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J'ai toujours aimé associer l'amour et l'art de la table. Dans les histoires comme dans la vie. Dans un cas comme dans l'autre, un peu d'ambition et de risque ouvrent les portes de bien des plaisirs.

Le soir où nos jeux ont commencé, nous n'avons mangé que l'entrée.

Nous nous connaissions depuis peu, et jusqu'à présent jamais il ne m'avait parlé vraiment « cuisine ». C'était aussi le premier homme que je rencontrais qui, parmi ceux qui savent cuisiner, aimait réellement cela.

C'est donc par la cuisine que j'ai commencé à découvrir sa maison.

Il avait grillé deux tranches de pain, puis les avait imbibées de Gewürztraminer avant de les disposer au centre de deux assiettes. Sans savoir pourquoi j'avais laissé traîner mon doigt sur le pain, et j'avais regardé la fine pellicule humide sur mon doigt, avant de le mettre en bouche. Pourquoi ce geste alors que j'avais le même breuvage dans le verre que tenait ma main droite?

Difficile à dire... mais à bien y réfléchir je crois que c'est à cet instant que l'idée de marier les plaisirs s'est développée en moi.

Un parfum un peu acide m'envahissait: il venait de couper en petits dés une nectarine à peine mûre et une poire Conférence, puis avait jeté le tout dans une poêle où le beurre avait déjà fondu. Cette préparation était le reflet du Gewürztraminer qui teintait délicieusement nos verres: fruit brut, acidulé, velouté.

A ces doux parfums vinrent s'ajouter ceux du cidre qu'il versa généreusement sur les fruits en pleine cuisson, qui aussitôt disparurent dans un brouillard fruité.

Il ne me disait rien de ce qu'il comptait faire de tout ceci, et je laissais ce mystère exciter mon imagination. La décontraction dont il faisait preuve ajoutait à ma curiosité. Combien de fois avait-il cuisiné ce plat que je ne voyais encore qu'en chantier? Avec qui l'avait-il partagé? Qu'avait-il fait ensuite?

Moi je savais qu'au plaisir de la découverte - et la faim aussi - s'ajoutaient bien des sensations auxquelles je ne pourrais bientôt plus résister.

Il m'invita à m'asseoir à la table dressée avec soin, et où il avait disposé deux bougies. J'obéis. J'étais légèrement frustrée de ne pas assister à la fin de la préparation, mais ne pas savoir exactement à quoi ressemblerait ce qu'il entendait me servir attisait ma curiosité, et les images qui me venaient me troublaient avec une douceur infinie.

Ses mains sur moi. Et mes yeux bandés.

Tu anticipes ma fille, tu anticipes.

C'est donc les yeux fermés, sans qu'il n'ait à me le demander, que j'accueillis nos assiettes à table.

Sur les deux pains grillés il avait disposé des tranches de foie gras, puis les avait nappées des fruits poêlés au beurre et au cidre. Le tout formait un chaud-froid qui me fit vibrer le ventre.

Qu'est-ce qui me met dans cet état? Toi? Moi? Ton appétissante composition?

La réponse me vint dès la première bouchée.

Tout à la fois.

Le foie gras s'était doucement amolli sous le nappage brûlant des fruits. Son goût délicat s'en trouvait renforcé, et se mêlait harmonieusement aux parfums de Gewürztraminer dont le pain demeurait imbibé. C'était à croire que les parfums s'étaient nourris de l'initiale fermeté du pain et du foie gras, et cette idée entreprit d'agiter les papillons qui dormaient, là, tout en bas.

Mes joues se sont certainement mises à rougir quand je me suis rendu compte que je n'écoutais pas un mot de ce qu'il me disait. C'était un peu comme si j'avais fait un tour sous la table comme une petite fille un soir de fête. Je tentai de m'agripper à sa conversation, en vain. Je sombrais lentement dans un océan de plaisirs parfumés, et sa voix s'éloignait peu à peu de moi.

Je portais à ma bouche une source de plaisir insoupçonné, qui me semblait inépuisable. Sentir couler au fond de ma gorge ce subtil nectar me transformait peu à peu en une chaude vague de désir.

Tais-toi.

C'est ce que je lui dis.

Il ne me parut même pas surpris de cette subite autorité. Il baissa les yeux, et mangea en silence. Mais à chaque bouchée qu'il savourait il me regardait à nouveau. C'était un regard bienveillant. Il m'associait, moi, dans la lueur des bougies, à ce qu'il goûtait. Et cela me plaisait furieusement.

L'idée que bien des soirées semblables à celle-ci se soient passées, avec d'autres femmes, devenait secondaire. Et progressivement la conviction d'être unique ici et maintenant montait en moi.

Il me respectait.

Et je terminais ma dégustation, en silence, face à lui, et lui face à moi.

Amen.

Lorsque nous en eûmes fini avec sa délicieuse préparation, c'est avec la conviction qu'il était inutile de cuisiner encore, du moins pour ce soir-là.

Je lui dis: « Maintenant, je veux que tu le refasses. Avec moi ».

Et c'est ce qu'il fit.

Plusieurs fois cette nuit-là je me dis que j'avais eu de la chance de le rencontrer. Au-delà des dispositions positives qui s'étaient développées en moi tout au long de l'avant-soirée, je garderai un souvenir émerveillé de l'exercice que je lui avais imposé. Je fus tour à tour chacun des ingrédients qui s'étaient transformés en merveille.

Il me déshabilla avec une infinie délicatesse, tout comme il avait fait glisser la peau de la nectarine sur sa chair si tendre en apparence, mais en réalité si ferme au toucher.

Les baisers dont il me couvrait étaient comme autant de morceaux de poire chaude, taillés au couteau, doux et acides à la fois.

Je griffai son dos et il me griffa en retour, et ma peau se souviendra éternellement de ces rugueux tours de passe-passe, tout comme ceux du pain imbibé sur ma langue.

Quant à nos corps, qui au fil de notre dégustation augmentaient en goût et en chaleur, ils furent longs à épuiser la recette de cette nuit.

A plusieurs reprises – combien en fait? Je n'en ai aucun souvenir précis - j'eus l'impression qu'il me portait à ébullition, qu'il me transformait en un nuage parfumé tout autour de lui, et lui perdu au milieu de moi, étouffé mais si vivant, encore et toujours.

Je sombrai alors qu'il faisait déjà jour, et m'éveillai à peine plus tard. Il me regardait, couché sur le côté. Son regard me donnait chaud.

« J'ai faim », dis-je.

Il sourit, se glissa sur le dos, me laissant découvrir derrière lui le plateau du petit-déjeuner, débordant de petits pains au chocolat, croissants, confitures, thé, café, jus d'orange, ...

Je lui lançai un regard gourmand et dévorai le tout en un instant, homme et viennoiseries.

Nous avons inventé tant de recettes. Des mets pour se faire du bien, des dégustations ludiques et coquines, d'énormes plats pour nos amis, de petites douceurs pour se consoler lorsque la vie nous malmenait, et toujours de quoi attiser tous nos appétits... jusqu'à ce que mon ventre en porte le fruit.

Nos enfants sont grands maintenant.

Mais il me fait toujours aussi bien la cuisine, cet homme-là...





Bruxelles, le 10 septembre 2008.

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Un peu trop de bit(e)

Un peu trop de bit(e)

Dans le Discours amoureux, Roland Barthes se demandait pourquoi  il était si peu question d’amour dans les romans actuels lus par l’intelligentsia alors qu’un romancier comme Stendhal  par exemple considérait cette passion comme la « grande affaire » de sa vie, plus grande peut-être que l’idée fixe d’écrire un chef-d’œuvre.  In fine, l’auteur du Degré zéro de l’écriture concluait que « l’obsession politique » avait remplacé celle de la poursuite insensée du bonheur par l’amour qui donnerait un sens au non-sens selon la morale des époques incertaines. L’histoire d’amour avait été reléguée au rang de motif ou de thème,  ou pour le dire en terme plus cynique, de fonds de commerce exploité par  ces romans grand public au titre doucereux que la critique dédaigne mais que le public plébiscite. Mais aujourd’hui, puisque la politique n’est plus le discours dominant qu’il était, comment expliquer que le roman dans son ensemble ait renoncé à redevenir  la science des affects alors que le concert ne risque plus d’être troublé par les coups de pistolets de la triste politique ou par les cris de la rage impuissante des indignés ?  Il arrive encore qu’une romancière  comme Marie Darrieussecq  par exemple parle un peu des  premiers émois sensuels ou expériences sexuelles de ses personnages féminins, qu’elle rapporte  d’ailleurs si crûment qu’ils prennent un caractère sordide un peu kitsch qu’ils n’ont pas toujours, dans des scènes souvent placées abruptement au tout début du récit, in media res, pour accrocher le lecteur  dès l’incipit  (procédé employé aussi par  Dimitri Bortnikov dans Repas de morts qui commence par un scène de masturbation) et exciter son dégoût ou son penchant, c’est selon, pour  le trashy (pour le tragique on repassera). Le  vernis de la pseudo-novation stylistique peine pourtant à rajeunir  de si vieilles rengaines malgré leur piquant intrinsèque, malgré la verdeur du lexique (pas une page voire pour certaines pas un paragraphe sans le mot « bite », cette répétition produit un effet de saturation comme on dit dans la publicité), malgré l’absence de discours psychologisant.  Pour Marie Darrieussecq en effet, il n’y a sans doute  rien de si nouveau  à dire sur l’homme et  sa psyché depuis le passage de Freud ou Lacan pour qu’un romancier aille s’arroger un peu imprudemment comme au temps de Balzac une compétence de psychologue surtout quand on est déjà soi-même psychanalyste… et qu’on tient au partage des savoirs : car finalement n’est-il pas un peu incongru pour un auteur de disserter sur les motivations embrouillées de ses personnages ? Quelle valeur le lecteur  peut-il donner à ces développements, à ces analyses, à ces dissections du « cœur humain » à l’ancienne ? Toutes ces questions n’ont pas arrêté Stéphane Chasteller, auteur d’un premier roman singulier intitulé Terre promise.
Dans une langue impeccable et dans une syntaxe irréprochable, sur un ton plaisant,  avec un brin d’ironie, et aussi avec un certain talent (mot galvaudé mais il n’y en a pas d’autres pour qualifier un complexe de qualité d’expression et d’originalité),  il déroule la très vieille histoire de la recherche de l’autre  à travers l’itinéraire d’un personnage qui court après les ombres de son rêve et cela jusqu’aux dernières conséquences.

Clèves, Marie Darrieussecq, POL, 352 p., 19 € 

Terre promise, Stéphane Chasteller, Edition Embrasure, 158 p., 16 €

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Une terza rima, exercice de style

 

Les muses, autrefois, offrirent aux poètes

Des genres harmonieux pour combiner les mots.

Ces formes, de nos jours, paraissent désuètes.

 

Les pantoums, berceurs demeurent certes beaux,

N’utilisant toujours, seulement, que deux rimes.

Les phrases s’y répètent comme dans un rondeau.

 

Certains anciens poèmes atteignent le sublime

Et nous donnent souvent le goût de les chanter.

Les sonnets sont troublants, délicats et intimes.

 

La poésie propulse, en des aires enchantées,

À moins de se vouloir ambiguë et secrète;

Peu ressentent, je crois, l’envie de détecter.

 

Les muses continuent, fidèles et discrètes,

À répandre la joie et l’émerveillement.

Leurs élus inspirés, les accueillant, les fêtent,

 

Transcrivent leurs propos dans le recueillement.

 

21/9/2005

 

 

 

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Qu'il est difficile d'éditer en couleurs !

Peu après que nous ayons lu nos textes en la Médiathèque de Gruissan, mon ami l'écrivain Christian PASTRE et moi-même Michel SIDOBRE, j'ai été contacté par le photographe qui exposait ses belles photos lors de notre passage...

12272766288?profile=originalMon ami Christian PASTRE

 

 

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Michel SIDOBRE

 

12272766653?profile=originalLe photographe Bernard GUILLAUME


Il voulait publier un choix des plus significatives de cette zone humide, près de la mer, aux multiples étangs.

Je n'étais pas contre y poser quelques textes mais je l'avertis bien vite que la quadrichromie n'a pas de prix...

Il ne tarda pas de s'en apercevoir et les 3500 euros demandés pour 1000 exemplaires - ce qui n'est d'ailleurs pas excessif - ne convenaient pas à nos modestes économies.

Cherchant des sponsors pour " Gruissan, sang et eau ", titre que j'avais posé, il me vint alors à l'idée, en gardant mes textes, d'essayer de trouver des sponsors en demandant à mon ami le réalisateur Gilbert CORBIERES, de créer un petit film que je baptisais " Être de passage "...

Je contactai les Autoroutes du Sud de la France, SITA Sud, en pure perte.

Le livre n'existe qu'à une dizaine d'exemplaires ! Même la Mairie de Gruissan qui m'avait commandé il y a quelques années " Gruissan la fleurie, l'Île aux Pêcheurs " avec les dessins du réalisateur Vincent DIDEROT, à 1000 exemplaires a fait défaut, par contre elle a passé ce film cet été sur la Place de l'Eglise.

 

Le film avec les textes du livre:

 

 

La couverture du livre: (auto-édité par Bernard GUILLAUME)

 

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Je pense que, malheureusement, l'histoire de ce livre est finie!


 


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administrateur théâtres

12272764654?profile=originalDu 22 septembre au 22 octobre 2011

Le tour du monde en 80 jours au Théâtre royal du Parc

Day ONE « Phileas Fogg était de ces gens mathématiquement exacts, qui, jamais pressés et toujours prêts, sont économes de leurs pas et de leurs mouvements. Il ne faisait pas une enjambée de trop, allant toujours par le plus court. Il ne perdait pas un regard au plafond. Il ne se permettait aucun geste superflu. On ne l'avait jamais vu ému ni troublé. C'était l'homme le moins hâté du monde, mais il arrivait toujours à temps. Toutefois, on comprendra qu'il vécût seul et pour ainsi dire en dehors de toute relation sociale. Il savait que dans la vie il faut faire la part des frottements, et comme les frottements retardent, il ne se frottait à personne. »

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Une introduction qui donne le ton. Ironique en diable. Tout l’art de Jules Verne sera de démonter, rouage par rouage la belle mécanique de cet homme imperturbable et froid (Alain Leempoel) où nul grain de sable ne peut - en principe - se glisser. Mais que se passera-t-il  à la fin, en vertu des grands sentiments ?  Sous ses dehors de   séduisant gentleman cambrioleur, le sire est raide et  triste, et il nous fait franchement rire aux éclats.

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 La représentation théâtrale qu’en fait Thierry Debroux  est un spectacle de grand  Guignol explosif, pour grands et petits,  à la fois majestueux et pétillant de malice, et suspendu entre deux époques, toutes deux délirantes.  Chacun y trouvera son compte. Il y a des paroxysmes d’inventivité et de volubilité, sinon de haute voltige.   Il faudra attendre la chute  de  la prodigieuse histoire pour connaître la chute du héros de marbre de son socle d’impassibilité. Mais en attendant le dénouement bien connu, quel plaisir des yeux, grâce à la valse incessante des décors extraordinaires et aux mouvements spectaculaires  des comédiens, quel plaisir  des oreilles pour l’esprit qui suit avec délectation et bonheur les  mille et une réparties, allusions comiques, dialogues extravagants, sauces locales, fumets exotiques, connotations musicales subtiles ou satiriques, et autres anachronismes qui fusent  en continu de la bouche des comédiens.

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Othmane Moumen  est fascinant dans son rôle de Passepartout. Il est partout à la fois aussi coquin qu’un écureuil en délire.  La joute  perpétuelle entre Jean Passepartout (« Je suis français ! ») et le détestable flic Monsieur Fix (Stéphane Fenocchi) est pur divertissement théâtral : des héros à la manière de David et Goliath. Cela fait immanquablement plaisir de voir le petit se jouer du géant ! On aura donc  fait le plein de bonne humeur et de rire en attendant que le personnage principal daigne enfin se dérider, grâce au Miracle Féminin. Ce Miracle Féminin qui tout d’un coup déboule dans ce club exclusif et très sélect uniquement réservé aux hommes  fera définitivement exploser la notion du temps au profit de celle de l’amour. Adieu aux  montres, horloges et clepsydres de malheur! C’est  Jasmina Douieb dans le rôle d’Aouda, princesse des planches.  12272766259?profile=original

Moralité : Avoir une princesse indienne dans ses bagages  ne nuit pas !

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Day LAST « Ainsi donc Phileas Fogg avait gagné son pari. Il avait accompli en quatre-vingts jours ce voyage autour du monde ! Il avait employé pour ce faire tous les moyens de transport, paquebots, railways, voitures, yachts, bâtiments de commerce, traîneaux, éléphant. L'excentrique gentleman avait déployé dans cette affaire ses merveilleuses qualités de sang-froid et d'exactitude. Mais après ? Qu'avait-il gagné à ce déplacement ? Qu'avait-il rapporté de ce voyage ? Rien, dira-t-on ? Rien, soit, si ce n'est une charmante femme, qui - quelque invraisemblable que cela puisse paraître - le rendit le plus heureux des hommes ! 

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En vérité, ne ferait-on pas, pour moins que cela, le Tour du Monde ?  »  

 

http://www.theatreduparc.be/spectacle/spectacle_2011_2012_001

 

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Sur mon chemin

 

Sextine

 

La pluie était sur mon chemin,

Mettait des larmes sur mes joues;

Je sentais comme des caresses.

Je l’ai accueillie en chantant.

Peu pressée de rentrer chez moi.

Je trottinais, l’âme ravie.

 

Je me sentais soudain ravie,

En éveil sur mon chemin,

Ayant laissé l’ennui chez moi.

Des gouttelettes sur les joues,

J’avançais, seulette en chantant.

Les vers aussi étaient caresses,

 

Émouvants, devenaient caresses.

Les prononçant, j’étais ravie,

Me sentais jeune, allant chantant.

J’ai toujours chanté en chemin,

Souvent, du soleil sur mes joues,

Pourtant de la tristesse en moi.

 

Quand l’espoir s’éloigne de moi,

Les mots fervents sont des caresses.

Semblent se poser sur mes joues.

Si ne suis nullement ravie,

Suivant les détours du chemin,

Je me distrais, allant chantant.

 

Me console aussi en chantant.

Les vers ont cet effet sur moi.

Parfois sur un rude chemin,

J’ai pu retrouver les caresses,

Du temps où je vivais ravie,

Sentir leur douceur sur mes joues.

 

La pluie rafraîchissant mes joues

J’avançais, toujours en chantant.

Me sentant légère, ravie

Rêveuse, en retournant chez moi.

Or me prodiguant ses caresses,

La pluie restait sur mon chemin,

 

Caresses qui frôlaient mes joues.

Sur ce chemin, j’allais chantant,

Retour chez moi, certes ravie.

 

25 novembre 2010

 

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Le choix de la sextine

 

Monsieur le comte de Gramont

Dont l’humeur fut peu libertine,

Mettait des propos en sextines

Privilégiant la forme au fond.

 

Il mariait six mêmes mots

En scabreuses unions intimes

Et ne se servant pas de rimes,

Mettait l’harmonie en défaut.

 

Seulement trois terminaisons

Jouant le rôle d'assonances

Conduisent à la somnolence

En l’absence de la raison.

 

Ce poète talentueux

Releva certes des défis;

La sextine pourtant ne fit

Que peu d’émules aventureux.

 

23 juin 2010

 

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administrateur théâtres

 

12272763279?profile=original« La source des femmes» sortie en Belgique le 9 novembre (avant- première aux Beaux Arts de Bruxelles le 5 octobre)

 

Fils d'un journaliste juif déporté et sauvé Radu Mihaileanu  est né à Bucarest en Roumanie le 22 Avril 1958. A  22 ans, il fuit le régime politique de son pays et s'installe en France.  Il signe en 1992 son premier film, Trahir, comme réalisateur et scénariste. Ce film narre le combat d’un individu contre une puissance totalitaire.   Son  deuxième film, Train De Vie reçoit un très bon accueil au Festival de Venise. En 2005, avec Va, Vis Et Deviens, Radu Mihaileanu devient producteur, et remporte le prix du Public et le prix Européen à Paris. Une histoire réelle de réfugiés juifs éthiopiens rapatriés par Israël  dont le protagoniste est un jeune garçon échappé d’un camp de réfugiés au Soudan et  qui réussit à se proclamer  juif et orphelin et est accueilli dans une famille adoptive française en Israël. Ce long-métrage plein d’humanité évoque les problèmes d’intégration, le racisme, les différences culturelles, la perte des racines.  En  2006 il reçoit le César du Meilleur Scénario Original pour ce troisième film. En 2009, Radu Mihaileanu signe la mise en scène du film  Le Concert, long-métrage avec Mélanie Laurent.

 

 Le voici maintenant  à Cannes pour le film La Source Des Femmes présenté en Compétition du 64ème Festival International Du Film De Cannes 2011 avec 5 nominations :

- Palme d'Or (Radu Mihaileanu)

- Grand Prix (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury (Radu Mihaileanu)

- Prix du Jury Oecuménique (Radu Mihaileanu)

- Prix de la Jeunesse (Radu Mihaileanu)

 

Leïla Bekhti et Biyouna  jouent à la perfection le rôle de deux femmes de générations différentes,  qui vont entamer une guerre contre le machisme, l’inégalité profonde des femmes, dans la société médiévale qui sévit dans ce petit village marocain sans eau et sans électricité. Du Maroc à L’Afghanistan c’est dans doute le même combat : une révolution à accomplir. Parfois une étincelle, infiniment petite,  suffit à allumer un brasier de changements.  Elles sont déterminées, malgré l’opposition de quelques unes et la crainte justifiée de leurs maris.   Elles veulent dénoncer des pratiques qui n’ont rien  à voir avec l’Islam, mais tout à voir  avec cette supériorité masculine atavique, le corvéage sans merci des femmes, les mariages forcés à un âge indécent,  le droit de les violer, de les répudier, de les battre et de leur refuser l’accès à l’éducation… sous prétexte de sorcellerie.

L’idée géniale de ces femmes  c’est  donc de faire la grève del'amour et du sexe tant que les hommes ne s’arrangeront pas pour amener de l’eau au village. Eux qui  forcent leurs femmes à se transformer en bêtes de somme, pour transporter tous les jours, l’eau que l’on ne peut trouver qu’à une source perdue dans la montagne, n'imaginaient pas qu'un jour elles puissent se rebeller et trouver un tel moyen de pression.

Les porteuses d’eau se sont épuisées sur les chemins arides de ce pays « où coule une source d’eau qui  se tait. » Au propre et au figuré. « Mais l’eau  qui apporte la vie emporte aussi  la vie, déplore l’une d’entre elles, qui a malheureusement glissé et  perdu  sur le chemin caillouteux, le bébé qui allait naître.  Et le cœur des hommes est sec et sans amour,   à cause du chômage et de la sécheresse de l’environnement. Les conditions de vie font qu’ils  ne participent plus du tout à la vie économique du village et se prélassent à ne rien faire.  Cela doit changer. Le village est en train de mourir, il s’agit de survie, comme de celle des infiniment petits, ces insectes en voie de disparition  qu’un entomologiste au cœur aussi sec que le leur,  est venu étudier sur place.

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Le film s’accomplit comme une sorte de conte, fourmillant d’humour, d’inventivité, non sans rappeler celle des mille et une nuits. La danse, le chant lancera la première offensive. Les hommes sirotant leur thé à une terrasse seront ahuris devant la montée des exigences qu’ils nommeront aussitôt sacrilèges et se défendront bec et ongles pour garder leurs privilèges. Le ton est malicieux, déterminé, dicté par l’amour et non par la tradition. Les femmes sont généreuses, belles, pétillantes d’intelligence et armées de courage, comme dans un conte. Les images sont superbes, le cœur du spectateur se nourrit de l'allégresse communicative de ces femmes qui croient à la justice de  leur combat.  

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Tout le propos du film sera celui d’une source d’eau qui parle et se fait entendre, enfin. Et la source des femmes, c’est l’amour, qui lui aussi doit se faire entendre, enfin. L’être humain n’est pas fait pour vivre à genoux et est capable de merveilleux. Voilà pour ce conte oriental réaliste et contemporain de l'infiniment petit. Comme les femmes le disent dans l’histoire, «  beaucoup de fourmis tirent un lion ». Le lion c’est l’histoire de l’humanité.

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Un toit là-bas

 Chers amis

  J'ai enfin retrouvé un poème dont je n'ai jamais cessé de réciter quatre vers particulièrement harmonieux et émouvants.

Je pense que vous le recevrez avec plaisir.

Un toit, là-bas

Oh ! la maison perdue, au fond du vieil hiver,
Dans les dunes de Flandre et les vents de la mer.
Une lampe de cuivre éclaire un coin de chambre ;
Et c'est le soir, et c'est la nuit, et c'est novembre.

Dès quatre heures, on a fermé les lourds volets ;
Le mur est quadrillé par l'ombre des filets.
Autour du foyer pauvre et sous le plafond, rôde
L'odeur du goémon, de l'algue et de l'iode.

Le père, après deux jours de lutte avec le flot
Est revenu du large, et repose, là-haut ;
La mère allaite, et la flamme qui diminue
N'éclaire plus la paix de sa poitrine nue.

Et lent, et s'asseyant sur l'escabeau boitant,
Le morne aïeul a pris sa pipe, et l'on n'entend
Dans le logis, où chacun vit à l'étouffée,
Que ce vieillard qui fume à pesantes bouffées.

Mais au-dehors,la meute innombrable des vents
Aboie, autour des seuils et des auvents ;
Ils viennent, d'au-delà des vagues effarées,
Dieu sait pour quelle atroce et nocturne curée ;

L'horizon est battu par leur course et leur vol,
Ils saccagent la dune, ils dépècent le sol ;
Leurs dents âpres et volontaires ragent et s'acharnent si fort
Qu'elles mordraient, jusqu'au fond de la terre, les morts.

Hélas, sous les cieux fous, la pauvre vie humaine
Abritant, près des flots, son angoisse et sa peine !
La mère et les enfants, et dans son coin, l'aïeul,
Bloc du passé, debout encor, mais vivant seul,

Et récitant, à bras lassés, chaque antienne,
Cahin-caha, des besognes quotidiennes.
Hélas! la pauvre vie, au fond du vieil hiver,
Lorsque la dune crie, et hurle avec la mer,

Et que la femme écoute, auprès du feu sans flamme,
On ne sait quoi de triste et de pauvre en son âme,
Et que ses bras fiévreux et affolés de peur
Serrent l'enfant pour le blottir jusqu'en son coeur,

Et qu'elle pleure, et qu'elle attend, et que la chambre
Est comme un nid tordu dans le poing de novembre.


Émile Verhaeren
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CE CRI DANS LA NUIT...

C'est un cri de douleur,

de révolte, de colère!

Pour conjurer sa peur...

 

C'est un cri d'impuissance,

de vérité, de détresse!

Il cherche l'espérance...

 

C''est un cri comme un appel,

salubre, fier et libre!

C'est celui des rebelles...

 

C'est un cri qui fait honte,

car il est si banal!

Mais dans le soir, il monte...

 

C'est un cri dispersé

Envahit par l'écho!

D'un monde désespéré...

J.G.

 

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administrateur théâtres

ADULTERES de WOODY ALLEN Au théâtre Varia

ADULTERES de  WOODY ALLEN  Au théâtre Varia

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Woody Allen n'a pas fait que des films : il a aussi écrit des pièces de théâtre. Voici deux de ses  intrigues mises en scène par Marcel Delval. Du 4 au 27 octobre 2011 à 20h30 sauf les mercredis à 19h30 - relâche les lundis et dimanches. CREATION au Grand Varia.

Avec: Bernard Cogniaux, Joséphine de Renesse, Pierre Dherte, Alicia Frochisse, Marie-Paule Kumps, Valéry Massion, Hélène Theunissen.

 « Pour inaugurer la saison, nous avons choisi de rire de nous-mêmes, de nos hypocrisies et de nos convenances, de nos hautes trahisons, de nos petites lâchetés et même de nos cruautés, avec la création de ADULTERES de WOODY ALLEN, un spectacle au titre explicite, composé de deux courtes pièces mises en scène par Marcel Delval. Une fantaisie évidemment névrotique, un rien féroce, un brin impitoyable et bien truculente. »

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Un thème, deux variations :

Part 1 : ‘Central Park West’
Les Riggs ont une adresse des plus chics. Sauf que leur appartement, où l'épouse, Phyllis exerce en tant que psychanalyste, est sens dessus dessous : dans la bagarre conjugale avec Sam, une statue ethnique a même perdu son pénis démesuré...  C’est le soir et arrive Carol la meilleure amie. The best friend. Confrontation. Trahisons en séries, violents règlements de comptes, vacheries vengeresses, dialogues de sourds,  écarts de parole,  déballages conjugaux sordides s’échapperont au fur et à mesure de cette boîte de Pandore d’un genre très connu : l’Adultère.

 Un thème éculé, revisité des milliers de fois par le vaudeville classique et contemporain. Cette fois-ci, les huit comédiens  nous ramènent sans ménagements au  fond de platitude  qui sous-tend les relations adultérines. Plus d’un se sentira gêné. Si dans la vie d’aucuns osent se fourvoyer dans les buissons de la passion extra conjugale,  le théâtre met totalement  à nu et pointe le sordide et souligne le  caractère éphémère de l’Amour ! Répandues au sol la jeunesse et la passion premières. Renversés les élans d’amour et la tendresse, remplacés par des amours furtives et coupables. 

 La jeune Juliet  (Alicia Frochisse) sortie-d’on-ne-sait-zou est un véritable pavé dans la mare qui crée une onde de choc encore plus pernicieuse, car plus cynique que tous, du haut de ses presque 18 ans. Et Howard de renchérir : « le mariage c’est la mort de l’espoir ! » Carol garde l'humour: «  Il ne faut jamais coucher avec un juriste, il te coince toujours sur le vocabulaire. »  Les spectateurs, presque assis sur la scène, sans jamais être pris à partie, se sentent impliqués dans cette vague de  tromperie généralisée et la perte d’idéal. Une comédie plutôt amère que douce. Et voir un spectacle sous les feux de la rampe ou dissimulés dans le noir, ce n’est pas la même chose.

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Part 2 :  'Old Saybrook’

Autre lieu: les mêmes acteurs vont rejouer le même thème avec des personnages différents, plus caricaturaux encore, à coups de costumes et perruques extravagantes. Hypocrisie endémique : James Ensor où es-tu ?  Tout lasse, tout passe, … sauf l’Adultère.  Une charmante  petite ville coloniale du Connecticut.  Sheila et Norman ont invité à un barbecue David et Jenny, la sœur de  Sheila qui plaidera: «  A part, le sexe, c’était platonique ! ». La découverte d'un journal intime et l'arrivée des anciens propriétaires  vont corser les fantasmes et animer - élément nouveau, ouf ! - la créativité d’un auteur en mal d’écriture. 

 

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La distribution  des acteurs belges qui se sont amusés follement à interpréter ces deux pièces est impeccable. Soulignons l’interprétation éblouissante et quasi viscérale de Marie-Paule Kumps, le ton olympien d’Hélène Theunissen  et ses rages homériques, et l’inénarrable Bernard  Cogniaux, Howard  le paumé qui retrouve son entrain sexuel loin de sa femme  et Pierre Dherte un beau salaud, très attachant aux dires de ces dames. Marcel Delval (l’écrivain) quant à lui se pointe sur les planches  dans la deuxième variation, comme un deus ex machina et à l’instar de Woody Allen joue un des personnages qu’il a créés. Le coup de théâtre c’est ce  couple  improbable « d’intrus » interprétés par les excellents Joséphine de Renesse et Valéry Massion et qui jouent avec conviction les  bombes à retardement.  La libération de  toutes leurs émotions refoulées  semble tout droit sortie de la foule … des spectateurs. De la vie elle-même, sans l’aide du théâtre, avec les accents confondants du vécu !

 Arrivez les premiers en haut de l’escalier et choisissez les sofas accueillants tout blancs en bordure de chaque côté de la  scène. Non seulement vous aurez un festival de bons mots et de réparties houleuses mais vous serez dans la pure émotion, par la proximité avec les comédiens. Des close-ups comme au cinéma…mais en live, de douze personnages délurés et de huit comédiens totalement investis. 

Que dire si tout cela avait été joué dans l’élan de la  langue originale? Car la traduction a parfois des côtés moins savoureux que l’anglo-saxon  d’origine avec ses intonations subtilement moelleuses. Il y a des mots et parfois un humour difficilement traduisibles, sauf avec une certaine rugosité, qui  finit par écorcher la volubilité et le  rythme!

 

 

Théâtre Varia Rue du Sceptre 78 1050 Ixelles, Belgique  

 

REPORTAGE-VIDEO David Courier et Denis Caudron - Intervenants
- Marcel Delval, metteur en scène

http://www.telebruxelles.be/portail/emissions/les-journaux/le-journal/16087-qsdf

 

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Reviendront-ils un jour les Temps de la Merveille

Où, cieux empanachés sur champ d'or et d'azur

Les hommes étaient grands et belles les querelles ?

Lors, la poésie engendrait l'architecture.

 

Reviendront-ils un jour les monstres et les fées

- divine musique et carrousels d'enfants-rois

Fête des fous et masques et porteurs d'épée

Fêtes-Dieu, folie, sagesse et cheval de Troie ?

 

Le temps en ces temps-là n'était pas si compté

En ces temps où le temps était couleur de l'air

Couleur du ciel - y a-t-il si longtemps ? - Amer

Comput qui dérobes à l'homme ce qu'il a été !

 

Je parle ici de notre siècle, de notre âge

de notre temps, de ces années qui naufragent

Méthodiquement les trèsors du vaste coeur

Les eaux, les bois, nos chasses et nos belles peurs

 

C'était le temps du temps qui tourne en rond, ailleurs

En nos places pavées traversées de jongleurs

Cirque divin, quadrant solaire où convergeaient

Une cohue vivante d'arcanes majeurs

Les lames transversales d'un Tarot français

Et le peuple était magicien, prêtre ou danseur.

 

Reparaîtront-ils point quelque jour en ces bois

En nos lacs, en nos landes, en nos pauvres lieux

Ces poètes divins, la langue de nos rois ?

Oh servir encore le savoir gai et précieux !

 

          "Doulce mémoire en plaisir consommée

           Ô siècle heureux qui causait tel sçavoir

           La fermeté de nous deux tant aymée

           Qui  à nos maulx a sceu si bien pourvoir

           Or maintenant a perdu son pouvoir

           Rompant le but de ma soeure espérance

           Servant d'exemple à tous piteux à voir

           Fini le bien le mal soudain commence."

 

Douce mémoire en plaisir consommée

Ô siècle heureux qui causait tel savoir ...

Serviteurs de l'Epée, du Trône de la Gloire

Puis dans le même temps porte-enseignes du chant constellé

De par votre couronne vous teniez ouverts

Le Temps et l'Etendue, princes du Sagittaire

 

Ô l'heureux siècle mû par des rois troubadours

Couronne dévolue sur le ring de l'Histoire

Initiant l'homme assis sous le porche oratoire

Et par où passait la brise bleutée des jours.

 

Douloureuse mémoire, ô douce et vénérée

Hôtesse enluminée des princes architectes

Le Temps et l'Etendue consonnaient sous le plectre :

L'ordre est inconcevable et le pouvoir donné.

 

Vienne la résurgence, vienne le glaive ardent

Et le fil de l'épée en l'iris coronal

Oser !

Entrer dans le secret, grâce de solitude

Se laisser dénuder et traverser le mal

Cesser de croire aux mythes de la multitude

 

Errant et maquisard reconverti poête

Mais poête du large, tantôt pauvre et prophète

Tantôt clochard et roi

Entendre cette voix

Cassée, brisée, perdue

Folle mais rendue peut-être

Comme légère et sombre par la douleur et la vraie joie.

 

Reviendront-ils un jour les Temps de la Merveille

Et de la joie profonde ?  Il est tard, je sens bien

Que nous l'avons perdu le mot du monde ancien

Les portes en sont closes. Le temps des assassins

Est sur nous. Aveuglés nous sommes leurs pareils !

 

Ils sont les accroupis de la lourde catin

Et la face noyée aux aisselles des foules

Ils béquillent aux trousses de l'épaisse houle

Qui aimante le peuple en cinglant ses instincts.

 

Et pourtant qu'est-ce du souvenit et de réminiscence

Le pressant espoir

Qu'est-ce de n'avoit goût à poursuivre qu'en faisant mémoire

Racines de l'enfance

Pourquoi transmettez-vous cette clarté vermeille

Reviendront-ils un jour les Temps de la Merveille ?

 

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Poésie,

Dentellière avec les mots,

finesse et blancheur,

soie précieuse,

poésie pour ce visage

mélangé aux nuages,

au soleil à toutes les

pluies du monde.

Indistinct, pâle et bleu.

Terre plus légère que l'air,

par la mer inondée,

familière.

Par vagues bruissantes,

interminables, l'écriture

avance,s'aventure, m'impose

ses marées claires ou sombres,

son rythme respiratoire, ses

rendez-vous courts ou longs,

immédiats, sans délais !

Oh serait-ce à nouveau vous,

encore et toujours ?

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Un flot de joie

 

En hommage à Thomas Tranströmer

 

À l’ère de la transcendance,

D’éblouissantes performances,

L’art nouveau provoque l’esprit,

Mais l’âme, lassée, dépérit.

 

Une nouvelle me surprend,

Lors, un flot de joie se répand.

La gloire échoit à un poète.

Je participe à cette fête.

 

La littérature distrait;

La poésie, vibrante, vraie,

Harmonie, qui nous émerveille,

Est une manne sans pareille.

 

6 octobre 2011

 

 

 

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Un peu de belge pour mes amis belges

« Li Vî Bon Dju* ».


Tancrémont, le 18 avril 1880.

Mon cher fils,

A toi qui es si loin aujourd’hui pour effectuer ton service militaire, il faut que je raconte une bien bonne qui m’est arrivée la semaine dernière.
Comme le printemps me semblait bien tôt cette année, je me suis décidé à enfin défricher le champ près du petit bois de Jolimont. Cela faisait des années que j’y pensais et que je reportais toujours ce travail. Mais maintenant que tu vas bientôt revenir parmi nous au prochain automne, il m’a semblé qu’il était temps d’agrandir notre surface cultivable puisque nous serons bientôt deux à nous en occuper. Et puis, je suppose que tu fonderas aussi une famille. Si j’en crois les rumeurs, il paraît que tu écris souvent à la fille du Gaston Deckers depuis ton départ. Tu aurais pu plus mal tomber, car elle est bien mignonne, gentille et dure à la tâche, vu l’exemple de sa mère qui n’est pas feignasse non plus.
Bref, je monte vers le champ de Jolimont avec les deux bœufs et je me mets à retourner la terre. Quel ouvrage ! Tu te doutes bien que, depuis le temps qu’il était en friche, il y en avait des pierrailles et des souches à enlever ! Le soleil brillait fort pour un début de mois d’avril et je transpirais sous l’effort. Mais le travail avançait bien, quand le fer de la charrue a buté contre un obstacle plus important. Une grosse pierre camouflée sous des mousses, que je n’avais pas vue. Une pierre bien plate, comme celles que les druides élevaient autrefois dans nos campagnes, sauf que celle-ci, elle était un peu enterrée dans le sol. Il m’a fallu bien des efforts, et aux bœufs aussi, pour arriver à la déterrer puis à la pousser au bord du champ. Les douze coups de midi avaient sonné quand j’ai pu me relever et je suis alors rentré manger pour refaire mes forces.
L’après-midi, après la sieste, je suis retourné au champ, pensant avoir effectué le plus gros du travail. Nenni ! J’avais à peine relancé l’attelage que le fer bute de

*Le Vieux Bon Dieu.
nouveau contre un obstacle, au même endroit où j’avais eu tant de mal à enlever la pierre. Tu me connais, mon fils : j’ai juré tous les jurons que je connaissais et même peut-être d’autres que j’inventais pour l’occasion ! Maintenant, je le regrette car, devine ce que j’ai déterré au bout de deux jours d’efforts ? « Li Vî Bon Dju » de Tancrémont que tout le monde croyait perdu depuis l’époque de Napoléon !
Enfin, c’est ce que Monsieur le curé a dit quand il a vu ma trouvaille. Parce que je l’ai appelé quand j’ai vu la taille de la croix, plus de deux mètres, et du corps, presque aussi grand, fixé dessus. En chêne bien dur, la croix, et le Jésus, si je ne me trompe pas, en bois de tilleul. C’est une affaire à te fausser un soc, mais ma charrue est solide et a tenu le coup.
Je me doutais bien que c’était une affaire de curés, ça ! Mais je n’imaginais pas le ramdam que ça allait provoquer… D’abord, tous les Bons Pères de l’abbaye sont accourus. Normal, c’est leur fond de commerce que j’avais exhumé ! Puis on a vu arriver tous les haut gradés de l’Eglise, les sous fifres d’abord, les importants après. Même Monseigneur l’Evêque s’est déplacé avec toute sa suite en longues robes brodées d’or, croix en or, bagues en or, que je n’avais jamais vu autant d’or réuni de toute ma vie ! Car il me fallait assister à toutes ces cérémonies, et raconter à chaque fois, pourquoi, quand, comment, où, … Finalement, ils ont amené une charrette et l’ont emporté vers l’ancienne chapelle de Tancrémont, leur « Vî Bon Dju », pour un peu le renettoyer et le remettre enfin à sa place. Je dis l’ « ancienne chapelle » parce qu’on parle déjà d’en construire une nouvelle où on pourra venir en pèlerinage.
Enfin, moi, j’en suis quitte ! Et j’ai pu finir de retourner mon champ bien tranquillement. Je ne sais pas encore ce que je vais y semer. Je vais laisser reposer la terre cette année et nous en discuterons lorsque tu seras rentré. De toute façon, la terre doit être bénie, vu le locataire qu’elle a hébergé, et tout devrait bien y pousser.
Voilà, mon fils toutes les nouvelles d’ici. Ta mère va bien, moi aussi, et j’espère qu’il en est de même pour toi.
Ton père,
Eugène Hawaux.






Liège, le 14 mai 1880.

Très Saint Père,

C’est avec beaucoup d’émotion que je viens vous faire part de ce qu’il faut bien appeler un miracle qui s’est produit dans mon diocèse. Je vous explique les faits qui sont advenus le mois dernier.
Mais, pour rappel, je vais vous faire un petit historique du pèlerinage de Tancrémont, petite localité près de Pepinster, en province de Liège. Depuis des siècles, on vient y prier devant la Croix de ce que les gens d’ici nomment « Li Vî Bon Dju », c’est-à-dire « Le Vieux Bon Dieu ». Pourquoi l’appelle-t-on ainsi ? Nul ne le sait, mais le nom est resté chez les habitants un peu frustres de la région. Une communauté religieuse s’est créée autour du lieu saint où était exposée la Croix et s’est développée avantageusement jusqu’à ce que les guerres napoléoniennes viennent perturber le calme de la campagne environnante. Vous n’êtes pas sans savoir, Très Saint Père, que les soudards de l’empereur se sont souvent rendu coupables de nombreuses exactions, notamment envers les prêtres et les moines.
Apeurés par l’approche des troupes françaises, les pères de Tancrémont ont alors décidé de soustraire « Li Vî Bon Dju » aux mauvais traitements qui pourraient lui être infligés. Ils l’ont donc enterré dans un champ assez éloigné de l’abbaye, et l’ont recouvert d’une énorme pierre que l’on ne pourrait pas déplacer facilement.
Ce qu’il s’est passé alors, je n’en sais trop rien. Les moines eurent-ils à subir les violences des reîtres impériaux ? Ont-ils dû fuir ? Ont-ils péri ? Nul ne les revit jamais à Tancrémont et ce fut une nouvelle communauté religieuse qui se fonda quand le calme fut revenu dans la région. Les habitants se doutaient que la Croix avait dû être préservée dans un endroit secret, et de nombreuses légendes circulaient autour de sa présumée cachette. Mais, jusqu’il y a peu, personne ne l’avait retrouvée.
Ce n’est que le mois dernier qu’un paysan, un certain Hawaux, en retournant une terre restée longtemps en friche, a déterré la Sainte Croix de Tancrémont. Bien protégée par la pierre qui la couvrait, enfouie dans un terrain argileux et, surtout grâce aux matériaux nobles dont elle est composée, la relique a étonnamment bien résisté à ces longues années passées sous terre. Après un nettoyage sommaire, elle pourra reprendre sa place dans la petite chapelle du lieu-dit.
Seules les couleurs qui l’ornementaient ont eu à pâtir de l’humidité. Il faut vous dire, Très Saint Père, que le Christ est revêtu d’une tunique droite et plissée. Les experts de l’Université de Liège appellent cela un colobium. Toujours d’après ces hommes savants, elle porte des traces de couleurs polychromes qui laisseraient supposer qu’au départ, le colobium imitait un tissu byzantin vert à motifs ovales rouges. Mais les couleurs sont aujourd’hui tellement délavées qu’il n’en reste pratiquement plus rien.
Et j’en arrive à l’objet de ma longue épître. Devons-nous envisager de restaurer plus avant « Li Vî Bon Dju » de Tancrémont ou est-il préférable de le laisser dans son état actuel, avant de le soumettre à l’adoration des fidèles ? Une telle responsabilité de décision dépasse mes simples prérogatives et mes compétences au sein de mon épiscopat. J’en appelle donc à votre sagesse et à votre sainte sagacité pour me dire quelle doit être la voie à suivre en cette occurrence.
Je voudrais également vous signaler que la presse locale et le bouche à oreille ont tellement parlé de la découverte miraculeuse, que les pèlerins se sont remis à affluer à Tancrémont. La chapelle du hameau, en mauvais état d’ailleurs, est devenue bien trop petite pour abriter tous ces croyants. Cela pose problème car la région est soumise à de rudes conditions climatiques qui requerraient une protection plus adéquate pour tous ces braves gens. J’envisage donc de faire bâtir une nouvelle chapelle plus adaptée à l’afflux massif de populace. Hélas, Très Saint Père, vous connaissez l’état des finances de mon diocèse. Je ne pourrai pas faire face, seul, aux frais inhérents à un tel projet. Je vous demande donc humblement si vous pourriez débloquer des fonds pontificaux pour m’aider dans mon entreprise.
Je prie chaque jour pour la gloire de notre Sainte Mère l’Eglise et pour le salut de son Représentant ici-bas, votre Sainteté le Pape de tous les croyants.
Votre évêque de Liège,
Albert Van Zuylaan.







Tancrémont, le 29 août 1880.

Ma chère Henriette,

Je ne sais pas si tu en as entendu parler dans ta grande ville, mais il s’en est passé des choses depuis ta dernière visite. Souviens-toi, nous avions beaucoup discuté, moi surtout, de mon commerce qui menaçait de tomber en faillite. Depuis des années, il vivotait grâce aux samedis et dimanches, quand les jeunes gars du pays venaient s’y retrouver, se payer un peu de bon temps en descendant pas mal de bière pendant qu’ils jouaient aux quilles, au couyon ou aux fléchettes. Mais pendant la semaine, je voyais très peu de monde. Quelques bûcherons, des promeneurs altérés par la marche, parfois un colporteur ou un voyageur de commerce en quête de réconfort. Cependant, cela ne faisait pas assez de recette pour faire vivre un jeune couple. Si bien que mon Firmin avait été obligé de partir chercher du travail dans une filature de Verviers et ne rentrait à la maison qu’en fin de semaine pour me donner un coup de main. Ce n’est pas une vie pour des jeunes mariés !
Depuis le mois d’avril, tout a bien changé. Figure-toi que le vieil Eugène Hawaux, celui dont le fils te plaisait tellement mais qui a préféré l’Amélie Deckers, donc l’Eugène qui défrichait un champ près du bois de Jolimont, a retrouvé « Li Vî Bon Dju » qu’on croyait perdu à tout jamais et que certains disaient même que c’était une légende, une histoire du curé pour attirer du monde dans son église. Et bien, pas du tout ! C’était bien vrai qu’il avait été enterré puisqu’on l’a déterré !
Et depuis, c’est le branle-bas dans le hameau ! Le défilé des gens importants n’arrête pas. D’abord tous les prêtres des villages alentour, puis des plus importants, puis même leur chef de Liège, l’évêque. Des savants de l’université se sont déplacés pour examiner la croix. Le gouverneur de la province est venu prononcer un beau discours devant les paysans du coin qui n’ont pas compris grand-chose à ce qu’il disait mais ont bien applaudi quand même. Des beaux messieurs en habit et chapeau haut de forme, accompagnés de leurs épouses en grand tralala, avec bijoux, fourrures, capelines emplumées, fins escarpins, et de leurs enfants tellement endimanchés qu’on aurait cru de jeunes communiants, tout ce monde se précipitait à Tancrémont pour pouvoir dire dans leurs réceptions « J’y étais ! ». Puis sont venus les plus humbles, les gens du peuple qui voulaient se recueillir et prier devant le Bon Dieu miraculeusement réapparu.
Comme la chapelle était devenue trop petite pour accueillir autant de monde, la plupart se faisaient mouiller par la pluie, décoiffer par le vent ou rôtir par le soleil. Et chacun alors s’arrêtait dans ma buvette pour se désaltérer et reprendre des forces en vue du retour. Je ne savais plus où donner de la tête et, très vite, Firmin a dû quitter son emploi à Verviers pour m’aider à servir toute cette foule. Mais, même à deux, nous y arrivons à peine. C’est pourquoi je viens faire appel à toi aujourd’hui. Tu m’avais confié que tu n’aimais pas ton travail de bonne au service de bourgeois arrogants, prétentieux, exigeants, et qui ne te payent qu’un misérable salaire. Si le cœur t’en dit, je te propose de revenir au pays travailler avec nous. Je sais que je pourrai te faire confiance puisque nous nous connaissons depuis notre enfance. Tandis que si j’engageais une inconnue, je devrais me méfier et la surveiller pendant toute la journée. Ce qui me ferait perdre mon temps.
Il y a une autre raison pour laquelle j’ai pensé à toi. L’autre jour, une petite vieille toute mignonne qui sirotait une citronnade, m’a demandé : « Tiens, vous ne servez plus des portions de la tarte au riz qui m’avait laissé un souvenir inoubliable quand j’étais gamine ? ». J’ai bien été obligée de lui avouer que non, mais que j’envisageais de m’y remettre prochainement. Le problème, c’est que moi, je ne sais pas faire la tarte au riz ! Mais je me rappelle les tartes que ta maman confectionnait, larges comme des roues de charrettes, qui laissaient s’écouler un peu de bonne crème aux oeufs quand on les entamait au couteau, dont l’arôme vanillé qui s’en échappait alors chatouillait les narines et parfumait déjà le palais avant que d’en avoir mangé le premier morceau. J’espère qu’elle t’a légué sa recette et que je pourrai régaler mes clients comme je l’ai promis. Et, qui sait ?, peut-être que Tancrémont deviendra un jour aussi célèbre pour sa tarte au riz que pour son « Vî Bon Dju »…*
Voilà, ma chère Henriette, la proposition que je viens te faire aujourd’hui. Si tu es d’accord, tu viens dès que possible. Le plus tôt sera le mieux ! Tu n’as pas besoin de me prévenir : tu arrives et on s’y met tout de suite ! De toute façon, ta chambre est déjà prête…
A bientôt, je l’espère. Ton amie qui t’attend avec impatience,
Clotilde Charlier.
*C’est un peu ce qui est arrivé : si vous dites « Tancrémont » à des habitants de la province, ils vous répondront neuf fois sur dix « Tarte au riz ».

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