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raison (4)

administrateur théâtres

...La réponse à l'énigme? c’est l’Homme! 

La tragédie du savoir et de la fatalité commence lorsqu’Œdipe apprend que la peste qui sévit dans la ville de Thèbes cessera dès que la mort de Laïos sera vengée. Œdipe a été recueilli par un berger et confié à Polybe roi de Corinthe et sa femme Mérope. Mais à l'âge adulte, ignorant de sa véritable naissance, lors d'une rixe, il apprend qu'il est un enfant trouvé. L'oracle de Delphes lui révèle alors qu'il tuera son père et couchera avec sa mère. Craignant pour les siens, il ne rentre pas à Corinthe et c'est sur le chemin de Thèbes qu'il rencontre Laïos, qu'il tue suite à une violente querelle. Œdipe sauve alors la ville de Thèbes de la voracité du Sphinx en répondant à sa fameuse énigme. Les Thébains reconnaissants donnent en mariage à Œdipe la veuve de Laïos et Œdipe devient roi, Turannos en grec ancien. Mais  voilà que la peste ravage la cité. Œdipe, à la fois juge et coupable,  décide de tout faire pour sauver son peuple et punir  le meurtrier. Cela passera par son sacrifice car le destin est inexorable. Ainsi que le chante le chœur, « le Temps qui voit tout, malgré toi t'a découvert!». Tout est joué d’avance. Merveilleusement, par le Théâtre en Liberté.  

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Œdipe est le lieu de recoupement entre grandeur et misère, image de notre condition humaine, une condition tragique. C’est  dès la première scène déchirante, un homme de compassion, mais le héros n’a aucune prise sur le Destin scellé par les Dieux. Il souffre avec majesté, stoïquement courageux et désespéré devant les malheurs et les révélations qui s’accumulent. Thèbes est l’image pour Sophocle (411 av. JC) de sa ville d’Athènes profondément divisée contre elle-même, en proie aux guerres, victime de scandales et procès avant-coureurs de catastrophes, en butte à a crise morale et politique d’une démocratie décadente. Qu’ajouter de plus ? Ceci ne vous fait-il pas penser à notre Europe ?

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Et la force théâtrale extraordinaire de la juste mais inutile colère d’Œdipe est là pour nous émouvoir au plus profond de nous- même, en tant qu’individus et en tant que citoyens. Daniel Scahaise, dont c’est la dernière mise en scène pour le Théâtre des Martyrs, à l’issue d’une formidable carrière,  est passé maître dans l’adaptation du théâtre antique à la scène contemporaine. Fluidité, fidélité au texte, humour, humanité, respiration tragique, tout y est. « Œdipe, C’est l’homme par excellence, celui qui se heurte au chaos de la vie et qui tombe le plus bas. Comme Antigone, il représente le parcours du combattant humain. Ils font tout pour trouver un chemin lumineux, et ils se ramassent tous les embruns, tous les écueils, mais ils se relèvent, ils font front. » On est devant une fête spirituelle de l’humanisme.

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Le contexte rituel et la présence du chœur, regard et parole  publique démultipliée,  renouent avec les sources du théâtre antique et celles de notre civilisation. Le jeu des lumières, les chants, les percussions, les voix, la flûtiste,  donnent  un  frisson lyrique au drame.  Un rideau transparent balayé par de belles projections poétiques  évoquant le voyage initiatique d’Œdipe, sépare l’espace de l’action et celui de la réflexion. La scène est un espace incandescent, brûlé par une lumière aveuglante parsemée de roches qui évoquent des cités en ruines. Quelques chaises éparses. Au centre un somptueux olivier vivant, lieu de pouvoir, de justice et de sagesse devant lequel s’affrontent les passions et la raison humaines. 

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D’une puissance dramatique extraordinaire,  Créon (Stéphane Ledune), le frère de Jocaste, Œdipe (Christophe Destexhe), Jocaste (Hélène Theunissen), Tirésias (Bernard Marbaix) fonctionnent comme les engrenages d’une machine infernale - selon les mots de Cocteau - dont les tensions et la vérité psychologique ne cessent de monter en crescendo. Brûlante fresque qui marque durablement et profondément. Le couronnement d’une carrière théâtrale de quelqu’un à qui  Jacques De Decker, Secrétaire perpétuel à l’Académie Royale de Langue et de Littérature Française,  voue non seulement de l’amitié mais une  « gigantesque admiration. » ...qui est la nôtre aussi: hommage et Respect.    

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Crédit photos Isabelle De Beir

Du 18 septembre au 31 octobre 2015

Mardi à 19h - du mercredi. au samedi à 20h15 - Samedi 17.10 à 19h - Di 11 & 25.10 à 16h

Avec Maxime Anselin, Barbara Borguet, Isabelle De Beir, Jaoued Deggouj, Daniel Dejean,  

Dolorès Delahaut, Angelo Dello Spedale Catalano, Christophe Destexhe (Œdipe),

Laurine Dombret, Nadège du Bled, Bernard Gahide, Stéphane Ledune, Bernard Marbaix,

Denise Meyskens, Hélène Theunissen, Laurent Tisseyre, Emma Van Wetter, Gérard Vivane

et Antoine Dandoy (Percussions), Christophe Delrée, Jérémy Grynberg, Renata Kambarova (Flûte),

Denis Marcelle, Anthony Molina-Diaz (Elèves du Conservatoire Royal de Bruxelles)

Traduction Bernard Chartreux   Mise en scène et scénographie Daniel Scahaise

Assistanat à la mise en scène Julie Lenain   Musique Originale Daniel Dejean   Création vidéo Vincent Pinckaers

Costumes Anne Compère   Coiffures Laetitia Doffagne   Régie/Lumières Bruno Smit

Un spectacle en collaboration avec la FPGL (Fédération des Professeurs de Grec et de Latin)

Soirée de Gala Œdipe Tyran – Mercredi 30 septembre à 20h15

Participons ensemble au rayonnement de la culture grecque

  

Nous vous proposons une soirée dédiée à la Grèce : Introduction au spectacle par le metteur en scène, représentation d’Œdipe Tyran, dégustation de spécialités grecques, concert de PassaTempo Rebetiko et rencontre avec les comédiens.

25 Eur par personne - Les bénéfices de la soirée serviront à la création d'une bourse d'aide à l'écriture pour un jeune auteur grec. En collaboration avec l'Hellenic Circle de Bruxelles et Free Thinking zone à Athènes.

 Avec le soutien du bureau de l’éducation de l’Ambassade de Grèce en Belgique,

de l’Association des Epirotes de Belgique du Restaurant Strofilia et de Canette Brussels - Greek quality wines.

Réservations sur theatredesmartyrs.be... et au 02 223 32 08

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administrateur théâtres

2549246019.jpgLe théâtre des Martyrs a inauguré sa saison 2014-2015 avec une première performance  du Théâtre en Liberté dirigé par Daniel Scahaise, un spectacle foudroyant de cruauté  qui montre les limites à ne pas enfreindre au risque de payer le prix fort. Difficile de s’en remettre.  L’interprétation est fort traditionnelle comparée à celle de Tom Lannoye dans sa « Mamma Medea » qui était d’une inventivité étourdissante. Ici nous allons patauger dans le drame immonde des protagonistes, faisant face à des remparts de ville méditerranéenne au pied desquels s’affairent des humbles gens des années 30-40. Chapeaux à voilettes, châles. Les tableaux sont particulièrement pittoresques. De jolies jeunes  villageoises en habits noirs pour la plupart. On tresse des fleurs, on brode des paillettes sur des voiles, on plie du linge, des hommes silencieux regardent. Voilà le chœur planté. Il sculptera avec grande fluidité toute la tragédie, faisant émerger une sagesse qui ne peut se nourrir des passions extravagantes. Ah ! Que l’on aime tout ce petit peuple de figurants (élèves du Conservatoire Royal de Bruxelles)!

1550198084.jpgSurvient la Folie personnifiée. Hélène Theunissen, une comédienne chevronnée l’incarne, avec toute la violence dramatique dont elle est capable. La  Médée d'Euripide est déchirée entre son amour pour Jason et sa colère d'être  remplacée par une autre femme. Ses imprécations sont des explosions de rage et de  douleur incontrôlables. Elle renverse échelles et guirlandes. Elle se lamente sur la problématique de l’étranger qui doit faire beaucoup de concessions pour être accepté par la cité où il vit. Thématique qui traverse les siècles. Aussi la magicienne trahie choisira d'accomplir un acte odieux pour toucher Jason au plus profond de son être… Médée, une  terroriste, quoi ! Dont on dira que, bien que  mère criminelle, elle est  une femme courageuse qui s'élève seule contre le pouvoir des hommes. Elle est habile, pleine de mauvaise foi, profite de la moindre occasion pour mettre en œuvre ses sombres desseins, endort les soupçons, ironise, manipule à mort.

3869623297.jpgLes discours  maladroits du  très lâche Jason (un très convaincant Stéphane Ledune) sont  mielleux à souhait et ne manquent pas d’habile hypocrisie. S’il se remarie, c’est… pour protéger ses enfants, dit-il! Pathétique et humain!  Et le chœur de commenter que si Jason a été injuste, nul malheur n’est plus grand que d’être loin du sol natal ! On oublie de dire que la noble  Corinthe a accueilli des fuyards criminels…  

2649291396.jpgMais ce qui passe le moins dans le texte lourd comme du plomb fondu, c’est que la vengeance personnelle prend le pas sur l’amour des enfants. « Tuer les enfants, rien ne ravagera plus mon mari !» Euripide décrit une folie destructrice que tous les Grecs craignaient le plus au monde : la vengeance.  La folie frôle de près le culte de la mort et on revient de ce spectacle fort meurtri. « La passion a eu raison de ma raison » dit-elle en lavant une dernière fois ses enfants aux portes de la ville ! Le feu empoisonné de la vengeance de l’exil et de l’adultère consumera le roi et sa fille. Le peuple en habits de fêtes nuptiales déplore : « Le sort favorise celui-ci, celui-là mais qui est heureux? Personne. Zeus dans l’Olympe organise bien des choses, à l’inattendu, les dieux livrent passage… » Ouf ! La distribution inclut quelques-uns de nos comédiens préférés : Jaoued Deggouj, Bernard Marbaix, Sylvie Perederejew ,Dolores Delahaut. Seul le petit peuple fait un peu de bien dans cette sombre tragédie où les protagonistes, hommes  et femmes  donnent une piètre image de notre condition humaine!

Le mot de la fin revient évidemment au metteur en scène : Nous voudrions, toute l’équipe et moi, que le spectateur suive la représentation comme un acte de foi, qu’il soit aussi inquiet, aussi envoûté, aussi fixé sur l’évènement qu’on lui propose que s’il assistait à un sacrifice. Nous aimerions que le spectateur ne se reconnaisse que dans les sentiments extrêmes, hors de toute contingence quotidienne,  qu’il soit pris dans un kaléidoscope de sentiments violents, comme dans un rituel, à travers les sens, la sensibilité et la disponibilité spirituelle. MEDEE est pour nous, non seulement la tragédie de la vengeance et de l’exil, mais un véritable sacrifice rituel. La cérémonie de la passion déchaînée dans toute sa splendeur. Son horreur absolue.

http://www.theatredesmartyrs.be/index2.html  Jusqu'au 24 octobre

 

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Baudet entre coeur et raison

Si l'esprit humain se découvre dans la résistance qu'offre le réel aux aspirations de l'investigateur, il faut admettre avec toute une séquence de réflexions systématisées par le langage et repérables dans l'Histoire que cet esprit - cette capacité, cette aptitude - se fonde sur le vécu, que l'on peut appeler la sensibilité (die Sinnlichkeit, chez Kant) ou l'émotion. Et c'est la capacité langagière - qui se constate comme un fait - qui transmute cette émotion naïve et spontanée en un discours (le logos des Grecs), et donc ce que la tradition philosophique appelle la raison est une émotion promue à l'état de sentiment exprimable. On pense avec des mots, c'est vrai, encore faut-il que ces mots se rattachent à des significations existentielles préexistantes à la démarche locutrice. On n'exprime que ce que l'on souhaite exprimer (la raison comme fruit du besoin et du désir). La radicalité de la recherche philosophique peut-elle dépasser la dualité ainsi mise à jour de l'Être, découverte déjà par Parménide, magistralement théorisée par Aristote, et plusieurs fois retrouvée - le moi et le non-moi chez Descartes, le phénomène et le noumène chez Kant, la thèse et l'antithèse chez Hegel, la volonté et la représentation chez Schopenhauer, et en somme déjà l'âme et le corps chez les peuples primitifs ? Parce qu'il est impossible de penser en dehors de la dualité, peut-on déduire que rien ne peut exister sans dualité ? Problème éternel : ce que je découvre dans ma conscience existe-t-il dans les choses ? Il faut une scission dans l'Être pour que l'Être devienne Devenir (Hegel). Et si la raison n'est rien d'autre que le sentiment devenu exprimable, cela nous indique que la raison ne s'oppose pas au coeur, mais le contient par sa nature même. Le coeur a des raisons que la raison connaît fort bien ! L'épistémologie est ainsi, depuis Kant, une "esthétique transcendantale", et l'exploration de l'Être est une poésie autant qu'une science.


http://jeanbaudet.over-blog.com/article-baudet-entre-coeur-et-raison-119092056.html

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