Quelle belle journée!
C'est la Saint-Valentin,
Moi je t'aime
et tu m'aimes aussi
Quelle belle journée!
C'est la Saint-Valentin,
Moi je t'aime
et tu m'aimes aussi
Je suis resté ton Valentin.
Veux-tu me garder dans ton coeur?
Toi tu es toujours dans le mien.
Chaque langue a des harmonies
Dépourvues de correspondances;
Les traducteurs de poésie
Sont déçus de leur impuissance.
En sonorités étrangères,
Transposés très fidèlement,
Des vers émeuvent, peuvent plaire,
Sans créer d'émerveillement.
On a certainement compris
Ce qui fait notre préférence;
Ce sont des mots jadis appris
Combinés avec élégance.
Traduits certes sans grands problèmes,
Les proverbes exercent un attrait.
Ils ont reçu l'humour qu'on aime
Lors, chacun en use à son gré.
13 février 2014
Les Editions masquées.
Le masque a pris la plume pour écrire aux carnavals,
L’œil percé d’écriture surgie d’un autre monde,
Où l’on tue les énigmes à la fin du festival.
Le masque a pris la plume pour écrire aux carnavals,
Et venger le martyre de l’enfant moribonde,
Succombant sous le talent des traits de la faconde,
Le masque a pris la plume pour écrire aux carnavals,
L’œil percé d’écriture surgie d’un autre monde.
La plume s’est faite épée, a saigné furibonde,
De mots d’un coupe-gorge, exécuté son rival,
Dans le sang de ses écrits, à sa façon immonde,
La plume s’est faite épée, a saigné furibonde.
Sous un vil déguisement s’est enfuie sur son cheval,
Pour glisser dans le jaune et noir du salon médiéval,
La plume s’est faite épée, a saigné furibonde,
De mots d’un coupe-gorge, exécuté son rival.
Claudine QUERTINMONT D’ANDERLUES
Un air de Famille
Mise en scène : Olivier Leborgne
Avec Olivier Cuvellier : Philippe
Marie-Line Lefebvre : La mère
Julien Lemonnier : Denis
Frédéric Lepers : Henri
Cécile Van Snick : Yolande
Stéphanie Van Vyve : Betty
« A force de préciser sa pensée, on en arrive à très peu de mots pour le dire. J’aime beaucoup le dialogue, j’éprouve un vrai plaisir à le faire, à trouver ce qui est le plus juste. La gageure était d’écrire très parlé et de dire des choses. »
Du 11 au 28 février 2014 au Théâtre Jean Vilar : Un air de Famille, la pièce d’Agnès Jaoui et de Jean-Pierre Bacri*
Le pitch : Chaque vendredi soir, la famille Mesnard se réunit au bar-restaurant « Au père tranquille », tenu par l’un des fils, Henri (Riri). L’autre fils, Philippe, vient de passer à la télévision régionale et son épouse Yolande va fêter son anniversaire. Betty, la sœur qui marche sur ses trente ans, vient, quant à elle, d’avoir une sérieuse altercation avec leur chef commun, Benito Massolini. Le cher Philippe (aux airs de tueur) est incarné par Olivier Cuvellier, à la perfection. On attend en vain Arlette, l’épouse d’Henri, pour aller dîner mais elle tarde... Lorsqu’elle se décide enfin à appeler de chez sa copine, c’est pour annoncer à Henri "qu’elle ne reviendra pas ce soir". Elle doit « réfléchir ! »"Paraît que j'ai pas de considération pour elle!" Mais que va dire la sainte famille?
Henri, le patron des lieux est l’imbécile de la famille: le jeu de Frédéric Lepers est parfait. Il a de la tendresse pour les joueuses de tennis en jupette et dit qu'il l'aime, son Arlette. Il nourrit sa conversation de dictons, ce qui irrite prodigieusement Betty. Il est l'enfant maudit de la reine-mère et a pour riche conversation, ses apartés avec son clebs arthritique. "On est comme on est, on change pas, j'te dis! "
Une époustouflante Marie-Line Lefebvre, ou peut-être votre propre belle-mère, bien-pensante et vieux-jeu en diable, interprète Madame Mère en plein délire. Elle se plaint à répétitions de son mari défunt qui manquait tellement de tout et surtout, d'ambition.Tandis que Philippe.... Tout en ne perdant jamais une occasion d'asticoter sa fille Betty.
Cécile Van Snick est une inénarrable YoYo, drôle à souhait, la femme soumise de Philippe et le pendant féminin de RiRi. Elle voudrait juste « un peu vivre », partir à deux en voyage ...et reçoit comme cadeau d’anniversaire du tandem mère-fils un collier de chien et le chien qui va avec. N.B. de la même race que la pauvre ruine appelée Caroso qui jappe dans son panier au fond de la salle. Pour énerver son frère, Betty pousse sa belle-sœur à boire Suze sur Suze. Denis, le serveur, beau à en tomber, met le jukebox "C'est son anniversaire Non? " Ils dansent. Le craquant Denis, écoute, ne juge pas, lit des livres au coin d’une table et astique avec philosophie sa pompe à bière. C'est Julien Lemonnier , sortit de IAD en 2009.
Et enfin Betty la fille pas tranquille du tout, est un paquet craquant de charme, « mal fagoté » débordant de vitalité et de rébellion, qui n’offre rien aux anniversaires et crache sur tous les règlements. Elle a dit son fait à Benito le jour même et - simple question de justice - fera de même avec Philippe et sa mère! Une authentique garce que l’on adore car elle fonctionne au Vrai, passionnément !
Olivier Leborgne ("Sois belge et tais-toi", "Sur la route de Montalcino") adapte cette œuvre avec beaucoup de doigté à la situation d’une famille résolument belge qui veut faire bonne figure mais a tout raté, question communication. Sans avoir jamais l’air d’y toucher, Denis, lui, l'intrus, écoute, compatit, remonte le moral, conseille et charme. Le public l'adore.
Le très beau décor mis au point par Lionel Lesire et Jean-François Viot est une véritable contraction temporelle. Il réussit à projeter l’action au temps de …MATHUSALEM ? Une action qui se déroule dans les années 90 - Dieu que c’est loin ! - avec un décor totalement rétro des années 70, qui donne à son tour la tentation de plonger dans les années 50 ! Toute une vie, quoi ! Mais les relations entre les personnages n’ont pas pris une ride, ni leur parler. Il y a une sorte d'immortalité. C’est du vécu pour chacun d’entre nous, au quotidien… en 2014, tout comme dans la mythique famille Duraton du feuilleton radiophonique des années 50! Du théâtre de conversation où se révèle une image satirique de la société avec son lot de rivalités, d'hypocrisies, de malentendus et d'incommunicabilité.
Lorsque la dynamique de la férocité familiale s’enclenche, personne ne sait où cela va s’arrêter! La réunion hebdomadaire de famille tourne au cauchemar. Les interprétations de chaque personnage sont succulentes: des plats cuisinés de typologies hypertrophiées qui ont le don de faire rire à chaque tournant de phrase ou de non-dit! Du théâtre intelligent et sensible, une présence en scène fabuleuse pour chacun des personnages, une gestuelle merveilleusement étudiée… jusqu’à celle du pauvre clebs ! Et par-dessus tout, la splendide diction, le charme, la jeunesse et la finesse de notre comédienne préférée : Stéphanie Van Vyve !
A vos agendas! http://www.atjv.be/
http://www.atjv.be/Un-Air-de-famille
*La pièce d’Agnès Jaoui et de Jean-Pierre Bacri créée en 1994 au Théâtre de la Renaissance à Paris, qui obtint l’année suivante deux Molières et fut adaptée au cinéma par Cédric Klapisch rafla trois Césars en 1997.
Elle se plaignait, en grande détresse.
Je l'ai imitée, feignant la tristesse.
Sa plainte a pris fin immédiatement.
Elle a étouffé son propre tourment
Et m'a regardée, emplie de tendresse.
26/7/1974
Un adorable petit livre,
Dès qu'il est ouvert il me livre
Photos et poésies mêlées
Me laissant grandement troublée.
Durée retrouvée par magie,
Des lieux, des émois de ma vie,
Miroirs éclatant de couleurs,
Des mots écrits avec ferveur.
Je me revois dans le bonheur,
Bien souvent entourée de fleurs,
Non loin du fleuve. C'est l'été
Ravivant le goût de fêter.
Livre fermé, autre décor.
Je retrouve mon nouveau corps.
C'est l'hiver, je reste sereine
Les regrets sont des pensées vaines.
12 février 2014
Le chômage fait peur. C’est un épouvantail qui est agité sans cesse dans l’opinion publique et ce n’est pas innocent. C’est l’épée de Damoclès. Chômage veut dire : moins de voiture, de maison, de bonnes études pour ses enfants, d’amis, de vacances à la mer ou au ski …plus de pauvreté en somme. Mais derrière ce mot aussi effrayant pour l’inconscient collectif qui ne rêve que de bonheur que nous cache t-on ? Quel est le cocktail savamment dosé, quels sont les ingrédients qu’on y met pour agiter ainsi ce spectre infernal et pourquoi n’arrête-t-on pas d’en parler comme d’un cyclone qui ne va pas tarder à toucher nos terres ?
D’abord le mot chômage est lié au mot travail. La disparition de ce dernier ne fait pas disparaître le premier et inversement ! Bref, à ce que l’on entend, il n’y aurait plus de travail pour tout le monde. Les usines ferment. Les ouvriers brûlent des pneus devant les caméras. Ils séquestrent les patrons, demandent des indemnités de départ plus élevées et paraissent soulagés quand ils obtiennent plus que ce que leurs conventions collectives prévoient. L’air de la revanche ajoute là aussi à l’inconfort du mot travail. C’est une menace brandie pour la prochaine fois. Menace désespérée car sous la menace chacun sait que la solution c’est la fuite quand on est moins nombreux. Donc fuite de l’outil de travail, des capitaux , donc chômage. Il est facile d’aiguiser la revanche, la menace et la fuite pour parvenir au but que l’on s’est fixé. Cela s’appelle la stratégie. Il y a donc une stratégie du chômage. Que l’on ne s’y trompe pas, le plein emploi n’existe pas, on n’y tient pas en haut lieu. Il ferait disparaître la peur et de quoi la foule causerait-elle ? Il vaut mieux distiller les pas en avant et les pas en arrière, surveiller ce que cela donne, infléchir des courbes à coup d’annonces miracles pour conduire le troupeau là où on veut le mener ! Quant au travail par lui-même, c’est une variable d’ajustement. Quand il est trop cher, il faut en faire baisser le prix. Ce n’est pas plus compliqué. Aujourd’hui la valeur du travail est planétaire. Finie la carriole à boeufs et le tam-tam, quoique ! S’il y avait quelque chose de vertueux dans le travail il y a une cinquantaine d’années c’est bien fini. Le travail, on y vient pour gagner de l’argent. Ce n’est plus la valeur morale de jadis…Il faut dire que lorsque l’argent se fait rare on crie haro sur le baudet !
Au passage de ces réflexions, si l’on quittait la macro-économie du travail, la stratégie de la peur et que l’on regardait le parcours de l’individu face au travail . Prenons la sphère publique. Il faut passer un concours. C’est le meilleur qui réussit. Il en est. Mais un pourcentage plus ou moins élevé n’a pas nécessairement ce besoin. Qui ne favoriserait pas son ami, son clan, sa société. Vous ? Et peut-on parler de travail, de stratégie, de peur quand l’équation est déjà résolue au départ ? La route du fonctionnaire jonchée de répétitivités, d’ennui et de certitudes calculées d’avance n’a rien au fond de plus enviable que la seconde catégorie qui suit. Celle de la sphère privée, de la jungle de l’argent, de l’insécurité comme contrat à vie marquée au fer rouge, du suivi jusqu’à la tombe où chômage et travail alternent incessamment, pauvreté et peur sont conjugués au fil des coups de fil des labyrinthes du désespoir, des perpétuelles errances.
Griserie verbale, théâtrale, musicale et chorégraphique à la première ce soir à la Clarencière! Theatregoers! Go for it! You won't regret! Somptueuse anthologie de textes et chansons : des misérables aux désirables! Un trio de comédien et comédiennes époustouflant qui revisite et le surréalisme poétique belge, et la Lost Generation... et les années 20 à Paris! Sublime spectacle, mû par l’amour de la culture! Diction parfaite, langue merveilleuse, les trois comédiens Laurence Briand, Rosalie Vandepoortaele et Laurent Laigneaux (le musicien-comédien) partagent un inimitable pouvoir de suggestion.
Dès les premières secondes, on se sent aspiré par le souffle puissant de l’histoire littéraire du début du XXe siècle qui revit soudain à la lueur d’antiques lanternes. 2014 : Anniversaire du centenaire, me direz-vous ? Les personnages nous happent, nous attirent et nous fascinent.
Voici un défilé de textes soigneusement choisis par Rosalie Vandepoortaele qui a composé une véritable anthologie vivante, dense et documentée où l’on retrouve tour à tour, sertis dans un écrin musical approprié LA VICTOIRE DE LA MADELON - PAUL NOUGE - CAMILLE GOEMANS - BLAISE CENDRARS -E.L.T MESENS - PHILIPPE SOUPAULT - HENRI MICHAUX - ROBERT DESNOS - R. RADIGUET - ANNA DE NOAILLES - PARLEZ-MOI D'AMOUR - GERTRUDE STEIN - F. Scott FITZGERALD - LOUIS ARAGON - ANTONIN ARTAUD - EN DOUCE - MARCEL LECOMTE - MAX JACOB avec des clins d’œil appuyés au peintre MAGRITTE ! Un enchaînement bourré d’intelligence et de finesse! C'est elle qui avait fait la mise en scène du spectacle "Le Chat noir," l'an dernier. Elle aime les textes de qualité.
« Selon ma doctrine » il est défendu (sous peine d’imbécillité) de rien prévoir. Ce que je ferai dans tous les domaines est imprévisible tout autant que l’apparition d’une réelle image poétique. » « Etre surréaliste, c’est bannir de l’esprit le « déjà vu » et rechercher le pas encore vu » Magritte
Entre ombres et lumière, les mots et la poésie transfigurent les corps et les visages des comédiens. La bouche et les sourires sont ceux de trois muses théâtrales apprivoisées et offertes à un public reconnaissant. Chaque mouvement est fascination:
Rosalie :
Ma bouche qui bouge
devant vous
n'est pas habitée de paroles
ordinaires
Laurence :
Ma bouche ce soir est habitée
de paroles qui ne sont
pas à moi
de paroles qui ne sont pas des
chansons ni des charmes
Rosalie :
mais balles de fusils
On ne peut assez se répandre en louanges et vouloir partager tout le plaisir que l’on reçoit avec les spectateurs qui nous entourent. Applaudissements nourris, « bravos » qui fusent en plein spectacle, rires, grognements de bonheur ou de révolte partagée. Tout le monde a envie d’exprimer bruyamment son ravissement. Le lieu s’y prête d’ailleurs parfaitement et les vagues de bonheur se répandent avec candeur… Et de remercier autour d’un verre après le spectacle de la façon la plus tangible ces comédiens généreux qui nous ont offert une prestation hors pair. Quelle sensibilité, quelle subtilité, quel jeu, quelle présence et quelle dramaturgie éblouissante de la metteuse en scène Isabelle Nasello ! Ceci n’est pas seulement un Bijou, c’est tout un univers. Cheers!
www.toctocart.com/Welcome_to_the_annees_folles.html">http://www.toctocart.com/www.toctocart.com/Welcome_to_the_annees_folles.html
Je ne sais pourquoi je suis ici, de mes habitudes, il ne reste rien, des gens que j’aimais, des souvenirs envolés.
Après un printemps plein de promesses est arrivé l’été. J’ai entendu les bruits des sacs et des valises et je me suis réjoui de tout ce vacarme. Ils avaient tous l’air heureux autour de moi. Assis dans le fauteuil, tous ces allers venus me plaisaient. J’aimais les voir voyager dans la maison et me faire un petit coucou à chaque passage. La demeure était joyeuse et magnifique par cette après-midi d’été.
Les préparatifs ont duré des heures et sans méfiance, je me suis endormi. Je suis parti sans doute dans mes rêves.
Heureux et joyeux de monter dans cette nouvelle automobile, j’ai collé mon nez au carreau et vu s’éloigner cette maison si familière. Les kilomètres se sont ajoutés au fil des heures et par habitude, ils se sont arrêtés sur le bord de l’autoroute.
Enfin un peu de liberté et courir m’a fait du bien. Je me suis éloigné un peu trop peut-être. Au bout de qq minutes, je suis revenu et j’ai cherché cette voiture, j’ai cherché de plus en plus vite. M’avait-il oublié sur ce maudit parking ? J’ai commencé à courir dans tous les sens, j’ai crié, hurlé.
J’étais seul sur cette route inconnue.
Au bout d’un moment, je me suis assis ne sachant plus quoi penser. M’avait-il oublié ou jeté comme un objet encombrant ? Moi, mon petit chéri comme elle disait. Lui son compagnon de tous les jours. Et eux, mes petits amours.
La nuit vient de tomber, j’ai mal d’avoir trop marché. Mal de penser à eux, mal de me dire que je suis seul dans cet endroit. Mal de devoir rester dehors sans manger.
Au petit matin, toujours dans l’incompréhension, je me remets à avancer et quitte cette route bruyante pour d’autres plus sereines. Je n’avais jamais vu autant de choses nouvelles. De cette petite route devenu sentier, j’ai coupé par les prés et rencontré des animaux gigantesques que j’ai pris soin d’éviter.
Enfin, un petit ruisseau où je peux enfin boire. J’ai l’estomac qui se rappelle à moi. J’ai faim. Une vieille bâtisse m’attire et dés que j’ai fait qq pas, l’odeur de cuisine se fait sentir. Doucement, sans faire de bruit, j’arrive devant cette porte. Trop tard, je suis pris, coincé par cet homme de grande taille qui me regarde avec pitié.
La voiture, je la vois. Cette voiture va me conduire chez eux, chez moi comme avant. Je monte gaiement dans ce véhicule et me laisse conduire.
J’arrive dans un endroit plutôt sordide. J’ai vite compris que ce n’est pas chez moi. Ce n’est nulle part, c’est horrible. Des cages, du bruit et la certitude que cette fois, je ne reverrai jamais mes maîtres.
Cet endroit ne me plait pas, j’ai mal à l’âme, mal au cœur, mal d’être si peu de choses pour les hommes. J’ai mal d’avoir été jeté sur ce parking parce qu’il n’y avait pas de place pour moi dans cet hôtel. Maudites vacances qui font de ma vie un enfer, qui me laissent seul dans ce refuge. Je ne suis plus que l’ombre de moi-même. Je suis sale, crasseux, dégoutant, moi d’habitude si fier et si beau.
Couché à même le sol, dans cette odeur ambiante détestable, j’attends. Les hommes sont cruels parfois. Je ne suis qu’un pauvre vagabond sans collier dans cet enclos où je ne suis pas seul. Beaucoup d’autres sont là pour la même raison.
Voilà que j’aperçois un jeune couple qui passe sans voir. Un autre avec une petite fille qui ne me voit pas non plus. Un homme solitaire qui me toise et passe sa route.
Les jours défilent et mon désespoir est à son comble. Je reste là, enfermé comme mes amis d’infortune. J’attends mon triste sort.
La journée arrive à sa fin, le soleil décline et j’ai décidé d’en finir, de ne plus manger, ni boire. A quoi bon maintenant vivre en cage. Mon désespoir se voit trop et je n’ai plus la force de me battre. Allongé au fond de cette cage, la tête à même le sol, j’attends que tout cela cesse enfin.
Au petit matin, le ciel m’apparait plus triste que celui de la veille, encore un jour qui se lève et ma détermination à ne plus manger, ni boire est bien réelle.
Le gardien s’en est aperçu et insiste pour que je m’alimente. Non, ma décision est prise. Je me laisse mourir. Peu importe la durée de mon agonie, mon chagrin est tel qu’il n’y a pas de solutions.
De l’autre coté de la rue, une voiture s’arrête. Seraient-ce eux enfin qui auraient changé d’avis et qui seraient là pour me prendre ?
Non, c’est une dame qui cherche un compagnon à 4 pattes, un petit ami qui la suivrait et qui l’aimerait. Le gardien vient à sa rencontre et passant devant ma cage et mon petit corps sous alimenté, lui déconseille de me prendre. Non, ce chien est malade.
La dame revient vers moi et s’agenouille, me regarde et m’appelle doucement. Aurai-je l’envie de me lever, le courage de reprendre confiance dans ces humains ? Elle insiste beaucoup, énormément.
Cette fois, dans un grand effort, je me lève sur des pattes hésitantes et marche vers elle. Son sourire me ravit et je sens sa chaleur qui vient vers moi. Que dire d’elle, elle fit de moi son existence, son bonheur.
Les 10 dernières années de ma vie seront pour elle. Jamais je ne la quitterai du regard, toujours près d’elle et collé à ses talons, j’en ai fait ma vie aussi et elle fut heureuse.
Le ciel d'hiver s'est dégagé
Et je regarde le jardin
Où trône un Saule épuré
Dans le givre du matin...
Le vert explose d'intensité,
Alors un questionnement s'impose!
Qu'est-ce donc qui nous fait avancer?
Regarder vers demain, je n'ose...
C'est qu'à nuages habituée
D'un coup je les avais chassés!
Et qu'au bleu, je m'étais camée...
Alors pourquoi cœur angoissé?
Si le temps dépose sur les branches
Un givre aussi beau que glacé...
C'est que vers l'hiver on se penche
j'aurais tant voulu l'ignorer!
J.G.
Dans la foulée, aujourd'hui, j'ai reçu les exemplaires que j'avais commandé de 'La petite fille qui aimait trop... les st honorés'...
Une année qui s'annonce littéraire pour moi.
Comme il ne paraîtra pas de sitôt en librairie, toute personne intéressée peut me contacter via ma boîte mail:
yvette.hulin@skynet.be
En voici un extrait:
« Ne bouge pas, arrête de respirer…
« Souffle maintenant… Encore… Encore… Encore…
« Très bien.
« Maintenant, il va falloir que tu sois un petit peu courageuse.
« Ca ne va pas durer longtemps, mais pour guérir, il faut passer par-là »
Pas longtemps qu’il a dit Monsieur le Docteur, ça me semble une éternité à moi.
Je regarde maman en me pinçant les lèvres pour ne pas crier.
Son regard en dit long : si je ne suis pas sage, pas question de st honoré…
Mes yeux coulent tous seuls… Pourvu que ça s’arrête vite !
Ca s’est enfin arrêté.
Maman est fière de moi… Enfin, je ne sais pas, elle ne me l’a pas dit mais m’a offert le st honoré tant convoité.
Mais mon petit bras est tellement douloureux que j’ai du mal à porter la cuillère à la bouche. Et pas question de me faire aider par maman. Je suis une grande fille maintenant, j’ai trois ans !
Plus tard, il y aura d’autres st honoré…
Ils auront tous le goût d’une récompense amplement méritée.
Quand maman en parle maintenant, j’ai l’impression qu’il s’agissait d’un simple caprice de ma part.
Je déteste les st honoré… Que dis-je ? Leur simple vue me donne envie de pleurer.
Une grande fille ne pleure pas n’est-ce pas ?
Eh bien, si, j’ai appris à pleurer… Mais cinquante ans plus tard !
Pour voir la couverture, cliquez sur le lien suivant: 1B.jpg
Une fille pour deux.
Isabelle n’a jamais pu choisir entre Georges et moi. A seize ans, entre nous deux, elle prenait le bras de chacun d’entre nous.
Je ne sais pas si Georges me jalousait autant que je le jalousais mais nous savions l’un et l’autre que c’était risquer de la perdre que de le lui demander lequel de nous deux elle préférait.
A vingt ans, nous nous aimions toujours autant. Comme si cela allait de soi. Sinon que le corps d’Isabelle nous troublait désormais. Moi en tout cas, il me troublait fort. Elle était plus que séduisante. Elle était désirable. La nuit, durant mes rêves éveillés, je la prenais nue tandis qu’elle haletait.
Je l’ai épousée deux ans plus tard sans savoir si j’étais amoureux de la fille que j’avais aimée depuis l’enfance, et dont je n’avais pas imaginé le plaisir que pouvait me procurer son corps, ou si c’était de son corps d’abord dont je voulais disposer.
Un jour que j’étais seule avec elle, je l’ai prise sans qu’elle s’y soit fort opposée.. Elle avait geint comme elle geignait dans mes rêves. Elle découvrait qu’elle aimait faire l’amour. Et pas seulement, je ne l’ai compris que plus tard, parce que c’était moi qui l’avais caressée. Elle aussi devait avoir ses rêves éveillés et des nuits durant lesquelles ils s’épanouissaient. Plus encore que dans la réalité.
Georges avait été l’un de nos témoins, Isabelle et moi l’avions souhaité. Ce fut un repas modeste .Nous n’étions pas nombreux. Les parents et les amis partis, nous étions restés à trois, Georges, Isabelle et moi.
- Et bien, je m’en vais alors.
Aujourd’hui encore, je n’oserais jurer que c’est bien lui qui est parti. Isabelle avait rit.
- C’aurait pu être le contraire. Georges à ta place et toi à la sienne, non ?
Durant la nuit, je lui avais chuchoté à l’oreille en me serrant contre elle :
- C’est moi Isabelle, c’est moi Pierre qui suit en train de te prendre.
- Oui, c’est toi.
Mais elle n’avait pas prononcé mon nom de toute la nuit.
Nous étions souvent ensemble, Georges, Isabelle et moi. Comme lorsque nous étions adolescents, Isabelle marchait entre Georges et moi de sorte que des inconnus pouvaient se demander lequel d’entre nous deux était son mari ou son amant ? Ou bien si nous l’étions tous les deux.
Je me disais : lequel de nous deux apparait comme l’amant trompé, le cocu des comédies d’antan. Des amants consentants ? Consentants ? Et elle, comment la jugeait-on ?
Je me disais : peu importe la façon dont on la juge. C’est elle que j’aime et non ces gens que je ne connais pas. Et Georges comment ressentait-il notre union ? Et si c’est moi qui était à sa place ?
Un après-midi que je me rendais chez Georges, j’ai sonné deux fois comme je le fais d’habitude, c’est le signal dont nous étions convenus depuis longtemps, j’ai entendu beaucoup d’agitation derrière la porte. Puis plus rien. Georges ne venait pas m’ouvrir. J’ai frappé du poing sans résultat. J’ai crié :
- Georges. Georges, c’est moi.
Ce jour-là, j’ai marché près de deux heures à travers la ville. Je n’avais pas envie de rentrer chez moi.
Isabelle était à la maison. Elle m’a embrassé avec plus de chaleur qu’elle ne le faisait d’habitude. Elle a dit :
- J’ai été voir Georges cet après-midi.
- Il va bien ?
- Je l’ai invité à manger avec nous, ce soir.
- Vous mangerez sans moi, je dois m’absenter tout à l’heure jusqu’à demain. Pour le bureau.
Elle m’a regardé profondément. J’avais le sentiment qu’elle me jaugeait. Plus encore, j’avais le sentiment qu’elle me jugeait. Elle souriait.
- Je t’aime, tu sais. Je ne pense pas que je pourrais aimer quelqu’un plus que toi.
- Autant, c’est possible ?
Elle s’est serrée contre moi.
Lorsque je suis rentré le lendemain, elle était seule. Sur la table de nuit, il y avait la montre de Georges qu’elle avait du laisser intentionnellement.
.
Un détail stupide devient parfois le souvenir le plus marquant d’une union qui ne s’est défaite que par la mort.
Je me suis parfois demandé : Jusqu’où serais-je allé pour qu’elle soit encore en vie. A mes côtés ? Aux côté d’un autre ?. L’ais-je aimée ou est-ce moi que j’ai aimé lorsque je l’aimais ?
« Souviens-toi Azziza, c’était un lundi soir » était une réplique du théâtre d’Armand Salacrou, un auteur très réputé lorsque nous étions jeunes et à peine mariés, Thérèse et moi. J’avais le sentiment que ma vie commençait avec cette réplique de théâtre.
Thérèse est morte vingt ans plus tard. J’étais convaincu que je ne lui survirais pas. C’est cette certitude qui m’a retenu de me tuer.
Julie était seule elle aussi. C’était une amie que son mari avait abandonnée sans qu’elle n’en ait jamais compris la raison. Elle était séduisante et fort amoureuse à en juger par les caresses dont elle le comblait même au vu de ses proches. Les hommes y sont sensibles, m’avait-elle dit un jour, Ils sont vaniteux.
Cela n’avait rien empêché.
- Moi aussi, j’aime ça. Les hommes sont des séducteurs, les femmes sont des nymphomanes, dit-on. Chez les femmes, c’est méprisable.
Un jour que j’étais chez elle, elle est entrée dans sa chambre à coucher. Lorsqu’elle est revenue, elle ne portait sur elle que son peignoir qu’elle dénoua devant moi.
- Julie !
C’est vrai qu’elle était séduisante.
Etrange femme ! Elle faisait l’amour toute seule. Elle se servait de son corps et du corps de son partenaire pour jouir.
Un peu plus tard, elle s’endormit la main une de mes cuisses.
Souviens-toi, Azziza . C’était un Lundi soir.
Une réplique de théâtre, et le passé a recommencé.
[De libero arbitrio diatribe sive collatio]. C'est le célèbre traité, publié en septembre 1524 à Bâle, par lequel Désiré Erasme de Rotterdam (Geert Geertsz, 1469-1536) prit position contre Luther et sa réforme religieuse.
Outrepassant la conception de saint Augustin, Luther affirme que le péché a déformé l'organisme psycho-physique humain dans sa substance, en le rendant absolument incapable de toute bonne action: seul le rachat du Christ peut accorder le salut. D'où la totale négation du libre arbitre chez l'homme, absolument passif entre les mains de Dieu.
Contre Luther, Erasme affirme ici la doctrine catholique qui veut sauver à la fois les droits de la liberté, sans lesquels il n'y a pas de vie morale, et les droits de la grâce, sans lesquels il n'y a pas de vie chrétienne. Le péché originel n'a pas détruit chez l'homme son aptitude au bien: il l'a seulement rendue embryonnaire. Le baptême la vivifie, ainsi l'homme peut parcourir le sentier de la vertu.
Le libre arbitre est la capacité de l'homme à s'appliquer aux choses qui conduisent au salut éternel ou à s'en écarter. Sans libre arbitre, il n'y a pas de responsabilité. Au "Libre arbitre", Luther répondit par le "Traité du serf-arbitre" et Erasme aurait répondu à son tour avec "L'hyperaspistes": la polémique eut des résonances énormes et contribua à délimiter, d'un côté, les orientations révolutionnaires de la Réforme, de l'autre le rationalisme et le personnalisme humaniste qui eut en Erasme un de ses plus illustres représentants. En effet, celui-ci bien qu'il ait cherché dans le "Libre arbitre" et dans "L'hyperaspites" à se concilier le catholicisme, fait preuve, à travers son équilibre élégant et clair, d'une attitude rationaliste, d'une indépendance d'esprit, qui conduisirent l'Eglise à condamner ses oeuvres.
A voir:
La maison d'Erasme à Bruxelles
Cléo nous est arrivée une après-midi de Juillet enfermée dans un petit panier au bras de Nicole. Gilles les accompagnait.
En ce temps là, Gilles était le petit ami de Nicou. Petit ami qui faisait sourire lorsque ce doux barbu de un mètre quatre-vingt cinq marchait auprès du mètre cinquante-cinq de notre fille sans qu’on puisse deviner lequel des deux entraînait l’autre.
Marie avait une idée de femme à ce sujet. Elle prétendait :
- Au début, que le mâle soit grand ou petit, gros ou maigre, c’est toujours la fille qui est le poisson-pilote.
Gilles était photographe. Pas de ces photographes qui vous demandent de sourire devant une boite. Gilles photographiait les cimetières et les grilles de fer forgé. Qui, je vous le demande, a déjà vu sourire une grille ou une croix de pierre dans un cimetière ?
- C’est tout le mystère de l’Art.
- Et peut-être celui de l’origine des Religions.
Nicole avait l’air de comprendre mais elle comprenait tout le monde pourvu qu’il portât des Jean’s et une barbe.
Gilles avait travaillé durant quatre mois en tant que troisième assistant - réalisateur à la Télévision. Il déplaçait les chaises et il avait en charge la maman de Cléo. Travail harassant comme le sont toutes les tâches de début de carrière.
A chaque fois qu’il fallait recommencer une prise, il devait rattraper la maman de Cléo et la convaincre de reprendre son rôle
- Viens ; disait Gilles en tendant une soucoupe de lait, et la maman de Cléo traversait le champ avec autant de naturel qu’une nominée à l’Oscar.
Je ne sais pas si vous êtes comme moi ? J’ai toujours été fasciné par les coulisses du spectacle. Par ce qui se passe avant que les choses n’apparaissent aux yeux du public.
A mon avis, même Dieu avant de créer le monde en six jours, ce qui est relativement court, a dû procéder à un grand nombre de répétitions, de retouches, etc…Une répétition de plus, je le dis sans reproche, n’aurait peut-être pas été superflue.
- Pourquoi le réalisateur n’a-t-il pas remplacé l’actrice ?
- Et le contexte affectif ?
-Le contexte affectif, mon œil. Ils couchaient ensemble, oui !
Marie qui a toujours été pudique, elle a fait ses études chez les Ursulines, a demandé hypocritement :
- Vous croyez ?
A la réflexion, je reconnais que c’est naturel. Le sexe occupe une place importante dans la vie des gens. Déjà lorsqu’au début de ma vie professionnelle je travaillais dans les Grands Magasins, je m’étais aperçu de certaines relations équivoques entre Directeurs et Secrétaires, entre Chefs de rayon et Première –vendeuse, entre Magasiniers et Réassortisseuses.
C’est vrai que le temps consacré au travail est plus long que celui que l’on passe chez soi et que c’est durant le jour que les pulsions sexuelles sont les plus puissantes. Comment expliquer, sinon, que dès qu’ils sont rentrés chez eux, le soir en général, les maris se montrent peu empressés, et les épouses atteintes de migraine ?
C’est du moins ce que m’a confié une dame de mes connaissances qui se demandait s’il ne valait pas mieux inverser l’ordre des activités professionnelles et du repos.
- C’est durant le jour que se commettent la plupart des adultères.
Mais elle concluait avec bon sens :
- L’essentiel pour la paix des ménages, c’est qu’on soit discret et qu’il n’y ait pas d’accident.
Hélas !, un accident, cela arrive même aux plus sages, un instant de distraction suffit, la maman de Cléo en était un exemple navrant. Cléo est née durant le tournage d’une série familiale destinée au grand public, parfaitement honorable.
Marie s’est levée et a préparé une boite à chaussures en y glissant un morceau de tissu à fleur.
- Demain, je lui achèterai un panier, dit-elle.
Et Cléo fut adoptée autour d’une tasse de lait coupé d’eau.
Le lendemain, j’ai trouvé Cléo endormie à côté de sa boite, et la tasse de lait avait été renversée.
- Elle a du s’agiter durant la nuit, la pauvre petite n’a pas pu regagner son lit.
Marie donna à Cléo une tasse de lait frais et une ration de poulet coupé en dés.
-Tu vas la gâter.
Marie qui conservait la candeur de sa jeunesse m’expliqua :
- Il faut être gentil envers les gens et les animaux. En retour ils seront gentils avec toi.
Quant à Cléo, indifférente à ces propos quasi bibliques, elle a fait le tour du salon lentement, le ventre à ras de terre, inspectant chaque centimètre du tapis.
- Tu vois, elle fait le tour du propriétaire. Dès demain, j’en suis sûre, elle se sentira chez elle.
Je ne sais pas si c’était un pressentiment mais je n’étais pas aussi à l’aise que Marie.
- Je me demande si elle s’entendra avec les autres chats, et surtout avec Bibig ?
Bibig était un teckel à poils durs parfaitement sociable mais sa présence parmi nos chats avait créé quelques remous dans notre voisinage.
Je reconnais que la nature de Bibig était complexe. Depuis sa naissance, il avait toujours vécu parmi des chats et des êtres humains. Bébé, il allait se nicher auprès de Nabu, le plus ancien de nos chats, dont il recherchait la chaleur. Plus tard, lors de ses premières pulsions sexuelles, c’est le derrière de Pupuce, une petite chatte timide, qu’il reniflait. A mon avis, Bibig ne savait pas qu’il était un chien. Il se contentait d’aimer tout et tout le monde. Gens, bêtes, plantes et tentures, à tous et à tout, il manifestait de l’amitié sous forme de frottis-frottas ou de petits pipis. S’il avait pu se frotter à la lumière du jour, il l’aurait fait.
- Regarde comme elle est mignonne. Je vais faire les présentations.
Elle a pris Cléo dans ses bras et nous sommes allés à la cuisine où nous nous retrouvions tous la plupart du temps. Pupuce, qui depuis la mort de Charlot notre premier teckel avait déserté le haut de l’armoire où elle se réfugiait, s’y trouvait à nouveau.
- Viens Pupuce, viens voir ta petite sœur.
Pupuce ne bougeait pas. Ses yeux dont on ne voyait généralement que des fentes étroites avaient l’apparence de petits globes de marbre vert. Elle était littéralement tétanisée.
Un jour dans une chambre d’hôpital, j’avais vu la même expression dans le regard d’une vieille dame à qui un jeune médecin, faussement enjoué, annonçait avant de sortir :
- Ne vous inquiétez pas, je vais vous faire administrer une prémédication.
Elle a déposé Cléo dans le salon et a fermé la porte. J’ai eu le sentiment que le doute l’avait saisie elle aussi.
Le surlendemain, à nouveau, Cléo dormait à côté de sa boite et la tasse de lait avait été renversée une fois de plus. Au moment où je m’approchais pour la remettre dans sa boite elle ouvrit un œil, un seul, et grogna sous ses moustaches. Aplatie sur le tissu à fleurs, le regard métallique, le poil hérissé, la griffe tendue, Cléo me regardait avec cette fixité propre, paraît-il, aux schizophrènes, aux directeurs excédés que l’on dérange, et à certaines stars du cinéma.
- Cléo !
Un sifflement hargneux fusa entre ses dents.
Dieu, me dis-je, quel drôle de numéro. Lorsqu’elle est arrivée, on lui aurait donné le bon dieu sans confession comme on dit. Aujourd’hui à peine adoptée, elle révèle un curieux caractère. Le lendemain de leur mariage, parfois, des maris éprouvent une surprise similaire. Du moins, c’est ce que je me suis laissé dire sans que je puisse le garantir.
Je l’ai regardé dans les yeux pour l’impressionner mais son regard ne cilla pas.
J’ai appelé Nicole.
- Elle est zinzin, c’est tout. Et alors, il y en a d’autres, non ?
- Mais enfin ce n’est pas normal.
Elle m’a regardé avec cette commisération qu’elle manifeste parfois lorsqu’ elle s’adresse à moi et, à ce qu’on m’a dit, que d’autres adolescents expriment également lorsqu’ils répondent à leur père qui les interroge sur un détail de leur vêtement.
- Toi, et ce qui est normal Ce qui est normal pour toi ne l’est pas nécessairement pour d’autres. Ce qui n’était pas normal hier le devient aujourd’hui. Il faut évoluer avec son temps.
A cause de son aspect, j’attribuais à Cléo des traits de caractères que, du haut de ma propre perception des choses, je trouvais mauvais. Nous sommes nombreux, hélas !, à être aussi légers dans nos jugements.
Nicole avait raison. Cette dame avait raison. Cléo était zinzin, voilà tout. Mais incontestablement normale. Et pourvu que l’on ne se trouve pas à sa portée lorsque son humeur l’incitait à griffer ou à mordre, elle pourra devenir une chatte adorable. Autant que ces femmes aux réactions imprévisibles qui sont le sel de la vie de nombreux maris.
Le dirais-je ? J’ai connu le mari d’une femme de ce genre : il était parfaitement heureux. Lorsqu’il pressentait un orage conjugal, il faisait une halte au café avant de rentrer chez lui, et au bout de quelques années, il n’en aimait sa femme que davantage. Amoureux, il appréciait ses mamours. Sociable, il aimait l’atmosphère des cafés que la bière et les rires alimentent sans cesse. Il était comblé tout à la fois de son amour et de cette liberté de garçon qu’elle lui offrait inconsciemment.
- Ils s’aiment à leur manière ; disais-je à Marie. Elle n’est peut-être pas mauvaise. Lorsqu’il rentre un peu gai, les yeux brillants, les gestes tendres, peut-être qu’elle lui en est reconnaissante ?
- C’est vrai que toi, tu pourrais avoir des gestes tendres un peu plus souvent.
J’avais raconté à Nicou ce que j’avais dit à sa mère et ce qu’elle m’avait répondu. J’avais ajouté en riant :
- Les femmes sont étranges, tu ne trouves pas ? Je ne les comprendrai jamais. Elle sait que je l’aime, non ?
- Elle sait, elle sait…De temps en temps, tu pourrais faire comme si elle ne le savait pas. Les hommes ne sont pas normaux, je ne les comprendrai jamais.
Elle a pris Cléo dans ses bras et elle lui a caressé le museau.
Je viens de remporter mon premier prix d’écriture : le droit de paraître dans le recueil de formes brèves sélectionnées dans le cadre du concours d’écriture du Printemps des bibliothèques 2013 (organisé par la Bibliothèque centrale de la Province de Hainaut et les bibliothèques hainuyères)
Le prix remporté est : un bouquin sur les contes et légendes de Wallonie (peut-êtrematière à… ultérieurement ???) et ma place dans la plaquette qui sera distribuée dans toutes les bibliothèques de Wallonie ainsi que les institutions de la Province de Hainaut !!! Tadam !!!
Nombre de caractères imposés sur le thème : ‘Ô temps…’
Bon, faut aimer hein ? Ce n’est pas, à mon sens, ce que j’ai écrit de mieux mais puisque ça a plu…
Et bien sûr, y qu’à moi que ça arrive, ces choses-là, j’ai reçu un mot d’excuse parce qu’ils avaient attribué mon prix à quelqu’un d’autre (qui a été plus que correct) parce qu’il a signalé que ce texte n’était pas de lui. Ils ont donc dû procéder à la réimpression de la plaquette. Vu le truc, ça a dû leur coûter quelques euros !
Inutile de vous dire que je suis sur un petit nuage !!!
Donc, voici: Les cinq sens du temps
Aveugle, il trace mes rides
Sourd, il croque mes os
Insipide, il égare mes papilles
Inodore, il me parfume
Et à la fin, tremblent mes mains
Soliloque
Non! Le mauvais génie oeuvrant à ma vieillesse
N'a pas eu le souci de connaître mes choix.
Il s'est montré clément en décidant pour moi;
Je ressens bien souvent une douce allégresse.
Il m'a laissé santé, mémoire, intelligence.
Or, tout au long des jours s'attaquant à mon corps,
Il lui a fait subir d'irréparables torts.
L'indifférence arrive avec l'accoutumance.
Pour vivre sans révolte une métamorphose,
Qui rend un clair visage taché et sans beauté,
Il faut avoir admis du sort la cruauté
Qui traite les vivants comme de simples choses.
La vérité s'impose après force détours.
La vie met les humains face à des tragédies,
Les instruit leur montrant aussi des comédies
Les comble de bonheur en leur offrant l'amour.
Je croyais forte, invulnérable ma sagesse.
Elle m'avait guidée, réconfortée souvent.
Grâce à elle, je sus ce qui est important.
Je la sais défaillante, atteinte de faiblesse.
11 février 2014
J'ai eu le plaisir de vous montrer mes peintures à l'huile. Aujourd'hui, mes oeuvres sont à l'acrylique. Par obligation j'ai dû m'adapter à cette nouvelle technique et aller vers une orientation plus abstraite. Alors soyez les bienvenus dans mon nouveau monde !
ALFONSO DI MASCIO : D’UNE TRANSPARENCE, l’AUTRE
Du 05-02 au 23-02-14, l’ESPACE ART GALLERY (Rue lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) organise une exposition essentiellement centrée sur l’œuvre de Monsieur ALFONSO DI MASCIO, un sculpteur et dessinateur Italien vivant en Belgique, intitulée AU-DELA DE LA TRANSPARENCE.
La transparence est, selon l’étymologie scientifique, la propriété qu’a un corps de laisser passer les rayons lumineux afin de révéler ce qu’il y a derrière sa structure. Formé du latin « trans » (au-delà) et de « parere » (paraître). A l’analyse du mot, on s’aperçoit qu’il revêt une étymologie fort vaste, laquelle embrasse tant la sphère scientifique que philosophique et politique.
L’Histoire de l’Art s’intéresse également à la transparence mais essentiellement pour mettre en exergue certains aspects techniques essentiellement liés à la peinture, en ce qui concerne la pertinence de tel procédé dans le rendu des couleurs associés à la forme. Il n’est pas fréquent de la voir prise comme sujet d’étude sur lequel bâtir une œuvre. Surtout une œuvre aussi riche que celle de cet artiste à la démarche très intellectualisante, laquelle exige du visiteur qu’il déploie sa palette de réflexion face à l’œuvre qui l’interroge.
Pour ALFONSO DI MASCIO, la transparence est le véhicule servant d’intermédiaire entre ce qu’il voit et ce qu’il y a derrière le miroir. Et ce véhicule faisant office de messager entre l’Homme et l’inconnu, c’est le verre. Le verre mettant en évidence notre première réalité en tant que phénomène sensible. L’artiste utilise le symbole pour donner corps à sa recherche. Le symbole est, par excellence, le pare-brise, lequel est extrapolé de sa fonction première pour servir d’intermédiaire entre un intérieur (celui de la voiture) et l’extérieur, exprimé par une réalité en continuelle métamorphose. De ce fait, le visiteur doit impérativement prendre son temps de réflexion face aux surprises que dévoile cette démarche à la fois artistique et philosophique. Mais une fois le seuil franchi, la découverte est fascinante !
La première constatation est que le verre est un corps. Un corps avec une peau.
La matière usitée est le verre feuilleté à l’intérieur duquel se trouve une membrane (la peau) insoupçonnée. Ce derme est l’expression de la réalité que la transparence rend évidente.
Si généralement l’aspect technique est révélé à la fin, dans la démarche d’ALFONSO DI MASCIO, il ne peut qu’être au centre de la recherche car il explique toute sa philosophie. L’artiste exploite les deux surfaces du verre (le côté recto et le côté verso) en les traitant au marteau et au burin pour enlever la matière qu’il qualifie d’ « indésirable » parce qu’elle le sépare de la peau, intermédiaire vers la réalité. Une fois la membrane atteinte, il la travaille en son centre, jusqu’à la faire sortir de son cadre, en la transformant en une fine pellicule blanche. Une sorte de pâte laiteuse (VERRE + GALET).
Un aspect que nous avons cité plus haut, à propos de l’artiste, doit être absolument souligné, à savoir son immense talent de dessinateur.
L’on peut dire que son talent de dessinateur est une conséquence de son être sculpteur. Il suffit d’observer la position du dos féminin ainsi que l’échancrure profonde assumée vers le bas par l’écartement des jambes que rappelle le demi-cercle abritant la pièce oblongue qui termine VERRE + GALET. De même les nervures « badigeonnant » le verre que l’on retrouve, réalisées au fusain, sur le dos du personnage féminin, mettant en relief la nervosité du trait dans un contraste d’ombres/lumière.
Les PENDUS constituent une réflexion sur le tout dans le tout.
Fin connaisseur de l’Histoire de l’Art, l’artiste s’inspire du peintre et théoricien de l’Art Italien du 16 siècle Giorgio Vasari. Cette œuvre, conçue par trois pare-brises enroulés à la main, met en exergue la peau des suppliciés s’échappant de l’encadrement noir, enserrée dans la peau du verre de laquelle elle est issue. Enroulée à mains nues, la peau maintient le verre et permet son pliage. Dans cette œuvre, la transparence est, de fait, le maître mot régissant la composition. Tout fuse à travers le verre. Lumière et couleur naissent au jour. A ce stade, une question doit nous interpeller : quel est l’élément chromatique à prendre en considération ? S’agit-il d’un chromatisme essentiellement centré sur le noir ou bien est-ce la brillance du verre enroulé sur lui-même, exposé sur un support de bois également de couleur noire qui doit retenir le regard du visiteur ?
Tout est à prendre au premier degré car, une fois encore, tout est dans le tout : la transparence donne vie à la matière profonde du verre, tout en révélant au regard la brillance du noir.
Les dessins réalisés par l’artiste sont de conception baroque. Le jeu des contrastes, la peau plissée, les postures torsadées sont (toutes proportions gardées) proches de celles d’un Michel-Ange. Cet engouement pour la forme torsadée se retrouve, notamment dans ROUGE + NŒUD + BARRE.
Dans cette œuvre, la membrane (la peau expulsée du verre) trouve précisément cette dimension baroque dans ce côté torturé que présentent les sculptures de cette époque, elles-mêmes héritières de la sculpture antique, particulièrement dans la réalisation des plis des vêtements. Dans cette pièce, la présence de verre réduit en fines brisures à l’intérieur de la peau, évoque la pluie, donnant à la matière un côté lisse et mouillé.
Ce qui saute immédiatement aux yeux du visiteur c’est l’absence de visage sur les dessins de l’artiste représentant des torses. En effet, ce dernier prive les corps d’identité, les cantonnant à de simples réceptacles dynamiques, destinés à être engendrés par le tracé du fusain.
DESSIN 10
représente une coupe de membrane. Remarquons le traitement de la matière. La consistance de la chair, l’élasticité des tissus puissants comme des muscles en extension. Le trait au service de la matière règne en maître.
Ce qui prouve que les dessins d’ALFONSO DI MASCIO ne sont pas simplement l’œuvre d’un dessinateur mais bien celle d’un sculpteur qui dessine.
Formé à l’Académie de Watermael-Boisfort par le Professeur Gérald Dederen, il a une formation de dessinateur en architecture, ce qui l’a conduit au dessin technique, pour se tourner par la suite vers le dessin artistique avec bonheur.
Un dénominateur commun lie sa production au fusain avec celle sur verre, à savoir qu’à l’instar des dessins, ses sculptures peuvent être accrochées au mur. Ce qui signifie qu’en dernière analyse, la ligne de démarcation intellectuelle entre l’image sur papier et celle sculptée demeure extrêmement floue, pour ne pas dire inexistante, puisque l’une complète l’autre.
La transparence, l’artiste veut la dépasser pour atteindre une métaréalité. Le visiteur qui la reçoit est conduit au-delà de lui-même, au travers de sa transparence propre, par le biais de la nature physique inchangée du matériau usité par l’artiste, lequel, même torsadé, martyrisé, réduit en brisures scintillantes, n’en demeure pas moins…du verre.
Lettres
Alfonso Di Mascio et François Speranza: interview et prise de notes sur son déjà réputé carnet de notes Moleskine dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (5 février 2014).
N.-B.:
Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.
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