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Coups de griffes pour coups de dents

À huit ans, Jean-Clause, à l’école,

N’avait pas rendu coup pour coup

Et cela avait semblé drôle

Aux témoins qui riaient beaucoup.

On lui avait dit, qu’en colère,

On peut causer un bien grand tort;

Hélas! il n’y a rien à faire

Quand un geste entraîne la mort.

N’étant pas sûr de son contrôle,

Que l’on soit ou non le plus fort,

Il vaut mieux se battre en paroles

Et ne pas défier le sort.

Coups de griffes pour coups de dents,

On triomphera, on l’espère.

Attaqué, on devient méchant,

On crie à l’aide et c’est la guerre!

 

19 avril 2007

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Ils furent nombreux les photographes de la ruée vers l'or du Klondike (Yukon, Canada) et le l'Alaska. Mais combien connaissent leurs noms ? d'autant que nombre d'entre eux sont oubliés, leurs clichés éparpillés. Je veux rendre hommage aujourd'hui à deux d'entre-eux, et des plus talentueux. Et loin d'être les plus renommés, mais pour moi les plus fameux. Je veux parler de Case & Draper. Mais patientons un peu...

Le plus connu est certainement Eric A. Hegg, certainement parce que Ethel Anderson Becker lui consacra une monographie, Klondike'98, dès 1949 (chose peu courante un photographe à l'époque), et aussi pour ses cartes postales qui ont beaucoup circulé. Il faut dire qu'il avait du talent, notamment celui d'être toujours là au bon moment, le premier le plus souvent. Et qu'il a laissé dans l'imaginaire collectif la photo la plus célèbre de la ruée vers l'or (cf. mon billet intitulé "La pépite"). Charles Chaplin s'en souviendra...

Citons encore Benjamin W. Kilburn, Benneville L. Singley (les plus productifs, mais pas les moins doués), William H. Rau, Harry C. Barley, Veazie Wilson, Louis H. Pedersen, Joseph Burr Tyrrell, H. J. Goetzman, T. W. Ingersoll, R. Y. Young, Walter Strand, Wolfe, Graves, Griffith & Griffith, Robertson & Darms, Larss & Duclos, George Hicks, Ernest Keir, Wilfred et Ed McDaniel, Frank La Roche ou Asahel Curtis (oui, le frère d'Edward S. Curtis, excellent photographe lui aussi, hélas laissé dans son ombre). Mais je vous fais mariner... (si vous me pressez je pourrais y revenir...)

William H. Case et Herbert H. Draper s'associèrent et travaillèrent dans leur studio de Skagway (Alaska) de 1898 à 1908 et conjointement à Juneau de 1905 à 1907, jusqu'à leur séparation, Draper restant à Skagway jusqu'en 1913 et Case à Juneau jusqu'en 1920, dates de leurs morts respectives.

Oui mais leur travail ?

Case & Draper furent certainement les plus novateurs, les plus modernes, explorant des domaines variés avec un sens du cadrage hors du commun.
Dans leurs vues en extérieur, paysagistes hors pair, ils apportaient souvent un détail, arrière ou avant-plan, qui donne vie à leurs clichés. Une vue du fleuve Yukon avec un esquif passant entre deux rocs les rapides de "Five Fingers", alors que d'autres, je pense à la même prise par Barley, ne faisaient pas vivre le site, ou de simples cabanes de mineurs :

12272864071?profile=originalYukon River (Canada, photo Case & Draper, ca 1900 ; collection L.M)

Pour les intérieurs, froids, mécaniques, désincarnés, comme leur série "Treadwell Gold mines", un sens de la perspective, de la composition, de la lumière, qui en font des oeuvres presque abstraites, "cubistes", qui font penser tant à Vasarely, le père de l'art optique, qu'à M. C. Escher, fou de figures spatiales mathématiques abstraites, à Léger...Intemporel miroir magique mais combien humain ainsi définirai-je leur travail.

12272864670?profile=originalTreadwell mines. Douglas island, Alaska (Etats-Unis, photo Case & Draper, 1906 ; coll. L.M)

Comme on le voit, un photo "industrielle" permet à nos photographes d'exercer leur talent, perspectives, contrastes, lumière, profondeur, offrent une image d'une grande modernité.
Pendant la ruée vers l'or en Alaska, la "Treadwell gold mine" fut la plus grande mine d'or du monde, tournant 24h sur 24. Son propriétaire, John Treadwell (1842-1927), dirigea son activité de 1881 à 1922, employant jusqu'à 2000 personnes.

Enfin et surtout ils furent des ethno-photographes avant l'heure. Bien que réalisées en studio, leurs photos sont loin de maints clichés d'alors où le "sauvage" est montré comme ours en foire ou larron sur toile de fond. Déjà ombres et lumières dessinent les Indiens comme le feraient les grands maîtres du portrait pour des princes de cour (il faudra attendre les célèbres studios Harcourt créés en 1934 pour ainsi mettre en valeur les vedettes avec ce sens du noir et blanc), témoignant d'un respect pour le modèle qui force l'admiration. De plus ces portraits ont une valeur ethnographique incontestable, témoignages uniques des indiens Tlinglit  (ou Thlinkit) au début du vingtième siècle. Je pense notamment aux portraits des chefs Ano-Thlosh ou Cow-Dik-Ney, ou d'autres membres de cette nation, hommes ou femmes, ainsi que les objets de leur quotidien captés comme les objets d'art qu'ils sont, mais perçus alors comme des curiosités incongrues, pris en 1906-1907. C'est là qu'ils rejoignent l'immense Edward Sheriff Curtis (1868-1952), oublié à sa mort, emporté par une crise cardiaque autant que par la fièvre de l'or, mais heureusement redécouvert dans les années 1970.

Sur le vif, ils ont également beaucoup photographié les travailleurs, les gens de peu, les anonymes, mineurs ou pêcheurs, employés ou charpentiers, du Grand Nord.

Dire qu'à ma connaissance aucune monographie, aussi bien en français qu'en anglais, n'existe de ces deux grands noms de la photographie ! Même dans la littérature la plus pointue, consacrée aussi bien à l'histoire de la photographie qu'à la ruée vers l'or du Klondike ou aux Indiens d'Amérique du Nord, on ne les trouve que rarement ne serait-ce que mentionnés (néanmoins certaines photos sont visibles en ligne, notamment sur le site de l'Alaska Historical Collection de l'Alaska State Library).

12272865070?profile=originalLignes de fuite (aéroport d'Abu Dhabi, 2012 ; photo L.M prise en hommage à Case & Draper).

Lansardière Michel

Les photographies proviennent de ma collection personnelle. Je dois néanmoins la photo n°2 à Chantal Roussel qui m'en fit cadeau et que je remercie ici.

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Dans la main de la terre

https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=rfhMXRNPlMY

Il y avait peut-être cent ans qu'elle était là

ou peut-être juste un instant.
Le vent de la nuit lui caressait le visage.

Je ne saurais vous dire où était son pays
Où était sa maison.
Si elle était femme de marin, de paysan, d'exilé ou
d'émigrant.
Si elle avait franchi la mer, une montagne ou
l'océan.

La terre semblait être derrière elle.

En la voyant marcher
On pouvait imaginer qu'elle la portait toute seule
sur ses épaules.

Allez donc savoir ce qu'elle s'en allait chercher
Ce qu'elle aurait tant aimé entendre cette nuit-là.

La nuit
les regards des hommes s'éteignent un peu.
On dit que la lumière est à l'intérieur.
Dans un village, au fond d'un port,
en haut d'une montagne,
un phare dans l'océan,
ou bien une étoile dans le ciel.

A chaque chant elle accordait son
âme, elle accordait ses pas.

Elle disait qu'elle voulait apprendre le chemin
Jusqu'aux plus beaux signaux du monde
Jusqu'à la beauté qui unit les hommes, les peuples

Son rêve elle l'écrivait de quatre mots...
L'unité qui rassemble,
La diversité qui enrichit.

Dans chaque chant du monde elle voulait graver
une alliance, une reconnaissance
De chaque langue elle voulait apprendre la part
d'altérité, d'intelligence, d'humanité.

Elle disait que c'était cela la plus belle promesse
d'avenir, de paix, de richesse du monde.

Un jour le poète a écrit pour elle...
L'homme n'est ni grand ni petit
Il a la taille de ce qu'il sait aimer et respecter.

Elle, elle répondait que toute la vie il fallait
apprendre à être l'invité de l'autre,
l'invité du monde,
que c'était cela l'hospitalité.

Il y a peut-être cent ans qu'elle marchait ainsi
Ou peut-être un instant...

C'était cela sa fidélité.
Le chant d'amour qui fait pleurer les yeux d'un
peuple
Ne peut à tout jamais laisser indifférent l'âme du
monde.

C'était cela sa paix.

Ce soir-là,
entre la mer et l'océan,
il y avait peut-être quelques lumières de plus dans
la main de la terre.

Là où rien n'est séparé...
Là où s'additionnent et se reconnaissent toutes les
dignités du monde.

Là où les enfants de Bretagne ont écrit un jour...
...tous ces pays dispersés par le vent
les champs de blé dans la poche des paysans...
et l'océan qui n'a plus pour frontière
que la graine emportée par une main d'enfant...

... Ce soir
... le pain sera blanc à la table d'hôte...
Passant demeure ici
pour le partager...

... Il y a peut-être cent ans qu'elle marchait ainsi
Ou peut-être un instant.

Elle disait que cette beauté-là est invincible...
Elle disait que cette beauté-là est invincible.
Citation du message publié par JF Bernardini – I Muvrini

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POURVU QUE TU RESTES!

Pourvu que tu restes !

(Quand un bonheur infime, nous parle et nous

Intime de tenir à la vie, d’y croquer à pleines dents)

 

Etrangère ! Tu le fus ;

Etrangère tu seras !

Et le peu de lumière

Que capturent tes paupières

Tu l’offres au temps qui fuit ;

Et le peu de ton souffle

Qui te hante et t’étouffe,

Vole en rêves luisants, 

Vole en vers fuyants!

 

Ainsi tu ne tiens plus !

 

Alors écoute et reste !

Prend tout ce qui me reste

De sève et de sang,

De souffle et de dons,

De rêves et d’aura,

De temps, de ton, de bras,

De bon, de bien, de draps,

Mais reste, reste là !

Mais reste avec moi !

 

Ainsi tu ne mourras plus !

 

 

J’ai besoin de tes yeux

Pour refaire le monde

Au goût de l’innocence.

J’ai besoin de tes cris

Pour tenter de construire

Un pays de cocagne.

Mes couleurs se déteignent,

Mes globules se déteignent,

La fin vient sans bruire !

 

Mais pire si tu n’y es plus !

 

Je te donnerai mon sang !

Que mes yeux se débrident,

Que mes jours se dérident,

Que mes heures se dévident !

Je ferai une étoffe,

Et la soie de tes mots,

Douceur incandescente,

Recouvrira nos os

Et que vienne la descente !

 

Trépas, je ne le crains plus !

 

Khadija, Agadir, Samedi  26/01/2013 à 19h37

© Khadija ELHAMRANI

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NINA

 

grands yeux verts « en amande »,

robe douce «  écailles de tortue »,

truffe mi rose mi brune,

oreilles délicates, tout en soie,

gueule d’amour, si menue, féminine,

immensité du regard,

hypnotiseur, accrocheur,

maquillage d’ébène, parfait.

Déesse je suis, tigresse urbaine,

reluqueuse d’oiseaux, de petites bêtes ;

j’accepte ces hommes, ces femmes

qui me chérissent, me caressent,

par ma grâce et mon intelligence

sont fascinés, un peu gâteux,

 je le miaule haut et fort,

mais je les aime quand même !

Je les accepte,

 les gratifie de ma présence, de mes frôlements velours,

de ma reconnaissance entière.

Ils m’offriront un jour des jardins,

des souris un peu bêtes,

bref un p’tit paradis, une terre verte et chaude,

 aux quatre coins de laquelle,

des coussins en velours,

 douillets et chauds me seront destinés !

Un vrai pacha.

 

 

 

 

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Du chaos naissent les étoiles.

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris qu’en toutes     circonstances, j’étais à la bonne place, au bon moment. Et alors,     j’ai pu me relaxer. Aujourd’hui je sais que cela s’appelle… l’Estime de soi.

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai pu percevoir     que mon anxiété et ma souffrance émotionnelle n’étaient rien d’autre qu’un signal lorsque je vais à l’encontre de mes convictions. Aujourd’hui je sais que cela s’appelle… l’Authenticité.

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de vouloir une vie     différente et j’ai commencé à voir que tout ce qui m’arrive contribue à ma croissance personnelle. Aujourd’hui,je sais que cela s’appelle… la Maturité. 

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai commencé à     percevoir l’abus dans le fait de forcer une situation ou une personne, dans le seul but d’obtenir ce que je veux, sachant très bien que ni la personne ni moi-même ne sommes prêts et que ce n’est     pas le moment… Aujourd’hui, je sais que cela s’appelle… le Respect. 

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de chercher à avoir     toujours raison, et je me suis rendu compte de toutes les fois où je me suis trompé.

     

    Aujourd’hui, j’ai découvert …     l’Humilité. 

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de revivre le     passé et de me préoccuper de l’avenir. Aujourd’hui, je vis au présent, là où toute la vie se passe. Aujourd’hui, je vis une seule journée à la fois. Et cela s’appelle…la     Plénitude.

     

    Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai compris que ma tête pouvait     me tromper et me décevoir. Mais si je la mets au service de mon coeur, elle devient une alliée très précieuse ! Tout ceci, c’est … le Savoir vivre. Nous ne devons pas avoir peur de nous     confronter.

     

    Du chaos naissent les étoiles.

     

                                                                                 Charlie Chaplin

   

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EUROPE

Stéphane Hessel (Berlin, 1917)
Né allemand, acquiert la nationalité française en 1937. S’engage dans les Forces françaises libres. Devient diplomate et haut représentant de la France.
« De cette France revendiquée j’adopte les institutions et les multiples aspects de l’héritage culturel et historique : non seulement la Révolution de 1789 et la Déclaration des droits de l’homme, mais encore la valorisation sans cesse renouvelée de l’intelligence et de la tolérance, de la lucidité et du respect de l’autre : Montaigne, Pascal, Voltaire, Georges Sand ; la conquête des libertés modernes : Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Apollinaire ; la profonde clarté d’une langue analytique, articulée, précise. »
(« Danse avec le siècle », par Stéphane Hessel, Seuil, 1997, p. 39)

Rainer Maria Rilke (Prague, 1875-1926)
Poète autrichien de langue allemande. secrétaire de Rodin.
« Oui, j’aime écrire en français, quoique je ne sois jamais arrivé à écrire cette langue (qui plus que toute autre oblige à la perfection, puisqu’elle la permet) sans incorrections et même sans d’insidieuses fautes… Je me rappelle qu’une des premières raisons de me passer une poésie française fut l’absence de tout équivalent à ce délicieux mot : Verger. »
(Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Editions Richelieu-Senghor, 1988, p. 102)
« Quelle joie que de pouvoir confier à une langue aussi consciente et sûre d’elle-même, une sensation vécue, et de faire en sorte qu’elle introduise en quelque manière dans le domaine d’une humanité générale… Elle académise, si j’ose m’exprimer de la sorte, la contribution frappée à sa marque et déversée en elle, et lui donne ainsi l’aspect d’une noble chose comprise. »
(Extrait de « Vergers », Gallimard, 1926)

John Brown (Angleterre)
Poète anglais et critique éminent. Auteur en français d’une remarquable histoire des lettres américaines.
« Je sais qu’au début, émerveillé, je maniais le français avec l’insouciance et l’audace d’un alpiniste débutant, qui se balance sur les abîmes sans penser aux dangers. Tout était permis : Je me trouvais dans un nouveau pays où je ne connaissais personne, où personne ne me connaissait. Les contraintes de ma langue natale disparaissaient. Je pouvais sauter, danser, marcher sur la tête, je ne craignais ni le ridicule ni l’extravagant. J’étais l’enfant qui tambourine sur un antique clavecin, le barbare qui pille joyeusement les temples millénaires. »
(Revue internationale de culture française)

Julia Kristeva (Bulgarie)
Professeur à Paris VII. Epouse de Philippe Sollers. Auteur de « Etrangers à nous-mêmes » (Folio, 1988).
« Ecrire en français, ce fut me libérer. Geste matricide. Quitter l’enfer : cette langue est devenue mon seul territoire. Désormais, je ne rêve plus qu’en français. »
(André Brincourt)

Michel del Castillo (Madrid, 1933)
A fui l’Espagne franquiste, en 1953, pour Paris. Romancier célèbre et chrétien engagé.
« C’est vrai que j’ai eu beaucoup de mal avec l’Espagne, mais maintenant cela va beaucoup mieux. Je suis en fait assez content de ma position, être un écrivain français d’origine espagnole me permet d’avoir une certaine distance vis-à-vis des deux pays. »
(Entrevue, dans Vers l’Avenir, Namur, 18 août 1997)

Jorge Semprun (Madrid, 1913)
Emigré à Paris, en 1936. Déporté à Buchenwald. Ministre en Espagne après Franco.
« Nous avions la passion que peuvent avoir des étrangers pour la langue française quand celle-ci devient une conquête spirituelle. Pour sa possible concision chatoyante, pour sa sécheresse illuminée… L’ espagnol est une langue très belle, mais qui peut devenir folle et grandiloquente, si on lui lâche la bride. Cioran parlait du français comme d’une langue de discipline. Je le crois, le français m’aide à maîtriser mon espagnol. »

Jan Baetens
Critique et poète flamand
« En choisissant librement le français, je cherche aussi à maintenir vivante la tradition de liberté du français, langue et culture des lumières dont il est nécessaire de rappeler l’héritage. J’écris en français pour me libérer de mes particularités trop partisanes, de tout ce qui me limite, des préjugés, des idées trop vite faites, des certitudes trop commodes à porter. »
(Carte blanche, extraits. Le Carnet et les Instants, novembre 1998- - janvier 1999)

Marie Gevers (Edegem, 1883-1975)
Romancière flamande intimiste de grand renom.
« J’ai reçu le français comme instrument familier et bien aimé. Je n’ai pas choisi cette langue. Je me trouve au point de jonction des deux cultures. Et ces deux routes se joignent dans mon cœur. »
(Marie Gevers et la nature, par Cynthia Skenazi, Palais des Académies, 1983, p. 81).

Emile Verhaeren (Saint Amand, 1856-1916)
Etudes au Collège jésuite de Gand (en français) avec Georges Rodenbach. Figure dominante de la littérature belge de langue française. Chantre de la Flandre.
« La plus solide gloire de la langue française, c’est d’être le meilleur outil de la pensée humaine ; c’est d’avoir été donnée au monde pour le perfectionnement de son sentiment et de son intelligence ; c’est en un mot, d’être faite pour tous avant d’appartenir à quelqu’un. Ah ! Si un jour il se pouvait faire que toute la force et tout le cœur et toute l’idée et toute la vie des Européens unis s’exprimassent en elle avec leur infinie variété d’origine et de race… »
(Revue internationale de culture française)

Vassilis Alexakis Grèce) 1944
Partage sa vie entre Athènes et Paris. Prix Médicis 1995 pour « La langue maternelle ».
« Nous sommes les enfants d’une langue. C’est une identité que je revendique. J’écris pour convaincre les mots de m’adopter. »
(« La langue maternelle », Fayard, 1995)

Jean Moreas (né Papadiamantapoulos, Athènes, 1856-1910
Amoureux de la France. Prince de l’école symboliste.
« Mon père voulut m’envoyer étudier en Allemagne. Je me révoltai. Je voulais voir la France. Deux fois je me sauvai de mon foyer et pus enfin gagner Paris. Le destin m’a montré la route –mon étoile me guidait- pour que je devienne le plus grand des poètes français. »
(Revue internationale de culture française)

Samuel Beckett (Dublin, 1906-1990)
Ecrivain de langue anglaise qui s’est imposé par son théâtre en langue française. Prix Nobel de Littérature.
« Son bilinguisme anglais-français lui permet d’assurer à sa pensée une équivalence d’expression dans chacune des langues qui lui sont également familières… Le langage ne compte pas d’abord en tant que porteur d’idées, ce sont les mots, quoique imparfaits, chacun d’eux pris séparément et en même temps dans ses rapports avec les autres, qui isolent l’idée pour la mettre en valeur, soit prononcée, soit suggérée, soit très sous-jacente. »
(Louis Perche dans « Beckett », Le Centurion, 1969, p. 118-119)

Carlo Coccioli (Livourne, 1920)
Emule de Bernanos, auteur du roman « Le Ciel et la Terre ».
« Disons que je sens en italien et que je parle en français. »
(dans « La Voix au cœur multiple »)

Emmanuel Lévinas (Kaunas, Lituanie, 1905-1995)
Philosophe d’origine juive. A élaboré en français sa phénoménologie.
« J’ai souvent pensé que l’on fait la guerre pour défendre le français, c’est dans cette langue que je sens les sucs du sol. »
(Le Monde, 19 janvier 1996)

Oscar Vladislas de Lubicz-Miloz (Czereïa, Biélorussie, 1877- Fontainebleau, 1939)
Prince balte, grand poète français. Auteur d’un chef-d’œuvre : Miguel Manara.
« Honneur à la France, pays de cristal, patrie de la pure raison. »
(dams « Milosz, par Armand Godoy, Fribourg, 1944, p. 207)

Marel Halter (Varsovie)
D’origine juive. Rescapé des camps d’extermination.
« C’est en France, plus tard, dans cette France réelle que j’ai découverte à l’âge de quatorze ans, que j’ai appris la liberté en même temps que le français. C’est pourquoi, bien que parlant plusieurs langues, je ne peux écrire, pleurer, rire ou rêver qu’en français. Seule langue dans laquelle je n’ai connu aucune oppression. »
(« Contacts », Paris, janvier 1996-décembre 1997)

Emil Michel Cioran (Raschinari-Sibiu, Roumanie, 1911-1995).
En France depuis 1937. Devenu chef de file de la pensée française.
« La langue française m’a apaisé comme une camisole de force clame un fou. Elle a agi à la façon d’une discipline imposée du dehors, ayant finalement sur moi un effet positif. En me contraignant, et en m’interdisant d’exagérer à tout bout de champ, elle m’a sauvé. Le fait de me soumettre à une telle discipline linguistique a tempéré mon délire. Il est vrai que cette langue ne s’accordait pas à ma nature, mais, sur le plan psychologique, elle m’a aidé. Le français est devenu par la suite une langue thérapeutique. Je fus en fait moi-même très surpris de pouvoir écrire correctement en français, je ne me croyais vraiment pas capable de m’imposer une telle rigueur. Quelqu’un a dit du français que c’est une langue honnête : pas moyen de tricher en français. L’escroquerie intellectuelle y est quasi impraticable. »
(« Itinéraires d’une vie », par Gabriel Lûceanu.)

Eugène Ionesco (Slatina, Roumanie, 1912-1994)
Membre de l’Académie française. Consécration mondiale au théâtre avec « La Leçon » et « La Cantatrice chauve ».
« Si je suis citoyen français, c’est que j’ai fait un choix, qu’une patrie avait la priorité. J’ai choisi le pays de la liberté. »

Romain Gary (Moscou, 1914-1980)
D’un père émigré en Pologne. Volontaire de la France libre. Amoureux de De Gaulle. Diplomate français. Deux fois Prix Goncourt avec « Les Racines du ciel » et « La Vie devant soi ». S’est suicidé.
« Je plonge mes racines littéraires dans mon métissage… La France libre est la seule communauté humaine à laquelle j’ai appartenu à part entière. »
(André Brincourt)

Andreï Makine (Novgorod, 1957)
Venu de Russie aux lettres françaises. Pris Goncourt 1995 pour « Le Testament français ».
« Le français de Charlotte avait gardé une extraordinaire vigueur, dense et pure, cette transparence d’ambre qu’acquiert le vin en vieillissant. Cette langue avait survécu à des tempêtes de neige sibériennes, à la brûlure des sables dans le désert de l’Asie, et elle résonne toujours au bord de cette rivière. »
(« Le Testament français », Mercure de France)

Henry Troyat (né Lev Tarassov, Moscou, 1911)
Venu à Paris en 1920. Couvert de prix. Membre de l’Académie française (1959). Beaucoup de romans et de biographies, inspirées par la Russie.
« Je vivais la moitié du jour à Paris et la moitié du jour à Moscou. J’étais partagé entre le passé et le présent, sollicité, tour à tour, par des fantômes surannés et par des visages vrais et actuels, par une première patrie, lointaine, inaccessible, fuyante, et par une seconde patrie, qui bourdonnait autour de moi, me tirait à elle, m’emportait dans un tourbillon. Pendant longtemps, j’avançai, tant bien que mal, un pied sur les nuages russes et l’autre sur la terre ferme française. Puis, l’équilibre se fit, insensiblement, entre ces deux séductions rivales. Je devins Français, tout en conservant une tendresse particulière pour la contrée de rêve dont m’entretenaient mes parents. »
(« Revue internationale de culture française »)

Milan Kundera (Brno, 1929)
Ecrivain français de langue tchèque. Exilé en France. A fini par écrire directement en français (par exemple « Les testaments des trahis »).
« C’était l’occupation russe, la période la plus dure de ma vie. Jamais je n’oublierai que seuls les Français me soutenaient alors. Claude Gallimard venait voir régulièrement son écrivain pragois qui ne voulait plus écrire. Dans ma boîte, pendant des années, je ne trouvais que des lettres d’amis français. C’est grâce à leur pression affectueuse et opiniâtre que je me suis enfin décidé à émigrer. En France, j’ai éprouvé l’inoubliable sensation de renaître. Après une pause de six ans, je suis revenu, timidement, à la littérature. Ma femme, alors, me répétait : La France, c’est ton deuxième pays natal. »

Elie Wiesel (Signhet, Transylvanie, 1928)
Rescapé des camps d’extermination. Parle et écrit quatre langues : yiddish, hébreu, français, anglais. A choisi le français pour langue littéraire parce que c’est la langue qui l’a réconcilié avec le monde et c’est en français qu’il a lu ses deux maîtres : Kafka et Dostoïevski.
« C’est le français qui m’a choisi. »
(Dans « Auteurs contemporains », n° 6, Bruxelles, Didier-Hatier, p., 50


AFRIQUE NOIRE ANTILLES OCEAN INDIEN

Paulin Joachim (Cotonou, Bénin, 1931)
Etudes de journalisme. Directeur de « Bingo ».
« Je me suis enraciné loin dans la langue française pour pouvoir en explorer les profondeurs… et je peux affirmer aujourd’hui que je lui dois tout ce que je suis. »
(« Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Ed. Richelieu Senghor, 1998)

Sony Labou Tansi (Kimwanza, 1947-1995)
Né de père zaïrois, un des écrivains les plus créateurs de l’Afrique noire, notamment au théâtre. Mort du sida.
« On me reproche d’écrire en français, langue de l’acculturation. Une chose me fait sourire : les reproches me sont faits en français et je les comprends mieux comme cela. Cela ne veut, certes, pas dire que je balance la langue kongo par dessus bord pour épouser la belle prisonnière de Malherbe. Le monde actuel est essentiellement fait de métissage. Comment pourrait-il en être autrement ? Je suis Kongo, je parle kongo, j’écris en français. Ma kongolité ne peut pas s’exprimer en dehors de cette cruelle réalité. »

Léopold Sédar Senghor (Joal, 1906)
Père de la négritude, premier président du Sénégal indépendant. Membre de l’Académie française. Un des plus grands poètes français.
« Le français, ce sont les grandes orgues qui se prêtent à tous les timbres, à tous les effets, des douceurs les plus suaves aux fulgurances de l’orage. Il est, tour à tour et en même temps, flûte, hautbois, trompette, tam-tam et même canon. Et puis le français nous a fait don de ses mots abstraits –si rares dans nos langues maternelles- où les larmes se font pierres précieuses. Chez nous, les mots du français rayonnent de mille feux comme des diamants. Des fusées qui éclairent notre nuit. »

René Depestre (Jacmel, Haïti, 1926).
Exilé. Séjour à Cuba. Haut fonctionnaire à l’Unesco.
« De temps en temps il est bon et juste
de conduire à la rivière
la langue française
et de lui frotter le corps
avec des herbes parfumées qui poussent en amont
de mes vertiges d’ancien nègre marron.
Laissez-moi apporter les petites lampes
créoles des mots qui brûlent en aval
des fêtes et des jeux vaudou de mon enfance :
les mots qui savent coudre les blessures
au ventre de la langue française,
les mots qui ont la logique du rossignol
et qui font des bonds de dauphins
au plus haut de mon raz de marée,
les mots qui savent grimper
à la folle et douce saison de la femme,
mes mots de joie et d’enseignement :
tous les mots en moi qui se battent
pour un avenir heureux,
Oui, je chante la langue française
qui défait joyeusement sa jupe,
ses cheveux et son aventure
sous mes mains amoureuses de potier. »
« Bref éloge de la langue française », Haïti, 1980)

Léon Laleau (Port-au-Prince, 1892-1979)
Sa « Musique nègre » date de 1931.
« Ce cœur obsédant, qui ne correspond
Pas à mon langage ou à mes costumes,
Et sur lequel mordent comme un crampon,
Des sentiments d’emprunt et des coutumes
D’Europe, sentez-vous cette souffrance
Et ce désespoir à nul autre égal
D’apprivoiser, avec des mots de France,
Ce cœur qui m’est venu du Sénégal. »
(Dans « Francité », par Joseph Boly, Bruxelles Fondation Plisnier, 1984, p. 36)

Jean Métellus (Jacmel, 1937)
Eloigné de son pays. Neurologue à Paris.
« Je tiens à la francophonie non pas pour une quelconque raison esthétique mais parce que tout le passé d’Haïti a été exprimé dans cette langue. »
(Dans « Florilège »)

Raphaël Confiant (Lorrain, Martinique, 1951)
Appartient à la nouvelle génération des Antillais décolonisateurs de la langue française, avec Patrick Chamoiseau (Prix Goncourt pour « Texaco »). Co-auteur de « Eloge de la créolité ».
« Je suis français. Césaire est français. Mais nous ne sommes pas que français. Je ne peux pas écrire comme un Hexagonal. Je ne crois pas que les canadiens Gaston Miron ou Antoine Maillet soient seulement français, et ce qui est intéressant dans leurs livres, ce n’est pas la Francité mais la Canadianité. »
(André Brincourt)

Edouard Glissant (Bezaudin, Martinique, 1928)
Ecrivain mondialement consacré depuis longtemps. Prix Renaudot pour « La Lézarde » (Seuil, 1958)
« Je crois que la francophonie peut être un lieu de lutte pour l’explosion de toutes les langues, et c’est seulement à ce prix, selon moi, qu’elle aura mérité d’être. »
(Dans « Florilège »)

Jean-Joseph Rabearivelo (Tananarive, 1901-1937)
Poète maudit et déchiré. Auteur des « Calepins bleus ». S’est suicidé en pensant à Baudelaire.
« J’embrasse l’album familial. J’envoie un baiser aux livres de Baudelaire que j’ai dans l’autre chambre –Je vais boire- C’est bu- Mary (sa femme). Enfants. A vous tous mes pensées les dernières –J’avale un peu de sucre –Je suffoque. Je vais m’étendre…
(Dans « La Voix au cœur multiple »)

Jacques Rabemananjara (Maroantsera, 1913)
A grandi à Tananarive. Ecrivain majeur des lettres françaises.
« La langue française est un objet d’amour pour nous… Nous avons été tellement séduits par la langue française que c’est à travers cette langue française que nous avons réclamé notre indépendance… Débarrassée de toute connotation impérialiste et dominatrice, la langue française a été choisie par nous-mêmes pour être un instrument idéal, le véhicule qui nous permet de communiquer aisément avec des millions d’êtres humains et de lancer, de par le monde, notre propre message. »
( « Florilège »)

Raymond Chasle (Brisée-Verdière, Ile Maurice, 1930-1996)
Etudes à Londres. Diplomate de haut niveau. Métis et poète à la manière de Mallarmé et d’Apollinaire.
« La langue française m’a permis de résoudre mes tensions intérieures, de transcender mes écartèlements. Langue de toutes les succulences et de toutes les résonances, elle est, pour moi, le support privilégié de la mémoire, de la connaissance et du combat. »
( « Florilège »)


MONDE ARABE

Jean Amruche (Kabylie, 1906-1962)
Poète et essayiste. Se voulait être un pont entre les communautés algérienne et française.
« Ses rigueurs (du français) satisfont un besoin essentiel de mon esprit. Sa souple, sévère, tendre et quasi insensible mélodie, touche, éclaire, émeut mon âme jusqu’au fond. »
(Le Figaro littéraire, 13 avril 1963)

Mohamed Dib (Tlemcen, 1920)
Romancier et poète. regard lucide sur le monde et les siens.
« (Le français), c’est le véhicule idéal d’une pensée qui cherche, à travers les réalités locales, à rejoindre les préoccupations universelles de notre époque. »
(« Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Ed. Richelieu-Senghor, 1988)

Tahar Djaout (Algérie, 1954-1993)
Prix Méditerranée 1991. Assassiné à Alger, le 2 juin 1993.
« L’écrivain n’use-t-il pas inévitablement d’une langue différente, d’une langue de l’étrangeté… empruntant les détours d’une langue non natale, aller plus loin dans l’exil et, partant, dans l’aventure. »
(« La Quinzaine littéraire », Paris, 15 mars 1985)

Assiaz Djebar (Cherchel, 1936)
Romancière et cinéaste.
« Il y a un pont à établir… du français conceptuel à l’arabe luxuriant, il y a quelque écho commun, mais si fragile, si secret… une fluidité, une coulée qui est à la fois française et arabe. »
(Dans « La Voix au cœur multiple ») + Anth. Nathan (p. 376-7)

Malek Haddad (Constantine, 1927-1978)
Poète et romancier. déchiré de ne pouvoir écrire en arabe.
« Je suis en exil dans la langue française. Mais des exils peuvent ne pas être inutiles et je remercie sincèrement cette langue de m’avoir permis de servir ou d’essayer de servir mon pays bien aimé. »
( « Florilège »)

Mouloud Mammeri (Kabylie, 1917-1989)
De sa langue maternelle berbère au roman français. Auteur de « La Colline oubliée » (1952). Mort accidentelle.
« Le français n’est pas ma langue maternelle. J’ai eu bien du mal à apprendre l’imparfait du subjonctif antérieur. Or si je veux m’exprimer, je ne peux le faire que dans cette langue. On peut être nationaliste algérien et écrivain français. Je crois, d’ailleurs, qu’avec l’indépendance, la langue française prendra un nouvel essor. Elle ne sera plus l’instrument d’une coercition, la marque d’une domination. Elle sera le canal de la culture moderne. Pour moi, je n’envisage pas d’écrire jamais dans une autre langue. »
(Le Figaro littéraire », 31 décembre 1955 et « Témoignage chrétien », 24 janvier 1958)
« La langue française est pour moi un incomparable instrument de libération, de communion ensuite avec le reste du monde. Je considère qu’elle nous traduit infiniment plus qu’elle nous trahit. »
(« France Information », n° 122, Paris, 1984)

Khalida Messaoudi
Pour elle, comme pour beaucoup d’autres, la résistance au terrorisme islamique en terre d’Algérie se fait d’abord en langue française.
« Bien sûr, j’avais déjà étudié Nedjma (de Kateb Yacine) sans le comprendre vraiment. J’ai écouté cet homme (Guenzet) parler dans un français exceptionnel et nous lancer : « Le français, c’est un butin de guerre . » Pour la première fois, je me suis mise à réfléchir en français, mais plus comme à la langue donnant accès aux textes de littérature ou de philosophie. Je m’interrogeais sur son statut en Algérie. Je me suis rendu compte que Kateb –comme Mouloud Mammeri ou Mohamed Dib et d’autres- l’avait utilisé, lui, comme arme de combat contre le système colonial, comme arme de conceptualisation. Dès lors je ne trouvais plus seulement naturel de parler français, je me disais : « C’est génial, je suis en train de me l’approprier comme un instrument. Jamais je ne laisserai tomber ça. » Vois-tu, c’est cette Algérie-là pour laquelle je me bats, une Algérie où il est possible d’être en même temps berbérophone, francophone et arabophone, de défendre le meilleur des trois cultures. Le message de Guenzt se trouvait dans cette vérité, et ma mémoire l’a enregistré pour toujours. »
(« Une Algérienne debout », Flammarion, 1995, coll. J’ai lu, p. 81-82)

Kateb Yacien (Constantine, 1929-1989)
D’une renommée internationale avec « Nedjma » (1956) au théâtre en langue arabe.
« La plupart de mes souvenirs, sensations, rêveries, monologues intérieurs, se rapportent à mon pays. Il est naturel que je les ressente sous leur forme première dans ma langue maternelle. Mais je ne puis les élaborer, les exprimer qu’en français. Au fond, la chose est simple : mon pays, mon peuple sont l’immense réserve où je vais tout naturellement m’abreuver. Par ailleurs, l’étude et la pratique passionnées de la langue française ont déterminé mon destin d’écrivain. Il serait vain de reculer devant une telle contradiction car elle est précieuse. Elle consacre l’un de ces mariages entre peuples et civilisations qui n’en sont qu’à leurs premiers fruits, les plus amers. Les greffes douloureuses sont autant de promesses. Pourvu que le verger commun s’étende, s’approfondisse, et que les herbes folles franchissent, implacables, les clôtures de fer. »
(« Revue internationale de culture française »)

Tahar Ben Jelloun (Fès, 1944)
Immense écrivain international. Poète, romancier et essayiste. Pris Goncourt (« La Nuit sacrée »). Chroniqueur au « Monde ».
« Qu’importe l’encre, la couleur des mots, le regard des mots ; et si ces mots sont de France, ils viennent de toutes les langues françaises que nous écrivons ici et ailleurs. »

Héli Béji (Tunisie, 1948)
« Une langue n’est jamais neutre, fut-elle de naissance ; elle n’est qu’une traduction étrange de l’intensité de la réalité. »
« La Quinzaine littéraire, Paris, 16 mars 1985)

Abdelwahab Meddeb (Tunisie, 1946)
« Faire pénétrer dans la langue française une respiration sémitique spécifique… décentrer la langue française, lui insuffler un expir arabe, de quoi lu donner des accents inouïs, inattendus, imprévus. »

Albert Memmi (Tunis, 1920)
Vit à Paris. Psycho-sociologue et romancier. (« La statue de sel », 1953).
« J’essayais de prononcer une langue qui n’était pas la mienne, qui, peut-être, ne la sera jamais complètement, et pourtant m’est indispensable à la conquête de toutes mes dimensions. »
( « La Voix au cœur multiple »)

Abdelaziz Kacem (Bennane, Tunisie, 1933)
Agrégé d’université, critique, écrivain bilingue.
« J’ai expliqué que l’arabe et le français étaient pour moi l’endroit et l’envers d’une même étoffe, que l’une des deux langues était ma mère et l’autre ma nourrice, ce qui fit de moi pour Villon un frère de lai. »

Hector Klat (Alexandrie, 1888-1977)
Un des précurseurs, avec Charles Corm, dans l’expression littéraire libanaise.
« Mots français mots du clair parler de doulce France ;
Mots que je n’appris tard que pour vous aimer mieux.
Tels des amis choisis au sortir de l’enfance ;
Mots qui m'êtes entrés jusqu’au cœur par les yeux. »
(« Le Cèdre et les lys », 1934, couronné par l’Académie française)

Georges Schéhadé (Beyrouth, 1910-1989)
Une des grandes voix des lettres françaises en poésie et au théâtre.
« Tout petit, j’avais le goût des mots, j’étais en dixième, je crois, quand j’ai entendu pour la première fois le mot « azur », j’ai trouvé ça « extraordinaire »… « azur »… je l’ai emporté avec moi dans mon cartable. »
(Entrevue dans « Le Monde », par Claude Sarraute, 26 novembre 1967)

Salah Stétié (Beyrouth, 1929)
Grand prix de la francophonie 1995.
« Miracle de ceux-là qui viennent au français avec leur arabité ou leur négritude, leur asiatisme ou leur insularité, leur expérience autre de l’Histoire et du monde, leurs autres mythologies, avec leurs dieux ou leur Dieu, salés par les océans qui ne sont pas les mers frileuses d’ici, mers d’Europe bordant le plus grand pourtour de l’Hexagone. Ils savent ceux-là que le français, langue des Français, n’est pas, n’est plus le trésor des seuls Français. »
(André Brincourt)

Vénus Koury-Ghata (Beyrouth, 1937)
Inspiration poétique et expérience de femme.
« Le français est pour moi un compagnon fidèle, clef des fantasmes, gardien contre les dérapages et la solitude dans un pays qui n’est pas le mien. L’Arabe, c’est l’autre, drapé de mystère. Il emprunte ma plume… Il revient quand bon lui semble, entre les lignes, au détour des pages. Ses passages sont fugaces. »
(André Brincourt)

Amin Maalouf (Beyrouth, 1949)
Une des voix qui montent en France et recueillent tous les suffrages. Auteur des « Identités meurtrières » (Paris, Grasset, 1998)
« Le fait d’être chrétien et d’avoir pour langue maternelle l’arabe, qui est la langue sacrée de l’Islam, est l’un des paradoxes fondamentaux qui ont forgé mon identité… Je bois son eau et son vin, mes mains caressent chaque jour ses vieilles pierres, jamais plus la France (où il vit depuis l’âge de 27 ans) ne sera pour moi une terre étrangère. »

Andrée Chédid. (Le Caire, 1920)
Vit en France par choix. Y brille par sa poésie. Formée en partie à l’Université américaine. Premier poème en anglais.
« Par choix, par amour de cette cité (Paris). Sa pulsation, sa liberté, sa beauté m’ont marquée très jeune d’une manière indélébile. »
(Dans « Questions de français vivant », n° 4, Bruxelles, 1984)

Albert Cossery (Le Caire, 1913)
Vit à Paris depuis 1945. N’a jamais demandé la nationalité française. Décrit une Egypte marginale.
« Je n’ai pas besoin de vivre en Egypte ni d’écrire en arabe. L’Egypte est en moi, c’est ma mémoire. »
(André Brincourt)

Georges Dumani (Egypte, 1882)
Fondateur de l’hebdomadaire « Goha ».
« C’est qu’ici et là on aime la fine clarté, l’intelligence compréhensive, l’ordonnance rythmée de la pensée et du style, l’enchâssement harmonieux des mots dans le tissu des phrases : c’est qu’ici et là –quelle que soit la diversité du génie et de la race- on a le goût de la vérité, le sens de l’ironie et le culte de la tendresse. »
(Dans « L’Egypte, passion française », par Robert Solé, Seuil, 1997, p. 234)

Edmond Jabès (Le Caire, 1912-1991)
Grande notoriété dans la littérature française contemporaine. Quitte l’Egypte à l’arrivée de Nasser, en 1957.
« Mon attachement à la France date de mon enfance et je ne pouvais m’imaginer habitant ailleurs. »
(Dans « Questions de français vivant »)

Elian J. Fibert (Jaffa, 1899-1977)
A chanté les animaux et son pays, Israël. Grand Prix Princeton pour l’ensemble de son œuvre.
« Voici des Musulmans, des Arméniens, des Juifs, des Syriens et bien d’autres. Familles d’esprit aux contrastes et aux oppositions innombrables, mais qui se sont pliés à une même règle et ont accepté une discipline semblable, celle de la langue et de la culture françaises. Peut-être, cette langue et cette culture, touchent-elles en moi ce que nous avons en commun, nous autres riverains de la Méditerranée, je veux dire le goût pour les idées pures, pour la raison. »
(« Revue internationale de culture française »)

Naïm Kattant (Bagdad, 1928)
Né dans la communauté juive de Bagdad. Emigré au Québec, en 1954. Chef de service des lettres et de l’édition des Arts du Canada.
« Si, à vingt-cinq ans, j’ai choisi Montréal comme nouvelle patrie, c’est qu’on y parle français. Aussi, à travers les civilisations, j’adopte une langue et un pays autres que les miens et je garde mon nom. Je ne subis pas mon destin et ma mémoire, je les accepte et je signe mon nom. »
« Le Repos et l’Oubli », essai, Québec, Méridiens Klincksieck, 1987, p. 121 et 196)

André Chouraqui (Aïn Temouchent, Algérie, 1917)
Résistant en France. Maire adjoint à Jérusalem. Traducteur de la Bible et du Coran en français, « une lecture décloisonnée, non confessionnelle » qui, grâce aux « libertés que permet l’éclatement actuel de la langue française, abolit les frontières et lance un pont entre des religions et des confessions fondées sur les réalités essentielles ».
« Ma langue maternelle, avant l’hébreu, était l’arabe. Nous ne parlions que cette langue, qui fut celle de nos plus grands théologiens, dans notre maison, comme dans les rues animées par nos jeux. »
Dans « Le Journal d’un mutant » par Joseph Boly, CEC, Bruxelles, 1987, p. 89)


AMERIQUE – ASIE

Julien Green (Paris, 1900)
Ecrivain américain de langue française. Un monument de notre littérature.
« Ma vraie personnalité ne peut guère s’exprimer qu’en français ; l’autre est une personnalité d’emprunt et comme imposée par la langue anglaise (et pourtant sincère, c’est le bizarre de la chose). Cette personnalité d’emprunt, je ne puis la faire passer en français que fort ma-laisément : elle ne semble pas tout à fait vraie. »
(« Journal » (1943-1945), Plon, 1949, p. 160, 16 sept. 1944)

Hector Biancotti (1930)
Argentin d’origine italienne. Venu en France, à Paris (1963) pour être écrivain français. Membre de l’Académie française. Chroniqueur au « Monde ». Premier roman en français « Sans la miséricorde du Christ » (Gallimard, 1985).
« J’entends les nuances du français, c’est une langue plate, très uniforme au point de vue de l’accent, mais il a la richesse des diphtongues et des différents « e » aigu, accent grave, et cette mystérieuse richesse qui est le « e » muet. Il faut que la phrase soit bien balancée. Pas toutes. On apprend, en écrivant beaucoup de pages, qu’il ne faut pas tomber dans la mélopée. Il faut casser le rythme. Vous avez cédé pendant vingt lignes à la phrase longue et à la mélopée, alors il faut tout à coup faire des phrases courtes. Certains appellent ça la technique. C’est comparable à la musique. »
« Le Magazine littéraire », septembre 1995)

Adolfo Costa du Rels (Corse, 1891)
Romancier et auteur dramaturge bolivien. Ecrivain bilingue.
« Je t’ai donné une culture française afin de perpétuer dans notre famille une tradition qui est une sorte de patrie mentale. Je vous passe le message de mon père. » (à son fils).
(« Revue internationale de culture française »)

Armand Godoy (La Havane, 1880-1964)
A changé de langue à quarante ans pour devenir poète français dans la langue de Baudelaire.
« Depuis que je t’ai découvert
Ton livre jamais ne me quitte
Il vit en moi, toujours ouvert,
Comme un missel de cénobite. »
(« Stèle pour Charles Baudelaire »)

Ventura Garcia Calderon (Paris, 1887-1959)
Né péruvien, à Paris. Fut ministre du Pérou. Ecrivit dans les deux langues en cultivant un grand amour pour la France.
« Me suis-je trompé avec tant de spectateurs universels en venant ici à vingt ans, orphelin ingénu, comme le pauvre Gaspard de Verlaine, prendre place dans ce que l’ancêtre Calderon appelait « le grand théâtre du monde » ? Tout le problème de la culture française et des origines de son génie se posait naturellement à moi. pendant que des soldats nocturnes dévalisaient la France, je faisais, sans pouvoir dormir, l’inventaire de son génie. »
(« Cette France que nous aimons », Paris, Editions H. Lefèbvre, 1942)

Nguyeng tien Lang (Nord, 1909-1976)
Prisonnier du Viêt-Minh (1945-1951). « Les Chemins de la révolte » (1953).
« C’est dans nos fibres les plus profondes que cette empreinte de la France nous a marqués pour toujours, et pourtant nous restons encore et toujours nous-mêmes ; ou, pour ainsi parler, ni tout à fait nous-mêmes, ni tout à fait français ! C’est cela qu’on appelle la synthèse ! Si c’est cela, c’est bien doux à certaines minutes, mais c’est très souvent déchirant. »
(Dans « La Voix au cœur multiple »)

Vo Long-Tê (Sud, 1927)
Ecrit en vietnamien et en français. Baptisé catholique en 1952. Interné en 1975-1977. Au Canada depuis 1991. Traducteur de Paul Claudel. Admirateur de Rimbaud et du poète lépreux Han-Mac-Tu. A servi la poésie française qui lui a permis de rester lui-même dans l’épreuve.
« Reverrai-je bientôt ma lointaine patrie ?
Elle est toujours en moi durant toute ma vie,
Attachée à jamais à la vietnamité. »
(« L’Univers sans barreau », 1991)

A ces auteurs qui se sont exprimés, il conviendrait d’ajouter tous les autres, innombrables, et de plus en plus nombreux, ces dernières années.
Laissons de côté les écrivains d’Afrique noire, des Antilles et de l’Océan Indien ainsi que ceux du Monde arabe et de l’ancienne Indochine, ils sont légion. Nous ne pouvons que renvoyer aux anthologies et histoires littéraires.
Certains pays non francophones et non colonisés par la France entretiennent une littérature presque continue en langue française. C’est le cas de :

Flandre : Charles de Coster, Michel de Ghelderode, Georges Eechoud, Max Elskamp, Franz Hellens, Werner Lambersy, Maurice Maeterlinck, Françoise Mallet-Joris, Félicien Marceau, Camille Melloy, Jean Ray, Charles Van Lerberghe, Liliane Wouters, Pau Willems .

Roumanie : Constantin Amarui, Princesse Bibesco, Adolphe Cantacuzène, Comtesse Anna de Noailles, Petru Dimitriu, Mircea Eliade, Benjamin Fondane, Virgil Gheorghiu, Luca Gherasim, Isidore Isou, Panaït Istrati, Tristan Tzara, Hélène Vacaresco, Horia Vintila, Ilarie Voronca.

Russie : Arthur Adamov, Victor Alexandrov, Nelle Bielski, Alain Bosquet, Hélène Carrère d’Encausse, Christian Dédeyan, Georges Govy, Joseph Kessel, Zoé Oldenbourg, Nathalie Sarraute, Boris Schriber, Elsa Triolet, Vladimir Volkoff, Vladimir Weidké.

Grèce : Alfred Cohen, André Kedros, Gisèle Prassinos, C.P. Rodocanouchi, Georges Spyridaki, Nikos Zazantzaki.

Italie : Louis Calaferte, Gabriele d’Annunzio, Lanza Del Vasto, Geneviève Genari.

Espagne : Arrabal, Salvador de Madiaraga, Luis de Villalonga, Picasso.

Egypte : Amouar Abdel Marek, Albert Adès, Faouzia Assad, Georges Cattauï, Georges Henein, Albert 
Josipovicci, Joyce Mansour, Filippo Marinetti, Out El-Kouloub, Robert Solé, Gaston Zananiri.

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Face aux urgences

 

Soliloque

S'agissant de philosophie,

J'accepte, dans l'indifférence,

Mon évidente incompétence.

À ma saine raison, me fie.

J'accepte dans l'indifférence.

De paroles, peu me soucie.

À ma saine raison, me fie,

Voir ce qui a de l'importance.

De paroles, peu me soucie,

Qui ne sont que vaines errances.

Voir ce qui a de l'importance;

Tant de crucifiés balbutient!

Qui ne sont que vaines errances.

Je soliloque et simplifie.

Tant de crucifiés balbutient,

Dans l'horreur et dans le silence.

Je soliloque et simplifie.

Ô le courage en cas d'urgence!

Dans l'horreur et dans le silence,

Qu'apporte la philosophie?

Ô le courage en cas d'urgence!

Des demi-dieux se sacrifient,

Qu'apporte la philosophie,

Dans le chaos et la souffrance?

21 juin 2013

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Était-ce réellement un homme ?

12272863277?profile=originalElle était au bar, à peine reconnaissable, était-ce un homme ? On aurait dit un garçon, elle avait une veste en nylon ton vert, modèle masculin et une casquette assortie. 

Elle fréquentait les bars populaires et voulait se noyer dans le public probablement pour entendre les conversations d'hommes, écouter les discussions entre-mecs !

J'avais remarqué sa féminité grâce à quelques tresses perdues et mélangées à sa capuche. 

C'était bien une femme, une métisse. En faisant un peu plus attention, on devinait de jolies courbes au niveau de son bassin. 

A hauteur de son pull, on pouvait distinguer une certaine proéminence, attrayante d'ailleurs. J'avais raison, c'était bien une femme, une femme sublime.

Quelque chose brillait dans l'obscurité, je me suis approché discrètement et j'ai été surpris de découvrir de magnifiques boucles d'oreilles, elles étaient sûrement importées du pays.

Mon blog : http://textesdeben.skynetblogs.be/archive/2013/01/25/une-certaine-proeminence-au-niveau-de-son-pull.html

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Deux petits chaussons Charlie Chaplin

Ecoutez cet air C'est l'histoire banale De ce ver de terre
Amoureux d'une étoile. Histoire d'enfant Qui souvent fait pleurer
Les grands


Deux petits chaussons de satin blanc
Sur le cœur d'un clown dansaient gaiement
Ils tournaient, tournaient, tournaient, tournaient
Tournaient toujours
Plus ils tournaient, plus il souffrait du mal d'amour
Deux petits chaussons et par dessus
Les plus jolis yeux que l'on ait vus
Sous de longs cheveux légers, légers
Et qu'il était bien obligé d'aimer

Le nez vermillon Le chapeau sur la tempe
Comme un papillon Sous les feux de la rampe
Le soir, il jouait Mais tandis que les gens
Riaient ...


Deux petits chaussons de satin blanc
Sur le cœur d'un clown dansaient gaiement
Ils ont tourné, tourné, tourné qu'un soir d'été
Le cœur du clown trop essoufflé s'est arrêté
Deux petits chaussons de satin blanc
Sur le cœur d'un clown dansaient gaiement
A vingt ans, l'on ne sais pas toujours
Que même un clown, ça peut mourir d'amour

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Un mauvais génie

 

Certes déconcertée. Devrais-je m'inquiéter?

Alors que j'écrivais, surtout pour me distraire,

Plongée dans le silence, sereine, solitaire,

J'entendis un fracas qui me fit sursauter.

Rien de suspect dans mon espace où ma vue erre.

Je vais d'où vint le bruit et je vois, aussitôt,

En une quantité de tout petits morceaux,

Brisé, un bel abstrait que j'avais peint sur verre.

Il avait une place, en vue, sur un buffet.

Bien calé et soudain, je le retrouve à terre,

Arraché violemment d'une haute étagère.

Or, je sais que sans cause, il n'y a point d'effet.

Il eut vraiment fallu qu'un vandale jaloux

Le prît entre ses mains afin de le détruire.

Nombreux croient aux génies qui se plaisent à nuire,

Et ont même, dit-on, rendu des hommes fous.

 

24 janvier 2013

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ETONNAMMENT !

Le sourire en hiver est plus beau qu'en été

Il semblerait qu'il gagne en efficacité!

Quand l'arbre dénudé étincelle au soleil

Il est nimbé d'un charme, à nul autre pareil!

De désirs et rancunes, l'âme s'étant vidée...

Coule pellicule de roses, sur une vie écorchée!

De l'imagination, naquit un jour la chance

Qui aime à se frotter aux ailes de la démence!

En sa maturité, l'artiste peut trouver...

Des accents juvéniles, nos sens sont étonnés!

Il flotte dans son regard des rêves inassouvis...

Qui prendront contenance à nos yeux éblouis!

J.G.

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Pierre Reverdy," Sans savoir où"

reverdy x picasso

Pierre Reverdy par Pablo Picasso

      

Les nuages au fond cachaient déjà le ciel. Le soleil naissait à l'horizon. Et de l'autre côté les étoiles tombaient une à    une dans un fossé couvert. Les fleurs s'illuminaient alors de chaque couleur déjà connue. Et les feuilles tremblaient. Il marchait sur le bord du talus, le dos courbé. D'un pas timide sans qu'on    pût voir derrière lui d'où venait sa crainte.

      

Le coup de vent qui passa alors l'aurait bien fait tomber comme il courbait les arbres. Mais ses pieds tiennent aussi au    sol. Il marche. Et dans le soir qui tombe, vers la montagne et les bois où il est plus épais, il avance.

      

C'est peut-être seulement son ombre qu'il poursuit.

      

(Pierre Reverdy, "Sans savoir où", in La balle au bond, 1928)

      

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René Magritte

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Ce samedi 26 janvier à 12 h 

En collaboration avec les Archives & Musée de la Littérature, et dans le cadre de l’exposition Elskamp, enfin… 

À la rencontre de Max Elskamp 
Portrait de l’oeuvre 


par Marc Quaghebeur, poète et écrivain 
et directeur des Archives &Musée de la littérature 
Lectures par Frédéric Dussenne, comédien 


La poésie de Max Elskamp brille comme un soleil voilé dans le ciel de la Belgique fin-de-siècle. 
Eclat des sonorités claires, musicales, aériennes. Vers taillés comme des comptines populaires, à murmurer à mi-voix. 
Depuis Villon, la langue française n’avait plus connu ni ce cristallin ni ce désespoir. 

Plus de quatre-vingts ans après sa disparition, l’ombre mélancolique de l’ascète reclus dans sa grande demeure anversoise, aux murs austères, étrangement perméables pourtant aux peines laborieuses de la ville, à son souffle marin, à ses joies trop fragiles et ses trop gros chagrins continue de nous hanter, bien au-delà du drame qui le conduira à ces Effigies dans lesquelles le poète à la dérive fige la musicalité qui l’a fait vivre jusqu’alors. 

(Véronique Jago-Antoine et Marc Quaghebeur) 



Bois gravé inspiré d'une photographie de Max Elskamp vu de dos à son bureau (AML)

Librairie Quartiers Latins 
14, Place des Martyrs 
1000 Bruxelles 
www.cfc-editions.be 

Entrée libre. 

Max Elskamp sur le réseau arts et lettres

Ce site est dédié au poète Max Elskamp (1862-1931)   dit l'admirable12272652655?profile=original

Le légendaire portrait dit "au macfarlane" de  Max Elskamp

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A la réserve précieuse de la Bibliothèque de l'ULB;
Le Fonds et la Bibliothèque Max Elskamp
La bibliothèque Max Elskamp fournit une documentation riche, voire unique, sur le symbolisme littéraire et sur les relations littéraires franco-belge entre 1860 et 1900.


Elle révèle la curiosité et la soif de connaissance du poète, et ouvre de multiples domaines: histoire du livre, occultisme, philosophie et psychologie, religions, sciences sociales, folklore et vie sociale, philologie, sciences pures et appliquées - avec un souci particulier pour l'astronomie et la cosmologie - arts, littérature, géographie et histoire. 
Ces collections sont complétées par près de 70 titres de revues littéraires quasi complètes, dont la Jeune Belgique et la Société nouvelle. Cet ensemble permet de reconstituer assez finement l'univers intellectuel du poète, de retrouver, grâce aux nombreuses dédicaces, ses amis et correspondants, de connaître mieux ses centres d'intérêt, de le suivre sur les voies de son imaginaire. 

La bibliothèque Max Elskamp rassemble, dans une atmosphère paisible, la majeure partie du fonds. Certaines pièces remarquables sont présentées sous vitrines: lettres, autographes, bois gravés, ex-libris, volumes dédicacés, documents issus des presses de l'imprimeur Buschmann qui publia les oeuvres d'Elskamp.
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DELIRES ET ERRANCES

Délires et errances en portées, ou emportées, à emporter

 

Creux, crêtes, harmoniques déchaînées sans vieilles dentelles

Vacillent sous les soupirs inquiétants du chef d’orchestre.

La face haletante du do mineur comme dans une forêt obscure,

Entre en transe face au regard envoûtant du fa majeur.

 

La raie Manta quémande la clé de sol à Ré, porteur du soleil.

Aigris, rabougris, racornis, sont les violons de l’automne

Cherchant à prendre le bac sans passion

Qui mène à la rive assombrie du Styx.

 

« Au diable l’enfer » s’écrie Dante,

- Face à la beauté mortelle des grecs

« Il faut Mendelssohn»  lui crie Erato - qu’on entende mieux.

Avant que la vie active ne m’use.

 

Les trolles en transe sont à la masse,

Tous poilus, tous ventrus, dansent autour du feu.

Aum, chantent les vierges éplorées, invoquant la voûte céleste.

Perdues pour perdues, soyons dignes face à l’adversité.

 

Déchiffrée, la partition de Dante symphonie.

Le défi achevé, la harpe se tue

Pour fait de luxure avec le trombone à coulisse.

« C’est l’enfer ici », s’écrie l’alto désœuvré.

 

Un premier violon sent son âme expirer,

Emportant son corps dans l’abîme.

Les seconds violons, transformés en arbres épineux et noueux,

Miaulent des sons hideux incompréhensibles ;

Parade satanique, la nuit sur le Mont Chauve.

 

Le Maestro, cupide comme un pape subjugué

Par la rudesse de la partition, vocifère de douleur

Face à l’illumination du cœur final des femmes.

Une femme apparaît, la « mère »,

Et finalement, Dante s’intègre en la divinité.

 

                                                               Raymond MARTIN

 

 

Délires et errances en portées, ou emportées, à emporter

 

Creux, crêtes, harmoniques déchaînées sans vieilles dentelles

Vacillent sous les soupirs inquiétants du chef d’orchestre.

La face haletante du do mineur comme dans une forêt obscure,

Entre en transe face au regard envoûtant du fa majeur.

 

La raie Manta quémande la clé de sol à Ré, porteur du soleil.

Aigris, rabougris, racornis, sont les violons de l’automne

Cherchant à prendre le bac sans passion

Qui mène à la rive assombrie du Styx.

 

« Au diable l’enfer » s’écrie Dante,

- Face à la beauté mortelle des grecs

« Il faut Mendelssohn»  lui crie Erato - qu’on entende mieux.

Avant que la vie active ne m’use.

 

Les trolles en transe sont à la masse,

Tous poilus, tous ventrus, dansent autour du feu.

Aum, chantent les vierges éplorées, invoquant la voûte céleste.

Perdues pour perdues, soyons dignes face à l’adversité.

 

Déchiffrée, la partition de Dante symphonie.

Le défi achevé, la harpe se tue

Pour fait de luxure avec le trombone à coulisse.

« C’est l’enfer ici », s’écrie l’alto désœuvré.

 

Un premier violon sent son âme expirer,

Emportant son corps dans l’abîme.

Les seconds violons, transformés en arbres épineux et noueux,

Miaulent des sons hideux incompréhensibles ;

Parade satanique, la nuit sur le Mont Chauve.

 

Le Maestro, cupide comme un pape subjugué

Par la rudesse de la partition, vocifère de douleur

Face à l’illumination du cœur final des femmes.

Une femme apparaît, la « mère »,

Et finalement, Dante s’intègre en la divinité.

 

                                                               Raymond MARTIN

 

 

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H I V E R N A L E

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Et la neige à nouveau sur les villes flamandes

Dont les canaux fuyants se perdent dans le noir

Interdit de songer au-delà de l’aimable

- O l’ardeur des vitraux dans tes yeux en amande ! –

 

 

Fourrure col de martre à tes seins étonnants

Et le sel de la mer qui s’enlise et qui vague

Et se mêle aux cheveux de la terre ma douce

Aurait-on raccourci la splendeur des terroirs ?

 

              

La chair évangélique a croisé la carriole

Où turbulent sans fin nos amours à tout va

Cathédrales sonnez aux canaux qui se gèlent

Sur la plaine là-bas vont viennent les corbeaux

 

 

Je ramène le flux des nuits sentimentales

Au plein jour balayé par l’écorce des vents

Contraires tour à tour et novices de l’âme

Les révoltes au loin soulèvent l’horizon

 

 

Viens là figure Mère et racinée à l’âme

Immobiles Passés au tout présent se fondent

Grincent à qui mieux mieux les charnières du temps

Et se ferme le jour au noir définitif

 

 

 (inédit)

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