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femmes (55)

administrateur théâtres

Au théâtre Le Public : DU COQ à LASNE

 

De et avec  LAURENCE VIELLE ( avec JEAN-MICHEL AGIUS), Vincent Granger (clarinettes)  Helena Ruegg(bandonéon) pour la musique

Regard extérieur à l'écriture et à la mise en scène : Pietro Pizzuti

DU 12/04/12 AU 26/05/12               Petite Salle - Création mondiale - relâche les dimanches et lundis. Durée 1h30 / Supplémentaire le lundi 7 mai 2012 à 20h30

12272805292?profile=original« Pendant la deuxième guerre mondiale, il y avait dans ma famille flamande un résistant, membre du réseau Comète, et un collaborateur, fondateur du pèlerinage de la tour de l'Yser. Le premier est mort à Flossenburg en mars 1945, à l'âge de 34 ans, tandis que le second, après la guerre, était encore vivant. Cette histoire est un secret de famille. Personne n'en parle. On se tient bien... »

 

 Traversée de Flandre-Bruxelles-Wallonie. Cochon, coq ou âne, qu'importe? Voyage à pied dans l’espace et le temps.  « C’est le cheminement qui importe. » Lors de son voyage entre De Haan (du coq) et Lasne (à l’âne) Laurence fait une trouvaille insolite au bord d’un rang d’arbres de la forêt de Soignes : deux petites chaises pour enfant, porteuses  de deux âmes vieilles de plus de cent ans, comme dans l’Oiseau Bleu.

Bon début,  la peinture bleue est à peine écaillée. Laurence Vielle va s’empresser d’écouter avec passion le bruissement de la voix de son  arrière grand-mère en conversation avec son frère. La jeune femme, encore sous l’emprise de  la magie de l’enfance saisit les moindres frémissements des choses et des gens. "Van de hak tot op de tak."  De long en large, elle cherche inlassablement, classe, range et refait surgir l’image déteinte de sa famille. Elle fait reverdir tout un arbre de vie commune. Les uns et les autres se partagent les mêmes racines et s'expliquent. Tandis que la voix de  sa mère n’a de cesse que de la  conjurer de ne plus remuer le passé, Laurence travaille comme une archéologue. Explorer, étiqueter, replacer, trouver la bonne distance, restaurer les voix contradictoires : résistants contre collabos, francophones contre flamands, occupés contre occupants, les face-à-face sont prodigieux. « L’humain face à l’humain. »  

 

Laurence veut, à travers sa patiente et minutieuse reconstitution,  comprendre de quoi elle est faite, essayer de retrouver le fil rouge qui file l’histoire de mères en filles. Braver la honte et lever  une à une les pierres qui scellent des secrets terribles. C’est toute l’histoire de la Belgique qui y passe, depuis les tranchées de l’Yser. Un tableau  poignant qui nous aide à comprendre la superbe des uns la frustration des autres et ce clivage géologique fait du schiste le plus dur  qui pourfend la Belgique depuis sa création.

 

 Les moyens poétiques mis en œuvre par l’archéologue familiale sont d’une rare inventivité. Elle ne tient pas en place et passionne le public.  A vous de découvrir tous les secrets de l’art de la conteuse qui batifole avec tout ce qui lui tombe sous la main et organise un véritable jeu de piste surréaliste. Les voix sont touchantes, la volonté de nager en eau libre enfin transparente est  tenace. Ces questions d’identité sont  une question de vie ou de mort. Le spectacle est si émouvant et attendrissant que l’on doit souvent  retenir ses larmes. Il y a des paroles terribles :  « A défaut de savoir qui on est, on stigmatise qui on n’est pas.»  C’est rare de s’abreuver à une telle source d’humanité et de parole juste. Dans sa quête, elle cite Primo Levi et Aragon. Laurence fait plus que du théâtre, elle devient chaque jour un peu plus « Elle » en mille facettes: une métaphore vivante de la Belgique, telle qu’on la rêve, tous les soirs sur le plateau.

 

http://www.theatrelepublic.be/play_details.php?play_id=293&type=2#

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Vingt-quatre heures de la vie d'une Femme

Hommage à Stefan ZWEIG

 

avec Anne-Marie CAPPELIEZ


 

Et au fond de l’abîme, était l’Envoûtement.

Premier cercle : Dans un hôtel de la Côte d’Azur, une femme « comme il faut »  quitte mari et enfants pour soudain suivre un jeune amant, sans jeter un regard en arrière  et sans espoir de retour. Scandale. . .  Deuxième cercle : Une autre femme, une dame anglaise très distinguée, séjournant dans le même hôtel a aussi été envoûtée par le passé. Sa confession imminente suffira-t-elle à lui faire retrouver la sérénité  et faire craquer après 24 ans  l'envoûtement de souffrances toujours recommencées ? Troisième cercle : Apparition magique de ladite femme, encore jeune et  si envoûtée par son mari, qu’à la mort de celui-ci,  elle se trouve  incapable de continuer à vivre chez elle et se lance dans une fuite en avant pour échapper au vide vertigineux de l’âme. « Aucun flot vital ne résidait plus en elle. » Quatrième cercle : Était-ce une nuit de la Saint-Jean ? Sur le tapis vert du casino de Monte-Carlo, elle rencontre des mains, puis un visage exalté, ensuite flétri: un homme au bord du désespoir. Cinquième cercle : L'inconnu est envoûté par la passion du jeu et agonise. Sixième cercle : La femme se découvre une âme salvatrice qui l’envoûte totalement. Elle est prête à commettre les actions les plus folles pour l’arracher à la destruction.  Sentiment exaltant et neuf de l’utilité de son existence ! Septième cercle : Les 24 heures fatidiques. La voilà  au septième ciel, elle est tombée amoureuse. « Cette nuit me parut mille ans ». Passion foudroyante.  Nouvel envoûtement. Huitième cercle : Toujours envoûté par le jeu, le jeune homme  rompt sa promesse et  ne la reconnaît pas. Après avoir reperdu toute sa fortune, il ne résistera pas à l’attrait du suicide, envoûtement maléfique.

 Neuvième et dixième cercles : c’est le spectateur et la spectatrice qui sont à leur tour envoûtés par le texte de Stefan Zweig, par le talent très puissant de la conteuse. Un élixir, une herbe magique ?  Les murs du théâtre disparaissent, le décor de même, jusqu’au moindre petit pot de Saint-Paulia aux fleurs violettes  qui décoraient le lobby de l’hôtel  où est sensée se dérouler l’histoire. A la fin de l’histoire on découvre avec stupeur, la  petite tasse à thé en porcelaine  de la dame anglaise, posée délicatement sur une table basse juste devant les spectateurs. Elle semble ne jamais avoir été là avant, tant l’imagination du spectateur a fait du chemin.

Allez voir cette pièce qui fait partie d’une trilogie envoûtante de Stefan Zweig, donnée au théâtre du Grand Midi sous la direction artistique de Bernard Damien.

 

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https://artsrtlettres.ning.com/profiles/blogs/le-theatre-du-grand-midi-rend-hommage-a-stefan-zweig

du 28 février au 17 mars à 20h30

 

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Et voici la lauréate du prix première 2012:

Elle vient d'obtenir pour son  premier roman "Léna" le prix Première de la RTBF décerné ce premier mars à la foire du livre de Bruxelles.

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 Virginie Deloffre  est médecin à Paris... à mi temps, car elle écrit depuis un long moment et voici son premier roman.  Fascinée depuis l’enfance par la Russie, elle signe  un livre magnifique à l'écriture sensitive. La toile de fond est  toute l’épopée soviétique depuis les années 20 jusqu’à  l’effondrement de l’URSS à la fin des années 80.  Une débâcle spectaculaire qui ressemble à celle du fleuve Léna lorsqu’il sort de sa rêverie hivernale et cause des conséquences catastrophiques quand craquent tous les barrages de glace.

La Léna dont la romancière retrace le parcours est une enfant rêveuse, traumatisée par la mort de ses parents disparus dans un trou de glace en Sibérie, recueillie par un vieux couple sans enfant, Dimitri, un scientifique exilé en Sibérie et Varvara une bonne vieille paysanne pragmatique au franc parler, fière de son communisme. Hélas sa chaleur humaine peine fort à dégeler l'enfant mystérieuse et secrète.

Léna les quitte pour épouser Vassili, un ardent pilote de chasse de l’Armée rouge, et se retrouve seule dans un nouvel environnement urbain. A quel malheur doit-elle se préparer ?  Sa vie intérieure est marquée par  la rêverie et l’attente perpétuelle des retours de mission de Vassia. Son immobilité lui suffit pour capter la permanence.   Elle se complait dans l’inaction comme si bouger dans sa chrysalide allait tout faire basculer. A chaque départ et chaque retour de son mari elle écrit  de longues missives nostalgiques à son oncle et sa tante restés dans le Grand Nord et se souvient : "La terre et la mer se confondent, uniformément blanches et plates l'une et l'autre, sans ligne de fracture visible. L’œil porte si loin dans cette blancheur, qu'on croit percevoir la courbure de la terre à l'horizon. A ce point d'immensité l'espace devenait une stature, imprégnant chacun des êtres qui l'habitent, une irréductible liberté intérieure qui fait les hommes bien nés, les Hommes Véritables, ainsi que ces peuples, les Nénètses,  se désignent eux-mêmes."  Elle se sent comme les paysages de sa tribu d’origine: sans limites, à la fois changeants et immuables, aussi désertiques.

 La langue poétique dévoile peu à peu tous les replis de son âme vagabonde. Elle a aussi la distance pour décrire avec humour son nouvel environnement : "C'est la fameuse Laideur Soviétique, inimitable, minutieusement programmée par le plan, torchonnée cahin-caha dans l'ivrognerie générale, d'une tristesse inusable. Un mélange d'indifférence obstinée, de carrelages mal lavés, de façades monotones aux couleurs uniques -gris-bleu, gris-vert, gris-jaune-, témoins d'un probable oukase secret ordonnant le grisaillement égalitaire de toutes les résines destinées à la construction du socialisme avancé. Un genre de laideur qu'on ne trouve que chez nous, que l'Ouest n'égalera jamais, malgré les efforts qu'il déploie à la périphérie de ses villes. "  
 

Soudain, rien ne sera plus jamais le même. « Elle est tombée sur moi, la menace que je sentais rôder. »  Lorsque Vassia  est sélectionné pour faire partie de mission de la station Mir, Lena, fille de l’immuable perd ses repères: la routine de son attente des retours-surprise du mari qui faisait  tout son bonheur  tranquille et solitaire explose et fait  place aux incertitudes et au questionnement. Son monde solitaire est fracassé.
Elle est forcée au commerce avec autrui, confrontée par la réalité. Et de se demander ce que  vont donc chercher les hommes dans l'espace. Quelle est cette force qui les lance vers l'inaccessible?  Qu’ont-ils contemplé ces cosmonautes,  face à face avec l'univers? Pourquoi ceux qui en reviennent ont-ils tous le même vide au fond des yeux ?  « Je ne sais pas pourquoi les hommes veulent aller plus loin. Mais ils l'ont toujours fait, ils ont toujours marché droit devant eux. Ils se sont heurtés à des déserts, puis à des montagnes, et ils les ont franchis. Ils sont arrivés à la mer et cet obstacle leur a pris des siècles. Mais ils ont appris à construire des bateaux et ils sont partis sur la mer au milieu des tempêtes, droit devant vers l'inconnu. Vers l'inconnu terrifiant toujours. Chaque étape de leur progression était jonchée de cadavres et pourtant ils ont continué jusqu'à couvrir la surface de la terre, et maintenant la terre ne leur suffit plus. Ils sont ensorcelés par les lointains. C'est une force en eux, sans doute semblable à celle qui habite les oies sauvages au printemps. L'étendue les attire, elle les appelle. Et ils se mettent en marche. »

Le roman est construit avec  le soin d’une lente distillation de l’art de dire,  sans en dire trop, par petites touches successives, pour fabriquer des images inoubliables. Le plaisir de la lecture est total tant la langue soutient l’imaginaire, fait éclore l’émotion, et ouvre nos yeux sur la sensibilité de l’âme  russe. Elle insiste sur  le désir permanent  de conquête  de l’homme. Elle capte les différences ahurissantes entre l’homme et la femme dans les deux couples… qui malgré tout s’entendent.   Le personnage de Léna est tout émotion: fine, pudique et délectable. Tous les  personnages sont riches, la narration de l’histoire soviétique prend des allures de conte. Le lecteur de l’OUEST se sent transporté dans un monde inconnu et surprenant.  L’écriture fluide  et rythmée colle au roman, comme un vêtement mouillé car Léna au fur et à mesure fait fondre la glace qui l’étreint. Tout au long de l’histoire on assiste à une accélération dynamique de l’énergie  et à une authentique mise à flots du vaisseau de la vie. Celle de Léna.

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Le ravissement de l'éclosion.

 

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               Contes coquins d’Algérie, un spectacle de et par Fahem Abes  au théâtre littéraire de la Clarencière

                   Fenêtre ouverte sur la Kabylie, Fahem Abes nous a récité hier soir avec humour un délicieux chapelet de contes érotiques venus de la tradition orale de son pays. Le point de vue est souvent masculin.  Il a refusé tout décor, il y a  juste un rideau noir qui drape le fond de la scène. Le conteur, en pantalon et chemise noire occidentale, joue le masque neutre et va faire éclore tout un monde imaginaire et malicieux dans une langue qui égrène un français académique et d’exquis vocables berbères aussitôt traduits.

                  Entre les contes à multiples tiroirs il rejoint le bord de la fenêtre de briques blanches dans le rideau et esquisse quelques notes de flûte, seul élément qui évoquera l’instrument du plaisir masculin. On voyage de royaumes en villages, en bord de mer. On rencontre poissons, crabes, lézards, serpents  et herbes magiques. Un curieux  instrument de taille impressionnante faisant office de ceinture, de manteau, de turban, un coffre magique empli de silence et une petite souris aussi maline qu’un chat!


                Shéhérazade masculin, le conteur se saisit des mille et un contes kabyles pour nous faire apprécier sa culture algérienne. « Sortir ces contes de l'oubli, les porter à la lumière, les faire entendre, les partager était pour moi un défi, mais c'est avant tout une contribution certes modeste, mais ô combien importante aux festivités qui en 2012 célébreront les 50 ans d''indépendance de l'Algérie. Importante car à travers ces contes coquins, c'est une autre Algérie qui se découvre. Une Algérie suave, drôle, épicée, irrévérencieuse, libre de paroles, chaude, sexuelle, féministe, une Algérie amoureuse. Porter et vivre le partage de cette Algérie-là est un réel plaisir. »

 

               L e Shéhérazade au pipeau volubile nous fait voyager au pays de la montagne de vérité  vexée et vaincue par les ruses d’une femme, au pays des ogres terrassés, de l’amour qui arrive toujours à ses fins, du plaisir épicé que l’on donne, version masculine.

C’est sobre, délicat, l’air de ne pas y toucher, rien de lascif, pétillant d’humour. On le croirait en train de déclamer des contes coquins lors d’un dîner, parlant à mots poétiques et voilés de la chose.  Le cadre du conte permet de décapiter les hommes qui ne satisfont pas les femmes, aux amants de berner les maris, aux hommes de n’avoir pour tout travail que l’amour.

On n’imagine  pas ce spectacle autre part que chez Fabienne, à la Clarencière,  charmant petit lieu bruxellois intime et vibrant. On sort de l’époque, on rentre dans un temps immémorial où le ciel brille nuit et jour. On se complait dans une vivacité de ton, une gestuelle de scène étourdissante, et un voyage dans les désirs et les phantasmes amoureux où lune et soleil se partagent le plaisir.  

 

du 10 au 18 février 2012 http://www.laclarenciere.be/

 extraits:

http://www.fahemabes.com/



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"La fin du monde" de Sacha Guitry (Comédie Claude Volter)

La fin du monde  de Sacha Guitry Comédie Claude Volter

 

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                                             Après nous…

Un toast à l’argent,

Le suprême agent,

Dit le Titan de la banque,

La richesse est tout,

Retournons l’atout,

Ce n’est pas l’enjeu qui manque.

Pressons si fort

Qu’en moelle d’or

Tout fonde,

Crédit, journaux,

Chemins et canaux,

Terre, onde.

Saignons sur bilan,

L’avenir à blanc.

Après nous la fin du monde ! 

                        (Paris, 1871.)

 

Sautez dans votre calèche ou votre fiacre, et demandez le château de Troarn. Chambres d’hôte de charme aux noms prestigieux : Charles IX (bof), Voltaire (piquant), Charlotte Corday (sans la baignoire) ….  Mais c’est surtout l’esprit et  la conversation avec le maître des lieux qui vaudra la promenade.  Une langue magnifique, des intonations princières,  dans un décor en décrépitude il est vrai, mais ô combien chargé d’histoire. On inviterait bien le capitaine Fracasse ! Le duc désargenté est un partenaire de choix pour se gausser de l’administration, du fisc, des huissiers et autres notaires dévoreurs de votre bel argent. Toute sa personne trônant sur un escalier horriblement kitsch nous offre des moments théâtraux  délectables qui dépeignent la fin d’un monde. « On ne saisit pas le Duc de Troarn ! » « Je vais être assiégé par la troisième république ! »

 

  Un seigneur sans le sou et que l’on va bientôt mettre à la porte du château de ses ancêtres, à moins que suivant l’idée géniale d’un sien cousin et prince d’église, il ne fasse chambres d’hôtes! Il en profitera pour retrouver le goût de la farce et pimenter l’affaire.  Dans cette pièce de Sacha Guitry,  on ne retrouvera pas les   mille et un traits acérés du misogyne qui s’offrit … cinq épouses car il écrivit cette pièce en  réponse spirituelle aux instances qui le pourchassaient de leur courroux pour des questions de cassette plus que de conquêtes féminines.  

 

 Bonheur désuet : les personnages sont une palette d’individus tous mieux campés les uns que les autres. L’huissier, Maître Charognard, ex-maître d’hôtel de la princesse de Monaco, ne manque pas d’allure. C’est un ahurissant Gérald Wauthia. Sa gestuelle est assurément croquée sur les  meilleurs sketchs de l’illustre  Honoré Daumier.

 

Monseigneur Le Landier, à l’embonpoint révélateur,  fort sensible aux histoires de soubrettes,  n’est pas en reste : sa robe violette et ses manières onctueuses ont de quoi faire rire à larges rasades. Il est passé maître en mensonges pieux, bien sûr ! Le Duc de Troarn, autrement dit Gibelin de père en fils, est une statue de bonne humeur qui pourfend morosité et hypocrisies de tout poil. Il résiste à tout : aux femmes surtout. Sa cousine, la marquise d’Aumont de Chambley,  sa fidèle vieille bonne revêche et amoureuse, Amélie, jouée à l’époque par Pauline Carton, et, of course, Adèle Pégrilleux, la riche héritière qui l’aime à la folie. Vierge rébarbative, diplômée et musicienne, elle lui résoudrait  tous ses problèmes d’argent s’il consentait à l’épouser sur les conseils de son avisée cousine.  La Marquise : « Comment vivez-vous ? Le Duc : Je vis le mieux du monde ! Avez-vous vu mon potager ? Et mes poules, les avez-vous comptées ? J'en ai deux cents…» Il ajoute froidement : « D’un parc j’ai fait un bois, d’un monsieur j’ai fait un homme ! » Vous appelez cela un discours réactionnaire? Il est libre, Gibelin,  et ne boude pas son plaisir! L’argent le fait …rire! 

 

Par contre, Mademoiselle  Mimosa qui  joue la femme sublime a de quoi réveiller le gentleman qui s’était retiré du monde finissant. Le Duc : «  Une femme - mais c'est toujours quelque chose. Et si vous n'êtes pas autre chose qu'une femme, tant mieux. C'est encore plus beau …Vous dites « pas grand'chose » quand vous avez tous les pouvoirs ! Vous pouvez faire faire un chef d'œuvre à un peintre - une bêtise à un brave homme - une folie à un banquier - vous pouvez faire commettre un crime - empêcher d'en commettre un autre - vous pouvez faire le bonheur d'un homme - le malheur de cinq ou six femmes !...Regardez donc ce que vous avez fait de moi en quelques heures !...Vous m'avez rajeuni d'un siècle ou deux. Pas grand'chose, une femme ? » Elle ressemble à s’y méprendre à celle  qui le 21 février 1935 épouse Sacha Guitry, homme de   50 ans,  de 22 ans son aîné. Il annonça leur mariage en déclarant : « J'ai le double de son âge, il est donc juste qu'elle soit ma moitié »  Tiens… une réplique de la pièce…

 

Une pièce donc, pleine de charme, d’esprit et de bonne humeur. Le choix des acteurs pour ces huit personnages hauts en couleur est particulièrement heureux. On ressort donc du spectacle, les yeux rieurs et l’esprit rassasié de bonheur verbal car dans l’affaire on a eu même droit au richissime américain, un Adamson  admirablement campé par Marcel  Delval et qui ne parle pas un mot de français bien sûr mais peut s’entretenir en latin ad libitum avec le monseigneur goguenard.  

 

Mise en scène : Danielle Fire  /Décor : Christian Guilmin / Avec : Michel de Warzée, Stéphanie Moriau, Nathalie Hons, Gérard Duquet, Jacqueline Nicolas, Gérald Wautia, Marcel Delval, Xavier Percy.

                                                
 Comédie Claude Volter
Avenue des Frères Legrain 98 - 1150 Bruxelles

du 07/12/2011 au 31/12/2011

http://www.comedievolter.be/

 

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 Sylvie NICOLAÏ  est  Clara SCHUMANN  

dans Clara et Robert SCHUMANN 


de l'auteure belge Sylvie Nicolaï

 

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spectacle créé par LE THEATRE DU GRAND MIDI à L'XL THEATRE

 dans le cadre du  FESTIF'FESTIVAL 2011 - La parole est aux Jeunes Artistes  du 15 au 19 novembre à 20h30

 

 

                                                            &

 

 

 

Emilie DUVIVIER  est La MALIBRAN 

dans UNA VOCE POCO FA 

de  l'auteure belge Sandrine WILLEMS

 

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spectacle créé par LE THEATRE DU GRAND MIDI à L' XL THEATRE


 

du 15 au 19 novembre à 20h30

 


  

 

                                                    Deux destinées extraordinaires: Clara et Maria,

Deux femmes extraordinaires. 

 

Elle s’appelait Clara. Femme de tête et de cœur,  amante et mère incomparable. Une princesse sombre. Elle s’appelait  Maria. Irrémédiablement belle, riche et intensément jeune. Une princesse blanche.

Toutes deux vivent la passion d’un homme entre tous et de la musique. Toutes deux subissent la tyrannie de  pères autoritaires. Pour l’une la passion devient constructrice, pour l’autre destructrice. Le spectateur est captif entre ces deux faces de la féminité qui lui sont tendues comme un miroir, fondement du théâtre.

 

Les deux interprètes de cette rencontre poétique et musicale sont habitées par la fougue du  romantisme. Toutes deux, anciennes élèves de Bernard Damien, ont accompli un travail magistral   de création et d’interprétation. La création de Sylvie Nicolaï est un patient  travail d’assemblages des lettres  enflammées qu’échangèrent Clara et  Robert Schumann. L’ensemble est  mis en scène avec vivacité et amour palpable. Ce texte volubile retrace leur histoire d’amour avant que le compositeur ne sombre dans la folie, la laissant à la tête d’une nombreuse progéniture.

 

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 Emilie Duvivier reprend le texte splendide et touchant de Sandrine Willems,  jeune auteure belge vivant à Nice, qui retrace la vie éphémère de Maria Felicia Malibran. E.E Schmitt dirait « chacun sait qu’une biographie est une autobiographie sincère. En croyant parler d’une autre, on parle sans fard de soi ». Les deux comédiennes mettent tant de cœur dans leur interprétation qu’on ne peut pas les imaginer étrangères au texte et uniquement interprètes. Ou alors elles possèdent un talent hors du commun. 

Toutes deux nous livrent ce qui se passe  au-delà des mots et nous tendent ce miroir dans lequel elles et nous, pouvons nous voir. Toutes deux pénètrent avec talent ce que ces deux personnages féminins extraordinaires éprouvent. Clara : « Je veux vivre et vous chérir et me souvenir ! » Maria : «Je te donne ma vie, mais je ne vis plus ! ».  Puis au bord du désespoir : « Encore vivre, encore chanter ! » alors qu’elle agonise à 28 ans après une chute mortelle à cheval. « Un amour, enfin à sa hauteur ! »



 

Il y a  un formidable crescendo entre les deux parties du spectacle. Emilie Duvivier ajoute tout son corps rayonnant sur le plateau. Et une lumière incandescente. « De ma voix, je pouvais faire n’importe quoi. Trois octaves balayées d’un souffle. » Tout en elle est vibrant, intense et juste. Sa voix souffle des confidences à des spectateurs assis au premier rang devant un décor éblouissant de blancheur. Des bribes de  mélodies inoubliables de Maria sont ressuscitées avec une justesse  surprenante. Elle avoue que l’acharnement du succès et l’angoisse l’ont fait vivre comme une bête traquée aux côtés d’un père tyrannique. Que « les jours les plus heureux de sa vie » étaient avec Bellini, qui ne la désirait pas. Elle soupire avec amertume que les gloires de l’art lyriques « sont aimées pour ce qu’elles font, pas pour ce qu’elles sont ». Une question qui nous vrille le cœur. Tout son corps « impossiblement beau »  et rose de féminité palpite, bondit et se terre  comme un  animal en souffrance, l’émotion nous étreint. Le sourire se perle, la bouche frémit, les ongles écarlates agrippent sa tunique vaporeuse  de déesse.  Ses yeux radieux nous transpercent, et  tout en elle confesse avec passion  son histoire malheureuse à cet enfant mort en son sein. Les noces de la scène et de la comédienne lui font tout donner d’elle-même.  Le spectateur est subjugué. Par le texte et par l’actrice.  « Qui a goûté à l’ovation d’un public ne peut plus s’en passer ». Ce spectacle d’exception le prouve en tout cas.

 

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administrateur théâtres

 

12272763279?profile=original« La source des femmes» sortie en Belgique le 9 novembre (avant- première aux Beaux Arts de Bruxelles le 5 octobre)

 

Fils d'un journaliste juif déporté et sauvé Radu Mihaileanu  est né à Bucarest en Roumanie le 22 Avril 1958. A  22 ans, il fuit le régime politique de son pays et s'installe en France.  Il signe en 1992 son premier film, Trahir, comme réalisateur et scénariste. Ce film narre le combat d’un individu contre une puissance totalitaire.   Son  deuxième film, Train De Vie reçoit un très bon accueil au Festival de Venise. En 2005, avec Va, Vis Et Deviens, Radu Mihaileanu devient producteur, et remporte le prix du Public et le prix Européen à Paris. Une histoire réelle de réfugiés juifs éthiopiens rapatriés par Israël  dont le protagoniste est un jeune garçon échappé d’un camp de réfugiés au Soudan et  qui réussit à se proclamer  juif et orphelin et est accueilli dans une famille adoptive française en Israël. Ce long-métrage plein d’humanité évoque les problèmes d’intégration, le racisme, les différences culturelles, la perte des racines.  En  2006 il reçoit le César du Meilleur Scénario Original pour ce troisième film. En 2009, Radu Mihaileanu signe la mise en scène du film  Le Concert, long-métrage avec Mélanie Laurent.

 

 Le voici maintenant  à Cannes pour le film La Source Des Femmes présenté en Compétition du 64ème Festival International Du Film De Cannes 2011 avec 5 nominations :

- Palme d'Or (Radu Mihaileanu)

- Grand Prix (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury Oecuménique (Radu Mihaileanu)

- Prix de la Jeunesse (Radu Mihaileanu)

 

Leïla Bekhti et Biyouna  jouent à la perfection le rôle de deux femmes de générations différentes,  qui vont entamer une guerre contre le machisme, l’inégalité profonde des femmes, dans la société médiévale qui sévit dans ce petit village marocain sans eau et sans électricité. Du Maroc à L’Afghanistan c’est dans doute le même combat : une révolution à accomplir. Parfois une étincelle, infiniment petite,  suffit à allumer un brasier de changements.  Elles sont déterminées, malgré l’opposition de quelques unes et la crainte justifiée de leurs maris.   Elles veulent dénoncer des pratiques qui n’ont rien  à voir avec l’Islam, mais tout à voir  avec cette supériorité masculine atavique, le corvéage sans merci des femmes, les mariages forcés à un âge indécent,  le droit de les violer, de les répudier, de les battre et de leur refuser l’accès à l’éducation… sous prétexte de sorcellerie.

L’idée géniale de ces femmes  c’est  donc de faire la grève del'amour et du sexe tant que les hommes ne s’arrangeront pas pour amener de l’eau au village. Eux qui  forcent leurs femmes à se transformer en bêtes de somme, pour transporter tous les jours, l’eau que l’on ne peut trouver qu’à une source perdue dans la montagne, n'imaginaient pas qu'un jour elles puissent se rebeller et trouver un tel moyen de pression.

Les porteuses d’eau se sont épuisées sur les chemins arides de ce pays « où coule une source d’eau qui  se tait. » Au propre et au figuré. « Mais l’eau  qui apporte la vie emporte aussi  la vie, déplore l’une d’entre elles, qui a malheureusement glissé et  perdu  sur le chemin caillouteux, le bébé qui allait naître.  Et le cœur des hommes est sec et sans amour,   à cause du chômage et de la sécheresse de l’environnement. Les conditions de vie font qu’ils  ne participent plus du tout à la vie économique du village et se prélassent à ne rien faire.  Cela doit changer. Le village est en train de mourir, il s’agit de survie, comme de celle des infiniment petits, ces insectes en voie de disparition  qu’un entomologiste au cœur aussi sec que le leur,  est venu étudier sur place.

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Le film s’accomplit comme une sorte de conte, fourmillant d’humour, d’inventivité, non sans rappeler celle des mille et une nuits. La danse, le chant lancera la première offensive. Les hommes sirotant leur thé à une terrasse seront ahuris devant la montée des exigences qu’ils nommeront aussitôt sacrilèges et se défendront bec et ongles pour garder leurs privilèges. Le ton est malicieux, déterminé, dicté par l’amour et non par la tradition. Les femmes sont généreuses, belles, pétillantes d’intelligence et armées de courage, comme dans un conte. Les images sont superbes, le cœur du spectateur se nourrit de l'allégresse communicative de ces femmes qui croient à la justice de  leur combat.  

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Tout le propos du film sera celui d’une source d’eau qui parle et se fait entendre, enfin. Et la source des femmes, c’est l’amour, qui lui aussi doit se faire entendre, enfin. L’être humain n’est pas fait pour vivre à genoux et est capable de merveilleux. Voilà pour ce conte oriental réaliste et contemporain de l'infiniment petit. Comme les femmes le disent dans l’histoire, «  beaucoup de fourmis tirent un lion ». Le lion c’est l’histoire de l’humanité.

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Nues en diptyque

 Pour en finir avec la peinture, je recommence.. Comme après chaque break.. grande timidité..

 Un diptyque  20x15 traine dans un coin et je  l'attaque prudemment.

 Les couches et marouflages se superposent et chaque fois, je suis proche de l'exercice sans intérêt.. Faut avec petits comme avec grand se fâcher.. Pas de bonne peinture sans colère.. Hein.!

 Voici enfin un résultat digne de la bonne surprise.

 diptyque 20x15 sans titre acry et marouflage sur toile gegout©adagp2011

diptyque 

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administrateur théâtres

Une superbe vidéo aquatique  nous plonge dans l’Histoire du Titanic,  vieille de 99 ans. En ce jour fatidique  du 14 avril 1912, le puissant monde occidental se brisait comme une poupée de porcelaine et s’engouffrait au fond de l’Atlantique Nord pour toujours. On le sait, c’est le  péché  d’Hubris, tant dénoncé par les tragédiens grecs,  qui  fit disparaître  pour toujours ce bâtiment réputé insubmersible, dans "le  crissement d'un patin sur la  glace." Ce navire, aussi  haut que le plus grand des gratte-ciel américains, sombra en quelques heures par  une nuit sans lune, en frôlant l’iceberg meurtrier. Symbole tragique des limites de l’homme et de la dislocation du Vieux monde.

 

La pièce de THIERRY DEBROUX fut écrite quelques mois avant la sortie du film de Cameron en 1996, lui aussi une description d’une catastrophe qui ne cesse d’interroger notre mémoire collective.  Ainsi furent fracassés brutalement, le luxe extrême, le délire du progrès technique et les classes sociales…. Coup de semonce divine? En tout cas, une catastrophe internationale et ici dans la pièce, une catastrophe intime d’une petite fille séparée de sa mère dans des circonstances étranges. De l’immensément grand à l’immensément petit.

 

 Le décor est un vaste plan incliné blanc, le souvenir de l’iceberg,  sur lequel apparaissent - elle,  dans toute sa vivacité, et lui, dans son immense bonhommie - la grande actrice Jacqueline Bir et son merveilleux compagnon, Marc Olinger  jouant Edward, le mari flegmatique. Ils ont tout du beau couple de noces d’argent,  s’intéressant, l’un aux étoiles et aux questionnements de Einstein, et  l’autre à l’infiniment petit : les  pucerons  dévorants le robinier du jardin.

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 Maggy est mystérieusement protégée de ses souvenirs de petite fille par une amnésie infantile  qui a recouvert  les événements du 14 avril 1912.  La surface polie du couple sera fracassée par la  visite soudaine d’un jeune compositeur d’opéra, tout comme le destin fracassa subitement le bateau mythique. Edward, le mari  astronome ne veut pas réveiller les vieux souvenirs. Il traine derrière lui un fardeau aussi lourd que le Titanic. Par amour pour sa femme, Maggy,  il n’a jamais voulu dévoiler les secrets qu’il détient.

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Un douloureux travail de mémoire  pour Maggy s’engage dans un duel avec le jeune compositeur, figure très dramatique. Celui-ci s’est  passionné pour un travail de mémoire palpitant et c’est ainsi que les deux destins se croisent. Il est en effet fasciné par la photo d’une femme, trouvée dans un livre ayant appartenu à son grand-père. Pourquoi ressemble-t-elle tant à cette mère fermant les bras sur son enfant, qu’il a retrouvée dans des documents d’archive du  Titanic? Une énigme familiale qu’il ne peut s’empêcher de vouloir résoudre. Maggy, devenue la proie de réminiscences  troublantes, qu’elle croyait enfouies à jamais,  finit par se prêter au jeu … qu’elle porte élégamment, avec une justesse de ton, une vigueur et une émotion magnifiques.

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A la fin, c’est la catharsis salutaire et l’émergence de la sérénité et de la paix. La petite fille souriante de la vidéo mélangeant subconscient et fonds marins,  apparaît sur la scène en sautillant. Applaudissements vifs et chaleureux.

 

 

        THÉÂTRE ROYAL DU PARC  28 Avril 2011 >> 28 Mai 2011

MISE EN SCÈNE   Thierry Debroux , COMPOSITION MUSICALE de PASCAL CHARPENTIER, 

SCÉNOGRAPHIE ET COSTUMES   Catherine Cosme

 

 

AVEC   Jacqueline Bir,  Anouchka  Vingtier,  Marc  Olinger,  Hervé  Sogne

                                   Le texte est paru aux éditions Lansman.

 

 

 http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2010_2011_005

 

 

 

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administrateur théâtres

Cinq filles couleur Pêche (Théâtre des Martyrs)

12272729068?profile=originalCinq filles couleur Pêche    Titre original :

« Five Women Wearing the Same Dress » (Allen Ball 1993)

 

L’absente de tout bouquet :  on ne voit jamais la mariée dans la pièce, mais on vient observer « les insolentes bridesmaids », toutes habillées façon meringues roses, selon le vœu de la mariée. Quant au marié, on n’en parle même pas ! symptomatique?


Cinq demoiselles « d’honneur » qui lèvent cyniquement le voile sur l’envers du décor. Cinq « demoiselles »…qui n’ont rien de jeunes vierges effarouchées. Elles devraient sortir d’une bonbonnière, et être toutes pareillement  coiffées, pomponnées et  habillées,  ainsi le veut la  coutume en Amérique. Mais la livrée est trash et chacune décline à sa façon des traits de costume et de caractère, hors du commun. Le froufrou du tutu de fluo  rose criant est piétiné par le vécu des cinq grâces, qui à l’occasion de la mascarade de ce mariage délirant, se lâchent comme elles ne l’ont jamais fait.

Elles boivent, elles fument et elles causent ! Confidences détonantes et hilarité en continu, vocabulaire cru fait pour choquer, langage corporel outrancier, la critique de la société néo-libérale éclate dans toute sa violence. Le ton est corrosif, on nage dans l’acide.  On ne peut pas être indifférent.

Margaret, la sœur de la mariée, coiffée punk blond oxygéné, attachante, est  vraie sur toute la ligne. Toutes griffes dehors elle pourfend l’institution, l’establishment et les parents débiles, et surtout la mascarade de la cérémonie et de l’après-cérémonie. Sous des dehors de battante, elle est toute fragilité et insécurité! 

Georgia the gorgeous, ronde et crépitant d’humour, l’esprit et le corps en pulpe. Pourquoi a-t-elle accepté de devenir demoiselle d’honneur d’une  mariée qui lui a raflé in illo tempore son Don Juan, l’incomparable sex-symbol, Tommy Valentine, qui se les est toutes « faites »? De dépit, elle a épousé le roi des « larves ». Elle joue divinement bien !

Frances : La cousine de la mariée. « Je ne fume pas, je ne bois pas, je ne couche pas, je suis chrétienne »….et tous les autres poncifs à la clé. Une caricature exquise de la naïveté et de l’innocence. C’est elle bien sûr qui gagnera le bouquet de la mariée !

Julia, « élue Reine de la mauvaise réputation ». Solitaire en diable malgré le  nombre  incalculable d’amants qu’elle a collectionnés. Les parents lui reprochent son influence  néfaste sur la mariée, elle se réfugie dans le plaisir de la manipulation et de l’observation, jusqu’à la dernière scène où …(chut !!!)

Brenda: la sœur grande et maigre du marié. Malgré les lunettes démesurées son  corps ingrat se cogne partout. Ugly Duckling, elle est devenue lesbienne, et peut se gorger d’appetizers à l’infini, sans gagner un gramme. Quelle injustice !

 

La panoplie des maux de notre siècle est présentée en éventail.  Rien ne manque. Le rythme et le décor sont débridés, le ballet presque macabre. On perçoit des références très lisibles au très beau film du même auteur, « American Beauty » avec l’utilisation d’une  petite caméra vidéo qui filme les mouvements des « Barbies ». Ils sont  projetés sur une dizaine d’écrans ayant remplacé depuis longtemps les livres sur les étagères de l’immense bibliothèque de  cette chambre où elles se sont réfugiées pour fuir le mariage. On a même droit à une séquence purement nombrilique, au propre et au figuré, c’est dire si l’altruisme a peu voix au chapitre!  La mise-en-scène de  leur déshabillage mental est très audacieuse et fait mouche. Toutes happées par les non-valeurs, l’encombrement de la société moderne et la perte de certitudes, elles volètent en tous sens, de façon erratique. Heureusement cette expérience impromptue leur fait découvrir les bienfaits du parler vrai et des  liens d’amitié naissante, la seule chose qui surnage dans ce tas d’immondices.

Soif d’idéal couleur pêche?  On finit par les aimer toutes …ces pécheresses! Toutes pèchent, à cause du monde  moderne qui les broie. Sauf peut-être, Frances, accrochée aux vertus obsolètes de sa foi chrétienne.  Et encore, celle-là  ne pèche-t-elle pas par extrémisme religieux?  Foule sentimentale, s’abstenir.

Sauf que le jeu des cinq actrices est tout simplement génial.

Dernier jour: au théâtre des Martyrs

 

avec 

Julia (Valérie Bauchau)

Margaret (Stéphanie Blanchoud)

Georgia (Laura Vossen)

Frances (Sandy Duret)

Brenda (Karin Clercq)

Et Michelangelo Marchese


http://www.theatredesmartyrs.be/pages%20-%20saison/grande-salle/piece5.html

 

 

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administrateur théâtres

LE JOURNAL D'UNE FEMME DE CHAMBRE

femmedechambre.jpg d'Octave Mirbeau
du 22 mars au 9 avril 2011 à 20H30
Matinée le dimanche 3 avril à 16H
Relâche dimanche et lundi


adaptation et mise en scène
Bernard Damien
Avec
Nicole Palumbo
Laurent Renard

« Si infâmes que soient les canailles, ils ne le sont jamais autant que les honnêtes gens. »

C’est dire si Octave Mirbeau éprouve une véritable nausée pour le monde des honnêtes bourgeois qu’il pourfend impitoyablement. Célestine, la soubrette, tient un journal circonstancié de ses heurs et malheurs et égrène les turpitudes des nantis. « Je te hais, un peu, beaucoup, passionnément… » La condition de domestique n’est qu’un esclavage déguisé. Le secours des mots lui rend toute sa droiture et sa solidité. Ses racines sont dans le ciel.  Les rôles s’inversent, on est pris d’empathie pour quelqu’un qui s’exprime avec autant de finesse, de lucidité et de cœur. Car elle a le cœur grand comme la main.

« Échouée dans un bourg normand, chez les Lanlaire, au patronyme grotesque, qui doivent leur richesse injustifiable aux filouteries de leurs « honorables » parents respectifs, elle évoque, au fil de ses souvenirs, toutes les places qu’elle a faites depuis des années, dans les maisons les plus huppées, et en tire une conclusion que le lecteur est invité à faire sienne :  Si infâmes que soient les canailles, ils ne le sont jamais autant que les honnêtes gens. »

Comme Chambrière elle rêvait d’une intimité avec la dame à servir, … de confidences, voire d’amitié même. Elle découvre froideur, mépris, méfiance, manque d’humanité, avarice et asservissement. A elle de déguster en cuisine poires pourries et poulet avarié. A elle d’aller  quérir les pantoufles du maître qui ne peut plus cacher son désir.  La dame des lieux accepterait même que le maître de maison la mette dans son lit… du moment que cela ne lui coûte rien! Ordre social hypocrite et injuste où les domestiques sont souvent des travailleuses sexuelles à domicile.

L’adaptation théâtrale de ce roman fait d’aller-retours dans le temps et l’espace, dans les états d’âme, dans  la perception de la moralité, est faite de façon très fine dans cette création du théâtre du Grand Midi. Le large décor sur plusieurs plans tout éclairé d’art nouveau est une jolie féerie dont on découvre vite les dessous peu aimables.

Le nombre de rôles endossés par le comédien masculin est extraordinaire. Il est la plume d’Octave Mirbeau et à la fois une constellation de personnages admirablement  campés. C’est un conteur né, avec la légèreté et la mobilité du troubadour.  Ses interprétations féminines sont particulièrement renversantes avec en vedette la maîtresse frustrée: Madame Lanlaire. Des  caricatures dignes des personnages de Daumier. Jubilatoire.

Le jeu de la charmante soubrette Célestine est carrément exquis, fait de nuances, d’amour  véritable, de compassion, d’humour, de distance,  un personnage hybride entre servante et maîtresse… et qui le deviendra en se fiançant au pire des hommes, le jardinier-cocher Joseph : « Si infâmes que soient les canailles, ils ne le sont jamais autant que les honnêtes gens. »

Des chansons de barricade  ou de pavé parisien sont autant de clins d’œil poétiques et émouvants… très Piaf ! La construction de la pièce est aussi  harmonieuse que la société qui est dépeinte est pourrie et vice-queuse.

 

http://www.xltheatredugrandmidi.be/index.php?pid=39

 

 

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administrateur théâtres

 

Quand le jeune oiseau devient cygne noir…

 

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« Nora, femme-enfant grisée par les hauteurs de la hiérarchie sociale où son mari sera bientôt perché, transportée par la joie qu’un trop plein d’argent lui procure, croit dur comme fer à l’héroïsme de cet homme qu’elle met au centre du storytelling de la vie « délicieuse » qu’inlassablement elle se fabrique. Et quand son petit échafaudage d’idéaux creux (et pourtant si modernes) s’écroule, elle ne semble avoir d’autre choix que de quitter cette maison de poupée qui l’a trahie. »

 

Une éblouissante première au théâtre Claude Volter hier soir. L’interprétation presque surjouée de la femme-infantilisée, agace royalement : les sautillements, la voix perchée, le rire de casserole, la cervelle d’oiseau - de l’étourneau à la bécasse.  Bien que, derrière cette façade, il y ait le mensonge salvateur et un amour considérable (inconsidéré ?)  pour le père et le mari de ce personnage  surféminisé...

 

Quand on était  adolescentes, on adorait « Une maison de poupée » d’Henrik Ibsen, pourquoi ?  Par soif d’idéal,  par le souffle romantisme de la liberté enfin découverte, pour le courage de Nora de savoir se détacher du confort matériel et  vouloir devenir un être humain à part entière et pas simplement une épouse-poupée et une mère-poupée, dans la maison de poupée avec des enfants-poupées.  Rien n’a changé pour notre amour de la pièce norvégienne, si ce n’est que l’on n’en mesurait peut-être pas  suffisamment toute l’urgence dans notre jeunesse.  Grâce aux mouvements féministes et aux progrès scientifiques,  la société a su évoluer… ici, dans le monde occidental, finalement, un monde presque minoritaire. Ainsi, tout n’est pas gagné, ainsi, cette pièce scandaleuse tant  décriée en 1880, garde son actualité dans la profondeur des esprits et dans les clichés véhiculés par la société. Que vaut une femme, face à l’ordre établi, à la loi essentiellement masculine, au soit- disant « code de l’honneur »,  au culte du pouvoir, de l’argent et des religions, ou face à la Morale Incontestée? 

 

Et donc, la deuxième partie de la pièce, lorsque la femme enfin se révolte, fait plaisir à voir et à entendre. Tout-à-coup la voix  de la comédienne sonne juste!

 

La mise en scène est d’une facture résolument moderne, tout en transparence, et décor blanc d’innocence. Mais, les vies de « housewives » n’existent pas qu’en Outre-Atlantique! Jeunes filles, précipitez-vous pour voir ce spectacle!  Le rêve de suprématie  masculine, malgré l’égalité des droits a encore de beaux jours,   à en juger par le plaisir du comédien de mari, Bernard d'Oultremont , à jouer son rôle avec délices et perfection. Jean-Philippe Altenloh n'a rien à lui envier, son jeu est parfait! Faut-il qu’un homme soit quitté pour qu’il découvre enfin son humanité ? C’est le miracle secrètement espéré de Nora, où d’étranger insupportable, l’homme se muterait enfin en généreux compagnon de mariage avec qui « on se sent bien ». Fidélité des signes…  Le public, parfois compassé dans  ce théâtre d’avant-garde - il  y a quarante ans déjà - n’a pas pu s’empêcher d’applaudir avec respect la très belle distribution des comédiens, les personnages secondaires étant aussi bien campés que l’héroïne de la pièce.

 

Avec : Stéphanie Moriau, Bernard d'Oultremont,

Jean-Philippe Altenloh, Michel de Warzée et Laure Tourneur

 

adapté par Jacques De Decker

 

http://www.comedievolter.be/index.php?page=infos-pratiques

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administrateur théâtres

Pour la saint-Valentin, offrez-lui ce spectacle magnifique !

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René se souvient de ses vacances chez sa grand-mère à Soignies, berceau de la pierre bleue. « Je joue avec une petite fille dont j’ignorais le nom. » La grille du cimetière où ils jouaient se ferme. Elle a disparu. 

 Voici un huis clos qui évoque de façon ludique la vie de René Magritte, l’homme au chapeau boule,  vue par Georgette, sa femme,  sa muse chérie, son exclusive égérie, sa complice éternelle, son unique modèle...

Magritte peint dans la vie mais ne peint pas dans la pièce. La pièce c’est « la » pièce. La pièce où ils vivent, dans chacun des lieux où ils ont vécu de leur premier logement en passant par Paris, jusqu’à la rue des Mimosas, près du parc Josaphat, où Magritte s'éteindra à 69 ans, le 15 août 1967 à 15 heures.  Voici des tableaux vivant  la banalité  de  la vie de tout couple, et pourtant  une alchimie particulière, un mystère extraordinaire. Surréaliste ?  Aucune  figuration des peintures de Magritte: sa vie de peintre est entre parenthèses. Avec des comédiens de 2011, ce couple revisité, est vraiment  touchant.   Cela a quelque chose de jeune, de dynamique, d’innovateur, d’éternel, cela a le charme de Roméo et Juliette. Dans l'air, il y a l'énigme de tous les couples qui durent.

L’image du père fait ombre, elle se veut prophétique comme une scène d’Hamlet ou de Don Juan, elle représente  le bourgeois de 19e siècle engoncé dans ses certitudes, muré derrière ses habits de circonstance, avare de paroles. Léopold Magritte, « prohibant le sabir wallon dans sa maison, marchand tailleur et affairiste, brade, vend, écoule. Coureur de jupons, frimant et plastronnant, il  lui souffle : «M’as-tu vu bedonnant, d’un chapeau boule coiffé, cravaté, pocheté, costumé, tel un bourgeois sapé, tu me ressembleras, René !’  Cet homme à femmes, le mari de sa mère qui se suicide dans la Sambre, inondera le fils de sa culpabilité. A l’école, Magritte se décrit comme le fils de la noyée. « J’avais 14 ans, elle en avait 40.» Malheur indicible qui le corsettera à vie. Georgette : « De la perte cruelle, René se remet à peine. Je suis sa petite mère, Il est tout à moi ! »

 

La mise-en-bouche est de Patrick Rougiers : les mots dansent dans le tableau du théâtre. L’écriture rimée, parsemée  vocables belgo-belges comme des touches de peinture,  donnent une forme fantaisiste à la pièce. L’humour fait loi. Georgette: « J’ai fait une fausse couche, ce fut une froide douche. »  Assonances, allitérations, associations musicales ou rythmiques, tout cela laisse un magnifique espace pour le jeu des postures, des regards, le brillant du rouge à lèvres Diorescent de Georgette assorti à l’ourlet de sa robe mobile,  le magnifique film et les arrêts sur image qui encadrent les personnages. La mise en scène ciselée de  Monique Lenoble met carrément en scène toute  la lumière et les couleurs de Magritte, ce sont autant de moments de beauté, qui donnent de l’appétit,  du plaisir artistique. Cette comédie picturale diffuse un plaisir rare. Aurore Rougiers et  Baptiste Blampain sont éblouissants.  Le quatuor de comédiens nous livre une musique qui n’est pas une musique.  Ne vous en privez pas !

 

Du 27 janvier au 27 février 2011, le Poème 2 vous propose:

 
"La femme de l'homme au chapeau boule"
 
de Patrick Roegiers
 
"Magritte vu du côté cuisine, Georgette en personnage principal, René quand il ne peint pas. Ce qui est fascinant, c’est la vie de couple. Et comment une femme aussi simple est l’indispensable complément d’un génie." 

Renseignements et réservations:
Poème 2 (Théâtre-Poème)
30 rue d'Ecosse - 1060 Bruxelles
 
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administrateur théâtres

Vous vouliez vivre un grand frisson de scène ? Une véritable passion entre Chair et Ciel? Courez  applaudir Carmela Locantore qui interprète merveilleusement la voix  notre grande Christiane Singer hélas disparue,  dans son livre brûlant:

12272716299?profile=original« UNE PASSION », livré pour nous… sur la scène du Blocry, place de L’Hocaille à Louvain-La-Neuve.

 

« J’ai choisi de chuchoter dans un siècle qui fait tant de bruit ! » Héloïse boit aux deux coupes de la mémoire, celle des événements et celle des sensations et rappelle « Dieu n’a que nous pour faire ce qu’il y a faire ».

Héloïse est animée de l’amour cueilli dans les yeux de sa nourrice Louisette, au premier regard, à sa naissance. Très jeune, elle a subi le coup de foudre avec Abélard, cela lui a entr’ouvert le ciel et les plaisirs sensuels, son corps en transes vit l’amour absolu et charnel. « Je découvrais le monde dans sa clarté originelle ». Le ciel dévoilé, le temps d’instants de grâce. « Nous avions conflué en Dieu ». Au contraire, Fulbert, son oncle trouve que toutes les activités humaines entravent la communication avec Dieu. Punition: la voilà enfermée dans un couvent pour avoir répugné ostensiblement de se plier aux conventions sociales. Abélard lui,  n’a rien compris … ou en définitive ne l’aimait pas ou aimait plus sa chaire de théologie. Elle médite : « Seul Comprendre délivre ! » Elle éprouve du remords : « Mon corps, le piège immonde où Abélard est tombé ».

Au couvent, Héloïse raconte : « je suis morte sans la miséricorde de la vraie mort ». « Chaque jour est un jour de moins de mon tourment, voilà ce que dit mon soupir ! » Enterrée vivante. Elle se souvient : « Je ne savais que me donner, rendre plus profond mon réceptacle. » Quelle passion haletante et  inouïe !

Réflexions sur le rôle de la femme: on ne croit pas les femmes, pourtant, Héloïse cite leur rôle essentiel dans la Bible : « Quelques-uns des nôtres sont allés au tombeau et ont trouvé les choses TOUT COMME LES FEMMES AVAIENT DIT ; mais Lui, ils ne l'ont pas vu ! " (Luc 24:24)».

Et par l’écriture, l’âme s’est délivrée, abbaye du Paraclet, 1162   

12272716493?profile=originalLouvain-La-Neuve, Le Blocry, 2011: un spectacle qui coupe le souffle, on en oublie le décor parfaitement moyenâgeux,  il ne reste plus que l’incandescence de la  voix et des paroles.

 

http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=442  jusqu’au 12 février 2011

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administrateur théâtres

Le Masque du dragon ( au théâtre des Martyrs)

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 Deux couleurs de peau. L’une : caramel doré, l’autre : un

 mystérieux brun violacé ; coiffures en turbans assortis, mais

 ô combien différentes! 

 

 Deux âges différents, l’une jeune, l’autre : une  bonne

 dizaine d’années au-dessus, et elle vient de débarquer.

 

 Deux ethnies opposées qui se sont livrées à des massacres

 sans merci. 

 

 Et les voilà, catapultées  ensemble quelque part en Occident,

 avec le projet utopique de faire la guerre à la guerre, par

 la magie du verbe. C’est la seule chose qu’elles savent

 faire. 

 Réfugiées dans un pays où il pleut du gris, elles vont

 exploiter leur métier  de conteuses chatoyantes,  chacune

 avec son bagage, lourd pour la nouvelle arrivante, léger pour

 l’autre. 

 

 Chacune étale ses trésors, à gauche et à droite de la scène. 

 Chacune fascine totalement, si bien qu'on en oublie l'autre!

   

 

 Elles vont surtout devoir s’entendre, travailler  ensemble

 alors que tout les sépare. Dans leur jeu, elles seront femme

 ou homme, ou femme déguisée en homme... 

 

 La dernière arrivée, sursautant devant l'existence

 d'un  micro, comme si on lui volait son âme,  découvre que

 chez nous ... 

 il y a l’internet, la télévision, des cinémas, des acteurs

 qui, sans conter,  incarnent des rôles où ils ne sont plus

 « eux » sur nos scènes. Comment peuvent-ils bien faire?

 Elle pense qu'un  public si gâté par le virtuel doit

 être inaccessible et ne sera pas intéressé.

 C'est elle qui veut arrêter maintenant. Sa

 rivale lui saute à la gorge et lui répète sauvagement ses

 propres paroles du début: "Dis-moi,

 qu'est-ce que tu auras fait pour arrêter la guerre? "

 

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 Elles se disputeront sans vergogne, jusqu’à ce que les deux

 versions diamétralement opposées  de la même histoire

 ancestrale finissent par correspondre.

 Car même les histoires s’affrontent: d’une part, il y a une

 histoire du fâmeux masque du dragon, basée sur le rêve, le

 mythe, la métaphore, de  l’autre, une  histoire fichée dans

 la réalité de la  misère journalière  pleinement vécue.

 

 

 Conter, dire, verbaliser, c'est la seule chance contre la

 guerre. Sur ce point elles sont d'accord.

 Elles ont toutes deux secrètement juré que le masque du

 dragon serait donné à la femme, quoique l’homme en dise. Ce

 talisman va les rendre invincibles, arrêter enfin la guerre,

 et le massacre absurde et cruel des enfants. 

 

 C’est une sagesse profonde et une force monumentale qui les

 feront dépasser leur  inconfort de réfugiées,leur

 méconnaissance des moeurs occidentales, leurs affrontements

 mutuels, basés  sur  la haine ancestrale des Tribus des

 collines contre celle  des Tribus des lacs, auxquelles

 chacune  d'elles appartiennent.  Le ciel contre la

 fange. 

 

 Toutes deux sont attachantes et criantes de vérité.

 Découvrir et porter le   masque du dragon, c’est être capable

 de se calibrer sur   l'autre et se  métamorphoser magiquement

 en tout être ou créature terrestre différente, cependant

 que  l'on reste  entièrement « soi » !

 

 Toutes deux ont raison dans leurs approches de l’histoire,

 toutes deux finiront par s’entendre, se répondre, se fondre

 sans se confondre…

 ...en une impressionnante figure mythique,ni femme,ni

 homme, centrée au  milieu  du plateau, apaisée, réconciliée.

 

 Circulant dans cette pièce étrange, il y a des choses, des

 vibrations  mystérieuses et émouvantes, du mouvement,  des

 gestes de magie,

 du  symbolique,  du chant, de l'argile que  l'on pétrit à la

 rencontre de l'âme,  de la  voix et du corps qui font battre

 nos cœurs un peu plus vite,  un  peu plus juste.

 

Du 12 au 23.01.11

Le Masque du dragon                                       au théâtre des Martyrs

De Philippe Blasband, mise en scène Hélène Theunissen, avec Babetida Sadjo et Awa Sene Sarr.

Cie Mekeskidi asbl à l’Atelier du Théâtre des Martyrs en coproduction avec le Théâtre en Liberté.

 

pl. des Martyrs 22 - 1000 Bruxelles
Tél : 02-223.32.08
Email : theatre.martyrs@busmail.net
Site web : http://www.theatredesmartyrs.be

 

Et du 15 au 24 février 2011

Théâtre Blocry
Ferme de Blocry
Place de l'Hocaille
1348  Louvain-la-Neuve     http://www.atjv.be/fr/saison/detail/index.php?spectacleID=443

 

 

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administrateur théâtres

KIKI VAN BEETHOVEN (théâtre le Public)

12272709459?profile=originalKIKI VAN BEETHOVEN12272709662?profile=original

d'Eric-Emmanuel Schmitt
Mise en scène: Daniela Bisconti / Avec Nicole Valberg

 

DU 13/01/11 AU 30/04/11  avec relâches

 

 

                                                                                         « Bach, la musique écrite par Dieu, Mozart la musique que Dieu écoute et Beethoven la musique d'un homme pour les Hommes »

 

Démasquons le  géant du business littéraire et penchons-nous sur le masque de Ludwig…

 

Christine (dite Kiki) est une sexagénaire solitaire mais rayonnante qui tient à distance ses poignantes émotions, bien enterrées, une fois pour toutes. Mais aussi  hélas, la musique…. Elle vit en surfaces avec  trois autres vieilles souches, Rachel, Candide, Zoé, façon "adolescence retrouvée", mais dans la résidence aseptisée des Lilas.

 

Un hasard lui a fait acheter un masque du compositeur célèbre. Les quatre mamies vont réveiller leurs émois endormis, en retrouvant leur capacité d’écouter cette musique retrouvée, à partir du masque rédempteur. « Beethoven, c’est la célébration de la joie. Il a eu une vie pourrie, sourd à 27 ans, coupé de la vie sociale, de ses amis, de son amour, auquel il n’a pas voulu imposer son infirmité mais il a laissé un extraordinaire Hymne à la joie… Jubiler de ce qui est, même si c’est peu, plutôt que regretter ce qu’on n’a pas. » Hymne à l’optimisme et à la force de l’individu.

 

Seule en scène, Nicole Valberg , très belle comédienne,  interprète Kiki van Beethoven. L’interprétation du texte est encore un peu jeune, un peu hésitante parfois mais elle suscite certainement de l' empathie pour la narratrice. Et  la saison de ce spectacle, attachant quand même, ne fait que débuter. Il est vrai que les juxtapositions de scènes lassent un peu au début….L’entrée dramatique trouve sa source dans la visite du camp d’Auschwitz par les quatre dames en voyage rétro-scolaire. De grâce,  il faudrait supprimer l’appellation ‘camping’ du registre de vocabulaire dans cet épisode, c’est immensément choquant et déplacé. Mais dès ce moment, le reste du texte se met à vibrer…dans les grandes cordes. Le thème de la mère abusive, celui de l’homme–enfant qui se suicide, celui de la belle fille détestée qui devient fille prodigue, sont sans doute des ficelles sentimentales un peu grosses, dès qu’on prend quelque recul.

 

Belle mise en scène du thème « nos parents nous grondent, et … ce sont nos enfants !» Belle boutade : « La beauté c’est intolérable » dit Eric-Emmanuel Schmitt. « Parce qu'il y a une sagesse de la beauté et qu'on ne veut pas l'entendre. La musique peut nous montrer la beauté de la tristesse, du désarroi, la beauté du deuil, la beauté de l'abandon. Et cette beauté nous force à accepter des dimensions de l'existence dont nous voudrions nous protéger. » Intolérable, parce qu’elle mesure notre nullité ou notre médiocrité. 12272709289?profile=original

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http://www.lepublic.be/play_details.php?play_id=261&type=1

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administrateur théâtres

12272707268?profile=originalL'illusion conjugale    AU CENTRE CULTUREL D’AUDERGHEM  jusqu’au 19 décembre 2010

 

D'Eric Assous, mise en scène Jean-Luc Moreau, avec Isabelle Gelinas et José Paul

 

Après quatre répliques, la salle ronronne déjà sous les  sourires et

 les gloussements approbateurs. Le décor est une épure lumineuse

 couleur arc-en-ciel. Trois grandes marches vers un large balcon aux

  bastingages de voilier de luxe donnent sur un ciel,  une mer, une

  plage, une ville ? L’ensemble a la beauté du désert. Le rideau

 s’est levé sur une pose de pure élégance de la femme, Isabelle 

 Gélinas,  sise dans l’écrin d’un fauteuil design. Déshabillé

 charmeur.  Le mari, Jean-Luc Moreau, en complet veston contemple

l’infini.

 

 Arrêt sur image avant que  le mythe de la transparence absolue ne

 démarre.Etat des lieux : Jeanne a décidé de faire avouer à son mari

 le nombre de conquêtes féminines qu’il a eues au cours de leur

mariage, histoire de remettre les compteurs à  Zéro. « Les

compteurs », insiste Maxime. Maxime est au faîte de la réussite

professionnelle, automobile et féminine.  Piégé par les bonnes

 questions posées par sa  femme maîtresse de ce jeu de dames

 particulier, il ira de consternations en consternations. Il avoue 12

 conquêtes à son actif : que des femmes « solubles », dit- il, des

 « moments suspendus ! » contre une liaison de 9 mois pour sa femme,

 ce qui   soudain le rend fou. Une jalousie lancinante lui fait

interpréter toutes les phrases de la délicate Jeanne à double sens.

 Il est de plus en plus convaincu que Claude, son  meilleur ami,

 l’ex-mari d’Astrid, joueur de tennis est de la partie.

12272707291?profile=original Maxime est doué d’amnésie totale pour ses propres frasques bien sûr,

 et espère  une amnistie sans  conditions. Sauf qu’il n’a pas joué le

 jeu de l’honnêteté à 100%, il est confond u dans le mensonge, et il

 perd  définitivement la joute affective à cause de ses demi-vérités

 et grâce à la patiente adresse de sa femme, si fine, si

 sensuelle,  si  tendrement ironique… Dans la deuxième partie de la

 pièce, le personnage de Claude prend toute son envergure et confond

 le monde de  certitudes  et de mensonges de Maxime. Jeanne , pleine

 d’humour et  de discrète jubilation, a  un plaisir certain à

 le  voir se  déstabiliser par le doute. Maxime, déboussolé,  à

Claude : « Tu le  savais,  toi… ? » réponse : « Pourquoi je le

saurais ? » Sourires  entendus de part et d’autre  de Maxime, et dans

 le parterre. Tout le  monde est suspendu à une parole décisive,

 qui  ne vient pas.

 

 

Répliques comiques, acérées, ambiguïtés pernicieuses, mystifications

 burlesques  s’entrelacent avec de l’émotion profonde. Claude :

 « L’amitié, c’est des devoirs, des  obligations. C’est quoi cette

 morale de chien ?» « Si mon meilleur ami m’avait fait le coup de

 séduire ma femme, cela se serait terminé dans les faits divers! »

Pas dans la compromission. Le dénouement sibyllin laisse le

 spectateur rêveur et dans un océan  de nuances quant à la

transparence … et à l’illusion conjugale.

 

12272707084?profile=original   12272707093?profile=original

Merveilleuses interprétations de ce remarquable  trio d’acteurs des

 planches  parisiennes : Jean-Luc MOREAU, Isabelle GELINAS et José

 PAUL. Il nous a livré une prestation méticuleuse autant dans la

 gestuelle que dans le verbe dont ils s’habillent  avec brio.

12272707672?profile=original

 

http://www.cc-auderghem.be/

 

 

 

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administrateur théâtres

Mon chat s'appelle Odilon (au théâtre de la Samaritaine)

Un spectacle de la Compagnie des Chercheuses d'Or : MON CHAT S’APPELLE ODILON.

Natacha a perdu son chat ! « Partagée entre l’amour qu’elle éprouve pour son nouvel amant et celui qu’elle éprouve depuis peu pour un jeune chat, devenu envahissant, Natacha se retrouve embarquée dans une succession frénétique de rencontres avec des personnages hauts en couleurs.
Comédie et drame sont ici habilement entrelacés et servis par une interprétation remarquable, entre humour et émotion. »

Extrait : Mais avec Odilon blotti sur mes genoux…

Au début, il était encore un peu timide.

Très vite il a couru partout, nous avons fait mille folies.

Jusqu'à ce que la fatigue, paf ! nous terrasse d'un coup.

Alors, je me suis étendue sur le lit et là, j'ai vraiment craqué : en ronronnant, Odilon est venu se poser délicatement sur mon cou et n'a plus bougé.

Tout chaud, tout doux, tout mimi !

Je n'ai plus bougé non plus…

C'est Barnabé qui nous a réveillés en rentrant.

— Qu'est-ce que c'est que ça ?

— C'est Odilon.

— Manquait plus que ça, il a dit.

— Il est si craquant, j'ai dit.

Barnabé n'a plus rien dit.

Barnabé, il ne parlait jamais beaucoup…

Texte de Paul Emond. Avec Marie-Astrid Legrand. Mise en scène de Suzanne Emond.
Venez nombreux ! Du 14 au 30 décembre à la Samaritaine à 20h30. ( 02 511 33 95)
Plus d'infos : lasamaritaine.be/​saison2009-2010/​index.html#bv000014



Mouvements scéniques imaginatifs, présence juvénile, sourire de jeune

féline craquant d’innocence, aucun maquillage, des cheveux attachés

n’importe comment, comme si on débarquait dans son appartement un

jour où elle assemble un maître-achat de chez Ikéa: c’est la jeune

comédienne Marie-Astrid Legrand. Avec la fraîcheur d’une étudiante,

elle va nous transporter dans sa vie intérieure et ses tribulations

amoureuses entre son magnifique chat mâle d’1 mètre 07 cm et son

amant, ledit Barnabé, amant fixe pour une fois, mais souvent

hypocrite, égoïste, infidèle, macho et aviné. On la suit avec une

émotion intense, de déchirement en déchirements, passés et présents.

Le pire est à venir : le partage du chat. C'est moi qui ai crié

'NOoooon!' quand vous écarteliez le chat avec Barnabé hier soir. Je

l'ai "vu" se casser en deux. Votre jeu est superbe. J'ai été prise

par l'imaginaire avec une force incroyable! Ce « non! » venait du

fond de mes entrailles! Que dire… quand on se bat pour un enfant de

couple de divorcés! Cette pièce est d’une sensibilité remarquable,

écrite par un homme, qui pénètre les félinités et les féminités

avec une perception très vive… et qui sait prendre ses distances

par rapport à tous les Barnabés du monde. La comédienne projette

les nombreux personnages de ses mésaventures avec une vérité et

une variété des tons, détonante! Courrez voir ce bijou de spectacle!

Tout sonne juste !

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administrateur théâtres

Jalousie en trois mails (Théâtre Argan 42)




JALOUSIE EN TROIS MAILS

COMÉDIE D'ESTHER VILAR

06 Octobre 2010 >> 30 Octobre 2010

Une avocate d’âge mûr intelligente et sensible, une femme fatale architecte -la vamp irrésistible et blonde en robe noire, chignon sensuel et bouche peinte se refermant sur une éternelle cigarette dans un penthouse de rêve, et l’étudiante bouddhiste en jeans, végétarienne. Trois générations. Elles habitent le même immeuble. Epouse ou maîtresses, elles partageront inéluctablement les palpitations et les affres de la jalousie pour le même homme. Ce Lazlo, est omniprésent dans leur monde intérieur mais absent de la scène, sauf qu’il circule, habilement entre les étages, insaisissable. Les empoignades se font à coup de mails, de véritables argumentaires pleins de fiel, de poison et de verve : tour à tour des salves de perfidie, de désespoir, d’amour passionné tombent avec fracas dans les maibox. Les textes sont beaux, du Sacha Guitry version féminine. La rivalité entre ces femmes révèle en chacune la mesure de leur passion pour le même homme et la douleur insupportable de l’abandon. Pas de clichés, un crescendo de souffrance et de violence, boomerangs verbaux, bombes de détresse et de sarcasmes vengeurs. Les monologues se croisent et se répondent sans jamais réellement communiquer entre eux, chacune se croyant pathétiquement à l’abri dans sa bulle, jusqu’au dernier moment, à l’abri dans la croyance folle d’être aimée. Mais les déconvenues sont d’autant plus cruelles, jusqu’à friser le suicide. L’une lit avec effroi le texte qu’elle vient de recevoir, l’autre livre ses pensées aux fenêtres ou s’adresse virtuellement à sa rivale, l’une lit son texte en l’écrivant rageusement, chaque fois l’émotion est au paroxysme mais pas de confrontation réelle, ni de bagarre, le sentiment n’en est que plus aigu.

La voix de " l'autre" est prisonnière de l'écrit, comme un moustique coincé dans un microscope. C’est donc le verbe qui se charge de la vérité de l’émotion. Et de l’évocation des ravages du temps… mais les femmes, statistiquement, ne sont-elles pas gagnantes ? D’un bout à l’autre, la jalousie est disséquée avec brio jusqu’à la scène finale où paradoxalement il sort une véritable surprise rhétorique voluptueuse. Exaltation. Vive l’intelligence …

Le spectacle est aussi dans la salle : des spectateurs masculins, totalement inconscients des dangers des relations extraconjugales ont les yeux qui brillent, le sourire flottant, et se trémoussent d’une fesse sur l’autre. J’en ai vu saisir leurs accoudoirs et se lever à demi, transportés par le bonheur imaginaire de se sentir Lazlo – quelle erreur! – et des femmes soupirer d’aise quand à son tour la maîtresse, femme fatale « tombe »…

Rosalia Cuevas, Carole Weyers et Cloé Xhauflaire sont toutes trois, solaires!

Petit Théâtre Mercelis:Du 06/10/10 au 09/10/10 Et du 14/10/10 au 30/10/10 à 20h30
BOZAR: Le 12/10/2010 à 20h30
Infos et Réservations: www.argan42.be et 070/75.42.42

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administrateur théâtres

L'Insoumise ou Scarlett O'Hara au pied du terril

Nous voici à L’ESPACE MAGH, le Centre culturel maghrébin, aussi accueillant que le hall d’un bel hôtel étoilé. A gauche en entrant, un superbe bar, décoration florale majestueuse, d’innombrables théières ventrues bientôt fumantes, l’accueil souriant d’Anissa - Ben Salah, la directrice et créatrice géniale de tout cet ensemble surprenant, à la lisière des Marolles et des quais de Senne. La musique feutrée… vous fait prendre le temps d’examiner de magnifiques toiles lumineuses, suspendues tout le long de la rampe d’accès vers la salle, dissimulée par de lourds rideaux rouges rehaussés de spots. Il faudra passer ce rideau de scène subsidiaire, pour accéder à la salle de spectacle, disposée sur deux niveaux, un concept ancien complètement dépoussiéré qui remplace une ancienne boîte de nuit. C’est confortable comme un lounge VIP.

Et puis voici en contraste fascinant et émouvant, L'Insoumise ou Scarlett O'Hara au pied du terril. « Seule en scène, Jamila Drissi s’est inspirée de sa mère, héroïne ordinaire d’une cité du Borinage, pour dessiner une pièce touchante, loin de tout misérabilisme, hommage à toutes ces mères qui ont connu l’exil et choyé leurs enfants malgré la misère. » Nous sommes au cœur du Borinage.

Jamila Drissi apparaît, dos à un immense écran qui par magie s’allume et se dissipe au moindre de ses signes. Les jeux de lumières très délicats éclairent la lecture de sa jeunesse, de ses rêves, de ses tendres souvenirs. Le fond de misère de son village couvert de la suie des terrils s’illumine des grands espaces américains ou de scènes de films romantiques. Les rêves de l’enfance. La capacité de voir la vie autrement, avec les yeux de l’amour. Avec simplicité elle évoque la solidarité de sa famille et de ce village tout entier, elle rend hommage à la joie, à la tendresse, à l’imaginaire qui recrée les couleurs au milieu de la suie, du travail harassant, des maladies de la mine. Sa mère n'est jamais allée à l'école mais elle adorait le cinéma, le théâtre, l'opéra et elle a semé les merveilleuses graines de la création dans sa fille, insoumise, de mère en fille! Jamila plonge dans le personnage de sa mère, qu’elle essaie de déchiffrer, car les yeux d’une petite fille voient parfois tout autre chose. Souvent un nuage gris menaçant et autoritaire! Elle raconte son père, si vite disparu à l’hôpital devenu sa dernière résidence secondaire… Elle fait raconter à sa mère sa vie en Algérie, sa venue en Belgique à 17 ans. Elle conte ses propres jeux d’enfants, le théâtre de la vie de village. Elle joue en guise de couplet, Anna, l'Italienne toujours au courant de tout, Thérèse et son inséparable caniche, Renée, l'alcoolique fumeuse de Belgas, avec leurs accents multiples, tellement drôles, puis redevient l’enfant irrésistible, riche de sa relation de princesse avec son père, ou bien Jacques Dufilho, ou bien les deux ? Mais il y a aussi Cathy l'Allemande et Henri le nazi revisités avec la lorgnette de l’enfance.

Que connaît-on des adultes ? Comment savoir si on connait bien ses parents ? Que peut-on connaître d’eux ? Cette vision d’enfant reçue au creux de notre main, un oiseau précieux qui ose chanter l’espoir à tue tête, est un bonheur insigne pour le spectateur. Pas la moindre harangue sociologique ou discours racoleur. On jette un regard neuf sur ces centaines d’immigrés venus de toutes parts, avides de se construire une nouvelle vie, digne et respectable. Le texte est plein d’humanité et d’humour et s’achève comme le générique d’un film d’amour. La réponse que reçoit Jamila à la fin de ses interrogations, est un hommage à la liberté et à la dignité de la femme, un envol pour la magie de l’écriture.

http://www.espacemagh.be/index.php

17 rue du Poiçon, Bruxelles

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