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Une indigence passagère

 

  À Rolande Quivron

 

Instant silencieux de paix, d'indifférence.

Une immobilité qui fige l'énergie.

Une fleur d'hibiscus semble à peine jolie.

Le ciel est décevant, dépourvu de brillance.

Une immobilité qui fige l'énergie.

N'arrivent ni cadeaux ni courant de fragrances.

Le ciel est décevant, dépourvu de brillance.

Je demeure en éveil, accueillant des envies.

N'arrivent ni cadeaux ni courant de fragrances,

Or ne cessent d'agir les forces de la vie.

Je demeure en éveil, accueillant des envies.

Ma liberté m'émeut comme une immense chance.

Or ne cessent d'agir les forces de la vie.

Les ravissants nuages sont ailleurs en errance.

Ma liberté m'émeut comme une immense chance.

Je m'évade, écoutant ma seule fantaisie.

4 juillet 2014

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12273025279?profile=originalhttps://www.youtube.com/watch?v=Z9JPcvuZJTA

Pour voir ou revoir la séquence d'Actu-tv qui m'est consacrée (durée 8' 56"), un clic sur le lien ci-dessus.

Je tiens à remercier chaleureusement Robert Paul de m'avoir choisie comme écrivain-invitée de Arts et Lettres de ce mois de juin 2014 ! Et de m'assurer de son fidèle soutien comme en témoigne, documents à l'appui, l'annonce qu'il fait ici même de l'émission ! En amitié, Jacqueline.

 

 

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un silence nommé Philippe du Jura Suisse !

Suis partie avec une valise (pas en carton non ! ) mais une simple valise direction la Suisse il y a deux mois ! Je ne pensais pas rester si longtemps...Suis de retour chez moi, en Anjou, pour deux semaines et je repars en Suisse, à Porrentruy lundi prochain ... Tout est nouveau ! Tout mes repères de femme seule bouleversés et tout est à construire... avec ce que m'apporte cette nouvelle vie, les choix, les plus et les moins... Je vais corriger le livre de Philippe et le publier à la rentrée prochaine dans mes éditions... Un raz de marée surprenant, entre houle et embellie, entre je tourne le dos au passé et je construis un avenir dans un présent qui fut pendant plusieurs semaines malgré tout incertain, je compose une nouvelle partition en duo cette fois ! Je vais revenir sur ce site que j'aime tant ! Désolée d'être absente mais sincèrement je suis peu opérationnelle en bien des domaines, entre destruction et construction d'un nouvel édifice ! Merci et à bientôt

Marie ♥

Cette fois je repars avec, entre autres mon ordinateur, ma mémoire vive, le prolongement de moi qui était resté ici sur Angers et que j'ai appelé bien des fois, nous avons tant travaillé ensemble !

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UN CERTAIN REGARD...

Avec un certain regard

Entre l'esprit et le cœur

Au détour de nos hasards

Avons égaré les peurs...

Et quand vient le crépuscule

Voyons la vie, comme une fleur...

Qui même si minuscule

Contient toutes les splendeurs!

Il suffit d'un seul instant

Où se croisent des chemins

Et se fige dans le temps

L'espoir d'autres lendemains...

Avec un certain regard

Quelques larmes au bord des cils

Oui, plein d'ardeur on repart

Qu'importe si c'est difficile!

J.G.

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Une réunion d'anciens.

 

Je n’ai pas eu de leurs nouvelles durant vingt-cinq ans. Une carte postale de José  à chaque fin d’année me souhaitait une heureuse année ‘ de tout mon cœur ‘. J’imagine que c’était à ce point mécanique, et que ca lui était à ce point indifférent, qu’il recommençait à chaque année sans même s’être rendu compte que je ne lui avais jamais répondu.

Ils sont quelques uns, je suppose, dont la vie est réglée jusque dans les plus infimes détails. Petits ou grands, ils constituent l’ossature de la vie de la plupart d’entre nous. Sinon les incertitudes du destin, ce que j’appelle le sel de la vie, on pourrait en écrire le scénario du début à la fin. Plusieurs même, ils se ressembleraient tous.

Il y a trois mois, José m’a envoyé une lettre. Lucien avait eut l’idée de réunir tous ceux qui avec le jeune Juan qui s’était suicidé parce qu’il refusait de vieillir avaient été de ces révolutionnaires disposés à donner leur vie pour contribuer à la chute du franquisme. Y compris le jeune Français ; avait-il ajouté, qui avait transporté les armes à travers la frontière. Celui qu’ils avaient surnommé Saint-Bernard. Saint-Bernard, c’était moi, Bernard Lepoivre.

A l’époque, il y a vingt-cinq ans, j’étais membre de la cellule Bergère du Parti. Aujourd’hui encore, je ne me suis pas départi de cette propension que j’ai à dire le Parti lorsque je veux désigner le parti communiste.  

Le soir où nous nous étions réunis pour la première fois chez José, nous étions six. Il y avait José bien entendu, Isabelle avec laquelle j’avais passé la nuit il y a vingt-cinq ans, Jordan, un étudiant en Architecture si je me souviens bien, Lucien qui faisait des études de médecine et le jeune Juan qui avait cherché à tuer un garde-civil le jour où le franquisme avait basculé définitivement.

C’est long vingt-cinq ans. J’ai écris à José que je viendrais.

Barcelone avait bien changé. Elle avait conservé cette atmosphère austère que je lui avais trouvée en dépit du caractère  fantasque de la cathédrale de Gaudi. Je ne voyais pas ce qu’on lui trouvait de fou. C’était espagnol. Pas  très différent de Don Quichotte, une histoire toute ordinaire dès lors qu’on n’oubliait pas qu’il s’agissait d’une histoire espagnole.

Dans le centre de la vile, dès qu’on s’éloignait des Ramblas pour se diriger vers les avenues qui font de Barcelone une étoile de béton, on pouvait se trouver n’importe où.

José avait un appartement à la lisière de la ville sur les hauteurs de Monjuich. Il était célibataire.

- Cela n’empêche rien.

Il me tendit un doigt sévère.

- Si tu me vois accompagné d’une femme, ne lui fais pas de compliments à la française. Tu ne la verras peut être jamais plus, et tu auras rendu plus pénible notre séparation.

Curieux garçon. Il me parlait comme si nous nous étions quitté la veille. Je l’ai souvent remarqué, les liaisons qui datent de l’adolescence, si elles ont eu caractère particulier, en tout cas différent de celui qu’on peut attendre de jeunes gens de vingt ans qui n’ont rien de commun entre eux ou avec l’évènement qui les réunit, créent entre eux des liens étranges. Ils ne sont pas faits pour durer mais ils sont profonds comme s’ils avaient toujours existé.

- Tu te souviens d’Isabelle ?  Isabelle de feu, disions-nous.

Il me fit un clin d’œil.

- Elle a divorcé depuis trois mois.

José était le chef d’une administration qui dépendait du Ministère de l’Intérieur. Proche des renseignements généraux. Pour le dire simplement, il était un ponte de la police. De ceux qu’il combattait lorsqu’ils étaient les chiens franquistes comme il disait.

Au début, il s’était promis d’en faire le tri. D’éliminer sans pitié les moins honorables d’entre eux. Hélas, il faut bien le reconnaitre, c’était les plus habiles. Peu leur importait le chef qu’ils servaient, ils le servaient bien.

Jordan, l’élève un peu fou des étudiants en architecture était à la tête d’un bureau d’urbanisme que la municipalité interrogeait avant d’entreprendre le moindre travail. Quant à Lucien, directeur d’un important service médical de l’Hôpital Régional de Catalogne, il était professeur à l’Institut de médecine.  De sa jeunesse, il avait conservé le souci du malade quelle que soient ses revenus ou sa position sociale. En prêtant serment, il avait eu la sensation que le froid le saisissait. Même le jour de son mariage, il n’avait pas ressenti cette impression.  

Mais tous, hauts fonctionnaires ou non, enrichis ou non, personnages en vue ou non, les jeunes gens qu’ils avaient été restaient des modèles dont ils étaient fiers.

- Et Isabelle ?

José pointa le doigt vers moi pour la seconde fois.

- Elle t’a laissé des souvenirs, non ? Elle a divorcé il y a trois mois. Tu la verras jeudi, elle a promis de venir.

Jeudi, nous étions tous chez José, et je regardais avec curiosité ces hommes, et cette femme, que j’avais connus l’espace de quelques jours il y a vingt-cinq ans. A l’exception de José, ils me regardaient eux aussi.

Le premier qui ouvrit la conversation qui devint vite générale, ce fut Jordan.

- Comment vas-tu saint- Bernard ? Je l’avoue, j’ai été surpris lorsque José nous a dit que tu serais parmi nous aujourd’hui. Je crois que je peux le dire au nom de tous. Bonjour mon frère.

J’avais les larmes aux yeux. Nous nous sommes mis à rire. Je me suis rendu compte que c’est à cet instant même que l’atmosphère venait de se détendre. Notre aspect physique ne comptait plus. Vingt-cinq ans venaient de s’écouler en un instant.

- Juan a laissé une lettre avant de se tuer. Il y disait qu’en vieillissant nous deviendrions comme tous ces gens que nous méprisions lorsque nous avions vingt ans. Il s’y refusait.

C’est Lucien qui s’exprimait en montrant une lettre que tous, à l’exception de moi, semblaient connaitre.

- Nous avons décidé que le jour anniversaire de sa mort, nous nous réunirions en pensant à lui. Voir, s’il avait eu raison.

Jordan avait rempli nos verres d’un vin de Rioja. Nous levâmes nos verres et nous les avons vidés d’un seul coup. 

- Santé !

Nous avons vidé quelques bouteilles en bavardant de tout et de rien. En réalité, nous marquions que rien n’avait changé en nous. L’âge, la corpulence pour Jordan, nous déformait mais l’idéal romantique de notre jeunesse restait intact.  Vive la Révolution permanente !

Je suppose que nous étions ivres. Jordan était parti. José, ça se voyait attendait, de nous voir partir.

Isabelle s’était levée. En me serrant la main, elle me dit :

- J’ai ma voiture, je te dépose ?

 Dans la voiture, elle s’est tournée vers moi.

- C’est pour eux que tu es revenu ? Où c’est pour moi ?

- C’est pour toi.

Elle a garé sa voiture devant chez elle. Nous sommes montés dans son appartement. Elle a écarté les draps, et elle s’est déshabillée avec simplicité.

- Tu viens ?

Je me suis déshabillé à mon tour. Nous nous sommes glissés sous les draps. Une mince lueur émergeait de la fenêtre. Nous étions étendus côte à côte sans dire un mot. Je devinais que l’un et l’autre nous avions les yeux au ciel.

A un certain moment de la nuit, je me suis glissé sur elle.

- Pénètre-moi, dit-elle.

Puis, nous nous somme tourné le dos.  

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La sieste,

Sieste enfantine,

draps bleus,

cotonnade fraiche,

chevelure dénouée,

éparse et rousse,

chambre ouverte,

 sur l'arborescence fruitière.

Sieste enfantine,

air bourdonnant,

voilages clairs,

petit corps ne pesant rien,

abandonné et tiède,

fenêtre ouverte sur la mer.

Sieste enfantine,

sur le chevet,

un diabolo pétille,

mains miniatures, entrouvertes,

avant toi magiciennes,

gourmandes et habiles,

attrapeuses du monde entier.

Sieste enfantine,

respiration chantante,

paupières baissées,

translucides et laiteuses ;

en dessous d'elles,

un opéra sans faste,

tout bleu et chaud,

respire et se déploie,

Dehors,

les fleurs, les arbres,

la pluie et le soleil,

conversent,

à merveille se comprennent !

A l'intérieur,

l'enfance dort,

en elle, les reçoit.

Dans la vaste maison,

des parfums de linges frais,

de chocolatines, de jeunes roses,

annoncent le goûter,

juste après la sieste,

et avant "un, deux, trois, soleil" !

 

 

 

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Après la canicule

 

En signe de soulagement,

La nature pousse un soupir.

Ô la caresse du zéphyr!

La pluie arrive lentement.

La nature pousse un soupir.

Elle souffrait apparemment.

La pluie arrive lentement

Va ranimer et rafraîchir.

Elle souffrait apparemment,

Voyant les fleurs se rabougrir.

Va ranimer et rafraîchir,

L'eau du ciel qu'apporte le vent.

Voyant les fleurs se rabougrir,

Je me sentais en faire autant.

L'eau du ciel qu'apporte le vent,

À mon attente va s'offrir.

3 juillet 2014

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Un homme ordinaire

 C’était un brave garçon. Après avoir terminé des études de droit et de fiscalité, il avait intégré le Ministère de Finances. Lorsqu’il avait été nommé contrôleur, il avait dit à ses amis :

- Je préfère que vous me disiez : Monsieur. Dans ma position, on risque de penser que je suis en mesure de favoriser des amis.

Il n’avait pas osé leur demander de le vouvoyer.

Peut être avait-il raison ? Peut être faut-il qu’un certain nombre de citoyens se défasse des liens noués durant l’adolescence pour endosser la stature de l’homme d’Etat. De celui pour lequel il n’y a pas de communauté particulière mais des citoyens égaux devant la loi. Ce sont des conceptions de ce genre qui créent l’ossature d’une nation et de l’administration qui en est le bras.

Henriette qu’il avait épousée après sa nomination était la fille unique d’un chef de service à l’administration. Lui-même était le fils d’un gendarme. Il avait été amoureux d’Henriette mais qu’elle ait été la fille d’un fonctionnaire avait ajouté à son charme. Il aimait l’idée que l’administration constituait une sorte d’aristocratie qui se perpétuait au travers des familles qui en étaient les serviteurs. Dans la noblesse tout autant il y a les familles dont les titres étaient prestigieux mais combien de chevaliers et d’écuyers en étaient la trame depuis des siècles. Ils étaient à titre égal des membres de la noblesse.

Ils n’avaient pas eu d’enfant, ils n’en avaient pas voulus ni elle ni lui. C’est ce qu’il avait répondu à un ami qui lui avait posé une question.

En réalité, il était mu par une autre ambition.

Jean avait convaincu sa femme de ne dépenser que le strict nécessaire pour manger, s’habiller ou sortir.  Leurs économies leur servaient à payer la maison qu’il avait achetée dans le Midi en prévision de sa retraite. La retraite !

- Nous pourrons jouir de la vie sans restriction.

Malheureusement, Henriette était morte avant leur retraite et  n’avait pas eu l’occasion de jouir de sa frugalité. La maison et l’argent économisé, seul Jean en jouirait.

C’est à cette époque qu’il avait commencé à changer. Il avait compris que les projets n’étaient jamais que des rêves dont il n’était pas le maître.

Désormais, tout allait changer.

C’était peut être une attitude excessive mais pas plus que la manière dont ils avaient vécu, sa femme et lui. Il n’y a rien de mal à vivre modestement. Se marier, avoir des enfants, travailler et vieillir sans être trop affecté par le sort. Discrètement, sans attirer l’attention. Mais ça avait un prix, pas nécessairement le moins cher.

Un jour, il avait dit à une jolie femme :

- Je connais très bien votre dossier.

Elle avait dit par après :

- Je me demandais ce qu’il avait voulu me faire entendre. Nous étions assis à la terrasse d’un café, je portais une robe légère, il regardait mes jambes avec insistance, je n’osais plus bouger.

Ce fut un éblouissement. Il en était conscient, il disposait du vrai pouvoir, celui de disposer des autres.

Un jour, il téléphona à un gros commerçant de la ville dont le dossier fiscal présentait quelques interrogations.

Ce fut l’épouse qui lui répondit.

Elle possédait un magasin de lingerie très bien achalandé qu’elle dirigeait à l’aide de deux vendeuses. Aucune n’était particulièrement aguichante. Chacune de ses clientes pouvait se sentir belle auprès de ses vendeuses.

- Vous me surprenez, monsieur le contrôleur ?

- Ce n’est probablement rien. Mais il faut que je vérifie, c’est la routine. Mardi prochain, ça vous convient ?

-  Mon mari sera en voyage mais je serai là, bien entendu. Les livres sont à mon domicile.

Les rumeurs naissent et se répandent vite en province. Lorsque Jean s’était présenté chez Elvire Dubois, elle avait préparé ses livres et du café sur une table basse auprès du divan. Une bouteille de vin aussi. Au fond du salon, une porte entr’ouverte donnait sur la chambre à coucher. On pouvait apercevoir le lit.

Il n’y avait rien de répréhensible dans le dossier. Jean y apposa un paraphe. Elvire venait de faire l’économie de mille cinq cents euros d’impôt.

Une des ses clientes, c’est le nom qu’il leur donnait, avait évité une amende de quinze euros. La valeur de l’argent varie avec les gens.

Il eut trois aventures de la même nature mais à chaque fois, il en était plus amer.

Jean était fatigué, On n’endosse pas une nouvelle peau aussi aisément qu’on le souhaite. Henriette lui manquait. Etait-ce ce qu’on appelle l’amour ? Elle lui manquait le jour, et elle lui manquait la nuit. Du temps qu’elle vivait, il lui était arrivé de faire l’amour en évoquant une autre. Parce qu’il aimait sa femme, il évoquait une actrice qui n’était souvent qu’une image plutôt que la femme d’un de leurs proches. Ils sont nombreux les maris qui agissent de cette façon.  Ils comblent leur femme, et ne la trompent qu’à peine.

Peut être que des femmes agissent de la même manière par amour pour leur mari ? Bien sûr,  c’est un acteur masculin qu’elles imaginent.

Henriette lui manquait de plus en plus. Sans elle, il avait le sentiment d’être exilé sur la terre. Il voulait mourir. Qui donc se préoccuperait de son décès ?  Qui donc s’était préoccupé de sa vie ?

Il voulait mourir mais pas comme quelqu’un qui n’a jamais existé. Sinon, sa vie toute entière comme la plupart des vies humaines se résumerait aux quelques lignes de sa nécrologie. Il acheta une grosse corde qu’il attacha soigneusement à une poutre du grenier. Il glissa dessous une vieille chaise. Il n’aurait qu’à la pousser. Qui donc s’inquièterait de lui ? 

Le lendemain, un incendie s’était déclaré dans l’immeuble. On découvrit le corps de Jean dans les décombres. Les responsables se perdirent en conjectures. La télévision avait envoyé un caméraman et un journaliste. On parla de Jean Dereux le soir même, et le lendemain lors des informations de mi-journée. Le journal local en parla durant quelques jours. La personnalité de Jean Dereux, dit le journaliste, apparaissait comme un mystère.

A quoi tiennent les choses ? Ce n’était plus un homme ordinaire.

 

 

 

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En ce jour de chaleur intense

 

J'écris en vers, parfois en prose,

Quand je m'abandonne au repos.

Dire des émois, des propos

Est un plaisir, qui se propose.

 

Troublée, Je reçois en cadeaux

Les joies que la beauté fait naître,

Et sens une ardeur en mon être.

Lors ma plume se fait pinceau.

 

Ce désir de capter l'instant

Me vint, je sais, dès ma jeunesse.

Je mettais en mots ma tristesse,

Et tous mes émerveillements.

 

Besoin d'amour pour exister.

Sur un petit cahier d'élève,

Je déposais d'étranges rêves.

Puis, attentive, m'écoutais.

 

En ce jour de chaleur intense,

Etant lasse, sans appétit,

Dans l'indifférence, j'écris,

Accueillant maintes souvenances.

 

2 juillet 2014

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Frieda la juive.

 

C’était quelques années avant la dernière guerre. C’était en Allemagne. Hitler était au pouvoir après que le peuple allemand en toute légalité eut renversé le gouvernement de Weimar, un gouvernement de  modérés que les communistes effrayaient.

Le Destin l’avait investi, il dominerait le monde. Dieu le voulait ! Gott mit uns.

Mais le peuple, les hommes sont comme ça, veut aussi de la viande à se mettre sous la dent, de celle qu’on produit dans les arènes après qu’il ait tendu le pouce vers le sol. A mort ! A mort !

Hitler allait lui en fournir. De la viande toute fraiche. Celle que dieu avait désignée, hurla-t-il en tendant le doigt vers les juifs, ces maudits de toujours. A mort !

Curieuse époque. Les élites allemandes méprisaient Hitler et sa clique. Mais la plupart d’entre elles s’y soumettaient. Tant les Junkers que les officiers à la joue marquée d’un coup d’épée.

Ils baissaient l’échine pourvu qu’ils puissent redresser la tête avec la morgue aristocratique des gens bien nés.

Que leur importaient les juifs. Des tailleurs, des coiffeurs, des usuriers qui ne prêtaient aux fils de bonne famille que contre l’assurance que leur argent leur serait rendu. Qu’ils crèvent si le peuple veut qu’ils crèvent.

Eric von Berger était différent. Je le reconnais : toutes les élites allemandes lorsqu’elles donnaient par prudence l’apparence de la soumission n’étaient pas les valets de ce petit sergent qui ameutait les foules avec des cris de dément. Tous les ouvriers allemands n’étaient pas des charognards assoiffés du sang des juifs. Mais, à cette époque, qui était en mesure de les distinguer ?

Eric von Berger était un hobereau issu de cette Prusse qui avait juré fidélité à l’empereur. Agé d’une quarantaine d’années, il servait dans l’armée avec le grade de commandant. C’est lui qui organisait les manifestations culturelles destinées à la troupe et au corps des officiers. Concerts, séances théâtrales, expositions de peinture, il se tenait au courant de la vie artistique et intellectuelle du pays.

Il connaissait le monde des artistes, les artistes officiels qui émanaient  des académies et ceux qui, quel que soit leur petit nombre, faisaient bouillonner les cerveaux. La peinture, en particulier, suscitait sa curiosité. C’était à ne plus rien comprendre de ce que ses années d’étude si conventionnelles en matière de culture lui avaient appris. Sur la peinture, et ces peintres dont chaque trait sur une toile prétendait révolutionner, et la peinture et la façon de voir.

L’un d’entre eux l’envoûtait plus que les autres, c’est le mot qui convenait. Un certain Groszberg, un juif. Et, pour d’autres raisons vraisemblablement, le modèle qui l’accompagnait constamment sous prétexte que l’inspiration et le besoin de peindre pouvait le saisir à tout instant.

Il peignait vite, à grands coups de brosse.

Son modèle, Frieda Lewitz, peignait elle aussi. A la différence de Groszberg, elle peignait des toiles aux couleurs tendres teintées de sensualité. Personne dans son entourage n’appréciait ces toiles qui n’étaient d’aucune époque imaginable.

- Ne sens-tu rien venir, Frieda ? Ce sont des années de sang, pas d’amour. Même la couleur rouge est trop tendre. Ajoute autant de couches que tu voudras, tu n’auras rien dit de ce temps. Il faut peindre avec du sang véritable.

Lorsque von Berger venait les voir dans son atelier Groszberg prétendait qu’il avait soif : 

- Je vais prendre une bière.

- Ce n’est pas moi qui vous chasse, j’espère ?

Il grognait quelques mots incompréhensibles, et il sortait.

- Il n’aime pas les militaires. Pourtant, il en faut quand il y a la guerre. Ils ne les perdent pas toutes.

- Je crois que ce sont les guerres qu’il n’aime pas.

Entre Frieda, la juive, et Eric von Berger, les relations étaient étranges. Mais, je le répète, qu’est-ce qui ne l’était pas à cette époque ?

Ce peuple allemand qui ne voulait ni voir ni entendre, et qui applaudissait lorsqu’on lui demandait d’applaudir ? Ce n’était pas normal. Avez-vous remarqué ? A la même époque, dans un même pays, parfois dans une même ville, il se passait des choses qui étaient généralement les mêmes mais lorsque vous interrogiez les habitants de la cité, des voisins en quelque sorte, ils racontaient la chose comme s’il s’agissait d’évènements tout à fait différents. A croire que le monde est constitué de cercles qui sont autant de planètes distinctes.

En d’autres temps, Eric et Frieda eussent été amants depuis le premier jour. Elle était belle d’une beauté qui séduisait sexuellement. Elle n’avait pas cet air farouche des jeunes femmes qui croient encore que le sexe n’est pas la première chose à quoi pense un homme. Pourquoi cet homme épouserait-il une fille dont il ne sait rien, alors ?

Eric était bel homme. De plus, c’était un aristocrate. On a beau dire, c’est doublement flatteur. Un homme à l’aspect fragile qui avait encore le visage d’un ange. Les femmes ont de la compassion pour ces hommes là. De la compassion aux abandons du corps il n’y a pas loin. 

C’était un officier allemand. Il craignait qu’elle ne cède par peur. Dans certains mess d’officiers, où il ne manquait pas d’homos qui ne savaient pas de quoi ils parlaient, on disait des juives qu’elles étaient de bonne baiseuses et on éclatait de rire. Eric ne voulait surtout pas que Frieda le soupçonne d’avoir des pensées aussi vulgaires.

Frieda n’osait pas se mettre au lit avec un allemand. Un officier allemand qui plus est. Aux yeux des siens, on aurait pu dire qu’elle n’était qu’une putain.

C’était le jour de cette fameuse nuit qui retentira longtemps encore du bruit des vitres brisées dans les rues de Berlin. La nuit de cristal. Je n’ai jamais compris pourquoi on lui avait donné ce nom. Il faut n’avoir jamais entendu se briser la coupe de cristal qu’un juif jette sur le sol. Le son du cristal est doté d’une musicalité singulière. Sa vibration tient du miracle. Cette fameuse nuit, ce sont les vitres des magasins juifs qui ont été brisées.

Dans les rues on entendait le martèlement des bottes  sur le sol, et le chant des nazis. Des chants ? Des vociférations d’ivrognes. Ils se dirigeaient vers les quartiers populaires, là où, pensaient-ils, se terraient les juifs. C’est dans ces mêmes quartiers, aux nombreuses arrière-cours, que travaillaient les peintres et les sculpteurs dans des ateliers qui avaient servis naguère à des artisans.

Lorsqu’ils étaient dans des cafés où on leur faisait crédit, les peintres passaient une bonne partie de leur temps à discourir à propos de la peinture. Ils inventaient des noms pour qualifier leurs mouvements. Ils pensaient qu’ils étaient en train de transformer la peinture. Nouvelle objectivité, Dadaïsme, Constructivisme, etc…Art dégénéré, disaient les membres éminents des académies.

-Il faut partir d’ici. Sur le champ.

Eric pressentait ce qui allait arriver. Il n’était pas bon d’être juif. En ce temps-là en particulier.

Et aujourd’hui, c’est mieux ? C’est un autre débat comme on dit quand on ne sait pas ce qu’il faut répondre.

Eric était en civil. Il avait sorti sa carte d’officier et la tenait en main. Au  cas où une de ces brutes le regarderait de trop près, il la lui mettrait sous le nez. Il avait raidi le cou, et accentué sa morgue d’officier. Il tenait Frieda par la taille.

-Bravo, mon prince. Il n’est pas nécessaire de vous souhaiter une bonne nuit.

Ils se mirent à rire parce qu’ils parlaient de sexe. Eric garda la main sur la hanche de Frieda même après qu’ils aient disparu.

- Dieu merci, j’ai encore ma chambre d’étudiant. Après, nous verrons.

L’homme fragile se révélait un homme déterminé. Frieda ne demandait rien d’autre que de se laisser guider par lui. C’était à la fois un sentiment de peur atroce et d’exaltation qui lui soulevait la poitrine.

Arrivés dans la chambre elle ouvrit les boutons de sa robe pour se dénuder. Elle s’étendit sur le lit, à même le couvre-lit, et tendit les bras.

Le lendemain Eric retourna à l’atelier de Groszberg.

Le peintre était en train de bourrer une sacoche de toile.

- Je pars, monsieur von Berger. Bientôt ils briseront des corps. J’ai eu la visite d’un certain Giraud.qui m’a acheté deux toiles, il y a trois mois. Il me conseille de partir. J’ai toujours rêvé de Paris. Berlin, c’est fini. Vienne aussi, c’est fini.

- Et vos toiles ?

- J’emporterai celles que je pourrai porter. Les autres, je les laisserai à ceux qui n’imaginent pas qu’on puisse emporter sa patrie à la semelle de ses souliers.

Il a raison, pensa Eric. Avec ce clown sinistre qui était le chef de l’Allemagne tout pouvait advenir.

Il ne voulait pas perdre Frieda. Fuir ! Il fallait fuir comme Groszberg se préparait à le faire.

Bientôt ce serait la guerre. L’Autriche. La Tchécoslovaquie. La Pologne. Demain la France  puis l’Angleterre. Puis…Cette armure d’officier qu’il portait sur le dos depuis des générations, est ce qu’il pourra la déposer un jour ?

Il avait jure de servir son pays. Si les militaires commençaient à se poser la question : c’est quoi mon pays, autant se tirer une balle dans la tête. Il y était prêt. Mais il n’était pas prêt de sacrifier Frieda. C’est drôle comme de simples discours vous font oublier que votre vie est unique et irremplaçable.

Il lui ferait passer la frontière. En France, elle ne risquait pas de se faire arrêter comme des milliers de personnes étaient en train de l’être. Les bureaux  de la caserne bruissaient des rumeurs les plus invraisemblables.

- Heil Hitler !

Jusqu’à son ordonnance qui le saluait en tendant le bras levé, et le commandant von Berger répondait de la tête mais n’osait pas le lui interdire.

Ce soir-là, dans sa chambre d’étudiant, sur son lit d’adolescent, témoin de tant de songes inavoués, il prit Frieda consentante avec tant de vigueur qu’il était incapable de mesurer ses ardeurs. Comble de torture, alors qu’il espérait lui faire l’amour jusqu’au bout de la nuit comme si c’était la dernière fois, il ne put la prendre qu’une fois à peine.

- Ce n’est rien. Je t’aime.

Elle caressait son sexe qui ne réagissait pas. Il était chaud, tendre et docile. On eut dit un oiseau blessé. Eric avait les larmes aux yeux.

- Ce n’est rien mon chéri, ce n’est rien.

A Frieda aussi, les larmes venaient aux yeux. Ils ne purent s’aimer qu’au lever du jour.

Berlin se trouve à près de cinq cents kilomètres de la frontière française. En train, c’était prendre de grands risques, les contrôleurs étaient vigilants. Par les routes encombrées, les risques étaient nombreux, eux aussi, Mais à cette époque, pour des juifs, vivre était tout aussi risqué.

Sa tenue d’officier pouvait donner le change. Quelques jours de congés octroyés par le  Général von Hauser, son supérieur direct, pouvait apaiser les suspicions. Plutôt que de se diriger directement vers la frontière française, il pouvait se diriger vers Stuttgart puis Karlsruhe. On y venait pour les eaux. On ne s’y étonnerait pas lors d’un contrôle qu’un officier supérieur en congé s’y rende accompagné de sa maîtresse. 

Fallait-il que le trajet soit court, c’était plus prudent, ou un peu plus long, et conserver Frieda plus longtemps auprès de lui ? Lui seul pouvait en décider, Frieda était prête à tout pour ne pas le quitter.

Groszberg lui avait communiqué l’adresse d’un passeur en mesure de faire passer la frontière à des juifs, des communistes, et d’autres cibles du nazisme. C’était une question d’argent pour le passeur et les garde-frontières qui devaient détourner les yeux.

- Tu iras à Paris. Groszberg m’a parlé d’un quartier appelé Montparnasse. De nombreux peintres y vivent. Bientôt, les Allemands occuperont Paris, c’est une question de mois. Je viendrai t’y chercher. Efforces-toi de changer de nom.

Avant la frontière durant la dernière nuit qu’ils passèrent ensemble ils s’aimèrent avec tant d’ardeur qu’ils auraient aimé mourir pour ne penser à rien d’autre. Mais ne meurt pas qui veut.

Dans la ferme Eric attendit que le passeur revienne avec une bague de Frieda. C’était le signe convenu pour dire que tout s’était bien passé. Il repartit pour Berlin. C’était en mars 1940.

Comment imaginer qu’en même temps, dans le sang et dans l’horreur, se mêlent l’histoire d’un peuple et le destin dérisoire d’un couple à peine constitué. Que le temps leur soit plus largement compté, et ils cesseront de s’aimer ou chacun d’entre eux en aimera un autre, et l’histoire sera différente ou il n y aura pas d’histoire du tout.

C’est l’Histoire de l’Humanité ? L’histoire de l’humanité, ce n’est que l’histoire de chacun d’entre nous.

Après l’armistice Eric von Berger avait été affecté aux services culturels du gouvernement militaire à Paris. Son rôle véritable, c’était d’acheter des objets de valeur pour les transférer en Allemagne.

Dès qu’il fut à Paris, il parcourut Montparnasse sur les conseils d’un collaborateur qui avait son pourcentage sur les œuvres achetées ou réquisitionnées.

-Une certaine Frieda, dites-vous. Une peintre ? Un modèle de Groszberg ? Groszberg a quitté la France. On dit que c’est pour les Etats-Unis.

Il avait promis de chercher. On se méfierait moins d’un Français que d’un Allemand. Durant plus d’un an, il n’y eut rien de nouveau.

Le 15 septembre 1941, le Français lui dit qu’il pourrait rencontrer le lendemain quelqu’un qui avait connu une peintre allemande.

Sorti du Lutétia, le quartier général du gouverneur militaire, Eric von Berger se dirigea vers l’avenue Montparnasse. Soudain un homme, un membre de la résistance française, un certain Rol-Tanguy, apprit-on plus tard dans les livres d’histoire, jaillit du porche d’un hôtel, se précipita vers lui un pistolet à la main,  et tira deux fois sur Eric qui s’écroula, la main sur la poitrine.

 

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A quoi rêvons nous ?

A quoi rêvons nous et comment inscrivons nous nos rêves (ou rêveries) dans le réel. Ici bien entendu l'Art est le lieu où ces rêves ou rêveries tissent leurs fils que ce soit par la peinture, le dessin ou par l'échange intellectuel sur ce qu'est l'Art. Mais nos rêves profonds où vont ils échouer ? Restent ils en nous, comme sous clefs ? Sont ils communicables et comment ? Et rêver est ce une action ? L'inconscient est il perceptible en tant que vecteur entre le rêve et la réalité, et l'art (voire l'artiste) peut il être un passeur entre les 2 mondes ? Et que faisons nous passer ? Autre chose que ce qui est en nous ou au delà ? Sommes nous un miroir déformé de la réalité, projetons nous un monde inconscient qui fait écho à une réalité avec laquelle nous aurions du mal à communiquer ?

Et l'acte de créer n'est il pas porté par un désir d'explorer et de trouver quelque chose que nous pourrions partager ? Créons nous seulement pour nous même ou aussi pour l'autre, les autres ?

Nos rêves sont ils partagés, reconnus, ou tout simplement restent ils enfouis ou impossibles à traduire, tels une langue trop ancienne pour être décryptée sinon par les passionnés.

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Didactica magna: la nature comme modèle et guide

"Didacta magna" est un ouvrage du grammairien et pédagogue tchèque Jan Amos Komensky (Coménius, 1592-1670), composé primitivement en tchèque de 1629 à 1632 et plus tard - en 1640- en latin. C'est l'un des ouvrages les plus remarquables de la littérature pédagogique mondiale. Il se compose de 33 chapitres dont le but fondamental est de jeter les bases d'une science pédagogique solide et universelle. Les chapitres XVI à XIX, partie centrale de l'ouvrage, contiennent l'essence de la pensée didactique de Coménius, qui consiste à trouver l'art d' enseigner toute chose à tous, avec la certitude "d'obtenir d'heureux résultats". Autour de ce thème, l'auteur en développe d'autres qui envisagent le problème de l' éducation au point de vue religieux, social et moral, le tout s'éclairant à la lumière d'une idée fondamentale. Cette idée, c'est la divinité de la nature humaine: l'homme est orienté vers Dieu, sa vie est une préparation à la vie éternelle.

L'homme est à l'image du Dieu vivant, il possède en germe dans sa nature tout ce qui lui est nécessaire pour réaliser sa fin éternelle, c'est-à-dire l'intelligence, la vertu et la piété. Dans cette ascension vers Dieu, le rôle du monde visible est de servir d'école aux hommes; c'est pourquoi l'auteur puise continuellement des exemples dans la Nature, dans l'instinct et le comportement des créatures privées de raison.

Dans les sept premiers chapitres de la "Didactica", Coménius pose comme base de l'œuvre éducative la valeur intrinsèque de la nature humaine, création de Dieu; l'éducation n'est donc autre chose que la possibilité qu'a l'homme de faire fructifier les semences déposées par Dieu en lui semences du savoir, de la vertu et de la piété. Elles sont distinctes dans la pensée de l'homme, mais au fur et à mesure de leur développement, elles arrivent à se subordonner au savoir, c'est pourquoi la majeure partie de l'ouvrage est consacrée à l'instruction, ce qui justifie son titre.

S'instruire est un devoir individuel, mais aussi un devoir social; c'est par l'école que se forme la conscience sociale de l'individu. En conséqence il faudrait un grand nombre d'écoles ouvertes à tous, hommes et femmes, riches et pauvres, et dont la fonction serait d'enseigner tout ce qui touche à la culture en général. La nécessité s'impose de réformer les écoles existantes et d'en créer de nouvelles (Chapitres VIII à XV). L'ouvrage s'occupe ensuite des règlements dans les écoles, et au cours des quatre chapitres centraux de la "Didactica", l'auteur explique comment il entend fixer de manière universelle et infaillible les règles de la méthode didactique, pour s'assurer toujours de bons résultats. Il s'efforce d'édifier une théorie générale de la méthode didactique en appliquant à l'homme, par des procédés artificiels, les procédés infaillibles de la nature. Ces chapitres sont donc pleins de "préceptes", c'est-à-dire de schématisations et de généralisations des moyens par lesquels la nature opère sur les êtres vivants; de ces moyens, Coménius tire des règles qu'il juge fondées sur la nature même des choses, telle que Dieu l'a voulue, et qu'il pense pouvoir être universellement sûres. Ainsi, de l'observation des agents naturels, il tire des principes généraux, tels que ceux-ci: "Dans l'accomplissement de ses oeuvres, la nature ne procède pas de façon désordonnée, mais distinctement", "Toute opération de la nature débute par les parties les plus intérieures".
Selon Coménius, les différents arts sont fondés sur la reproduction de ces principes généraux. Il note les aberrations des écoles, et propose enfin des amendements didactiques, comme celui de former l'esprit avant la langue, de placer les disciplines positives avant les disciplines linguistiques et logiques. La dialectique ne doit pas être étudiée en même temps que la grammaire et il ne faut occuper les élèves qu'à une seule étude à la fois. Enfin, d'un autre précepte il déduit que l'intelligence des choses devra être formé en premier, puis la mémoire et, en troisième lieu, le langage et l'habileté manuelle". Ayant ainsi fixé les règles générales de la méthode didactique, l'auteur s'occupe ensuite de la dialectique appliquée aux sciences, aux arts et aux langues. Puis il étudie la méthode pour développer les germes de la vertu et de la piété (morale et religieuse) qui, avec l'instruction forment l'homme complet.
Dans les derniers chapitres (XXV à XXXIII) il revient au problème de l'école et esquisse la réforme des institutions scolastiques: quatre degrés: école maternelle, école de langue nationale, école de latin, Académie. Il clôt enfin son livre en répétant ses directives pour obtenir un ordre universel et parfait dans les écoles, réfutant les objections qui pourraient s'élever contre l'universalité de sa méthode.
La "Didactica magna" de Coménius est une des plus grandes manifestations de la science pédagogique qui cherche à trouver les bases d'une constitution théorique. Pour comprendre son importance, il faut la situer dans l'esprit scientifique de son temps dont elle est une géniale application. Les fondateurs de la science moderne étaient convaincus que la nature était régie par des lois immuables, inscrites par Dieu lui-même d'une façon mathématique dans la structure des choses. N'était-il pas juste de penser que ce monde de la nature devait servir de modèle et guider l'homme au cours du développement de sa vie spirituelle? C'est à cette exigence qu'a obéi Coménius. Après deux siècles d'évolution de la science pédagogique, nos idées touchant la nature et ses lois ne sont plus celles de Coménius. Il nous faut cependant reconnaître à Coménius le mérite d'avoir envisagé le problème pédagogique dans ses points essentiels.

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PARADE

Devant l'arbre coupé les coquelicots montent la garde

Dernier hommage navré

Les oiseaux ne viendront plus se cacher , vers le soir de Juillet

Il y aura un crépis sur les beaux "galets roulés" que le  Rhône a bercés

La vie s'en va ... Madame ! et moi je vais

AA

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Eh ! Toi là !?... Que sais-tu ?

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De ces scènes ? Ces moments ineffables,

Enchevêtrés les uns aux autres. Tenaces...

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Si vivaces en sa mémoire ;

Enfilés comme perles noires à reflets fugaces.

Renvoyant, Par éclairs de souvenances douloureuses

Sur le tain de la glace ses larmes, grosses, denses, pesantes ;

Telles des billes, roulant, muettes, Sans cri ni soupir;

N'ayant où s'épandre et se dire que l'en-dedans de soi.

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Et de ces silences, soutenus.

Climat mutique suivant les admonestations...

Et puis. De l'exil où il la reléguait ?

Pour suivre. Et ensuite.

De cette poix. Tu vois ?

Je t'explique :

Cette glu de l'âme dégoulinant sur la peau du dos.

Sueur visqueuse, épaisse, râpeuse,

A l'odeur de peur qui se nomme effroi.

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Et ce regard, dardé, comme flèche empoisonnée,

Vrillant ses omoplates... Elle le devinait,

Fouaillant sa chair jusqu'à ses os,

Loin jusqu'à leur moelle ;

Scrutant la défaillance chez l'enfant

Agenouillée sur une méchante latte.

Et le sentait, d'instinct, virulent, vigilant,

Ne lui lâchant l'échine d'un poil.

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Son nez collé dans le coin des deux murs

Contre lesquels il l'avait isolée.

Quel âge avait-elle déjà ?

Si petite... Conspuée...

Il ne s'en souvient pas ?

Que non  ! Il est mort ! S'est barré !

Et elle reste là... Ployée depuis lors ;

Les jambes ankylosées, roidies,

Si endolories par le fardeau de son corps.

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Et de ses bras, levés, portant, à chaque main,

Un de ces pesants souliers...

S'alourdissant de douleurs

Sous les crampes engendrées par l'immobilité.

Et la menace, ce constant danger,

Certitude qu'il ne lui suffirait, châtiée,

De l'avoir mise au pilori de longues heures.

Devant ses frères. Exhibée...

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Devant sa jeune sœur. Sa mère.

Qui laissait faire. Qui voyait. Donc savait.

Mais agréait l'opprobre car s'en taisait.

Ne s'insurgeait. Il faut le croire.

L'enfant, elle s'en convainquait,

Méritait ces châtiments.

Ils se devaient. Trop turbulente.

Si rebelle. Enfant différente.

Différenciée. Suspectée.

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Comme malade. Comme contagieuse.

Comme pestiférée. Comme lépreuse.

Qu'il devait faire taire. Proscrite.

Frappée d'ostracisme. Mise aux bans.

L'enfant apocryphe. L'inconcevable survenu.

La surprenante déconvenue. Devenu enfant miroir.

Faute vivante qu'ils ne souffraient ne savoir ni voir.

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Et la voilà ! Vive ! Mais lacérée...

A jamais écorchée de ces âpres batailles.

Tombeau scellé sur une enfance défunte

Scarifiée de sanglantes entailles.

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Eh ! Toi là ! Qui geins. Et te plains.

Et porte en médailles d'infimes peines.

Que sais-tu de l'indicible genèse martyr

Que d'aucuns, adultes, traînent ?

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De ces séquelles ardentes ?

De ces sévices pérennes sertis en souvenirs ?

Voraces... Qui de retentir ne se lassent...

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MandraGaure

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Marchienne-au-Pont le 10 Mai 2014

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Image : 

Jean-Baptiste Greuze

(Tournus 1725 - Paris 1805)

Etude d'enfant agenouillé

Contre épreuve de sanguine et  crayon noir

Annoté en bas à gauche : «Greuze f.an.1758»

[22 x 33 cm] 

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Sédition...

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Qu'adviendra-t-il de nous

Lors qu'aux confins de nos tolérances

Se lèveront les désirs de faire jaillir

Les vents violents de nos révoltes ?

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Quand indignés, et sans patience encore,

Sans espoirs autres que la rébellion,

Nous nous dresserons face à nos ennemis sans visage,

Qu'en sera-t-il de nous ?

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Lorsque nos sagesses érodées,

Nos limites atteintes, acculés, dos aux murs,

Levant les étendards de nos protestations,

Que feront-ils de nous ?

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Quand nous serons fronts, et nous insurgerons,

Laissant nos foyers ;

Quand nous prendrons les armes, face aux leurs,

Quel sera notre sort ?

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Quand la colère du Juste déferlera sur les pavés;

Quand exacerbés nous aurons perdu raison;

Quand nous serons mis en joue par nos tortionnaires...

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Tant de deuils jalonnent les sentiers des insurrections ;

Taraudent les mémoires ;

Tant de causes légitimes baignent, muettes,

Dans le sang.

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Je vous parle !

Attendrons-nous les heures extrêmes où écorchés vifs,

Saignés à blanc,

Nous scanderons face aux fusils ce seul mot :

"Pain ?"

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Oblitérant l'autre vocable, magique pourtant,

Que nul, car nulle part, n'entendra plus résonner

Sous le brouhaha des combats et luttes planétaires :

"Paix !"

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R_B

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Marchienne-au-Pont ce 1 juillet 2014

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Source de l'image : Blog'Ami : 

Et si la masse des lois d’un État était le grimoire d’un Ogre ?

L'Image : 

"Golem vs Mech"

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l'ascenseur

                                                                                                                                

 

 

Julie était mariée depuis vingt ans, elle en avait quarante-cinq, et éprouvait pour son mari un amour qu’elle qualifiait de profond.  Ils vieilliraient ensemble, disait-elle,  parce-qu’elle n’imaginait pas qu’elle pût vivre avec quelqu’un d’autre.

C’était un homme affectueux, riant, qui aimait la vie et la bonne chère, et ce qu’elle appréciait plus encore, c’est qu’il était un amant qui excitait ses sens et qui lui avait appris à aimer son corps, c’est important, disait-elle, et elle avait appris auprès de lui à donner du plaisir et à en recevoir davantage à mesure qu’elle en donnait.

Tu n’es pas jolie, disait son mari, tu es belle. Julie avait conservé de son adolescence des traits que n’entamait aucune ride, des joues lisses et des lèvres pleines qu’elle soulignait soigneusement de son rouge à lèvres. Le corps à peine épaissi aux hanches, elle n’en était que plus désirable. Elle était heureuse de son corps.

Mais un jour quelque chose avait changé. Ils s’étaient rendus chez un couple dont ils avaient fait la connaissance durant les vacances et qui les avait invités pour le week-end. Les amitiés de vacances se dénouent généralement avec la fin des vacances, si bien qu’ils avaient été surpris quand les Peraux leur avaient téléphoné pour leur dire qu’ils avaient conservé de leur rencontre un souvenir si plaisant qu’ils souhaitaient les revoir.

Georges Peraux était un homme d’affaires prospère avec lequel, durant leurs vacances, ils avaient passé la plupart de leurs soirées. Sa femme était charmante et enjouée. Julie et elle s’étaient raconté un tas de choses, même des choses intimes qu’on ne raconte d’habitude qu’à des amies de longue date.

C’était des gens chaleureux. Ils étaient à peine arrivés que Georges avait entouré les épaules du mari de Julie pour faire, comme il disait, le tour du propriétaire et lui montrer sa cave. Pendant ce temps, dit-il,  Sylviane montrerait leur chambre à Julie, cela leur permettrait de se faire jolies, et eux, les hommes, choisiraient les vins qui accompagneraient leur repas. Un repas de retrouvailles.

A la fin du repas, Julie avait voulu se rafraîchir. Sylviane et le mari de Julie parlaient cuisine, et le mari de Julie avait à ce sujet une compétence de gourmet qui surprenait toujours la femme de ses hôtes. Georges dit qu’il allait la conduire à la salle de bains, il était inutile que Sylviane se dérange, après tout lui aussi savait où elle se trouvait.

Il entra dans la salle de bains avec Julie, prit une serviette de bain pour la lui donner mais la conserva dans la main.

Tu sais que tu es jolie, dit-il en s’approchant d’elle. Je l’avais déjà remarqué au bord de la piscine, et j’avoue que je te regardais souvent. Je le dis comme je le pense, j’enviais ton mari. Oui, dit Julie en souriant, mais c’est mon mari.

Georges s’était approché d’elle, il avait voulu l’embrasser sur la bouche, elle avait détourné la tête et elle avait mis la main sur sa poitrine pour le repousser. Il avait cherché son cou et il avait retiré la main de Julie de sa poitrine pour la poser sur son sexe tendu. Julie ne voulait pas créer un scandale, elle n’était plus une enfant, mais elle ne savait pas ce qui aurait pu arriver si on n’avait pas frappé à la porte. C’était Sylviane, et Georges, le visage en feu, avait dit qu’il cherchait une serviette propre pour Julie, et il était sorti en riant.

Cette nuit-là, Julie n’avait pas voulu que son mari l’approche, elle avait la migraine, avait-elle dit, c’était peut-être le vin, elle pensait qu’il valait mieux qu’ils rentrent chez eux, peut-être qu’elle avait un début de grippe.

A peine rentrés chez eux, Julie avait entraîné son mari dans la salle de bains, et elle lui avait fait l’amour comme l’aurait fait une putain, avait-elle pensé. Mais, et ça lui était venu à l’esprit comme à peine l’ombre d’une pensée, que, peut-être, c’était à Georges aussi qu’elle avait songé.

Julie n’avait jamais trompé son mari. C’est vrai qu’il lui arrivait d’être troublée  lorsque en dansant son cavalier la serrait de trop près, sa poitrine était particulièrement sensible, mais elle s’écartait sans aigreur. N’était-ce pas un hommage à sa beauté et à cette attraction qu’elle exerçait sur les hommes ?

Elle avait d’ailleurs le sentiment que son mari en était fier, et elle était heureuse qu’il le soit. Ce qu’elle lui réservait, pensait Julie, le don de son corps, plus encore que son corps, n’en avait que plus de valeur. Parfois, elle était tentée de le lui dire pour pimenter ces jeux où ils trouvaient leur plaisir tous les deux.

Julie et son mari formaient un couple heureux. Leur vie, Julie pensait parfois qu’elle était trop routinière. Adolescente elle avait rêvé de rencontres inédites, d’actions qui la porteraient à prendre des risques dont elle ignorait la nature mais dont son entourage serait surpris.  Mais leur vie se déroulait selon un schéma bien réglé. Trop bien?  Sereinement, pensait-elle. Que peut-on souhaiter de plus de la vie ?

Autre chose avait changé encore après un voyage qu’ils avaient fait en amoureux pour fêter l’anniversaire de leur première rencontre.

Au retour, ils s’étaient arrêtés dans une auberge de campagne pour y passer la nuit. Ils avaient fait l’amour pendant longtemps. Puis, elle avait eu envie de descendre dans le hall pour demander elle ne savait plus quoi, et son mari était resté allongé sur le lit. La chambre se trouvait au troisième étage, elle avait pris l’ascenseur vêtue d’un manteau qu’elle avait enfilé sur son pyjama.

Un homme se trouvait dans l’ascenseur. Le col de sa chemise ouvert, les cheveux dépeignés; manifestement il sortait de son lit. Ils se regardèrent un moment puis, gênés, ils détournèrent la tête. Mais Julie sentait sur eux, et il devait le sentir lui aussi, cette odeur épicée qu’ont les couples après avoir fait l’amour.

C’était une sensation curieuse et excitante. Il venait de faire l’amour, elle en était certaine, et c’était comme s’ils avaient fait l’amour ensemble. Et elle imaginait que sa compagne l’attendait dans leur chambre comme l’attendait son mari dans la sienne.

L’ascenseur s’était arrêté, l’homme était sorti mais Julie avait changé d’avis. Elle remonta dans la chambre. Son mari était toujours étendu sur les draps rabattus. Elle se coucha auprès de lui, elle posa la main sur sa jambe et, tout en le caressant, elle lui raconta sa rencontre de l’ascenseur. Ils avaient ri de cette coïncidence et de la jouissance singulière qu’elle leur procurait.

Depuis, est-ce qu’on sait pourquoi et comment ces idées-là vous viennent, comme si une main vous saisissait le bas du ventre, elle s’était mise à penser à des gestes que des inconnus pourraient avoir envers elle dans un ascenseur ou ailleurs. Et à ce qu’elle ferait s’ils le faisaient en réalité, et non pas dans ce jardin obscur de l’imagination.

Par exemple, ça pourrait arriver, si elle se trouvait dans une voiture avec un conducteur de rencontre. Au début, ils se tairaient tous les deux, puis parce-que ce silence serait devenu de plus en plus lourd, une sorte de tension indéfinissable se serait emparée d’eux et, tout en roulant et sans la regarder, son conducteur lui aurait entouré le cou, l’aurait obligée à baisser la tête jusqu’à son sexe, et aurait exigé d’elle qu’elle le mette à nu. Devait-elle se débattre ? N’était-ce pas une question de vie ou de mort ?

Ou bien encore, elle se trouvait dans une salle de conférence avec quelqu’un qui était son patron, un patron autoritaire. Elle n’avait jamais eu de patron mais c’était imaginable, non ? Ils avaient beaucoup travaillé et tard, tous les autres employés étaient partis. Le dos appuyé à la table de conférence, elle le regardait. Il s’était approché d’elle, il avait saisi ses hanches et, sans dire un mot, il avait soulevé sa jupe. Naturellement, elle n’aurait pas encore été mariée, et finalement ce n’était qu’un fantasme comme en ont la plupart des femmes

Julie avait rencontré Michel par hasard Elle se trouvait dans le bar d’un hôtel pour prendre un café avant de rentrer chez elle.

Michel était un homme d’une cinquantaine d’années, pas particulièrement séduisant et d’allure maladroite. Elle ne l’aurait pas remarqué d’ailleurs sans cette allure maladroite avec laquelle il cherchait une table où s’asseoir. Le bar était plein et il était passé deux fois auprès de celle de Julie.

C’est elle qui d’un sourire et d’un geste courtois l’avait invité à prendre place. Il l’avait remerciée, il avait dit que le bar était plein, ce qu’elle avait constaté elle aussi, avait-elle répondu.

Sans l’avoir cherché son pied avait rencontré celui de Michel. Il n’avait pas retiré le sien mais il avait dit qu’il faisait chaud. Puis, il avait avancé l’autre pied si bien qu’il avait le pied de Julie entre les siens.

Il y avait eu un moment de silence, elle voyait qu’il hésitait, elle ne savait pas ce qu’elle souhaitait elle-même, il se redressa et il dit qu’il allait demander une chambre. C’était autant une affirmation qu’une question. Et quand il était revenu de la réception, une clef à la main, elle l’avait suivi vers l’ascenseur, curieuse de sa propre réaction, en vérité elle n’en avait pas, et ils prirent l’ascenseur jusqu’à l’étage de leur chambre.

- Est-ce que tu es marié ?

Il avait paru surpris de la question de Julie. Puis, il avait dit que ça paraissait ridicule mais qu’il n’avait jamais trouvé chaussure à son pied, non il ne voulait pas le dire dans le sens où elle l’entendait mais affectivement, le travail, les voyages, enfin tout ce qui fait qu’on passe peut-être à côté de sa vie, tu vois ?

Elle voyait, avait-elle répondu, est-ce qu’on sait qui passe à côté de sa vie ? Et ils s’étaient promis de se revoir.

Les premières fois, ce fût dans le même hôtel. Parfois, elle arrivait avant lui, et elle l’attendait dans la chambre, déjà nue, étendue sur les draps. Elle aimait le regarder ôter ses vêtements selon une sorte de rituel érotique. Je suis le mâle, disait-elle en riant.

Après s’être aimés, elle partait la première, la tête baissée afin qu’on ne puisse pas la reconnaître, et s’émerveillait du plaisir qu’elle éprouvait du caractère clandestin de cette aventure. Au bout de trois semaines, il lui avait demandé de venir chez lui puisqu’il vivait seul, et elle avait accepté, étonnée de ce que le sentiment de culpabilité qu’elle en ressentait, Dieu sait où ça la mènerait ?, lui était agréable et, de manière étrange, lui donnait, pour la première fois, le sentiment de construire sa vie.

C’est Michel qui préparait le repas qu’ils prenaient avant ou après s’être aimés. Parfois même, en même temps. Ce fût un temps délicieux et exaltant.

Un jour, il lui offrit un cadeau, un parfum, celui qu’elle utilisait, et une surprise, avait-il dit, la clé de son appartement, tu pourras venir quand tu voudras

Elle venait sans prévenir dès qu’elle le pouvait. C’était une étrange sensation que d’avoir deux foyers. C’est drôle, avait-elle pensé, elle aimait toujours son mari. Et il lui avait même semblé lorsque Michel, peu à peu, se mit à l’attendre avec de plus en plus  d’impatience que c’est à son mari qu’elle pensait en se mettant au lit. Peut-être n’aurait-il pas dû lui remettre sa clé ? Peut-être auraient-ils dû continuer de se rencontrer à l’hôtel ?

La dernière fois qu’elle était venue, elle avait déposé sur la table du salon, bien en évidence, la clé de l’appartement. Et, sans se retourner, elle avait repris l’ascenseur.

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un arbre, une vie JGobert

Cet arbre dressé au fond du jardin qui, dans sa majesté temporelle, regarde cet homme évoluer, vivre depuis tant d’années lui ressemble.  Cet homme a pour lui beaucoup de tendresse.  Il le compare aux phases de son existence. Du tronc solide et bien encré dans le sol, il tient sa force. Des branches nombreuses et inégales, il retient des moments, des instants, des étapes de sa vie.

Le temps de l’enfance à l’adolescence est loin et reste néanmoins le terreau de son évolution, de sa croissance, de son essor, faisant des bases solides qui ont fait de lui un être humain équilibré.

Toutes ces années, où il s’est développé au fur et à mesure du temps, ont rempli l’espace libre laissé autour de lui. Les êtres et les histoires sont venus s’accrocher insensiblement à lui. Il a pu en apprécier la plupart et en aimer certaines follement.

Les plus belles pages de sa vie sont gravées sur ce tronc. Les enfants qui ont fait de lui le père qu’il est. Sévère, rigoureux. Il est un guide qui a donné des individus responsables. Il ressent une certaine fierté de les voir devenir ce qu’ils sont. Ces branches tendres pleines d’amour, de tendresse et d’affection sont devenues les plus solides sur lesquelles il peut se poser et se reposer.

D’autres ont pris également beaucoup de places dans son existence à en remplir des stères. Une vie très riche en évènements, en voyages, en rencontres. La découverte de l’autre, par des chemins escarpés, a laissé une richesse incomparable. Les visites du passé ont brodé son cœur de fierté et  d’estime. Il puisse chaque jour dans celles qui détiennent le puits de connaissance qui est la nourriture de son âme.

L’absence des êtres disparus trop tôt a laissé des branches vides, abandonnées. Des cassures, Des fractures toujours trop vite survenues ont bouleversé à certains moments cet équilibre et soulevé des tempêtes et des orages. Le temps, heureusement, a fait son œuvre, son labeur et le calme est revenu.

De l’adolescence à l’adulte naissant,  il a gardé de grandes amitiés dont le secret en fait le sel, le piment.  Certaines durent toujours et restent nobles et pures. Malgré les années, elles conservent le goût agréable, satisfaisant de la première rencontre, du premier regard et des serments de la jeunesse.

Sur cet arbre fécond se sont greffés de nombreuses autres rameaux qui ont jalonné une existence couverte d’emballements et de débordements. Certains ont cassé, n’étaient qu’éphémères et ont laissé place à des vides. L’incompréhension, le mensonge, la trahison ont parfois fait de gros dégâts dans les sentiments. Les blessures, les plaies sont restées souvent entrouvertes et sans guérison

Toutes ces ramures, qui l’entourent, n’ont pas été aisées. Le travail fut une des plus difficiles et a laissé des traces lourdes et ineffaçables. L’autorité non respectée, le combat des chefs n’ont jamais pu le réjouir et l’ont toujours laissé étranger à ces batailles de pouvoir et d’argent. 

Défendre l’opprimé, faire respecter la justice et la loi furent des combats de chaque jour et souvent perdus et inégaux.  Les branches de la patience, de la tolérance, de l’indépendance sont restées solides et ont fait la sève de sa vie.  Sa détermination n’a pas changé le monde mais elle a éclairé par moment l’obscure lueur de certains hommes.

Cet arbre, qui possède maintenant la cime de la sagesse et où l’on peut lire le temps passé, lui donne à réfléchir. Tous ces pourquoi sont derrière lui et les histoires de sa vie lui reviennent sans souffrance, sans regret, sans remord.  Et il s’interroge sur l’avenir, l’ailleurs.

Il hésite à traverser ce pont libérateur et à laisser derrière lui cet arbre vieillissant des moments de sa vie.  Il rêve de le transformer, le modifier en un arbuste léger et éthéré et qui le laisserait de nouveau libre de ses envies où ses rêves et ses chimères reprendraient une place première comme au temps de sa jeunesse.

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