qu’il soit constitué non pas par une seule couleur mais bien par le rouge, le jaune et le bleu, assemblés comme notes de fond constituant la base chromatique spectrale ou pour mieux dire, la Trichromie (théorie élaborée au début du 18èmesiècle), partir de laquelle naissent les différentes couleurs. Les titres des oeuvres  évoquent d'ailleurs cette théorie par l'apparition de trois initiales : RJB (rouge-jaune-blanc). 

A’ quelques rares moments, telle couleur prend le pas sur l’autre, accentuant l’impact de l’effet visuel.

Au fur et à mesure que le regard se rapproche de l’œuvre, au plus la dynamique cinétique (évoquée plus haut) s’affirme.

Partant d’un sentiment de brouillard, la mise à feu se précise jusqu’à imprégner une véritable toile cinétique sur la rétine oculaire. De prime abord, l’on peut penser à une écriture sans évolution. Mais en y regardant de près, l’œil perçoit des variations dans la forme, l’amenant vers un univers de plus en plus « microscopique », jusqu’à atteindre le trait dans son plus total épurement : l’idée avant la forme;

RJB (rouge-jaune-bleu) (40 X 40 cm)

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Mais l’artiste ne s’arrête pas à ce stade, il reprend le trait là où il l’avait laissé, pour le (re)conjuguer dans une dimension plus feutrée, de laquelle il point dans un dédale d’entrelacs. 

RJB (rouge-jaune-bleu) (40 x 40 cm)

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Cette oeuvre représente un véritable tour de force, en ce sens que le trait blanc entrelacé, s’anime sur un fond également blanc. Il ne s’anime que par des stries que l’artiste apporte par sa mine de plomb sur chaque segment pour lui conférer sa propre individualité. 

RJB (rouge-jaune-bleu) 40 x 40 cm)
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Cette oeuvre est, en quelque sorte, le véhicule esthétique de l'artiste dans l’expression de l'idée créatrice de son graphisme.    

RJB  (rouge-jaune-blanc)  (40 X 40 cm)

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RJB (rouge-jaune-blanc) (40 x 40 cm)

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Des compositions telles que celles-ci illustrent parfaitement le discours de l'artiste.

Pourquoi cet art participe-t-il d’une forme de « cinétisme »? Parce que le trait (par exemple de couleur noire) se trouve, pour ainsi dire, « propulsé » par la note blanche se situant dans l’espace qui le sépare d’un autre trait, accentuant ainsi une forme de perspective qui l’anime. Et ce grouillement graphique s’éparpillant sur l’ensemble de la toile fait de sorte que l’œil « court » dans l’espoir de saisir l’animation dans sa totalité. Il peut d’ailleurs se placer sur plusieurs axes de la toile, ce sentiment d’animation microscopique ne le quittera pas. L’œil devient alors le témoin d’une sorte de fermentation dans laquelle la vie essaime dans tous le sens.  

CROISE D'OGIVES (180 x 100 cm)

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Cette pièce est, pour ainsi dire, une « sculpture picturale » laquelle reprend plastiquement dans la matière sculptée ce que le trait du pinceau a laissé sur la toile. Cet ensemble de lamelles attaquées à l’acide (faisant fonction de rouille dans le champ interprétatif), forme un ensemble harmonique, une œuvre « primitive », en ce sens où elle renoue avec le champ mythologique qui anime l’œuvre d’art dans son tréfonds originel.   

Bichromée dans son ensemble (blanc et rouille), l’œuvre est partiellement rehaussée d’une note jaune-or, dans le bas à droite.

RJB (rouge-jaune-blanc) (40 x 40 cm)  

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Ce détail de RJB (mentionné plus haut) confirme une parenté stylistique, voire sémantique, de l'écriture picturale de l'artiste.   

 

Est-ce de l’art « brut »? Les trois sculptures filiformes, conçues à partir de fils de fer surplombées d’une petite pierre et portées par trois pierres de majeures dimensions, appartiennent au vocabulaire contemporain.Sont-ce les personnages à l’origine de l’idée? Leur conception à partir du socle basé sur trois pierres, défie l’essence de l’abstraction, lorsque, tout en tenant compte de la présence imaginaire de trois squelettes filiformes s’élançant, l’on songe aux personnages de Giacometti. Idée et concept se marient dans le traitement à la fois plastique et intellectuel de cette œuvre.12273362476?profile=original

Est-ce de l’art « minimaliste » ? Aux dires de l’artiste, elles pourraient l’être au sens « trivial » du terme, en ce sens qu’elles ne se déclinent que par le noir et le blanc. Néanmoins, le minimalisme se définit surtout par une conception travaillée de la figure géométrique, à la base. De plus, il est dépourvu de symbolique et d’émotion. Son principal attrait est qu’il joue sur les formes et les couleurs. Cela ne se retrouve aucunement dans l’œuvre de l’artiste dont la portée philosophique, symbolique et intellectuelle prime sur le reste. Force est donc de constater que son écriture n’est pas minimaliste.    

L’art de JOHANN DAMOISEAU prend naissance non pas sur le choc visuel mais bien sur la révélation à partir d’une apparition, laquelle se matérialise au fur et à mesure que le regard s’approche de la toile. Cette révélation est pareille à celle d’une existence ayant pris forme jadis, laquelle a laissé son empreinte (sa « trace » comme l’artiste aime à le préciser) dans les résidus de sa matière primale, réduits à l’état de fossile imaginaire. Car les « traces » que l’artiste a laissées sur le papier ou sur le cadre sont les empreintes cosmiques d’éléments ayant participé de la Nature, jusqu’à former une sorte de proto écriture indéchiffrable aux non initiés. Ce langage graphique inondant l’espace, pris comme microcosme, se déploie sur toute la surface jusqu’à « déborder » le regard qui le prolonge à l’infini.

La production de l’artiste se divise en deux espaces visuels sanctionnant deux techniques particulières, à savoir le cadre (pour les petits formats) mettant en exergue l’approche picturale du peintre et la mine de plomb, réservée aux formats plus grands.

A’ côté de la signature du dessinateur, figure confirmée par un chiffre, la consistance de la mine de plomb formant le relief exigé pour l’individualité de l’œuvre. Quant au cadre, il témoigne d’une dynamique gestuelle, en ce sens qu’une fois le geste posé, celui-ci ne varie pas. Le papier, lui, varie.

La démarche de l’artiste est essentiellement philosophique. Le sujet, issu de la Nature, tel que le paysage, le sable ou la roche, prend son autonomie face à sa représentation figurative, pour atteindre une Nature exclusivement humaine. Il s’agit là d’une Nature dont la représentation picturale transcende le figuratif. Cette vision humaniste trouve son origine dans les cartes géographiques du 16ème siècle, essentiellement conçues comme des représentations de sites vus d’en haut, à l’instar des courbes de niveau actuelles.   

Excluant tout sujet rhétorique, la forme est pour l’artiste une unicité plastique qui se décline tant dans la peinture que dans le dessin ou la sculpture. A’ la question de savoir s’il est un peintre qui sculpte ou un sculpteur qui peint, il précise qu’il se trouve à la charnière de ces deux disciplines. Dessinateur à l’origine, il s’est interrogé sur la fonction subjective des choses et de leur rôle dans ce que l’on nomme la « réalité » pour créer une existence faite d’ « apparitions » destinées à laisser une trace sur la surface de l’espace pictural, considéré comme le théâtre d’un imaginaire à recréer, à partir d’une apparition, prise comme l’écho d’un vécu.

La technique de prédilection de l’artiste est l’huile. L’aspect prépondérant de son œuvre est, comme nous l’avons spécifié plus haut, le monochromatisme. Néanmoins, il s’agit d’une illusion d’optique, en ce sens que trois couleurs (le rouge, le jaune et le bleu) sont usitées pour atteindre le gris. Cette technique a quelque chose qui rappelle la composition musicale car il faut très souvent l’alliance de plusieurs instruments pour créer un son. Cette teinte grise est le son sorti de ce kaléidoscope pour atteindre son individualité chromatique. A’ ce titre, l’artiste aime écouter la musique de compositeurs tels que Steve Reich ainsi que des compositions polyphoniques pendant qu’il crée. « Chercheur » devant l’Eternel, il est en totale recherche face à la création. Jamais il ne considère « avoir trouvé ». Son futur projet consiste à poursuivre son expérience créative, cette fois, sur de grands formats. 

Dessinateur de formation, il a fréquenté l’Académie des Beaux Arts de Bruxelles. Il a été l’élève du Professeur Camille Detaye avant de devenir son assistant. Il a ensuite travaillé avec Lucien Massaert pour devenir enfin professeur de dessin aux Beaux Arts. Depuis vingt ans il dispense des cours dans des ateliers ainsi que des cours privés.

L’œuvre de JOHANN DAMOISEAU est un discours phénoménologique sur la perception des choses, établie par la relation entre le trait en fusion et l’œil qui s’acharne à le cerner. Lorsqu’il appréhende la toile ou le cadre, l’œil peut se placer soit devant l’œuvre soit en biais.

La réaction physiologique s’avère immuable : tout fuit. Rien ne reste statique. La Nature demeure l’écho de la trace laissée par son passage.

François L. Speranza.

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                                                         Une publication
                                                                Arts
 
12272797098?profile=original                                                                          Lettres     
                                                               
 

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Collection "Belles signatures" © 2019 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste JOHANN DAMOISEAU et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de JOHANN DAMOISEAU à l'ESPACE ART GALLERY 

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Peut-être la flânerie Promenant son regard

Peut-être, la flânerie.

Promenant son regard ;

Franchissant le pont, au détour d’un sentier.

Après quelques jours de marche,

Nous sommes retournés tout au début.

D’autres formes pourtant surgissent,

S’assemblent,

Au-dessus des reliefs.

Quelques pas et bien des années après,

Le même arbre, sans son rocher.

Il existe des parcours

Où le pas est lent,

D’autres sous les semelles de vent ou de pluie,

De chair ou d’os,

Sous les rondeurs des silhouettes,

Les foules des ruelles,

Dans les quartiers de ces villes

dont les ruelles en pente

mènent au port.

 

Julien Boulier

A Brest,

Le 02 mars 2021

https://soundcloud.com/julien-boulier/le-reveur-de-pierres-itineraires-ii

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12273366467?profile=originalRêve d’idéal

  

      Aux « quatre tentations de l’homme », le vin, les femmes, la richesse et la colère, qui, selon la tradition chinoise, sont les vices communs des mortels qui, en outre, les empêchent de demander l’inspiration au rêve.

      A Pékin, je vous parle de l’ancien Pékin pas de la moderne Beijing, on retient toujours le chiffre quatre : les « Quatre Grands Maîtres Yuan » (les peintres Huang Gondwang, Wu Zhen, Ni Zan, Wang Meng), les « Quatre Bonheurs » en cuisine, les « Quatre Génies » d’un sanctuaire, les « Quatre Professions » pour les classes sociales (de l’aristocratie aux vils marchands, en passant par les paysans et les artisans), les « Quatre Plantes souveraines » (prunier, bambou, chrysanthème, orchidée), les « Quatre grandes inventions » (boussole, papier, imprimerie, poudre noire), les « Quatre Trésors » du lettré (pierres, encre, pinceaux, papier), les « Quatre Livres extraordinaires » (Au bord de l’eau, Les Trois Royaumes, La pérégrination vers l’Ouest, Fleur en fil d’or, ou, selon l’époque pour ce dernier, Le Rêve dans le Pavillon rouge), jusqu’aux « Quatre Livres » de l’enseignement confucéen (La Grande Etude, L’Invariable Milieu, les Entretiens de Confucius et de Mencius) ou les « Quatre Nobles Vérités » révélées par le Bouddha (la douleur ; la racine de la douleur qui est le désir ; la douleur peut être vaincue en atteignant le nirvana ; pour le gagner il faut suivre la voie de la sagesse, de l’éthique, de la méditation) en passant par les « Quatre Montagnes Sacrées » du bouddhisme  (les monts Wutai, d’or, représentant la sagesse, Putuo, d’argent, la compassion, Emei, de bronze, la pratique,  Jiuhua, de fer, le vœu)

La forme la plus pure de poésie chinoise classique est le quatrain. La part belle y est faite aux images simples et spontanées comme fleurs des champs, mais rigoureusement réglée selon quatre figures ou tons. Forme qui évoluera en huitain (qi lü).

      Et même aux temps nouveaux des lendemains qui devaient chanter, aux « Quatre Vieilleries » selon Mao (vieilles idées, cultures, coutumes, habitudes) succédèrent les « Quatre Modernisations » (agriculture, industrie, science, défense) de la Chine Populaire de Zhou Enlai et Deng Xiaoping.

Chute de la Bande des Quatre.

Quatre restera le chiffre de la prospérité. Dans le respect évidemment des « Quatre Grands Principes fondamentaux » inscrits dans le préambule de la Constitution de 1982 : le Socialisme, la Dictature démocratique populaire (admirez l’oxymore), le rôle dirigeant du PCC, le marxisme-léninisme et la Pensée du Grand Timonier.

 

      Humblement, je m’en suis donc remis à une pierre de rêve (mengshi). Celle-ci m’a suggéré quatre textes purement imaginaires que j’ai réunis ici afin substituer aux quatre funestes tentations ces Quatre visions de la porte Vénération des Lettres : Poème visuel, Abolir le temps, L’esprit est un miroir brillant et Essence de vie.

Toutes s’inspirent des Quatre Vertus, les principes fondamentaux du tch’an,  harmonie, respect, pureté, sérénité.

Se retrouvent ainsi les « trois enseignements » de Bouddha, Kongzi (Confucius) et Laozi (Lao-Tseu), piliers de culture chinoise traditionnelle. Du moins vus par un occidental réduit à interpréter des signes, un promeneur qui tente de traduire l’intime et sensible relation qui se crée entre l’homme et la nature. Un peu comme le ferait un moine errant en robe pourpre vagabondant sur le sentier de la longévité.

 

 

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Les Quatre visions de la porte Vénération des Lettres (Chongwenmen*)

 

 

Poème visuel

 

Quand les mots ne suffisent plus

Quand le mystère est trop grand

Que même la pierre ne peut exprimer l’indicible

Que ma plume s’assèche en attendant le jour

Que l’hiver espère un nouveau printemps

Alors la nature toute entière se grave dans ma mémoire

Comment s’en détacher ?

Et je pleure sur le monde d’hier.

 

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Abolir le temps

 

Il s’assit alors sous le pin de la longévité,

dans cet entredeux, cet entrelacs,

ne servant à rien,

ne faisant rien

Sublime oisiveté

Il n’eut plus ni passé

ni présent

Il ne pâtit de rien

Suprême liberté

Tel le phénix,

oiseau de paradis,

vit au loin un rocher d’éternité

et, passant au-delà de sa psyché,

 il entra dans le domaine où il n’existe ni vie ni mort

Infinie félicité.

 

En italique : Tchouang-tseu (ou Zhuangzi, IVe s. av. J.-C.)  

 

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L’esprit est un miroir brillant

 

Maîtrise de l’esprit sur la matière

En laissant chanter la pierre

Abolir le temps, l’espace

Se soustraire au monde.

 

Juste une sensation de fraîcheur

Un bouquet d’arbres, en fleurs

Un reflet de lune pâle

Saisie d’une caresse magique.

 

Pure jouissance esthétique

Le goût subtil de l’inutile

Du lointain éclat de l’opale

Astre d’une nuit magnétique.

 

« L’esprit est comme un miroir brillant », Shen-hsiu (ou Shénxiù, ca 607-706).

 

 

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Essence de vie

 

Chef-d’œuvre non signé

Chef-d’œuvre d’humilité

Saisir la beauté et la sublimer.

 

Harmonie, respect, pureté, sérénité

 

Humanité délivrée

Simplicité inspirée

Complicité, spontanéité.

 

Transcender l’ordinaire

Creuser aux racines

Pour atteindre l’universel.

 

Conscience, essence de vie

Sincérité de cœur et d’esprit.

 

Ainsi la fleur de cerisier s’abandonne au vent

Gagne l’onde, quitte le réel pour l’éternel.

 

En italique : Sen no Rikyū (1522-1591)

 

 

Michel Lansardière

 

 

A-t-on jamais entendu pareille pierre muette parler ?

A-t-on déjà vu chose inerte ainsi inspirer ?

Une certaine sagesse immanente, sidérale peut-être…

Tout est possible, surtout si l’artiste se fait démiurge, le minéral illusionniste, le poète visionnaire.

 

 

      Voilà, j’ai ici groupé mes quatre « poèmes visuels » pour former un cinquième billet. Cinq comme le sont en Chine les cinq éléments (bois, feu, terre, métal, eau), les cinq couleurs primaires (rouge, jaune bleu, blanc, noir), les cinq saveurs (âcre, aigre, amère, douce, salée), mais aussi les Cinq Classiques (les Livres des Mutations, de l’Histoire, des Odes, des Rites, les Annales du Printemps et de l’Automne) qui forment le canon confucéen à la base de la culture chinoise, les Cinq Dynasties (907-960), les Cinq Empereurs de l’âge d’or du bon gouvernement qui honorèrent le mieux les cinq vertus confucéennes (humanité, intégrité, sagesse, justice, persévérance), les cinq bénédictions (longue vie, richesse, santé, amour, fin heureuse)… Poèmes traditionnellement composés de cinq (quatrain) à sept (huitain) caractères, musique savante.

Si pour les Chinois cinq est un chiffre parfait… pour nous cinq est un nombre premier et six un nombre parfait (c’est la somme de ses diviseurs en-dehors de lui-même).

Cela m’a semblé idéal pour fêter la fin du Nouvel an chinois et clore un mois de février « parfait » lui aussi : quatre semaines commençant par un lundi et se terminant par un dimanche.

 

 

Pour connaître le vertige de la liste (Umberto Eco), la griserie des mots d’un Li Yi-chan (ou Li Shangyin, 813-858) dans ses Notes, comme dans sa litanie des

 

Choses agaçantes :

Des arbres dont l’ombrage coupe la vue

Un mur si haut qu’il cache une montagne

Pas de vin à la saison des fleurs…

et approcher de l’ivresse d’un Li Bai (ou Li Po, 701-762)…

Trois coupes et je maîtrise le Tao

Une jarre pleine et je fais corps avec la nature

 

Quand les coupes d’or se rempliront-elles à nouveau

Sur ces routes qui mènent au Mont de la Porte des pierres ?

 

Les oiseaux s’effacent en s’envolant…

 

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Fond opalescent, ciel bleu :

nuit après nuit, je songe

hiver, lune pâle

merles d’or qui chantez,

versez vos pleurs

abreuvez les dernières fleurs.

Michel Lansardière

(pastiche de Li Yi-chan)

 

 

* Dans le vieux Pékin, au début du XXe siècle, la porte « Vénérations des Lettres » ou « de la Culture » (Chongwenmen, ou Hademen ou Hatamen, ou Wenmingmen sous la dynastie Yuan, 1279-1368) ouvrait sur des quartiers populaires animés par de nombreux artisans.

« Le quartier était habité par des artisans, des petits commerçants,

des porteurs de palanquins, des coolies et quelques rares riches commerçants ou des prostituées. »,

Deng Youmei

Cette porte, connue pour sa tortue marine en fer (dans le temple Zhenhai) qui protégeait la ville fut démolie dans les années soixante.  C’était «  le lieu de prédilection des artistes qui travaillent le jade, l’ivoire, le feutre, le strass et autres matériaux plus humbles. » (id.)

La porte « Vénérations des Lettres » est une des trois voies d’accès internes qui faisaient communiquer la « Ville tartare » (ou « mandchoue », soutiens de la dynastie en place, dite encore, à tort, « mongole », ou « Ville intérieure ». Elle protège la « Ville impériale » - ou « Ville jaune » ou Houang-tchen - avec ses temples et pagodes, ses jardins et lacs, ses hauts dignitaires, qui elle-même enclave la « Cité interdite » - « Ville rouge », Houang-chan-ti-kong - , le Palais impérial) et la « Ville chinoise » (ou « Ville extérieure »).

C’est près de cette porte, à l’intérieur de la « Ville tartare », que s’installeront les légations étrangères à partir de 1860, chacune dans une résidence princière ou Fou (le Tsing-kong-fou, pour le palais de la légation française).

Au sud, près de Suzhou la cité des mille canaux, nous dit Yuan Hongdao (1568-1610) en adepte du bouddhisme tch’an amoureux des paysages, nuages, montagnes et pierres, « Le Kiosque de la Littérature est lui aussi admirable. »

Pour lui, comme l’eau vive « la littérature s’élabore par la concentration et s’exprime par le souffle. »

« Rien, sous le ciel, n’est plus proche de la littérature que l’eau. Elle part soudain tout droit, ou soudain change de cours. ]…[ Rapide ou lente, nonchalante ou brusque, elle jaillit sous dix mille formes. »

C’est quand même fou ce qu’une pierre a à transmettre !

M. L. (texte, notes, photos)

 

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Illustration de tête : Léonard (détail ; fresque murale réalisée par Nadège Dauvergne et Fabrice Minel/Captain’Baf, Méru, Oise)

 

 

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Collection Robert Paul Exemplaire sur papier Chine Reproduction interdite

Six chansons de pauvre homme pour célébrer la semaine de Flandre (1895)
Collection Robert Paul (exemplaire sur papier Chine)

Edition originale (rarissime)

Un pauvre homme est entré chez moi

Pour des chansons qu'il venait de vendre,

Comme Pâques chantait en Flandre

Et mille oiseaux doux à entendre,

Un pauvre homme a chanté chez moi,

Si humblement que c'était moi

Pour les refrains et les paroles

A tous et toutes bénévoles,

Si humblement que c'était moi

Selon mon coeur comme ma foi.

Or, pour ces chansons, les voici,

Comme mon âme, les voilà,

Sainte Cécile, entre vos bras;

Or, ces chansons bien les voici,

Comme voilà bien mon pays

Où les cloches chantent aussi

Entre les arbres qui s'embrassent

Devant les gens heureux qui passent,

Où les cloches chantent aussi

Des Dimanches aux Samedis;

Et c'est pour toute une semaine

Qu'ici mon coeur, sur tous les tons,

Chante les joies de la saison,

Et c'est dans toute une semaine

Où chaque jour a sa chanson.

I


CELLE DU LUNDI

Et prime en joies, et tout béni,

Gens de chez moi, voici Lundi:


Messes sonnant, cloches en tête,

Avec leurs voix qui disent fête,


Et le soleil après, et puis

Ceux des outils tout beaux d'habits.


Mais lors, chôment les établis,

Et suivant la mode d'ici,


Avec les voeux qu'on se souhaite,

Les apprentis chantez la quête;


Puis préparez, comme aux dimanches,

Pour tous les saints leurs robes blanches,


Car dès aube, tout en sueur,

Voici saint Arnold des brasseurs


Cherchant saint Jude avec ses hommes,

Pour s'aller jouer à la paume.


Or place alors, sur le marché,

Maraîchères et maraîchers,


Car aujourd'hui ceux de saint Blaise

Pour le palet veulent leurs aises,


Tandis qu'ayant perdu leur roi,

S'en vont, les bras longs, ceux d' Eloi


Montrer à tous, faute de gloire,

Comment forgerons savent boire


Et garder pour eux le bon droit

Aussi bien au jacquet qu'à l' oie.


Mais lors c'est votre heure, aubergistes,

Et que saint Riquier vous assite,


Et soif aidant lundi de mai,

S'accomplissent tous vos souhaits;


Puis mendiants que Job patronne,

Salut! et plaies pansées d' aumônes,


Quant à nous, ceux de Sébastien,

Nous partons au joyeux jardin


Tirer, puisqu'aujourd'hui c'est fête,

Le papegai à l' arbalète,


Laissant bouder à mauvais vin

Ceux de Crépin seuls en leur coin.

II


CELLE DU MARDI


Et mardi, ce sont les batistes

Et les linges dans tous les coins

Des maisons comme des jardins,

Et mardi, voici les batistes,


Et les vieilles gens égoïstes,

Faisant taire à chaque refrain

Les servantes, le coeur au loin,

Dans les chansons qui les assistent.


Mais paix et joies aux rouges mains,

C'est mardi blanc comme les anges,

Et dans les toiles et les langes

Lors paix et joies aux rouges mains,


Puis gloire à vous, sainte Blandine

Descendue chez les serviteurs,

Puis gloire à vous, sainte Blandine

En aide douce à leur labeur,


C'est mardi, c'est votre conquête,

Aux fenêtres, blancs les rideaux,

Comme aussi les armoires nettes

Et fleurant bon les draps nouveaux.

III


CELLE DU MERCREDI


Puis tout en blanc

Et tout en rose,

C'est le grand jour des jardiniers,

Mercredi ainsi qu'un bouquet

Chantant-fleurant

Lilas et rose,


Et les marchés

Pleins de pensées,

Et les carillons exaucés

En leurs voeux de voix et clarté,

Fleurs enbaumant,

Cloches sonnées.


Or Flandre alors,

C'est en décors

D'arbres au loin en draperies,

Jardinier, vos imageries,

Et Flandre, alors,

Chère à saint Maur,


Puis par vos soins

Mercredi ouint

D'un paradis tout en prairies,

Et pour la douceur de la vie

Alors sans fin,

Flandre aux jardins.

IV


CELLE DU JEUDI


Et lors, Jeudi, rendez heureux

Les cordiers et les amoureux,

Les uns seuls et les autres deux,

Mais tous experts en lacs et noeuds;


Et pour les cordiers, faites tendre

Sous les cardes virer le chanvre,

Et pour les amoureux, sans nombre

Baisers donnés, baisers à rendre.


Puis, soit de lin ou soit de chanvre,

Jeudi, sacrez tous les liens

Pour le repos et pour le bien

De notre amour quotidien;


Et Pierre, alors, des Fois jurées,

Aux mains doigts à doigts enlacées

A toujours ainsi qu'à jamais,

Prêchez et puis sanctifiez:


Des cordiers le voeu de veuvage,

Et Jeudi, des sots et des sages,

Les uns seuls et les autres deux,

Mais tous experts en lacs et en noeuds.

V


CELLE DU VENDREDI


Or, Vendredi, c'est vous alors,

Vendredi cher à ceux du Nord

En mémoire de Jésus mort,


Et puis les barques et les voiles

Rentrant de mer à pleine toile,

Chacune selon son étoile


Pauvre ou riche, mais de retour

Avec les guidons à l'entour

Des mâts qui fêtent leur grand jour.


Car Vendredi, c'est saint Christophe

Patron de l' amure et du lof

Et des drapeaux de rouge étoffe,


Et mer en fête, et terre en joie,

Et le poisson, comme au pavois,

Porté dans la clameur des voix,


Puis toutes les mains étonnées

Des mannes trop multipliées

Pour n'être point miraculées.


Mais lors c'est fête, pauvres gens,

Et dansez en rond les enfants

Au soir venu avec le vent,


Et vendredi, ardent les souches!

Car sonne enfin l'heure des bouches,

Avec le soleil qui se couche.

VI


CELLE DU SAMEDI


Et Samedi soir,

Samedi soir,

Avec votre bel habit noir,

Et les lampes que l'on allume,

Et les toits des maisons qui fument;

Et Samedi soir,

Samedi soir,

Maintenant c'est vous tout en noir,


Et puis les pies,

Et puis la lune,

Et sur leurs portes les vieillards,

Et les enfants qui chantent tard

Près des bêtes à l'abreuvoir,

Et puis les pies,

Et puis la lune,

Et les maçons qui s'en vont boire.


Or, à sa fin

C'est la semaine,

Et pour les pauvres doigts de peine

Aux écheveaux la fin des laines,

Et tout en place en les armoires;

Or, c'est la fin

De la semaine

Où chaque jour fut à la peine,


Et samedi soir,

Samedi soir,

Avec votre bel habit noir,

Maintenant de nuit douce et pleine

Faites à tous un reposoir;

Samedi soir,

Samedi soir,

Tout le monde a fait son devoir.


A présent c'est encor Dimanche,

Et le soleil, et le matin,

Et les oiseaux dans les jardins,

A présent c'est encor Dimanche,

Et les enfants en robes blanches,

Et les villes dans les lointains,

Et, sous les arbres des chemins,

Flandre et la mer entre les branches.


Or, c'est le jour de tous les anges;

Michel avec ses hirondelles

Et Gabriel tout à ses ailes,

Or, c'est le jour de tous les anges;

Puis, sur terre les gens heureux,

Les gens de mon pays, tous ceux

Allés par un, allés par deux,

Rire à la vie aux lointains bleus;


A présent c'est encor Dimanche,

-Meuniers dormants à leurs moulins,-

A présent c'est encor Dimanche,

Et ma chanson, lors à sa fin.

 

 

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Un aparté...

 Un aparté, un doux moment

Celui où on oublie le temps

Quand les jours soudain deviennent longs

Chercher du sens, du beau, du bon!

Une quête qui attend un écho

Trouver alors le bon tempo

C'est une question de talent

D'envie de vivre simplement!

Faut excuser cette exigence

Ne plus parler de tempérance

Seul vaut de vivre avec passion

Ne plus brider nos émotions.

J.G.

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Le "Propos sur le Bonheur" d'Alain

12272743463?profile=original"Propos sur le bonheur" est un essai d'Alain, pseudonyme d'Émile Chartier (1868-1951), publié à Nîmes dans les Cahiers du Capricorne en avril 1925, et en volume, dans une version augmentée, à Paris chez Gallimard en 1928.

Alain commença à écrire ses premiers «propos», sous le titre de «Propos du dimanche» et «Propos du lundi» dès 1903: de Paris, il envoyait un article hebdomadaire au journal la Dépêche de Rouen et de Normandie. Il traitait les sujets d'actualité avec un grand sérieux. Puis Alain «invente» le «propos»: le 16 février 1906, dans les «Propos d'un Normand», désormais quotidiens, il laisse aller sa plume au gré de ses humeurs. Alain est alors un Normand, au propre et au figuré: originaire de Normandie, il incarne l'homme de bon sens par définition. Le «propos» renvoie à la tradition de l'essai selon Montaigne, où le «sage» s'analyse et exerce sa pensée en toute lucidité. De 1906 à 1936, les «propos» s'imposeront comme une sorte de commentaire, à chaud, de l'actualité politique: les «Propos d'un Normand» (16 février 1906-1er septembre 1914) furent suivis, après la guerre et une interruption due à la «tyrannie de l'opinion», par les Propos (d'avril 1921 à février 1927), puis les Libres Propos (de mars 1927 à septembre 1935) et les Feuilles libres (1935-1936). Certains seront réunis par thème et publiés en volumes: Propos sur la littérature, Propos sur l'éducation, Propos sur l'économique, etc. Dans ses textes, Alain exprime des opinions inspirées du radicalisme et dénonce les errements extrémistes des militaires et des politiques. Il lance aussi l'anathème sur le freudisme, qui ôte à l'individu toute liberté en prétendant le réduire à ses pulsions.


Nous nous irritons, nous nous agitons: preuve que nous méconnaissons les causes de notre mal-être. Or, tout est une question de tempérament. Si notre corps souffre, la dépression nous guette. Peu importent les motifs que nous pouvons avoir d'être malheureux: adoptons une vision positive des choses. Il faut vouloir le bonheur et non pas se laisser travailler par la peur de l'avenir. Ne laissons donc pas notre imagination errer, et alimenter sans cause nos appréhensions: rien ne perturbe davantage la santé physique et morale. Ne nous complaisons pas dans la tristesse. Oublions nos angoisses en identifiant leurs facteurs physiologiques, faisons du sport et pallions l'ennui mortifère en nous distrayant. N'accusons pas le sort: soyons lucide, rien ne nous détermine sinon notre propre nature et nous pouvons la transformer. Faisons de notre inquiétude le moteur de notre progrès et ne cessons d'oeuvrer pour notre félicité. Nous trouverons alors notre bonheur non dans une satisfaction illusoire mais, à chaque instant, dans l'action. Une fois en paix avec nous-mêmes, adoptons l'art de vivre que nous dictent la politesse et le respect d'autrui, sans nous laisser influencer par la rhétorique chère aux prêtres et aux poètes. Le bonheur est un devoir social qui se cultive grâce à un art de vivre bien entendu.


Les «propos» apparaissent comme des billets d'humeur où l'auteur exprime ses partis pris sur le ton de la conversation. D'une part, le «propos» se définit donc comme un essai libre de toute contention rhétorique, un fragment d'une «imprécision calculée» (Samuel de Sacy). D'autre part, il se veut le procès-verbal d'une réflexion consciente sur son être. Cette double caractéristique en fait le moyen privilégié de traduire une morale ou, plus précisément, un art de vivre. Il ne s'agit pas, pour Alain, d'imposer une norme mais de forger un instrument menant à la connaissance de soi. Dans les Propos sur le bonheur, Alain ramène toutes les angoisses à des troubles physiologiques. Qu'est-ce que le bonheur? Impossible à définir, jamais acquis, il vient d'une disposition de l'esprit, proche de la vertu antique, de la force d'âme virile. Comment forger cette aptitude au bonheur? Pour Alain, d'abord, il convient de se connaître soi-même, puis de cultiver, envers ses semblables, la politesse consistant à bannir des conversations tout motif d'inquiétude. Alain développe donc une philosophie de l'action: le bonheur est à conquérir, ici et maintenant. Quant à l'imagination, la folle du logis, elle fait extravaguer l'homme; elle l'incite à se projeter dans le passé ou l'avenir. De l'action conjuguée de la douleur physique et des délires imaginaires naît la métaphysique, qui se complaît dans la souffrance. Or l'inquiétude ne peut constituer qu'un aiguillon dans la chasse au bonheur. Puisant ses sources chez les stoïciens, Platon, Descartes et Spinoza, Alain incite l'homme à se détacher de ses passions et à les considérer comme extérieures au moi. Thèse évidemment peu compatible avec celles, contemporaines, du docteur Freud.

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                      JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI OU L’EFFACEMENT INELUCTABLE DU SUJET

Du 07-02 au 29-02-20, l’ART ESPACE GALLERY (Rue de Laeken 83, Bruxelles 1000) a présenté une exposition consacrée à l’artiste français JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, intitulée : VOYAGE INTÉRIEUR.

Ce qui, chez JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, frappe au premier regard, c’est la puissance par laquelle sa technique magnifie l’œuvre jusqu’au moindre détail. Cette puissance a pour but de la révéler dans sa matérialité « rustique », exprimée par ce côté « rugueux », brillamment mis en relief par un travail titanesque exercé, notamment, par le couteau et par les brosses. Cette même matérialité trouve son impact dans une manière de peindre comparable à une calligraphie « calquée », à l’intérieur de laquelle la forme trouve sa corporalité.

LE CIRIO (2) (100 x 81 cm- fond laque de garance)

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Cela devient parfaitement flagrant avec LE CIRIO (2), en chaque élément le composant. Observez attentivement le garçon de café lever son bras droit qui saisit quelque chose. Le bras est compris à l’intérieur d’un sillon (conçu de façon translucide) qui l’enveloppe totalement, mettant en exergue la blancheur des chairs ainsi que la tension (même légère) musculaire, appuyant la dynamique du mouvement ascendant. Cette technique qui est en fait une écriture à part entière, laisse au regard le sentiment qu’il s’agit de formes « négatives », émanant de la surface plane. Le chromatisme est entièrement conçu dans des couleurs vives, telles que le rouge, le brun, le vert et le jaune. Le plan moyen de l’espace est dominé par le rouge et le jaune ainsi que sur la zone unissant l’avant à l’arrière-plan (concrétisée par le parquet), associé au rouge vif que l’on retrouve pour assurer la matérialité massive du comptoir. Le tout soutenu par une haute note blanche à l’arrière-plan, conférant à l’œuvre une luminosité rarement égalée dans sa dimension diaphane.

LE CIRIO (100 x 81 cm-fond laque de garance)

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Cette composition est traitée de façon à scander progressivement tous les éléments qui la distinguent. A’ partir de l’avant-plan : la chaise annonçant la table, laquelle annonce à son tour le dossier du fauteuil (rouge en dégradés). Il est suivi par une zone de séparation dominée par le jaune, laquelle divise la scène en deux parties. Le tout aboutissant vers cette haute note blanche (évoquée plus haut), conférant à l’œuvre sa viabilité lumineuse, en permettant l’avènement des contrastes entre les couleurs.

La partie gauche est entièrement plongée dans un chromatisme sombre, lequel reprend le rouge bordeaux largement usité dans le rendu du volume du comptoir. Ce traitement offre une merveilleuse scansion de l’espace.

HOMMAGE A’ MONET (100 x 81- blanc sur blanc),

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Majoritairement dominé par le vert et le jaune, HOMMAGE A' MONET s’inspire de l’esprit des NYMPHÉAS (1914-1926). Incontestablement, nous nous trouvons face à une splendide réalisation technique. Mais quel est son rapport avec l’ « impressionnisme »? Il est évident que l’œuvre flirte avec l’écriture impressionniste des origines. Surtout dans sa conception des couleurs. Néanmoins, le traitement apporté aux formes ainsi que le côté « fluide » créé par la brillance à outrance du vernis nous éloigne esthétiquement de Claude Monet, tout en saisissant parfaitement l’âme des NYMPHÉAS. C’est en cela qu’il s’agit bel et bien d’un « hommage ». Car pour l’artiste toute peinture est une « impression ». Le tout est de travailler vite pour capter l’irruption de la lumière en tant que couleur. Précisons que des clichés photographiques ont servi de base à la réalisation de cet excellent travail.  

LE CIRIO (100 x 81 cm - fond rouge anglais) 

Le rouge est la fabrique de la base du fond permettant l’émergence ainsi que le développement d’un blanc dont la fonction n’est plus d’être une couleur « neutre » mais bien d’être le passage vers l’accomplissement du mouvement. Le serveur apportant les tasses ainsi que la dame (avant-plan gauche) semblent statiques. Néanmoins, le traitement apporté, tant au vêtement du serveur qu’à la coiffure de la dame, conçu à base de stries se suivant en séries, dynamise l’opacité du blanc et le rend « actif » dans une forme particulière de cinétisme.

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SCULPTURE (RUBENS) (100 x 81 cm – fond strié rouge)

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Remarquez la posture altière de la femme statufiée dont le mouvement débute à l’avant-plan pour s’étirer de manière ascendante. Observez la folie dans les entrelacs des plis du vêtement. Ce sont, en fait des stries réalisées par des outils pointus qui créent cette agitation visuelle. Si le nom de Rubens est associé au titre c’est parce qu’il est le précurseur de cette technique appliquée sur le fond. Ces stries permettent la simplification du dessin pour obtenir le volume. Il en va de même pour le « clair-obscur » des autoportraits. L’artiste précise que ce fut le même Rubens à pratiquer cette technique bien avant Rembrandt que nous allons à présent évoquer.             

 

AUTOPORTRAIT COULEUR (17ème siècle (34 x 26 cm - clair-obscur)

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Il s'agit manifestement d'un hommage à Rembrandt. Trois étapes chromatiques structurent le portrait.

  • Le noir, enveloppant l’arrière-plan
  • Le blanc-jaune. Blanc pour la chevelure, jaune pour le visage
  • Le rouge du vêtement

Des glacis ont été utilisés pour créer les ombres sur le visage par rapport au blanc des cheveux et au jaune soulignant les chairs du faciès. 

L’œuvre fait référence du 17ème siècle. Il s’agit d’un autoportrait. L’équation n’est guère difficile à réaliser. S’agissant d’un autoportrait se référant au 17ème siècle, l’œuvre est un hommage à Rembrandt. Comme l’écrivait fort justement Germain Bazin, l’autoportrait est, en matière de peinture, l’expression majeure de l’extériorisation de la conscience dans tous ses états. Rembrandt, en est le  meilleur théoricien. En quoi l’émergence de la conscience se dévoile-t-elle dans ce tableau? Elle se dévoile par la présence du visage de l’artiste. Mais à l’instar de Rembrandt, il ne s’agit pas d’un simple rendu physique mais bien d’un visage transcendé au niveau de l’âme. Cette dernière s’affirme dans une introspection sombre où le sourire est absent. Elle interroge le visiteur qui seul peut oser une réponse. Rembrandt est là mais Schembari aussi ! Si le maître hollandais est présent, il existe principalement dans le rendu émotionnel de la mise en scène du visage. L’expression est intense. Le personnage, campé de face, fixe le visiteur. Il semble sorti d’une sorte de « camera oscura », comme propulsé de l’arrière-plan d’un noir intense. La composition est essentiellement tricolore. Elle superpose simultanément le noir (arrière-plan), le jaune (associé au visage ainsi qu’aux cheveux) et le rouge (alterné de blanc en stries verticales du vêtement).

REMBRANDT : AUTOPORTRAIT DU KUNSTHISTORISCHES MUSEUM (1657)

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Si dans l’autoportrait représenté, les couleurs sont franches et affirmées, l’AUTOPORTRAIT (de petites dimensions) abrité au Kunsthistorisches Museum de Vienne, peint par Rembrandt en 1657, « flotte » pour ainsi dire, dans une luminosité rendue volontairement opaque par le passage répété du pinceau de l’artiste, rendu dans les stries également verticales, effleurant à peine la surface de la toile. Il n’y a pratiquement pas d’arrière-plan, si ce n’est l’espace arrière enserrant la totalité de la composition.

La zone au chromatisme rouge, réservée à la chemise du personnage, renforce le contraste entre le blanc (en dégradés) du visage avec l’ensemble globalement monochromatique de l’ensemble de l’œuvre. Concernant la mise en scène des visages, celui de Rembrandt est campé de face, sur un buste légèrement positionné de trois-quarts. Celui de Schembari s’impose en position frontale. 

JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI a employé trois heures pour réaliser son autoportrait. Campé buste de face, il s’est tenu devant un miroir noir permettant de voir simultanément la lumière et l’ombre sans fatiguer l’œil. La conception de l’ensemble a été réalisée par des pigments qui sèchent très vite, tels que le jaune de Naples pour les chairs du visage. Une économie chromatique a été apportée à la composition : très peu de couleurs pour respecter la palette de l’époque.

Un dénominateur commun unit Rembrandt à Schembari, à savoir l’expression des visages, laquelle est soulignée par un même froncement des sourcils, affirmant la personnalité des sujets. La bouche, fermée, contribue à rendre hermétique l’expression faciale. Bien que, à y regarder de près, la possibilité de l’émergence d’un sourire, frôle à peine le visage de Jean-François Schembari.      

AUTOPORTRAIT (54 x 45 cm - BLANC/BLANC CADRE)

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Cette même couleur blanche conçue de façon presque aveuglante, évoquée plus haut, servant de « négatif » à la forme émergente dans une opposition entre deux types de blanc : un blanc « cassé » donnant naissance à un autre blanc dans une note plus claire à partir de laquelle le personnage issu de cette teinte apparaît dans ce qui donne le sentiment d’être l’empreinte originelle, se retrouve dans cette œuvre.    

Le visage est campé de face, reposant sur un buste représenté de trois-quarts. Nous entrons ici dans le royaume du trait. Le visage est structuré par les principaux éléments le composant, à savoir les cheveux, ressemblant à des fils, finement ciselés posés sur le crâne. Les sourcils laissant apparaître les yeux. Le nez sur lequel reposent les lunettes. La bouche, assez charnue, c'est-à-dire matériellement plus affirmée, se signale par rapport au reste. En réalité, ce sont ces quelques éléments qui confèrent au visage son volume. Le vêtement demeure anecdotique.

Toute la composition est basée sur le rapport « blanc sur blanc », lequel insuffle l’énergie dynamique nécessaire à l’œuvre. Elle est là, présente. Néanmoins, effacée par l’extrême finesse du trait, contribuant en dernière analyse, à faire disparaître le sujet. L’œuvre devient puissamment éphémère.  Les cheveux sont réalisés en creux comme dans une gravure.

Le blanc usité est le « blanc gaufré », plus « arrondi », captant et restituant mieux la lumière. Ce procédé pictural fut adopté jusqu’au 18ème siècle.

JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI a ceci de particulier qu’il possède une grande érudition concernant l’histoire de la peinture, laquelle ne se limite pas à son évolution sur le plan diachronique mais également sur l’histoire des techniques picturales qu’il revisite dans chaque œuvre réalisée.     

La pose de la couleur est pour l’artiste une démarche instinctive dont le but est de capturer l’émotion et la lumière. Il instaure ainsi une dichotomie en la rendant indépendante par rapport au sujet. Cette volonté d’indépendance se retrouve à la fois dans la forme et le dessin, mettant en exergue la liberté du geste. Car la hantise de l’artiste est celle d’être prisonnier du sujet. Au point d’affirmer qu’en dernière analyse, le véritable sujet du peintre n’est autre que la peinture elle-même. Il ne peint plus au pinceau parce que les dessins sont lisses et qu’il privilégie tout ce qui est rigide et permet d’être creusé. De là la différence qu’il instaure dans son interprétation par rapport aux notions d’ « artiste » et de « plasticien ». Selon sa théorie, l’artiste oriente ses recherches sur ce que cache l’image à la différence du plasticien pour qui la peinture survole l’image sans jamais en atteindre la profondeur. La technique est là pour appuyer ses moyens d’expression.

Autodidacte, l’artiste a pratiqué le dessin dès son enfance, pour s’orienter par la suite vers la peinture à l’huile à l’âge de douze ans. Il a néanmoins fréquenté les Beaux Arts en 1975 avant de s’intéresser en 1984 à la photographie, ce qui lui sera indispensable dans sa connaissance de la peinture : la réalisation des nymphéas de L’HOMMAGE A’ MANET (cité plus haut), peint d’après un cliché photographique, témoigne de l’importance qu’il accorde à cette discipline. En fait, la découverte d’un ouvrage de Jacques Maroger (1884-1962), peintre, restaurateur et pédagogue, lui révèle qu’aux Beaux Arts, il n’avait pas reçu la formation ad hoc en tant que peintre.

D’où un divorce d’avec la peinture. Grâce à l’ouvrage de Jacques Maroger, il se réconcilie avec ce médium en travaillant sur le thème de l’invisible, tant par la peinture que par la photo. Il décrochera d’ailleurs un prix international pour un travail photographique basé sur le rapport entre l’invisible et la lumière. Si l’artiste a adopté l’huile, c’est parce qu’il recherche l’épanouissement de ce qu’il appelle « une aventure créatrice », ce que ne permet pas l’acrylique. Car cette dernière sèche trop vite et de ce fait, « termine » en quelque sorte l’acte créateur avant l’heure. L’huile, par contre, de par la lenteur de son séchage, permet à l’artiste de poursuivre cette « aventure créatrice ». Nous avons évoqué, plus haut, son immense culture concernant l’histoire de la peinture. Elle se traduit techniquement par une démarche entrée désormais au sein de l’art contemporain, appelée le fusionnisme.

Il s’agit, comme son nom le suggère, de mettre en exergue le mélange des couleurs, toujours au sein d’une perspective historique que l’on retrouve étalé sur la surface de la toile. Issu de l’esthétique contemporaine, le fusionnisme est né en France, dans les années ’90 à Fontainebleau. Associant styles et techniques en plus des encres, acryliques et outils en tous genres, il inclut dans le processus créatif, le langage gestuel de l’artiste ainsi que sa culture et son imaginaire. Sur base du fusionnisme, l’artiste axe son œuvre au centre d’une recherche picturale qui le mène au cœur de l’histoire de l’Art. Sa technique, résolument contemporaine, est basée sur une recherche oscillant entre les cultures flamande et italienne. Dès lors, le fusionnisme s’étale entre les techniques (écoles) d’Antonello de Messine (15ème siècle), de Leonardo da Vinci (16ème siècle), du Titien (école vénitienne, 16ème siècle) jusqu’aux maîtres flamands, Rubens et Rembrandt (17ème siècle), à l’intérieur de savantes fusions chimiques, telles que le médium d’Antonello de Messine, celui de Leonardo da Vinci, la gelée et le mastic en larmes de Rubens. De par son choix, l’artiste propose une œuvre-réflexion basée sur le moment où du fait de la création d’écoles et de techniques innovantes, la peinture devient, comme il l’affirme, un métier. JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, nous offre une démarche cultivée et laborieuse, contribuant à restaurer la peinture en tant que « sujet », lui rendant derechef sa fonction de labeur, de culture et de connaissance originelles ainsi que ses lettres de noblesse.

 François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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 L'artiste JEAN-FRANCOIS SCHEMBARI et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.       

12273351290?profile=original Photos de l'exposition de JEAN-FRANCOIS SCHEMBARI à l'ESPACE ART GALLERY

                                   

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                               LE BESTIAIRE ENTRE IDÉE ET FORME : LA VISION CRÉATRICE D’EMMALY

Du 07-06 au 30-06-19, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a consacré une exposition au sculpteur français EMMALY, intitulée : LA MAGIE DES COULEURS.

Le titre de cette exposition semble porter sur un des innombrables éléments qui constituent le travail de cet artiste, à savoir la couleur comme vecteur d’onirisme. Néanmoins, la seule couleur ne suffit pas à caractériser l’œuvre du sculpteur EMMALY, en ce sens qu’elle compose avec la forme sur laquelle elle s’applique. Certes, la couleur est primordiale dans la conception des pièces, mais elle ne l’emporte pas sur la seule ligne. Ligne et couleur forment une entité dynamique, l’une étant tributaire de l’autre. L’œuvre qui en résulte est le mariage entre ces deux éléments. La lumière, issue de la couleur, s’attache à dessiner la forme dans ses moindres recoins. Pour ce faire, l’artiste n’hésite pas à « agrandir » le sujet, voire à le « rapetisser » pour mieux y déceler les arcanes formels.   

LIBELULE (bronze polychromé)12273332876?profile=original

Cette oeuvre rappelle la coupe microscopique de l’insecte vue à travers la loupe grossissante du microscope. Posée sur un socle rotatif, la pièce tourne au gré de la main du visiteur. Vue de face, l’œuvre se révèle par l’appareil oculaire de l’insecte, lequel occupe la totalité de la partie faciale. Il est l’élément principal de la composition. Le deuxième élément apparaît dans la conception des ailes. Les ailes antérieures esquissent un mouvement directionnel vers le bas. Tandis que les ailes postérieures projettent le mouvement vers le haut. L’artiste nous indique donc que l’instant est soit saisi en plein vol, soit que l’insecte amorce son envol. La vue de profil met en exergue la beauté plastique de la conception des ailes. Tant, dans l’intérieur comme dans l’extérieur, les ailes sont porteuses de fines nervures, à peine esquissées. Ce qui appuie, dans le rendu plastique, la force directionnelle du mouvement. La vue arrière insiste sur le corps dans toute son extension. Des stries horizontales alternent, de la base jusqu’à la partie supérieure, pour mettre en évidence la force du corps, conçu comme une cage. Cette vue postérieure nous fait prendre conscience de l’assemblage résultant du contact entre les ailes et la partie supérieure du corps. Bien que tout soit parfaitement poli et soudé, l’œil du visiteur, apprivoisé, s’aperçoit de l’ajout d’éléments sur le haut du corps. Cette pièce est réalisée en six parties, à la cire perdue sur une armature métallique recouverte de plâtre.

Cette même vue fait également prendre conscience de l’aspect « mythologique » des ailes, lesquelles, évoluant sur deux rythmes différents, ressemblent aux voiles déployées d’un vaisseau.      

MARCHE POLAIRE (bronze polychromé)

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La démarche est la même que pour l’œuvre précédente. Le sujet est, comme son titre l’indique, la marche prise  sous plusieurs angles, tant frontal que de profil et postérieur. L’artiste se frotte ici à un aspect lequel a toujours énormément intrigué les peintres et sculpteurs de tous temps, à savoir la représentation du mouvement. Des chevauchées sur les grottes pariétales de Lascaux au « galop volant » de la Grèce antique, en passant par le décorticage du mouvement par le phénakistiscope du début de l’histoire du Cinéma, le mouvement, dans sa rhétorique a toujours été décrypté avant toute volonté de reproduction. La patte arrière droite du plantigrade répond à sa patte avant gauche. Les deux autres pattes (la gauche arrière et la droite avant) stabilisent le mouvement. La patte arrière droite sert de « propulseur », tandis que celle avant gauche ferme, en quelque sorte, le mouvement. Le museau de l’ours est privé d’attributs. La couleur jaune a ici un rôle déterminant, en ce sens qu’elle insiste sur les lignes de forces de la pièce. Cette œuvre, à dominante verte, est sur les flancs ainsi que sur le dos, supplantée par du brun vif dans le but de renforcer l’idée de la masse musculaire de l’animal. Cette même tonalité, agglomérée sur la crête du dos jusque sur le postérieur de l’ours, sert à matérialiser le volume. Le rendu de la pièce est d’une grande élégance.  

ENVOL (bronze polychromé)12273333693?profile=original

Cette pièce témoigne également d’une splendide représentation du mouvement ascendant dans l’effort physique de l’oiseau. L’étirement se produit par l’élongation du cou, à partir du milieu du corps. Cette ligne droite, aboutissant au bec du volatile, est capitale car elle assure le mouvement directionnel à la pièce. Force est de constater la puissance des ailes, plastiquement conçues comme des muscles destinés à porter tout le poids de l’envol. La vue arrière nous offre une ligne droite unissant l’arrière du corps, presque en éventail, en passant par les ailes pour aboutir au cou jusqu’à la tête de l’oiseau, signifiée par le bec. A’ l’instar de l’ours (MARCHE POLAIRE – mentionné plus haut), la tête du volatile est privée d’attributs.  

DUO MARIN (bronze polychromé)

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représente une scène de maternité. Ce qu’il y a de prodigieux dans cette œuvre, c’est qu’il s’agit de la représentation d’une plongée. La baleine et son baleineau plongent dans une synchronisation du mouvement totale, lequel les unit d’un même lien. La polychromie s’étale à partir d’une couleur dorée vers un ensemble de variations raffinées.

LE TOUCAN (bronze laqué)12273335453?profile=original

le corps, vu de profil, est compris entre deux figures hyperboliques, à savoir la queue et le bec. De face, le bec occulte la tête.  Les yeux s’inscrivent dans deux énormes orbites privées de regard. L’oiseau se résume à cela. Au visiteur de concevoir le reste.

Avec EMMALY, nous allons à l’essentiel, l’artiste refuse de se perdre dans des détails superflus. L’absence d’attributs caractérisant la gueule de l’animal sculpté peut se traduire par la volonté de le concevoir, à la fois dans l’idée et dans le volume. Son œuvre se situe à l’intérieur d’une démarche essentiellement figurative, basée à partir d’un travail sur la ligne, d’où ce côté stylisé et lisse caractérisant chacune de ses pièces. L’artiste travaille toujours d’après photo. Deux choses interpellent d’emblée le visiteur : la dextérité du mouvement ainsi que le socle (souvent mobile) sur lequel repose et tourne la sculpture. Même si l’œuvre y contribue dans sa réalisation, c’est l’œil qui détermine le mouvement. Le socle, permettant la rotation, est là pour renforcer la dynamique de ce mouvement dans sa métamorphose mais aussi pour protéger la pièce de chocs éventuels. L’artiste, qui ne s’est jamais attaqué à la figure humaine, demeure éperdument animalier. En cela, il est l’héritier de son père, également sculpteur spécialisé dans le bestiaire, évoluant, néanmoins dans l’abstrait. Extrêmement attentif à l’aspect technique, il envoie ses pièces chez le fondeur. Une fois finies, il les termine en travaillant sur la dichromie, c'est-à-dire sur un travail chromatique centré sur la fusion entre deux couleurs. Mû par la symbiose mystique entre Nature et tonalités, il pratique toujours un chromatisme très proche de celui que l’on trouve dans les différents biotopes. L’artiste est autodidacte et sa technique se résume essentiellement au bronze. Il pense persévérer dans cette voie.

EMMALY nous offre un merveilleux travail où la ligne est à la croisée de la forme et de la proportion. L’élégance se mêle au mystère de l’idée et la matière conduit le regard vers une vérité possible que le visiteur fait sienne.  

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste EMMALY et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photos de l'exposition de EMMALY à l'ESPACE ART GALLERY

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administrateur partenariats

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Joyaux éphémères

Rêveries assumées

Eclats de lumière

Grâce sublimée...

Les fleurs...

Heureuse détente

Coroles éclatées

Splendides et ardentes

Et soudain pâmées...

Les fleurs...

Rien que mots très doux

Au sortir des lèvres

Si je pense à vous

Comme un goût de fièvre...

Les fleurs...

Le monde est trop triste

Quand il vous oublie

La beauté existe

Rétines éblouies...

Les fleurs...

Gilbert Jacqueline

12273364663?profile=original

Merci à Anne Marie REMONGIN  pour toutes ces belles aquarelles.

Qu'elle reçoive mon affection.

Liliane

Un partenariat

Arts

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Lettres

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  • Le site de l'organisation "Brussels Museums" nous propose entre autre une page exceptionnelle qui suggère des visites virtuelles -via votre ordinateur ou votre smartphone- de  nombreux musées bruxellois.
  • Profitez donc de cette magnifique occasion
  • Et cette page magique, c'est par ici

Et retrouvez le lien vers le site complet de Brussels Museums dans la colonne de droite du réseau qui a été conçue pour s'afficher lors de toutes vos navigations sur 12273361081?profile=original

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Le visage des fleurs

Le jardin

je m’y retrouve
mes souvenirs
ont le visage des fleurs
la voix des oiseaux
l’apparence des arbres
la joie des secrets
la mélancolie
des feuilles qui battent
de l’aile

*
Martine Rouhart

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L'UNIVERS FEERIQUE DE DOMINIQUE LEMOINE

                                                      L’UNIVERS FÉERIQUE DE DOMINIQUE LEMOINE 

Du 02-10 au 20-10-20, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir de vous présenter l’œuvre de la sculptrice française, Madame DOMINIQUE LEMOINE, intitulée : CONVERSATIONS SINGULIÈRES.

DOMINIQUE LEMOINE est une artiste qui surprend en ce sens qu’elle prend le bois comme point d’amorce pour une sculpture mettant en relief d’autres matériaux (tels que le fer) sans qu’aucun d’entre eux ne l’emporte sur l’autre. Le fer (notamment le fer rouillé) épouse le bois jusqu’à en faire corps. Néanmoins, s’il n’y a aucune volonté de « perspective morale » dans les matériaux utilisés, force est de constater que la pièce en bois demeure l’élément portant de la sculpture. Le bois conserve sa prérogative  de « tronc ». Les autres matériaux, sans être relégués au rang d’ « accessoires », s’ajoutent en tant qu’éléments constitutifs à l’œuvre.

FAMILLE

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Cette oeuvre présente un groupe de trois personnages (père, mère et enfant) formant, de par leur disposition, un cercle. Des trois personnages, seul l’enfant possède un « visage » avec des attributs extrêmement sommaires, tels que les yeux. Le reste du faciès se limite à légère enflure vers le bas, faisant parfaitement ressortir la partie supérieure et les orbites oculaires. Bien qu’il s’agisse de personnages humains, le visiteur pourrait croire qu’ils sont inspirés de l’esthétique des arts dits « primitifs ». De plus, l’addition d’éléments en fer, accentue sur l’œuvre le côté « art brut ». Il y a, en outre, du « totémisme » dans cet ensemble sculptural. Cela se remarque dans la conception plastique du père (l’ancêtre/patriarche), reconnaissable à sa taille dominante sur le groupe, participant de cet ensemble de trois pièces, dont chaque individu est soudé par un système de vis, reliant les différentes parties, permettant aux personnages d’arborer leur posture : en l’occurrence, celle de se pencher vers l’enfant, en ce qui concerne le père. Les bras sont de longues tiges pendantes en fer rouillé. La tête est une fine lame de fer noir. Ces mêmes fils de fer font office d’articulations, à la fois pour la mère comme pour l’enfant. Il est à préciser que toutes les pièces exposées reposent sur un socle en métal faisant intégralement partie de la démarche sculpturale. Ce qui frappe, en ce qui concerne ces personnages, c’est l’expression d'une atmosphère protectrice de laquelle l’on subodore des gestes d’aménité. Autre indice d’harmonie sociale, la proximité des personnages prend la forme d’un cercle fermé. La famille est un thème que l’artiste a toujours pris à cœur.

ATTENTE12273367853?profile=original

A' l’instar de DANSEURS, cette pièce présente une volonté d’anthropomorphisme. En effet, autant les visages que les corps se rapprochent de la réalité (même caricaturale). Le visage de l’homme, enlaçant la femme, conçu de profil, adopte une morphologie proche de la caricature. Il trouve se point d’ancrage à la fois par son nez crochu et par sa bouche, en forme de fente rentrante, définissant la forme du visage. La femme, aux attributs faciaux plutôt sommaires, se singularise par son ventre proéminent, signe d’une « attente », celle de la vie.

DANSEURS12273368056?profile=original

Comme toutes les œuvres de cette exposition, une pièce en bois fait office de piédestal. Un panier à friture fait office de visage. Une différence notable avec les autres couples réside dans le fait que les pieds (de forme humaine) sont physiquement présents, en ce qui concerne ceux du danseur et de la danseuse, ils se réduisent à une sorte de fer à cheval dilaté. Leur corps est conçu en fer.   

Le comble de l’enlacement se situe dans cette sculpture de petites dimensions intitulée :

FUSION 

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Le couple est carrément « ficelé » dans des lamelles de fer rouillées, enserrant les corps à l’intérieur d’une fusion mystique : leur conception relève de l’esthétique contemporaine, notamment, dans ces corps presque torsadés, aux crânes exceptionnellement réduits. Des seins, légèrement proéminents, sortent du buste de la femme. Chez l’homme, le buste est svelte et une musculature puissante s’affirme dans la conception de sa cuisse gauche. Le corps de la femme est, lui, plus « enveloppé », plus propice à l’enfantement. Le chromatisme est dominé par le brun-clair. 

L’ELEGANTE 12273368473?profile=original

est un hymne à la féminité. Cette pièce est un véritable tour de force. Le corps est, pour ainsi dire, composé de trois parties : la tête, plus petite par rapport à l’ensemble. La partie supérieure, composée par le tronc, se réduit à une « taille de guêpe » séparant le bassin des jambes.

Si nous qualifions cette œuvre de « tour de force », c’est parce qu’elle s’avère être « multidimensionnelle », en ce sens que le visage, même tourné vers la droite (la gauche par rapport au visiteur) pointe du côté opposé. Que le buste penche résolument vers la droite (la gauche par rapport au visiteur) et que le bassin « propulse » en quelque sorte le rythme de la composition vers l’avant. La partie postérieure se présente sur sa droite (gauche par rapport au visiteur), par un renflement qui contribue à déstabiliser le rythme une seconde fois. Deux excroissances en métal font office de bras. Quant à la coiffure, elle est réalisée par des bouts de métal en forme de ressort. Cette pièce allie, en un souffle, rythme, dance, élégance du geste et chorégraphie dans sa conquête de l’espace.   

Un autre aspect de l’artiste réside dans la réalisation de pièces appartenant à l’art animalier. Il s’agit d’un bestiaire aux allures à la fois caricaturales et fabuleuses, autant que peut l’être une fable d’Esope ou un fabliau du Moyen Age mettant en scène le corbeau ou le goupil.

L’INNOCENT

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présente trois palmipèdes dont le bec pointe vers trois directions différentes. Leur corps se résume à une longue pièce en bois, surmontée d’une tête se terminant par le bec et aux lamelles de fer rouillées leur servant d’ailes. Les pattes palmées sont réalisées à même la pièce leur servant de socle. Les yeux des oiseaux sont conçus à la fois avec des ressorts, des clous ainsi qu’avec des plaques en forme de globes oculaires, déposées sur des orbites à peine creusées pour les accueillir. L'artiste précise que le titre de cette oeuvre traduit une forme de procès adressé au personnage faisant face aux deux autres. Sa position dans l'espace est une métaphore de son innocence. 

PARTIE DE PÊCHE

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Cette oeuvre présente l’image d’un canard faisant du ski nautique, pouvant participer du récit joyeux de la fable moralisatrice d’un La Fontaine. Divers éléments définissent le volatile : le ski, le bec, les passoires à thé servant de lunettes, sans oublier les lamelles en fer rouillé en guise d’ailes. La pièce du haut, comprenant le buste et la tête est raccordée à celle du bas comprenant le reste du corps jusqu’aux pattes, elles-mêmes soudées aux skis. Les pupilles et les blancs des yeux, derrière les lunettes, sont deux pièces enserrées à l’intérieur des trous faisant office d’orbites oculaires.

Le socle prend la forme d’un poisson d’où le titre de l’œuvre. Concernant l’art animalier, celui-ci est porté par une forte charge d’humour, consubstantielle à la fable moralisatrice.

Le visiteur peut légitimement se demander s’il y a adéquation entre ses œuvres et leurs titres. En réalité, il n’y en a pas. Les titres ne lui viennent qu’après la création.

Cela se retrouve dans sa technique par rapport au résultat. L’artiste précise qu’Il n’y a aucune idée préconçue. Les formes de départ des bois travaillés sont à la base de ses idées. L’origine même des bois est disparate, à titre d’exemple, le matériau ayant servi pour LA FAMILLE (cité plus haut) provient d’un ancien poteau de moules. D’anciens morceaux de carcasse de bateaux sont également à la base dans la réalisation des pièces. Son travail est avant tout celui d’une céramiste associant des terres différentes qui ont du grain avec adjonction de métal. Malgré cela, elle préfère de très loin la sculpture à la céramique proprement dire car celle-ci s’avère trop compliquée lors de la cuisson. Elle avoue avoir toujours eu l’envie de travailler sur de grandes pièces.

DOMINIQUE LEMOINE, de formation scientifique (elle est médecin-radiologue), travaille la terre depuis l’âge de cinq ans. Elle aborde bien plus tard la peinture sur soie. Ce n’est qu’au moment de sa retraite (vers 2010), qu’elle  reprend et amplifie son activité artistique. Elle pense continuer dans ce même créneau sans pour autant se destiner spécifiquement vers l’art animalier. Auteure d’un univers fantastique, elle nous transporte par des voies joyeuses vers des espaces pavés de récits intemporels, faisant des fables d’antan,  des conversations singulières.    

François L. Speranza.

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N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

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A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste DOMINIQUE LEMOINE et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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LES MOTS POUR LE DIRE

Un grand merci à Mr. François Speranza, car le billet me concernant me touche profondément, c'est une façon de voir et comprendre avec justesse mon état d'âme

Un artiste a besoin d'un regard éclairé sur son travail, et quelle regard !! Mr. F. Speranza.

La perception que vous avez de mon travail me réconforte, un artiste est toujours seul devant sa toile, vous avez traduit en mots l'exactitude de mes émotions.

Ce titre "Omer Amblas ou l'esthétique de l'effacement" m'oblige à reconnaitre qu'effectivement au fond de moi même "l'effacement" n'est pas un vain mot car le fondement de mon travail est justement "effacer pour mieux voir"

Devoir de mémoires" lors de mon exposition à la galerie EAG c'est parce que je suis intimement convaincu que mon passé et celui de mes ancêtres ont subi le triste sort d'un effacement naturel. 

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Premier hommage:

L'âme des cieux

Deuxième hommage:

L'opéra dans les cieux

Tout, dans les oeuvres d'Ophira Grosfeld semble devoir être lié: peinture, musique et aussi poésie.
Aussi, je lance un appel aux membres poètes afin de commenter poétiquement ses oeuvres.

Je rappelle les règles des partenariats soulignées ICI par Liliane Magotte, administratrice des partenariats sur le réseau

L'on pourra trouver ICI dans les pages de commentaires quelques-unes des oeuvres d'Ophira Grosfeld qui trouveront certainement écho chez les poètes.

Robert Paul

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        GILLES BEYER DE RYKE : HORIZONTALITÉ ET VERTICALITÉ, DEUX AXES D’UN MÊME SIÈCLE.

Du 02-10 au 31-10-20, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir de vous présenter de vous présenter l’œuvre du peintre belge, Monsieur GILLES BEYER DE RYKE, intitulée : VUE SUR LE 21ème SIÈCLE.

Le titre de cette exposition, même s’il est inconsciemment entré dans les mœurs, comporte une particularité pour le moins intrigante : on ignore s’il est envisagé a priori ou a posteriori. Le 21ème siècle n’a que vingt ans d’ancienneté. Or, pour qu’il y ait une vue pertinente sur un siècle, il faudrait qu’il soit, sinon derrière nous, du moins en être arrivé à la moitié. Cette vision, décidément a posteriori n’est pas récente, elle est déjà ancienne d’une dizaine d’années. Que l’on nous comprenne bien, ceci n’est pas un reproche mais une constatation.

En ce qui concerne GILLES BEYER DE RYKE, cette vision est sciemment calquée sur le moment présent du siècle. C’est sous la forme d’un florilège stylistique renfermant des expériences expressionnistes, métaphysiques mais aussi cubistes que l’artiste affirme son regard sur le siècle courant. Pour renforcer son écriture picturale, une forme involontaire de « cinétisme cubiste » s’affirme dans une uniformité axée sur une verticalité que sous-tend une savante dimension perspectiviste, témoignant d’une extrême connaissance de la peinture classique. Mais également une horizontalité, laquelle se retrouve dans des œuvres témoignant d’une aura mélancolique. Les œuvres se divisent en toiles isolées ainsi qu’en diptyques et en triptyques. Chacune d’elles se développe spatialement à l’intérieur de ses proportions.

Envisageons ce triptyque : OUVERTURE (92 x 32 cm-huile sur toile x 3)

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Chaque panneau est pleinement centré sur une section de la scène pour former une entité. Cette fenêtre ouverte sur le littoral (panneau de droite) est construite sur un jeu de perspectives fort intéressant qui trouve son élan à partir de son bord, bien avant que l’œil n’atteigne la fenêtre en tant qu’élément physiquement tangible. L’artiste avance étape par étape. Le rebord s’inscrit à la fois chromatiquement et spatialement à l’intérieur du module du quadrilatère. Il remplace la fonction du cadre. L’on s’en aperçoit en regardant les quatre coins du tableau soulignés par un fort trait noir.

Les bords de ce cadre sont scandés par l’orange du rebord de la fenêtre et le rouge foncé des parois latérale et supérieure du cadre faisant office de mur portant. La fonction des couleurs est celle d’accentuer les effets de perspective : l’orange du rebord amène le regard vers le vert du chambranle, lequel conduit vers le jaune du sable, avant d’atteindre le paysage marin.

Au-delà de la fenêtre, s’ouvre une scène formée par quatre zones chromatiques initiales : le jaune de la plage, le bleu (en dégradés) de la mer, alternant avec le bleu foncé du ciel (dont le reflet s’amorce tout en devenant plus clair à partir du panneau de droite). D’autres couleurs émergent discrètement. Les édifices, de taille variable, varient de l’orage au vert, en passant par le bleu (le premier édifice que la fenêtre ouverte du panneau de droite annonce). Un « champ » d’immeubles, au loin parsemés, confèrent à l’ensemble, un rythme des plus intéressants. Essaimés vers l’arrière-plan, leur hauteur épouse les dépressions du terrain.

TERRE DES HOMMES (70 x 50 cm-huile sur toile)

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Il y a aussi une volonté expressionniste dans l’œuvre de l’artiste. Le titre de ce tableau, agencé avec la vision délibérément expressionniste du rendu graphique, font que cette mégapole prend des allures menaçantes. Qu’est-ce qui rend ce graphisme si expressionniste? Essentiellement le choc de deux couleurs rageusement vives, à savoir le rouge et le jaune des immeubles, conçus comme des sortes de crayons au garde-à-vous, enveloppés par la chape noire du ciel, lequel occupe l’espace extrêmement réduit du coin droit supérieur de la toile. Ce vocabulaire expressionniste rend compte d’une vision pessimiste de l’humanité, sinon future du moins actuelle. La présence de l’édifice se déployant de tout son long, traduit le rejet par l’artiste de l’uniformité culturelle ambiante.

Comme nous l’avons évoqué plus haut, GILLES BEYER DE RYKE est à la croisée de plusieurs styles, forgeant son écriture picturale : l’expressionnisme dicté par l’influence d’Egon Schiele et mais aussi par le symbolisme de Léon Spilliaert ainsi que de l’art métaphysique de Giorgio de Chirico. Sans parler de ses rendus cubistes exprimés de façon cinétique. Mais que l’on ne se méprenne pas, il ne s’agit en rien d’un cubisme et d’un cinétisme volontaires. Le cubisme en tant que tel ne l’a jamais véritablement influencé. Il en va de même en ce qui concerne le cinétisme. Ces deux styles ne sont que le résultat d’une mathématique engendrée par sa maîtrise de la perspective, laquelle demeure toute personnelle, en ce sens qu’en aucun cas elle ne pourrait être comparée avec celle de la Renaissance italienne.   

Il s’agit d’une vue contemporaine revisitant dans un langage contemporain une convention à la fois humaniste et picturale datant du 16ème siècle.

Parmi les références picturales de l’artiste, nous avons, entre autre, signalé le peintre autrichien Egon Schiele. Affranchi de l’influence de Klimt, Schiele apportera une révolution personnelle à la symbolique du corps humain. Il le peindra meurtri et malingre, mettant en parallèle la déliquescence corporelle avec la décadence de la bourgeoisie de l’époque. Outre les élongations et déformations physiques, le chromatisme appuiera cette mise en scène de la décadence psycho-physique par des teintes lugubres, telles que le noir ou le violet.

GILBERT BEYER DE RYKE reprend cette esthétique en l’adaptant non pas aux corps humain mais au corps urbain, en présentant les gratte-ciels comme de longs corps malades, dont l’élévation se termine de manière effilochée, presque filiforme. L’état de pourrissement du corps se transforme en une sombre pathologie urbaine et lugubre.

L’ARC DE TRIOMPHE (92 x 33 cm-huile sur toile)

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Ce diptyque aux couleurs ternes est censé glorifier l’arc de la victoire présent sur le bas du panneau de droite. Sa présence est timide, insignifiante. Il croule sous les édifices squelettiques, en élévation. L’œuvre est bi-chromée : noir et gris, alternant avec le blanc qui recouvre les toits. On peut y voir une « parabole » picturale de l’image du « Triomphe ». Image flamboyante dans son symbolisme mais altérée par la dimension squelettique (mortifère) des édifices, comme un crachat lancé au visage d’une beauté défunte. Notons qu’avant de se consacrer à l’univers urbanistique, l’artiste s’était concentré sur le corps humain en tant qu’expression des tensions humaines.   

ESTACADE DE NIEUPORT (100 x 66 cm-huile sur toile)

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Cette oeuvre traduit la forte influence de Spilliaert. Cette estacade, laquelle de l’avant-plan, traverse l’espace jusqu’au plan moyen de la toile pour se jeter dans la mer, se déploie dans une continuité chromatique faite de couleurs à la fois tendres et ternes qui incitent à la mélancolie. L’association de deux verts (avant-plan et plan moyen) annonce le bleu foncé du large se confondant avec l’horizon, signifié par une zone blanche se déployant horizontalement sur tout l’espace. Le ciel maussade se signale par un contraste entre une zone brune et une zone noire annonçant la nuit.

L’estacade est une longue succession de notes blanches, marron et noires, composant avec le mur en briques bleu-foncé, réalisé en damier, situé en contrebas, sur la gauche. L’ensemble se déclame comme une longue composition cinétique qui apprivoise et emporte le regard. La présence du phare, au loin, terminant la digue est une longue ligne verticale, conçue comme un point de repère, indissociable de la plupart des œuvres marines de Spilliaert. Même si l’artiste l’a peint parce qu’il se trouvait là au moment où il l’a peint, la présence du phare, en tant que point de repère, est une constante dans les marines de Spilliaert. Une lueur au cœur de la nuit.

DIGUE DE NIEUPORT (98 x 97 cm-huile sur toile)

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Nous propose un discours similaire dans une esthétique contemporaine. Ce qui interpelle le visiteur c’est (outre la beauté des couleurs, engendrant une mélancolie sincère) la puissance visuelle de la droite, partant de l’avant-plan pour se perdre au loin, dans un point que l’œil n’arrive plus à atteindre. Cette droite, réalisée en brun-clair, est une piste sur laquelle se réfléchissent les ombres des bâtiments, exceptionnellement conçus en dimensions réduites afin de ne pas l’emporter sur la puissance picturale de la droite, rendue inatteignable.

Nous nous trouvons avec ces deux dernières œuvres, dans une « temporalité » horizontale. Car il s’agit d’un temps de mélancolie, propice à la méditation, laquelle est engendrée à la fois par la scansion des couleurs, à la fois sombres et tendres, mais aussi par cette ligne droite partant de l’avant-plan et s’arrêtant là où l’œil n’a plus prise sur le temps.

DEUX SOUVENIRS (70 x 60 cm-huile sur toile) Nous sommes à la charnière entre la dimension mystique intemporelle, chère à de Chirico et l’écriture personnelle de l’artiste. La structure en pierre, enveloppante entourant la statue équestre à laquelle font face les deux personnages, traduit l’influence du peintre italien. Les lignes droites faisant office de plages de couleurs horizontales, mettent en exergue l’écriture de l’artiste. Le chromatisme de la structure en pierres reste fidèle à l’esthétique de Giorgio de Chirico.  

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ENTRE DEUX MONDES (100 x 66 cm-huile sur toile)

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Dans une écriture décidément contemporaine, l’association entre l’influence séculaire arabo-muslmane traduite par les fenêtres, à l’avant-plan, donnant sur une section de la métropole, géométrique à outrance et déshumanisée, forme un contraste saisissant entre la sécularité culturelle présentée comme l’image d’un passé, révolu dans sa mélancolie poétique et la classification géométrique de l’urbanisme contemporain, ressenti comme l’harmonisation forcée d’un chaos. Il y a dans cette œuvre, l’image d’un dualisme délicatement obsédant qui cherche une issue.

RUE DE LA LOI (70 x 50 cm-huile sur toile x 2)

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A’ l’immense surprise du visiteur, cette œuvre, construite sur deux panneaux se présente comme un jeu de perspectives, aux allures de trompe-l’œil. L’artiste propose faussement deux vues de la ville : une en plan, montrant des gratte-ciels (panneau supérieur). L’autre, en plongée, axée sur un angle créant l’impression (au sens pictural du terme) d’un vertige (panneau inférieur). Ces deux panneaux produisent un effet « en contrepoint » en la présence de deux verticalités distinctes, l’une visuellement opposée à l’autre, créant ainsi une opposition visuelle entre deux dynamiques, à l’origine d’un trouble cognitif. L’erreur que pourrait commettre le visiteur à l’approche de cette œuvre, serait de considérer sa lecture en partant du haut pour atteindre le bas, voire de ne faire aucune distinction entre les deux panneaux en les considérant comme deux instantanés d’une même réalité urbaine. En réalité, il faut considérer cette œuvre comme une étude sur la genèse de la verticalité, présentée ici dans son élan carrément gothique, jusqu’à atteindre le point culminant de son élévation. C’est à partir du panneau inférieur que tout commence l’ascension. A’ partir de différents points dans l’espace, sortent en verticalité des gratte-ciels, lesquels partant du plan moyen, s’élèvent en flèche jusqu’à atteindre le bord du panneau supérieur. Celui-ci les reprend dans une perspective nouvelle pour porter leur verticalité à son terme. Le panneau inférieur témoigne d’une splendide conception de la perspective, usitée comme une focale pour concevoir un cliché photographique.

Elle se poursuit dans le splendide « quadrillé » formé par les fenêtres de l’édifice (dont on ne voit qu’une section), à l’avant-plan. Le côté « réticulaire » des carrés piège la lumière réfléchie par le ciel. Axée sur une plongée, observez l’excellente disposition des voitures dont le débit s’écoule sur des files de trois lignes. Les passants, marchant sur le trottoir, ne sont que des points à peine perceptibles que l’œil distingue à peine.

Nous avons, à l’instar de TERRE DES HOMMES (cité plus haut), affaire à une parabole contemporaine : l’Homme conditionné, écrasé sous le poids de la mégapole.

Les couleurs (vert-clair/foncé, bleu (clair/foncé), jaune, blanc et noir) contribuent à augmenter la perspective de l’œuvre.

Les vues sur ce 21ème siècle (somme toute) débutant sont des « instantanés » reprenant des problématiques (pour le moment) majeures qui le structurent, sur lequel l’artiste se pose, comme il le spécifie lui-même en « augure ». Au-delà d’une vue parfois pessimiste (TERRE DES HOMMES), il accompagne la vision de ce siècle d’une aura de rêve, comme pour lui faire entrevoir, in fine, la possibilité d’un sauvetage moral. A’ partir d’une perspective essentiellement personnelle, l’artiste engage un dialogue humaniste avec son époque.  

GILLES BEYER DE RYKE a une formation académique. Il a fait ses études à l’Académie Royale de Bruxelles ainsi qu’à L’Académie d’Uccle. A’ partir de son écriture picturale actuelle, il estime avoir encore beaucoup de choses à explorer dans ce domaine. Sa technique est essentiellement basée sur l’huile.

Comme nous l’avons précisé plus haut, avant d’aborder cette vision de l’humanité, il était axé sur le corps humain, exprimé en tant que réceptacle des tensions humaines. Ce passage entre le corps et la ville se traduit dans une dialectique composée de lignes horizontales, tournées vers l’élévation et verticales, visant un infini inatteignable, mettant en exergue le tréfonds de l’humain dans l’expression la plus vivante de sa condition. 

François L. Speranza.

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 Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

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Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste GILLES BEYER DE RYKE et François Speranza : interview (masquée !) et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photos de l'exposition de GILLES BEYER DE RYKE à l' ESPACE ART GALLERY  

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