« Des vents parfois se lèvent,
Montés de l'extrême orient de notre être.
Ils feulent dans les broussailles de notre coeur,
Dans les gouffres zigzaguant à fleur de nos pensées. »
Sylvie Germain
Un spectacle comme un ovni. C’est Philippe Vauchel qui le prédit et nous file son armée de doutes.
La salle est à l’envers. On traverse le plateau, on s’assied et on regarde le public déferler par le fond du plateau. Les quatre comédiens ont pris la peine d’ôter leurs bottines pour ne pas blesser la forêt ou pour sentir le monde de plain-pied. Ils attendent, assis au bord du chemin, les jambes ballantes. En vertu de leurs semelles de vent, ils ont décidé de vivre perchés et d’y habiter chaque instant. Toucher terre, et toucher l’inaccessible. Philippe Vauchel prend les bois comme on prend le maquis.
Ce tas de charbon ou de graphite, que l’on croit voir au milieu du plateau, au début, c’est pas de la tarte, ni de la tourbe, ni de la litière de lapin, ni ce beau terreau que l’on trouve sous les feuilles, c’est un produit fabriqué pour la scène, extrêmement mobile et volatile. C’est ce que le metteur en scène a trouvé de mieux pour faire l’humus, personnage à part entière. Pour que les quatre joyeux chasseurs de rêves s’y ébattent, s’y adonnent et s’y confondent. Pour y émietter le temps, les pensées et l’espace. Un tas d’humus et d’humeurs qui nous relient tous, hommes, femmes, bêtes, flore, nuages et firmament. Pour dire la fourmilière, pour dire les racines, pour dire là où on se terre, pour dire là où l’on s’enterre. Pour dire le frémissement des humbles plaisirs, pour dire les sombres violences. Pour entonner le chant de la terre: « des vents parfois se lèvent à fleur de nos pensées… »
Et les bois, ce sont d’abord des gazouillis d’oiseaux, des brâmes, les huées des chouettes, des bruits d’angoisse, des bruits de création et de mort, des appels sauvages. Et quelques escabelles pour pendre de la hauteur, jouer aux cimes et plonger dans les profondeurs de la présence du vivant.
Ainsi entre chaque scène de la suite bucolico-surréalistes, on se refait, avec un p’tit café sorti d'un thermos, pris en rang d’oignons, face au public, serrés par la solidarité, serrés par la rage de vivre, serrés par l’angoisse de naître. De vivre. De disparaître. Mais disparaissons-nous vraiment?
Toute la question est là : « Sommes-nous nés ? Vraiment ? »
« L’obscur et la lumière soufflent tour à tour sur la poussière. » On vous suit, chers comédiens, pas à pas, à pas de loups, appâtés par les mille fumets de la forêt humaine…secoués de rires, inondés de bonheur, à la recherche des couleurs de l’invisible.
Ceci n’est pas un spectacle. Ceci n’est pas un ovni ! Et cela se joue à guichets fermés. Avec trois artistes de belle glaise : Anne-Claire, Jean-Luc Piraux et un accordéoniste : Jonathan De Neck ou Didier Laloy.
LE DIRE DES FORÊTS
PHILIPPE VAUCHEL
CREATION FEVRIER 2017
Une forêt. En bordure du monde. À la lisière du Grand Vide. Confinés sur cette parcelle d'humus et de sève, un public, trois comédiens, un musicien. Pour une étrange veillée... Peuplée de typique, de mythique, d'épique, de comique et de cosmique.
Brigitte Petit Pour le Rideau de Bruxelles
+32 (0)471 11 19 47
En raison des prochains travaux de rénovations, le Rideau joue hors les murs. Le Dire des Forêts à lieu à L’Atelier 210.
http://www.rideaudebruxelles.be/diffusion/8-presse-a-diffusion/651-2016-06-07-14-05-43
Le spectacle commence à 20H30 à l’Atelier 210, Chaussée Saint-Pierre 210 à 1040 Etterbeek (durée : 1h30 environ).