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jalousie (26)

administrateur théâtres

«Mitridate, cérémonie politico-musicale »

13221336_10153632774056297_8540514091759340485_o.jpgNotre présent  ne se mire-t-il pas inévitablement  dans le miroir du passé, ou est-ce le passé qui n’en finit pas de nous hanter?  Nous voici en 2016, real time,  invités dans le Nymphea Building niché dans  un immense chapiteau de 40 m de haut,  sis en bordure  de Tour et Taxis, loin du Quartier européen. Première prise de conscience : sur les  murs de la salle de concert en gradins, flottent  à contre-coeur 28 drapeaux européens: ils rêveraient d’être mieux connus du public! L’accès  en esplanade au chapiteau a  quelques ressemblances avec les bâtiments du Rond-point Schuman. Mais au pied de l’escalier, voilà  des messages,  la plupart en anglais,  des bougies des gerbes de fleurs, en témoignage de deuil. « Le roi Mithridate est mort! » Aussitôt se superposent  les images de deuil  des victimes des attaques terroristes qui nous ont tous frappés, en France comme en Belgique, et aussi celles des rassemblements de l’espoir, place de la République ou place de la Bourse. Et partout le slogan : «Save Pontus, Change Europe». Une Europe, oui, mais pas celle de l’impérialisme romain! Une Europe, oui, mais pas celle d’une dictature de droite. C’est là que se glisse une malencontreuse erreur de couleurs… car  l’impact visuel du drapeau du royaume du Pont n’est pas  sans rappeler les bannières nazies de la deuxième guerre!

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Mithridate VI, roi et despote est en guerre avec la Rome antique qui veut annexer ses territoires. Il est aussi en lutte avec ses propres démons: l’orgueil du pouvoir, l’amour déçu, la jalousie et l’absence de miséricorde. Néanmoins, effet d’admiration pour le ténor, Michael Spyres, ou de compassion pour l’imperfection humaine, ce personnage est  rendu  très attachant, car il s’oppose à une  Rome impérialiste. « Ne cédons pas face au Capitole, résistons à cet orgueil qui ne connait pas la mesure, répondons toujours par la guerre, jamais par la paix au génie altier qui prétend ravir la liberté au monde entier! » chante le chœur final (Acte 3, Scène 25) après son abdication  et non sa mort.

13221278_10153632774046297_2474660340207964144_o.jpg La belle grecque Aspasia est son épouse promise. Une très royale Lenneke Ruiten.   Elle est déjà déclarée reine mais elle est amoureuse du fils cadet de Mitridate Re di Ponto, Sifare (Myrto Papatanasiu, qui recevra des tonners d’applaudissements pour sa prestation d’une sensibilité remarquable). Il partage avec  son père  la même soif d’indépendance  politique. Son frère aîné Fernace (David Hansen), est politiquement opposé à son père et, ne jurant que par Rome, complote avec Marzio, le tribun romain. Bien sûr, lui aussi est amoureux d’Aspasia. Double conflit entre frères dont  le langage corporel et vocal est particulièrement éloquent. Son style de chant est sur le fil de la parodie, versant parfois carrément dans une voix de fausset! On doit aussi souligner la très belle prestation d’Ismène (Simona Saturova) qui personnifie la raison et la tolérance. Le parallèle entre rivalité politique et amoureuse est habilement mis en valeur par Christophe Rousset et l’Orchestre de la Monnaie. L’emploi brillant des cors en dialogue avec les voix (élément neuf apporté par Mozart par rapport à l’opéra italien) donne une réelle  résonance à l’œuvre. L’interprétation chatoyante de Christophe Rousset souligne avec fougue juvénile toutes les charges émotionnelles de la partition.

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L’aspect novateur de cette production  est de rendre le spectateur partie intégrante du jeu. A lui de repérer activement la superposition voulue entre  les codes de l’opéra et ceux de la scène politique moderne.

On finit par oublier complètement que le livret est basé sur la pièce de Racine :  il y a une  nouvelle crise au sommet suite à l’annonce de la mort de Mitridate. Sur scène, on assiste aux débats d’une réunion d’urgence round the clock  qui oppose ‘The Roman Union’ et ‘The Pontus Kingdom’. Ceux-ci veulent évidemment le Brexit, tant qu’à pousser l’actualisation jusqu’à à son breaking point!

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Au public de savourer le « feel real » d’une mise en scène à l’américaine hyper détaillée. Les moindres détails y sont: les breaking news et les live de la CNN,  les journalistes qui mitraillent, qui se bousculent, brandissant leurs micros à l’arrivée des grands pontes, les intervenants filmés en close up pendant les débats autour de la table ovale où ils siègent, chacun avec sa bouteille d’eau. La mise en scène de  Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil (« le lab ») expose toute une grammaire de la mise en scène politique : les poignées de mains assassines, les sourires toutes griffes dehors, la théâtralisation intense de la chose politique.  Rien n’a finalement vraiment changé depuis le cher William: "All the world's a stage". Hopper version 21eme siècle a-t-il encore frappé ? Chaque tableau est un éclat du miroir de notre époque.

A la recherche d’une nouvelle plate-forme citoyenne européenne, Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil ne cessent d’ironiser sur la Res Publica. Leur but avoué est d’éveiller la conscience de citoyen européen du spectateur, lui rappeler peut-être que c’est chacun de nous  qui détenons le vrai pouvoir. Susciter notre réflexion, quitte à aller jusqu’à  nous redonner le goût de l’action politique, en proposant une parodie chantante et musicale de ce que ne devrait pas être le pouvoir! Dans le miroir qu’ils nous tendent, Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil nous soufflent : « l’Europe est complexe parce que nous, les Européens, sommes complexes ! » La recherche d’harmonie passe par la polyphonie!

  

Mozart, qui écrit ce premier opera seria à l'âge de quatorze ans en 1770, témoigne d'une maturité exceptionnelle, à la fois musicale et psychologique pour exprimer les sentiments qui animent le père et ses fils et pour explorer leurs relations «compliquées».  Mozart universel, Mozart intemporel, Mozart indispensable  nous aura une fois de plus illuminés par son inventivité inépuisable, sa grâce musicale et la clarté de son propos humaniste. Le thème de « l’oubli de la vengeance » que l’on retrouvera  plus tard dans la Clémence de Titus est déjà omniprésent. Et le compositeur a à peine 14 ans…   

DATES DE REPRÉSENTATIONS

05 mai 2016 19:00:00

08 mai 2016 15:00:00

10 mai 2016 19:00:00

12 mai 2016 19:00:00

15 mai 2016 15:00:00

17 mai 2016 19:00:00

19 mai 2016 19:00:00

DISTRIBUTION
Direction musicale : Christophe Rousset
Mise en scène et costumes : Jean-Philippe Clarac & Olivier Deloeuil
Scénographie et lumières : Rick Martin
Vidéo : Julien Roques & Jean-Baptiste Beis
Collaboration artistique : Lodie Kardouss
Michael Spyres (Mitridate), Lenneke Ruiten (Aspasia), Myrto Papatanasiu (Sifare), David Hansen (Farnace), Simona Saturova (Ismene), Sergei Romanovski (Marzio), Yves Saelens (Arbate)
Orchestre symphonique de La Monnaie

Crédit photos: ©BUhlig

PRODUCTION
La Monnaie-De Munt, avec la participation de Clarac-Deloeuil > le lab

http://www.lamonnaie.be/fr/opera/578/Mitridate-Re-di-Ponto

 

Palais de la Monnaie, Tour et Taxis, du 5 au 19 mai à 19 h. A 15 h les dimanches 8 et 15 mai.

En savoir plus sur la mise en scène: L'article de Serge Martin: http://www.lesoir.be/1200985/article/culture/musiques/2016-05-04/nous-jouons-avec-codes-du-monde-politique

 

 Enregistrement Arte: http://concert.arte.tv/fr/mitridate-re-di-ponto-de-wolfgang-amadeus-mozart-au-theatre-de-la-monnaie

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LA SCALA DI SETA, rythmique endiablée pour intrigue amusante à L’Opéra de Liège

Gioachino Rossini

 : 

La scala di seta
("L'échelle de soie")

 


12273151294?profile=originalAprès le succès de
« La Cambiale di matrimonio », en 1810 - le jeune Gioachino Rossini avait à peine 18 ans, Antonio Cera – directeur du Teatro San Moisè de Venise, décida de faire à nouveau appel  à Rossini pour la réalisation de quatre farces supplémentaires: « L’inganno felice », « La Scala di seta », « L’occasione fa il ladro » (1812) et « Il Signor Bruschino » (1813). Le public vénitien qui a assisté au succès de LA SCALA DI SETA du compositeur le 9 mai 1812 n’a pas manqué de remarquer que le sujet de l’œuvre était fort similaire à celui de « Il Matrimonio segreto » (Domenico Cimarosa) dont le succès à Vienne en 1792   avait été  immédiat et retentissant.  Du modèle théâtral français, le livret en conserve les caractéristiques d’une dramaturgie construite autour de l’intrigue dans laquelle sont impliqués les personnages, sans développer outre mesure leur portrait individuel. Par contre, pour les situations comiques, c’est le principe de la farce à l’italienne qui s’applique s’attelant à faire jaillir des personnages l’aspect giocoso, à travers le contraste social qui s’exprime dans les différences linguistiques et dialectales. Ici, le thème du mariage clandestin sert de toile de fond. Elle est composée d’imbroglio sentimentaux, et de rebondissements souriants. Rossini et le librettiste, Giuseppe Marie Foppa, ont construit un mécanisme théâtral parfait où la musique, dont le rythme soutenu invite à la joie, cède parfois le pas, par jeu uniquement, à la langueur sentimentale d’une aria, qui permet à la voix de se déployer dans toutes ses nuances, élégiaques et acrobatiques. Pour le reste, le dynamisme prend le dessus dès la très célèbre symphonie d’ouverture, pétillante et d’une fraîcheur mélodique séduisante. 

 

Christopher Franklin assurera la direction musicale. Ce sera l'occasion de découvrir, pour la première fois à Liège, Damiano Michieletto, metteur en scène de renommée internationale. Une belle équipe (avec Julie Bailly et Laurent Kubla)  qui donnera toute son envolée comique à cette œuvre, garantissant au public un moment joyeux dont on espère, tout comme lors de la création, qu'il fera naître dans la salle des sourires, voire des éclats de rire. Vous avez dit : opera buffa ?

 

L'histoire: 

Opéra en un acte: 
On se trouve dans les appartements de Giulia la pupille de Dormont. Elle voudrait se débarrasser de la  surveillance jalouse  de Germano, le serviteur de son tuteur, domestique bouffe qui est amoureux d'elle. La jeune fille, en dépit de l'opposition de Dormont, a secrètement épousé Dorvil et chaque nuit, elle le reçoit en secret  grâce à une échelle de soie. Il faut qu'elle permettre au jeune marié, caché dans l'une des armoires adjacentes, de quitter la chambre. Germano est sur le point de sortir, quand Lucilla, sa cousine se présente.

Enfin seul avec Julia, Dorvil avoue être préoccupé par l'arrivée de son ami Blansac jeune prétendant que le tuteur lui veut pour mari. D'abord inquiet puis rassuré par ses serments d'amour, Dorvil saute du balcon juste à temps pour éviter d'être vu par le tuteur. Les événements se précipitent et Giulia doit concevoir un plan pour se débarrasser du prétendant qu'on voudrait lui imposer. Le mieux serait qu'il tombe amoureux de Lucilla. Dorvil brûle néanmoins de jalousie. Lucilla et Blansac tombent amoureux l'un de l'autre, mais Germano continue de semer le trouble dans les couples et fait presque échouer les plans de Giulia... À minuit, la fuite de Giulia et Dorvil est interrompue par l'arrivée  inattendue  de Blansac et de Germano. Dormont se réveille, et les deux amants n'ont plus qu'à lui révéler la vérité. Dormont leur pardonnera voyant que Blansac est amoureux de Lucilla. Il donne son consentement aux épousailles. 

Dates: 

Du vendredi, 11/03/2016 au samedi, 19/03/2016

Distribution

Chef d'orchestre  

Christopher Franklin

Metteur en scène  

Damiano Michieletto

Décors, Costumes  

Paolo Fantin

Lumières  

Alessandro Carletti

 

~

Giulia   

Mariangela Sicilia

Dorvil   

Ioan Hotea

Germano   

Filippo Fontana

Dormont   

Federico Buttazzo

Blansac   

Laurent Kubla

Lucilla   

Julie Bailly

 

Orchestre: Opéra Royal de Wallonie/ Production: Rossini Opera Festival

http://www.operaliege.be/fr/activites/operas/la-scala-di-seta

 

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Drame. Hermione (Anne-Pascale Clairembourg) est reine de Sicile, la belle épouse du roi Leontes et la mère aimante de Mammilius, un jeune garçon espiègle qui adore sa mère et « les histoires tristes que l’on raconte en hiver ».

12273148898?profile=original Injustement accusée de tromper son mari avec son meilleur ami Polixène, roi de Bohême, elle est jetée en prison, où elle donne naissance prématurément à une fille (Perdita) que le tyran Leontes fait disparaître dans un désert lointain. Une scène d’une violence inoubliable. On fait à l’épouse un simulacre de procès pour adultère et haute trahison. …Qu’on la lapide, non ? Version blonde de la Reine Margot d’Isabelle Adjani, elle reste d’une dignité inébranlable devant son accusateur assoiffé de vengeance. On nous dit qu'elle mourra de chagrin après l’annonce du décès de son fils chéri, Mammilius, à qui on a interdit de la revoir. Seize ans plus tard, cependant, elle sera "ressuscitée" et réunie avec sa famille dans l'une des scènes les plus étonnantes de Shakespeare, revisité avec éclat par l’inventivité de Georges Lini.

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Difficile de décider laquelle des trois femmes on préfère. Perdita ? Héroïne de conte de fées, façon Marylin Monroe, qui croit très peu aux princes charmants et est transformée en « daffodil virevoltant » par une exquise et solide Sarah Messens flanquée d’un pétulant Julien Bezure. Ou sa mère Hermione ? Noble victime expiatoire de la folie du soupçon. Ou l’intrépide suivante, Paulina, qui ose confondre et pourfendre le tyran? Va ! Pour la pure jouissance physique verbale et vocale, la palme de l’interprétation féminine va à Daphné D’Heur qui incontestablement dicte le rythme de l’affaire et préside à l’accouchement systématique des idées merveilleusement subversives. En s’opposant avec une vigueur vivifiante aux diktats mortifères du Tyran, on assiste à la démolition méticuleuse et sans appel de l’échafaudage insensé de ses arguments. Cette femme est une reine dans son impeccable rhétorique cinglante et juste.

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Face à elle, le tyran est un comédien flamboyant, ruisselant de vérité dans sa folie meurtrière. Itsik Elbaz, pour tout dire. Son jeu témoigne d’une urgence, d’un dynamisme rebondissant. Entêté comme un cabri, les accès de rage et de mauvaise foi de l’enfant gâté et mal élevé se cognent, impuissants, aux réalités. Pathétique, il tente même à plusieurs reprises de séduire le public dans des apartés charmeurs et de l’engager dans la complicité de ses crimes. Il finit aliéné et seul, confondu par l’oracle de Delphes qui le condamne irrémédiablement. Ou presque. Une phrase sibylline laisse entrevoir un espoir.


Car cette tragi-comédie se veut un vrai conte d’hiver. De bon ou mauvais augure? Est-ce une prédiction sinistre qui affirme que « Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument... » ? Ou l’aveu optimiste que la pureté de la neige peut nous mettre sur la voie du pardon et peut effacer les blessures et rendre la dignité à l’humanité ? Miracle : la magie hivernale aura fait tomber la première neige dehors, dès la fin du spectacle. De quoi prolonger durablement la magie du texte. A moins que cela ne soit un clin d’œil en personne, de l’illustre dramaturge élisabéthain, touché par l’époustouflante mise en scène, les décors et les costumes résolument avant-gardistes de Georges Lini. Celui-ci utilise en effet la transparence d’une cage de verre qu’il manipule comme un diamant pour faire apparaître nombre de réalités, pas toujours bonnes à voir! Mais vous, spectateur heureux, malgré quelques soucis de sonorisation propres à une première sans doute, vous repartirez comblés par l’adresse, la finesse et la profondeur de l’interprétation de ce texte fabuleux dont les fibres poétiques jusqu’aux moindres fleurs sont littéralement mises à nu.

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Royale est la distribution. Le fidèle Camillo, vaillant creuset où siège la raison, c’est un Luc Van Grunderbeeck, au mieux de sa forme. L’autre roi, joué par Didier Colfs, n’est pas en reste car sa prestation très authentique de terrorisme familial au quatrième acte, scène 4, vaut vraiment le détour. Vous avez aussi ce capitaine Haddock devenu Berger sous les traits de Michel de Warzée, qui donne avec son comparse (Thierry Janssen) l’indispensable dose d’humaine bouffonerie propre au théâtre de Shakespeare. Et pour finir, l’exquise métamorphose du jeune enfant et du Temps - celui qui annonce, celui qui sait et qui raconte - un diamant vert planté sur la poitrine, c’est encore, Louise Jacob.

http://www.theatreduparc.be/Agenda/evenement/62/32.html

Crédit photos: Sébastien Fernandez

Un spectacle de la Compagnie Belle de Nuit, en coproduction avec le Théâtre Royal du Parc et l’Atelier Théâtre Jean Vilar

  • Création
  • 16 au 28 février 2016
  •  Au Théâtre Jean Vilar à Louvain-la-Neuve
  • Durée : 2h25 entracte compris

http://www.atjv.be/Un-Conte-d-hiver

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zurga_lionel_lhote_et_leila_anne-catherine_gillet__.jpg?width=452La première des « Pêcheurs de Perles » a eu lieu en 1863, Bizet avait alors  tout juste 24 ans. L'opéra est ramené à Paris en 1889  pour l'Exposition Universelle, l’exotisme oriental  est à la mode. L'histoire se déroule  à Ceylan avant l’occupation anglaise. Une communauté de pêcheurs-plongeurs en apnée affronte durement  la nature, les tempêtes et les cyclones  pour vivre de la pêche de l’huître perlière. Chaque année une  nouvelle prêtresse vierge  est invitée au village pour prier Brahma et  repousser par ses chants les esprits maléfiques.  Elle prête le triple serment de rester voilée, vierge et sans tache, de prier jour et nuit et de n’avoir ni ami ni amant. La mort la menace si elle en vient à transgresser le serment.  Les deux indéfectibles amis, Nadir et Zurga évoquent leurs souvenirs de voyage où ils  sont tombés amoureux jadis de la même femme mais ils  se sont juré mutuellement une fidélité  éternelle qui ne saurait être entravée par des liens amoureux. nadir_marc_laho_et_zurga_lionel_lhote__.jpg?width=452 Bien sûr, l'amour entre Leila, la  jeune prêtresse vierge, et l’élégant  chasseur de fauves  Nadir renaît lorsqu’il entend sa voix et sera jalousé par son ami Zurga, devenu chef de la communauté. La palette de la couleur des sentiments du triangle amour , amitié et jalousie  vaut bien celle des perles : du noir le plus sombre, quand le cœur crie vengeance pour la trahison, aux  rutilantes  couleurs de verts  et violets pour la souffrance et les doutes qui s’insinuent, aux éclats nacrés de l’amour pur, du sacrifice librement consenti, et finalement du pardon, de la clémence  et de l’oubli de soi.  

Ces couleurs nacrées, délicates, voire étincelantes dans l’évocation du coup de foudre des amoureux  sous  la lumière des tropiques, ou celles de l’épouvante, sont rendues avec intensité par l’orchestre dirigé par Paolo Arrivabeni qui fait vibrer la texture orchestrale. Les  mélodies lancinantes et mystérieuses sont  pleines de raffinement et de recherche. L'atmosphère languissante du premier acte est particulièrement envoûtante. La présence des courbes mélodiques du chœur souvent en coulisses, entretient l’atmosphère poétique et finit par ensorceler. Sortilège malais ?  nadir_marc_laho__et_leila_anne-catherine_gillet_.jpg?width=452

 

Le metteur en scène japonais Yoshi Oïda  a relevé le défi de recréer l’exotisme imaginaire d’un Bizet qui n’a jamais quitté la France. C’est beau, dépouillé  et intemporel. Cela donne l’impression de  se passer sur une île lointaine du Japon, cela semble  frôler les côtes indiennes ou du Sud-Est asiatique, toucher peut-être l’Afrique et refluer jusqu’aux confins de la  Polynésie, sans que le rêve ne s’arrête.  Quelques barques  en forme de feuilles de palmier, creusées dans le bois sauvage, quelques nasses, des perches de bambous, l’esquisse d’un ponton qui se transforme en temple ou en couche sommaire,  dans un univers de bleus et de couleurs Chagalliennes, du sol au plafond et dans les miroirs. Les jeux de lumières sont fascinants.  L’esquisse d’un horizon flottant est-il le bord d’une falaise?  Ou la ligne entre ciel et mer ? Les travailleurs de la mer habillés de couleurs océanes disparaissent au fond du plateau dans un jeu de bras et de jambes  lent et  poétique. L’esprit flotte sur un  plateau vivant et vibrant de couleurs et de sonorités, comme la lumière qui traverse un vitrail. Est-on entre  ciel et terre, sous un croissant de  lune couché à l’horizontale ou dans la féerie d’un royaume sous-marin pardessus lequel flottent de frêles esquifs sur une eau transparente?  12273097493?profile=original

 

La superbe texture vocale et dramatique des quatre personnages dissipe le flou.  Anne-Catherine Gillet, Marc Laho, Lionel Lhote et Roger Joachim sont  tous des artistes belges francophones qui tous font preuve d’une diction impeccable. En effet, chaque tessiture articule la prosodie française avec une étonnante limpidité, sans le moindre  relent de français chanté affecté et vieillot.  Quel collier de perles, ces voix nuancées, ces timbres parfaits, cette prosodie célébrée avec ravissement ! « O nuit enchanteresse, divin ravissement ! » se joue de part et d’autre de la rampe. La maîtrise  vocale de  Leila (Anne-Catherine Gillet) est remarquable : de très belles notes de tête, rien de forcé, de la souplesse dans la virtuosité, une très belle variété dans le phrasé et la couleur. Son jeu physique est tout aussi empreint de grâce et d’humanité. « Accorde-moi sa vie, pour m’aider à mourir », plaide-t-elle pour sauver Nabir.  Tout est prêt pour le sacrifice. Roger Joachim interprète  le rôle de Nourabad le grand-prêtre de Brahma comme s’il endossait le rôle du Destin. Quelle puissance tranquille, quelle imposante autorité dans sa somptueuse voix de basse! Le ténor Marc Laho, originaire de Liège, livre un Nadir très vaillant, habité  par le désir, incapable de se tenir à ses promesses, incroyablement humain, offrant  sans compter le velours palpitant de ses émotions. Au cours de l’action, la voix chaude et cuivrée du baryton, Lionel Lhote  rassemble dans  le noble  personnage  de Zurga, toutes les tempêtes mais aussi  la sagesse de l’homme maître des émotions les plus  déchirantes.  Son ultime  « A Dieu ! »  est majestueux, il a renoncé aux deux seules choses qui comptaient dans sa vie, l’amitié et l’amour, après avoir découvert en Leila celle qui lui avait sauvé la vie des années auparavant.

 

nadir_marc_laho___leila_anne-catherine_gillet_et_zurga_lionel_lhote___.jpg?width=300A tous points de vue, cette dernière création toute en finesse de L’Opéra de Liège force l’admiration et se range au niveau des plus belles performances internationales.  La saison prochaine du MET a mis « Les pêcheurs de perles » dans sa programmation en janvier 2016, ils auront fort à faire pour égaler la beauté et la tenue  de ce spectacle  ciselé avec le plus grand art.   

Paolo Arrivabeni, direction musicale • Yoshi Oïda, mise en scène • Tom Schenk, décors • Richard Hudson, costumes • Daniela Kurz, chorégraphie • Fabrice Kebour, lumières • Marcel Seminara, chef des choeurs

 

Anne-Catherine Gillet, Leïla • Marc Laho, Nadir • Lionel Lhote, Zurga Roger Joachim, Nourabad

Liège, Théâtre royal, du 17 au 25 avril. Réservation : 04-221.47.22 ou www.operaliege.be

Charleroi, Palais des Beaux-Arts de Charleroi - PBA le 30 avril à 20h

http://www.pba.be/fr/saison/153/les-p%C3%AAcheurs-de-perles

      

    

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A la recherche vertigineuse de l’Autre… « Je m’imaginais ce que je pourrais découvrir si tu mourais! » Ah femme curieuse, ne te suffis-tu pas de l’amour, te faut-il éternellement la connaissance?

 

C’est la nouvelle saison chez Claude Volter. Leur premier spectacle, une pièce de Florian Zeller met en scène les  trois comédiens chevronnés qui jouaient l’an dernier « Sentiments provisoires » : le   mari, la  femme et l'amant, sujet très exploité au théâtre mais dont la composition en éclats, les monologues intérieurs et la superposition des vérités avaient déjà fasciné les spectateurs par leur profondeur derrière l’apparente comédie de mœurs. Un spectacle qui déjà essayait de nous dire quelque chose de très profond, au-delà de la réalité visuelle.  Hasard ? ou suite logique d’un questionnement de l’Autre?  Ainsi, ce nouveau demi-vaudeville  plonge dans les doutes, les craintes, les phantasmes et la difficulté de percevoir la vérité. Le trio Stéphane Moriau, Jean-Claude Frison, Michel de Warzée, on l’a vu, excelle dans l’art de faire apparaître des émotions vives ou sombres dans les interstices du visible. Ils chevauchent aussi bien le comique que le tragique.  

12272952697?profile=original12272952470?profile=originalDans « Si tu mourais… »  Florian Zeller brouille les repères, emmêle  les différentes couches  de réalité ou d'imaginaire, le  moment présent et les flash-backs. Apparemment, on  se trouve  dans un appartement, …ou un autre, dans un  temps, … ou un autre, devant des faits avérés… ou des craintes imaginaires. Réalité et mensonges se superposent. Façon modules Ikea, décor de Noémie Breeus.  On voit une veuve, pas trop éplorée, quoique… Un ami Daniel très mystérieux ou amoureux ? « Vraiment, crois-moi ! » Il la ménage ou il est sincère ?  Un mari mort d’un accident de voiture mais omniprésent… A la fois mari et amant d’une autre, …ou non. Laura Dame, la sémillante  jouvencelle en shorts et bretelles, est-elle une  des   jeunes maîtresse dudit mari ? Ou la femme de l’agence immobilière ? Anne, la veuve, vient d’ouvrir une boîte de Pandore. Elle vient de découvrir des notes - un testament empoisonné -  dans les affaires de Pierre,  son mari écrivain, qui laissent à penser qu’il  menait une double vie…  Et tout porte à le croire, surtout que c’est ce que Anne a peut-être envie de croire. Pour diminuer sa peine ? Pour confirmer des soupçons inspirés par une jalousie latente ? Mais voilà l’engrenage bien réel  d’une chimère - la peur de l’abandon -  et le besoin de savoir qui la ravage. Jamais  plus elle ne pourra parler à Pierre et savoir, il a  définitivement emporté son secret avec lui.  Paranoïaque ou avisée, Anne se drape d’un imperméable de détective et débarque chez la soi-disant maîtresse, elle veut la confirmation de sa vérité.  Dérangée, Laura Dame avoue : rien ou tout. Par jeu ? Ou par dépit amoureux ? 12272953281?profile=originalUne merveilleuse Caroline Lambert  d’une fraîcheur acidulée !

 Plus l’enquête se fait pressante, plus le mystère s’épaissit.   On retrouve la même atmosphère riche de questionnements humains, un temps et un espace explosés comme dans « Sentiments provisoires » comme pour mieux cerner le désir de l’auteur de la pièce. « Mon désir,  était de raconter l’histoire d’une femme qui se perd, qui cherche une vérité qu’elle fuit en même temps et qui, à la mort de son mari, se pose cette question : Peut-on réellement connaître l’autre, ou son visage demeure-t-il toujours, tout en étant familier, un masque, une chimère, une construction ? »

12272953485?profile=originalAnne cherche Pierre partout dans ses souvenirs… il ne cesse de lui échapper. Elle doit faire son deuil, mais cela veut dire quoi ?  Apprendre à vivre sans lui ? Mais qu’est-ce qui est plus facile ? En continuant  à l’aimer avec son vrai visage  ou en froissant son souvenir devant le masque de sa trahison ?  « Tu ferais quoi à ma place ? » « Si tu mourais ? Qu’est-ce qu’il me resterait ? » Des questions poignantes.  Il ne peut plus répondre, même par ses pirouettes de mâle assoiffé  d’aventures. La mort est la seule certitude. L’énigme de la  vérité, « ce sont des mains et des yeux qui brûlent en silence », une phrase incandescente.

12272953872?profile=originalL’écriture de Florian Zeller ? Une écriture «vive et musicale, un genre qu'adorait le XVIIIe, où le mot et le sentiment se livraient à de délicieux et douloureux cache-cache dont la vérité et le mensonge étaient les enjeux favoris». La  mise en scène ? Celle de Vincent Dujardin : adroite,  malicieuse comme un jeu de colin-maillard, qui ménage des coups de théâtre et s’amuse du jeu de pistes qu’il offre au spectateur et lui fait traverser le miroir des rêves. La musique ? Le seul bémol. Elle est envahissante, lancinante et  aussi pâteuse que celle d’un orchestre fatigué au bal du rat mort à trois heures du mat. Peut-être l’effet voulu ! Qui sait ? Il y a toujours au moins deux réponses à la même question, c’est Michael Crichton, dont l’inquiétude était sans bornes, qui le disait n’est-ce pas?  

Jean-Claude Frison (Pierre, le mari d’Anne)

Michel de Warzée (Daniel, l’ami de Pierre)

Stéphanie Moriau (Anne)

Caroline Lambert (Laura Dame)

SI TU MOURAIS  de Florian ZELLER

du 2 au  26 octobre 2013

du Mardi au Samedi à 20h15, Dimanche à 16h

Réservation www.comedievolter

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administrateur théâtres

12272947085?profile=originalMême pas vrai…

Mais si, c’est vrai : Jean-Luc REVOL est professeur régulier au Cours Florent depuis 1987 et mène une double carrière de metteur en scène et de comédien. Il est directeur artistique du TCF/Théâtre du Caramel Fou.  Et il a  derrière lui une série impressionnante de mises en scène depuis 23 ans. Il a mis en scène HAMLET de W.Shakespeare, avec Philippe Torreton en 2011.  « Même pas vrai »,  de Nicolas POIRET ( le  fils du regretté Jean Poiret, décédé en 1992 ) une création co-écrite avec  Sébastien BLANC, n’est-ce pas une comédie un peu facile ?  Loin de là ! Jean-Luc REVOL explique : « La comédie est une discipline difficile, un véritable numéro d’équilibriste. Il faut savoir doser les choses, ne pas forcer le trait, être toujours vrai dans la démesure pour arriver à une parfaite harmonie. Quand j’ai lu « Même pas vrai », j’ai su que tout était là, ajouté au plaisir de la découverte de la plume de deux nouveaux auteurs.
Nicolas Poiret et Sébastien Blanc écrivent l’humour de notre époque. Un rire cinglant, vif, rapide et vachard, sans pour autant négliger la vérité et les doutes de leurs personnages.
Car c’est bien cela qui fait leur force. Mathilde et Arnaud, les deux protagonistes principaux, forment un couple qui pourrait être banal, si ce n’était le moteur de leur vie sentimentale : le mensonge. Ou du moins, le mensonge érigé en mode de vie, qui leur donne souffle et énergie, le piment indispensable à la banalité quotidienne.
Ils se mentent, mentent à leur fils et à leurs amis, jusqu’à ce que leur réalité devienne délirante et éclabousse de joie, tout cela en parfaite connivence. Seulement, voilà, quand Mathilde comprend qu’Arnaud lui a vraiment caché une chose importante, la machine se grippe et l’heure va être aux règlements de compte sanglants. Tous aux abris !
J’espère pouvoir construire une horlogerie suisse avec cette comédie pleine de rythme et de rebondissements. Les personnages et les situations imaginées par les auteurs doivent être réglés au millimètre. C’est un travail de précision. Ici tout est réuni pour y parvenir. »

Ayant vu la pièce hier soir au Centre culturel d’Auderghem, on ne peut qu’applaudir le savoir-faire étincelant du metteur en scène qui pose très adroitement  sur les planches l’ensemble de ses propositions sans le moindre faux-pas. Du très grand art de boulevard. Une mise en scène au cordeau.  Car le spectacle est fort divertissant et les gens rient de bon cœur, mais ils s’interrogent aussi sur la société qui a enfanté ce sextuor de  personnages qui nous ressemblent.

Le pitch, on l’aura compris est assez facile. Ils sont six personnages qui se heurtent et essaient de s’expliquer, tous aveuglés par  un ego exacerbé, dans l’appartement où vivent Mathilde et Arnaud (Bruno Madinier, ah ! le redoutable beau gosse)  et leur ado en crise, Michaël. Heureux qui communique : 12272946881?profile=original « On ne dit jamais rien dans cette famille!  Petits jeux à la con ! J’en ai un marrant : essayez de vous parler !»   Entre les six protagonistes il y a des relations … qu’ils espèrent tous garder secrètes. Sauf que Mathilde (l’inénarrable 12272947477?profile=originalRaphaëline Goupilleau de Qui est Monsieur Schmitt?)  découvrant une rupture dans le comportement de son mari,  s’affole et veut en finir avec le temps des secrets. Des dîners de (non)-dupes s’organisent - le trio familial  ne peut régler ses problèmes que  devant des tiers - et les invités en sortent le plus souvent  l’estomac vide et la tête à l’envers… la cuisine n’étant pas le fort de la famille. Le trio « externe » est  électrique : le paisible Bernard ( Christophe Guibet) et  les deux filles :  une renversante Valérie Zaccomer  et Anne Bouvier, un paquet explosif d’affects.

12272948067?profile=originalBien que Mathilde, capable d’inventions délirantes, soit devenue une virtuose du mensonge et vacheries verbales en tout genre,  elle recherche désespérément la sincérité. A la fin de la pièce c’est finalement son fils Michael (Thomas Maurion, craquant de naturel) qui remet les pendules à l’heure. Il la somme de dire les choses enfin de façon simple, sans continuellement les saupoudrer de « magie », ce second degré qu’elle affectionne tant. « On n’a pas toujours besoin d’inventer la réalité pour qu’elle soit jolie ! » Le couple va- t-il  enfin finir par se parler…et arrêter de se mordre ?

12272948090?profile=originalCette comédie joyeusement sarcastique et très rythmée est menée  à grande vitesse : magie des changements de décors instantanés, (merveilleuse composition de Stéphanie Jarre) défilé de tenues mode de la  rue Montaigne, coups  de tensions intenses entre les comédiens qui jouent la réalité du théâtre plus vrai que nature  et se gavent de répliques spirituelles et bien tournées. Le public adore une telle élégance théâtrale!  Après la Belgique? La pièce « Même pas vrai » sera montée le 19 novembre au Théâtre Tête d'Or à Lyon avant d'être reprise début 2014 à Paris, au Saint-Georges.Christophe Guybet

12272948273?profile=originalhttp://www.artemis-diffusion.com/saison_prochaine/meme_pas_vrai/resume.html

http://www.ticketnet.be/fr/manifestation/meme-pas-vrai-billet/idmanif/8469

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