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Poème 11

Instinct de survie

Tendresse

Des journées fleuries de ces "je t'aime" en boucle

Qui tressaient ce pont fragile serti d'escarboucles

Sourire de l'autre rive, où m'attendait l'unijambiste

Qui proclamait haut et fort que le bonheur existe.

Tendresse

Des cieux exténués d'être bleus, éclaboussés 

D'oiselets de lumière, de pétales effeuillés

De cumulus drapés de rose où repose

Le corps éthéré enfin guéri de la terrible adipose.

Tristesse

Des mers dont pas un récif ne dessine la surface

Et le blanc silence gît partout et partout efface

Le chant du dauphin et les robinsonnades. 

Un Saint-Bernard me fait l'aumône d'un fond de limonade.

Tristesse

En cristaux liquides fluides sous la peau de braise

Etat grippal anodin qui couvre le profond malaise.

Terminus! tout le monde descend! panne des artères.

Oh! mon Dieu! mon ange gardien est en congé; je galère!

Tigresse

Acculée à sortir ses griffes acérées pour affronter l'ogresse

Qui hante les nuits sans lune et se gave de princesses.

J'en fais une chienne en laisse et je la traine sur ma cime

Pour que, devant tous, elle expie l'horreur de tous ses crimes.

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Poème 12

Le poète incompris

Le printemps fait ses fleurs sans mes vers

Et mes vers moisissent aux fonds des tiroirs !

Le ciel est d’un bleu si vert

Et mes pages n’ont rien à y voir !

 

Adieu Poésie !

 

Personne ne te voit dans mon écriture ;

Personne n’y reconnaît ta noble nature !

 

 

Adieu, chère amie !

 

Ces pages amoncelées, je les enterre

Dans le jardin de mes rêves pubères

Et quand je foulerai leur  tombe de misère

J’entendrai gémir mes métaphores peu ordinaires.

 

Adieu, c’est fini !

 

Au prochain printemps, autour de ton blanc tombeau

Fleuriront des jacinthes et des coquelicots

Et les passants diront : "ça aurait pu être beau !"

Et j’aurai appris à parler « comme il faut ».

 

 

 

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Mes soliloques en vers

 

Propos

 

En l'absence de poésie,

D'émois portant à m'épancher,

Je n'ai pas besoin de chercher

Où trouver de la fantaisie.

Je sollicite ma mémoire.

Souvent surgit une pensée.

Je l'examine intéressée,

Peu encline à vite tout croire.

Les dictons qui nous interpellent,

Par leur sagesse ou trait d'esprit,

Sont rarement sans parti pris.

Par respect on leur est fidèle.

J'aime critiquer des maximes,

Ou simplement les commenter,

En m'essayant au beau-parler.

Je le fais me servant de rimes.

9 mai 2014

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Après la pluie

  

     Après la pluie

     Le jardin ébouriffé

     Se remet à chanter

     Nichée au cœur d'une rose

     Une fée se repose

     Après la pluie

     Mon cœur apaisé

     Allume l'infini

     Et l'arbre irisé

     Frissonne et me sourit

   Extrait du recueil " Bientôt les jonquilles";

   http://www.editionschloedeslys.be/

       

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Syrie, séisme humain

Les bombes résonnent telles des échos ;
Le monde entier se souvient de toi.
Pauvre terre ruinée de ce chaos
Que vas -tu devenir sans plus un toit ?

Où cours-tu ainsi parmi les gravats ?
Qu’espères-tu au sein de cette misère ?
Tu enjambes tes voisins recouverts de draps,
Suaires inondés de poussière.

Les yeux au ciel sont figés tels des couteaux,
Oreilles et bras tendus , désespérés.
Les malchanceux reposent dans le caniveau,
En silence, comme pour ne rien troubler.
.
Le vacarme de la vie et les machines
Qui écrasent sur leur chemin
Les restes des ouvrages en ruines
Refont l’avenir avec l’éternel entrain.
.
Des refrains résonnent au plus loin possible.
Des vivants chantent aux vivants
De nouvelles rues, de nouvelles bibles.
Près des décombres, hagard, un enfant attend !

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Etreintes maritimes,

Etreinte maritime,

Vous êtes ce voilier bleu,

moi le désert blanc,

je suis cette main émue et blanche,

vous.l'enlaçant regard bleu.

De l'un à l'autre,

de l'un contre l'autre,

cet incessant voyage,

infatigable et lent,

ce désir sans retour chaque jour.

Dans l'autre,

 perdre pieds,

pour retrouver nos corps,

s'en déposséder  à force de les sculpter,

 de les fondre l'un dans l'autre ;

précieux et délivrés.

Sortir de soi, être touché !

Nos cœurs réciproquement,

sont abordables, navigables,

bien qu'infiniment profonds ;

tour à tour, paisibles, tumultueux.

Douce ivresse blanche

fièvre bleue.

Mal au cœur,  rires au cœur ;

vaste bonheur !

 

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ADMINISTRATEUR GENERAL

INVITATION A PARTICIPER A UN CONCERT

Samedi 17 mai 2014

Concert de Formiga and Cigale par Anna Amigô et Eva Genniaux.

 

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Notre projet est un voyage à travers l’Europe et sa musique traditionnelle. Une harpe celtique, un violon et deux voix plus que magiques transportent ceux qui les écoutent en des lieux mythiques et inattendus pendant plus d’une heure d’évasion.

 

Formiga and Cigale transforment la scène en un espace plein de glamour, d'humour et bien sûr de musique. Un répertoire riche et vaste en chansons traditionnelles de différentes régions de l'Europe, fruit de leurs voyages et de leurs rencontres. Troubadours modernes, elles adaptent et arrangent les morceaux pour arriver à un style qui leur est propre. Histoires de princesses, de guerres, d'amour impossible, de mère qui empoisonne leur fille, de vent soufflant sous un kilt et de gigues endiablées; Formiga and Cigale vous embarquent dans leurs aventures, réelles ou imaginées, à travers le continent. Laissez-vous séduire par l’univers de ces deux baroudeuses (une catalane Anna Amigô et une française Eva Genniaux habitant en Belgique). Que le spectacle commence…

 

Infos pratiques : 20h à 21h 30. Espace Art Gallery, rue Lesbroussart 35 à 1050 Ixelles.

PAF : 5 €. Réservations souhaitées au 00 32 (0) 497.577.120. Places limitées (35) et verres de l’amitié après. Les bénéfices du concert seront au profit de Formiga and Cigale.

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poème 10

Ceci n'est pas un poème


Elle est née dans une étoile
Elle a grandi dans un nuage
Elle a dessiné un grand ciel
Elle est fille des mots.

Il a hissé sa voile
Il a quitté son rivage
Vers la contrée irréelle
Il est son jumeau.

Elle a vu la montagne
Elle a habité la grotte
Elle a cultivé la terre
Elle est fleur.

Il a oublié son bagne
Il a fait une bonne trotte
Il a appris l'abécédaire 
Il est rêveur.

Ils n'ont pas grand chose 
Ils allument des feux
Ils sont en osmose
Et osent être heureux.

Je ne vous dirai pas
La fin de l'histoire
Un conte comme ça
Doit garder l'espoir.

Et puis, c'est dimanche
Aujourd'hui, c'est une pose
Laissons la page blanche
Dieu se repose.

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Poème 9

Magie blanche

L’hiver ne sait plus que faire

Il a perdu son identité

La main de l’automne lui verse

Un vent nostalgique et des feuilles d’or

 Qui craquent, voient loin

Et reviennent se coller à certains visages

Puis repartent, enrichies de nouvelles histoires

L’hiver ne sait plus que faire

De ce que racontent les feuilles d’or

Les tristes histoires des visages impassibles

N’ont pas à être effeuillées

Feuilles d’or, feuilles volages

Revenez !

Rendez  à chacun son identité

Puis repartez, légères, vers votre destin !

L’hiver ne sait plus que faire

Il ne peut plus être tout à fait l’hiver

Il porte le nom que tu lui donnes

Et tu l’as toujours nommé « vert »

Tu vois l’impossible printemps

Que masquent les long mois de blanc vêtus

Et tu sèmes des fleurs multicolores

Et tu souffles une brise odorante

Et tu peins des tapis verts et des murs bleus

Ta main de magicien est fertile

Tes yeux versent leur soleil sur ton œuvre

Et l’hiver ne sait plus que faire

Il a perdu son identité

Il porte le nom que tu lui donnes

Mais qui ne saura l’effacer

Tu l’appelles « vert », tu peux l’appeler « or »

Et inventer l’été

L’hiver a des neiges trop épaisses

Pour se laisser briser

Et sa blancheur refuse la danse des couleurs

Il ne se laisse que maquiller

Il ne se laissera  pas changer

Peut être…..peut être

Si tu l’appelais « mer »

L’hiver sera-t-il pris de vertige

Devant ton immensité

Et se laissera-t-il couler…

Alors,

Les feuilles d’or

Auront d’autres histoires à emporter

Des histoires douces et gaies

Où des papillons sans identité

Auront trouvé un printemps éternel

Et les fleurs qui auront coulé de ta main

Pour en faire une terre natale.

 

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Une vie de trop

 

Je suis juif. C’est mon père qui me l’a dit lorsque je suis revenu de l’école. J’avais huit ans et je lui ai raconté qu’un de mes condisciples m’avait jeté à la figure : sale juif !  Mes parents ont décidé que nous allions déménager. Pas pour un autre quartier mais pour une autre ville.

- Il faut nous intégrer à la population de ce pays. Ici, nous  ne quittons pas le nôtre.

J’ignore pourquoi mes parents ont débarqué à Tournai. Ils y ont ouvert un magasin de chaussures à l’enseigne : « chez Samy », ce n’était pas le nom le plus judicieux à cette époque. Mais c’était avant la guerre et le pire n’était pas encore sûr.

A l’école communale qui se trouvait à proximité de notre domicile, j’avais intégré la sixième primaire. L’école se nommait Ecole de la Justice, et je me demandais quel rapport il y avait entre une école communale et la Justice.

L’année suivante nous étions en 1940. Au retour de l’exode le pays avait été envahi. Mes parents ne parlaient pas souvent de la guerre. Pas devant moi, en tout cas. Ou alors c’est moi déjà qui commençais à enterrer au plus profond de ma mémoire des images que je voudrai oublier quelques années plus tard.

En fait, peut-être faut-il en sourire, il y avait deux guerres qui se déroulaient en même temps. Une guerre que les allemands menaient contre un certain nombre de pays et qui suscitait de l’indignation, un esprit de résistance, de la complaisance ou simplement de l’indifférence parce qu’on ne savait pas encore qui gagnerait cette guerre. Et il y avait une guerre qui se menait contre les juifs sans leur laisser le choix d’y être favorables ou non, ou de souhaiter ou non la victoire de l’adversaire.

A y bien réfléchir, c’était le comble du mépris. Et l’isolement des juifs, et leur retrait sur eux-mêmes, c’était comme leur tendre un miroir et leur dire : regardez, vous n’êtes rien. A partir de là, les allemands pouvaient tout exiger d’eux.

En 1942, les juifs avaient été avertis par des représentants officiels de la communauté juive, qu’ils devaient se présenter dans un centre d’accueil pour y être déportés. De nombreux juifs se présentèrent et furent déportés. Après tout, cette convocation, c’était un ordre. Est-ce qu’on se dérobe devant un ordre quand on est un citoyen soucieux de la légalité et de son devoir?

Je suppose que mon père ne l’était pas et qu’il avait pensé qu’il était temps de se prendre en mains. Avec l’appui d’amis de mon père qui nous avaient fourni de fausses pièces d’identités, ma mère s’appela Cécile Vander, mon père Léon Berger et moi je me prénommai Pierre.

Nous sommes partis vers la France libre ou la France non-occupée ou, pour le dire simplement, au-delà de la ligne de démarcation qui coupait pour un temps la France en deux.  Si désormais je savais que j’étais juif, je devais faire comme si je ne l’étais pas, mes parents me le répétaient souvent.

C’est à cette époque que j’ai appris à me taire. Si le fils du boulanger du village où nous étions réfugiés m’accusait de manger le pain des français, ce n’était pas parce que j’étais juif mais parce que j’étais étranger. J’étais heureux de pouvoir ainsi me confondre avec le reste de la population. 

Mon étoile jaune si elle brillait, c’était au fond de moi et j’étais seul à la voir. C’est bon de ressembler à un groupe, si possible au groupe le plus puissant. Le nombre, c’est le visage de la vérité, non ? Plus il est élevé, plus elle est ressemblante.

Lorsque le pays a été libéré, nous sommes revenus chez nous.

Je suis retourné à l’école mais les cours me paraissaient insignifiants, et un an plus tard, je les abandonnais. C’était vraiment trop bête ce qu’on nous enseignait, l’histoire telle que les livres la décrivaient, et cette morale qui disait ce qu’il fallait considérer comme bien et ce qui était mal. Ils n’avaient donc rien appris, ou alors c’est qu’il ne s’était rien passé.

C’était le moment où revenaient des camps de concentration des milliers de survivants. Mais ils avaient été des millions à y mourir, des juifs pour la plupart. Les actualités cinématographiques montraient des choses horribles. Est-ce qu’on pourrait un jour les oublier ? Aujourd’hui je pense que oui. Aujourd’hui, de toute manière, la plupart d’entre eux seraient morts.  Vous vous souvenez du visage de ce jeune garçon, presqu’un enfant, la casquette enfoncée sur le front, ses yeux surtout qui vous interrogent encore aujourd’hui, vous vous souvenez ?

Je suis devenu journaliste presque par hasard pour un de ces journaux qui s’étaient créés dès la fin de la guerre. Je signais mes articles, des interviews littéraires ou des actualités locales du nom de Pierre Berger, et quand il ne s’agissait que de quelques lignes ou d’une information anodine, des seules initiales : P.B. Je reconnais que la discrétion des initiales tout compte fait me plaisait davantage que l’exposé de mon nom, même si ce dernier en dissimulait déjà un autre. A croire que je ne voulais pas exister en tant que moi-même.

Je me suis marié avec une jeune femme non juive au désespoir de mes parents, de celui de ma mère surtout. « Souviens- toi, Sammy, durant la guerre, des femmes ont dénoncé leur mari pour n’être pas assimilées à des juifs auprès des autorités allemandes », me disait-elle. Que ne ferait-on pas si votre vie est en danger ? J’en ai beaucoup voulu à ma mère.

Et moi, est-ce que j’avais réellement envie d’être assimilé à ces juifs tels que les représentaient les non-juifs ?  Etre de ce peuple dont l’histoire baignait dans le sang ? Non, je l’avoue, je ne voulais pas être un élu parmi ce peuple d’élus, ce coupable idéal et universel que l’on sacrifie à chaque grande fête de l’Histoire humaine. Dans un mondé féru de généalogie où on descend de quelqu’un, où on vient de quelque part, c’est étrange de n’avoir pour famille que son père et sa mère. Je n’ai jamais dis de quelqu’un:« c’est mon cousin ou c’est ma cousine, et j’étais amoureux d’elle quand j’avais douze ans.

Le journal pour lequel je travaillais a cessé de paraître quelques années plus tard mais par l’entremise d’un ami j’avais trouvé un poste dans un journal plus important. Je n’y signais pas d’article, j’étais employé au secrétariat de la rédaction, un poste sans éclat mais qui demandait peu d’attention, peu d’initiative, simplement le respect du rédacteur.

Ne pas voir mon nom au bas d’un texte ne me frustrait pas, ce nom qui n’était pas le mien mais qui existait davantage que le vrai. Tout le monde m’appelait Pierre ou Monsieur Berger. Même hors du journal c’était Pierre ou Monsieur Berger au point que lorsqu’il fallait décliner mon identité conformément à celle qui figurait sur des documents officiels, il m’arrivait d’hésiter.

Et nos amis, lorsqu’ils parlaient de nous, disaient les Berger. Ma femme, au début elle rectifiait mais c’était plus ridicule encore, et ça paraissait affecté. « Qu’est-ce qu’un nom ? » avait dit un personnage de théâtre. Ma femme elle-même sauf lorsqu’il s’agissait d’étrangers répondait au nom de Berger.

Entre nous bien sûr, elle continuait de m’appeler : Sammy ou Sam. Somme toute nous vivions dans deux mondes que seule la texture d’un nom séparait. Ou alors c’est moi qui voyais ou imaginais une différence là où il n’y en avait pas.

Nous étions mariés depuis près de vingt ans quand les prémices du cancer se sont manifestés. Nous n’avions pas d’enfants. J’étais d’une génération où l’on associait souvent guerre à mort et enfants. Ce sont toujours les jeunes qui meurent à la guerre. Les vieux en général, et les généraux, si je peux me permettre cette plaisanterie plus qu’éculée meurent dans leur lit.

Les jeunes craignent moins la mort. Parce que ce qu’on craint, et les plus âgés le savent, ce n’est pas cet accident aussi absurde que celui de la naissance mais c’est de ne plus vivre. Chaque jour qui passe dépose des images. Les souvenirs, bons ou mauvais, prouvent que vous avez existé.

Les jeunes ont moins de souvenirs que leurs aînés mais ils sont convaincus qu’ils sont la substance d’un grand dessein. Au contraire de leurs aînés moins assurés de l’être, ils savent qu’ils ne peuvent pas mourir avant que ce dessein ne se réalise. Même sous  les bombardements,  couché à plat ventre sur le sol, je levais les yeux vers le ciel et une curieuse exaltation soulevait ma poitrine. Je ne pouvais pas mourir. La preuve c’est que j’avais survécu durant de nombreuses années et que je vivais encore. Hélène n’était pas immortelle et, proche de la mort, elle n’avait été animée d’aucune exaltation particulière.

Jusque là je ne savais pas à quel point j’aimais ma femme. Le soir de notre mariage, comme des esprits forts nous nous étions juré de nous aimer le plus longtemps possible, qui peut prévoir l’avenir?

Pour Hélène, j’avais été celui qu’elle aura aimé jusqu’au dernier de ses jours. Lorsque ma mère est morte, c’était à peine quelques mois avant la mort d’Hélène, je n’avais pas éprouvé cette sensation de vide que je ressentais désormais. Peut-être parce qu’il est naturel que les plus âgés meurent avant les plus jeunes et contribuent ainsi à un juste équilibre des générations. Quand c’est le contraire qui se produit, l’équilibre en est bouleversé et on aboutit à une civilisation de vieillards sans beauté, sans énergie et sans courage. Et qui craint l’avenir.

Mon père, il est mort quelques mois avant elle, ignorait la mort d’Hélène. Je ne le lui avais pas dit parce qu’il n’avait plus sa tête. Il méritait que les images qu’il voyait encore, les propos qu’il entendait ou croyait entendre, ou bien ceux qu’il tenait lui même le ramènent, du moins c’est ce que je souhaitais, aux périodes de sa vie qu’il choisirait lui-même.

Durant cette année là j’ai beaucoup côtoyé la mort, la mort des autres, et je me retrouvais pour la première fois seul comptable de ma vie.

C’était une période curieuse. J’avais l’impression de voir un film à l’envers. Un de ces vieux films d’actualités où les personnages passent leur temps à courir. Les gestes saccadés, ils s’inscrivent définitivement dans l’histoire. Hitler, Staline, Daladier, Chamberlain ! Ils étaient les protagonistes d’une histoire des hommes que je n’ai connue qu’après la guerre. Tout semblait caricatural mais les morts de plus en plus nombreux ne se relevaient pas.

Je me suis souvent demandé à quoi on pouvait reconnaître qu’une guerre allait survenir. Pas de ces petites guerres qui depuis un certain nombre d’années éclatent à différents endroits de la planète, non ! Une guerre sérieuse avec des ennemis suffisamment proches pour qu’ils puissent se réconcilier rapidement et que les survivants puissent se demander pourquoi leurs proches se sont fait tuer.

Ce sont des guerres normales dont on enseigne la stratégie dans toutes les bonnes écoles militaires sans se préoccuper de la nationalité de l’auteur qu’on étudie. Pour les juifs du passé, ça n’avait pas été pareil. Eux qui étaient habitués à ce qu’on les persécute à chaque éruption d’acné sur le visage de la communauté dans laquelle ils se trouvaient, durant les guerres de plus grande ampleur, ils étaient assimilés d’office à ces communautés.

Il arrivait que durant certains assauts un juif tuait un juif porteur d’un uniforme différent du sien. Il en était profondément désolé bien sûr mais c’était le prix à payer pour continuer d’être le semblable de ses semblables.

Mais durant cette guerre-là qu’on appelle encore la dernière guerre, il n’y avait pas de bons ou de mauvais juifs. Tous ils étaient mauvais, tous il fallait les éliminer. Durant cette guerre-là, certains n’ont pas eu droit à la mort à laquelle ils étaient destinés ni à l’endroit où leurs proches pourraient se recueillir sur leur tombe. Honnêtement, aujourd’hui que tant d’années ont passé je peux le dire, ce n’était pas juste.

Et moi ? Il faut bien le reconnaitre, j’ai joui d’un bonus par rapport à ceux qui avaient mon âge. Ceux qui comme tant d’autres avaient la vocation d’être heureux et qui sont morts. Et tout ça parce que ils étaient juifs. Mais c’est quoi un juif ? Je pense qu’il est bien tard pour en débattre.

Un jour qu’il y avait une commémoration à Auschwitz, j’ai accompagné les organisateurs. Vers la fin de l’après-midi, je me suis rendu dans la baraque la plus éloignée, j’ai attendu que tout le monde ait quitté le camp, je me suis étendu sur un des châlits et j’ai pensé que c’était peut-être ma place que je retrouvais. Peut-être que c’est ce qu’ils veulent, ceux qui me regardent comme si je n’étais pas tout-à-fait des leurs, comme si cependant, ils attendent de moi que je leur dise quelque chose que nous ne comprenons ni les uns ni les autres mais qui est important.

 

 

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Un voyageur JGobert

Dans cette région moyenâgeuse où subsistent des vestiges d’un autre temps, un homme étrange est arrivé ce matin. Le regard sombre, un manteau défraîchi sur le dos, il voyage de vallon en vallée, de village en campagne parcourant des kilomètres chaque jour. Accroché à son épaule, il a une besace qui renferme ses secrets.

Il apparaît à l’aube, silencieux, cherchant un coin d’ombre pour s’y installer. Les habitants curieux le regardent et n’approchent pas. Cet étranger est inaccoutumé, énigmatique, inquiétant et il ne fait rien pour se montrer sympathique.

Il voyage comme cela depuis très longtemps. Il passe à travers le temps comme l’eau coule dans les rivières. Il ne s’attache à personne, ne fait aucun mal, se repose et s’en va sans rien dire. Les villageois ont entendu parler de lui dans le passé. La nouvelle de son arrivée le précède et une vieille légende raconte la vie d’un déplacé, d’un inopportun, d’un errant.

Les vieux du village se souviennent toujours de son passage au temps de leur jeunesse et s’en rappellent fort bien mais personne n’en parle, n’ose le dire de peur des moqueries, des quolibets. Le temps des sorcières est passé et ce temps n’a apporté que le malheur.

Assis à l’ombre, l’homme médite et a sorti de son sac des objets bizarres, qu’il tient d’une drôle de façon. Le mystère est entier et la rumeur s’installe de nouveau. Dés que les plus audacieux ont commencé, les autres se joignent à eux et amplifient les interprétations. Tout et rien sont dits sur cet homme et les anciens osent à peine exprimer leurs souvenirs qui, de toute manière, ne seront pas entendus.

L’homme a bougé, faisant reculer les villageois. Cette fois, un jeune téméraire, un fou ose approcher de quelques pas et le fixe. Retenant son souffle, il fait encore quelques pas hasardeux. L’étranger l’aperçoit et d’un geste lent, l’appelle.

Face à face, le jeune aventurier voit la face burinée, grêlée de cet homme, un grand âge inscrit sur la figure dans des rides profondes. Mais de ce visage vieilli ressortent des yeux d’un bleu infini. La crainte s’est envolée pour le jeune fou et rassuré, il s’installe à côté de cet homme pour l’écouter.

Son histoire est peu commune. Il a connu un nombre incalculable d’évènements dans sa vie, des catastrophes, des guerres. Il a vécu des vies différentes, à des époques distinctes sur d’autres continents. Il a fait le tour de la terre. Il a aimé des femmes, eu des enfants et les a vus mourir. Sa destinée est depuis longtemps celle d’un déraciné, d’un vagabond, d’un mendiant.

Il possède la sagesse, le savoir, la vertu, il vit loin des hommes depuis longtemps et ne s’en approchent que rarement. Il possède un don, un présent que les humains recherchent avidement : la vie éternelle. C’est un immortel.

Son chemin est comme un jour sans fin, il recommence chaque matin et le temps ne lui est pas compté.  Ce voyageur fantôme cherche le repos depuis longtemps. Peu de ses contemporains ont vécu la même histoire, c’est un rescapé du pays des songes.

JGobert

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Une femme moderne JGobert

Smartphone en main, Victoria consulte ses mails, ses rendez-vous d'un œil rapide et pense à ce qu'elle va manger ce soir. Un petit tête à tête improvisé avec ce charmant ami rencontré au théâtre. Victoria a accepté ce repas un peu par curiosité et pour stopper l’afflux de mails qui lui envoie et qui l'envahit.
Vic vit seule. Elle a quitté le cocon familial pour vivre sa vie et déposé son enfance chez ses parents.  Son appartement cossu est dans un quartier agréable et tranquille,  il la laisse au centre de la ville. Son travail n'est pas très loin, un bureau dans un immeuble rénové qui en fait un endroit lumineux et actuel.

En femme moderne, elle privilégie les transports en commun. De saut de puce en saut de puce, elle parcourt son territoire en courant toute la journée. Son travail terminé, elle passe en vitesse chez son coiffeur, récupère ses vêtements au pressing et court à toute vitesse à la superette pour quelques provisions. Son frigo est toujours vide et son chaton n'a plus de lait.
Sa vie se résume à une course folle depuis qu'elle a quitté l'Université. Diplômée, elle a trouvé un emploi bien payé dans ce qu'elle aime et pratique sans compter.
Vic vit librement et a bientôt la trentaine, elle n'a pas de projet immédiat. Ses ambitions de mariage n'ont pas abouti et elle en a déduit qu'elle n'était pas prête à cette vie. Ses principales copines sont dans son cas, indépendantes et libres, elles sont toutes célibataires.
Ses weekends sont chargés et toujours trop courts. Un coup de téléphone à Maman et elle repart dans ses activités dominicales. Son agenda constamment ouvert se remplit à toute vitesse et la laisse parfois dubitative quand à l'organisation de ces jours à venir.

Rendez-vous à 20 heures devant le resto, cela lui laisse à peine une heure pour se préparer, s'habiller, se maquiller et partir.
Son appartement prend l'allure d'un capharnaüm indescriptible où tout a un endroit précis. Elle interdit le rangement. Tout est à sa place sans contrainte au grand désespoir de sa mère qui se sent investie d'une mission quand elle rend visite à Vic. Ranger.

Vic a besoin de liberté et rêve de voyages, de grandes étendues et de mer. Ses prochaines vacances sont réservées et elle passera prendre les billets à l'agence le weekend prochain.

Le restaurant proposé est de l'autre bout de la ville. Un endroit connu et face à la grande roue qui domine cet espace vivant et agréable. De grands piétonniers agrémentent ce quartier où les restaurants sont alignés, chamarrés et bruyants. Dés qu’elle arrive, elle sent battre son cœur plus fort comme à chaque rendez-vous mais elle n’y attache pas d’importance. Il n’y a pas de place pour un homme dans sa vie.

Son horloge biologique lui a déjà donné envie d’enfants, sentiment vite repoussé parce que ce n’est ni le moment ni l’instant. Le temps lui fait défaut et vivre en couple n’entre pas dans sa conception actuelle. D’ailleurs, un bébé toute seule lui plairait peut-être mais ce n’est pas encore le moment.

Son amie d’enfance est mariée depuis plusieurs années et deux magnifiques bébés sont arrivés. Une vie pour cette femme qui a suivi la route toute tracée de la famille. C’est trop pour elle, jamais elle ne pourra s’identifier à cette mère de famille qui sacrifie tout à ses petits enfants et qui se laisse envahir, prendre par un foyer possessif.

 Vic a des rêves plein la tête et même si pour l’instant, ils se résument à des prospectus alignés sur l’étagère, elle sait qu’un jour, elle partira, sac à dos, vers ces pays qui la font rêver depuis son enfance.

Déjà en retard,  cet homme n’a pas de chance, la faire attendre un soir devant un resto est la chose qui la fâche le plus au monde. Encore une cigarette vivement allumée, quelques bouffées et d’un geste nerveux, l’écrase violement sur sa chaussure. Vic part et se promet bien de lui apprendre la ponctualité.  

Dans ce quartier festif, Vic se dirige vers un endroit où elle a l’habitude de se rendre. Un petit bar où elle rencontre des gens amicaux et avec qui, elle parle et refait le monde. La soirée ne sera pas perdue. C’est là qu’elle entrevoit cet artiste désenchanté, peintre et poète. Il cherche fortune mais n’y met pas la forme. Elle le trouve bohème avec de grandes idées pour refaire le monde.  Son téléphone n’arrête pas de sonner. Des excuses arrivent, formulées de toutes les façons et l’agacent. D’un geste rapide, elle coupe cet appareil pour le faire taire et continue à écouter ce poète contemporain et désappointé.

Vic ne le connait pas personnellement mais elle l’a déjà rencontré à plusieurs reprises dans cet établissement.  Elle reste néanmoins fascinée un moment par ce que cet homme dégage.  De toute façon, le but n’est pas de s’embarrasser de cet homme mais l’écouter, l’entendre lui plait. Il libère une douceur extraordinaire, ses gestes sont raffinés, suaves et sa voix posée est réfléchie.  Vic, au bout de quelques minutes se ressaisit et se demande pourquoi elle reste là. D’un bond, elle quitte sa chaise et après un petit salut souriant, part.

Ne jamais rester en place fait partie de son mode de vie, toujours voir autre chose, ne pas s’attacher, toujours improviser du nouveau pour que sa vie ne soit pas monotone, insipide, fade.

A son âge, la solitude n’existe pas. Elle a trop de projets pour y penser. Dehors, elle rallume ce Gsm envahissant et efface un à un les messages sans les lire. Trop tard, elle n’a pas le temps d’attendre.

De retour dans son appartement, son chat l’observe sur le canapé et ronronne de la voir rentrer. D’un geste machinale, elle allume la télé et s’allonge près de lui, un gros paquet de chips sur le ventre et un coca à porter de main. Demain sera un autre jour.

Au petit matin, ébouriffé, échevelée et déjà en retard, elle cavale dans la salle de bain et quelques minutes plus tard attrape son sac. En bas de l’immeuble attendent ses copines.  Journée shopping. Le soleil est au rendez-vous et gaiement elle part vers ces rues remplies de magasins. Sa carte de banque est bien rangée dans son sac et elle sait que ce mode de paiement lui plait. Peu importent les dépenses, son salaire est amplement suffisant pour tous ses petits caprices.

L’agence de voyages est à quelques pas et Vic en profite pour prendre ses billets d’avion. De petites vacances au soleil lui feront le plus grand bien. Vic aime l’ambiance de ces hôtels à l’étranger où tout est fait pour satisfaire le client. Se laisser materner, n’avoir rien à faire, se lever avec le soleil et s’installer sur le sable chaud. Un repos facile.  Ses grands voyages ne sont pas encore décidés mais elle y pense et en parle souvent à sa mère.  Vic attend le bon moment pour partir à l’aventure.

Ses copines font la fête dans cette rue commerçante, achètent et rient. Vic participe à ce défoulement collectif et sourit de satisfaction. La journée s’achève trop vite et un petit snack sera le bienvenu.

Après avoir passé une excellente journée entre filles, Vic rentre chez elle et croise ce poète aux boucles blondes. Il doit habiter le quartier.

Déjà, dans son immeuble, son esprit la libère et elle repart dans ses rêves d’aventure. A peine rentrée, elle s’installe dans ce canapé qui l’accueille toujours avec tant de plaisir et ouvre son Gsm qui la tient informée de ce que les autres font.

Maman lui a offert une tablette et Vic l’apprivoise depuis quelques jours. La technologie n’a plus de secrets pour elle. L’ordinateur et les différents appareils sont rassemblés sur le bureau bondé. Les chargeurs en masse font le siège sur cette  autre table.  Maman a aussi acheté un aspirateur robot qui voyage dans l’appartement toute la journée et qui au début effrayait Marti dans son sommeil. Depuis, le chat et l’aspi font bon ménage.  Marti le laisse passer et le regarde faire allongé dans le canapé. Voilà un drôle de compagnon pour Marti qui ne s’en plaint plus.

Son répondeur émet constamment un bip qui en énerverait plus d’un. Vic ne l’entend pas et poursuit sa vie complétant une partie de son travail sur son ordinateur. Toutes ses notes sont consignées dans cette boîte magique et l’aide beaucoup. Ses patients aussi sont importants et elle s’investit beaucoup pour eux. Ses pensées profondes sont pour eux. Les aider un peu plus chaque jour est pour elle un but qu’elle ne laisse à personne d’autres. Son travail l’occupe beaucoup et elle le véhicule partout, parfois lourdement.

Un choix décidé très tôt et rondement mené. Des études intelligentes et un diplôme en main, Vic a découvert très vite la face cachée de la vie et sa dureté. Le désarroi, la solitude, l’abandon sont pour elle des mots de tous les jours. Les voir s’étioler jour après jour la rend parfois impuissante devant une telle misère qu’elle compense par ses activités.

 Femme  moderne, évoluée, libérée, responsable, des qualificatifs parfois bien erronés qui lui laissent un goût amer parfois. La société a voulu des femmes modernes qui assument, qui courent, qui vivent à cent à l’heure. La  société de consommation les a conditionnées pour qu’elles travaillent, gagnent de l’argent et le dépensent. Elle en a fait l’égal de l’homme oubliant que les femmes ont des contraintes que les hommes n’ont pas. La nature a pourvu l’homme d’une liberté totale mais pas la femme.

Vic sait que son horloge biologique avance et que malgré tous ses discours de femme libérée, elle voudra un enfant, une envie qu’il lui vient de l’intérieur et qu’elle n’explique pas toujours. La nature ne la lâchera pas et fera tout un cirque pour arriver à ses fins. Vic a encore le temps mais il passe si vite. Et quand le moment sera venu, si elle ne trouvait pas de père pour cet enfant qu’elle voudra peut-être un jour dans sa vie.

Rien n’est facile. Envisager un bébé toute seule. Non, bébé a besoin d’un père. Bébé lui reprochera son absence plus tard. Vic a le temps comme elle dit. Rien ne presse encore et la science fait beaucoup maintenant. Sa vie vient à peine de commencer et lui laisse un choix immense de choses à réaliser.

Depuis quelques mois, Vic s’est rendue à des mariages. Des collègues qui ont officialisé leurs relations. Des faire-part de naissance ont suivi. Des copines se sont rangées et ne sortent plus. Ses nouvelles relations sont un peu plus jeunes qu’elle et les invitations se font plus rares.  Malgré sa vie toujours trépidante, le mouvement autour d’elle se calme, la laissant seule de temps à autre. Son canapé est toujours aussi accueillant et Marti a vieilli aussi. L’aspi est tombé en panne et est coincé dans un coin. Elle le garde en souvenir comme une œuvre d’art moderne.

Son travail la fatigue, la misère l’oppresse et rien ne change. Ses vacances ont un goût de déjà vu et toutes les plages se ressemblent. Ses grands voyages n’ont pas pris forme et restent à l’état de rêve. L’appartement l’enferme et la ville l’étouffe.  Elle aime repartir à la campagne voir sa maman et passe le weekend avec elle. Elle profite de ces instants qui étaient trop rares dans le passé. Maman va bien et ses envies de rangement ont disparu. Elle aimerait avoir un petit, le petit de sa fille à garder, à aimer surtout.  Quel beau cadeau ce serait !  J’y pense maman, j’y pense.

Le dimanche soir arrivé, Vic prend son sac et repart laissant sa mère. Vic reprend le train à travers cette merveilleuse campagne qui lui manque.  En ville, rien ne change et Marti, à son tour, est parti.  Vic ne veut plus y penser.  Sa vie de femme moderne lui a plu jusqu’à ce jour et elle se répète chaque fois que cette envie de bébé va passer. Les statistiques le montrent. Les enfants ne sont plus la priorité des femmes. Les chiffres sont en baisse et c’est devenu normal.

Vic le sait et son smart en main, elle continue à courir pour son travail, pour son coiffeur, pour le pressing. Les rendez-vous en tête à tête sont plus rares. Les hommes de son âge sont rangés, divorcés, ont des enfants, un deux parfois trois…

Avec nostalgie, ses pas la ramènent vers ce café où l’artiste aux boucles blondes était apparu dans sa vie. Un beau souvenir. L’âme en peine, elle erre doucement dans ces rues familières et rentre chez elle, fatiguée. Elle éteint son Gsm qui sonne de moins en moins, s’allonge sur son canapé et s’endort.

Dans son rêve apparaît ce petit bout, une tête bien ronde couverte de boucles et qui l’appelle maman. Elle le voit pour la première fois, marchant déjà et parlant comme un ange. Il est si beau et elle entend aussi sa maman l’appeler. C’est incroyable de le voir là devant elle. Ce petit homme si joli, son regard la dévisage et elle sent en elle naître un amour infini pour ce petit garçon. La vie se rappelle à elle et lui envoie des images.

Tout à coup, elle sursaute et se réveille. Mon dieu, ce n’était qu’un rêve. Tout cet amour s’évanouit en quelques secondes et la laisse pantoise, blessée même. Tout ceci n’est qu’un rêve après tout. Elle aura vite oublié ce joli bambin qui la regardait si tendrement.

Au travail, les équipes se forment, se déforment et accueillent de nouvelles personnes. Un collègue qui a demandé sa mutation est arrivé. Un adjoint qui lui sera utile avec cette nouvelle section.  Il est installé à l’étage et croise Vic chaque matin sans qu’elle y fasse attention.

Les habitudes se font et repartent. Vic n’a pas le temps et court toujours. Son appartement a été rénové et elle se sent de nouveau bien dans cet endroit. Elle a un nouveau jeune compagnon, Moris qui comme Marti dort étalé sur le canapé. Maman va bien et vient de moins en moins.

Son smart en main, Vic continue à regarder ses messages et ses rendez-vous. La vie a pris un autre sens, plus posée, plus réfléchie. Vic se sent bien dans ses chaussures et voit la vie se dérouler de cette façon encore longtemps.

Son téléphone sonne et Vic décroche. C’est son collègue qui l’invite au resto, juste un petit souper entre nouveaux collègues, rien de grave. Elle accepte ou elle refuse. Indécise, elle prend le temps pour réfléchir. Oui peut-être.

Samedi 20 heures au resto. Vic déambule dans son appartement, hésitante, contrariée. Et puis après tout pourquoi pas. A son âge, elle est toujours ravissante. Vite dans la salle de bain, maquillage et elle passe une robe qui lui va à ravir et dans laquelle elle se sent bien. Son sac à main avec elle, déjà sur cette place aux souvenirs, elle arrive et s’aperçoit que son collègue est déjà là. Il l’attend quelques fleurs à la main comme un débutant timide.

Il est encore temps de faire demi-tour, il ne la voit pas encore.  Que va-t-elle chercher à cette heure, à son âge ?  Elle approche enfin et il l’aperçoit.  Son visage s’illumine et aussi inconcevable qu’il soit, Vic pense reconnaître les traits de quelqu’un de familier, quelqu’un qu’elle a aimé. Après avoir cherché un instant, c’est cet enfant. Oui, cet enfant dans son rêve, le sourire de ce petit garçon blond qui lui est apparu et qui lui revient ce soir.

JGobert

 

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Hier, demain, l'étrange affaire!

 

Soliloque

Les plaisirs les plus exaltants

N'ont qu'une durée éphémère.

Or j'aimerais, de temps en temps,

Tenir pour vrai l'imaginaire.

Je reçois un ami, ce jour.

Il est assis à cette place,

Comme jadis, en L'An de grâce

Quand chez moi, il fit un séjour.

Je ferme les yeux, aucun doute!

J'ai en l'oreille ses propos

Et non loin de moi ses cadeaux,

Pourtant il a repris sa route.

On dit que l'oubli est voleur,

Soustrait des moments délectables.

Certains le trouvent secourable,

Un bon remède à la douleur.

Hier, demain, l'étrange affaire!

On ne s'émeut fort qu'au présent.

Le passé offre un trou béant,

La mémoire y fouille et déterre.

8 mai 2014

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PROMENADE?

Au fond du lit, fenêtre ouverte

J'écoute doucement la pluie tomber.

Le jour se lève, la plaine est verte

Il fera gris toute la journée!

Pourtant cette eau est bienfaisante

Les petits oiseaux sont à l'abri...

Dans la mémoire est bien présente

Une chanson faite sur la pluie!

Alors surgit une autre averse

Dégoulinante de sentiments!

Car tout ce temps que l'on traverse

A besoin de rafraîchissement!

L'air est si doux, fredonne l'été...

Promenade sonne comme aventure!

Les rues luisantes sont désertées

Est-ce un défi qu'elles nous murmurent?

J.G.

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Béatrice

 

J’avais dix-neuf ans à cette époque. J’étais étudiant en sciences économiques. Durant l’année scolaire j’occupais ce qu’on appelle un kot à proximité de l’université. Une chambre pourvue d’une douche et d’une kitchenette. Le week-end, je rentrais chez mes parents.

J’avais une amie, étudiante elle aussi, Henriette Leroux avec laquelle le samedi soir j’allais au cinéma ou dans une boite aux environs de la ville. On y dansait parfois jusqu’aux premières lueurs de l’aube. Mes parents n’y voyaient pas d’inconvénients, Henriette leur était sympathique. Je suppose que du coté des parents d’Henriette, leur sentiment était le même à mon égard.

J’ai revu des photos de nous deux à cet âge. J’étais maigre mais bien proportionné, le visage creusé, des yeux noirs au regard profond. Henriette était mince mais la poitrine saillait en dessous d’un pull étroit. Elle avait un visage frais, plaisant, un peu candide comme on l’a souvent à cet âge.

Béatrice disait qu’à l’âge de sa fille, elle lui ressemblait. Elle me laissait entendre, sans doute, qu’Henriette ressemblerait un jour à sa mère. Quel est le jeune homme ardent qui ne l’aurait pas espéré ? Béatrice était séduisante. Aujourd’hui, on dirait qu’elle était sexy.

Les parents d’Henriette avaient une maison à la côte, elle était située dans les dunes. Debout devant la maison on voyait la ligne d’horizon à plusieurs kilomètres de distance.

Elle était entourée d’un jardin et d’un terrain herbeux qui avait près d’un hectare. Devant il y avait les dunes, derrière l’orée d’un bois. Isolée, on y était au bout du monde.      

C’était en juillet. Béatrice m’avait invité à passer quinze jours avec sa fille et elle.

- Vous aimez la côte, Pierre ? Bien sûr, ce n’est pas directement la plage mais on n’en est pas loin.

Le père d’Henriette n’y venait que le week-end. Durant la semaine, il restait à Bruxelles pour travailler. Il était un des agents commerciaux d’une firme qui distribuait des produits destinés à la construction de bâtiments. Les administrations  publiques constituaient le plus gros de sa clientèle. Il n’y avait pas un soir où il ne traitait pas un fonctionnaire important dans un des restaurants les plus réputés de la ville. Il rentrait chez lui mort de fatigue et s’endormait sur le champ. Plus tard, disait-il en riant, lorsqu’ils seraient riches, Béatrice et lui feraient la grasse matinée tous les jours. Et si ce n’était pas la grasse matinée, ils resteraient au lit tout de même. Même à la côte, il se couchait tôt. Il disait pour s’excuser :

- J’ai de la peine à récupérer.

- Tu es en vacances.

- C’est vrai.

Mais il ne changeait pas sa façon d’agir.

C’était un été particulièrement chaud. Il fallait, disait-on, remonter à de nombreuses années en arrière pour retrouver un été aussi torride.

Nous mangions dans le jardin vêtus aussi légèrement que possible. La plupart du temps je ne portais que mon slip tandis que les deux femmes restaient en maillot toute la journée. Chacun de nous disparaissait tour à tour et revenait les cheveux mouillés. Il venait de prendre une douche.

- Si nous étions nos ancêtres des premiers âges, nous pourrions nous promener tout nu.

Bien sûr, ce n’était qu’une plaisanterie. Mais le bas de mon ventre s’était enflammé, les yeux tournés vers Béatrice que je regardais soudain comme si elle était nue. Elle détourna la tête.

Au bout de quelques jours, tous les trois nous avions la couleur du bronze et l’habitude de nous voir pratiquement nus. Je pouvais regarder Béatrice sans réagir comme je le faisais les premiers jours. C’est la nuit, étendu sur mon lit, que je pensais à elle. Est-ce qu’elle dormait nue, elle aussi ?      

Un jour qu’elle nous avait laissé pour aller prendre sa douche je me suis rendu dans ma chambre pour y prendre je ne sais plus quoi. En revenant je suis passé devant la salle bain. La porte était ouverte. Machinalement j’ai tourné la tête. Béatrice était en train de prendre sa douche. Elle n’avait pas tiré le rideau. J’étais cloué au sol. Ruisselante, les cheveux brillants, les seins bronzés mais plus clairs autour des aréoles, elle était la femme comme l’imaginent, je suppose, les peintres et les jeunes gens.

La chaleur m’était montée au visage. Je ne pouvais détacher le regard du triangle noir de sa toison. Elle me regardait, elle aussi, les yeux  effarés. Elle ne faisait aucun geste pour se dissimuler ne serait-ce que pour tirer le rideau. Je me suis repris et je suis retourné au jardin. Henriette était étendue sur son drap de bain. Je me suis étendu sur le mien. Lorsque Béatrice est revenue, j’ai fait semblant de sommeiller.

J’ignore ce que j’aurais fait pour la couvrir, c’est le mot qui m’était venu à l’esprit, mais j’avais envie d’elle comme je n’avais jamais eu envie de qui que ce soit d’autre. Je haïssais son mari. J’aimais Béatrice passionnément.

J’ai quitté la côte deux jours plus tard. La veille, Henriette avait pris la voiture pour se rendre à Ostende. Elle avait, disait-elle, des achats importants à faire. J’étais resté dans ma chambre pour réfléchir. J’en étais convaincu, je ne pouvais plus rester. Durant le déjeuner que nous avions pris à trois comme d’habitude, Béatrice nous avait parlé de ce qu’elle avait envie de faire durant ces chaleurs mais elle évitait de me regarder. Cependant à chaque fois que ses yeux me croisaient, j’avais le sentiment qu’elle jouait la comédie. Ni ses gestes ni sa voix ne ressemblaient à ce qu’ils étaient auparavant. On eu dit la façon de se tenir ou de jouer d’un comédien débutant ou médiocre.

Lorsqu’Henriette est partie, je suis monté dans ma chambre. Béatrice s’était étendue sur son drap de bain pour exposer son dos au soleil. Elle avait dénoué les liens de son soutien afin de ne pas avoir le dos marqué.

Je suis descendu. J’étais debout auprès d’elle.

- Je vais rentrer demain, Béatrice. Je crois que c’est mieux.

- Demain. Mais pourquoi ?

Elle s’était tournée vers moi. Elle n’avait pas songé à se couvrir les seins.

Je me suis laissé tomber sur les genoux.

- J’ai trop envie de vous Béatrice.

- Ce n’est pas raisonnable, Pierre.

Je me suis allongé sur elle, j’ai introduit ma langue entre ses lèvres. C’est elle qui m’a serré sur sa poitrine.

Lorsqu’Henriette est rentrée, j’avais mis un t-shirt au dessus d’un short en coton, et j’aidais Béatrice à mettre la table. Elle avait change de maillot et enfilé une chemisette dont elle avait glissé les pans dans son slip.  Elle avait le regard brûlant mais les traits apaisés.

- Il a fait chaud, aujourd’hui.    

- Vous aurez du beau temps jusqu’à la fin du mois vraisemblablement. Dommage pour moi, il faut que je rentre demain.

Henriette était surprise.

- Pourquoi, tu n’es pas bien avec nous ?

- Je lui ai dit qu’il pouvait rester.

J’ai dit que mes parents avaient appelé. Henriette ne voyait pas le rapport, dit-elle.

Le lendemain, elle m’a conduit à la gare. Elle m’a demandé si j’avais eu des mots avec sa mère, nous nous sommes embrassés, elle se serrait fort contre moi.

- C’est à cause de ma mère que tu pars.

J’ai secoué la tête sans rien dire.

- Ne pars pas. Retournons à la villa tous les deux.

Elle avait mis ses lèvres sur ma bouche. Nous sommes remontés en voiture et nous avons repris le chemin des dunes. Béatrice a semblé heureuse de me revoir. Elle a abandonné son livre et est venue m’embrasser sur les joues.

- Vous avez bien fait. Je me suis demandé ce qui ne vous avait pas plu.

Je ne pensais pas qu’elle faisait allusion à ce qui s’était passé entre nous mais j’avais envie de la prendre entre les bras. Je suis monté dans ma chambre pour me mettre en maillot.

Le soir nous avons bu davantage que nous le faisions généralement les autres soirs. Henriette était particulièrement agitée. Elle s’asseyait sur mes genoux, puis elle embrassait sa mère sur le nez.

- Elle est folle. Ma fille est folle.

Il faisait noir lorsque nous sommes montés nous coucher. La chambre de Béatrice, la chambre conjugale, se trouvait en face des escaliers. Celle d’Henriette, à droite, se trouvait au fond du couloir. La mienne, à gauche, directement après la salle de bain. J’entendais couler la douche à chaque fois que quelqu'un s’en servait. Je n’étais pas encore endormi. La douche a coulé, j’ai entendu des pas qui se dirigeaient vers ma chambre. Je devinais que c’était Henriette. Elle s’est glissée dans mon lit, elle a posé la main sur mon sexe, et elle a chuchoté :

- Pourquoi, es-tu parti ?

C’était Beatrice.

 

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Un coup de téléphone JGobert

Au cours d’une soirée, d’une discussion animée entre amis, l’un d’eux me demande s’il y a longtemps que j’ai téléphoné à cette petite fille qui vivait avec moi et qui m’accompagnait dans mon enfance. Drôle d’idée d’appeler cette fillette et de ranimer ainsi un passé révolu, accompli avec des souvenirs douloureux peut-être, remuer l’enfance avec ses bonheurs et ses malheurs. Un coup de fil et je replonge dans cette vie que j’essaie d’oublier depuis que j’ai le statut d’adulte.

Cette enfance mal digérée, douloureuse qu’il a fallu tirer, traîner chaque jour et qui m’a laissé un goût plus qu’amer.

Le jeu est ainsi fait et pourquoi pas. Je ne me sens pas particulièrement rassurée de cet exercice devant des amis mais bon, c’est un jeu. Je prends le téléphone et le serre à l’écraser.

 Allo, c’est moi. Comment vas-tu ?

La fillette est étonnée de ce coup de téléphone et hésite à répondre. C’est à peine si elle reconnaît sa voix. D’emblé elle me parle de sa mère qui ne va pas bien. Des misères qu’elle subit et des pleurs qu’elle entend chaque jour.  Non, rien n’a changé, les sentiments, les perceptions sont toujours les mêmes et l’incompréhension toujours présente.  Elle est seule et sa vie est triste de voir ce gâchis autour d’elle. Les jours passent sans saveur et s’égrainent tristement.

Je ne veux pas en entendre plus mais j’ai soudain le regret de la laisser dans cet état, je dois prendre sur moi et la réconforter, la rassurer et lui dire que la vie n’est pas cela. Que sa solitude cessera un jour. Elle aura des images du bonheur et connaîtra la joie d’aimer. Elle doit tenir sans se détruire le cœur, le protéger du mieux qu’elle peut. Boucher ses oreilles pour ne pas entendre et réconforter sa mère plus que tout. D’ailleurs, je voudrai parler à sa mère mais dans ce deal, ce n’est pas possible.  Le téléphone ne marchera pas pour elle.  Je n’arrive plus à raccrocher et je l’entends, fragile, perdue, seule se débattre dans cette vie où tout est douleur, crainte et angoisse.  Elle ne dit plus rien un instant  et doit penser que ma vie à moi est plus légère depuis mon départ.

C’est moi qui prends de ses nouvelles et pas le contraire et je reste là à l’écouter raconter ce que je connais trop bien.  Je sais que tout cela va finir mais je ne veux pas entrer dans cet avenir qui m’appartient et qu’elle ne connait pas encore.  Elle doit tenir, être forte et je sais qu’elle a une force peu commune et qu’elle tiendra. Personne ne lira jamais sur son visage sa tristesse, ni dans son cœur son désarroi. Elle sera un roc, muette et ne pardonnera pas. Elle n’oubliera rien. Même blessée à vie,  elle portera ses blessures fièrement et au fil du temps acceptera cette situation, ce passé.

Mes amis se rappellent à moi. Je suis épuisée de cette conversation. C’est à regret aussi que je l’abandonne dans ce monde révolu et j’attends avec impatience le coup de téléphone suivant pour pouvoir calmer ce cœur démonté.

Cette fois  c’est Hugo à appeler le petit garçon qu’il était dans son enfance.  Prendre des nouvelles de ce père aimant. Pas fier, il bafouille, balbutie  et n’y arrive pas. Il s’effondre en pleurant. Trop de souvenirs heureux, tristes lui reviennent à la mémoire et après quelques phrases ânonnées, bredouillées, il raccroche les larmes aux yeux toujours dans ce chagrin qui ne s’enfuit pas.  

Ce n’est jamais facile d’appeler son passé.

 

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Enfin sur le net ! Il est déjà passé dans quelques salles dans l'Aude...

Le long-métrage de Stéphane KOWALCZYK avec un scénario Jean-Paul JOGUIN/Stéphane KOWALCZYK, en version intégrale.

J'y campe Mr Lorty ...

Un film du cinéma des "occasions " du narbonnais...

Où l'on se dit qu'avec le centième ou le dixième des moyens - surtout humains: scripte, lumières, sons, etc... - du cinéma d'occupation hexagonal nous pourrions faire d'encore plus belles choses !

Nous aurions ici ces techniciens mais...tout travail mérite salaire...

 

Michel SIDOBRE

Acteur : http://michelsidobre.onlc.fr 

Auteur : http://sidobremichel.onlc.fr 

 

 

Publiée le 5 mai 2014

Un vieil ami demande de l'aide à l'inspecteur Garrigue dans une lettre. Celui-ci se rend dans le village ou son ami vient de se suicider et entame une enquête officieuse entre mensonge et vérité, rigueur policière et vision de chaman.

https://www.facebook.com/1rueducaussanel

http://1rueducaussanel.blogspot.fr/

 

 

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Nous n'irons plus boire à la source

 

Ma muse aussi s'en est allée,

Vers un ailleurs mystérieux,

Sans retour, ni signe d'adieu.

Souvent, en vain, l'ai appelée.

M'avaient inspirée des amis

Talentueux et dynamiques.

Dans un large espace onirique,

Fabuler nous était permis.

On se résigne de son mieux

Quand ceux qui tendrement nous aiment,

Sans l'avoir décidé eux-mêmes,

S'éloignent et semblent oublieux.

Nous n'irons plus boire à la source.

D'autres s'y rendront tour à tour

Et ils s'en souviendront toujours.

L'eau vive chantait en sa course.

                       

7 mai 2014

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Je suis dorénavant disponible pour chatter avec les membres du Réseau, mais aussi avec les non membres du réseau Arts et Lettres. Je serai cependant  très sélectif quant aux demandes d'accès: seu

Le chat peut se faire via votre ordinateur ou via l'application smartphone twoople.

Vous pouvez vous procurer gratuitement l'application pour votre smartphone via google play ici:  https://play.google.com/store/apps/details?id=com.twoople.twoopleme

Pas besoin d'inscription: vous tapez mon adresse twoople qui est 

 

twoople.com/art


dans la barre d'adresses internet et nous sommes en communication..

C'est hyper simple

 

Ma disponibilité pour la conversation chat est indiquée sur chaque page du réseau dans le haut de la colonne de droite

Robert Paul

Vous pouvez aussi cliquer sur le logo bleu de twoople pour être en mode discussion direct avec moi.:

Live chat with

   Robert Paul with:

     Twoople me

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Un grand écrivain.

 

Il est temps de faire une fin, comme on dit. J’ai 70 ans depuis hier. Encore un âge à chiffres ronds. J’ai eu 20 ans, l’âge de la mort de l’adolescent. 40 ans, l’âge des remises en question. 60 ans, celui de la pleine maturité. Celui que j’ai aujourd’hui est de toute évidence mon passeport pour l’éternité !

Je vis seul depuis vingt ans. Ma femme est morte, jamais je n’ai pensé à vivre avec une autre. Une épouse qu’on a aimé, ce n’est pas un livre qu’on referme pour en ouvrir un autre.

Le sexe ? Au début, je m’étais procuré par l’entremise d’un site spécialisé, un mannequin, une sorte de poupée d’un mètre soixante de hauteur qui avait toute l’apparence d’une femme véritable.

Je ne m’en suis jamais servi. Je l’ai conservé très longtemps. Un jour, je l’ai découpé en petits morceaux et je m’en suis débarrassé. A un certain âge, les pulsions sexuelles s’émoussent. On peut  passer pour chaste et l’être effectivement sans gros efforts.

En réalité, je n’ai jamais compris la chasteté qu’on affiche par fidélité à la femme décédée. Ou de l’amant disparu.

Il m’est arrivé de tromper Henriette mais je n’aurais pu vivre avec une autre qu’elle. Je ne crois pas ceux qui prétendent n’avoir jamais succombé aux charmes d’une femme séduisante.

Je suis un écrivain. Mes lecteurs ne sont pas nombreux mais ils sont d’une grande qualité. Ils attendent mon prochain livre. A chaque fois, ils attendent mon prochain livre. Aujourd’hui leur grande qualité a un goût un peu acide.

Un jour, mon ami Delcourt est venu me faire une proposition.

- Ecoutes, Jacques. Marc veut lancer une petite revue hebdomadaire. De l’importance d’une brochure. Bon marché. On y parlera de livres, de ceux qu’il vend en particulier, et, c’est la nouveauté, la dernière page sera consacrée à une nouvelle écrite par un écrivain connu. J’ai pensé à toi.

Henri secondait Marc Lambin, le propriétaire d’une grande librairie très courue.

- Il aime Faulkner, la revue s’intitulera : Mosquito. C’est moi qui suis chargé des textes hors ceux qui promeuvent les livres. Tu seras payé, bien sûr. Pas des masses mais …

J’ai accepté. Il y avait longtemps que je ne voyais plus mon nom sur la couverture d’un livre ou au bas d’un texte. J’ai pensé que c’était une occasion à saisir. La dernière page. La page de couverture, celle que le lecteur compulse en premier lieu.

J’imaginais déjà la surprise d’Henri, de Marc lui-même, devant ce qui serait une sorte de testament spirituel dans lequel je dirais les choses qui comptent avec des mots qui frappent. Des phrases au bout desquelles le lecteur lèvera les yeux au ciel pour réfléchir. Peut être même qu’il se retiendra de pleurer.  Henri m’avait réservé quatre semaines, quatre pages. J’avais huit jour pour rédiger la première, la dernière sera vraisemblablement le dernier chapitre d’un texte profond, et celui d’une vie.

Je passais beaucoup de temps devant mon ordinateur. Aucun des textes que j’écrivais ne survivait à une relecture. C’était banal, j’effaçais. Je recommençais à nouveau, j’effaçais encore. Parfois, je ne me relisais pas. Peine perdue. En me levant, avant même de me raser, je relisais ce qui subsistait de la veille. Et j’effaçais.

Le jour où Henri allait venir pour chercher mon texte, je n’avais rien à lui remettre. J’étais paniqué. C’était reconnaître l’indigence de mon imagination et la mort de l’écrivain que j’avais été.

Presque de force, je me suis assis devant mon clavier, et j’ai commencé à taper. Pour l’amour d’une femme, c’est le titre qui m’était venu à l’esprit.

«  Ce jour là, Dieu sait pour quelle raison, Suzanne était entrée au Majestic, et s’était assise dans un des siège d’où on pouvait voir entrer les clients.

Vers trois heures de l’après-midi, elle était assise depuis vingt minutes à peine, Roland poussait la porte battante de l’entrée suivi du porteur de bagage.

Il y eut comme un éblouissement dans les regards croisés qu’ils échangèrent.

Une demi-heure auparavant, ils ne savaient rien l’un de l’autre, et voilà que c’était comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Ils savaient l’essentiel l’un de l’autre. Que faut-il connaitre de plus dans la vie que le chemin qui désormais s’ouvre devant vous ?

Roland s’était dirigé vers elle. Suzanne s’était levée lentement comme si elle avait été mue par une force intérieure irrésistible. Il lui saisit les mains et s’inclina. Le hall, si bruyant un instant auparavant était devenu aussi silencieux que la nef d’une église. Chacun  des personnages qui s’y trouvaient s’était figé dans son attitude. On eut dit des statues. De celles dont un mage aurait sculpté les personnages d’un théâtre où l’amour régnait en maitre. Seul.

- Venez ; dit-il. Tu es belle, tu sais.

Ses yeux brillaient d’un éclat dont elle devinait la raison. Le désir du premier homme pour la première femme. Elle était prête à s’y soumettre. Son corps lui dictait ses attentes.   

Ils se dirigèrent vers l’ascenseur qui menait aux chambres. Le brouhaha soudain avait repris. Mais tout le monde les regardait et se posait la question ;

- Que va-t-il se passer ? »  

C’est le texte glissé dans une enveloppe de papier kraft que je remis à Henri. Il n’eut pas la curiosité de le lire.

- Je suis déjà en retard.

J’avais signé, en signe de dérision : Daphnée de Delly.

Peu de temps auparavant, pour meubler des périodes d’inaction de plus en plus fréquentes j’ai commencé à compulser des sites sur Internet. Sites d’inconnus ou d’institutions. De temps à autres,  je compulsais le site de la Bibliothèque Royale. Elle était en train de numériser ses archives.

Un jour, surprise ! Sous un numéro d’enregistrement, mon nom m’est apparu, daté de 1946. Il s’agissait d’une nouvelle envoyée à une revue qui l’avait mise; disait-elle, en attente. Malheureusement, avant même que ma nouvelle n’ait été publiée, la revue avait cessé de paraître faute de liquidités. Le fonds avait été repris par la Bibliothèque Royale.

Le titre de la nouvelle était : L’amour d’une femme. J’étais âgé de 25 ans en 1946. Ma première œuvre avait été une histoire d’amour. Je ne savais pas si je devais rire ou pleurer.

Une idée m’était venue. Pourquoi le texte d’un écrivain âgé devait il évoquer l’expérience ou la réflexion d’une vie ? Toutes les vies se valent. Toutes les réflexions se valent. Ce serait le sens de du texte promis à Henri. Une sorte de testament spirituel. J’y ai travaillé toute la semaine. Sans résultat satisfaisant. C’était mièvre. Quant à la nouvelle que j’avais remise à Henri, personne, au sein de la rédaction de la revue, ne s’était aperçu de ce que j’avais substitué au texte qu’ils attendaient un texte à la facture et au ton tout à fait différents.

Soit, me dis-je, cela me donne une semaine de plus. Et, en une demi-heure à peine, j’ai donné une suite à l’amour d’une femme. Daphnée de Delly venait de me sauver une fois de plus.

« Le serveur avait apporté une bouteille de Bollinger. Roland lui avait fait signe de sortir. Il était aux côtés de Suzanne, et tous les deux contemplaient la Méditerranée du haut de leur balcon. L’air était doux. »

Puis, je résume, il se passait quelque chose qui nécessitait quatre à cinq lignes.

« Tous les deux s’étaient approchés du lit princier dont une femme de chambre avait relevé les draps. » 

Glissé dans une enveloppe de papier kraft, format A4, je l’ai remise à Henri.

-Navré, je ne peux pas rester Jacques, l’imprimeur n’attend pas.

En se retournant, il me dit :

- Merci, Jacques. Merci. Je savais bien que j’avais frappé à la bonne porte.

Je pris la décision de lui dire la vérité dès qu’il reviendrait. Soit pour rompre à jamais avec moi, soit pour prendre le texte de la troisième semaine. Celui pour lequel il avait, comme il le disait, frappé à la bonne porte.

 

 

C’est quoi l’inspiration ? Sait-on comment elle vient, la question m’éblouit à proprement parler en passant devant l’armoire ans laquelle je rangeais des livres, des dossiers, des photos et des objets auxquels je tenais ou croyais tenir.

Henriette m’avait acheté une vieille bible qu’elle avait trouvée lors d’une brocante. Elle datait de 1885, le titre et le dos portait la mention : bible, en lettres d’or. Je ne voyais plus qu’elle. 

Tout de la vie des êtres humains se trouve dans des textes anciens : Bible, ancien et nouveau testament, le cantique des cantiques, etc. Mais les lecteurs y cherchent ce qui ne s’y trouve pas. Il faut se rendre à l’évidence, c’est le même roman que les écrivains réécrivent à chaque génération.

Une vulgaire copie. Amour et mort. Les hommes, en gros, se ressemblent depuis la nuit des temps. Dieu, pour ceux qui y croient, n’a pas eu beaucoup d’imagination. Si les récits sont mièvres, c’est que les faits le sont.

Henri était toujours aussi pressé. L’imprimeur ; disait-il.

- Il faut que je te parle, Henri.

- Oui ?

Il s’était assis en face de moi. Je le voyais, il avait soudain conscience de la solennité du moment. Henri et moi, nous sommes des amis de toujours. Il y avait dix ans de différence entre nous mais je ne m’en suis rendu compte que peu de temps auparavant. Le jour, précisément, où il est venu me proposer de lui fournir de la copie pour Mosquito.

- Les textes que je t’ai fournis n’étaient pas de moi. En réalité, ils étaient de moi mais d’un autre moi. Ils étaient inspirés du jeune homme que j’ai été il y a longtemps.

- Oui ?

- Une bluette. Rien qu’une bluette. 

- Oui ?

Si tu l’avais lue, ou Marc ou dieu sait qui, vous me l’auriez jetée à la figure.

Henri s’était levé.

- Mais je l’ai lue, Marc l’a lue, des lecteurs et des lectrices nous ont téléphoné, le tirage de la semaine dernière semaine a augmenté de 20%. Tu comprends, Jacques. Les lecteurs et les lectrices en ont marre des crimes ou des autobiographies déguisées de gens qui disent tous la même chose. Ils veulent de l’amour. De l’amour, pas des histoires de fesses qu’ils connaissent parfois mieux que ceux qui les écrivent.

Il avait l’air angoissé.

- Dis, Jacques, tu m’as préparé le texte de la troisième semaine ?

- Mais…

Il prit une chaise et l’enfourcha, les bras croisés sur le dossier.

-Je ne partirai pas sans lui, Jacques. Même si je dois y passer la nuit.

Je me suis rassis devant l’ordinateur, et me suis remis à taper.

 

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