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Joie de vivre,

 

Paris est gris aujourd'hui,

oh que m'importe,

puisque l'air je le sens tout fleuri,

les cafés sont pleins de gens

vêtus de clair et dont les regards

en secret attrapent un soleil,

 invisible pourtant.

Ici et là, l'allégresse du jazz

 pétille, bat son plein,

 habille tout en bleu les nuages incolores,

les gonfle de joie, d'impertinence,

fait qu'ils deviennent des fleurs,

des étoiles en plein jour.

Paris est gris aujourd'hui,

oh cela m'est bien égal,

puisque la Seine en un instant,

s'extravertie, audacieuse et dansante,

avec le ciel tout  médusé,

elle s'acoquine féline ;

Ici et là, d'immatérielles bouches,

me touchent, me posent des baisers,

 dont les sonorités joyeuses et chaudes,

 me comblent de bonheur,

même en l'absence de vous.

Paris, je le bois tout entier,

le savoure, le reçoit ;

je le traverse non sans grâce,

à pas de danse,

vêtue d'un ciré vert,

d'un impressionnant chapeau de lumière,

 puis d'une robe coquelicot ;

il fait si beau en ce jour de janvier,

les jardins à l'infini se multiplient,

l'enfance toute entière

réapprend à voler, à jouer avec un rien ;

un bout de ciel, un brin d'herbe,

un ballon vert, une boite de craie,

bref à redevenir géante !

Oui, décidément il fait si beau ......

 

NINA

 

 

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Après

 

Soliloque

Par ici, nous croyons beaucoup

À l’importance de notre être.

Que deviendra la vie quand nous ne serons plus,

Les saisons seront-elles à jamais aussi belles?

Devons-nous vraiment disparaître?

Quelques fois nous doutons de tout.

Or, là-bas, des millions d'humains

Ne se posent pas de questions.

Ils ont la certitude, qu'après, ils seront bien,

Léguent à leurs enfants cette seule espérance.

Il serait sage de comprendre

Qu'il s'agit là d'un fait certain.

1/8/1991

 

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Ma confortable indifférence

 

Songerie

Je n’interroge pas le sort,

Même à court terme, imprévisible.

Ma chaloupe amarrée au port,

Je vis solitaire et paisible.

Je vois, en restant éveillée,

Des crimes engendrés par la rage,

Mais aussi, suis émerveillée,

Par le génie et le courage.

Nostalgique, ou soudain ravie,

Chaque jour, je tourne une page.

Je transcris des instants de vie,

Et capte de belles images.

Je m'habitue à la vieillesse.

Mon corps est devenu pesant.

Je me vois enlaidir sans cesse,

Un constat certes déplaisant.

J'aurais voulu avoir la chance

De penser que tous les pays

Verront cesser les violences

Et disparaître la folie.

Comment pourrais-je l’espérer?

Elle est devenue incurable.

Nul ne voudra s’en libérer;

Ce sont les autres qu'elle accable.

Dans mon île, étant à l'abri,

Je médite dans le silence,

Souris souvent, jamais ne prie,

Me maintiens dans l'indifférence.

18 janvier 2015

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Le "Traité sur la tolérance" est une oeuvre polémique de Voltaire (François-Marie Arouet, 1694-1778), publiée en 1763. Elle était destinée à stigmatiser le fanatisme religieux des juges de Toulouse qui condamnèrent à mort le protestant Jean Calas.

Après avoir exposé dans un premier chapitre ("Histoire abrégée de la mort de Jean Calas"), la situation particulière de Calas ainsi que les principes sur lesquels se fondait la Réforme, Voltaire entreprend de montrer les avantages humains qu'offre la tolérance dans les pays où elle est en vigueur: Voltaire entend prouver ensuite que l' intolérance, n'étant ni de droit divin, ni de droit naturel, ne saurait être non plus du droit humain. La preuve en est que l' antiquité classique l'ignorait: quant aux Romains, s'ils ont persécuté les Chrétiens, ce ne fut point pour des raisons religieuses, mais tout simplement parce que les Chrétiens attentaient à la sécurité de l'Etat.

Loin d'être fondée sur un principe noble, l' intolérance trouve sa source dans ce que la vie sociale offre de plus bas: le fanatisme. En effet, celui-ci ne naît que dans l'esprit des peuples élevés dans la superstition, et nous savons que la superstition "est à la religion" ce que l' astrologie est à l'astronomie: la fille très folle d'une mère très sage".

A une époque comme la nôtre, où la raison envahit toute la vie sociale, l' intolérance est un non-sens; par contre, la tolérance est "un apanage de la raison". C'est le mérite de la philosophie d'avoir su dissiper les brumes du fanatisme et de l'obscurantisme, d'avoir trouvé, par-delà les divisions le thème universel, divin, qui rassemble tous les hommes dans la recherche commune du bien. La philosophie seule, cette soeur de la religion, a désarmé les mains que la superstition avait si longuement ensanglantées: et l'esprit humain, sorti de son ivresse, est resté stupéfait des excès auxquels l'avait porté son fanatisme.

La tolérance, fille de la raison, est une des exigences suprêmes de la civilisation et de la société; elle est un facteur de paix sociale, de respect et d'amour réciproques. Autour de ce thème central, l'auteur s'abandonne à de nombreuses discussions, que viennent rehausser d'audacieuses pointes polémiques d'une très grande perspicacité. Cet écrit de Voltaire est un des chefs-d'oeuvre qu'il convient d'inscrire au compte de ce grand mouvement d' émancipation qui devait conduire à la liberté religieuse moderne. On a fait remarquer, avec juste raison, que ce que Voltaire fit concrètement pour le triomphe de ce mouvement compte encore plus que son oeuvre écrite elle-même. En effet, non seulement il réussit à réhabiliter la mémoire de Calas, mais quelques années plus tard, lorsqu'une aventure analogue arriva à un autre protestant, Sirven, qui, condamné par contumace, s'était réfugié en Suisse, Voltaire se jeta dans la lutte, mit en branle les hautes personnalités qui s'honoraient de son amitié, jusqu'à ce qu'il obtint la réhabilitation de cette autre victime du fanatisme. A cette occasion il écrivit un pamphlet non moins célèbre intitulé: "Avis public sur les parricides imputés aux Calas et aux Sirven" (1766). Mais dans sa conclusion nerveuse, dans sa chaude éloquence, et dans l'incomparable élégance de son style, le "Traité sur la tolérance" reste un chef-d'oeuvre de polémique, peut-être jamais égalé et qui résume en soi toutes les qualités du genre.

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Les croisés du temps présent

 

Soliloque

 

Les vérités venues du coeur,

Rendent l'âme parfois peureuse.

Elles ne peuvent être douteuses,

Sont protégées avec vigueur.

Quelques croisés du temps présent,

Ennemis de l'obscurantisme,

Emplis d'un constant optimisme,

Attaquent des moulins à vent.

Quand des tabous sont pris pour cibles

Par des destructeurs d'illusions,

Il se produit des explosions,

Aux effets certes imprévisibles.

L'histoire a la mission d'instruire.

Les armes, qui causent la mort,

Donnent tous les choix aux plus forts.

Les gagnants peuvent tout détruire.

Il devient affligeant de voir

S'étendre, en tous lieux, les carnages.

Peu d'humains sont devenus sages,

Ayant eu recours au savoir.

17 janvier 2015

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Les Rhinocéros sont de retour !

Le glas de Notre Dame a fendu le ciel de Paris pour annoncer la mort des Rhinocéros.

Précédemment, le mercredi sept janvier deux mille quinze, dans une paisible rue de Paris, un groupe de rhinocéros de métal franchit le seuil d'un immeuble. Des claquements secs métalliques tuent des artistes, des penseurs de notre temps, des gardiens de sécurité et un employé.

La Liberté baigne dans une marre de sang devant nos yeux ébahis.

Puis l'escalade continue dans une imprimerie, puis une épicerie cacher.

De cette tuerie résulte dix sept morts et des blessés corporels et de l'âme.

Le monstre de métal veut s'attaquer à la Liberté de rire, de penser, de pleurer, de travailler, de créer....mais le monstre a déjà blessé New York, Boston, Toronto, Londres, Madrid, Bruxelles et Paris maintenant. Mais n'oublions jamais les premières victimes de pierre et de sable qui furent défigurées à jamais, ces statues géantes de Boudha gardiennes du Temple, mémoire de notre patrimoine mondial de l'humanité, restent debout face aux rhinocéros même sans leurs visages , leurs regards restent fixés sur eux..

L'épilogue à toutes ses journées d'émotions aura été la marche d'un peuple et d'un monde droit dans leurs bottes face aux rhinocéros iconoclaste du vingt-et-unième siècle.

Et je pense à Paul Eluard et à son poème Liberté "Sur mes cahiers d'écolier. Sur mon pupitre et les arbres. Sur le sable de neige. J'écris ton nom.(...) Et par le pouvoir des mots. Je recommence ma vie. Je suis né pour te connaître. Pour te nommer. Liberté." -Poèsies et Vérités 1942- Et relire avec délectation Paroles de Prévert cette belle invitation à la liberté artistique.

Betina Vorquerre

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A la mémoire de Jean Dumortier, poète (1926-2014)

Jean Dumortier me fut ami.  Un des hommes les plus généreux que j'aie rencontré.

Je tiens à déposer ici de nombreux poèmes issus de sa plume 

Un ensemble d' extraits de ses oeuvres est contenu dans le CD-ROM que je lui ai consacré. C'est un souvenir précieux que d'évoquer tous ces passages d'oeuvres diverses: j'ai eu l'immense honneur de choisir ces extraits sous ses conseils.

Je les avais présentés sous le titre "La symphonie Dumortienne".

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On était en pleine indécence, l’indécence de la chair triste, la chair grise, de la chair
suaire.

On se déclarait en paix, on se retrouvait en cendres…

On se mit à parler, à se toucher, à se sentir, à se reconnaître, à se restituer…

On écouta les pulsations de son double, celles de ses frères, celles de ses cousins
lointains…

On rompit les habitudes, les amarres, les jugements portés sur autrui, sur soi-même,
on se découvrit nu ainsi qu’à la naissance.

On savait, on savait de science intuitive, instinctive, que le provisoire, que le
précaire, que le fragile aujourd’hui rendait plus heureux que l’image de l’infini, que
la promesse d’un lendemain qui chante.

On retrouvait la terre, ses éclosions, sa maturité, ses endormissements, ses
respirations, on retrouvait le cycle, on éprouvait le retour du cycle.

On pouvait mettre à feu ses limites ou les bénir, propulser le jour dans la nuit pour se
ramener à l’enfantement, au soleil, à la mort qui cessait tout à coup d’être la peur qui
toujours jusqu’ici vous avait pris aux entrailles.

On pourrait vivre sa mort, on aurait droit à sa mort.

On pouvait jouir de la lucidité de ses gestes et de sa pensée.
On retournait au sang dans les racines de ses mots, de ses cris.

On pouvait tenter son incohérence sans s’attendre à être puni.

Être sans honte et sans orgueil, être homme, enfin!

Extrait de "Viviers"

(...)

Vivre le bonheur, avec ses lunes et ses marées, prendre en selle affinités et
dissemblances, vérités et passions.

Être ce chantier de contradictions et d’incertitudes, et aussi, ce jardin de plantes
aromatiques où des traverses échangent signes et couleurs, que le goût et le toucher
transmuent en liqueur de savane.

Devenir l’étoile de l’équilibre, et ce va et vient de moindre souffle, que les tasses de
Chine retiennent par l’oreille comme la trajectoire de leur destin.

Puiser où le jour tient la nuit en émoi, où le chant du coq répercute les doutes de
l’homme, où la femme a pour unique espoir le fragile appel du roseau.

Extrait de "Viviers"

(...)

Vous longiez les vitrines en attente de regards et,

parfois, frôliez les hautes marches des grands hôtels.

Tu distinguais les étoles de soie blanche ou champagne qui répandaient un parfum
discret que tu lapais pour la nuit.

Tu n’osais demander à ta mer de monter ces escaliers pour soulever un pan de la
réception. Tu écoutais l’écho se confondre avec l’écume de la vague approchante.

Tu étais trop sage ou timoré pour franchir ces portes vitrées qu’ouvraient ou
refermaient des hommes étrangement vêtus.

Plus tard, tu découvris l’atmosphère feutrée et sensuelle de ces salons où l’on
s’enfonce tout entier jusqu’au ras du front.

Confinement, endormissement, glissement du temps sous le timbre d’une horloge
éternelle.

Les dames ici, sont si luxueuses, elles se promènent avec une lenteur extrême…

Il t’arrive ainsi de t’étendre dans un aquarium de velours de Chine. Tu te laisses
dériver sous une rêverie muette qui engourdit les couleurs. Tu t’abandonnes aux
papillons des figurines du silence… Tu entres imperceptiblement dans le flou, tu y
glisses, te dopant d’encres pastel. C’est alors que s’ébauchent les dames si luxueuses
de la création…...

Leurs nappes de langueurs te recouvrent, les fleurs de chaleur s’intersticent à tes
tempes… ...

Tu as la tête qui s’emplit de miroirs où
apparaissent des visages les uns plus singuliers que les autres, s’ignorant le plus
naturellement du monde. Ils évoluent sans le moindre bruit, se croisant et
s’entrecroisant, se déplaçant du même pas.

Ils entrent et ressortent des tapisseries à fleurs des grandes salles à manger où
s’infiltrent leurs chuchotements d’ivoire sous des lampadaires aux teintes sombres.

Hésitant à être chair ou effluve, ton ombre se tient à l’écart, blottie au boudoir.

Des sels de bain s’évaporent d’épures de pantomimes abandonnées par un enfant.

Flottent des voix qui n’appartiennent plus aux corps des dames si luxueuses…

Tu es livré à toi-même, aux failles et outrances, à tous ceux qui t’habitent ou t’ont
habité.

Tu trembles devant ta lumière, tu crains à chaque instant qu’elle ne s’éloigne, tu
t’emportes sur le coursier arrivé là par miracle…

Vous longez les vitrines en attente de regards et, parfois, vous frôlez les hautes
marches des grands hôtels.

Tu distingues les étoles de soie blanche ou champagne…

Tu aperçois ton ombre s’éloigner de toi…...

Tu tentes de rejoindre l’écho de ton écriture…...

Extrait de "Sais-tu Florence"

(...)

Dans mon pays où mon amour a rendu la lumière aux frênes, dans mon pays promis
aux retours des printemps, déjà l’été a surgi au-dessus des astres anciens.

Les membres et les branches rejaillissent à travers l’horizon, Les cerveaux ont cessé
de languir aux tempes.

Les éperviers n’ont plus de proies pour nourrir leur grand corps noir,

Les chrysalides s’étirent dans les plaies où nageaient les cœurs.

Dans mon pays où mon amour a plaidé la sève et le safran, dans mon pays charrié
par les eaux tortueuses et brunes,

l’été a repris foi et la vie draine ses longues robes blanches.

Les châssis laissent à nouveau passer les rayons du soleil

et dans les chambres où le duvet avait pris forme de moisissures, tranquillement,
mon amour a répandu ses jupes de blé couché.

Là-haut, dans la montagne, les grives chantent.

Dans mon pays où mon amour a dessiné ses oiseaux,

dans mon pays où les carrières creusaient leurs abîmes,

l’été a donné aux bras la force de l’étreinte.

Les cimaises perdent, peu à peu, leur immobilité tenace

pour laisser au toucher le doigté de la tendresse.

Le bleu a vertu de parme et l’ocre de l’âtre

lèche les cheminées que le vent d’ouest ondule.

Dans mon pays où mon amour a rendu la lumière aux frênes, dans mon pays promis
aux retours des printemps, déjà l’été a blessé l’onde où se corrompaient les racines.

Les gestes de l’enfance trempent leurs vignes

dans les corridors austères de mâle mort.

L’érable a conquis l’écrin et la vitre,

l’angle a perdu les aspérités qui rougissaient l’écorce.

Dans mon pays où mon amour invite Dieu,

dans mon pays où mon amour gorge à nouveau les noces,

l’été donne le seigle à la main de la femme
et l’huile à la herse du corps de l’homme.

La parole haute de la chair mûrit l’âme

et l’incantation prend l’esquisse de la bouche.

Les baumes s’étalent en nappes de semences.

Dans mon pays où mon amour a le visage de la prunelle,

dans mon pays où la laine tisse l’ébauche,

les doigts coiffent le pain d’un arôme de miel.

La terre où s’allonge l’été prend source

aux origines des pouvoirs de l’amour,

la clarté des cylindres enveloppe la nuit

pour que se repose, au fond du rêve, la joie de midi.

Extrait de "Sais-tu Florence"

(...)

Ma fille des atmosphères,

frémissant au moindre souffle,

corps giboulée si l’attente est muette,

cœur en garde à l’apostrophe de son nom,

langue multiple aux saveurs du pays,

passante empressée ou lumière de rire,

toujours à l’heure et à la parole donnée.

Ma fille des atmosphères,

de silence aux yeux de sable,

greffant sur sauvageon son empreinte

de femme libre, de corail vivant.

Roseau couvant sa brise

comme au temps des promenades

sous le ciel bas de nos régions grises.

Ma fille des atmosphères,

que l’écho tient en éveil

sous la paupière et le frisson de décembre,

laissant ses pulsions dans la loge des coquillages,

à chaque pas multipliant ses sillages,

buvant l’eau de source comme l’oiseau des charmilles.

Voici que tu entrouvres ta porte et ta venue,

quand le jour te fait signe

et que la nuit se retourne

sur l’alternance des vents.

Ma fille des atmosphères

que le rire retient à l’étoile

si l’enfance tremble dans sa chrysalide.

Extrait de "La Porte du Temporel"

(...)

Mûre, mère, mante,

quand tu élèves les arcs au ciel de tes abondances,

je m’offre tes marais salants et, autour de tes reins,

plie mon plaisir pour t’en donner davantage.

Jument de ma joie que longe ton haleine,

je t’entends hennir au gré de tes délices

et le blé de notre couche jaillit de nos eaux fortes.

Lorsque je lâche ton nom et des mots d’homme,

le trait de l’éclair entaille l’oranger.

Tes accords de violoncelle bercent nos ondes

sous les âpres envies de nos bouches affranchies.

La résine découvre l’écorce, et nos corps chevauchants

s’annoncent à la tendresse comme la pluie de midi.

Les songes jonchent nos artères bleues et s’apaisent

à la lumière éteinte comme la terre à l’étoile.

La chaleur se range et baisse les yeux,

nos mains s’adoucissent et reposent l’étoffe.

Les nappes d’eau glissent le long de nos berges,

nos doigts coiffent le pain d’un arôme de miel.

S’abaisse le jour à la fente du soir

Extrait de "Sais-tu Florence"

(...)

Je t’appellerai Lalibela pour ce banc de tourbe

où tu t’affales quand la barque tire vers le fond.

Je t’appellerai pour l’ovale indécence dans la tragédie

ou dans le sommeil.

Je t’appellerai tant la pellicule aura imprimé ton corps

en l’espace du toucher.

Je te nommerai Galla, Galla Placidia tant tes jambes

auront soulevé de bras en traversant le désert.

Je te nommerai parce que ton regard aura fouillé le soleil

jusqu’au vertige.

Je te nommerai pour la réclusion du mal, pour la dette

arrachée au désir, pour l’homme expatrié que tu as ramené

au jardin.

Je t’inviterai pour l’arbre, pour la terre fendue,

pour les cristaux, pour la fête, les tropiques, les sortilèges.

Je t’interpellerai pour l’imprécation roturière,

pour la chair assouvie, pour la nuit où bivouaquent les

silences

Je te baptiserai Samarie tant à ses heures

le tourment nourrit ta langue et me chevauche.

Extrait de "Viviers"

(...)

L’errance… dans tes limbes, auprès du feu follet

de la mémoire.

Tu me réveilles, tu me révèles.

Tu me donnes ton délire…je me vois à distance.

Ton œil sur mes perspectives, sur mes perceptions.

Tu vois de moi ce qui demeure en toi. Ta ressemblance…

Tu participes de mon mouvement, tu hantes mes visibles,

mes énigmes, tu te tisses en moi…

Tu vois par mes mains, mes reflets se portent jusqu’à toi.

Ton œil dans ma vision, c’est mon témoin dans ta genèse.

Tu me rends à la polarité.

Tu me reconnais au chas de l’aiguille,

au cœur du passé, tu prends ma pesanteur, je rebondis de

ta cornée, je deviens le papier de tes encres, de tes œuvres,

le buvard de ton sang, j’ai accès au monde par ses tailles douces.

Tu me rends mon temps de latence et ma provocation.

Je hurlais à la lune, à l’espace, à la précision.

Tu me donnes l’en-soi, je nais de ton point d’arrivée, de ton

point de non-retour…

Tu es mon intrus, mon intruse, lorsque je crois achever la ligne, lorsque je crois
parachever le rêve…

Je peux m’endormir…

C’est d’ici que je te verrai le mieux…

A l’en-deçà…à l’au-delà du regard…

Extrait de "L'Age fruitier"

(...)

à Olga Davidow,

Warum?

Là, vit la part de l’ombre, la part jamais montée jusqu’au miroir.

On est descendu d’une marche. A tâtons.

On a cessé de boire au même verre, d’avoir les mêmes mots sous la chemise.

Warum?

C’est venu lentement, les consonnes remplacent les voyelles, le grand désordre des
nuages où l’on avait sa place, son rôle, sa dévotion, ses émotions, son auto-
complaisance.

Warum?

L’infirmité si ancienne qu’on ne la met pas à table par un soir d’ivresse ou de deuil.

Le trou, le paradis imaginaire, la plage innocente, l’éblouissement solitaire, la vision
de la rose…

Warum?

Le brouillard dont on s’éprend, la parade au lieu du visage, ton emblème qui se
meurt, le mien, lueur de bête à l’affût, je ne t’entends plus, tu me prêtes l’impossible.

Warum?

Tu es entré par le mur, je t’attendais sur le toit,

tu martèles, je me réduis, tu empiètes, je me terre,

tu prends, je me donne, tu ris, je survole.

Warum?

Je murmure à la part de l’ombre, à la part jamais montée jusqu’au miroir. Le temps
n’est pas passé entre nous, il demeure.

Tu m’as vêtue pour les autres. Je brillais dans tes souches.

Tu n’as gardé de moi que la lumière. Je vivais si peu à la surface.

Warum? Warum?

Extrait de "L'Age fruitier"

(...)

Mets le couvert sous le tilleul…

Je servirai le vin, nous beurrerons le pain, la douceur de vivre, nous découperons le
jour et la calebasse…

Nous nous souviendrons de ce que nous étions, la haie se hissera à notre hauteur…

Ton collier réveillera la lune…

Nous aurions perdu en route la chaleur de l’été, nous chercherions nos voix pour
retrouver la falaise…

Nous nous étions dit des fables, le visage nous avait manqué quelque part… et la
moitié du ciel…

Tu me parlerais de l’homme de ta vie – car tu aurais épousé l’homme de ta vie -, tu
me dirais le bleu délavé de la nappe que tu as posée sur la table…

Tu me dirais qu’on ne compte pas les mégots des autres dans le cendrier…

Nous dirions nos enfants, leur ferveur, leurs racines, leur déracinement…

Le vent aurait les joues fraîches…

Nous regarderions subrepticement nos mains, leur abondance, … et tout ce qu’il faut
à un seul instant pour endiguer le fleuve.

Extrait de "L'Age fruitier"

(...)

Sur un mode loufoque

Nous sortons ici d’un déluge de poussières dont on n’a pas idée. Mes oreilles en sont
encore pleines!

Il fallait un jour se mettre à l’ouvrage!

Nous avons rassemblé les dix mains de la famille et nous nous sommes pris à étaler
nos trésors au jardin, les recouvrant de bâches car en nos contrées il pleut plus que
de mesure.

Nous avons commencé à détapisser les murs, à la ver les plafonds, à rejointoyer où il
fallait.

Vingt ans de vie commune, pendant lesquels j’avais inconsciemment imposé aux
autres de ne pas renouveler la tapisserie.

Ce fut ma fête!

Mon inadaptation au réel, au quotidien, s’est étalée au grand jour. La paralysie
s’empara de mes mains.

Mes doigts s’allongèrent, se mêlèrent, s’entr’avertirent qu’ils ne pourraient se
démêler si je ne gagnais le faîte de la maison.

J’étais plus seul que Jésus en croix: lime, tournevis, marteau, tenailles, vrille, scie,
équerre, règle, ciseau, grattoir, crampons détalaient à ma vue. Plus j’étais en chasse
et moins j’étais lucide, moins je trouvais. Ce qu’on m’avait dit, il y a cinq minutes,
était oublié depuis dix. C’était pire qu’un mot qui vous quitte devant la feuille
blanche ou l’auditoire.

Extrait de "L'Age fruitier"

(...)

Je me surpris à rêver…mais c’était pour retrouver l’école quand les chiffres me
galopaient par-dessus la tête et que mon cartable se vidait de son contenu parce que
je ne connaissais pas les tables de multiplication…

On me surprit rêvant devant le seau de colle quand un nuage de couleur affleurait à
la surface…

Arrêté au milieu du désordre, je ne fus soutenu par personne, lorsque je tentai de
justifier ma halte incongrue.

Je démontais les tempéraments les plus sereins, je décourageais les plus
compréhensifs…

J’avais alimenté les quiproquos, je faisais porter le deuil ou le chapeau, j’étais un
introverti aux extravagantes mutations mentales et puis de toute façon quand, en
dernière phase, il faudrait remettre les choses en place, meubles, cadres, portraits,
paysages, vaisselle, bibelots, souvenirs risquaient la commotion entre mes mains.

Aussi, inapte au rythme communautaire, capable au contraire des inversions les plus
désolantes et d’une fantaisie que j’étais seul à comprendre, je fus prié d’arrêter mon
cinéma…

(...)

Tu as bravé les dires, les pierres, le désir, la loi, l’habitude.

Tu connus Pierre, Jacques, Zébédée, les sans nom et les

sans grade de Chorazin et de Bethsaïda.

Tu as dit l’aile du vent dans son monologue, le ravissement de l’olivier à l’esquisse
de la lune. Tu t’es penchée vers celui qui te racontait sa solitude et tous alors
s’épanchent avant de demander trois poses pour le prix d’une…

Tu leur avais laissé ta spontanéité pour n’être plus qu’un corps qui flanche dans sa
parodie.

Tu avais reçu les deniers mais combien en restait-il après le passage de Zachée, chef
des publicains et des bordels de Magdala?

Quand tu répandais le vase d’albâtre, tu ne songeais ni au lendemain, ni aux
réprobations, ni aux injures faites à ta condition au faîte de la jouissance.

Tu as bravé les dires, les pierres, le désir, la loi, l’habitude et tu as entendu Jésus,
comme tu avais écouté Jude, Mathieu, Jonas avec cette essence d’infini au fond des
yeux.

Que savais-tu de Jésus, si ce n’est qu’il parlait aux hommes qui ne franchissaient
plus ton seuil?"

Tu l’avais entendu: «l’œil est la lampe du corps. Si ton œil est en bon état, tout ton
corps sera éclairé; mais si ton œil est en mauvais état, tout ton corps sera dans les
ténèbres».

Tu l’avais entendu: «ne soyez pas comme ceux qui aiment prier debout dans les
synagogues et au coin des rues pour être vus, mais au contraire, quand tu pries, entre
dans ta chambre et ferme la porte.»

Tu le suivis depuis ce jour où le soleil s’était couché sur Béthanie.

Tu le suivis te cachant dans les plis de la foule, t’arrêtant quand il se reposait sur la
colline, traversant les bourgs à longue distance, pour n’être reconnue, t’approchant
du rivage quand il s’embarquait, te fondant aux femmes de Galilée pour oublier le
centenier, le scribe, le centurion, le grand-prêtre et le joueur de flûte.

Que savais-tu de Jésus, si ce n’est ce que tous en disaient, qu’il avait des disciples,
des contradicteurs, des miraculés, des croyants dont il dérangeait l’ordre établi et la
bonne conscience?

Que savais-tu de lui, si ce n’est qu’il buvait de l’eau et du vin, que le pain et le
poisson étaient son quotidien?

Tu l’attendais aux carrefours où s’achèvent les cortèges, quand il disait l’homme
possible, l’homme réel.

Tu l’attendais où sa vérité risquait de trébucher, où d’autres chemins s’ouvraient
comme tes bras s’étaient ouverts à l’inconnu de Jéricho.

Pourquoi n’avais-tu pu l’aimer comme celui-là, pourquoi n’avait-il eu besoin de toi?

Pourquoi n’arriverais-tu pas à te passer de lui?

Tu l’attendais où tout être porte son âge ainsi qu’un plaisir oublié. Tu l’attendais où
ton cœur frémissait pour aimer encore, car tu étais femme et ne pouvais aimer que
comme femme, rêve éveillé d’un deuil exclusif.

Tu l’attendais déjà sachant qu’il ne viendrait jamais, qu’il ne serait même pas une
clairière évadée de tendresse, que le lien qui subsisterait entre vous resterait cette
rencontre souterraine où seule la parole serait le fruit consumé.

Tu l’attendais déjà pressentant que le lit où tu découvrirais son empreinte ne serait
autre que celui de la tombe où tu ne te coucherais pas en croix…

Extrait de "Un été oublié"

(...)

Tu étais pauvre, Marie, tu étais nue sous ta robe,

tu marchais avec peine, trouvant que le fruit de Dieu était lourd à porter dans les
rues de Nazareth.

Derrière les portes du soir auxquelles ton compagnon frappait, nulle voix, nul signe
pour accueillir ton corps en gésine et tu ressentais la difficulté de vivre pour les sans
domicile.

Déjà tu perdais les eaux…

Tu les perdis souvent…

Seule déjà, quand le sang des enfants de Rachel coula

à flots dans le désert, seule quand tu appris que l’épée rompit le cordon des mères,
afin que nul en dessous de deux ans n’échappât à l’égorgement pour que soit sauf
l’orgueil d’un roi.

Combien d’enfants pour un seul?

Lancinante question de tes jours d’Egypte…

Seule devant les hommes de loi, devant le Grand Prêtre et peut-être aussi devant
Joseph, seule parce qu’à dix ans déjà ton fils t’avait quittée, seule devant les tiens
réclamant la libération de Barabbas, seule comme on est seul dans la douleur, trente-
trois ans après…

Depuis, on t’a revêtue dix fois, cent fois, mille fois, selon les coutumes des peuples,
on a laissé croire que tu étais reparue à quelques endroits du monde, renforçant la foi
chez certains, la faisant perdre à d’autres.

Des Sages ont affirmé que tu fus l’unique femme sur la terre qui enfanta avec le seul
recours de Dieu.

Aujourd’hui, d’autres Sages prétendent qu’au contraire,

tu fus aimée dans ta chair, pour enfanter le Fils de l’Homme.

Cela n’enlève rien à ton amour pour l’enfance, au désespoir que tu partages avec
toutes les mères, quand

les humains violent, pillent, tuent même au nom de ton fils.

Tu étais pauvre, Marie, tu étais nue sous ta robe et j’aurais aimé que tes adorateurs
ne considèrent pas la nudité comme le relent du monde…

Ici, te voilà par le désir d’un grand d’Espagne,

plus seule encore, peut-être…

Pour sûr, tu es arrivée dans nos provinces conquises par le feu et le glaive et voilà
que ceux de Tolède t’imposèrent à nous, en laissant dans nos terres leurs ossements
d’hommes menés par l’orgueil et l’intolérance d’un autre roi…

Ici, le bleu et le blanc dont ils t’ont revêtue ailleurs, est soumis au noir dont tu n’as
que faire pour recouvrir ton corps solitaire.

Ton fils est sur sa croix, ayant perdu tes eaux et ton sang, payant le tribut de l’erreur
judiciaire.

Tu portes le deuil comme on porte la nuit.

Centrée sur ta douleur dans ton corps qui n’a honte d’être corps, avec tes mains de
cinquante ans de connaissance,

de solitude, de joies et de peines.

Je confonds mes rides avec les tiennes, la transpiration de mes jours avec le sel de
tes larmes, mais je t’aurais aimée plus aux côtés des hommes que là-haut perchée, où
ils t’ont mise, comme s’ils craignaient qu’on ne t’enlève, pour te murer dans les
cœurs…

Extrait de "La porte du temporel"

(...)

Les jacarandas sont en fleur, les magnolias aussi, et

les bougainvilliers.

Nous sommes en octobre, c’est le printemps ici, où tout peut arriver.

La Vierge du bon air, patronne des marins de Séville pardonne à l’avance à tout le
monde en montrant son enfant à la Ville, Buenos-Aires.

Les annonces publicitaires des journaux font actuellement grand état des gourous,
des voyants et des tireurs de tarots.

Bien des salles de spectacle affichent «complet».

Les stades également. Comme au temps du Mundial ou presque. Dans leurs maisons
de San Isidro, les Alvarez, les Garrido, les Quinozù organisent leurs réceptions
mondaines, sur fond de yacht et de plage privée.

Attablées aux terrasses, des amazones conversent sous le dernier parfum qui vient de
Paris. Elles attendront le passage de la super américaine que conduira le secrétaire
d’ambassade, l’industriel ou, déguisé, le ténor du Barreau en mal de croisière. Dans
les quartiers moins favorisés, battent la semelle ou stationnent aux encoignures des
portes, bonnes à tout faire, filles de fabrique, manutentionnaires en mal de salaire,
chandelles, fellatrices, bucoliques, corps de citerne ou séduisantes encore comme la
provocation, décousant le temps, le rêve ou la fuite épinglée à la jupe.

Au croisement de quelques rues, sur leur tabouret de bar, jupe fendue et décolleté
vertical, d’autres Nidia, Alicia ou Sara, caravelles ou itinérantes des grands cinémas
et hôtels de luxe chaloupent doucement sous les regards assoiffés.

Près des gares les faroles brûlent, on y fait la queue ainsi qu’à Varsovie, mais c’est
pour Rita, Mariela, Nora, Angela, Carmela, Luci ou Inès la Castillane…

Extrait de "Un été oublié"

(...)

Au parc Charabuco, un jeune homme débonnaire s’intéresse au dépliant de
l’aéroport, le prochain vol pour Rosario. Il est suédois et sociologue. Il voudrait y
aller.

On lui a parlé de kilomètres de murs, de murs habités bien sûr avec portes et fenêtres
et des gens derrière.

Ce n’est pas tout à fait Stockholm, dit le dépliant, mais quand même c’est plus
récent en fait d’architecture populaire…

Il ira donc…

A Buenos Aires qu’il connaît quelque peu sous le jour décrit, on ne lui a rien dit
cependant de la Cava de San Isidro ni des jeudis de la Plaza de Mayo.

Il faut être d’ici pour savoir…tout à fait d’ici, et encore, plus personne n’a intérêt à
ressusciter les cris, à proclamer ailleurs ce qui meurt en douce, au fur et à mesure du
temps passé.

Tout s’oublie en marchant dans les rues, en traversant les quartiers, en se laissant
séduire par les eaux brunes du Rio de la Plata, tout s’oublie ici, tout sauf, fugace, la
peur.

La peur, telle une odeur de viande grillée.

Le visage raviné, le teint citrin qui la consume est un policier en civil. Un policier et
son sosie, le soufre et le sel, la torture et le meurtre. Discret ouï-dire.

Après tout, on n’a jamais rien vu et si quelqu’un a un jour disparu dans votre rue,
c’est comme partout, parce qu’il a abandonné ses enfants ou parce qu’il a volé son
patron.

Pourtant une rumeur se maintient, persiste, s’insinue, essaie ses gammes…

A la Cava de San Isidro, un puits se remplirait où vivraient six mille familles…

(...)

De La Cava de San Isidro, des ombres se lèveraient chaque jeudi. Avec leur héritage
de poussière indienne, elles se disperseraient sur la ville. Tôt matin, elles
s’approcheraient des patios où les derniers désœuvrés, le silence honteux, boivent le
maté, elles longeraient les baraques de beignets où l’huile surchauffée laisse
s’évaporer d’ultimes relents, elles se mêleraient aux Portenos et aux marins que les
sirènes, au loin, appellent aux départs.

Habituées aux œillades, aux invitations, aux quolibets, elles marcheraient, elles
marcheraient le regard filtré sur l’abîme.

Elles déboucheraient une à une ou par groupe de trois ou quatre sur la Plaza de
Mayo, là où les soldats gardent les fantômes.

D’autres les y rejoindraient, d’autres à qui un père, un amant, un fils aurait été
enlevé et sur qui serait tombé le silence.
D’autres qui seraient venues de la Tablada où les sépultures du cimetière juif
seraient refusées aux suicidées et aux prostituées.

D’autres qui seraient venues de l’avenida Rivadavia, de l’avenida Cordoba, et même
de l’avenida Corrientes car il ne serait point de lieu qui aurait été épargné par les
disparitions anonymes…

Enfants, petits-enfants de la guerre civile d’Espagne, juifs, arabes, ukrainiens,
polonais et même argentins de bonne souche, du pied de l’Obélisque à la statue de
Christophe Colomb, tous auraient été marqués de l’étoile blanche, troupeau jeté en
pâture aux calendrias.

Carlos, Federico, Ernesto, Horacio, Leopoldo, Esteban, Diego, Luis, Eduardo,
Claudio, Leonidas, Antonio…dont les noms ne figureraient pas sur les registres de la
Recoleta ou de la Chacarita.

Quinze ans, dix ans, huit… cinq…

Chaque jeudi elles seraient là, relayant de leur présence le flambeau éteint, clamant
leur dû, leur prophète, le souvenir, l’hypothèse de la mort…

Quinze ans, dix ans, huit… cinq…

Quinze ans… que l’on parlerait en sourdine, au marché, sur les quais, à La Boca, à
Mataderos, chez Fanny, au bistrot de la Colombienne… quinze ans que l’on parlerait
du défilé des folles, de celles-là qui ont le nœud entre les yeux et le burin sous les
pommettes…

Quinze ans qu’elles promèneraient dans les rues cette raie au ras du ciel, ce tatouage
du charnier dans la dérive de la nuit…

…et les jacarandas sont en fleur…

les magnolias aussi, et les bougainvilliers…

(...)

Vieillir en goûtant le vent dans une miche de pain,

Vieillir quand se profile l’écolier que l’on a été,

s’arrêtant au monde d’une poignée de porte,

Vieillir en sachant que l’âge émaille les saveurs,

Vieillir en ouvrant ses mansardes au dernier rayon du jour,

Vieillir comme une herbe sèche qui a tant reçu le soleil avant la faucille,

Vieillir avec la minutie d’un vol de cigogne…

(...)

C’était à la saison des crues, en septembre…

Un homme marchait au fond du Nil, un chandelier à sept branches à une main, un
autre d’un plus grand nombre à la droite.

Un homme de nulle part, sans retouche, sans référence, comme il y en a d’autres, un
de ces imprudents, un de ces inconscients toujours couvert de rêves, uniquement
occupé de lui-même, tant les idées émises ou en couveuse étaient tissées à sa mesure
et toujours dispensées aux doubles non évacués dans les parages.

Un homme sans patrie que la terre concédait lorsque les pluies n’avaient cessé
d’envahir les berges et que d’aval on retrouvait en amont, un homme aux souches
qui ne boivent en secret que chez autrui, un homme dont la folie s’était emparée – à
moins que ce ne fût l’inverse -, un homme quelconque cependant réduit à ses
voyances, quand s’exaltaient ses abîmes.

Figuier sans figue, hôte qui ne cessait d’être ailleurs, dispensateur de plaies, d’ailes
distendues, de désordres, de mâts penchés, un homme passé un nombre considérable
de fois à côté de l’ancrage, un homme cependant fourbu, traversé de chemins
illicites.

C’était à la saison des crues, en septembre…

Un trop plein lui aspirait le sang et témoignait de l’or de l’âme, allégresse et
blasphème venant du fond des âges, des gènes, des gênes…

Voyage sans but de nuit où la pierre germe quand la bouche s’égoutte, s’écrase,
s’écroue…

Le temps était pourtant celui du ruissellement, du recueillement, de la gourmandise,
de la sève, Arc et Octave quand les maisons sombres n’ont pas raison de vous, ni les
arènes sanglantes, ni la tuberculose, ni la guerre, ni l’argent, ni les médailles des trop
grands bonheurs, des trop grands honneurs.

Le temps avait été celui de la jonquille et de l’iris…

Plus rien ne pouvait arriver, comme lorsque le tachymètre dépasse la norme et que la
rumeur s’arrête aux cernes…

C’était en septembre, à la saison des crues…

(...)

Quand mon regard cessera d’être habité, que l’incertitude du temps prenne la place
de mon peu de vérité.

Je monterai vers l’absence recelant dans mon double cette part de silence que tu
avais enfouie quand nous recherchions notre identité.

Que le fond de notre histoire cesse d’encombrer l’enfant pour qu’il porte ses
branches libérées des nôtres.

Je monterai vers l’apaisement, vers le renoncement

que l’amour accorde aux gens qui se sont aimés dans la démesure.

Je monterai, porté par tes bras que j’aurai accablés

dans les lourds jardins d’autrefois où nous marchions au plus secret de notre
mémoire.

Que l’absence te reconnaisse comme le seul désir de son immobilité.

(...)

Je ne quitterai pas la terre en flammes hautes.

Je la quitterai lentement comme je suis venu, tel que j’ai vécu.

Je veux vivre ma cinquième saison, celle du terreau.

J’ai pris pacte avec mes souches, avec les vôtres.

J’absorberai ma mort dans une longue communion, dans une fidèle reproduction de
ce qu’aura été ma vie, patience du commencement.

Je n’ai rien livré au feu, ni mes délires, ni ma sagesse pourtant toujours temporaire,
ni le plomb de vos secrets, ni votre douleur que je sentais venir alors que je ne vous
connaissais pas.

Je ne livrerai rien au ciel ni aux océans, je ne rendrai rien à mon père,

mais à ces portes, à ces cloisons, au mur qui m’ont séparé de vous, je laisserai le
cheminement de mes gestes et de mon imaginaire.

Extrait de "Viviers"

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La complainte d'un Nigérien

 

J'écoute un sage qui affirme

Des faits constatés et certains

Sa voix est celle d'un infirme

Manquant d'espérance et d'entrain.

La complainte d'un Nigérien

Qui ne conçoit pas de se taire

Il doit en éprouver du bien.

On ne peut pas tout laisser faire.

J'ai écouté avec émoi.

Perdurera l'indifférence

À l'égard des gueux dans l'effroi,

Dépourvus de toute alliance.

Des millions d'êtres en souffrance,

N'aspirant qu'au droit exister,

Subissent l'horreur, en silence,

L'espoir ne peut les assister.

Ceux qui vivent dans l'opulence,

Ont le choix de se prononcer,

Pourraient, avec intelligence,

S'unir afin de dénoncer.

S'impliquer répond aux pourquois

Ou s'impose, en cas d'urgence.

Seuls, les intérêts ont du poids.

Chacun consulte sa balance.

14 janvier 2015

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"Moby Dick" est le chef-d'oeuvre de l'écrivain nord-américain Herman Melville (1819-1891) et l'un des livres majeurs de la littérature romantique. Publié à New York en 1851, alors que l'auteur était âgé de trente-deux ans, son importance ne devait être reconnue que beaucoup plus tard, et les principales études critiques qui lui furent consacrées, ainsi que les nombreuses traductions qui en furent faites dans les différentes langues, sont relativement récentes. Ainsi, en France, il a fallu attendre la traduction de Jean Giono, Lucien Jacques et Joan Smith, publiée en 1941 (aux éditions Gallimard). "Moby Dick" est l'histoire d'une importante expédition de chasse à la baleine, se déroulant aux alentours de 1840. Tandis qu'avec le récit de ses aventures de jeunesse dans les Mers du Sud (voir "Typee" et "Oloo"), Melville se bornait à raconter ses propres souvenirs, "Moby Dick", écrit plus de dix ans après les événements qu'il relate, n'est pas seulement un documentaire plein de vie et de détails pittoresques, c'est encore un véritable poème épique en prose. La baleine, à la poursuite de la quelle l'auteur entreprend de se lancer, en compagnie de tout l'équipage du "Péquod", bateau ayant son port d'attache à Nantucket, n'est pas une baleine ordinaire: répondant au nom de "Moby Dick", -ainsi la désignent les marins qui ont eu l'occasion de l'apercevoir lors de précédents voyages, -elle offre la singulière particularité, parmi bien d'autres, d'être blanche. Mais n'anticipons pas, car ce livre est tout d'abord un récit d' aventures maritimes qui emprunte au genre toutes ses caractéristiques. Nous faisons connaissance pour commencer avec Ishmaël (sans aucun doute, l'auteur); pris du désir "de naviguer encore un peu et de revoir le monde de l' eau", notre homme se met en route pour Nantucket. Après une nuit passée dans le village de New-Bedford, à l'auberge du "Jet de la Baleine" où il a, pour compagnon de lit, le brave Queequeg, un naturel de l'île de Rokovo (jadis embarqué par quelque baleinier et aujourd'hui perdu en ce monde très-chrétien). Ishmaël arrive sans encombre à l'île de Nantucket. Pris d'amitié pour lui, Queecqueg le suit et, avec lui, s'engage sur le "Péquod" qui s'apprête à gagner le large. Les contrats sont signés, il n'y a plus qu'à attendre l'ordre d'embarquement: celui-ci ne tarde pas à venir. Tout se présente donc normalement jusqu'ici; toutefois personne n'a encore vu le capitaine et le bateau quitte le port, sans qu'il ait fait la moindre apparition. La chose serait, tout compte fait, assez banale en soi, si certains matalots n'avaient à son encontre des paroles énigmatiques. Après une brève digression tendant à prouver, non sans quelque bouffonnerie, la dignité de la chasse à la baleine, et à lui octroyer en quelque sorte des titres de noblesse, l'auteur nous présente, avec minutie, les principaux membres composant l'équipage: outre nos deux lascars, voici Starbuck, le second, "un grand homme sérieux", prudent, chez qui la superstition est une forme d' intelligence, car il s'y entend en présages et en pressentiments, au demeurant un homme courageux à l'extrême; il a pour adjoint un dénommé Stubb, un natif du cap Cod, la nonchalance en personne, indifférent au danger à tel point qu' "une longue accoutumance avait converti [pour lui] la gueule de la mort en fauteuil"! Mais voici un troisième larron, un jeune homme rougeaud et fort, trapu, répondant au nom de Flask; d'humeur batailleuse à l'égard des baleines, comme s'il eut accompli une vengence personnelle, il mettait un point d'honneur à les détruire sans merci, chaque fois qu'il en rencontrait. Parmi les harponneurs, outre Queequeg (attaché à la personne de Starbuck), se trouvaient Tashtego, un Indien pur sang, qui servait de chevalier-servant à Stubb, cependant que Flask, lui, était flanqué d'un gigantesque nègre, couleur de charbon, Assuérus Daggoo. N'oublions pas enfin de mentionner, parmi les matelots, Pip, un jeune nègre que ses compagnons traitent de fou, parce qu'il voit sans cesse "le pied de Dieu posé sur la pédale du métier à tisser le monde". Il nous faut attendre que le navire ait gagné la haute mer et que plusieurs jours se soient écoulés, avant que le capitaine Achab ne fasse son entrée. Achab, -un homme fier qui aurait frappé le soleil, si celui-ci l'avait insulté, -avait un visage marqué d'une large cicatrice d'un blanc livide qui témoignait que cet étrange personnage avait soutenu, jadis, un gigantesque combat contre une bête mystérieuse: oh, non point une rixe de mortels, "mais une lutte cosmique en mer". Achab "avait l'air d'un homme qu'on aurait retiré du bûcher au moment où les flammes avaient pourléché ses membres". Il offrait encore ceci de particulier qu'une de ses jambes était faite dans l' ivoire poli d'une mâchoire de cachalot et que, pour conserver en toute circonstance son équilibre, il avait fait creuser sur le pont des trous de tarières, où ajuster sa jambe d' ivoire. Tout le monde est maintenant à son poste et la chasse à la baleine blanche peut commencer. De péripéties en péripéties, l'auteur nous conduira jusqu'à ce combat ultime et désespéré que le capitaine Achab et son équipage engageront contre Moby Dick et qui se terminera par un désastre, dans le fracas du tonnerre et de la mer déchaînée. Chemin faisant, nous rencontrerons d'autres navires: la "Pucelle", le "Samuel-Enderby" de Londres, la "Rachel"; et toujours du "Péquod" partira la même interrogation: "Avez-vous vu la Baleine blanche?" Entre temps, il nous sera donné de connaître toutes les formes de la pêche à la baleine, les manoeuvres compliquées qu'elle exige; nous serons initiés à tous les dangers, à toutes les ruses; plus rien ne sera secret. A côté des baleines que l'on pêche, il sera question aussi des baleines telles que les ont représentées les graveurs et les peintres, les naturalistes et les navigateurs; nous nous familiariserons avec la baleine fossile comme avec celle que l'on dépèce maintenant sur le pont. Et cette accumulation grandiose de détails n'est là, semble-t-il, que pour préparer et rendre plus pathétique le moment où se dessinera à l'horizon l'énigmatique Baleine blanche, dont on sait déjà qu'elle a le front ridé et la mâchoire de travers. C'est ici que le mystère insidieusement prend place et que, peu à peu, cette banale aventure maritime se transforme en une hallucinante poursuite dont on ne tarde pas à pressentir que l'issue sera fatale. Certes, l'histoire pour singulière qu'elle soit est pourtant naturelle: Achab, lors d'une chasse précédente, a eu la jambe coupée par Moby Dick et a gardé de cet accident une haine implacable, qui ne pourra s'apaiser que par la capture et la mort de son redoutable et cruel adversaire. Mais l'idée nous vient soudain que cette folie de vengeance recouvre une maladie de l' âme; dès ce moment, il n'est plus de repos possible, car cette maladie, c'est la nôtre, celle de l'humanité entière en proie aux désirs les plus insensés. Embarqués sur le "Péquod", il apparaît en définitive que ce que nous tentons désespérément, c'est de rapporter dans nos filets quelque chose comme Dieu lui-même: "Tout ce qui rend fou et qui tourmente, tout ce qui remue le fond trouble des choses, toute vérité contenant une partie de malice, tout ce qui ébranle les nerfs et embrouille le cerveau, tout ce qui est démoniaque dans la vie et dans la pensée, tout mal était, pour ce fou d' Achab, visiblement personnifié et devenait affrontable en Moby Dick. Il avait amassé sur la bosse blanche de la baleine la somme de rage et de haine ressentie par toute l'humanité depuis Adam et, comme si la poitrine avait été un mortier, il y faisait éclater l'obus de son coeur brûlant". Ce n'est pas pour rien que Melville consacre un chapitre entier de son livre à expliquer que la blancheur est le signe d'une présence mystique. Dans ces conditions, l'aventure ne pouvait que s'achever par un terrible et grandiose naufrage où tout sombre, raison et folie, pour ne laisser apparaître, comme une épave surnageant au désastre que la raison d'être du livre.

Considéré sous cet angle, "Moby Dick" prend place parmi les quelques grandes oeuvres universelles que le romantisme nous a léguées. Il est évident que le côté massif et monolithique de ce livre, que l'insistance qui le parcourt à n'user que d'images exclusivement empruntées au monde de la mer et de son habitant mystérieux et qui, toutes, concourent à donner au lecteur la sensation d'une obsédante unité, font de ce récit l'un des textes les plus envoûtants et le rangent parmi ces écrits dont le but inavoué est de rivaliser avec la réalité de la nature et du monde. "Moby Dick" est, une tentative pour capter, dans la trame du récit, grâce à un emploi rigoureux et magique du langage, ces puissances occultes dont il nous arrive de déceler l'intervention dans certains événements de notre univers. Cette volonté d'intégrer toute chose en une synthèse dont chaque image, prise isolément, porte le reflet, confère à ce roman une orgeuilleuse grandeur dont l'échec ne pouvait être que le prix. D'où la structure déroutante de l'oeuvre: tout n'y est qu'abîmes ou sommets, détours et replis, espaces vainement ouverts à la découverte sans fin du lecteur. Les formes littéraires les plus variées sont mises à contribution. Au monologue intérieur succèdent des dialogues claquant dans le vent, comme à la houle profonde succèdent les cris de la tempête. D'interminables anecdotes, dont rien ne semble devoir justifier la présence, nous ramènent invinciblement, et par les détours les plus imprévus, à l'unique, au terrible but sans cesse poursuivi, jamais oublié. Des digressions abstraites, allant jusqu'à l'étude quasi sientifique des cétacés, viennent brutalement interrompre le récit, mais en réalité pour creuser davantage le gouffre où va se précipiter le "Péquod", corps et biens. Certes, Melville n'a pas craint de recourir aux procédés les plus conventionnels du roman noir: le livre est parsemé d'épisodes singuliers, de scènes de pressentiments, de cérémonies quasi-diaboliques; tout concourt à faire du capitaine Achab un être démoniaque selon les conventions littéraires les mieux établies; mais rien ne parvient cependant à obscurcir la valeur symbolique et déchirante, profondément humaine, de cette course à la mort. Une puissante poésie biblique supporte tout le livre et confère au langage une valeur prophétique. Chariant des images étincelantes qui projettent, ici et là, des lueurs inattendues sur ces abîmes où s'élaborent la vie et ses passions, "Moby Dick" impose au lecteur cette aventure sans espoir et sans issue, la lui rend à ce point familière, contre toute attente, que le livre trouve en soi sa raison d'être et son aboutissement: univers clos s'ouvrant au coeur insondable de l'homme, dévoré par la plus lucide et la plus folle des chimères.

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A tous les menbres du réseau Arts et lettres

Bonjour à tous !

Tout d'abord il n'est pas trop tard pour souhaiter à tous mes vœux de bonheur , inspiration ...et état de grâce parfois, pour tous ceux qui cherchent , créent,  ou tout simplement aspirent à s’épanouir , se bonifier. Je vous souhaite plein de petits moments de joie pour illuminer cette année 2015!

Patrick Jossier

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Dans le présent qui raccourcit

 

Méditation

Excepté sous formes de traces,

Mon esprit ne put retrouver

D'exaltants émois éprouvés,

Jadis, lors de certaines grâces.

J'occulte mon destin passé.

Il me semblait parfois mensonge.

Ce qui fut vécu devint songe,

Ne veux plus m'y intéresser.

L'oubli balaye les regrets

Qui empêchent de se soumettre,

Quand on voudrait se le permettre.

De cela certes, lui sais gré.

Les humains âgés se soucient

De vivre au mieux dans le présent.

Il leur faut faire comme si

Rien n'est moins beau qu'auparavant.

Mais l'incontournable vieillesse

Ponctuellement enlaidit.

Elle multiplie les maudits,

Jusqu' à l'ultime, fin agresse.

Je pense à l'écoeurant insecte

Que Kafka a imaginé;

Métamorphose terminée,

Un homme devenu abjecte!

Abonde la réalité

En déprimantes, vaines choses,

Résultat des métamorphoses,

D'êtres transformés en déchets.

À la vie que l'on félicite,

On ne reproche rien longtemps.

Elle crée l'émerveillement,

On n'en critique pas les rites

16 janvier 2015

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Cher Ami,

 

 

Il fait noir,

un peu trop chaud,

vos doigts tout tâtonnants,

sur ma peau blanche et rose,

multicolores sont devenus ;

Libres enfin, s'étonnent,

ils y dessinent des petits mots,

à la mesure de mes lèvres,

des miens  point encore fredonnés,

y peignent  sans se lasser

d'innombrables caresses,

des chemins buissonniers,

élastiques à l'infini ;

alors ma voix en un instant,

est devenue un chant,

puis mon souffle grâce au vôtre,

jamais plus ne s'essouffle, ne s'éteint,

jusqu'à devenir symphonie bleue azur,

douce et chaude.

L'aube s'est levée, point pressée,

le soleil à ses pieds l'embrasse ici et là !

Je suis bien près de vous.

NINA

 

 

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HISTOIRE COURTE 28...

NICOLE FATIGUE...

Couchée dans le foin avec le soleil pour témoin... Les doigts de pieds en éventail! Relax?

Pierre est toujours aussi conformiste. Il ne sait décidément pas se détendre! Il se sent coupable peut-être?

Un méchant doute me taraude depuis le foutu mail de ce matin! Il n'était donc pas à New-York la semaine passée. Pourquoi m'a-t-il raconté des salades? Et je n'ai rien vu venir, trop confiante...

Ce dimanche de septembre est si doux! Les pieds nus dans l'herbe, une chansonnette dans la tête et ce grand bonhomme apparemment si bien élevé à mes côtés, qui garde ses chaussures et son parka malgré 25 degrés et un soleil omniprésent!

J'avais pensé avoir trouvé quelqu'un de bien, juste quelqu'un de bien... Balivernes, je me sentais seulement bien d'être convoitée avec élégance, aucune lourdeur, par petites touches...

Je n'ai plus envie de me compliquer la vie, juste envie de me poser un peu, en confiance... c'est raté!

Alors, arrête de remuer tes orteils ma fille, soit zen.... Il faudra penser à changer de verni, ce rouge est trop voyant! Et aussi changer de parfum.... Et pourquoi pas d'homme, tant que j'y suis?

Ce n'est pas vrai, il dort ou il fait semblant?

Raide comme la justice, ou comme quelqu'un qui se concentre sur son prochain mensonge? Finalement on ne connait jamais personne. Et puis zut, je ne vais pas déprimer aujourd'hui, ce soleil est un vrai bonheur, une caresse de la vie! Il ne ment pas lui, il est chaud, tendre et lumineux.

Brrh! Je devrais me vider la tête à nouveau, je fatigue...

-Tu me l'avais pourtant promise la franchise!

Nicole avait fini par poser la main sur le bras de ¨Pierre et avait laisser parler son intuition.

Surpris Pierre enchaine :

-De quoi tu parles?

-De ton séjour New-Yorkais!

-Et moi, je n'ose pas imaginer pourquoi tu as prétexté un voyage à New-York alors que tu étais à Biarritz!

-Qu'est-ce que tu racontes?

-La vérité, contrairement à toi!

Pierre se redresse et fait face à Nicole toujours étendue sur l'herbe.

-Tu crois vraiment que j'apprécie ta façon de m'espionner?

Nicole s'est redressée.

-La mauvaise foi, je supporte encore plus mal que le mensonge! Je demande juste une réponse claire, franche... comprends-tu ce que cela veut dire?

-Marchons veux-tu?

-Bonne idée, allons jusqu'à l'étang, nous assoir sur notre banc.

-Tu es décidément sans pitié!

-Je ne vois pas ce que la pitié vient faire ici!

Le silence alors s'installe, lourd des mots qui se pressent dans leurs têtes.

-Cerveau ou cœur? S'interroge Nicole...

Et leurs pas les dirigent vers ce banc qui a reçu leurs premières confidences et accueilli leur premier baiser...

Alors là, Nicole est définitivement très fatiguée!

J.G.

 

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L’enfant de papier JGobert

Une jeunesse que l’on dit insouciante se termine et une vie d’adulte commence, brillante, scintillante comme un tourbillon de lumière et s’enchaine dans une course folle. Des nouvelles expériences que l’on veut comme une rivière pétillante, étincelante. Une existence qui se dessine et s’installe heureuse. Des choix à faire, un logement, une voiture neuve, les premières vacances qui donnent une couleur inédite à cette vie fraichement découverte.

Le bonheur tant attendu, recherché, n’est pas loin, à portée de main.  Toutes les illusions et les rêves de l’enfance s’installent dans un monde d’adultes, de préjugés, de folie. Les songes se matérialisent en partie, s’accomplissent avec le sentiment qu’il échoit. La route s’ouvre sur l’inconnu raffiné, sophistiqué. Mais ce temps d’émoi, à l’éclat lumineux sonne, annonce déjà des jours sans lendemain.

Les premières désillusions s’installent dans cette vie que l’on veut parfaite. Les premiers pleurs amers font terriblement mal et s’inscrivent comme des blessures ineffaçables. La vie rappelle ce qu’elle a de difficile.  Les noceurs se réveillent fêtards déboussolés dans un monde inconnu.

Au fil du temps, la vie quotidienne revient et reprend sa place sur l’esplanade bancale. Celle que l’on veut construire a des difficultés à tenir debout. Les fondations vacilles,  les sentiments sont moins solides, convaincants et redeviennent instables, voir incertains.  L’histoire n’a pas réellement changé si ce n’est l’endroit. Elle titube, chancelle. Les contraintes sont différentes mais se ressemblent. Rien d’important n’a bouleversé l’existence, la vie. D’instinct, tout est de nouveau pareil. Une déconvenue en entraine une autre et le destin fragile fait comprendre que la vie s’enchaine de durs combats.

Un matin, Rose aperçoit l’enfant de papier blotti dans un coin. En quelques heures, celui-ci prend une énorme place dans sa vie. Il l’accompagne et ne la quitte plus. Ils font tendrement connaissance. Il l’apprivoise, la rassure avec douceur. Il lui raconte la vie sous un angle qu’elle ne connait pas encore et l’ensorcelle de rêves, de pensées qui lui plaisent. L’espérance se joint à eux, exquise, enchantée.

La solitude de Rose qui transparait diaphane, s’apaise et laisse place à des projets à long terme.  L’enfant de papier est son bel avenir. Pelotonnée contre sa tendresse, il la réchauffe et lui rend la vie supportable.  Le sentiment d’abandon a disparu et sa présence la bouleverse, la remplit de joie. A lui seul,  il englobe subitement tous ses désirs, toutes ses ambitions, tous ses appétits. Il l’ouvre à la vie comme par miracle.

Dans cette société, à cet instant, l’enfant de papier n’est pas le bienvenu. Le déroulement des choses a un ordre établi, bien précis. Il n’y a pas de place pour l’enfant de papier dans la vie de Rose.  Rose sent l’angoisse l’envahir et déjà elle entrevoit les jours tristes qui  s’annoncent. Sourde à certains propos, elle refuse d’écouter les discours qui ne la concernent pas. On lui demande un renoncement inhumain. Elle est constamment rattrapée par ces mots et elle arrive à peine à résister. L’enfant de papier doit partir. Cette décision lui arrache le cœur et la blesse. Elle est en souffrance. Elle résiste encore un peu et enfin, malgré ses pleurs, son chagrin, sa solitude, elle sait qu’il va partir.

Les heures ultimes en sa compagnie sont cruelles, un jour sans lumière. Il se prépare sachant qu’il va l’abandonner, la quitter comme s’ils ne s’étaient pas connus, comme s’il n’était pas venu.  Il connait trop son chagrin. Chagrin qu’il ressent lui aussi intensément. Il l’emportera avec lui.

L’enfant de papier prend une autre route, un autre chemin. Une destinée que personne ne connait. Il n’est pas triste mais il laisse Rose désenchantée par son départ. Tous leurs projets communs se sont évanouis et disparaissent l’un après l’autre.  Les dernières minutes les hantent et passent moroses au triste son de la vieille horloge. Le désespoir envahit Rose.

Depuis le départ de l’enfant de papier, Rose se résigne, maussade, chagrine. Il lui manque. Les jours de grande tristesse, elle pense à lui comme à un être d’exception.  Sa mémoire l’enferme dans cette pensée, l’apaise parfois. Le souvenir de l’enfant de papier reste blotti en elle.

Le temps est passé, a coulé comme une rivière qui, à chaque évènement, a gonflé son lit et a fini par se vider et se calmer. Les vieilles mains translucides de Rose ne tremblent pas et se joignent comme dans une prière. La douceur s’est toujours rependue autour d’elle prenant soin de ne rien déchirer, de ne rien froisser. Une étrange délicatesse qu’elle a posée sur son cœur blessé, sur ce souvenir si personnel, sur cette croix de papier qui lui remplit les yeux de larmes et que ses doigts décharnés n’arrêtent pas d’essuyer, de sécher depuis ce temps maudit où l’enfant de papier a disparu.



 

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Un ineffable ailleurs

P1010079.JPG

Haïkus

Une cité-serre,

innombrables bassins de fleurs,

jardin onirique.

...

Les passants contemplent

des espèces somptueuses,

plantées côte à côte.

...

Incitant aux pauses,

de confortables fauteuils

longent les murettes

...

Luxe et harmonie,

réalité fascinante.

L'âme s'attendrit.

...

14 janvier 2015

 

 

 

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Foire du Livre de Bruxelles

Bonjour à tous,

Je dédicacerai mes livres, "Battue!" et "Les Sous-Teckels" le 27/02/2015 dès 15h à la Foire du Livre du Bruxelles. J'espère sincèrement que vous serez nombreux à venir me dire bonjour, je suis toujours tellement nerveuse dans toute pièce comportant plus que 5 êtres humains!

Virginie Vanos

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L'absence,

.

 

L'absence de l'autre ;

Monumentale présence en soi,

nous la sentons,

la recevons,  l'entendons,

là où nous sommes.

C'est un soleil bien personnel,

intime, invisible des autres,

qui est trop fort.

Il se coule dans mon corps,

incendiaire et tout bleu,

de l'écriture me fait don.

Une langue est née.

 NINA

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Un mal-être passager

 

Méditation

Avec plaisir, je récupère,
Inactive, face au soleil.

J'avais perdu tous mes repères,

Me trouve à nouveau en éveil.

Dans un état qui nous surprend

D'une insurmontable faiblesse,

Une fois de plus, on apprend

Qu'à tout instant des forces agressent.

Quand on en soupçonne les causes,

Ce, plus ou moins rapidement,

Avec vigueur, on se propose

De les combattre activement.

Rien de grave peut nous priver

De l'énergie qui nous anime

Ou un mal pervers arriver

Qui tourmente et sans doute mine.

Je me sens certes rassurée.

Lors je réalise ma chance:

Mon mal-être n'a pas duré.

Reste bonne ma providence.

Un sort qui nous semble enviable

Cache des indices troublants.

Le présent devient invivable,

Aux gens heureux, n'importe quand.

Je pense à une grande dame

Dotée de multiples talents

Qui vit un effroyable drame,

Endurant un mal violent.

Ne pouvant recourir à l'art,

Elle survit dans la souffrance,

N'attend nul secours du hasard.

Reste intacte son élégance.

Les prières n'aident en rien,

Mais bienvenue est la tendresse.

Comme un baume, elle fait du bien,

Apaise un instant la tristesse.

13 janvier 2015

 

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Etre vivants !

 

Nous qui avons la chance

d'être vivants,

avec cette opportunité

de faire le bien autour de soi,

soyons les artisans acharnés

de la terre toute entière,

que nos têtes deviennent jardins,

nos mains des bienfaitrices,

nos mots, des pierres de l'édifice

commun à chacun et chacune.

Nous qui avons la chance

d'être vivants,

faisons pousser tous ensemble,

avec toutes nos intelligences

mêlées, les éternelles roses

multicolores de demain ;

que nos enfants

 ensuite en soient les jardiniers

 talentueux, inlassables, décidés !

Nous qui avons la chance

d'être vivants,

donc détenteurs du meilleur,

si nous le décidons,

redessinons ensemble

le nouveau monde ,

envisageable après la marche du siècle

d'un dimanche hivernal  !

Pensons à ceux et à celles,

qui jamais ne verront le jour,

ne sortiront des ventres sublimes, ensoleillés,

des femmes, des mères tout à la fois.

Des Reines !

Construisons, continuons , luttons ...

 

NINA

 

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