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Germination

Grain de sable ou de poussière,
Au gré des vents, folles secousses,
Mais jamais ne se courrouce,
Grain de folie aventurière.

Des raisins au mauvais temps,
De la cafetière à la rizière,
Sur le papier, dans la jardinière,
Comme une graine, il devient grand.

Et jusque dans le champ,
Pas besoin de le planter,
Le petit grain qui a poussé,
S'est ressemé en s'envolant.

Aliénor Samuel-Hervé

Extrait de mon recueil Éclats de Vie, VFB Editions, format numérique, janvier 2014
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L'emprise de la Nature

Songerie

L'énergie vitale, sans cesse,
Agit sur les êtres vivants,
Les rend actifs ou chancelants,
Superbes, au temps de la jeunesse.

Le chemin libre, où l'on avance,
Ne peut pas être rebroussé.
On y courut souvent pressé.
Un jour, s'impose la prudence

Je rends hommage à la Nature.
Et à ses lois époustouflantes.
Or sa rigueur est révoltante,
Qui, lentement, nous défigure.

Certes, en dépit de la laideur,
Que désemparée, je supporte.
Si la mort frappait à ma porte,
Je lui dirais d'aller ailleurs.

15 juin 2015

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administrateur théâtres

12273110300?profile=original                                 Suivez le XV Concours International Tchaïkovski en direct sur medici.tv

         36 jeunes pianistes participent cette année au premier tour du XV Concours International Tchaïkovski.

Aujourd'hui, Nikita Abrosimov, Yury Favorin, Sergey Redkin, Andrey Gugnin, Alexander Ullman, Asiya Korepanova, Maria Mazo et Emanuel Rimoldi joueront lors d'épreuves en récital solo, en direct de la Grande Salle du Conservatoire de Moscou.

Le direct sur tch15.medici.tv 

43c9a06d-a286-44d7-8af1-4b664016abab.jpg?width=250Le jeune belge Ayrton Desimpelaere dirigera la demi-finale du Concours International Tchaikovsky!


Ayrton Desimpelaere, jeune chef d'orchestre belge de 25 ans, dirigera la demi-finale du très renommé Concours International Tchaikovsky (session piano) du 22 au 26 juin 2015 à Moscou! Ce sera l'occasion pour le tout jeune chef de diriger les Solistes de Moscou de Yuri Bashmet devant un jury prestigieux (Gergiev, Pressler, Engström, Berezovsky, Bachkirov,…) en compagnie de six candidats dans des Concerti de Mozart. Le Concours International Tchaikovsky est présidé par Valery Gergiev et sera retransmis en direct sur Medici.tv.

Le Concours International Tchaikovsky est l'un des concours de musique classique parmi les plus prestigieux au monde. Baptisé en mémoire du compositeur russe, il se déroule à Moscou tous les quatre ans depuis 1958, année de sa création. Le Concours International Tchaikovsky est organisé par un comité réunissant d'éminentes personnalités du monde musical russe.

Né en 1990, le pianiste et chef d’orchestre Ayrton Desimpelaere est diplômé des Conservatoires Nationaux Régionaux de Paris et Versailles et des Conservatoires Royaux de Bruxelles et Mons. Il est également titulaire d’une licence en musicologie (Sorbonne) et d’un master en histoire de l’art, orientation musicologie (ULB). Il a ainsi l’occasion de rencontrer et travailler avec Daniel Gazon, Billy Eidi, Valery Gergiev, Mikhäil Faerman, Jean-Claude Vanden Eynden, Christoph Eschenbach, Adrian Mcdonnell, François Chaplin, Aldo Ciccolini, Shadi Torbey, Sébastien Romignon Ercolini, Cécile Lastchenko, Pauline Claes, tout en participant à de nombreuses master-classes. Fondateur de l’Ensemble Carminis et de l'Ensemble Pizzicato, Ayrton Desimpelaere participe en tant que pianiste à la création mondiale de Peter Pan d'Olivier Penard avec l'Orchestre de la Cité Universitaire de Paris en mai 2011 tandis qu'il dirige en mars 2012 la création belge de Browsing Agon de Michel Gonneville avec l’Orchestre du Conservatoire Royal de Mons pour le Festival Ars Musica. Avec le même orchestre, il a dirigé la Symphonie n°4 de Mahler, le Pierrot lunaire de Schönberg, l’Histoire du soldat de Stravinsky, Hommage à Garcia Lorca de Revueltas et Le Rossignol de Loevendie.

Moscou du 15 juin au 03 juillet 2015.

http://tch15.medici.tv/fr/festivals/piano-concerto-no-2-2

On peut déjà regarder le concert d'ouverture donné le 15 juin en replay:

En direct sur medici.tv, le XV Concours international Tchaïkovski s'ouvre dans la prestigieuse Grande Salle du Conservatoire de Moscou, dans un concert dirigé par Vladimir Fedoseyev.

Pour cette occasion, l'Orchestre Symphonique Tchaïkovski, sous la direction de Vladimir Fedoseyev, est rejoint par certains des meilleurs interprètes russes actuels, dont des étoiles montantes parmi lesquelles l'un des génies russes de la jeune génération de pianistes, Daniil Trifonov (1er prix et Grand Prix du XIV Concours Tchaïkovski), véritable phénomène qui a déjà brillé sur les plus grandes scènes (Carnegie Hall, Wigmore Hall et bien d'autres) et dont medici.tv a déjà retransmis de nombreux concerts.

À ses côtés on retrouve un autre jeune prodige, le pianiste Alexander Malofeev, qui à tout juste 14 ans a remporté plusieurs prix de concours internationaux pour jeunes talents – dont le concours Young Talents of Russia en 2013 et le VIII Concours international pour jeunes musiciens Tchaïkovski dont il a reçu le 1er prix et la Médaille d'Or.

Ils sont rejoints par le violoniste Georgy Ibatulin, vainqueur du XV Concours International Télévisé Casse-Noisette pour les Jeunes Musiciens, ainsi qu'Olga Borodina (membre du jury, mezzo-soprano, soliste du Théâtre Mariinsky), spécialiste du répertoire russe, invitée régulière des scènes lyriques et orchestres les plus prestigieux.

L'Orchestre Symphonique Tchaïkovski, premier orchestre de la Radio Nationale et considéré comme l'un des meilleurs orchestres au monde, est dirigé par Vladimir Fedoseyev, son directeur artistique et chef d'orchestre principal, dont la critique a salué la distinction et l'unicité de ses programmes. Aux côtés de cet orchestre et de son chef ont notamment été remarqués les jeunes talents Evgeny Kissin, Maxim Vengerov ou encore Vadim Repin.

Ils interprètent un très beau programme entièrement consacré à Tchaïkovski, à qui le monde rend hommage en 2015 à l'occasion du 175e anniversaire de la naissance du compositeur.

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Des « OGM » ou l’hybridation débridée

De l’Informel par le Surréalisme

                                                  

               Présenter un travail artistique qui s’est construit à la fois en dehors de toute pratique reconnue et de tout tropisme d’avant-garde, n’est pas chose aisée, mais c’est aussi ce qui  en fait la singularité, sinon la pertinence…

               Bien sûr, quelques aspects de ce travail entrent en résonnance avec certains pôles de l’art moderne et contemporain (par exemple celui de l’art informel mais aussi celui de Marcel Duchamp… qui est d’ailleurs presque toujours assimilé de manière expéditive à ses ready-made, alors que sa contribution au renouvellement de l’Art pourrait être tellement plus fertile), mais à aucun moment ils n’ont fait l’objet de choix préalables à ma recherche : ils se sont signalés à mon questionnement comme des révélations fraternelles. A présent, ils peuvent s’envisager à la manière d’un inventaire a posteriori, même si à l’évidence, mon inclination naturelle de jeunesse m’avait entraîné du côté de l’image surréaliste, d’abord écrite puis visuelle grâce à Ernst, Dali et Magritte.

               Ma créativité actuelle s’apparente aux impulsions de l’Action Painting mais, ma gestuelle étant exclusivement digitale (au sens propre), adaptée à un espace qui n’excède guère la surface d’une carte de visite, il m’est très difficile d’en faire une référence à part entière. Il faudrait sans doute chercher davantage du côté du dessin automatique dans la lignée de Masson, Tanguy voire du cycle de  l’Hourloupe mais, bien que je l’aie enseigné (après l’avoir longtemps pratiqué), les conditions d’élaboration d’un « monotypon » ne peuvent être comparées à celles qui déterminent le tracé en contours propre à ce genre de graphisme.

               Certes des apparences issues d’une conjugaison de textures demeurent sur le support de  réception des substances, mais elles sont souvent instables et génèrent par conséquent un potentiel supplémentaire d’aléatoire… qu’il s’agit ensuite d’interpréter.

               Certes la main intervient, ou plus exactement la motricité « hyperfine » des doigts, mais ce n’est pas « la main inspirée », ni la main affirmant son style ou sa « patte », c’est une main libérée de toute intention narrative, une main qui se moque de tout antagonisme entre figuration et abstraction mais qui cherche plutôt à capter l’invisible, à tendre des pièges aux forces de l’Esprit à la manière d’un médium. En cela, je me sens assez proche de l’attention que les voyants portent à la préparation d’une matière qui doit servir à témoigner et présager d’un destin.

                              Ce n’est donc ni de la peinture ni de la photographie, encore moins de l’art numérique pur (qui n’engendre que les potentialités contenues dans les algorithmes de ses programmes) mais c’est un peu la « trans-fusion » de tout cela : il faudra par conséquent cocher la case « autre » sur le formulaire  annuel d’identification des plasticiens, parce qu’il s’agit d’une composition d’artefacts, par nature hybrides, produisant des « œuvres ouvertes », dont les titres fonctionnent plutôt comme des indications « sur la route de l’aventure mentale »…

               Au départ, il y avait eu seulement en 1979, la rencontre entre la flamme d’un briquet et un film photographique, acte pyromaniaque primaire, assez hasardeux en soi, mais dont la pratique assidue se révéla capable de métamorphoser d’obscures diapositives en matière « plastique », à quoi s’ajouta cette alchimie d’apprenti-voyant, destinée à conjuguer  les effets aléatoires de substances sur une surface à peine plus grande qu’un timbre-poste….

 A la projection, ces transparences s’éclairaient comme des vitraux, et dévoilaient une  « pro-fusion » de figures qui semblaient émerger d’un Lascaux surréel,  révélant à perte de vue un univers d’outre-rétine pour lequel les regardeurs  devaient mobiliser leurs capacités à produire en eux une imagerie de l’étrange. Mais, en 1980, les techniques de reproduction analogiques ne permettaient pas encore de capter cette trans-figuration sauvage, qui allait devoir attendre la révolution informatique…

Trente-cinq ans plus tard, avec la numérisation digitale, c’est un peu comme si « Hubble » avait remplacé la lunette de Galilée… Les possibilités d’interprétation d’une même image et de son enregistrement sous forme de fichier de haute densité, ouvrent la voie à toutes les fantaisies et débrident littéralement les potentialités plastiques d’une trace (qui n’est jamais le fruit informatique engendrée par l’ordinateur, mais qui utilise celui-ci pour amplifier ses possibilités).

Ici, rien n’a été prémédité, aucune vision n’a été représentée,  aucune figure n’a été « figurée » car les traces laissées à la surface ne sont qu’une manière de « dessiner sur le hasard », selon la formule de Duchamp. Et c’est bien ce qui caractérise la vraie richesse de ce type d’œuvre informelle, presque « génétiquement modifiée » par sa numérisation (OGM) : offrir à celui qui en est le récepteur une authentique liberté de perception, vérifiant ainsi sa célèbre formule du «regardeur qui fait autant le tableau que l’artiste ».

               Dans cette perspective, la jouissance mentale de l’œuvre s’acquiert par l’invention renouvelée d’une scène ou d’un visage, qui doit à chaque regard reprendre corps dans l’esprit : c’est ainsi qu’il y a une véritable activité cérébrale chez le regardeur et non pas seulement la consommation superficielle de la mise en scène d’un pseudo commentaire, qui n’est trop souvent « conceptuelle » que du côté de l’artiste….

               C’est en cela que l’appropriation de l’œuvre est avant tout une expérience qui réconcilie un plaisir émotionnel (lié à une séduction plastique) avec une « inquiétude métaphysique ».

 

 

                                                                     D. Jonhière artiste digital

                                                                     Juin 2015

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À l'encre jetée

 
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Dans l'empan temporel de mes fêlures sans rive, ma main
froisse le silence en griffant dans la césure métrique
de sa poésie un visage micacé qui secoue mes pages en inférence.
Comme un mascaret, elle charrie la vie de mon addiction
et traverse mes heures arrêtées emportant
avec elle la charge de mon instance.
Dès lors, entre chien et loup, chaque mot ourlé
suspendu au bord de l'acte inaudible se déshabille et
se dilate dans l'aporie d'une dimension spectrale intense.
Ô amour, leurre à la saveur obsédante d'un baiser de feu,
à présent tu sais que les larmes à qui tu manques
irriguent les signes qui te composent,
dont l'enchâssement universel aux sillons de l'altérité
te définit dans la simultanéité
du langage des sens.

Nom d'auteur Sonia Gallet

recueil © 2015

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administrateur théâtres

12273108690?profile=originalNon, les contes ne sont pas périmés! Contes et légendes de tous les pays peuplent notre imaginaire, et font vibrer chez chacun notre âme d’enfant quels que soient les âges. La salle était pleine !  Certains connaissaient même peut-être Philomène et les ogres* !  

L'adaptation de ce conte connu ou non,  rassemblait à Lille, ce dimanche très estival de fête des pères, des centaines de  familles joyeuses autour du thème de la forêt interdite et des ogres qui s’y promènent. Elle  a été l'un des points forts du Lille Piano(s) festival (12-14 juin 2015) dont c'est la onzième édition cette année et qui a attiré plus de 13.000 spectateurs. La programmation, plus resserrée, comparé à l'an passé, fêtait le centenaire de la disparition de Scriabine et présentait des œuvres moins familières dont, par exemple, l'intégrale des concertos de Bella Bartók joués par Rémi Géniet, Kotaro Fukuma et Béatrice Rana,  à l'occasion du  70ième anniversaire de la disparition du compositeur hongrois.

 12273109091?profile=originalFoulant les escaliers aux tapis moelleux qui mènent à l’auditorium du Nouveau Siècle, certains enfants auront peut-être découvert une salle de concert pour la première fois. L’une des plus belles de France ! Vibrante de magie musicale et artistique!  L’occasion d’expérimenter le  triple ravissement de la parole, de la musique et du lieu. Mais pas seulement. Les images et les couleurs aussi se livrent à un véritable ballet musical. Les images du livre de conte seront projetées sur grand écran, et sur scène en guise d’introduction, apparaît  l’artiste à son bureau, pinceau en main, pour vous mettre l’eau à la bouche. Fascinés,  les enfants ne le regardent pas, mais ils suivent sur l’écran la main invisible de l’illustrateur  qui calligraphie  patiemment deux  petits personnages au bout d’un cerf-volant dans la trouée d’une forêt bleue! L’aquarelle brillante d’eau fraîche a du mal à sécher, les couleurs-nature frémissent, et c’est une leçon muette de peinture à laquelle nous assistons, portée par une mystérieuse  partition musicale. Voilà le décor est planté et la salle est muette, à peine l’un ou l’autre balbutiement!  

12273109478?profile=originalL’occasion de sortir du cadre, de rêver une société autre, de respirer le parfum de la tolérance et du respect. Car ce conte sous des dehors enfantins, ce spectacle à multiples facettes, véhicule  un message baigné dans  une musique rayonnante d’espoir. La réflexion poétique sur le monde tourmenté qui nous entoure est plus que jamais urgente.

Il était une fois, une petite fille nommée Philomène…  et ses aventures dans la forêt enchantée pleine de bruits effrayants, et les grognements de l’ogre n’auront pas fait hurler de peur les plus petits. Les plus grands auront exploré la souffrance de la solitude, la transgression indispensable, la  difficulté des métamorphoses,  la malédiction, le besoin de reconnaissance. Miracle de la musique ?  Ils sont déjà suspendus à l’espoir d’une résolution de l’intrigue ! Le coeur battant, ils comprennent que chacun peut se transformer en ogre ou en ogresse. Que le regard fait tout: le malheur autant que le bonheur ! Que les vraies larmes libèrent, que même ceux qui vous aiment parfois ne vous reconnaissent pas, mais finissent par pardonner ou demander pardon et que surtout, il faut réussir à tuer la peur de l’autre. Alors on peut danser et chanter 30 jours et 30 nuits en entendant la fête résonner aux confins de la voie lactée pour fêter la tolérance et l'amitié! 

12273110053?profile=originalMichel Vuillermoz de la Comédie-Française, et Laurence Colussi interprètent le conteur et la petite fille dans une mise en scène parfaitement touchante signée Olivier Balazuc. Le pianiste Moisès Fernadez Via et le percussionniste Jean-Baptiste Leclere aux commandes musicales dirigent-ils les voix ou vice versa? A moins que ce ne soit l’artiste, Charles Dutertre ?  Un enchantement, c’est certain. UN fleuron familissimo du festival Lille Piano(s) 2015!

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*conte fantastique écrit par Arnaud Delalande, édité en 2011 chez  Gallimard jeunesse, coll. Giboulées,  illustrations de Charles Dutertre et la  musique de David Chaillou. Le CD qui l’accompagne, est lu par Jean-Pierre Marielle & Agathe Natanson. "On est tous l'ogre de quelqu'un d'autre!"  

La prochaine édition du Lille piano(s) festival, du 17 au 19 juin 2016, saison des quarante ans de l’ONL, aura pour thème « du piano à l’orchestre »

http://www.lillepianosfestival.fr/

www.onlille.com.

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L'irréel dans la peinture

Propos, en réponse à Malraux

Qu'il observe ou qu'il imagine,
Ce que crée l'artiste qui peint,
En couleurs, parfois en sanguine,
De son être, en entier, lui vint.

Se trouvant en état de grâce,
Il observe ému, en éveil,
La beauté furtive qui passe,
Sous l'éclairage du soleil.

Parfois, sa mémoire associe,
À des réalités présentes,
Dont tout le monde se soucie,
Des images restées constantes.

Alors, peut lui venir l'envie,
En considérant ces images,
De leur donner une autre vie,
Les imaginant d'un autre âge.

Certes, s'il est talentueux,
L'artiste a un pouvoir magique.
Il maîtrise le merveilleux,
Créant le sublime artistique.

Peut-on parler de l'irréel
Comme étant sa sphère constante?
Il baigne dans le culturel,
Et dans l'énergie transcendante.

15 juin 2015

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        L’ART, MYSTIQUE DE LA NATURE : L’ŒUVRE DE DOROTHEE DENQUIN

Du 10 - 06 au 27 – 06 – 15, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles), a le plaisir de vous présenter l’œuvre de l’artiste française, Madame DOROTHEE DENQUIN, intitulée : D’ART ET DE NATURE.

Est-ce l’Art qui imite la Nature ou est-ce le contraire ? Certes, le débat est né intrinsèquement avec l’apparition de l’Art comme projection de la pensée humaine. Bien des théories ont été échafaudées à ce sujet. La plus célèbre d’entre elles demeure celle d’Oscar Wilde, pour qui c’est la Nature qui imite l’Art. Mais nous savons bien qu’Oscar Wilde aimait provoquer et….qui sait ? sans doute s’agissait-il là d’une boutade destinée à irriter le conservatisme victorien de l’époque ! Ce qui importe, c’est la réponse que DOROTHEE DENQUIN donne à cette question.

Selon l’artiste, c’est l’Art qui imite la Nature….sans pour autant y parvenir ! Mais, d’emblée, à ce stade, il n’est déjà plus question de parler d’imitation. Car l’Art n’imite pas. Il va au-delà de l’image archétypale. Une mer, calme ou démontée, sera inexorablement différente selon la sensibilité de l’artiste qui la crée (et non pas la recrée, car le premier jet provient du tréfonds de son émotion) sur la toile. S’agissant, au départ, d’une démarche à partir d’une vision « objective » (si tant est qu’elle existe !), un glissement s’opère jusqu’à atteindre, progressivement ébauchée sur la toile, l’empreinte d’une force de subjectivité créatrice. 

DOROTHEE DENQUIN peint « in situ ». Cela résulte de son passage par les écoles d’art britanniques duquel elle a retenu que peindre à l’extérieur oblige l’artiste à être en immersion dans le biotope du sujet et dépasser l’obstacle de la « réalité » pour trouver sa propre voie (Turner en est un exemple excellent). Dès lors, sa vision personnelle de la Nature se construit essentiellement à l’intérieur du cadrage dans un éternel dialogue avec la profondeur du champ.

LES FALAISES DE HAULT (50 x 70 cm – pastel sec sur papier Ingres).

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A partir de l’avant-plan représentant le bord d’une falaise avec le vide que l’on devine, s’ouvre sur la gauche l’infini dont l’horizon semble gonfler, au fur et à mesure que la brume monte pour se répandre sur la mer.

Tandis que la partie droite du tableau (les falaises) demeure immuablement statique, carrément massive par rapport à l’ensemble de la composition.

Le mouvement est rendu par l’écume nerveuse des vagues. Le seul élément « figé » dans une immobilité en suspension, c’est la mouette qui semble planer entre deux dimensions.

Le chromatisme est d’une grande force évocatrice.

Basé sur des couleurs tendres (presque tièdes), telles que le bleu-clair, le vert-clair et le blanc, elles expriment le choc des éléments au sein d’une douceur faisant contraste avec le thème.

Pastelliste de première force, l’artiste a réservé différentes tonalités destinées à souligner la matérialité de la Nature au sein d’un chaos poétique. Le bleu, le vert et le blanc, appartiennent à la mer dont les circonvolutions des vagues semblent labourer l’espace. Le blanc (en quantité importante) est réservé à la roche des falaises. Quant à l’avant-plan, il constitue le seul moment où l’artiste s’est aventurée dans la restitution du détail. Observez le traitement des herbes folles pliées par le vent. Elles regorgent de couleurs à peine esquissées, telles que le vert marié au blanc (avec en plus, l’ajout du jaune tirant sur l’orange, discrètement étalé).

Le cadre (nous le notions plus haut) est d’une importance capitale car il assume l’équilibre ainsi que la direction de la composition. Dans ce cas-ci, il faudrait plutôt parler de « déséquilibre », car la ligne d’horizon, étant tellement haute, le sentiment que ciel et mer s’apprêtent à engloutir la falaise envahit le visiteur. Cette même ligne d’horizon se retrouve placée tout aussi haut dans SEUL (50 x 70 cm – pastel sec sur papier velours)

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que dans LES OISEUX DE LA BAIE (73 x 60 – huile sur toile).

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Nous reviendrons, par ailleurs, plus loin sur le traitement que l’artiste accorde à la ligne d’horizon. 

Le but scénique de SEUL est celui de donner au visiteur la sensation physique de la vague en naissance, toujours avec l’idée du déchaînement des éléments mais, cette fois-ci, avec un protagoniste différent. Dans LES FALAISES DE HAULT, la mouette plane doucement, comprise dans l’édifice de la création. Dans SEUL, c’est l’Homme qui est aux prises avec les éléments.

L’Homme dont la frêle silhouette se confond avec le fracas visuel des vagues. Notons qu’un même chromatisme unit les deux œuvres.

Différentes tonalités de bleu, de vert et de jaune définissent BANC DE MEDUSES (50 x 70 cm – pastel sec sur canson).

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L’artiste nous offre une image de ce qu’elle considère être la perfection, issue d’une mathématique entraînant un ordre, en apparence, répété mais qui, néanmoins, laisse une place importante au hasard.

Outre le pastel, DOROTHEE DENQUIN maîtrise parfaitement l’huile. Par cette technique, elle incruste sa matérialité à la création. La densité de la matière, associée au dessin, apporte le relief nécessaire à chaque élément de la composition.

LE BREZOU (92 x 61 cm – huile sur toile)

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fourmille de détails au sein d’un biotope scintillant. La matière apportée aux arbres leur confère la chair de l’écorce. Une infinité de contrastes chromatiques font que le regard ne peut en saisir un seul et finit par se perdre dans un tourbillon de notes vertes et jaunes.

Osons cette dichotomie : par la dimension presque diaphane de ses couleurs, le pastel confère à l’œuvre de l’artiste une force métaphysique. Tandis que l’huile apporte au sujet une matérialité charnelle toute faite de lumière. Force métaphysique et matérialité charnelle, par une alchimie différente, se conjuguent dans l’émotion. Car la démarche de DOROTHEE DENQUIN s’inscrit dans un processus psycho-physique, en ce sens qu’elle place sur le même niveau matière et émotion pour qu’agencées, elles se déploient dans un même élan vital sur la toile. En effet, en ce qui concerne la technique à l’huile, l’artiste s’amuse souvent à confronter l’humide et le sec, lorsqu’elle travaille à la fois sur les matières et les ambiances. Il en va de même lorsqu’elle jauge la densité des couleurs et des pigments. L’artiste procède par couches successives (lavis) jusqu’à ce qu’elles soient sèches. LE BREZOU (cité plus haut) s’avère être un excellent exemple de sa technique. L’artiste a utilisé du jaune de Naples. Elle a étalé trois couches de jaune différent sur la toile et pour que la couleur inonde parfaitement l’ensemble de l’espace, elle a rajouté des couches successives.  Quant aux œuvres réalisées au pastel, elle l’utilise pour rendre plus profonde la densité du mystère de la lumière. Car, en définitive, brillante ou opaque, qu’est-ce que la lumière ?

L’artiste s’exprime dans deux techniques qui reflètent deux conceptions philosophiques. Nous insistions, plus haut, sur le caractère essentiellement métaphysique de ses créations au pastel. En fait, il est utilisé essentiellement pour traduire les transparences.

Il s’agit d’une opération extrêmement complexe, car le pastel se pose en couches successives, ce qui fait que pour obtenir la tonalité souhaitée, il faut jouer sur la gamme des tons. Il convient, par conséquent, de jouer toujours avec un ton plus bas, car le fait de fixer une couche augmente automatiquement l’effet lumineux d’un demi-ton.

Il devient alors impératif de « jouer en mineur pour obtenir un majeur », comme le dit l’artiste.

DOROTHEE DENQUIN, dont la première expérience avec la peinture remonte à l’âge de quatre ans, s’est à partir de son adolescence, orientée vers les beaux-arts. Elle a suivi les Cours Martenot ainsi que les Ateliers Clouet Des Perruches. Elle a également étudié le dessin en Grande-Bretagne ainsi qu’à Paris VII. Ayant des origines écossaises, elle est également titulaire d’un DESS en Langue et Civilisation Britannique. Elle a commencé par se familiariser avec les classiques, en copiant leurs œuvres pour en saisir la dynamique. Ensuite elle s’est tournée vers les impressionnistes pour leur lumière. Les hyper réalistes américains ont également exercé une grande influence sur elle, parmi les nombreuses références capitales dans l’Histoire de l’Art. Néanmoins, parmi celles-ci, figurent les maîtres de la peinture flamande. Arrêtons-nous un moment sur cette référence particulière. Nous avons indiqué plus haut le traitement que l’artiste donne à la ligne d’horizon (extrêmement haute par rapport au cadrage). Ceci est l’un des traits culturels majeurs de la peinture flamande qui s’est perpétué jusqu’à aujourd’hui. Précisons, également, que l’artiste est originaire du nord de la France, c'est-à-dire d’une région où la culture flamande se ressent jusque dans l’architecture. Hasard ou coïncidence ? Toujours est-il que ce trait culturel demeure inscrit dans son écriture.

Le dessin occupe depuis toujours une place primordiale dans son œuvre. Elle en dispense aussi des cours. A ceux qui prétendent ne pas savoir dessiner, elle rétorque que dessiner c’est d‘abord apprendre à regarder.

Regarder c’est avant tout s’approprier l’essence du Monde par la palette des sens. Son accouchement sur la toile est l’acte par lequel l’Art, nourri de l’humain s’interrogeant sur les êtres et les choses, se pose en mystique de la Nature.

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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François Speranza et Dorothée Denquin: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(10 juin 2015  -  Photo Robert Paul)

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Dorothée Denquin - Vue d'ensemble (photo Espace Art Gallery).  

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Le jardin merveilleux.

Le jardin merveilleux

avec des fleurs bleues,

des oiseaux plein les cieux,

puis la mer inlassable ;

la mer dans vos yeux,

s'élance dans les miens

désassombris soudain,

des mots vagues dans la tête,

les lèvres enchanteresses.

Le jardin merveilleux

avec des fleurs bleues,

de l'été plein les cieux,

puis l'astre clair inlassable ;

l'astre clair sur votre peau,

illumine la mienne,

toute éclaircie soudain,

des mots chauds plein la tête,

les lèvres extraverties.

.........

Allons parler aux fleurs,

jusqu'à ce qu'elles se parent,

de robes multicolores ;

nos voix bleues,

 festives et suaves,

posées sur elles toutes !

Savez-vous cher Ami,

que les abeilles font grandir les fleurs,

que le pollen voyage,

à l'instar de somptueux nuages,

puis sur nos visages ouverts,

maintes caresses fruitées passent.

NINA

 

 

 

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12273103096?profile=originalIl s'agit d'un recueil de poèmes de Charles Baudelaire (1821-1867). Publié en 1857, il réunissait presque toute la production du poète depuis 1840. Le titre, primitivement choisi, aurait été "Limbes"; il fut changé, paraît-il, sur le conseil d'un ami de Baudelaire. Après le procès qui lui fut intenté pour immoralité, Baudelaire en publia une deuxième édition en 1861, d'où il avait supprimé les six "Pièces condamnées". Par contre, trente-cinq autres poèmes, presque tous de grande valeur, y étaient ajoutés. Dans l'édition appelée définitive (édition posthume de 1868), établie par Théophile Gautier, à qui le livre est dédié, et Asselineau, figurent vingt-cinq nouveaux poèmes (notamment ceux qui avaient été publiés clandestinement à Bruxelles, en 1866, par Poulet-Malassis sous le titre: "Epaves").

L'ouvrage, tel qu'il se présente dans la seconde édition établie par l'auteur, se divise en six parties: "Spleen et idéal", "Tableaux parisiens", "Le vin", "Fleurs du mal", Révolte", "La mort". Certains ont voulu voir, dans cette présentation, l'intention de donner au livre la rigoureuse construction d'un poème, d'illustrer l'histoire d'une âme dans les divers moments de son expérience intérieure. C'est ainsi que le spectacle décevant de la réalité et les expériences sans issue qui fournissent les thèmes dans les deux premières parties, auraient conduit le poète, après avoir en vain cherché, pour oublier son angoisse, une consolation dans les "paradis artificiels", dans l' ivresse, à une réflexion sur le mal, sur les attraits pervers et sur l'horrible désespoir qu'il engendre. C'est alors que le poète aurait lancé ce fameux cri de révolte contre l'ordre de la création, avant de trouver un refuge et un aboutissement dans la mort. Tout nous autorise à penser que, si ce dessein ne fut pas totalement étranger au poète, il va, ainsi exprimé, à l'encontre de l'idée même que Baudelaire se faisait de la poésie: si, selon lui, les préoccupations morales ne devaient pas en être absentes, en aucun cas elles ne pouvaient en commander l'ordonnance et la réalisation. Il s'agit plutôt d'une évocation, à proprement parler symbolique, de cette dualité fondamentale qui se partageait son âme et qui le poussait irrésistiblement tour à tour vers les sommets de l' extase et les abîmes du péché, -dualité dont il a parfaitement conscience que, s'il fut le premier à la ressentir avant tant d'acuité, il ne la partage pas moins avec tout homme, en cela son "semblable" et son "frère", ainsi qu'il le proclame hautement dans son arrogante apostrophe "Au lecteur" qui ouvre le livre. C'est pour avoir préservé et cultivé cette dualité essentielle, pour l'avoir élevée à la hauteur d'une ascèse que Baudelaire fut revendiqué par les esprits les plus divers, les plus opposés, et que son oeuvre est allée en s'imposant, carrefour d'idées et de sentiments, point d'aboutissement et point de départ.

L'expérience poétique de Baudelaire s'inscrit tout entière entre les premiers vers du "Voyage" et le voeu qui l'achève: "Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe? -Au fond de l'inconnu, pour trouver du nouveau!" S'il fallait donner à tout prix un sens à l'aventure intérieure du poète, c'est sans nul doute, dans ce poème qu'il conviendrait de le chercher, Amour, gloire, bonheur, désir, tous les thèmes chers à Baudelaire s'y trouvent résumés, rassemblés, sans oublier "le spectacle ennuyeux de l'immortel péché", partout rencontré, "du haut jusques en bas de l'échelle fatale"; sans oublier non plus la mort, "vieux capitaine", éternelle compagne. Certes, l'idée que Baudelaire se fait du destin du poète reprend les termes traditionnels du romantisme: le poète est venu sur terre pour interpréter la réalité à la lumière de son rêve; il s'insurge contre les conventions, demeure, en dépit de tout un inadapté, trouble la conscience et le coeur de ceux à qui il offre ses sublimes mirages ("Bénédiction", "L'albatros", "Le guigon"); mais, tout en reprenant à son compte ces revendications, il leur en adjoint de nouvelles, qui font de lui le premier des poètes modernes. C'est ainsi qu'à la question: "Tout commence donc à Baudelaire?", on peut répondre avec Jean Cassou: "Tout, non! mais quelque chose"; en effet, "Baudelaire est devenu représentatif d'un certain nombre d'éléments qui manquaient au visage spirituel de la France et qui nous apparaissent devoir être désormais maintenus, affirmés et défendus, avec une vigueur combattive, sans cesse renouvelée".

C'est lui, Baudelaire, qui a formulé cette loi première à partir de laquelle s'organisera désormais consciemment toute poésie: la loi de l' analogie universelle, sur laquelle il s'est expliqué en maints endroits et notamment dans son fameux sonnet des "Correspondances". Si on les prive de cette perspective, des poèmes comme "La chevelure", "L'invitation au voyage", "La vie antérieure" et tant d'autres deviennent de simples allégories littéraires, certes fort belles ou émouvantes, mais dénuées de cette vérité absolue en dehors de laquelle la poésie demeure un jeu ou un exercice. Or, les poèmes de Baudelaire sont "vrais", essentiellement vrais. Un vers comme: "Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues", doit être éprouvé, ressenti comme un rapport absolu, inconditionnel, entre les "souvenirs dormant dans cette chevelure" et l'immensité du ciel, azur fait de ténèbres. Or, c'est bien de ce rapport absolu, et de lui seul, qu'est né ce vertige qui s'empare de nous; et ce vertige, quel est-il? Sinon la poésie elle-même, hors de laquelle ces cheveux ne sont plus qu'un objet quelconque de notre univers, émouvant sans doute, mais déchu. On ne peut d'autre part oublier que Baudelaire fut un de ces artistes qui rêvèrent de "découvrir les lois obscures en vertu desquelles ils ont produit, et de tirer de cette étude une série des préceptes dont le but divin est l'infaillibilité de la production poétique". Poète moderne, Baudelaire le fut par l'effort volontaire que déploya sa merveilleuse intelligence critique pour s'assurer des pratiques nécessaires à la naissance de la poésie: n'est-ce pas lui encore, qui nous dit: "L' inspiration vient toujours quand l'homme le veut, mais elle ne s'en va pas toujours quand il le veut. -De la langue et de l'écriture prises comme opération magiques, sorcellerie évocatoire".

Assumant et transposant dans son rêve toutes les expériences de la vie et toutes les apparences du monde, il n'est pas une de ses évocations qui n'ait un caractère irréductiblement original, allant bien au-delà du simple réalisme. "Dans certains états de l'âme presque surnaturels, la profondeur de la vie se révèle tout entière dans le spectacle, si ordinaire qu'il soit, qu'on a sous les yeux. Il en devient le symbole". Les poèmes abondent, qui révèlent, dans un symbolisme transparent, leur substrat intellectuel ou qui ne semblent être au contraire que grâce du langage, mystère et simplicité, et où chante seule la poésie: "Harmonie du soir" et, surtout, "Recueillement" peuvent être cités parmi les exemplse les plus parfaits de tout le recueil. "L'invitation au voyage" se résout, elle, en une musicalité pure qui transcende, en quelque sorte par anticipation, tous les développements possibles du poème dans un climat magique. Cependant le "Rêve parisien" atteint, avec l'aisance la plus naturelle, à certaines audaces dont Rimbaud ou les surréalistes se souviendront. Poète de la grande ville, aimant le bitume et le bruit de Paris, il en a chanté les rencontres boulversantes ("A une passante": "O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!"), les déchets d'humanité qui la hantent: les ivrognes, les petites vieilles, les aveugles, les chiffoniers. Maître du paysage urbain, il a créé une seconde nature, où l'architecture remplace les arbres et la verdure, où les "petites vieilles" s'en retournent à la terre comme les feuilles d'automne. Pour orgueilleux et solitaire qu'ait été l'univers où il se situait d'emblée, dominant les hommes et les choses, le poète n'a point cessé d'être solidaire de cette triste humanité, dont il a revécu les douleurs, la souffrance, les erreurs, le péché et le mal. "Le poète jouit de cet incomparable privilège, qu'il peut être à la fois lui-même et autrui...et si de certaines places paraissent lui être fermées, c'est qu'à ses yeux elles ne valent pas la peine d'être visitées". Ses chants d'amour, où il approfondit avec une fatale obstination les mouvements les plus secrets du coeur, depuis les rares instants de sérénité jusqu'aux troubles les moins avoués, refusent toute complaisance envers soi-même et rendent un son inimitable. Cela est vrai, soit qu'il reprenne dans "Le balcon" le thème classique de l'inexorable fuite du temps, soit qu'il rêve, avec une simplicité plus bouleversante encore (dans le "Chant d'automne"), de fraternels abandons de l'âme; soit enfin qu'il élucide, avec un courage presque sacrilège et une complaisance tenace, les liens secrets de l'amour et de la haine, du désir et de la vengeance, de la volupté et du crime (voir les célèbres "Pièces condamnées", celles que lui inspira Jeanne Duval, la "Vénus noire" et cet original ex-voto "dans le goût espagnol": "A une madone"). Mais jusque dans les rêveries les plus enchanteresses sur la grâce féminine, on retrouve, insistant et douloureux, l'appel de la misère humaine ("A celle qui est trop gaie" et surtout "Réversibilité": "Ange plein de gaîté, connaissez-vous l' angoisse...?). Dans les plus suaves et mélancoliques images, demeurent présents le sens d'un commun destin, la douloureuse vision d'un paradis perdu que le poète saura évoquer dans des termes d'une simplicité antique et définitive ("Moesta et errabunda": "le vert paradis des amours enfantines").

On en arrive ainsi aux trois poèmes qui composent "Révolte" et aux pièces qui portent en propre le titre de "Fleurs du mal" (et notamment les "Pièces condamnées"). C'est dans ces morceaux, que s'affirment, bien plus important que tout satanisme, le sentiment de la fatalité du péché en même temps que celui du juste châtiment, inévitable et immanent à nous-mêmes. Cette conception fondamentalement baudelairienne, le poète l'exprime de la manière la plus concise, en recourant au mythe du Péché originel. "Désir, vieil arbre à qui le plaisir sert d'engrais, -Cependant que grossit et durcit ton écorce, -Tes branches veulent voir le soleil de plus près": ces vers, tirés du "Voyage", expriment assez bien la nécessité et, par là, la quasi-légitimité du mal: mais la fatalité du péché n'est pas autre chose, dans la vie morale, que la nécessité de la souffrance. Cette certitude se résout, dans les moments de la plus haute inspiration, en un sentiment de charité universelle, en une grande pitié pour soi et pour les autres. Baudelaire, cet esprit toujours en mouvement, qui ne renonça point au droit de se contredire et dont les attitudes variées ne peuvent être réduites à quelque doctrine traditionnelle, n'est jamais plus lui-même que dans les moments où il porte son jugement sur la vie humaine: en lui, un drame se déroule, qui dépasse toute complaisance personnelle, la douleur d'un homme, -la sienne, -devenant, sans le secours de la moindre métaphysique, la douleur de chacun. Ce déchirement de tout un être trouve son expression la plus accomplie et la plus universelle, dans des pièces allant de la délicate et douloureuse fantaisie du "Cygne" jusqu'aux graves accents des deux confessions intitulées: "Je nai pas oublié, voisine de la ville" et "La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse", en passant par les poèmes sur "Les sept vieillards", "Les petites vieilles", "Les aveugles" (déjà cités), ainsi que "Crépuscule du matin", "Crépuscule du soir" et "La mort des pauvres". Telle sont les raisons qui ont fait dire que Baudelaire prolongea le romantisme jusqu'à ses extrêmes conséquences, le purifiant et le perfectionnant à un tel point que, tout comme un classique, il en vint à identifier son drame avec l'éternelle tragédie de tous les hommes. Cette position ressort clairement de son style, qui ne veut renoncer à aucune des subtilités qu'il a entrevues, ni à ce renouveau de classicisme le plus authentique. Mais ce qu'il chercha avant tout, ce fut de briser les cadres de la rhétorique et du discours où s'enlisait la poésie traditionnelle, en la libérant du carcan des expressions usuelles. Un dessein aussi ambitieux, et aussi nouveau (Baudelaire est un de ces "horribles travailleurs" dont parle Rimbaud), ne pouvait se réaliser sans courir de nombreux dangers et sans quelque dispersion: incertitudes de style qui passent comme des ombres et masquent parfois certaines des ses miraculeuses illuminations, insistance un peu lassante sur certains thèmes. Son existence si malheureuse, sa terrible clairvoyance se cristallisèrent dans un atroce pessimisme, dans ce triste jugement qu'il portait sur la destinée humaine, à jamais symbolisée à ses yeux par le mythe du Péché originel: ainsi fut-il un analyste horrifié, mais fasciné du vice et de la perversion. C'est cet aspect particulier de son oeuvre qui fit tenir l'homme et sa poésie pour scandaleux, blasphématoires ou sataniques. Mais cette interprétation est manifestement incomplète, unilatérale: elle ne tient nul compte de cette autre moitié de ce monde idéal d'où la première reçoit sa lumière et sa signification. Certes, il y a la "Vénus noire", Jeanne Duval, "bizarre déité brune comme les nuits"; mais il y a aussi son "analogue" sa "correspondance" dans le divin, "la très-belle, la très-bonne, la très-chère": Mme Sabatier. Plus loin encore, les réunissant au-delà de leurs apparences, il y a cette "maîtresse des maîtresse": la Mémoire, -cette mémoire qui fit de Baudelaire un de nos plus grands poètes.

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Au fil du temps


Souvent, à errer, me complais.
L'âme allégée, sous les nuages,
Je flâne dans un paysage,
Où stagne un silence parfait.

Je ressens un divin bien-être
Quand j'ai oublié qui je suis.
Ce m'est un plaisir inouï
De voir mon ombre disparaître.

Or, ma mémoire intarissable,
Ne reste muette qu'un temps.
Elle ramène, en mon présent,
Des émois grisants ou aimables.

J'entends des vers mélodieux.
L'atmosphère devient princière.
Citoyenne suis l'héritière
Du lyrisme de nos aïeux.

14 juin 2015

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les orgues de Diablczka

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Ce ne sont pas des orgues de cathédrale, elles seraient vite expulsées de ces lieus. Elles n’émettent aucune musique mais elles sont pires que le chant des sirènes. Elles sont faites de draps, elles envoutent et quand Diabliczka en joue, elles vous entraînent où seule, elle connait l’issue. Pris à ce piège diabolique, elles vous transportent dans un pays où seul le rêve est la raison d’être. Méphisto fut pris au piège et il est encore soumis à cette mélodie sourde et il la rêve encore, sa Diabliczka !

Il aime être sous cette emprise bien que parfois, il essaie de s’en échapper mais inexorablement, Méphisto revient écouter ces orgues. Il supplie même Diabliczka pour qu’elle en joue, comme ici où elle est prête à en jouer !

Méphisto a posé sur le papier cet instant mais méfiez-vous, lui seul sait maintenant comment faire pour ne pas succomber.

Comment ?

En la rêvant ?

Peut être !

Mais Méphisto garde pour lui ce remède ! 

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Vague à l'âme

Dans mon jardinet, l'énergie, 
En ce temps, à chaque seconde,
Fait que l'herbe, en tiges, y abonde.
Me sens vaguement étourdie.

En ce temps, à chaque seconde, 
Circule ardent, le vent de vie.
Me sens vaguement étourdie.
Liées, les plantes se confondent.

Circule, ardent, le vent de vie.
Il répand la lumière, en ondes.
Liées, les plantes se confondent.
Les tiges des pivoines plient.

Il répand la lumière, en ondes.
Mon âme troublée se replie.
Les tiges des pivoines plient.
Des regrets flottants font la ronde.

13 juin 2015

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Ruines de Palmyre

"Les ruines ou Méditations sur les révolutions des empires" est un ouvrage philosophique de C. F. Volney, pseudonyme de Constantin François Chassebeuf (1757-1820), publié sous le nom de M. Volney, député à l'Assemblée nationale de 1789, à Paris chez Desenne-Volland-Plassan en 1791.

 

Déjà connu par son Voyage en Égypte et en Syrie (1787), Volney, disciple des Philosophes, pamphlétaire dans la Sentinelle du peuple de Rennes (1788), connaît une immense célébrité européenne avec ce livre où se mêlent décor antique, souvenirs du périple en Orient, digressions philosophiques, dénonciation de l'obscurantisme et apologie du déisme opposé à l'intolérance. Réflexion sur la philosophie de l'Histoire et la politique, les Ruines s'imposent aussi par des pages emblématiques du premier romantisme français.

Si l'Avertissement indique que le projet du livre, fruit «d'un amour réfléchi de l'ordre et de l'humanité», remonte à «près de dix ans», et le situe dans une période où les «vérités morales» doivent freiner les passions, l'invocation initiale (1) salue les «ruines solitaires, tombeaux saints, murs silencieux». Organisé en vingt-quatre chapitres, l'ouvrage commence par une rêverie devant les ruines de Palmyre (2) qui le rattache au Voyage. Plongé dans une «mélancolie profonde», le narrateur voit apparaître un fantôme, le Génie des tombeaux (3). Un dialogue s'installe et, entraînant le narrateur dans les airs, le Génie dégage le sens de l'univers, de la condition humaine et de l'histoire des sociétés (4-11). Contemplant l'horrible spectacle d'une guerre (12), les interlocuteurs débattent du progrès (13-14), et de la Révolution française (15-18). Se déploie alors une vision utopique où l'«Assemblée générale des Peuples» entend s'opposer les tenants des religions et «l'orateur des hommes» qui recherche «l'origine et la filiation des idées religieuses» (19-23). Les législateurs enfin concluent qu'il faut «ôter tout effet civil aux opinions théologiques et religieuses», et entreprennent de développer «les lois sur lesquelles la Nature elle-même a fondé son bonheur» (24).

 

Livre complexe, les Ruines, ancrées dans l'expérience de leur auteur, se présentent comme une apocalypse rationaliste. A la prose poétique du préambule, «aux planes rives de l'Euphrate» succède un style d'inspiration biblique chargé de toutes les séductions de la rhétorique, tantôt didactique, tantôt «inspirée». Célébration d'une ère nouvelle, l'ouvrage entend démystifier aux yeux des hommes les causes de leur misère millénaire, qui les ont incités à créer des religions. L'Histoire se définit comme une suite d'obstacles placés sur le chemin de la perfectibilité. Régi par des lois naturelles, l'homme, être sensible, a fondé la société selon des «mobiles simples et puissants» qui le firent s'élever au-dessus de l'état sauvage: l'amour de soi, le désir de bien-être, l'aversion pour la douleur. Ces thèses, héritées de d'Holbach et d'Helvétius, interprètent la suite de l'évolution historique comme le produit de la cupidité, qui inspire le despotisme, et de l'ignorance, qui explique la soumission des faibles à la tyrannie et à l'imposture religieuse. Contre ces illusions tragiques, la morale, «science physique, composée, il est vrai, d'éléments compliqués dans leur jeu, mais simples et invariables dans leur nature», permet l'avènement des Lumières, grâce auxquelles les hommes pourront construire rationnellement des sociétés où règneront égalité, justice et liberté.

 

Partie essentielle du texte, les chapitres 21 à 23 développent en une monstrueuse litanie les billevesées métaphysiques qui encombrèrent et obèrent toujours l'esprit humain au long des siècles de ténèbres, dont ces pages écrivent la légende noire. Tyrans confondus, prêtres avouant leur imposture en se traitant mutuellement de menteurs, abusant tous de la crédulité des nations ignorantes pour les subjuguer: ce triomphe philosophique ne peut pourtant vaincre l'impression funèbre que les mélancoliques pages inaugurales laissent planer. «Ah! malheur à l'homme, dis-je dans ma douleur! une aveugle fatalité se joue de sa destinée!» Tout en proclamant une foi optimiste dans le progrès des esprits, les Ruines conservent l'aura de leur titre. Du passé fondateur, il ne reste que la «cendre des peuples».

 

Mais une telle lecture occulte le véritable projet de Volney qui annonce explicitement une suite, le texte s'achevant par «Fin de la première partie ou des Ruines». Publiée en 1793, la Loi naturelle ou Catéchisme du citoyen français apparaît comme la seconde partie, que les Oeuvres complètes feront succéder aux Ruines. Volney y exprime son athéisme, y expose un système proche du stoïcisme et s'y montre comme l'un des fondateurs les plus rigoureux de l'idéal de laïcité. A ce cadre éthique où se définit l'homme éclairé et maîtrisant les lois de son être individuel et social, les Leçons d'Histoire données à l'École normale en 1795 (publiées en 1826) apportent leur scepticisme quant aux enseignements de cette pseudo-science et leurs perspectives sociologiques qui permettraient d'envisager les civilisations comme des organismes vivants. Volney restitue alors à l'humanité son environnement, que l'édification d'un homme nouveau avait réduit à la longue succession de ses errements.

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Le plus souvent, c'est l'à peu près!

Propos

 

On existe sans trop penser

Aux dangers de l'incertitude.

On essaie de se protéger

Des imprudences prévisibles.

 

La Nature a tout mesuré,

Ne laissant pas jouer la chance.

Les artistes sont soucieux

De bien calculer la distance.

 

On était à peu près certain,

Que le temps serait au beau-fixe.

En déluge, la pluie surprend

Une noce sur une rive.

 

Interrogé par la police,

Un témoin dit à peu près tout.

À se souvenir, on le force;

On a besoin de savoir tout.

 

Ceux qui accueillent la paresse

N'ont cure de l'exactitude.

Ils s'en tiennent à l'à peu près,

Convenant à leurs habitudes.

 

Vaut mieux être enclin à l'humour

Face aux torts de la négligence,

Se recommander la prudence.

 Certes, on ne sourit pas toujours,

 

La mémoire, qui nous interpelle,

Ne nous conte que l'à peu près,

N'ayant jamais saisi le vrai.

Elle est sincère telle quelle.

 

12 juin 2015

 

 

 

 

 

 

 

 

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Le baiser.

 

 

Vous écrire ;

ce baiser d'encre,

bleu-chaud,

le seul qui me soit permis

de vous donner.

Ce baiser, à peine audible,

me fait songer au bruit

que fait ce pas extrêmement bleu,

dans la neige matinale,

 intouchée encore  ;

cette vague musique qu'il laisse.

A ce flocon solitaire aussi,

perdu sur un champs de coquelicots

en plein été paroxystique,

que calcine l'ensoleillement meurtrier.

Vous écrire,

un abri pour vous,

 fait de moi.

 

NINA

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Nucléus.

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Nucléus

Matière à rêve

Tel un sein

Coup de poing

Force brêve

Psaume d'une main

Rite païen,

Où la forme

De matière quelconque

Jaillit, éclate

Parfaite conque

Mémoire d'agate

Attente sous l'orme

D'une éternelle seconde

Genèse d'un monde

Pour qui demain

Ne signifie rien.

Michel Lansardière

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Illustrations :

  • biface indien (Utah).
  • racloir paléolithique (moustérien ?) trouvé à Dammartin-en-Goële (par bibi !). Et Homo sapiens sapiens entre en scène.
  • variations sur une photographie "Prince noir" de Hans Hartung (1904-1989).                                        "Un monde ignoré " dans lequel le peintre dans sa "recherche de pureté abstraite" a "fixé l'image de ces drôles d'êtres."                                                                                                                    Facétieux, j'y ai ajouté 2 pointes pédonculées (armatures de flèches indiennes du sud-ouest des Etats-Unis) en guise d'oreilles et une armature de flèche denticulée provenant de l'Adrar de Mauritanie (3e millénaire av. J.-C.) pour le nez. La chevelure est composée de 2 armatures de flèches du Néolithique saharien (1 lancéolée, olé, 1 pédonculée) et d'une aiguille d'obsidienne (Mexique, travail contemporain).                                                                                                                        Voilà le Prince paré :

12273100477?profile=original

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12273097882?profile=originalIvan Corbisier, vous avez repris la direction du festival en 2010, vous pourriez faire un bilan des cinq dernières années. Le festival est-il devenu de plus en plus européen ?
Il est européen depuis 13 ans. Au début, il y avait des sections européennes mais il y avait aussi des films américains ou autres. Mais depuis treize ans, le festival est consacré au cinéma européen sauf que me prédécesseurs privilégiaient les premiers et les deuxièmes films donc les films de jeunes auteurs. Depuis 5 ans, on a ouvert le festival à tous les auteurs, connus ou pas. Ce qui permet deux choses. Primo, de suivre des auteurs que l’on a découverts il y a quelques années et ensuite, d’inviter des réalisateurs ou des acteurs plus connus comme Jacques Doillon, Jérémy Régnier, Vincent Lannoo… La politique éditoriale a changé elle aussi avec des conséquences sur les invités, l’intérêt des médias pour le festival.12273098485?profile=original
La ligne éditoriale, elle est décidée en amont ou bien se dessine-t-elle en cours de sélection ?
La ligne éditoriale est décidée avant. On recherche des films d’auteurs, des gens qui ont quelque chose à dire et une manière de le dire. Soit ce sont des sujets originaux traités de manière géniale, soit ce sont des réalisateurs qui arrivent à créer un film de qualité esthétique mais on privilégie les auteurs, les cinéastes qui ont un regard. Au-delà de cela, ils peuvent venir de toute l’Europe géographique et quel que soit leur genre, que ce soit du drame, de la comédie, du thriller ou autre… C’est tout l’intérêt de la recherche en cinéma. Donc la ligne éditoriale, c’est une base. Mais, selon les années, tout peut changer. Cette année, par exemple, on a plus de films du Nord de l’Europe que du Sud, simplement parce que le cinéma nous semblait plus intéressant et plus riche au Nord qu’au Sud ! Et c’est vrai que cela fait deux ou trois ans que c’est le cas. Je pense que tout cela est lié à la crise. Le cinéma en Espagne et en Italie ne se porte pas super bien, donc on trouve moins de films que par le passé dans ces régions; en revanche, le cinéma scandinave est plus riche. Ce qui se dégage aussi, c’est la tendance des cinéastes à traiter des sujets universels, des sujets d’actualité, sociaux, économiques liés bien sûr à la crise. Mais cela devient clair à posteriori, et non pas d’emblée, car nous allons bien sûr à des festivals comme celui de Berlin, de Cannes ou d’autres mais nous recevons aussi des films de tous les vendeurs, de tous les producteurs européens. Et on cherche à en voir un maximum. Ici, on en a vu 800.
Ne trouvez-vous pas paradoxal que les pays du Sud, qui sont les plus marqués par les mesures d’austérité n’aient pas développé un cinéma créatif en ce sens ?
Je pense que le problème de l’Espagne, de l’Italie et d’autres pays, c’est que leur cinéma, peut-être à cause de la crise, mais c’était déjà le cas avant, sauf que cela s’accentue… En fait, y a deux sortes de cinéma: il y a le cinéma qui est fait pour la télé et pour l’instant, c’est vraiment le propre du cinéma du Sud parce que c’est le seul financement qu’ils trouvent - vu que les pouvoirs publics n’ont plus d’argent ou le mette ailleurs que dans la culture ou le cinéma - il y a donc ce cinéma de télé, de divertissement, qui n’est pas toujours de très bonne qualité, mais, ma foi, le dimanche soir devant la télé, cela passe; sauf que c’est un cinéma qui n’a pas un niveau suffisant pour concourir dans un festival international car à côté, il y a un cinéma d’auteur avec des gens qui parviennent à trouver des financements et c’est le cas du cinéma du Nord de l’Europe.
Pensez-vous qu’il y a une identité dans le cinéma européen ou qu’il y a un lien entre les différentes identités européennes ?
Le propre du cinéma européen c’est d’être un cinéma qui entre guillemets a la caractéristique d’être un cinéma artisanal. C’est un cinéma d’auteurs, d’artistes qui ont envie de dire des choses et ce ne sont pas des « entertainers » comme on dit aux États-Unis. Aux États-Unis, il y a aussi des gens qui disent des choses, il ne faut pas non plus caricaturer le cinéma américain, ce n’est pas le propos ; mais c’est une industrie du divertissement. Et donc, le cinéma américain est le plus fort avec 80 à 85% de fréquentation en Belgique, puisque c’est du divertissement pur… en tous cas, celui qui arrive en Belgique. En Europe, on est plus dans une réflexion quand on fait du cinéma… mais, il y a aussi des films de divertissement... Malgré tout, ils sont moins nombreux et je dirais que même dans les films divertissants, il y a souvent un fond solide… « Intouchables » qui a raflé tous les records de fréquentation parle aussi de choses graves comme le handicap. Le cinéma européen réfléchit plus sur notre monde.
La ligne éditoriale choisie, le contexte de la crise, a–t-elle mobilisé le public ? Constatez-vous une affluence plus importante cette année, par rapport aux autres années?
Le fait d’ouvrir le festival au-delà du premier et du deuxième a attiré le public. Jusqu’au premier, au deuxième film, nous sommes dans une ligne l’art et d’essai, de cinéphiles purs et durs. Ici, tout le monde peut trouver son bonheur, il y a des avant-premières, des réalisateurs plus connus et plus accessibles qui interpellent les médias, en général peu intéressés par des réalisateurs inconnus en Belgique…
Quels ont les critères de sélection d’un film pour qu’il aille en compétition ?
Nous somme une petite dizaine à visionner les films. On travaille en comité et avant de placer les films dans telle ou telle section, plusieurs personnes les ont vus. Chacun a donné son avis. Pour la compétition, on essaye de retenir les films les plus récents : c’est donc déjà un aspect technique qui n’est pas lié à la qualité du film. On essaye de sélectionner des films qui n’ont pas fait le tour des festivals, pour avoir une primeur. Il arrive cependant que certains films aient déjà été montrés dans plusieurs festivals d’Europe et même remportés des prix. Certains pays européens produisent peu de films et il peut arriver que l’on fasse concourir des films qui ont déjà une carrière internationale. Au-delà de tout ceci, on choisit les films qui nous paraissent les plus novateurs… là où on trouve un regard sur la manière de faire un film… ceux qui illustrent la richesse du cinéma européen. C’est ainsi que s’élabore la sélection pour la section «Compétition». La section « Panorama » présente des films de moindre qualité innovatrice. En tant que vitrine du cinéma européen, on cherche à proposer des films qui ont déjà été vus dans les festivals mais pas encore en Belgique et qui ne seront sans doute jamais un créneau. Nous avons aussi créé des sous-sections pour aider les gens à s’y retrouver. On a les "Masters" avec des réalisateurs déjà connus. Cette année, par exemple, nous avons retenu Cristina Comencini, une réalisatrice italienne très connue. Son film est très bien mais on ne l’a pas trouvé suffisamment original que pour le mettre en compétition.
Pour la compétition européenne, est-il important d’avoir une répartition géographique équilibrée ?
Non, ma politique est de représenter un maximum de pays européens. Mais si une année, il n’y a pas de bons films en Espagne… ou en Allemagne, ou peu importe où... on n’en montre pas. Je trouve que c’est desservir une cinématographie que de s’imposer de représenter tous les pays et de montrer le film qui n’a pas convaincu, histoire d’être représentatif ! Je trouve cela contreproductif. Il y a beaucoup de festivals qui le font; moi, j’ai toujours refusé. Nous, on choisit des films, pas des pays. Bien sûr, on évitera de proposer dix films islandais, mais ce n’est pas notre but de sélectionner suivant la nationalité.

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Les films belges sont bien représentés dans les projections en plein air mais il n’y en a pas en compétition…
C’est vrai que l’on a beaucoup de films belges cette année, surtout en extérieur avec deux avant-premières. On a aussi eu la grande avant –première de « Je suis mort mais j’ai des amis » qui a attiré beaucoup de monde, que nous trouvions très drôle, très divertissant mais qui, malgré toutes ses qualités, n’avait pas sa place en compétition. Mais on espère avoir un film belge en compétition l’une ou l’autre année, bien sûr.12273099071?profile=original
Est-il vrai que vous êtes propriétaire du festival, que vous l’avez acheté ? Qu’est-ce que cela implique ?
Des dettes ! (rires). Comme pour les autres festivals, c’est une asbl qui gère le festival, je ne suis pas propriétaire personnellement. C’est l’asbl qui est propriétaire d’un nom, d’une identité. On parle de 13 éditions mais le festival en compte en réalité 47 sauf qu’il s’est arrêté, puis qu’il a repris, puis s‘est encore arrêté et a encore repris. Ce festival est un héritage de longue date. Il y avait un autre directeur qui a désiré ne plus s’en occuper. Je lui avais proposé de prendre sa suite. Il a mis trois ans pour se décider, puis finalement, c'est lui-même qui l'a proposé.


Le choix de X+Y en clôture, c’est un coup de cœur ?
C’est un coup de cœur et aussi un choix de montrer la diversité. Puisqu’on a ouvert avec "La loi du marché", un film que je trouvais très fort et que l’on avait choisi bien avant les résultats de Cannes – et qui est un film dur, je voulais terminer sur une note plus positive. X + Y est un film émotionnel, sensible, touchant et qui est un film good movie. Je n’avais pas envie de terminer sur un drame mais sur une note d’espoir…

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Propos recueillis par Palmina Di Meo

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Innocenti - Premières lignes

Déborah sait qu'elle rêve et elle prie pour que cela ne s'arrête pas, tant le songe la ravit. Un joli soleil printanier s'est installé au-dessus des platanes aux feuilles vert tendre, dont l'ombre portée sur le sol semble faire danser le gazon. Elle porte sa robe en lin blanc, celle qui donne à son mari un regard malicieux lorsqu'en fin d'été, la peau de Déborah se colore comme du miel. Sous le ciel d'un bleu intense, un vent faible coule avec la régularité d'un fleuve. Les abeilles s'affairent autour des pommiers. Déborah tient sa fille dans ses bras. Jasmine n'est pas encore éveillée, mais déjà sa petite tête remue, à la recherche du sein maternel. Déborah la laisse patienter un peu, fascinée par la frimousse de son nouveau-né dont les yeux viennent de s'ouvrir en même temps que la bouche. Cet imperceptible mouvement des lèvres suscite un étrange frisson. Déborah sent le lait affluer. Le vent souffle un peu plus fort, mais l'air reste doux et le calme règne. La jeune femme n'a pas envie de rentrer pour nourrir sa fille. Elle pince l'aréole de son sein droit entre l'index et le majeur et présente à Jasmine ce qu'elle convoite. Déborah ferme les yeux. Elle se concentre sur les bruits de déglutition qui se mêlent aux soupirs du nourrisson, mélange d'effort et de satisfaction, et en même temps elle accorde une attention particulière à son ventre, qui se contracte un peu plus fort à chaque tétée. Jamais la jeune femme n'aurait cru qu'elle pourrait se sentir « animale » à ce point. Qu'au-delà de l'accouchement, sa propre fille agirait encore si intensément sur sa physiologie la plus intime, comme si son destin de femme n'était autre que d'enfanter à nouveau, puis à nouveau, puis encore et encore. Un coup de vent plus chaud lui fait ouvrir les yeux. Jasmine diminue déjà ses efforts : il faut que Déborah la sollicite pour qu'elle finisse son repas. Elle détache sa fille de son sein droit et porte son petit corps contre son épaule. « On fait une pause, ma chérie ? Un petit rot et on s'y remet, d'accord ? » Même en rêve, nourrir son enfant est une affaire sérieuse. Déborah fait glisser ses doigts le long de la colonne vertébrale de sa fille, de haut en bas, de bas en haut. Le nourrisson se tortille un peu avant d'obéir à sa maman en libérant son estomac. L'été s'invite dans le rêve de Déborah : l'air printanier se mue doucement en un souffle plus chaud. Elle transpire un peu, mais peut-être est-ce l'effet des contractions qui s'intensifient dans son ventre. Déborah se souvient que dans la vie réelle, loin de son rêve qu'elle n'a aucune envie de quitter, Jasmine est encore à venir. Comme pour s'accrocher à ce songe si réaliste, la jeune maman laisse doucement glisser sa fille de son épaule à son cou, puis à son sein gauche. Le nourrisson s'empare du mamelon avec voracité, déclenchant à nouveau une salve de contractions. La douleur devient gênante. Déborah sent venir le moment où son corps va l'arracher à ses songes et à l'image si harmonieuse de sa fille. « Bientôt, ce sera comme dans mon rêve, n'est-ce-pas, Jasmine ? Tu n'imagines pas comme je suis impatiente. » murmure-t-elle. La douleur se propage du ventre vers la poitrine, insistante, prête à tétaniser son corps, à l'aspirer en-dehors de son rêve, aussi Déborah jette-t-elle un dernier regard à sa fille qui boit toujours avec avidité. Ses petites narines, tout contre le sein gauche de sa mère, émettent un son humide. « Elle avale trop vite », se dit Déborah, qui gémit sous les crispations de son ventre et en même temps à l'idée de son retour forcé vers le réel. La bouche grande ouverte, Jasmine tète, quelques gouttes coulent sur le bord de ses lèvres. Le lait maternel est rose comme les joues de sa fille, mais à chaque nouvelle contraction qui prend le ventre de Déborah en tenaille, il paraît plus sombre. Plus rouge. Jasmine tète et tète encore. Elle transpire sous l'effort et la sueur qui perle sur son front laisse apparaître des reflets vermillon. Une nouvelle contraction s'annonce, elle arrache définitivement Déborah à son sommeil. Les arbres, le soleil, disparaissent d'un coup.

Il fait nuit. La jeune femme a froid, elle qui avait toujours trop chaud depuis qu'elle est sur son lit d'hôpital. Ses mains se portent à son ventre. Jasmine est bien là. Malgré la douleur, elle sent son bébé, se rassure et revient avec précipitation à la réalité. Les contractions. C'est le grand jour. Jasmine va arriver. Elles vont pouvoir quitter le service des « grossesses à risques », où malgré l'amabilité des sages-femmes, elle se sent prisonnière. Six semaines que ça dure. Mais ça en valait la peine, c'est presque fini. Une nouvelle contraction arrive, plus intense encore. Quelque chose se rompt en bas, comme une bulle qui éclate. « Je perds les eaux », se dit Déborah, qui entend des pas dans le couloir. Elle tend le bras vers l'interrupteur qui pend à côté de son lit, mais son mouvement s'exécute au ralenti, dans un silence étrange. Sa main retombe avec lenteur, tandis qu'une sage-femme pénètre dans la chambre en allumant les néons gris. Le monde autour de la jeune femme alitée ralentit à un tel point qu'elle peut presque voir la lumière quitter le plafond pour tomber sur elle. Au passage, son regard ricoche sur le visage horrifié de la sage-femme, qui porte ses deux mains à la bouche et crie quelque chose. La douleur s'éloigne, même si Déborah sent bien qu'une nouvelle contraction lui mord le ventre. La sensation de perdre à nouveau une vague d'eau lui fait porter le regard vers le pied de son lit. L'obscurité envahit peu à peu la pièce, mais Déborah comprend qu'elle perd du sang. Plus qu'elle imaginait en avoir dans le corps. Elle n'a plus la force de crier, ni de garder les yeux ouverts. Blanche comme un linge, elle repose la tête sur l'oreiller, ferme les yeux pour chercher à nouveau le soleil. Lorsqu'elle le trouve, c'est à peine si elle se rend compte qu'on la manipule avec empressement, que c'est l’affolement autour d'elle. Les contractions se sont éloignées. Déborah est déjà de retour dans son rêve. Sa conscience se dilue et en même temps elle se simplifie à l'extrême, pour se résumer à une seule et unique idée : le repos est tout proche, comme s'il était tout contre sa peau. Elle n'a plus froid, plus chaud. Une simple pensée et son rêve durera pour toujours. Elle n'a qu'à en décider.

Déborah vient de quitter son corps, elle est légère, elle monte. Enfin libre, elle prend sa fille dans ses bras et laisse son cœur s'arrêter.

Assis dans le couloir de l'hôpital, la tête dans les mains, Vincent aurait donné cher pour revenir deux semaines en arrière. S'il avait pu entrevoir où tout cela le mènerait, il aurait mis de l'eau dans son vin. La dispute aurait été évitée. Alice ne serait pas partie avant de revenir comme une voleuse. Elle n'aurait pas fourré quelques vêtements dans un sac de sport sorti de nulle part avant de disparaître. Il ne l'aurait pas laissé faire, non. Ni ce soir-là, ni plus tard, lorsque, revenu d'une interminable journée de travail, il avait retrouvé l'appartement vide de toute trace de sa fiancée.

Enfin, « fiancée », c'était beaucoup dire. Vincent avait trouvé le mot joli. Alice l'avait laissé dire, depuis les trois mois qu'ils vivaient ensemble.

(...)

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