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12272815686?profile=originalMessieurs les ronds-de-cuir est un tableau-roman de Georges Courteline, pseudonyme de Georges Moinaux (1858-1929), publié en feuilleton, de façon régulière puis irrégulière, dans l'Écho de Paris d'août 1891 à novembre 1892, et en volume, remanié et avec des ajouts, chez Flammarion en 1893. En 1911, Robert Dieudonné et Raoul Aubry adaptèrent le texte de Courteline pour le théâtre; la première eut lieu à l'Ambigu-Comique le 4 octobre de cette même année. Messieurs les ronds-de-cuir furent aussi portés à l'écran, notamment en 1937, par Yves Mirande, et en 1959, par Henri Diamant-Berger.

 

Fonctionnaire au ministère des Cultes où il s'ennuya ferme pendant quatorze ans tout en pratiquant assidûment l'absentéisme, s'assurant la complicité d'un expéditionnaire qui le déchargeait d'une grande partie de son travail, Courteline mit à profit son sens de l'observation et de la dérision pour, comme avant lui l'avait fait Balzac avec les Employés (1837), brosser un tableau satirique de la vie de bureau. Avec la même verve caustique qui l'avait animé lorsqu'il décrivait la vie militaire dans les Gaîtés de l'escadron (1886) et le Train de 8 h 47 (1891), il détaille les turpitudes administratives dans une série de portraits au vitriol et d'épisodes truculents liés entre eux par le fil ténu d'une très mince intrigue: les démarches du conservateur du musée de Vanne-en-Bresse pour entrer en possession du legs d'un certain Quibolle.

 

Employé à la direction des Dons et Legs, Lahrier a pris l'habitude de s'absenter une fois par semaine sans que «l'Administration, bonne bête, eût l'air de s'en apercevoir». Or, un jour de printemps, l'atmosphère joyeuse de la ville l'ayant peut-être retardé plus qu'à l'accoutumée, son chef de bureau, M. de La Hourmerie, s'avise de le tancer vertement, à propos précisément de ses absences. Sauvé de l'ire de son supérieur par l'arrivée inopinée du conservateur du musée de Vanne-en-Bresse auquel on fait croire que son dossier est en passe d'être réglé alors qu'il a été perdu, Lahrier va retrouver dans l'atmosphère poussiéreuse de ces bureaux confinés son vis-à-vis Soupe, baderne bougonne et obtuse, mais aussi Ovide, le garçon de bureau, Chavarax, aigri dans l'attente bilieuse d'un poste de sous-chef, l'expéditionnaire Sainthomme se surchargeant de travail dans l'espoir toujours déçu d'obtenir les palmes académiques, le sous-chef Van der Hogen, cloporte dénicheur de dossiers caducs et rédacteur d'invraisemblables rapports, enfin l'employé Letondu dont le comportement bizarre vire peu à peu à la folie. Le lendemain de l'algarade avec son chef, Lahrier, arrivé plus tôt que d'habitude au bureau, surprend Soupe en train de s'y laver les pieds. Il parvient à s'en débarrasser pour recevoir plus à l'aise sa petite amie Tata, mais se fait surprendre à son tour par La Hourmerie qui en réfère à son supérieur hiérarchique Nègre. Ce dernier refuse de prendre des sanctions à l'égard de Lahrier, mais aussi de Letondu de plus en plus détraqué. Au bout d'une dernière et longue errance dans le dédale des couloirs des Dons et Legs où, à chacun des détours, il découvre, interloqué, les scènes les plus loufoques, le conservateur du musée de Vanne-en-Bresse finit par trouver M. de La Hourmerie, qu'il cherchait en vain, atrocement égorgé par Letondu. Après l'enterrement de leur chef de bureau et les discours officiels, tout le monde se retrouve au cabaret de la Crécelle où la cérémonie se termine par un hourvari de chansons à boire et de bouteilles cassées, aux frais de l'Administration.

 

«On ne peut rire que des individus. Les idées générales n'affectent pas la glotte», écrivait Marcel Schwob dans une présentation de Messieurs les ronds-de-cuir. Il mettait ainsi en évidence une des qualités essentielles de Courteline: s'intéresser au comportement humain plus qu'aux péripéties. Il soulignait aussi les difficultés d'un travail de refonte qui consistait ici à transformer une suite parfois hétéroclite de charges d'atelier, hâtivement crayonnées pour la presse, en une oeuvre charpentée au style travaillé. Courteline y parvient en créant un mouvement d'entropie: au fur et à mesure que l'oeuvre avance, le personnage de Lahrier, qui peut apparaître comme le double de l'auteur, tend au fil des pages à se fondre dans la masse, comme phagocyté par l'univers déliquescent des bureaux (proche en fait de celui de la caserne courtelinesque). Les tribulations du malheureux conservateur dans ce labyrinthe servent de fil directeur et permettent de faire basculer le récit et les personnages de la bouffonnerie dans le loufoque, puis de la jobardise dans un absurde aussi farfelu que celui du Grand-Guignol.

 

La satire sociale et morale porte moins sur l'actualité des problèmes du jour, qui pour la plupart sont éludés, par prudence peut-être, ou pour mieux s'attaquer à la racine même du mal: l'esprit délétère de la bureaucratie, et à l'insupportable cohorte de ses déviations: hargne, envie, goût de la persécution, irresponsabilité, monomanie, excès de zèle, gâtisme, folie. Le système paraît d'autant plus absurde qu'il tourne sur lui-même à la manière d'un cercle vicieux ainsi que l'explique Lahrier à Tata: «Les uns (ce sont les rédacteurs) rédigent des lettres qui ne signifient rien; et les autres (ce sont les expéditionnaires) les reçoivent. Là-dessus, arrivent les commis d'ordre, lesquels timbrent de bleu les pièces du dossier, enregistrent les expéditions, et envoient le tout à des gens qui n'en lisent pas le premier mot. Voilà» (Quatrième tableau, II).

 

Participe de cette même inspiration caustique et désenchantée une «scène de la vie de bureau» dont le sujet avait fait l'objet d'une chronique dans l'Écho de Paris du 29 juin 1890: Monsieur Badin. Cette saynète qui fut représentée le 13 avril 1897 au théâtre du Grand-Guignol reprend avec des variations le premier tableau de Messieurs les ronds-de-cuir en accentuant encore le côté facétieux de l'absentéiste. On pourrait rattacher à cette veine Une lettre chargée, saynète jouée au Carillon le 10 juin 1897. Courteline, en peignant dans cette pochade l'employé Ratcuit qui observe le règlement jusqu'à l'absurde et avec la plus extrême mauvaise foi, semble se conforter dans une idée-force qui revient dans son oeuvre comme une antienne: «La bêtise insondable des hommes [est] un contrepoids à leur surprenante méchanceté.»

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Les Portes du temps
(Communiqué)

56 musées et monuments ouvrent les Portes du temps à plus de 35 000 jeunes pour une découverte artistique et ludique du patrimoine.

Du 28 juin au 31 août, cette opération invite les enfants et les adolescents, issus en priorité des zones sensibles, urbaines et rurales, à une découverte artistique et ludique du patrimoine.

15 nouvelles participations de Saint-Omer (Nord) à La-Seyne-sur-Mer (Var)

Pour cette 8e édition, l’opération prend de l’ampleur avec quinze nouveaux sites participants, aussi divers que le haras national de Besançon, le mégalithe des Causses et Cévennes, le Mausolée de Lanuéjols, la Voie Sarde, l’abbaye de Sénones et les sentiers des Passeurs, le château de Lunéville, le château de Carros – Centre international d’art contemporain, le musée de la Faïence au château Pastré, le musée et les jardins du Canal du midi à Saint-Ferréol, le Musée des Sapeurs Pompiers de Lyon, le centre historique de Rouen, le Musée de la Grande Guerre à Meaux, le musée Rodin à Meudon, les musées de Saint-Omer, le musée Balaguier de Seyne-sur-Mer, le Palais du Tau et la cathédrale de Reims, le Palais de Rohan et la cathédrale de Strasbourg.

La créativité à l’honneur

Grâce aux arts vivants, Les Portes du temps proposent des formes inédites d’appropriation des lieux du patrimoine, de leur histoire comme de leurs collections. En fonction de leur particularité, les sites mobilisent le théâtre ou la danse, la musique, les arts plastiques, le cinéma, aussi bien que les arts de la rue ou le numérique, ou encore les activités sportives.

Organisation

Lancée en 2005 par le ministère de la Culture et de la Communication, l’opération des Portes du temps est organisée en partenariat avec le ministère délégué à la Ville et l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé), dans le cadre des objectifs communs en faveur de la cohésion sociale, de l’intégration et de l’accès des publics défavorisés à la culture.

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Du 14-03 au 31-03-12 se tient à l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles), une exposition intitulée « Vision de la terre et esquisse d’architecte en couleur ».

Pourquoi un tel intitulé ? Parce que la ligne directrice de l’exposition est celle de montrer deux chemins à la fois complémentaires, tout en étant différents, sur la façon d’appréhender le Monde et l’existence par l’espace et la matière. Que le futur visiteur ne s’y trompe pas : il s’agit bien de la « terre » que l’on pétrit  et non pas de la « Terre » qui tourne autour de l’Astre dont il est question.


Pour illustrer cette thématique, deux artistes sont mis à l’honneur.


Madame ISABELLE VENET et Monsieur PIERRE- ANDRE MARTIN tous deux venus de France.


L’univers de la matière au service de l’Art est représenté par Mme ISABELLE VENET. Cette artiste lilloise nous offre des œuvres témoignant d’un dialogue intérieur caractérisé par des villes parsemées de silhouettes à l’intérieur d’une toile conçue comme un terrain expérimental sur lequel l’artiste utilise le sable pour fixer les pigments des couleurs.

Cette technique donne à l’œuvre un aspect « travaillé » où la matière (la terre) arpente la toile en la labourant, augmentant ainsi la mise en exergue de certains reflets et tonalités.

Dans PORTRAITS DE FEMMES (60 x 120 cm) Isabelle Venet nous propose une forme de triptyque  vertical conçu à l’intérieur du cadre originel. Il symbolise la Femme dans ses états les plus identitaires : la femme au foulard (dans toute l’acception de la sémantique de l’image) mais aussi la Vierge Marie prise comme symbole de la maternité. Cette dernière image a été également suggérée à l’artiste par sa belle-fille d’origine sud-américaine et sa façon d’être mère.

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PAROLES (80 x 80 cm) est une suite de formes longilignes, semblables à des silhouettes, que l’artiste considère comme des messages, voire des prières adressées à l’objet de sa croyance. Elle croit, en effet, dans la force transcendante de la Bible qu’elle met en pratique dans ses rapports avec l’Humanité qu’elle rencontre, notamment, dans la déchéance sociale des SDF à Lille qu’elle aide à l’intérieur d’une association lilloise qui les prend en charge.  

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Les messages d’Isabelle Venet se déclinent dans une intériorité qui se reçoit dans sa conception de la figure humaine, en apparence à peine « ébauchée », néanmoins « pleine » dans ce qu’elle a d’épiphanique. Les œuvres d’Isabelle Venet exposées à l’ESPACE ART GALLERY sont, en quelque sorte, des apparitions lesquelles, malgré leur proximité charnelle avec le visiteur, ne peuvent se concevoir que dans un lointain métaphysique.

D’un point de vue philosophique, l’artiste se considère comme une épicurienne faisant du met le plus banal un festin.

Ce même aspect philosophique elle le met en exergue dans la façon qu’elle a de se « déconstruire » pour se « reconstruire ». En effet, faisant bloc avec son œuvre, c'est-à-dire, cette part essentielle d’elle-même, il lui arrive d’en détruire une en étant lucide sur le fait qu’en la détruisant, elle commet un acte de pure création, d’abord en la renvoyant à son néant matriciel, ensuite en la remodelant pour en faire autre chose et lui donner une seconde vie.

La spiritualité d’Isabelle Venet est une spiritualité qui n’a besoin d’aucune mise « en pratique » dans une église pour exister. A ce titre, elle qualifie son atelier de « temple-ring ». Il y a dans cette contraction toute la signification de l’Art : le « temple » dans lequel se développe toute la spiritualité de l’essence créatrice et le « ring » où se joue la joute agonistique entre le créateur son œuvre ou pour paraphraser André Malraux rapportant un propos de Michel-Ange : « Mais quand donc en aurai-je fini avec cette matière qui me sépare de mon œuvre ? ».

 


Dès le premier coup d’œil le visiteur est assuré sur le fait devenu évidence visuelle que le peintre PIERRE-ANDRE MARTIN est architecte de formation. Si cette évidence saute aux yeux, c’est parce que, au-delà des couleurs chatoyantes donnant du tonus à la forme, les œuvres du peintre sont tendues par les lignes directrices typiques du dessin urbanistique ou, pour le dire d’une façon concrète, de la synchronisation parfaite de chaque façade constituant l’ensemble schématisé en plan de la ville, devant réaliser un tout urbain. 

Celui qui regarde et s’imprègne d’une toile de Pierre-André Martin doit s’attendre à vivre une architecture de rêve et de soleil. Non. L’image n’est nullement exagérée ! En effet, le soleil est l’élément déclencheur de la démarche du peintre. Il est présent sur toutes les toiles, tel le gardien d’un « ciel » qui n’est autre que le reflet de l’imaginaire de l’artiste.

Ce reflet est le fil conducteur de son œuvre puisque, en quelque sorte, il abolit toute hiérarchie entre le supra et l’infra monde (les parties haute et basse du tableau), l’une étant la continuité logique de l’autre.

Si nous considérons les tableaux intitulés VENISE (60 x 80 cm), BEZIERS (80 x 60 cm) et SETE (80 x 60 cm), nous constatons qu’architecture et réminiscence vivent à l’unisson.

Il est rarissime de concevoir Venise sans son voile crépusculaire. Décidément, Pierre-André Martin s’éloigne de Thomas Mann. Il nous offre une vision personnelle de la Cité des Doges où l’architecture ciselée des colonnes portant les arcs de la Basilique Saint Marc contraste à la fois avec l’eau de la Lagune et ce « ciel » conçu comme monde des idées et des rêves duquel se distingue le portrait de sa jeune fille ainsi que le prénom « Carmen ».  Venise fut le lieu où elle découvrit pour la première fois l’œuvre de Bizet.

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Un discours similaire nous est proposé avec BEZIERS. La ville se réfléchit dans l’eau tandis que le « ciel » offre trois épisodes appartenant à l’univers du peintre : la corrida dans une mise à mort opposant l’homme à l’animal, le rugby par la présence d’un joueur saisissant un ballon ovale et, in fine, la présence d’un visage de femme, celui de la mère du peintre qui mourut dans cette ville.

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Vivant à Carcassonne, Pierre-André Martin est viscéralement un homme du Sud.

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Pierre-André Martin: Sete


Soleil, eau, lignes directrices, souvenirs brillant comme des étoiles. Ce sont là les éléments qui insufflent la sève à l’œuvre de l’artiste. Le ciment catalyseur à tout cela étant l’architecture, ou plus précisément, l’ordre architectural régissant l’ensemble de la composition. Malgré la majesté des couleurs vives mariées dans la folie de l’acte créateur, rien n’est anarchique. Tout est, en quelque sorte, compartimenté et mis à sa juste place, que ce soit pour le « ciel » des idées et des rêves comme pour la ville en tant que symbole de l’espace urbain. L’effet est d’une rare brillance témoignant de l’immense maîtrise ainsi que de la grande générosité de l’artiste. L’huile constitue la technique essentielle de Pierre-André Martin.

 

Parmi les autres artistes invités à exposer, il convient de signaler l’œuvre d’une peintre excellente, s’inscrivant dans un autre discours que celui des artistes précités.

Mademoiselle LAURENCE RAPAILLERIE est une jeune artiste française. Sa peinture exposée à l’ESPACE ART GALLERY est le fruit de voyages témoignant de contacts culturels qu’elle a voulu graver sur la toile. Elle propose deux triptyques provenant d’un voyage aux Etats-Unis : DIRECTION (trois fois 75 x 75 cm) ainsi que L’HOMME BLEU (43 x 90 cm), L’HOMME VERT (90 x 58 cm) et L’HOMME ROUGE (89 x 69 cm).

DIRECTION est un triptyque montrant un panneau directionnel comme il en existe des milliers aux USA.  Néanmoins, le panneau devient une forme déclinée sur trois plans (chacun étant un panneau du triptyque) donnant au visiteur (que l’on pourrait même qualifier de « spectateur », tellement l’expérience visuelle est « cinématographique ») non pas la vision d’un ensemble mais bien celle de différents moments, ou si l’on veut, de « segments » appartenant à cette longue droite imaginaire qu’est une continuité narrative.

Le même discours esthétique est réitéré avec L’HOMME BLEU, L’HOMME VERT, L’HOMME ROUGE lequel montre un autre triptyque représentant un contrôleur à San Francisco se livrant à une gestuelle destinée à cordonner le trafic. On peut parler, concernant cette œuvre d’ « instantanés » au sens photographique du terme. Néanmoins, ces œuvres affirment une différence capitale par rapport à la photographie. Que se soit DIRECTION comme L’HOMME…chaque figure se détache sur un fond monochrome, occultant définitivement la possibilité à un élément étranger de s’intercaler derrière ou à côté du sujet.

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Le fait de « circonscrire » le sujet dans un espace monochrome occulte ce qui dans une photographie serait conçu comme espace environnemental ou « décor », (un espace entourant le sujet, rempli d’éléments et, en quelque sorte, le polluant). Ici, plus rien n’existe que le sujet se découpant sur chaque plan dans une posture à la fois différente et définitive. Ce qui en ressort c’est l’essence des formes dans une esthétique épurée au maximum que ne permet pas la photographie.

Ce qui est stupéfiant dans ces œuvres c’est qu’elles ont été réalisées par une artiste qui suit encore des cours à l’Académie de Molenbeek ainsi que des stages à La Cambre.

Laurence Rapaillerie est très attirée par la peinture de Hopper et de Hockney. Il y a, en effet, du Hopper niché dans l’œuvre qu’elle présente mais dans l’esprit seulement, en ce sens que tous deux présentent des personnages assez figés dans l’action qu’ils entreprennent, ce qui leur confère une dimension iconique. Les personnages de Hopper étant, si l’on veut, baignés d’une tranquillité que leur apporte le traitement de la lumière. Chez Laurence Rapaillerie, la couleur, même « tranquille » comme le bleu contient toujours cette note vive qui empêche, en quelque sorte, le sujet de « macérer » dans le geste accompli. La couleur devient lumière qui le fixe définitivement. 

Laurence Rapaillerie affectionne particulièrement l’acrylique pour la création de ses œuvres.

 

Isabelle Venet, Pierre-André Martin et Laurence Rapaillerie offrent chacun un moment significatif à cette exposition qu’il ne faut rater sous aucun prétexte !

 

François L. Speranza.  

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ITINERAIRE DE LA COULEUR CONSCIENTE

ITINERAIRE DE LA COULEUR CONSCIENTE

 

Le hasard fait-il toujours bien les choses ? Impossible, bien sûr, de l’affirmer. Néanmoins, le hasard a parfaitement travaillé pour harmoniser ce puzzle que constitue souvent l’exhibition des œuvres à l’intérieur d’une galerie d’art.

Les trois artistes exposés du 04-04 au 29-04-12 à l’ESPACE-ART-GALLERY(Rue Lesbroussart, 35,1050 Bruxelles), ont chacun choisi un espace particulier à l’intérieur de celle-ci, en réponse aux besoins qu’exigent les pièces présentées.

Monsieur JEAN LECLERCQZa demandé l’entrée ainsi que le milieu de la galerie parce que ces espaces lui offraient le volume adéquat pour présenter l’ensemble impressionnant des tableaux exposés.

Parsemées ça et là, tout le long de la galerie, les sculptures de Monsieur MARIO MOLINSnous proposent une série de « corps végétaux » vivants, dressés comme des reliques de la nature.

Enfin, l’espace du fond s’avérait propice pour abriter le caractère globalement introspectif contenu dans l’œuvre du peintre, Madame BETTINA MASSA.

Et le hasard dans tout cela ? Eh bien, il a travaillé de main de maître ! Car, en parcourant l’espace artistique, l’on ressent une progression allant du ludique se dégageant des œuvres de Jean Leclercqz au silence méditatif de Bettina Massa, en passant par la célébration joyeuse et mystique de la nature à travers l’Art de Mario Molins.

Tout cela, le plus naturellement et le plus fluidement du monde !
Mais entrons dans le vif (c’est le cas de le dire !) du sujet avec le vivant ludique des œuvres de JEAN LECLERCQZ.

Le point de départ des œuvres de l’artiste exposé trouve son origine dans une précédente exposition de ses œuvres au Musée Royal de l’Armée et d’Histoire militaire situé au Parc du Cinquantenaire, à Bruxelles, en novembre 2010, pour laquelle Jean Leclercqz a présenté, en parallèle avec de véritables engins de guerre (donc de mort !) d’époque, sa vision personnelle de l’avion, comme pour conjurer la dimension létale des premiers.

Mais force est de constater que l’avion conçu par Jean Leclercqz est une sorte de créature hybride, à l’intersection entre la machine et l’oiseau. Cela donne un être volant (piloté par un homme que l’on ne voit jamais) sillonnant un ciel tranquille et toujours bleu. Cela affirme et renforce la dimension ludique de son œuvre, laquelle est presque toujours en rapport avec la ville de Bruxelles et son architecture.

Cette architecture est reprise dans sa réalité pour être légèrement modifiée dans certains de ses aspects, notamment, par l’intermédiaire de la couleur.

A titre d’exemple, le tableau intitulé FLAGEY(103 x 77 cm) nous présente l’ancien INR (Ancien Institut national de Radio) tel qu’il est mais rehaussé de bleu très foncé au niveau des fenêtres comme pour mieux mettre l’extra structure en exergue.

 

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Jean Leclercqz avoue nourrir des velléités d’architecte. Et cela se perçoit dans le traitement qu’il apporte à l’appareil cyclopéen. Dans MUSEE DE TERVUREN(99 x 75 cm), nous retrouvons le même soin apporté à l’architecture, dans la coupole ainsi que dans la toiture du bâtiment, lesquelles sont soulignées par une bordure noire pour en affirmer le volume. Le trait gonfle la pierre de vie.

 

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Dans toutes les œuvres de Jean Leclercqz, l’avion-oiseau occupe la partie centrale de la composition avec, à l’arrière-plan, le support architectural bruxellois qu’il célèbre dans des couleurs de joie. Mais l’architecture n’est pas constamment présente dans son œuvre. En effet, les deux tableaux intitulés LES DANSES AERIENNES(1 m x 1, 20), proposent chacun une danse autour d’un personnage filiforme. Est-ce une danseuse ? Est-ce une tour de contrôle ? Toujours est-il que des êtres volants ayant l’apparence d’oiseaux, voire même de poissons, voltigent autour de cet axe comme pour le butiner. Le tout évoluant au centre d’un paysage floréal presque « fauve », annonçant la communion d’amour entre la Machine et la Nature.

 

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Dans l’œuvre de cet artiste le regard du visiteur n’arrive pas à saisir le simple détail car il se perd, attiré par mille éléments comme, notamment, cette série de chiffres et d’opérations d’une mathématique inconnue, converties en écriture, presque hiéroglyphique, comme pour en désacraliser la complexité. Ses tableaux sont, d’emblée, entourés d’une marge faite de motifs géométriques dont la couleur reprend (ou annonce) celle servant de dominante chromatique à l’œuvre.

A la perception de l’univers de Jean Leclercqz, d’aucuns pourraient s’interroger sur une éventuelle influence littéraire (Verne, Wells…) qu’aurait subi l’artiste.  A cette question, ce dernier répond par la négative. Rien de ce qui serait tributaire de la littérature fantastique (ou encore moins de la bande dessinée) ne l’aurait influencé. Et à y regarder de près, son œuvre échappe à tous les poncifs que pourraient imposer quelque influence littéraire ou graphique. Elle est bien trop personnelle pour obéir à des directives esthétiques.

Jean Leclercqz illustre parfaitement la conception que l’on se fait de l’idée de l’Art, considérée dans son acception grecque (technè). En effet, l’élément technologique intervient directement dans son œuvre, en ce sens qu’il nous offre des sérigraphies modernes dans un tirage de photographies à partir d’un fichier numérique pour des dessins au format A3, scannés en haute définition. Leur coloration se faisant sur ordinateur et leur taille pouvant varier selon les besoins. Les photographies peuvent être retravaillées, tant dans les couleurs que dans le dessin.  

Cet élément technologique n’est en réalité qu’une réminiscence, ou si l’on veut, un avatar de sa vie professionnelle car Jean Leclercqz est graphiste de formation. Il poursuit actuellement son activité via la société de communication graphique qu’il dirige à Bruxelles.

Son rêve, nous a-t-il confié, serait de mettre sur pied une exposition dans un lieu « insolite », telle qu’une usine ou carrément la rue, comme pour désacraliser le côté institutionnel (sinon mort !) du Musée.

 

MARIO MOLINSest un jeune sculpteur espagnol qui entretient un dialogue mystique avec l’une des formes, à la fois les plus matérielles et les plus tactiles de la nature, à savoir le bois. L’artiste considère cette matière comme un « corps » qui porte en lui la mémoire de la nature. Mémoire qu’il exprime par mille contorsions, élancements et sphères, traduites par l’artiste dans un discours humaniste. Non. Ce n’est pas de la « littérature » que de dire que Mario Molins se perd dans un rapport mystique avec la nature. Vie et mort se confondent dans le tronc d’arbre mort que le sculpteur ramasse (ou pour mieux dire, prélève) au sol, considéré comme une tombe destinée au pourrissement. Après l’avoir en quelque sorte « purifié » par le feu, l’artiste lui confère une patine d’un noir luisant, semblable à une introspection dans la matière, pour le « ramener » à la vie. Une vie esthétique pour le plaisir du regard qui interpelle la conscience du visiteur, lui-même frère de l’arbre, faisant partie intégrante de la nature.

Des œuvres telles que ANIMA I (2010) (35 x 40 x 165) réalisée en bois d’olivier ou EVOCACION III  (2011) (139 x 30 x 31), pièce en découpe directe, tirée d’un noyer brûlé dans un incendie que le sculpteur a sauvée en éliminant les parties consommées pour la recréer, font de l’artiste le démiurge distillant à l’argile informe un souffle nouveau.

 

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Dans son dialogue avec la matière, Mario Molins, qui a fréquenté l’Académie des Beaux-Arts de Barcelone n’envisage de sculpter qu’une pièce à la fois. Jamais il ne mélange plusieurs pièces. Car chaque rapport est intime, de même que chaque histoire ayant précédé (et qui engendrera) la matière est intime.

Sa démarche s’inscrit dans la dialectique du «Land Art », discours qui date de la fin des années ’60 et qui considère que l’artiste et la nature fusionnent dans un rapport intime, se réalisant au cœur même de celle-ci. Par la force des choses, leurs créations demeurent à l’extérieur et se présentent comme la négation de l’ « espace clos » tel que la Musée.

Et l’on peut, in fine, se demander après avoir vu les œuvres de Mario Molins qui « imite » qui. Est-ce la nature qui « imite » l’Art, comme le soutenait Oscar Wilde ou est-ce le contraire ?  Quoi qu’il en soit, la question est (volontairement) mal formulée car l’ « imitation » n’intervient jamais lorsqu’il s’agit de création !

La nature des œuvres de Mario Molins nous interroge sur la nature de nos origines dans toute la force et la beauté de leur volume.

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Nous atteignons la profondeur méditative avec l’artiste corse BETTINA MASSA. L’ensemble pictural qu’elle présente à l’ESPACE ART GALLERY est principalement structuré par le rapport au temps ainsi que par le mythe, ou plus exactement, par le riche héritage mythologique méditerranéen.

En vérité, mythologie et rapport au temps sont intimement liés. L’un des plus beaux exemples du rapport au temps se trouve dans le récit homérique. L’amnésie qui frappe Ulysse, prisonnier de Circé, est tout entière basée là-dessus. Il se cherche dans une dimension qui a perdu la conscience du temps. Temps et mythe s’enchevêtrent l’un dans l’autre. Il n’y a que la force du sentiment pour en exprimer la quintessence. L’acte créateur, lui, cherche à figer le temps en une métamorphose d’instantanés exprimant la volonté d’en garder, néanmoins, la trace.

Cette trace c’est l’ « idée », plastiquement exprimée sur la toile. A titre d’exemple, les TETES  (œuvres sans titre – 0,69 x 0, 77 – réalisées entre 2010 et 2012) que Bettina Massa nous offre, existent non pas en tant que telles, comme des trophées, mais bien pour exprimer l’ « idée » du visage, contenues dans des différences de couleurs et de plans.

Ces têtes « humaines » dans l’acception la plus physique du terme, sont en réalité, des sculptures sur toiles où les chairs s’enflamment et explosent sous la tension des couleurs changeantes au gré des positions qu’elles occupent par rapport à la lumière ambiante.

 

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Ces visages, le pinceau de l’artiste semble les avoir taillés au burin, tellement le volume en ressort comme les plis transparaissent du marbre. L’humain montre une face labourée à chacune de ses métamorphoses. Jusqu’à ce tableau (toujours sans titre – 0,64 x 0, 74) peint en 2011, montrant un visage féminin aux yeux bandés symbolisant la vacuité de la présence. Ici, la présence se fait déjà absence par la lumière éphémère que dispense la couleur. La toile utilisée par l’artiste est en fait un papier de couleur noire provenant du Bhoutan. Il s’agit d’un papier au grain extrêmement sensible, agissant comme un buvard, lequel absorbe les pigments avec une telle rapidité que l’on ne peut plus les effacer une fois fixés sur le support.

Bettina Massa est titulaire d’une Maîtrise auprès de la Faculté des Arts Plastiques de la Sorbonne. Elle a notamment travaillé avec des restaurateurs de peintures. Mais on peut dire qu’elle a baigné dans l’Art depuis sa plus tendre enfance, son père travaillant au Musée Fesch d’Ajaccio. C’est là qu’elle est entrée en contact avec, notamment, les Primitifs italiens et les suiveurs du Caravage napolitains.

Cela se traduit par une vision personnelle et moderne qu’elle offre du MARTYR DE SAINT MATTHIEU(1, 52 x 1, 38) réalisé en 2010.

 

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L’œuvre est réduite à l’essentiel. La foule des personnages présents dans la composition originale du Caravage (323 x 343 cm) abritée à la Chapelle Contarelli de l’Eglise St. Louis des Français, à Rome disparaît pour faire place au nœud de la tragédie : le sicaire, sur la gauche. Le jeune homme, sur la droite et Matthieu, en bas vers la droite. La totalité de l’ensemble du Caravage est remplacé par le polyptique (quatre panneaux d’égales dimensions portant chacun la fraction - ou la subdivision - d’un moment (traduit en mouvement) sont assemblés pour ne plus former qu’une entité scénique). L’essentiel : le drame biblique ainsi que l’éclairage dont on ne perçoit jamais la source – typique du style caravagesque – est respecté.

L’artiste n’est d’ailleurs pas étrangère à la conception de l’espace « scénique » car elle eut l’opportunité d’évoluer dans le monde du théâtre en créant des scénographies destinées, notamment,  à des textes de Louis Aragon, Garcia Lorca ou Armand Gatti, sous la direction du metteur en scène Najib Ghallale, à partir du milieu des années ’80.

La peinture de Bettina Massa exposée à l’ESPACE ART GALLERYest une peinture aussi vibrante que complexe, parce que hautement cultivée, pétrie d’un Humanisme renaissant modalisé, comme le fut ce même Humanisme  devant se distancer de la pensée gréco-latine pour pouvoir exister.

Elle clôt cet itinéraire de la couleur consciente qui ne peut se réaliser qu’en exhortant la part (re)créative vivant en chacun d’entre nous.

 

François L. Speranza.

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Du 02-05 au 20-05-12 se tient à l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles), une exposition à la fois fort intéressante et intrigante, laquelle a pour dénominateur commun (bien que différemment exprimé) la beauté et le mystère de l’entrelacs et de la courbe comme véhicule d’un voyage vers la pensée aboutie.Deux artistes méritent particulièrement notre attention, deux personnalités à la recherche obstinée d’elles-mêmes. Cette recherche passe par les arcanes de ce fil conducteur qui se fraye un chemin parmi les mille et une possibilités qui se dessinent sur la toile de la vie dont le tableau n’est que le modeste compte-rendu.Invisible est le fil d’Ariane qui sous-tend l’œuvre plastique de Madame 
MARIEVA SOL. Ce fil a pour particularité d’être le catalyseur d’un tracé qui ne s’achève que pour en créer un autre. La main qui le trace ignore tout de son futur. Du néant originel, elle lui assure une continuité. De segment en segment, elle porte la ligne directrice à son terme dans la réalisation d’une histoire. Que ce soit en termes plastiques ou littéraires (Marièva Sol est également auteure et poétesse), l’artiste se laisse guider par sa plume-pinceau dans l’instantané propre à l’écriture automatique.Les dessins exposés à l’ESPACE ART GALLERY illustrent un recueil intitulé
 DANSEZ MAINTENANT TOUT L’ÉTÉ DANS LA BISE – édité dans la Collection du Cercle des poètes du 18ème
 Paris, 2012. La poétesse Marièva Sol l’a spécialement conçu pour cette exposition. Quant aux dessins, ils se divisent en deux séries : une polychrome, l’autre monochrome.
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Le dénominateur commun à ces deux univers est le trait évoqué plus haut, lequel, au fil des entrelacs assure courbes et volutes aux personnages qu’il anime et que l’on croirait sortis tout droit d’un cirque imaginaire. Courbes et couleurs se marient pour créer la silhouette dans sa chair. Le couple est le thème central de l’œuvre de Marièva Sol. Néanmoins, aux dires de l’artiste, une stylisation volontaire entraînant une certaine raideur est apportée à la figure masculine. Tandis que les personnages féminins sont essentiellement régis par la courbe, accentuant à la fois leur sensualité (conçue comme condition sine qua non à la viabilité de l’Art par l’artiste) ainsi que leur féminité : maternité et plaisir de la forme, tout est guidé par l’entrelacs, englobant nature et figure humaine dans une ivresse de couleurs chatoyantes.Au contact de l’œuvre de Marièva Sol, le visiteur peut se demander si, en dernière analyse, il ne se trouve pas confronté à deux écritures. D’un côté, une œuvre polychrome portée par l’exubérance (43 x 53 cm pour toute la série), ensuite des pièces monochromes de dimension réduite par rapport à la première (24 x 32 cm) où le personnage, réalisé en bleu se détache sur un fond blanc. Si nous parlons de différence d’ « écriture », c’est parce que nous nous trouvons face à un langage du rythme différent dans son expression plastique.Dans son œuvre polychrome, l’artiste confère à ses personnages une musique rythmique essentiellement assurée par la conjonction entre la couleur et le trait. Tandis que dans ses compositions monochromes, le trait se révèle dans l’acrobatie restituée résultant de la posture. La danse en est le thème principal et des titres tels que 
TWIST,
FRENCH CANCAN,
CLAQUETTES,
HIP HOP ou
 SLOW, sont parfaitement évocateurs de l’idée de la torsion corporelle, essentielle pour mettre le volume en exergue. Mais il s’agit ici d’un volume traduit par la sensualité fine des courbes enlacées comme pour
 SLOW, lequel est un chef -d’œuvre de rythme issu de la posture. L’homme et la femme « empiètent », si l’on peut dire, sur la forme de l’autre tout en étant enlacés. Observez le mouvement du genou de la danseuse « enveloppant » celui du danseur, ainsi que la conception du visage de l’homme qui « occulte » celui de la femme. C’est de cet enlacement que naît le rythme de la danse, l’érotisme de la danse. Le texte qui l’accompagne intitulé 
DANSER AU-DELA DE LA VIE, tiré de son recueil cité plus haut, est un hymne à l’érotisme païen exprimé dans sa forme biblique :   (extrait)

                                        Soubrette

                                        Ou vestale

                                     Je danserai pour toi Seigneur

                                         Comète

                                         Vespérale

                                     Je t’offrirai enfin mon cœur

                                          Archange

                                          Ou démon

                                               (…)

                                          Te séduirai dernier amant

                                           Valseuse

                                            Sur nuage

                                            Dans tes bras divins réfugiée
12272807854?profile=original12272808255?profile=original12272808284?profile=originalLe texte demeure païen mais son objet pourrait se retrouver dans l’esprit du Cantique des Cantiques lorsque l’auteure associe charnellement l’amant à la figure de Dieu.Mais l’artiste a été aussi de tout temps fascinée par la magie de la Bande Dessinée. Et cela se perçoit dans son graphisme. L’humour et souvent la caricature, typiques de la BD, sont aussi de la fête comme il est loisible de le constater dans
 FRENCH CANCAN où le corps filiforme de la danseuse est, en quelque sorte, avalé par la jupe toute en guirlandes. Parmi les auteurs de bandes dessinées préférés de Marièva Sol figurent Franquin. Le personnage de
 GASTON LAGAFFE représente, selon ses dires, le summum de l’ « intelligence de la situation ».Les dessins de Marièva Sol sont l’expression d’une paix retrouvée. Une paix qu’elle avait perdue très jeune suite au décès de sa grand-mère envers qui elle était fort attachée. Cet évènement la plongera dans une grande solitude qui se transformera en souffrance et fera émerger en elle l’éclosion d’un mysticisme qui ne la quittera plus et dont son œuvre tant plastique que littéraire en est l’expression. Adolescente, elle se « disputera » avec Dieu lui reprochant de l’avoir abandonnée, tout en le priant. Ce qui contribuera à former en elle les prémices d’un déisme qui la rendra « chrétienne », avant même toute lecture didactique de la Bible. Tiraillée entre l’envie de devenir comédienne (elle a suivi les cours de René Simon) et celle d’être institutrice, elle optera pour le deuxième choix. Son expérience de l’univers de la pédagogie lui offrira l’opportunité de développer ses dons artistiques au bénéfice des enfants avec qui elle conservera un excellent contact, en leur redonnant confiance tout en les laissant s’exprimer dans une totale liberté. Ce contact optimal engendrera en elle le besoin de distiller le bonheur « au Monde », comme elle le dit.Parmi les critiques  exprimées par les personnes entrées en contact avec son œuvre, il en est une qui va très loin, à savoir que la gaité émanant de ses compositions témoigne d’un lourd passé de souffrance. Et comme l’artiste le dit elle-même, d’un vivre tragique est née une œuvre gaie où le festif et l’humour occupent la première place. Marièva Sol qualifie sa façon de créer comme l’expression d’ « une petite musique avec une idée à l’intérieur ». Si, d’aventure, une rupture de rythme devait se produire, cela ne serait pas si grave car elle se sent libre de s’exprimer comme elle l’entend. Le bonheur n’a nul besoin de règles pour s’épanouir.Il y a quelque chose d’intriguant dans le pseudonyme qu’a pris l’artiste : Marièva Sol.Le prénom, en tant que contraction biblique entre Marie, la mère de Jésus et Eva, la tentatrice…et puis Sol : le soleil ! Hélios ! Mélange terrible ou cocasse ? Peut-être les deux ensemble ! Car Marièva Sol révèle dans la beauté de son œuvre le souvenir de tensions passées.Marièva Sol qui travaille à l’encre n’a jamais fréquenté les Beaux-Arts, néanmoins, elle a fréquenté la Faculté des Arts Plastiques à Paris où elle a passé deux ans de Maîtrise sans présenter de Mémoire. L’artiste fait partie de plusieurs cercles de poésie.





Marièva Sol: Personnages de légendes (Vidéo proposée et réalisée par Robert Paul)

Cette volonté de s’abandonner à l’aventure de la main qui explore le terrain créateur se retrouve, différemment exprimée, chez Madame 
PATRICIA PROUST-LABEYRIE.Les œuvres présentées à l’ESPACE ART GALLERY résultent d’un projet intitulé « Arts et Sciences », lequel rassemble un groupe de plasticiens, de philosophes et de musiciens, à l’écoute des moindres variations dans le passage des émotions.Les œuvres présentées furent toutes réalisées l’été dernier. Elles résultent du résultat d’un mois d’enfermement chez elle où, se tenant à l’écart de la société, l’artiste s’est sentie extrêmement proche du Monde. Et par « Monde » il faut entendre « son monde personnel », l’empire de ses émotions lui ouvrant la voie à l’interprétation des évènements, en total décalage avec le réel.Sa peinture pose une interrogation : qu’est-ce que le réel ? Nous sommes tous dans l’impossibilité d’y répondre rationnellement. L’image, elle, s’en charge car en se déployant à notre regard, elle offre une myriade d’interprétations possibles.Parmi ses toiles exposées, un tableau faisant partie d’un triptyque (82 x 64 cm), interpelle nos sens.12272808660?profile=original
Par ses
 COURBES SPECULAIRES, Patricia Proust-Labeyrie nous offre un graphisme aux reflets démultipliés qui renvoient de manière inversée à la peinture de base. Cette perception phénoménologique du créé s’opère dans l’éventail émotionnel du visiteur comme un réel  miroir incarné par ce dernier, en ce sens qu’il devient, en quelque sorte, le miroir de l’œuvre de l’artiste. Ce qui résulte de cette œuvre à forte connotation intellectuelle est semblable à un message sur le buvard de l’âme apparaissant sous l’effet de l’encre sympathique. Leonardo da Vinci s’était lui-même essayé à cette technique. Et il y a fort à parier que ses résultats devaient s’approcher plus du mystère kabbalistique que de l’ « introspectif »  à proprement parler. Que ce soit en matière littéraire ou picturale, force est de constater qu’il y a un « avant » et un « après » Freud. Jérome Bosch avait beau extérioriser ses délires sur la toile, il n’en demeurait pas moins un produit de son siècle, s’inscrivant sur un substrat culturel gothique, définit par des canons bibliques. Lorsque Salvador Dali atteignit le pinacle de sa production surréaliste il avait parfaitement maîtrisé les principales théories psychanalytiques en vogue à son époque.Patricia Proust-Labeyrie, à la manière de Anselm Kieffer qu’elle révère, estime que le discours intellectualiste permet d’analyser sur le même plan l’Art avec les mutations sociopolitiques.Son travail s’efforce d’investiguer la pensée dans tous ses méandres. Un masque cache un autre masque et sa peinture déclenche l’ultime questionnement : que ce passe-t-il, à un moment déterminé dans la rencontre entre le créateur et son œuvre, en tenant compte du fait que le moment n’est nullement statique et qu’il est le résultat d’une suite d’autres moments, entraînant d’autres émotions ?La peinture de Patricia Proust-Labeyrie (à l’huile et à l’acrylique) participe d’un impressionnisme mental résultant d’une adaptation aux mouvements du lieu en phase avec les mutations du réel dont nous, miroirs sensibles, habitant au cœur de la peinture, incarnons les métamorphoses.L’artiste qui nourrit également une grande admiration pour Joseph Beuys et Malevitch, enseigne dans divers ateliers, de même qu’elle organise des séances « Bien être » d’Histoire de la peinture destinées aux patients du service psychiatrique de l’Hôpital Charles Perrens à Bordeaux.
L’arrêt sur image de la part du visiteur face à une œuvre de Patricia Proust-Labeyrie lui intime l’obligation de laisser promener son regard sur la surface entière du tableau, conçue comme un champ onirique où tout se dédouble et démultiplie pour retourner à la matrice.
Entrelacs et courbes spéculaires tracées par des mains qui se cherchent au fil de l’acte créateur. Un acte vers l’inconnu. Le poser signifie s’aventurer à travers les méandres d’une Terra Incognita. Mais quel que soit la conclusion de ce voyage, il ne peut que faire tomber le dernier masque : celui de notre inconditionnelle nécessité d’exister par la mémoire célébrée de cet acte.
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Vidéo proposée et réalisée par Robert Paul sur des oeuvres de Patricia Proust-Labeyrie


François L. Speranza.


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MICHEL MARINUS: LET THE ALTARS SHINE

Du 13-06 au 30-06-12 l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles), offre deux visions de l’œuvre de Monsieur MICHEL MARINUS.

Cet artiste belge nous invite à percer deux visions de son œuvre reliées par un discours identique, à savoir l’empreinte laissée en nous par le temps qui passe, en laissant un dialogue à l’intérieur de la matière, telle une offrande sacrée, mystique…d’où le titre de son exposition : LET THE ALTARS SHINE (LAISSEZ RESPLENDIR LES AUTELS).

Les « autels » sont ceux de la mémoire, sortis d’un passé, en l’occurrence archéologique, puisque la première série des tableaux exposés ont été créés à partir du souvenir de photos aériennes de sites archéologiques proche-orientaux.

Réalisés à l’acrylique, ces œuvres exposent une vision en plongée fortement stylisée (aérienne), de tumuli, enfermés au centre d’un halo lumineux, lequel met en exergue le mysticisme provenant du passé devenant par l’impact de la représentation plastique, intemporel.

Michel Marinus propose deux idées de tumuli prises d’en haut : dans un premier temps, le tumulus enserré dans une sorte d’enceinte, un kremlin dont le trait ressort pour en souligner le volume (composition n° 2, 52 x 52 cm).

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Ensuite, il nous propose le vestige enveloppé d’une masse de poussière séculaire réalisée au ciment et à l’acrylique, présentant un tout compact, pétrifié, indéfinissable, comme figé par la patine du temps (composition n° 4, 52 x 52 cm).

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L’idée d’intituler son oeuvre LET THE ALTARS SHINE lui est venue en écoutant le titre éponyme du groupe mythique des années ’70 MEAT LOAF.

La seconde série de tableaux peints par Michel Marinus est centrée sur le thème de la photographie ancienne que le temps a voilée. Une série de compositions dont il manque des morceaux. Ces morceaux sont ceux d’un puzzle qui se désagrège sur sa périphérie mais dont le centre est occupé par l’image floue, néanmoins vivante, ne fût-ce que par l’intemporalité de l’amour qui unit le couple portraituré sur le tableau n° 15 (61 x 61 cm), le faisant triompher de la mort et du temps.

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Nous assistons ici à la superposition de la peinture sur la photographie dans le but, peut-être absurde, de retrouver, en quelque sorte, l’origine même de celle-ci, en recréant la patine temporelle propre au daguerréotype ou à la photo d’ « époque » cloitrée dans le vieil album que nous ne sortons jamais de peur de l’abîmer.

L’humain confronté au passé magnifié par la beauté qu’il exhale. C’est essentiellement cela qui teint lieu de ciment aux œuvres créées.

Comment décrire le temps qui passe ? Faut-il laisser flétrir l’ « autel », l’abandonner à sa propre finitude ? Faut-il que l’Art le recouvre d’une poussière toute romantique ? Temps et Art peuvent-ils chanter à l’unisson ? Ils le peuvent, néanmoins, l’un ne sera jamais au diapason avec l’autre, comme les aiguilles de la montre sous le coup de midi. Ils ne peuvent être qu’en décalage car le rôle vital de l’Art est celui de saisir le temps au moment où le pinceau amorce le geste et le restitue sur la toile de l’intemporalité. C’est en cela que le couple, pris dans l’instant de l’amour sur la toile défunte, ressuscite à la vie. 

Michel Marinus est professeur de Morale au Lycée Charles Janssens, à Ixelles. Il a fréquenté les Beaux Arts de Bruxelles.

 

François L. Speranza

Attaché critique d'Art au Réseau Arts et Lettres

Note de Robert Paul: la page de Michel Marinus sur le réseau arts et lettres

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Je poursuis mon exploration de l'anthologie - parue chez Folio Gallimard - qui reprend maints passages des Cahiers dits "de la Petite Dame".

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Etrange comme j'aime Maria Van Rysselberghe. Elle est belle. Talentueuse. Intelligente.  J'essaie d'imaginer, d'entrevoir les contours de cette personnalité multiple dont je me sens si proche (par certains côtés, restons modeste...). Epouse du peintre gantois, Théo Van Rysselberghe, (1862-1929), modèle du peintre Fernand Khnopff - qui a laissé à la postérité le portrait de la jeune et ravissante Maria Monnom... Elle est la fille d'un éditeur bruxellois ayant édité entre autres la revue "l'Art moderne".

Art moderne, Groupe des XX, Libre Esthétique... Une évolution dans l'art belge du XIXème déclinée en trois termes...

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L'original du tableau est au musée d'Orsay, il vient parfois à Bruxelles pour l'une ou l'autre rétrospective.

J'aimais d'abord ce portrait. Longuement regardé à une expo sur Khnopff aux musées des Beaux-Arts. C'est par d'autres recherches, d'autres lectures, que je suis revenue vers Maria Van Rysselberghe. Je me documentais sur l'amitié entre Gide, Dorothy et Simon Bussy (elle, née Dorothy Strachey, écrivain et traductrice de Gide vers l'anglais, lui, artiste peintre ami de Matisse - habitant La Souco, à Roquebrune-Cap-Martin), et puis, il y avait aussi les liens entre Gide et les Vanden Eeckhout, Le peintre Jean Vanden Eeckhout, dit "Vanden", réfugié en France pendant la guerre 14-18.Leur fille, artiste peintre et pastelliste, connue sous le nom de Zoum Walter, a publié ses mémoires dans un volume intitulé "Pour Sylvie" - sa fille, morte aux alentours de la vingtième année.

Et puis, finalement, il y a entre toutes ces personnes cet homme célèbre qui fait le lien: André Gide. On se trouve devant un vrai puzzle dont il est la pièce-pivot. Gide dont j'ai lu, dévoré "Les faux-monnayeurs", quand j'avais dix-huit ans et qui pourtant est une histoire très dure.

12272781678?profile=original"La lecture" (ou Verhaeren lisant) par Van Rysselberghe (1903)

avec, de gauche à droite:

Félix Le Dantec, le poète Francis Viélé-Griffin, le critique Félix Fénéon, l’écrivain Henri Ghéon, André Gide et Maurice Maeterlinck, et – vu de dos – Emile Verhaeren et le peintre Henri-Edmond Cross

(Se trouve-t-il au musée des Beaux-Arts de Gand ou dans le cabinet de Verhaeren reconstitué à la Bibliothèque Royale, à Bruxelles? C'est ce que j'essaie de vérifier...)

***

Le plus curieux est quand on découvre l'union libre et momentanée entre Gide et la fille du couple Van Rysselberghe, et la venue d'un enfant, Catherine, née en 1923, que Gide a reconnue et adoptée après la mort de son épouse. Au-delà de l'anecdote, cela montre à quel point Maria Van Rysselberghe et sa fille vivaient affranchies du carcan social et moral de cette époque. Tout en observant une grande discrétion. Jamais Maria Van Rysselberghe n'émet de jugement. Elle n'a jamais un mot de blâme. Et son amitié avec André Gide est profonde au point qu'ils habitent tous deux un appartement sur le même palier de la même maison, à Paris, rue Vaneau 1bis, au Vaneau, comme on disait. Et vers 1918, elle entreprend la rédaction des cahiers qui seront un compte-rendu fidèle de la vie de Gide: dans ses rapports avec l'entourage et les amis, sur le plan littéraire et artistique, sur le plan politique aussi (il y a le compte-rendu de ses voyages en URSS), sur leur vie culturelle (ils assistent au renouveau du théâtre Yiddish - malgré un certain anti-sémitisme de Gide, un anti-sémitisme d'époque, hélas, qui s'arrête évidemment en 40-45, devant l'horreur des camps de concentration - enfin, d'extermination)... Et ainsi de suite jusqu'à la mort de Gide, en 51.

Et puis, il y a aussi cet amour qu'elle a nourri pour Verhaeren. Quand j'étais élève en première année de peinture, j'avais un professeur de peinture extrêmement calé en histoire de l'art. Aller au musée avec lui, ou dans une expo (comme Van Rysselberghe à Bruxelles ou Bonnard à Paris), c'était une vraie fête. Nous avions discuté de cette relation entre le poète et la femme du peintre et il m'avait conseillé de lire le récit "Il y a quarante ans". C'est très beau. Cela décrit un été à la mer, en Belgique, dans une fermette flamande, et une communion spirituelle et passionnée entre Verhaeren et Maria Van Rysselberghe d'où toute équivoque est très vite balayée. Là aussi, elle a attendu la mort de Marthe Verhaeren (son mari lui, est mort en 1929) pour publier ce petit récit et quelques annexes critiques.

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Voilà une femme - dans un monde exclusivement d'hommes, dominé, fait par et pour les hommes, le monde littéraire et artistique à cette époque -et en Belgique- ne fait certes pas la part belle aux femmes... Mais voilà qu'en dépit des obstacles, elle oeuvre dans l'ombre, et fait oeuvre de critique et de mémorialiste infiniment précieuse. Elle est encouragée - dans une certaine mesure- par Gide, plus qu'il n'a encouragé Dorothy Bussy, laissant ainsi passer la chance (pour les éditions Gallimard) d'éditer son unique roman, "Olivia. Par Olivia". Pour cet écrivain, c'est la Hogarth Press (en Angleterre) et Stock, à Paris, pour la version en français, qui "emporteront le morceau".

C'est toute une époque qui nous est ainsi restituée, et des célébrités - dans toute leur épaisseur vivante, loin des pages d'anthologie scolaire - qui nous deviennent étonnamment familières, et par là, plus humaines...

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Maria et Elisabeth Van Rysselberghe, par Théo Van Rysselberghe.

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administrateur théâtres

les Midis Minimes (Conservatoire royal de Bruxelles)

Gagnez vos places pour les Midis Minimes

Du 02 au 31 juillet, à 12h15, au Conservatoire royal de Bruxelles

 

Pour sa 26ème édition, les Midis-minimes débutent avec un concert d’ouverture qui associe le Quatuor Danel, un des plus grands quatuors d’aujourd’hui, et le jeune et talentueux Quatuor Alfama, pour l’irrésistible Octuor op. 20 de Mendelssohn !


La suite des concerts traduira cette même jubilation des artistes à explorer les répertoires et les effectifs selon des approches neuves et créatives, en faisant jouer librement les affinités et les coups de cœur, depuis les chants immémoriaux de la Sibylle ou la musique traditionnelle sénégalaise jusqu’aux quatuors de Chostakovitch ou encore au lumineux Souvenir de Florence de Tchaïkovski, ultime concert de l’été…


Concrètement, y aura-t-il quelque chose de changé ? Rien pour le public ni pour l’équipe si ce n’est le sentiment que tout ce qui fait la personnalité des Midis-Minimes continue à se déployer naturellement, avec une programmation captivante et variée – toujours déclinées selon les cinq jours de la semaine –, accessible au plus grand nombre dans les meilleures conditions d’écoute et pour un prix inchangé.

http://www.midis-minimes.be/fr/calendrier.php


Mais, de façon plus immatérielle, il règnera sans doute ce sentiment heureux de savoir que les musiciens – dont certains sont des partenaires de la première heure – trouveront au festival une plus grande reconnaissance de leur travail et de leur art. Pour tous, la fidélité aura porté ses fruits.

A partir de 2012, et pour une durée de 4 ans - soit la durée de son prochain contrat-programme – il voit la subvention de la Fédération Wallonie-Bruxelles augmenter de façon substantielle. Cette augmentation profitera directement à ceux qui, depuis la fondation du festival, en 1986, se sont constitués comme ses premiers mécènes: les artistes. Au lendemain des festivités de notre 25e anniversaire, cette hausse de subvention atteste aussi la confiance des pouvoirs publics en l’avenir du festival et nous permet de repartir pour 25 ans (au moins) !


MUSIQ'3 VOUS OFFRE DES PLACES !

http://www.rtbf.be/musiq3/concours/detail_gagnez-vos-places-pour-les-midis-minimes?id=35273

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Le conte vu par Rébecca

http://lalyredalize.org/accueil.html

 

Le conte magique imagé

 

-     Univers magique de beauté, le livre de conte avec aquarelles originales devient ce compagnon précieux et mystérieux renfermant des trésors, parfois venus de la nuit des temps et parlant droit au cœur par son récit profond,  imagé par des gestes d’âme colorés. Par ses peintures aux teintes expressives, aux couleurs douces ou vives, il  ouvre des mondes de liberté où l’imagination peut s’étendre à l’envie et rêver.  Ici chaque conte est un paysage d’âme, l’un est coloré comme l’été flamboyant et l’autre doux et recueilli comme nous sommes au cœur de l’hiver. Une communion peut s’opérer, à chaque page, dans chaque image.

  
La portée du conte et sa valeur pédagogique profonde -
 
Le conte initie à la Magie du Verbe, au mot juste, aux phrases harmonieuses, musicales et bien équilibrées.
Par lui, l’enfant, puis l’élève s'imprègne de la structure logique du récit. Il enrichit aussi bien son imaginaire, que son français et peut prendre goût à l'élocution, à la narration.
Le conte donnée en récit développe aussi le sens de l'écoute, dans une qualité d'intériorité très profonde, écoute non seulement en soi, mais aussi des autres dans cette "ronde" d'écoute.
Le conte développe tout naturellement le goût de la lecture -
 
Le livre devient ce compagnon précieux et mystérieux renfermant des trésors si variés, venant de la nuit des temps et parlant droit au cœur par l'image verbale, car il est montré à l'enfant comment les contes sont recueillis dans ces ouvrages à déchiffrer.
L'essence du conte, nourriture essentielle
 
Les contes, ces histoires en images, ne sont pas inventés à la manière des créations littéraires. Ils descendent soit des grandes mythologies et sont des émanations d'une mémoire populaire relatant les récits d'initiés, soit ils proviennent d'une imagination toute inspirée. Mais tous décrivent les pérégrinations de l'âme dans sa quête pour devenir.
De fait, le conte est intemporel car en joignant l'en deçà et l'au-delà, il devient puissance évocatrice, création d'un imaginaire à la fois universel et propre à chaque personne.
 
Le conte est un art suggestif et évocateur riche en significations et retentissant de portée intérieure mais extérieurement, c’est un art discret et modeste qui ne demande qu’à être transparent pour laisser briller les joyaux cachés contenu à l’intérieur du conte.
 
Il permet la formation d’images intérieures libres qui évoluent au fil du temps. Aussi les illustrations qui le servent doiventelles être d'une grande délicatesse de suggestion et laisser encore une grande ouverture possible au rêve et à l'imagination, à la représentation personnelle.
 
Les images verbales du conte sont des archétypes de portée symbolique vécues au second degré, au sens figuré et non au sens propre. Ainsi elles agissent doucement dans l’être de l’enfant lui permettant tout un cheminement intérieur personnel d’identification et de métamorphose  au cours des années.
 
Le conte est source de forces morales. Il stimule les élans les plus nobles de l'âme humaine et  la renforce dans ses impulsions de combattre tout ce qui est petit et mesquin et de cheminer résolument dans la voie du bien, avec courage.
 
Les contes continuent à vivre dans l'âme de l'enfant et l'éduquent de l'intérieur, lui permettent de développer une moralité vraiment personnelle. D’ou l'importance de ne pas défigurer le conte en le moralisant. Un conte authentique est sans jugement car il a sa force en lui-même et il a le pouvoir de renforcer la confiance et la positivité à l'égard de la vie et du monde : les contes ont une fin heureuse véhiculant force intérieure, espoir et justice. Et c'est pourquoi nous recherchons des couleurs lumineuses douces ou intenses.
 
Le conte décrit en tableaux simples les épreuves que l'homme doit traverser pour s'accomplir et trouver la cohésion de son être dans la confiance en soit et au monde.
Il permet, grâce au talent du conteur de pouvoir extérioriser ses angoisses  et sa peur devant un monde imaginaire inconnu ou connu, mais dont l'image doit rester discrète pour laisser libre place aux représentations intérieures personnelles.
 
Le conte est proche de la nature de l'enfant par sa nature volontaire faite d'actions où la réflexion est plus intuitive que réfléchie. Le conte se rapproche aussi de l'enfant par l'irrationnel qu'il suggère et comme dans son jeu imaginatif, il ouvre tous les possibles.
 

Conscient d’une telle portée dépeinte par nous et du fait qu’il s’agit ici d’un monde intérieur et non de réalités proprement dites et concrètes, -  nous avons à cœur de faire en sorte  que l’image colorée soit toujours subtile et non trop appuyée, ni théâtrale – et encore moins caricaturale - dans sa représentation, pour laisser encore libre le cheminement intérieur. Et surtout nous avons à cœur que par son traitement des couleurs, les images illustrées soient fidèles à la mission des contes d’être rayonnants et positifs, car les contes éveillent à une transcendance et  ouvrent l’avenir.

Sur quoi peut ouvrir le Conte à l’école ?
 
Il y a bien des façons de faire fructifier un conte, après tout un temps de gestation à respecter bien sûr. Cependant, le conte doit rester un cadeau, du domaine du plaisir récréatif (malgré les questions sérieuses qu'il traite), et donc il ne serait pas adéquat qu'il aboutisse à un devoir noté.
Si l'ambiance est préservée par le professeur, le fil bien gardé, le conte peut susciter chez l'élève:
* un récit libre faisant appel à son élocution, sa mémoire, son imagination,
* un récit écrit, rédaction libre faisant appel en plus à l'orthographe et une plus grande concentration et approfondissement sur tous les plans: français et imagination,
* des dessins, des peintures partant du conte,
* une expression par les marionnettes,
* des saynètes, du théâtre,
* une recherche de livres, ou sur un thème donné en lien au conte.
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administrateur théâtres

Du 7 au 28 Juillet 2012 en Avignon

L’Ivresse du boudoir

Textes : Alfred de Musset, Ovide, Marquis de Sade

et Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt

Production : Théâtre d’Une Pièce

Théâtre de la Clarencière - Théâtre du Verbe Fou, 95, rue des Infirmières, 84000 Avignon

Réservations : 04 90 85 29 90

Et en ligne sur www.leverbefou.fr

 

Le Verbe Fou est un petit lieu de caractère dont la profession de foi est le texte de répertoire classique, contemporain, philosophique quelle que soit sa forme.

Ce théâtre littéraire attaché au Verbe dans tous ses états vit grâce à la passion qui anime son équipe dynamique.

Le Verbe Fou, frère cadet de la Clarencière à Bruxelles, a pour vocation tout ce qui touche au Verbe. Son équipe travaille en permanence à la présentation d’oeuvres fortes ou de sujets de société, poétiques et esthétiques. Il apporte dans ses choix présentés au public, un  soin particulier au fond et à la forme et poursuit son chemin avec un souci constant de qualité et de convivialité. Sa fondatrice, Fabienne Govaerts et son équipe sont heureux de vous inviter au voyage pour ce nouveau Festival que nous souhaitons riche d’émotions et de découvertes.

 

L’Ivresse du boudoir

** Création 2012 **

A l’orée de textes d’auteurs de facture classique en prose ou en poésie, le metteur en scène s’est permis la fantaisie d’intégrer divers écrits ou chansons polissonnes.

La qualité littéraire toujours présente tisse au long du spectacle un fil rouge fait de croustillance, de moments mutins mais également de tendresse et d’humour.

Au cœur d’un univers coquin les comédiens enthousiastes virevoltent dans leurs atours d’époque en confrontant l’univers poétique de Musset à l’univers décadent du marquis de Sade.

Il fallait oser cette promenade littéraire et amoureuse !

Tisser, coudre, broder. De Pénélope à la reine Mathilde, épouse de Guillaume le Conquérant, voici la stratégie féminine à l’œuvre. Combien de  mains féminines  n’ont-elles pas  cousu l’amour et les cœurs dans des ouvrages délicats et exprimé ainsi  leurs attentes et leurs révoltes. Des bonnes fées aux sorcières les plus déterminées le transfert d’émotions passe par l’aiguille. Le rappel d’émotions tendres et des vœux d’amour éternel : voici une femme qui coud sa passion dans une bourse grenat  pour son galant homme de mari, oublieux de sa jeune et jolie épouse, étourdi par une coquette. « Allons, vive l’amour que l’ivresse accompagne ! » Ivresse de l’aiguille créatrice, ivresse de l’aiguillon de l’amour.

Bernard Lefrancq, amoureux du Verbe Fou  se met à l’ouvrage et nous livre de la haute  couture poétique en tricotant  avec délicatesse des textes de la plume érotique du marquis de Sade,  le  libertinage de Musset, Ovide et le Catéchisme libertin  d’Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt. Par passion du verbe, par passion de l’amour. Le verbe fou dans toute son ardeur et ses vérités sur la nature de l’homme, de la femme, des idéaux humains.

Le résultat est Ivresse de Boudoir, ce spectacle délicieux présenté à la Clarencière où trois personnages voguent entre le 18e et le 19e siècle, entre  badinage, fantasmes, et tourments de la  jalousie. Mathilde est revenue. Frémissements de belles robes, connivences féminines, éclairages aux bougies, baisers volés, soufflets, billets doux et mari épinglé, virevoltent  avec humour et tendresse. Le Boudoir est certes désuet, mais l’ivresse théâtrale est bien présente quoique trop vite enlevée.  Un   rendez-vous de l’esprit et du cœur,  celui de la musicalité de la langue et des voix de comédiens, jeunes et passionnés. Heureux qui communique, de l’aiguille au verbe libéré. C’est le lieu  du commentaire intérieur du spectateur en recherche lui aussi d’absolu qui reste à vibrer longtemps sous la peau. Déjeuner sur l’herbe, diablement court! On en redemande !

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Avec: Iris CHRISTIDIS, Olivier GARDENAL, Elodie VANDENPLAS

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Témoignages d’écrivains sur la langue française

EUROPE

Stéphane Hessel (Berlin, 1917)
Né allemand, acquiert la nationalité française en 1937. S’engage dans les Forces françaises libres. Devient diplomate et haut représentant de la France.
« De cette France revendiquée j’adopte les institutions et les multiples aspects de l’héritage culturel et historique : non seulement la Révolution de 1789 et la Déclaration des droits de l’homme, mais encore la valorisation sans cesse renouvelée de l’intelligence et de la tolérance, de la lucidité et du respect de l’autre : Montaigne, Pascal, Voltaire, Georges Sand ; la conquête des libertés modernes : Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Apollinaire ; la profonde clarté d’une langue analytique, articulée, précise. »
(« Danse avec le siècle », par Stéphane Hessel, Seuil, 1997, p. 39)

Rainer Maria Rilke (Prague, 1875-1926)
Poète autrichien de langue allemande. secrétaire de Rodin.
« Oui, j’aime écrire en français, quoique je ne sois jamais arrivé à écrire cette langue (qui plus que toute autre oblige à la perfection, puisqu’elle la permet) sans incorrections et même sans d’insidieuses fautes… Je me rappelle qu’une des premières raisons de me passer une poésie française fut l’absence de tout équivalent à ce délicieux mot : Verger. »
(Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Editions Richelieu-Senghor, 1988, p. 102)
« Quelle joie que de pouvoir confier à une langue aussi consciente et sûre d’elle-même, une sensation vécue, et de faire en sorte qu’elle introduise en quelque manière dans le domaine d’une humanité générale… Elle académise, si j’ose m’exprimer de la sorte, la contribution frappée à sa marque et déversée en elle, et lui donne ainsi l’aspect d’une noble chose comprise. »
(Extrait de « Vergers », Gallimard, 1926)

John Brown (Angleterre)
Poète anglais et critique éminent. Auteur en français d’une remarquable histoire des lettres américaines.
« Je sais qu’au début, émerveillé, je maniais le français avec l’insouciance et l’audace d’un alpiniste débutant, qui se balance sur les abîmes sans penser aux dangers. Tout était permis : Je me trouvais dans un nouveau pays où je ne connaissais personne, où personne ne me connaissait. Les contraintes de ma langue natale disparaissaient. Je pouvais sauter, danser, marcher sur la tête, je ne craignais ni le ridicule ni l’extravagant. J’étais l’enfant qui tambourine sur un antique clavecin, le barbare qui pille joyeusement les temples millénaires. »
(Revue internationale de culture française)

Julia Kristeva (Bulgarie)
Professeur à Paris VII. Epouse de Philippe Sollers. Auteur de « Etrangers à nous-mêmes » (Folio, 1988).
« Ecrire en français, ce fut me libérer. Geste matricide. Quitter l’enfer : cette langue est devenue mon seul territoire. Désormais, je ne rêve plus qu’en français. »
(André Brincourt)

Michel del Castillo (Madrid, 1933)
A fui l’Espagne franquiste, en 1953, pour Paris. Romancier célèbre et chrétien engagé.
« C’est vrai que j’ai eu beaucoup de mal avec l’Espagne, mais maintenant cela va beaucoup mieux. Je suis en fait assez content de ma position, être un écrivain français d’origine espagnole me permet d’avoir une certaine distance vis-à-vis des deux pays. »
(Entrevue, dans Vers l’Avenir, Namur, 18 août 1997)

Jorge Semprun (Madrid, 1913)
Emigré à Paris, en 1936. Déporté à Buchenwald. Ministre en Espagne après Franco.
« Nous avions la passion que peuvent avoir des étrangers pour la langue française quand celle-ci devient une conquête spirituelle. Pour sa possible concision chatoyante, pour sa sécheresse illuminée… L’ espagnol est une langue très belle, mais qui peut devenir folle et grandiloquente, si on lui lâche la bride. Cioran parlait du français comme d’une langue de discipline. Je le crois, le français m’aide à maîtriser mon espagnol. »

Jan Baetens
Critique et poète flamand
« En choisissant librement le français, je cherche aussi à maintenir vivante la tradition de liberté du français, langue et culture des lumières dont il est nécessaire de rappeler l’héritage. J’écris en français pour me libérer de mes particularités trop partisanes, de tout ce qui me limite, des préjugés, des idées trop vite faites, des certitudes trop commodes à porter. »
(Carte blanche, extraits. Le Carnet et les Instants, novembre 1998- - janvier 1999)

Marie Gevers (Edegem, 1883-1975)
Romancière flamande intimiste de grand renom.
« J’ai reçu le français comme instrument familier et bien aimé. Je n’ai pas choisi cette langue. Je me trouve au point de jonction des deux cultures. Et ces deux routes se joignent dans mon cœur. »
(Marie Gevers et la nature, par Cynthia Skenazi, Palais des Académies, 1983, p. 81).

Emile Verhaeren (Saint Amand, 1856-1916)
Etudes au Collège jésuite de Gand (en français) avec Georges Rodenbach. Figure dominante de la littérature belge de langue française. Chantre de la Flandre.
« La plus solide gloire de la langue française, c’est d’être le meilleur outil de la pensée humaine ; c’est d’avoir été donnée au monde pour le perfectionnement de son sentiment et de son intelligence ; c’est en un mot, d’être faite pour tous avant d’appartenir à quelqu’un. Ah ! Si un jour il se pouvait faire que toute la force et tout le cœur et toute l’idée et toute la vie des Européens unis s’exprimassent en elle avec leur infinie variété d’origine et de race… »
(Revue internationale de culture française)

Vassilis Alexakis Grèce) 1944
Partage sa vie entre Athènes et Paris. Prix Médicis 1995 pour « La langue maternelle ».
« Nous sommes les enfants d’une langue. C’est une identité que je revendique. J’écris pour convaincre les mots de m’adopter. »
(« La langue maternelle », Fayard, 1995)

Jean Moreas (né Papadiamantapoulos, Athènes, 1856-1910
Amoureux de la France. Prince de l’école symboliste.
« Mon père voulut m’envoyer étudier en Allemagne. Je me révoltai. Je voulais voir la France. Deux fois je me sauvai de mon foyer et pus enfin gagner Paris. Le destin m’a montré la route –mon étoile me guidait- pour que je devienne le plus grand des poètes français. »
(Revue internationale de culture française)

Samuel Beckett (Dublin, 1906-1990)
Ecrivain de langue anglaise qui s’est imposé par son théâtre en langue française. Prix Nobel de Littérature.
« Son bilinguisme anglais-français lui permet d’assurer à sa pensée une équivalence d’expression dans chacune des langues qui lui sont également familières… Le langage ne compte pas d’abord en tant que porteur d’idées, ce sont les mots, quoique imparfaits, chacun d’eux pris séparément et en même temps dans ses rapports avec les autres, qui isolent l’idée pour la mettre en valeur, soit prononcée, soit suggérée, soit très sous-jacente. »
(Louis Perche dans « Beckett », Le Centurion, 1969, p. 118-119)

Carlo Coccioli (Livourne, 1920)
Emule de Bernanos, auteur du roman « Le Ciel et la Terre ».
« Disons que je sens en italien et que je parle en français. »
(dans « La Voix au cœur multiple »)

Emmanuel Lévinas (Kaunas, Lituanie, 1905-1995)
Philosophe d’origine juive. A élaboré en français sa phénoménologie.
« J’ai souvent pensé que l’on fait la guerre pour défendre le français, c’est dans cette langue que je sens les sucs du sol. »
(Le Monde, 19 janvier 1996)

Oscar Vladislas de Lubicz-Miloz (Czereïa, Biélorussie, 1877- Fontainebleau, 1939)
Prince balte, grand poète français. Auteur d’un chef-d’œuvre : Miguel Manara.
« Honneur à la France, pays de cristal, patrie de la pure raison. »
(dams « Milosz, par Armand Godoy, Fribourg, 1944, p. 207)

Marel Halter (Varsovie)
D’origine juive. Rescapé des camps d’extermination.
« C’est en France, plus tard, dans cette France réelle que j’ai découverte à l’âge de quatorze ans, que j’ai appris la liberté en même temps que le français. C’est pourquoi, bien que parlant plusieurs langues, je ne peux écrire, pleurer, rire ou rêver qu’en français. Seule langue dans laquelle je n’ai connu aucune oppression. »
(« Contacts », Paris, janvier 1996-décembre 1997)

Emil Michel Cioran (Raschinari-Sibiu, Roumanie, 1911-1995).
En France depuis 1937. Devenu chef de file de la pensée française.
« La langue française m’a apaisé comme une camisole de force clame un fou. Elle a agi à la façon d’une discipline imposée du dehors, ayant finalement sur moi un effet positif. En me contraignant, et en m’interdisant d’exagérer à tout bout de champ, elle m’a sauvé. Le fait de me soumettre à une telle discipline linguistique a tempéré mon délire. Il est vrai que cette langue ne s’accordait pas à ma nature, mais, sur le plan psychologique, elle m’a aidé. Le français est devenu par la suite une langue thérapeutique. Je fus en fait moi-même très surpris de pouvoir écrire correctement en français, je ne me croyais vraiment pas capable de m’imposer une telle rigueur. Quelqu’un a dit du français que c’est une langue honnête : pas moyen de tricher en français. L’escroquerie intellectuelle y est quasi impraticable. »
(« Itinéraires d’une vie », par Gabriel Lûceanu.)

Eugène Ionesco (Slatina, Roumanie, 1912-1994)
Membre de l’Académie française. Consécration mondiale au théâtre avec « La Leçon » et « La Cantatrice chauve ».
« Si je suis citoyen français, c’est que j’ai fait un choix, qu’une patrie avait la priorité. J’ai choisi le pays de la liberté. »

Romain Gary (Moscou, 1914-1980)
D’un père émigré en Pologne. Volontaire de la France libre. Amoureux de De Gaulle. Diplomate français. Deux fois Prix Goncourt avec « Les Racines du ciel » et « La Vie devant soi ». S’est suicidé.
« Je plonge mes racines littéraires dans mon métissage… La France libre est la seule communauté humaine à laquelle j’ai appartenu à part entière. »
(André Brincourt)

Andreï Makine (Novgorod, 1957)
Venu de Russie aux lettres françaises. Pris Goncourt 1995 pour « Le Testament français ».
« Le français de Charlotte avait gardé une extraordinaire vigueur, dense et pure, cette transparence d’ambre qu’acquiert le vin en vieillissant. Cette langue avait survécu à des tempêtes de neige sibériennes, à la brûlure des sables dans le désert de l’Asie, et elle résonne toujours au bord de cette rivière. »
(« Le Testament français », Mercure de France)

Henry Troyat (né Lev Tarassov, Moscou, 1911)
Venu à Paris en 1920. Couvert de prix. Membre de l’Académie française (1959). Beaucoup de romans et de biographies, inspirées par la Russie.
« Je vivais la moitié du jour à Paris et la moitié du jour à Moscou. J’étais partagé entre le passé et le présent, sollicité, tour à tour, par des fantômes surannés et par des visages vrais et actuels, par une première patrie, lointaine, inaccessible, fuyante, et par une seconde patrie, qui bourdonnait autour de moi, me tirait à elle, m’emportait dans un tourbillon. Pendant longtemps, j’avançai, tant bien que mal, un pied sur les nuages russes et l’autre sur la terre ferme française. Puis, l’équilibre se fit, insensiblement, entre ces deux séductions rivales. Je devins Français, tout en conservant une tendresse particulière pour la contrée de rêve dont m’entretenaient mes parents. »
(« Revue internationale de culture française »)

Milan Kundera (Brno, 1929)
Ecrivain français de langue tchèque. Exilé en France. A fini par écrire directement en français (par exemple « Les testaments des trahis »).
« C’était l’occupation russe, la période la plus dure de ma vie. Jamais je n’oublierai que seuls les Français me soutenaient alors. Claude Gallimard venait voir régulièrement son écrivain pragois qui ne voulait plus écrire. Dans ma boîte, pendant des années, je ne trouvais que des lettres d’amis français. C’est grâce à leur pression affectueuse et opiniâtre que je me suis enfin décidé à émigrer. En France, j’ai éprouvé l’inoubliable sensation de renaître. Après une pause de six ans, je suis revenu, timidement, à la littérature. Ma femme, alors, me répétait : La France, c’est ton deuxième pays natal. »

Elie Wiesel (Signhet, Transylvanie, 1928)
Rescapé des camps d’extermination. Parle et écrit quatre langues : yiddish, hébreu, français, anglais. A choisi le français pour langue littéraire parce que c’est la langue qui l’a réconcilié avec le monde et c’est en français qu’il a lu ses deux maîtres : Kafka et Dostoïevski.
« C’est le français qui m’a choisi. »
(Dans « Auteurs contemporains », n° 6, Bruxelles, Didier-Hatier, p., 50


AFRIQUE NOIRE ANTILLES OCEAN INDIEN

Paulin Joachim (Cotonou, Bénin, 1931)
Etudes de journalisme. Directeur de « Bingo ».
« Je me suis enraciné loin dans la langue française pour pouvoir en explorer les profondeurs… et je peux affirmer aujourd’hui que je lui dois tout ce que je suis. »
(« Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Ed. Richelieu Senghor, 1998)

Sony Labou Tansi (Kimwanza, 1947-1995)
Né de père zaïrois, un des écrivains les plus créateurs de l’Afrique noire, notamment au théâtre. Mort du sida.
« On me reproche d’écrire en français, langue de l’acculturation. Une chose me fait sourire : les reproches me sont faits en français et je les comprends mieux comme cela. Cela ne veut, certes, pas dire que je balance la langue kongo par dessus bord pour épouser la belle prisonnière de Malherbe. Le monde actuel est essentiellement fait de métissage. Comment pourrait-il en être autrement ? Je suis Kongo, je parle kongo, j’écris en français. Ma kongolité ne peut pas s’exprimer en dehors de cette cruelle réalité. »

Léopold Sédar Senghor (Joal, 1906)
Père de la négritude, premier président du Sénégal indépendant. Membre de l’Académie française. Un des plus grands poètes français.
« Le français, ce sont les grandes orgues qui se prêtent à tous les timbres, à tous les effets, des douceurs les plus suaves aux fulgurances de l’orage. Il est, tour à tour et en même temps, flûte, hautbois, trompette, tam-tam et même canon. Et puis le français nous a fait don de ses mots abstraits –si rares dans nos langues maternelles- où les larmes se font pierres précieuses. Chez nous, les mots du français rayonnent de mille feux comme des diamants. Des fusées qui éclairent notre nuit. »

René Depestre (Jacmel, Haïti, 1926).
Exilé. Séjour à Cuba. Haut fonctionnaire à l’Unesco.
« De temps en temps il est bon et juste
de conduire à la rivière
la langue française
et de lui frotter le corps
avec des herbes parfumées qui poussent en amont
de mes vertiges d’ancien nègre marron.
Laissez-moi apporter les petites lampes
créoles des mots qui brûlent en aval
des fêtes et des jeux vaudou de mon enfance :
les mots qui savent coudre les blessures
au ventre de la langue française,
les mots qui ont la logique du rossignol
et qui font des bonds de dauphins
au plus haut de mon raz de marée,
les mots qui savent grimper
à la folle et douce saison de la femme,
mes mots de joie et d’enseignement :
tous les mots en moi qui se battent
pour un avenir heureux,
Oui, je chante la langue française
qui défait joyeusement sa jupe,
ses cheveux et son aventure
sous mes mains amoureuses de potier. »
« Bref éloge de la langue française », Haïti, 1980)

Léon Laleau (Port-au-Prince, 1892-1979)
Sa « Musique nègre » date de 1931.
« Ce cœur obsédant, qui ne correspond
Pas à mon langage ou à mes costumes,
Et sur lequel mordent comme un crampon,
Des sentiments d’emprunt et des coutumes
D’Europe, sentez-vous cette souffrance
Et ce désespoir à nul autre égal
D’apprivoiser, avec des mots de France,
Ce cœur qui m’est venu du Sénégal. »
(Dans « Francité », par Joseph Boly, Bruxelles Fondation Plisnier, 1984, p. 36)

Jean Métellus (Jacmel, 1937)
Eloigné de son pays. Neurologue à Paris.
« Je tiens à la francophonie non pas pour une quelconque raison esthétique mais parce que tout le passé d’Haïti a été exprimé dans cette langue. »
(Dans « Florilège »)

Raphaël Confiant (Lorrain, Martinique, 1951)
Appartient à la nouvelle génération des Antillais décolonisateurs de la langue française, avec Patrick Chamoiseau (Prix Goncourt pour « Texaco »). Co-auteur de « Eloge de la créolité ».
« Je suis français. Césaire est français. Mais nous ne sommes pas que français. Je ne peux pas écrire comme un Hexagonal. Je ne crois pas que les canadiens Gaston Miron ou Antoine Maillet soient seulement français, et ce qui est intéressant dans leurs livres, ce n’est pas la Francité mais la Canadianité. »
(André Brincourt)

Edouard Glissant (Bezaudin, Martinique, 1928)
Ecrivain mondialement consacré depuis longtemps. Prix Renaudot pour « La Lézarde » (Seuil, 1958)
« Je crois que la francophonie peut être un lieu de lutte pour l’explosion de toutes les langues, et c’est seulement à ce prix, selon moi, qu’elle aura mérité d’être. »
(Dans « Florilège »)

Jean-Joseph Rabearivelo (Tananarive, 1901-1937)
Poète maudit et déchiré. Auteur des « Calepins bleus ». S’est suicidé en pensant à Baudelaire.
« J’embrasse l’album familial. J’envoie un baiser aux livres de Baudelaire que j’ai dans l’autre chambre –Je vais boire- C’est bu- Mary (sa femme). Enfants. A vous tous mes pensées les dernières –J’avale un peu de sucre –Je suffoque. Je vais m’étendre…
(Dans « La Voix au cœur multiple »)

Jacques Rabemananjara (Maroantsera, 1913)
A grandi à Tananarive. Ecrivain majeur des lettres françaises.
« La langue française est un objet d’amour pour nous… Nous avons été tellement séduits par la langue française que c’est à travers cette langue française que nous avons réclamé notre indépendance… Débarrassée de toute connotation impérialiste et dominatrice, la langue française a été choisie par nous-mêmes pour être un instrument idéal, le véhicule qui nous permet de communiquer aisément avec des millions d’êtres humains et de lancer, de par le monde, notre propre message. »
( « Florilège »)

Raymond Chasle (Brisée-Verdière, Ile Maurice, 1930-1996)
Etudes à Londres. Diplomate de haut niveau. Métis et poète à la manière de Mallarmé et d’Apollinaire.
« La langue française m’a permis de résoudre mes tensions intérieures, de transcender mes écartèlements. Langue de toutes les succulences et de toutes les résonances, elle est, pour moi, le support privilégié de la mémoire, de la connaissance et du combat. »
( « Florilège »)


MONDE ARABE

Jean Amruche (Kabylie, 1906-1962)
Poète et essayiste. Se voulait être un pont entre les communautés algérienne et française.
« Ses rigueurs (du français) satisfont un besoin essentiel de mon esprit. Sa souple, sévère, tendre et quasi insensible mélodie, touche, éclaire, émeut mon âme jusqu’au fond. »
(Le Figaro littéraire, 13 avril 1963)

Mohamed Dib (Tlemcen, 1920)
Romancier et poète. regard lucide sur le monde et les siens.
« (Le français), c’est le véhicule idéal d’une pensée qui cherche, à travers les réalités locales, à rejoindre les préoccupations universelles de notre époque. »
(« Florilège de la langue française », par Xavier Deniau, Evreux, Ed. Richelieu-Senghor, 1988)

Tahar Djaout (Algérie, 1954-1993)
Prix Méditerranée 1991. Assassiné à Alger, le 2 juin 1993.
« L’écrivain n’use-t-il pas inévitablement d’une langue différente, d’une langue de l’étrangeté… empruntant les détours d’une langue non natale, aller plus loin dans l’exil et, partant, dans l’aventure. »
(« La Quinzaine littéraire », Paris, 15 mars 1985)

Assiaz Djebar (Cherchel, 1936)
Romancière et cinéaste.
« Il y a un pont à établir… du français conceptuel à l’arabe luxuriant, il y a quelque écho commun, mais si fragile, si secret… une fluidité, une coulée qui est à la fois française et arabe. »
(Dans « La Voix au cœur multiple ») + Anth. Nathan (p. 376-7)

Malek Haddad (Constantine, 1927-1978)
Poète et romancier. déchiré de ne pouvoir écrire en arabe.
« Je suis en exil dans la langue française. Mais des exils peuvent ne pas être inutiles et je remercie sincèrement cette langue de m’avoir permis de servir ou d’essayer de servir mon pays bien aimé. »
( « Florilège »)

Mouloud Mammeri (Kabylie, 1917-1989)
De sa langue maternelle berbère au roman français. Auteur de « La Colline oubliée » (1952). Mort accidentelle.
« Le français n’est pas ma langue maternelle. J’ai eu bien du mal à apprendre l’imparfait du subjonctif antérieur. Or si je veux m’exprimer, je ne peux le faire que dans cette langue. On peut être nationaliste algérien et écrivain français. Je crois, d’ailleurs, qu’avec l’indépendance, la langue française prendra un nouvel essor. Elle ne sera plus l’instrument d’une coercition, la marque d’une domination. Elle sera le canal de la culture moderne. Pour moi, je n’envisage pas d’écrire jamais dans une autre langue. »
(Le Figaro littéraire », 31 décembre 1955 et « Témoignage chrétien », 24 janvier 1958)
« La langue française est pour moi un incomparable instrument de libération, de communion ensuite avec le reste du monde. Je considère qu’elle nous traduit infiniment plus qu’elle nous trahit. »
(« France Information », n° 122, Paris, 1984)

Khalida Messaoudi
Pour elle, comme pour beaucoup d’autres, la résistance au terrorisme islamique en terre d’Algérie se fait d’abord en langue française.
« Bien sûr, j’avais déjà étudié Nedjma (de Kateb Yacine) sans le comprendre vraiment. J’ai écouté cet homme (Guenzet) parler dans un français exceptionnel et nous lancer : « Le français, c’est un butin de guerre . » Pour la première fois, je me suis mise à réfléchir en français, mais plus comme à la langue donnant accès aux textes de littérature ou de philosophie. Je m’interrogeais sur son statut en Algérie. Je me suis rendu compte que Kateb –comme Mouloud Mammeri ou Mohamed Dib et d’autres- l’avait utilisé, lui, comme arme de combat contre le système colonial, comme arme de conceptualisation. Dès lors je ne trouvais plus seulement naturel de parler français, je me disais : « C’est génial, je suis en train de me l’approprier comme un instrument. Jamais je ne laisserai tomber ça. » Vois-tu, c’est cette Algérie-là pour laquelle je me bats, une Algérie où il est possible d’être en même temps berbérophone, francophone et arabophone, de défendre le meilleur des trois cultures. Le message de Guenzt se trouvait dans cette vérité, et ma mémoire l’a enregistré pour toujours. »
(« Une Algérienne debout », Flammarion, 1995, coll. J’ai lu, p. 81-82)

Kateb Yacien (Constantine, 1929-1989)
D’une renommée internationale avec « Nedjma » (1956) au théâtre en langue arabe.
« La plupart de mes souvenirs, sensations, rêveries, monologues intérieurs, se rapportent à mon pays. Il est naturel que je les ressente sous leur forme première dans ma langue maternelle. Mais je ne puis les élaborer, les exprimer qu’en français. Au fond, la chose est simple : mon pays, mon peuple sont l’immense réserve où je vais tout naturellement m’abreuver. Par ailleurs, l’étude et la pratique passionnées de la langue française ont déterminé mon destin d’écrivain. Il serait vain de reculer devant une telle contradiction car elle est précieuse. Elle consacre l’un de ces mariages entre peuples et civilisations qui n’en sont qu’à leurs premiers fruits, les plus amers. Les greffes douloureuses sont autant de promesses. Pourvu que le verger commun s’étende, s’approfondisse, et que les herbes folles franchissent, implacables, les clôtures de fer. »
(« Revue internationale de culture française »)

Tahar Ben Jelloun (Fès, 1944)
Immense écrivain international. Poète, romancier et essayiste. Pris Goncourt (« La Nuit sacrée »). Chroniqueur au « Monde ».
« Qu’importe l’encre, la couleur des mots, le regard des mots ; et si ces mots sont de France, ils viennent de toutes les langues françaises que nous écrivons ici et ailleurs. »

Héli Béji (Tunisie, 1948)
« Une langue n’est jamais neutre, fut-elle de naissance ; elle n’est qu’une traduction étrange de l’intensité de la réalité. »
« La Quinzaine littéraire, Paris, 16 mars 1985)

Abdelwahab Meddeb (Tunisie, 1946)
« Faire pénétrer dans la langue française une respiration sémitique spécifique… décentrer la langue française, lui insuffler un expir arabe, de quoi lu donner des accents inouïs, inattendus, imprévus. »

Albert Memmi (Tunis, 1920)
Vit à Paris. Psycho-sociologue et romancier. (« La statue de sel », 1953).
« J’essayais de prononcer une langue qui n’était pas la mienne, qui, peut-être, ne la sera jamais complètement, et pourtant m’est indispensable à la conquête de toutes mes dimensions. »
( « La Voix au cœur multiple »)

Abdelaziz Kacem (Bennane, Tunisie, 1933)
Agrégé d’université, critique, écrivain bilingue.
« J’ai expliqué que l’arabe et le français étaient pour moi l’endroit et l’envers d’une même étoffe, que l’une des deux langues était ma mère et l’autre ma nourrice, ce qui fit de moi pour Villon un frère de lai. »

Hector Klat (Alexandrie, 1888-1977)
Un des précurseurs, avec Charles Corm, dans l’expression littéraire libanaise.
« Mots français mots du clair parler de doulce France ;
Mots que je n’appris tard que pour vous aimer mieux.
Tels des amis choisis au sortir de l’enfance ;
Mots qui m'êtes entrés jusqu’au cœur par les yeux. »
(« Le Cèdre et les lys », 1934, couronné par l’Académie française)

Georges Schéhadé (Beyrouth, 1910-1989)
Une des grandes voix des lettres françaises en poésie et au théâtre.
« Tout petit, j’avais le goût des mots, j’étais en dixième, je crois, quand j’ai entendu pour la première fois le mot « azur », j’ai trouvé ça « extraordinaire »… « azur »… je l’ai emporté avec moi dans mon cartable. »
(Entrevue dans « Le Monde », par Claude Sarraute, 26 novembre 1967)

Salah Stétié (Beyrouth, 1929)
Grand prix de la francophonie 1995.
« Miracle de ceux-là qui viennent au français avec leur arabité ou leur négritude, leur asiatisme ou leur insularité, leur expérience autre de l’Histoire et du monde, leurs autres mythologies, avec leurs dieux ou leur Dieu, salés par les océans qui ne sont pas les mers frileuses d’ici, mers d’Europe bordant le plus grand pourtour de l’Hexagone. Ils savent ceux-là que le français, langue des Français, n’est pas, n’est plus le trésor des seuls Français. »
(André Brincourt)

Vénus Koury-Ghata (Beyrouth, 1937)
Inspiration poétique et expérience de femme.
« Le français est pour moi un compagnon fidèle, clef des fantasmes, gardien contre les dérapages et la solitude dans un pays qui n’est pas le mien. L’Arabe, c’est l’autre, drapé de mystère. Il emprunte ma plume… Il revient quand bon lui semble, entre les lignes, au détour des pages. Ses passages sont fugaces. »
(André Brincourt)

Amin Maalouf (Beyrouth, 1949)
Une des voix qui montent en France et recueillent tous les suffrages. Auteur des « Identités meurtries » (Paris, Grasset, 1998)
« Le fait d’être chrétien et d’avoir pour langue maternelle l’arabe, qui est la langue sacrée de l’Islam, est l’un des paradoxes fondamentaux qui ont forgé mon identité… Je bois son eau et son vin, mes mains caressent chaque jour ses vieilles pierres, jamais plus la France (où il vit depuis l’âge de 27 ans) ne sera pour moi une terre étrangère. »

Andrée Chédid. (Le Caire, 1920)
Vit en France par choix. Y brille par sa poésie. Formée en partie à l’Université américaine. Premier poème en anglais.
« Par choix, par amour de cette cité (Paris). Sa pulsation, sa liberté, sa beauté m’ont marquée très jeune d’une manière indélébile. »
(Dans « Questions de français vivant », n° 4, Bruxelles, 1984)

Albert Cossery (Le Caire, 1913)
Vit à Paris depuis 1945. N’a jamais demandé la nationalité française. Décrit une Egypte marginale.
« Je n’ai pas besoin de vivre en Egypte ni d’écrire en arabe. L’Egypte est en moi, c’est ma mémoire. »
(André Brincourt)

Georges Dumani (Egypte, 1882)
Fondateur de l’hebdomadaire « Goha ».
« C’est qu’ici et là on aime la fine clarté, l’intelligence compréhensive, l’ordonnance rythmée de la pensée et du style, l’enchâssement harmonieux des mots dans le tissu des phrases : c’est qu’ici et là –quelle que soit la diversité du génie et de la race- on a le goût de la vérité, le sens de l’ironie et le culte de la tendresse. »
(Dans « L’Egypte, passion française », par Robert Solé, Seuil, 1997, p. 234)

Edmond Jabès (Le Caire, 1912-1991)
Grande notoriété dans la littérature française contemporaine. Quitte l’Egypte à l’arrivée de Nasser, en 1957.
« Mon attachement à la France date de mon enfance et je ne pouvais m’imaginer habitant ailleurs. »
(Dans « Questions de français vivant »)

Elian J. Fibert (Jaffa, 1899-1977)
A chanté les animaux et son pays, Israël. Grand Prix Princeton pour l’ensemble de son œuvre.
« Voici des Musulmans, des Arméniens, des Juifs, des Syriens et bien d’autres. Familles d’esprit aux contrastes et aux oppositions innombrables, mais qui se sont pliés à une même règle et ont accepté une discipline semblable, celle de la langue et de la culture françaises. Peut-être, cette langue et cette culture, touchent-elles en moi ce que nous avons en commun, nous autres riverains de la Méditerranée, je veux dire le goût pour les idées pures, pour la raison. »
(« Revue internationale de culture française »)

Naïm Kattant (Bagdad, 1928)
Né dans la communauté juive de Bagdad. Emigré au Québec, en 1954. Chef de service des lettres et de l’édition des Arts du Canada.
« Si, à vingt-cinq ans, j’ai choisi Montréal comme nouvelle patrie, c’est qu’on y parle français. Aussi, à travers les civilisations, j’adopte une langue et un pays autres que les miens et je garde mon nom. Je ne subis pas mon destin et ma mémoire, je les accepte et je signe mon nom. »
« Le Repos et l’Oubli », essai, Québec, Méridiens Klincksieck, 1987, p. 121 et 196)

André Chouraqui (Aïn Temouchent, Algérie, 1917)
Résistant en France. Maire adjoint à Jérusalem. Traducteur de la Bible et du Coran en français, « une lecture décloisonnée, non confessionnelle » qui, grâce aux « libertés que permet l’éclatement actuel de la langue française, abolit les frontières et lance un pont entre des religions et des confessions fondées sur les réalités essentielles ».
« Ma langue maternelle, avant l’hébreu, était l’arabe. Nous ne parlions que cette langue, qui fut celle de nos plus grands théologiens, dans notre maison, comme dans les rues animées par nos jeux. »
Dans « Le Journal d’un mutant » par Joseph Boly, CEC, Bruxelles, 1987, p. 89)


AMERIQUE – ASIE

Julien Green (Paris, 1900)
Ecrivain américain de langue française. Un monument de notre littérature.
« Ma vraie personnalité ne peut guère s’exprimer qu’en français ; l’autre est une personnalité d’emprunt et comme imposée par la langue anglaise (et pourtant sincère, c’est le bizarre de la chose). Cette personnalité d’emprunt, je ne puis la faire passer en français que fort ma-laisément : elle ne semble pas tout à fait vraie. »
(« Journal » (1943-1945), Plon, 1949, p. 160, 16 sept. 1944)

Hector Biancotti (1930)
Argentin d’origine italienne. Venu en France, à Paris (1963) pour être écrivain français. Membre de l’Académie française. Chroniqueur au « Monde ». Premier roman en français « Sans la miséricorde du Christ » (Gallimard, 1985).
« J’entends les nuances du français, c’est une langue plate, très uniforme au point de vue de l’accent, mais il a la richesse des diphtongues et des différents « e » aigu, accent grave, et cette mystérieuse richesse qui est le « e » muet. Il faut que la phrase soit bien balancée. Pas toutes. On apprend, en écrivant beaucoup de pages, qu’il ne faut pas tomber dans la mélopée. Il faut casser le rythme. Vous avez cédé pendant vingt lignes à la phrase longue et à la mélopée, alors il faut tout à coup faire des phrases courtes. Certains appellent ça la technique. C’est comparable à la musique. »
« Le Magazine littéraire », septembre 1995)

Adolfo Costa du Rels (Corse, 1891)
Romancier et auteur dramaturge bolivien. Ecrivain bilingue.
« Je t’ai donné une culture française afin de perpétuer dans notre famille une tradition qui est une sorte de patrie mentale. Je vous passe le message de mon père. » (à son fils).
(« Revue internationale de culture française »)

Armand Godoy (La Havane, 1880-1964)
A changé de langue à quarante ans pour devenir poète français dans la langue de Baudelaire.
« Depuis que je t’ai découvert
Ton livre jamais ne me quitte
Il vit en moi, toujours ouvert,
Comme un missel de cénobite. »
(« Stèle pour Charles Baudelaire »)

Ventura Garcia Calderon (Paris, 1887-1959)
Né péruvien, à Paris. Fut ministre du Pérou. Ecrivit dans les deux langues en cultivant un grand amour pour la France.
« Me suis-je trompé avec tant de spectateurs universels en venant ici à vingt ans, orphelin ingénu, comme le pauvre Gaspard de Verlaine, prendre place dans ce que l’ancêtre Calderon appelait « le grand théâtre du monde » ? Tout le problème de la culture française et des origines de son génie se posait naturellement à moi. pendant que des soldats nocturnes dévalisaient la France, je faisais, sans pouvoir dormir, l’inventaire de son génie. »
(« Cette France que nous aimons », Paris, Editions H. Lefèbvre, 1942)

Nguyeng tien Lang (Nord, 1909-1976)
Prisonnier du Viêt-Minh (1945-1951). « Les Chemins de la révolte » (1953).
« C’est dans nos fibres les plus profondes que cette empreinte de la France nous a marqués pour toujours, et pourtant nous restons encore et toujours nous-mêmes ; ou, pour ainsi parler, ni tout à fait nous-mêmes, ni tout à fait français ! C’est cela qu’on appelle la synthèse ! Si c’est cela, c’est bien doux à certaines minutes, mais c’est très souvent déchirant. »
(Dans « La Voix au cœur multiple »)

Vo Long-Tê (Sud, 1927)
Ecrit en vietnamien et en français. Baptisé catholique en 1952. Interné en 1975-1977. Au Canada depuis 1991. Traducteur de Paul Claudel. Admirateur de Rimbaud et du poète lépreux Han-Mac-Tu. A servi la poésie française qui lui a permis de rester lui-même dans l’épreuve.
« Reverrai-je bientôt ma lointaine patrie ?
Elle est toujours en moi durant toute ma vie,
Attachée à jamais à la vietnamité. »
(« L’Univers sans barreau », 1991)

A ces auteurs qui se sont exprimés, il conviendrait d’ajouter tous les autres, innombrables, et de plus en plus nombreux, ces dernières années.
Laissons de côté les écrivains d’Afrique noire, des Antilles et de l’Océan Indien ainsi que ceux du Monde arabe et de l’ancienne Indochine, ils sont légion. Nous ne pouvons que renvoyer aux anthologies et histoires littéraires.
Certains pays non francophones et non colonisés par la France entretiennent une littérature presque continue en langue française. C’est le cas de :

Flandre : Charles de Coster, Michel de Ghelderode, Georges Eechoud, Max Elskamp, Franz Hellens, Werner Lambersy, Maurice Maeterlinck, Françoise Mallet-Joris, Félicien Marceau, Camille Melloy, Jean Ray, Charles Van Lerberghe, Liliane Wouters, Pau Willems .

Roumanie : Constantin Amarui, Princesse Bibesco, Adolphe Cantacuzène, Comtesse Anna de Noailles, Petru Dimitriu, Mircea Eliade, Benjamin Fondane, Virgil Gheorghiu, Luca Gherasim, Isidore Isou, Panaït Istrati, Tristan Tzara, Hélène Vacaresco, Horia Vintila, Ilarie Voronca.

Russie : Arthur Adamov, Victor Alexandrov, Nelle Bielski, Alain Bosquet, Hélène Carrère d’Encausse, Christian Dédeyan, Georges Govy, Joseph Kessel, Zoé Oldenbourg, Nathalie Sarraute, Boris Schriber, Elsa Triolet, Vladimir Volkoff, Vladimir Weidké.

Grèce : Alfred Cohen, André Kedros, Gisèle Prassinos, C.P. Rodocanouchi, Georges Spyridaki, Nikos Zazantzaki.

Italie : Louis Calaferte, Gabriele d’Annunzio, Lanza Del Vasto, Geneviève Genari.

Espagne : Arrabal, Salvador de Madiaraga, Luis de Villalonga, Picasso.

Egypte : Amouar Abdel Marek, Albert Adès, Faouzia Assad, Georges Cattauï, Georges Henein, Albert
Josipovicci, Joyce Mansour, Filippo Marinetti, Out El-Kouloub, Robert Solé, Gaston Zananiri.

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Sa chère maison

 

 

Je suis au frais dans mon jardin,

Face à celui de mon voisin.

Ses cèdres ont grandi à outrance,

Le reste a la même apparence.

...

Il était simple et généreux,

Me paraissant toujours joyeux.

Il aimait à rendre service.

Je ne lui connus aucun vice.

...

Jamais bras ballants, pacifique,

Il me tirait d'une panique,

M'entendant me plaindre du sort.

Il m'évitait les gros efforts.

...

Au décès de sa dame, il eut

Une idée qui lui aurait plu:

Puisqu'il prenait, certes, de l'âge,

Vivre entouré lui sembla sage.

...

Deux ans plus tard fut à la rue,

Tout attristé. tombant des nues.

Son petit-fils, de locataire,

Devenait le propriétaire.

...

Il quitta sa chère maison.

Quand à moi, à chaque saison,

J'aimerais le voir apparaître,

S'activant près de ma fenêtre.

21 juin 2012

 

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administrateur théâtres

Enfin la clôture des activités scolaires ? Cool!

                                                                                        Venez vous réjouir  au festin  de la  musique espagnole dans un lieu bien de chez nous : à FLAGEY, du 29 juin au 1er juillet.  TOUTES LES ESPAGNES depuis  son âge d’or jusqu’à nos jours…seront rassemblées  lors du FESTIVAL MUSIQ’3 – FLAGEY - FESTIVAL DE WALLONIE 201212272816890?profile=original

 

 Leonardo García Alarcón est l’invité d’honneur du Festival de Wallonie 2012. C’est en compagnie de ses trois ensembles - Clematis, Cappella Mediterranea et le Choeur de Chambre de Namur – qu’il inaugurera cette édition 2012.

 

Né en 1976 à La Plata en Argentine, il commence ses études de piano à 6 ans. A l’âge de 14 ans, sa participation à un ensemble sur instruments d’époque lui permet de se familiariser avec la pratique de la basse continue, pour s’adonner ensuite au clavecin et à l'orgue. Poursuivant l’étude du piano, il entreprend parallèlement des études de direction d'orchestre à l'Université Nationale de La Plata. En 1997, il s’installe en Europe.Il a étudié le clavecin et l'orgue, et a été assistant de Gabriel Garrido pendant de nombreuses années, avant de fonder son propre ensemble, la Cappella Mediterranea, avec lequel il a donné des concerts dans de nombreux festivals, en particulier au Festival d'Ambronay. À la suite de la représentation de Il diluvio universale de Michelangelo Falvetti (1642–1692), il reçut la médaille de citoyen d'honneur d'Ambronay. Le CD enregistré à cette occasion remporte le Diaposon d'or, du mois d'octobre 2011. Leonardo García Alarcón enseigne au Conservatoire de Genève et effectue en parallèle des recherche sur le jeu de la basse continue au XVIIe siècle. Il a repris la direction artistique du Chœur de Chambre de Namur en 2010. Il partage la direction de l'Ensemble Clematis avec la violoniste Stéphanie de Failly.

 

Au cours du festival vous pourrez aussi apprécier l’intimité du clavecin du Padre Soler par Diego Ares. Les sonorités métissées des chants judéo-andalous de La Roza Enflorese, l’amour sorcier de Falla, ainsi que le jeu d’Oxalys et du trio Amparo Cortes. Les voyages dans les déserts d’Andalousie ou dans les toiles de Goya que nous font faire les pianos d’Albéniz ou de Granados, sous les doigts de leurs meilleurs interprètes (Luis Fernando Perez, Javier Perianes, Angel Sanzo).

 

 

Un rendez-vous d’instrumentistes des plus variés :

En tête les gambistes Jordi Savall et Philippe Pierlot, les violonistes Lorenzo Gatto, Shirly Laub et Mira Glaudeanu avec l’Orchestre baroque du Conservatoire, les pianistes Brigitte Engerer et Boris Berezovsky, le guitariste Milos Karadaglic, le Ricercar Consort, les clarinettistes Benjamin Dieltjens et Ronald Van Spaendonck, l’Ensemble Astoria, les violoncellistes Marie Hallynck et François Salque, les accordéonistes Christophe Delporte et Vincent Peirani, sans oublier le bandonéon de Manu Comté … et bien d’autres encore...

 

Enfin, Le Festival Musiq’3, c’est aussi, des dizaines de brillants musiciens, étudiants du Conservatoire de Bruxelles en formation de chambre ou d’orchestre, des animations, flashmobs, ateliers, concerts de jazz, films, expositions,

… et des spectacles pour enfants tels une histoire du piano par Eliane Reyes et Bruno Coppens ou un Homme de la Mancha concocté spécialement pour les familles.

 

Pas de fête sans la danse, elle aussi à l’honneur : Boléro, Fandango,Habanera, Mambo, Flamenco résonneront à tous les étages, tandis qu’un marathon du Tango réunira des danseurs venus des quatre coins de l’Europe.

 

 

Trois jours d’intenses émotions en ce début d’été. C'est l'embarras du choix, quels que soient vos goûts musicaux, difficile de trouver mieux pour commencer la période de vacances estivales.

 

 Rendez-vous sur le site pour télécharger le programme complet.

INFOS & TICKETS 02 550 13 30 - 02 641 10 20 www.festivalmusiq3.be

Date et lieu : du 29/6 au 1/7 - Flagey – place Sainte Croix – 1050 Bruxelles

La suite? dans les commentaires, par vous et moi! A bientôt!

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administrateur théâtres

Invitation cordiale à l’Ouverture de la 5EME BOURSE D’ART CONTEMPORAIN  au club de la faculté de médecine,  Leuven au profit  de la Banque de sang de cordon

 le vendredi 22 juin de 17 à 23 heures, le samedi 23 juin de 11heures à 19 heures et le dimanche 24 de 11 heures à 17 heures. 12272816699?profile=original


 

L’ouverture officielle avec réception, à laquelle vous êtes cordialement conviés aura lieu le vendredi soir à 19 heures et sera inaugurée par le Professeur Marc Bogaerts et le professeur Mark Waer recteur de l’université catholique de Leuven. La Banque de sang de cordon collecte du sans de cordon des nouveau-nés depuis 1997. L e sang de cordon, collecté immédiatement après la naissance, sans aucun risque, ni pour la mère, ni pour l’enfant, serait, sans ce geste intelligent,  simplement évacué comme déchet. Il contient néanmoins des cellules-souche qui peuvent potentiellement sauver un autre enfant atteint de leucémie. Il y a à l’heure actuelle environ 10500 échantillons. Tous les mois on envoie deux préparations  pour des transplantations quelque part dans le monde. Vu le succès de ces transplantations, on peut dire que chaque mois, au moins un enfant sera sauvé  de la terrible maladie, grâce à la solidarité bénévole de jeunes mères. Hélas cette initiative n’est soutenue par aucune institution officielle, ni remboursement. Il faut donc faire appel au mécénat et au travail bénévole. Voilà le pourquoi de cette bourse d’art  contemporain. Les galeries qui participent et les  nombreux artistes ne  recueillent aucun profit car le fruit des ventes est versé à la Banque de sang de cordon.

 

www.kunstbeursleuven.be  

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administrateur théâtres

Il était une fois une Sonate  en trois mouvements : Allegro appassionato, Moderato cantabile et Orlando furioso. Ou la construction en  trois parties de ce mémorable concert donné à la salle Henry le Bœuf , salle comble, devant la famille royale en conclusion du prodigieux concours de violon Reine Elisabeth 2012 dont c’est la 75e édition. Trois concurrents extraordinaires: une Amazone Coréenne bleue, un Prince Japonais et un Titan de Russie. Jouer c’est se surpasser. C’est ce que les trois jeunes artistes ont fait, tenant en haleine un public captivé. Trois concerti monumentaux sous la baguette virevoltante de Michel Tabachnik, musicien éclairé débordant de vitalité. Au Programme :

- Concerto Nr 1 en sol mineur op 26 de Max Bruch, soliste: Shin Hyun Su, troisième lauréate

- Concerto  en mi mineur opus 64 de Félix Mendelssohn, soliste: Narita Tasuki, deuxième lauréat

- Concerto  en ré majeur opus 35 de Tchaikovsky,  soliste: Andrey Baranov, premier lauréat

Allegro Appassionato 

Shin Hyun Su assume un phrasé incisif qui tranche avec le puissant murmure de l’orchestre que Michel Tabachnik conduit avec une  souplesse virevoltante. Le voilà, tempérant les cors anglais, insufflant du  recueillement avant la vague passionnelle qui précède le premier solo de la tragi-musicienne. Celle-ci, Tantôt extrait des intonations salées comme des larmes de son instrument, tantôt et offre un déferlement de musicalité. Dans l’Adagio, elle sait aussi faire sourdre tout en finesse, comme un ruisseau invisible, des modulations romantiques de son archet. Les commentaires de l’orchestre se nourrissent de gravité une pluie de pizzicati évoque les tressaillements d’une invisible harpe. La musique, serait-ce faire ressortir l’invisible? Les quatre cors et les deux trompettes jettent soudain une amplitude de tonalités qui repoussent au loin tous les horizons. Le rêve et la sérénité lumineuse se sont installés. Le moment de grâce se termine sur deux petites notes descendantes. L’Allegro energico porte bien son nom : jeu subtil de  l’exultation victorieuse. L’Amazone bleue est en parfaite symbiose avec l’orchestre dont le cœur bat la chamade. Les percussions scandent un final glorieux. Tout est dans le geste du dernier coup d’archet.   

Moderato cantabile

Narita Tasuki émeut par sa grâce, son élégance et sa virtuosité tranquille. Un seigneur de la musique qui explore la partition avec aisance et maîtrise. Le duo avec les vents est empreint de tendresse et de générosité. Le musicien produit des respirations lentes  et des sommets délicats. La transparence de la porcelaine. Sa créativité artistique s’imprime dans la flexibilité  de son corps. Se prend-il pour un roseau dansant au gré du ruissellement des clarinettes ? Deux cors et deux trompettes brillantes soudain se liguent pour préparer l’écrin du monologue  extraordinairement émouvant du soliste. Son  babillage intime se dépose aux pieds de l’orchestre sous le charme. Dans le mouvement suivant, les plaintes sonores et douloureuses de l’orchestre seront bientôt couvertes par la volubilité juvénile du jeune artiste. Les répétitions en force du cadre dramatique de l’œuvre forcent le soliste à exprimer la chose qui meuble toute son interprétation : l’harmonie. Alors les violons glissent imperceptiblement dans des couleurs bienveillantes. La fin du deuxième mouvement  est une construction séraphique du plaisir. Le troisième se termine dans l’allégresse, la légèreté et l’intensité. Vivacité à l’état pur, perlée de hautbois avant l’estocade finale.

 Et deux splendides bis: le  caprice Nr 1 de Paganini et ...une perle japonaise.

Orlando furioso

La vie est un combat sans merci. Contre le malheur qui imprègne toute chose,  Andrey Baranov forge des sonorités d’une puissance incomparable. Cet athlète musical entraîne l’orchestre dans le dépassement absolu. Ses soli de virtuose sont mouvementés et douloureux. Transfiguré par la musique, il ferait chanter un morceau de marbre ! Paroxystique dans la douceur comme dans la  force. On est dans de l’expressionisme fantastique. Un Titan, dont la concentration est phénoménale et l’expressivité, celle de toutes les Walkyries réunies. Slaves,  bien sûr ! Mystère : la finale égrènera des étoiles.    

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administrateur théâtres

                                            « SHERPA »  le dernier spectacle de  PHILIPPE VAUCHEL

 

 

        Après son spectacle mythique « La Grande Vacance »  au sujet de la mort et de la destinée, Philippe Vauchel  nous propose un nouveau voyage. «Un voyageur mystérieux fait halte de théâtre en théâtre... Il a le cœur gros. «Un cœur de 742 grammes, c’est magnifique, mon fils! Tu pourras grimper en haut et porter lourd! Tu seras grand, mon petit sherpa!»  Inspiré de ses rapports avec sa mère, Philippe Vauchel aborde dans ce nouveau monologue la question de la filiation, des rapports des humains entre eux et leurs démêlés avec la planète.

  

Si vous avez déjà assisté à un spectacle de Philippe Vauchel, vous y retournerez tant le bonhomme est attachant, tant l’artiste est généreux. Nous l’avions rencontré une première fois au théâtre des Martyrs dans son spectacle inimitable  et fascinant intitulé « la  Grande vacance ».

 Quand on aime son style débonnaire, tendrement philosophique, poétique, lucide et faussement naïf, on ne peut résister à l’appel de  son prochain spectacle. Car la proximité, qu’il a l’art de créer avec le spectateur, est un moment inoubliable.  Le voici dans « Sherpa »,  portant sa mère âgée sur le dos,  racontant sa difficulté à naître, à être et à n’être pas comme les autres.

On s’aperçoit bien vite qu’avec ses bardas humains dans sa hotte, il est la leçon vivante de la  tendresse humaine. Il porte sans se plaindre. Pourtant, il est un moins que rien, pour les grands de la terre. Et il promène, le sourire en coin, toute la mélancolie du monde.  Il a dépassé le ton sarcastique, la moquerie douce-amère de son premier spectacle et le voici tombé dans une marmite d’affects qui sentent bon le village, la terre humide, les goûts surranés simples et bons. Il est rare de voir un homme s’exprimer ainsi, mettre à nu sans vergogne toute son intimité  et déverser autant d’émotion et de poésie.

Il est votre compagnon de voyage, votre complice arpenteur de destins, votre copain de conscience, l’artisan de l’humain, votre frère au cœur gros. Gros de chagrins, gros de générosité. Il vous emmènera jusque sur le toit du monde - rien moins que l’Himalaya - qui donne  tant le vertige, si près du ciel. Il extirpera tous les non-dits, les souvenirs douloureux que l’on garde cadenassés,  pour les remettre en perspective. Ce qui fait retrouver l’essentiel.  Avec lui, on prendrait joyeusement  sur son dos une telle brassée d’humanité. Il transforme les peurs en légèreté de l’être,  la gerbe funéraire en  gerbe de bonheur. On reçoit en prime  un permis de pleurer, une assurance contre le nostalgisme et l’on finit par contempler  l’infini des horizons sans trembler. Wow ! Laissez-vous prendre sur le dos,  par la main ou par le coin du coeur !

UNE CREATION ET COPRODUCTION DE THEATRE LE PUBLIC ET DU THEATRE DE NAMUR
Mise en scène: JEAN-MICHEL FRERE / avec PHILIPPE VAUCHEL

DU 07/06/12 AU 30/06/12

Petite Salle - Création - relâche les dimanches et lundis. Durée : 1h15 / nouvelles dates supplementaires: le 3, 4, 5, 6 et 7 juillet 2012 à 20h30                                                                                                                                

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Petite Poucette

Petite Poucette (Document Culturebox)

 

Petite Poucette

discours prononcé par M. Michel SERRES
délégué de l'Académie française

Séance du mardi 1er mars 2011

LES NOUVEAUX DÉFIS DE L’ÉDUCATION

PARIS PALAIS DE L’INSTITUT

Avant d’enseigner quoi que ce soit à qui que ce soit, au moins faut-il le connaître. Qui se présente, aujourd’hui, à l’école, au collège, au lycée, à l’université ?

- I -

Ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n’a jamais vu veau, vache, cochon ni couvée. En 1900, la majorité des humains, sur la planète, s’occupaient de labourage et de pâturage ; en 2010, la France, comme les pays analogues au nôtre, ne compte plus qu’un pour cent de paysans. Sans doute faut-il voir là une des plus immenses ruptures de l’histoire, depuis le néolithique. Jadis référée aux pratiques géorgiques, la culture change.

Celle ou celui que je vous présente ne vit plus en compagnie des vivants, n’habite plus la même Terre, n’a donc plus le même rapport au monde. Il ou elle ne voit que la nature arcadienne des vacances, du loisir ou du tourisme.

- Il habite la ville. Ses prédécesseurs immédiats, pour plus de la moitié, hantaient les champs. Mais il est devenu sensible aux questions d’environnement. Prudent, il polluera moins que nous autres, adultes inconscients et narcissiques. Il n’a plus le même monde physique et vital, ni le même monde en nombre, la démographie ayant soudain bondi vers sept milliards d’humains.

- Son espérance de vie est, au moins, de quatre-vingts ans. Le jour de leur mariage, ses arrière- grands-parents s’étaient juré fidélité pour à peine une décennie. Qu’il et elle envisagent de vivre ensemble, vont-ils jurer de même pour soixante-cinq ans ? Leurs parents héritèrent vers la trentaine, ils attendront la vieillesse pour recevoir ce legs. Ils n’ont plus la même vie, ne vivent plus les mêmes âges, ne connaissent plus le même mariage ni la même transmission de biens.

- Depuis soixante ans, intervalle unique dans notre histoire, il et elle n’ont jamais connu de guerre, ni bientôt leurs dirigeants ni leurs enseignants. Bénéficiant des progrès de la médecine et, en pharmacie, des antalgiques et anesthésiques, ils ont moins souffert, statistiquement parlant, que leurs prédécesseurs. Ont-ils eu faim ?

Or, religieuse ou laïque, toute morale se résumait à des exercices destinés à supporter une douleur inévitable et quotidienne : maladies, famine, cruauté du monde.
Ils n’ont plus le même corps ni la même conduite ; aucun adulte ne sut ni ne put leur inspirer une morale adaptée.

- Alors que leurs parents furent conçus à l’aveuglette, leur naissance fut programmée. Comme, pour le premier enfant, l’âge moyen de la mère a progressé de dix à quinze ans, les enseignants ne rencontrent plus des parents d’élèves de la même génération. Ils n’ont plus les mêmes parents ; changeant de sexualité, leur génitalité se transformera.

- Alors que leurs prédécesseurs se réunirent dans des classes ou des amphis homogènes culturellement, ils étudient au sein d’un collectif où se côtoient désormais plusieurs religions, langues, provenances et mœurs. Pour eux et leurs enseignants, le multiculturalisme est de règle depuis quelques décennies. Pendant combien de temps pourront-ils encore chanter l’ignoble « sang impur » de quelque étranger ?

Ils n’ont plus le même monde mondial, ils n’ont plus le même monde humain. Autour d’eux, les filles et les fils d’immigrés, venus de pays moins riches, ont vécu des expériences vitales inverses.
Bilan temporaire. Quelle littérature, quelle histoire comprendront-ils, heureux, sans avoir vécu la rusticité, les bêtes domestiques et la moisson d’été, dix conflits, blessés, morts et affamés, cimetières, patrie, drapeau sanglant, monuments aux morts, sans avoir expérimenté dans la souffrance, l’urgence vitale d’une morale ?

- II -

Voilà pour le corps ; voici pour la connaissance.

- Leurs ancêtres cultivés avaient, derrière eux, un horizon temporel de quelques milliers d’années, ornées par la préhistoire, les tablettes cunéiformes, la Bible juive, l’Antiquité gréco-latine. Milliardaire désormais, leur horizon temporel remonte à la barrière de Planck, passe par l’accrétion de la planète, l’évolution des espèces, une paléo-anthropologie millionnaire. N’habitant plus le même temps, ils entrèrent dans une autre histoire.

- Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur faculté d’attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux questions à quinze secondes, chiffres officiels ; dont le mot le plus répété est « mort » et l’image la plus reprise celle des cadavres. Dès l’âge de douze ans, ces adultes-là les forcèrent à voir plus de vingt mille meurtres.

- Ils sont formatés par la publicité ; comment peut-on leur apprendre que le mot relais, en français s’écrit -ais, alors qu’il est affiché dans toutes les gares -ay ? Comment peut-on leur apprendre le système métrique, quand, le plus bêtement du monde, la SNCF leur fourgue des s’miles ?

Nous, adultes, avons doublé notre société du spectacle d’une société pédagogique dont la concurrence écrasante, vaniteusement inculte, éclipse l’école et l’université. Pour le temps d’écoute et de vision, la séduction et l’importance, les médias se sont saisis depuis longtemps de la fonction d’enseignement.

Les enseignants sont devenus les moins entendus de ces instituteurs. Critiqués, méprisés, vilipendés, puisque mal payés.

- Ils habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l’usage de la toile, lecture ou écriture au pouce des messages, consultation de Wikipedia ou de Facebook, n’excitent pas les mêmes neurones ni les mêmes zones corticales que l’usage du livre, de l’ardoise ou du cahier. Ils peuvent manipuler plusieurs informations à la fois. Ils ne connaissent ni n’intègrent ni ne synthétisent comme leurs ascendants.
Ils n’ont plus la même tête.

- Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes ; par GPS, en tous lieux ; par la toile, à tout le savoir ; ils hantent donc un espace topologique de voisinages, alors que nous habitions un espace métrique, référé par des distances.
Ils n’habitent plus le même espace.

Sans que nous nous en apercevions, un nouvel humain est né, pendant un intervalle bref, celui qui nous sépare de la Seconde Guerre mondiale.

Il ou elle n’a plus le même corps, la même espérance de vie, n’habite plus le même espace, ne communique plus de la même façon, ne perçoit plus le même monde extérieur, ne vit plus dans la même nature ; né sous péridurale et de naissance programmée, ne redoute plus la même mort, sous soins palliatifs. N’ayant plus la même tête que celle de ses parents, il ou elle connaît autrement.

- Il ou elle écrit autrement. Pour l’observer, avec admiration, envoyer, plus rapidement que je ne saurai jamais le faire de mes doigts gourds, envoyer, dis-je, des SMS avec les deux pouces, je les ai baptisés, avec la plus grande tendresse que puisse exprimer un grand-père, Petite Poucette et Petit Poucet. Voilà leur nom, plus joli que le vieux mot, pseudo-savant, de dactylo.

- Ils ne parlent plus la même langue. Depuis Richelieu, l’Académie française publie, à peu près tous les quarante ans, pour référence, le dictionnaire de la nôtre. Aux siècles précédents, la différence entre deux publications s’établissait autour de quatre à cinq mille mots, chiffres à peu près constants ; entre la précédente et la prochaine, elle sera d’environ trente mille.

À ce rythme linguistique, on peut deviner que, dans peu de générations, nos successeurs pourraient se trouver aussi séparés de nous que nous le sommes de l’ancien français de Chrétien de Troyes ou de Joinville. Ce gradient donne une indication quasi photographique des changements majeurs que je décris.

Cette immense différence, qui touche toutes les langues, tient, en partie, à la rupture entre les métiers des années cinquante et ceux d’aujourd’hui. Petite Poucette et son frère ne s’évertueront plus aux mêmes travaux.
La langue a changé, le travail a muté.

- III -

L’individu

Mieux encore, les voilà devenus des individus. Inventé par saint Paul, au début de notre ère, l’individu vient de naître seulement ces jours-ci. Nous rendons-nous compte à quel point nous vivions d’appartenances, de jadis jusqu’à naguère ? Français, catholiques ou juifs, Gascons ou Picards, riches ou pauvres, femmes ou mâles… nous appartenions à des régions, des religions, des cultures, rurales ou villageoises, des groupes singuliers, des communes locales, un sexe, la patrie. Par les voyages, les images, la toile, les guerres abominables, ces collectifs ont à peu près tous explosé. Ceux qui demeurent continuent aujourd’hui, vite, d’éclater.

L’individu ne sait plus vivre en couple, il divorce ; ne sait plus se tenir en classe, il remue et bavarde ; ne prie plus en paroisse ; l’été dernier, nos footballeurs n’ont pas su faire équipe ; nos politiques savent-ils encore construire un parti ? On dit partout mortes les idéologies ; ce sont les appartenances qu’elles recrutaient qui s’évanouissent.

Cet individu nouveau-né annonce plutôt une bonne nouvelle. À balancer les inconvénients de l’égoïsme et les crimes de guerre commis par et pour la libido d’appartenance – des centaines de millions de morts –, j’aime d’amour ces jeunes gens.

Cela dit, reste à inventer de nouveaux liens. En témoigne le recrutement de Facebook, quasi équipotent à la population du monde.

Comme un atome sans valence, Petite Poucette est toute nue. Nous, adultes, n’avons inventé aucun lien social nouveau. L’emprise de la critique et du soupçon les déconstruit plutôt.
Rarissimes dans l’histoire, ces transformations, que j’appelle hominescentes, créent, au milieu de notre temps et de nos groupes, une crevasse si large que peu de regards l’ont mesurée à sa vraie taille.

Je la compare, je le répète, à celles qui intervinrent au néolithique, à l’aurore de la science grecque, au début de l’ère chrétienne, à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance.
Sur la lèvre aval de cette faille, voici des jeunes gens auxquels nous prétendons dispenser de l’enseignement, au sein de cadres datant d’un âge qu’ils ne reconnaissent plus : bâtiments, cours de récréation, salles de classe, bancs, tables, amphithéâtres, campus, bibliothèques, laboratoires même, j’allais même dire savoirs… cadres datant, dis-je, d’un âge et adaptés à une ère où les hommes et le monde étaient ce qu’ils ne sont plus.

- IV -

Trois questions, par exemple : Que transmettre ? À qui le transmettre ? Comment le transmettre ?

Que transmettre ? Le savoir !

Jadis et naguère, le savoir avait pour support le corps même du savant, de l’aède ou du griot. Une bibliothèque vivante… voilà le corps enseignant du pédagogue.

Peu à peu, le savoir s’objectiva d’abord dans des rouleaux, vélins ou parchemins, support d’écriture, puis, dès la Renaissance, dans les livres de papier, supports d’imprimerie, enfin, aujourd’hui, sur la toile, support de messages et d’information.

L’évolution historique du couple support-message est une bonne variable de la fonction d’enseignement. Du coup, la pédagogie changea trois fois : avec l’écriture, les Grecs inventèrent la paideia ; à la suite de l’imprimerie, les traités de pédagogie pullulèrent. Aujourd’hui ?

Je répète. Que transmettre ? Le savoir ? Le voilà, partout sur la toile, disponible, objectivé. Le transmettre à tous ? Désormais, tout le savoir est accessible à tous. Comment le transmettre ? Voilà, c’est fait.

Avec l’accès aux personnes, par le téléphone cellulaire, avec l’accès en tous lieux, par le GPS, l’accès au savoir est désormais ouvert. D’une certaine manière, il est toujours et partout déjà transmis.

Objectivé, certes, mais, de plus, distribué. Non concentré. Nous vivions dans un espace métrique, dis-je, référé à des centres, à des concentrations. Une école, une classe, un campus, un amphi, voilà des concentrations de personnes, étudiants et professeurs, de livres, en bibliothèques, très grande dit-on parfois, d’instruments dans les laboratoires… ce savoir, ces références, ces livres, ces dictionnaires… les voilà distribués partout et, en particulier, chez vous ; mieux, en tous les lieux où vous vous déplacez ; de là étant, vous pouvez toucher vos collègues, vos élèves, où qu’ils passent ; ils vous répondent aisément.

L’ancien espace des concentrations – celui-là même où je parle et où vous m’écoutez, que faisons-nous ici ? – se dilue, se répand ; nous vivons, je viens de le dire, dans un espace de voisinages immédiats, mais, de plus, distributif. – Je pourrai vous parler de chez moi ou d’ailleurs, et vous m’entendriez ailleurs ou chez vous.

Ne dites surtout pas que l’élève manque des fonctions cognitives qui permettent d’assimiler le savoir ainsi distribué, puisque, justement, ces fonctions se transforment avec le support. Par l’écriture et l’imprimerie, la mémoire, par exemple, muta au point que Montaigne voulut une tête bien faite plutôt qu’une tête bien pleine. Cette tête a muté.

De même donc que la pédagogie fut inventée (paideia) par les Grecs, au moment de l’invention et de la propagation de l’écriture ; de même qu’elle se transforma quand émergea l’imprimerie, à la Renaissance ; de même, la pédagogie change totalement avec les nouvelles technologies.
Et, je le répète, elles ne sont qu’une variable quelconque parmi la dizaine ou la vingtaine que j’ai citées ou pourrais énumérer.

Ce changement si décisif de l’enseignement, – changement répercuté sur l’espace entier de la société mondiale et l’ensemble de ses institutions désuètes, changement qui ne touche pas, et de loin, l’enseignement seulement, mais sans doute le travail, la politique et l’ensemble de nos institutions – nous sentons en avoir un besoin urgent, mais nous en sommes encore loin ; probablement, parce que ceux qui traînent encore dans la transition entre les derniers états n’ont pas encore pris leur retraite, alors qu’ils diligentent les réformes, selon des modèles depuis longtemps évanouis.

Enseignant pendant quarante ans sous à peu près toutes les latitudes du monde, où cette crevasse s’ouvre aussi largement que dans mon propre pays, j’ai subi, j’ai souffert ces réformes-là comme des emplâtres sur des jambes de bois, des rapetassages ; or les emplâtres endommagent le tibia comme les rapetassages déchirent encore plus le tissu qu’ils cherchent à consolider.
Oui, nous vivons un période comparable à l’aurore de la paideia, après que les Grecs apprirent à écrire et démontrer ; comparable à la Renaissance qui vit naître l’impression et le règne du livre apparaître ; période incomparable pourtant, puisqu’en même temps que ces techniques mutent, le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la souffrance et la guérison, l’être-au-monde lui-même, les métiers, l’espace et l’habitat.

- V -

Face à ces mutations, sans doute convient-il d’inventer d’inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore nos conduites et nos projets. Nos institutions luisent d’un éclat qui ressemble, aujourd’hui, à celui des constellations dont l’astrophysique nous apprit jadis qu’elles étaient mortes déjà depuis longtemps.

Pourquoi ces nouveautés ne sont-elles point advenues ? J’en accuse les philosophes, dont je suis, gens qui ont pour métier d’anticiper le savoir et les pratiques à venir, et qui ont, comme moi, ce me semble, failli à leur tâche. Engagés dans la politique au jour le jour, ils ne virent pas venir le contemporain. Si j’avais eu, en effet, à croquer le portrait des adultes, dont je suis, il eût été moins flatteur.

Je voudrais avoir dix-huit ans, l’âge de Petite Poucette et de Petit Poucet, puisque tout est à refaire, non, puisque tout est à faire.

Je souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y travailler encore, en compagnie de ces Petits, auxquels j’ai voué ma vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés.

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administrateur théâtres

 

12272812890?profile=originalCe soir, sous la baguette de l’immense AUGUSTIN DUMAY, trois des six lauréats du Concours Reine Elisabeth nous offrent leur rêverie musicale  lors du prestigieux CONCERT DES LAUREATS.

Au programme :

 - Concerto Nr 5 en la majeur KV 219 de Wolfgang Amadeus Mozart, soliste :  Tseng Yu Chien

 - La sonate « Le trille du Diable » en sol mineur de Giuseppe Tartini, soliste : Esther Yoo

- Tzigane (arr. David Walter) de Maurice Ravel, soliste :  Artiom Shishkov

- Poème opus 25 d’Ernest Chausson, soliste : Artiom Shishkov

- Fantaisie sur des thèmes de Carmen de Franz Waxman, soliste : Esther Yoo

Tsen Yu-Chen, 5e lauréat, voltige tranquillement dans les parfums du  concerto de Mozart, cisèle de très belles sonorités. C’est un morceau de bravoure, exécuté avec finesse et maestria. Il alterne intimité et vaillance. Son adagio est plein de légèreté et  il se laisse parfois prendre à la confidence avec le Chef d’Orchestre avant de développer son dernier solo à la façon d’un hommage à la jeunesse éternelle… et invincible ? Même les cors ont été convaincus ! On ressent une sollicitude profonde dans la conduite enveloppante d’AUGUSTIN DUMAY qui entraîne les solistes par-dessus son épaule, comme un premier de cordée puis les laisse à leurs soli avec le respect profond qu’il éprouve pour les jeunes talents.  Bonheur de magister.

L’apparition d’Esther Yoo, 4e lauréate,  dans sa divine robe de  mousseline rouge Carmen cause des remous. La sonate pour violon  de Tartini  qu’elle présente est tout de suite habitée par ce qui fait la beauté et l’intelligence à la fois.  Joyeuse,  elle s’échappe dans des acrobaties ludiques. Le deuxième mouvement mélange majesté et tendresse. Sa virtuosité pétulante emballe des rythmes pressés pour se fondre à nouveau dans des vagues ralenties qui semblent chercher le sens intime des choses. Plusieurs reprises aussi vivantes que  des poissons volants alternent avec la houle romantique profonde, brodée de Ralentandi très étudiés. L’intention poétique est présente, ce qui caractérise un grand violon.  Et la fin est une dentelle d’écume suspendue à la vague qui virevolte en solo devant un public subjugué.

Voici enfin Artiom Shishkov, 6e lauréat dans Tzigane de Ravel. La première phrase est une longue incantation pathétique énoncée… passionnément. Elle se termine sur un souffle qui jette aussitôt des murmures  dans la harpe sertie au cœur de l’orchestre. Reprise tendre qui a tout des souffrances du jeune Werther. Dans la douceur exquise d’une nuit musicale s’élève un chant d’oiseau grave. La harpe aussitôt fait naître une forêt enchantée. Il y a l’apparition de danses autour du feu des violons. Le soliste rend son couplet plus festif. Celui-ci s’éclate en pizzicati miroitants. La joie est communautaire et le violon-étoile, pris de joie, se livre au bonheur de la musique. Le public exulte.

 Après la pause, c’est encore Artiom Shishkov qui joue le  Poème opus 25 d’Ernest Chausson.   Il attend que les profonds roucoulements de cordes repris à l’octave s’estompent pour nous emmener dans une complainte vibrante, reprise par les respirations profondes du tapis de violons. Multes modulations s’enchaînent avant le premier accord. Etonnant. Puis le soliste reprend son chant rhapsodique qui se répercute en mille éclats de sonorités lumineuses. Le plateau musical gonfle comme un gâteau vivant. Cela tremble du côté des violoncelles pendant la progression ascensionnelle du thème. Libération de la mélodie qui s’élève vers des cimes … et plane. C’est tout. C’est beau.

 Acclamée encore, Esther Yoo revient pour interpréter les envolées de Carmen. Le visage  concentré à l’extrême, c’est tout à la fois:  la  fièvre de l’exaltation personnifiée, la facétie, la versatilité, la détermination splendide, le tonus musical et le sentiment d’immortalité. … invincible Jeunesse ?

"La musique donne une âme à nos cœurs et des ailes à la pensée" disait Platon.

Une pensée pour vous donc, MADAME qui fêtez ce jour vos 84 ans en même temps que la jeune lauréate, et le 75e anniversaire du concours Reine Elisabeth. Vous, fidèle à la Belgique, fidèle à vos engagements culturels et sociaux. Vive la reine cinquième des Belges ! Coïncidence ou rêverie ? C’est ce soir qu’Esther Yoo fête aussi ses dix-huit ans.  L’orchestre entonne le « Happy Birthday » de circonstance,  repris par le public et, cerise sur la magnifique pièce montée qu’est ce concert, voici Navarra suite espanola, dédié tout particulièrement à la Reine. Les trois lauréats se retrouvent sur l’avant-scène et joignent leurs violons, jouant  à l’unisson. L’orchestre ajoute le souffle chaud de l’Espagne et  de mystérieuses castagnettes. C’est la feria ! Tous debout, les cœurs et les mains se joignent dans des applaudissements généreux et la Reine rejoint la liesse, du bord de sa loge royale.  

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Pierre-Emmanuel Meuris (peintures)

Exposition du 13/06 au 30/06 2012 de 11h 30 à 18h 30

Vernissage le 13/06 2012 de 18h 30 à 21h 30

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Patrick Marin  (peintures)

Exposition du 13/06 au 30/06 2012 de 11h 30 à 18h 30

Vernissage le 13/06 2012 de 18h 30 à 21h 30

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Michel Marinus (peintures)

Exposition du 13/06 au 30/06 2012 de 11h 30 à 18h 30

Vernissage le 13/06 2012 de 18h 30 à 21h 30

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Dominique Le Roy de La Chohinière (peintures et sculptures en verre)
et Patricia Izquierdo (Poète)

Exposition du 13/06 au 30/06 2012 de 11h 30 à 18h 30

Vernissage le 13/06 2012 de 18h 30 à 21h 30

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Corinne Wilson (peintures)

Exposition du 13/06 au 30/06 2012  et 05/09 au 23/09 2012 de 11h 30 à 18h 30

Vernissage/ finissage le 05/09 2012 de 18h 30 à 21h 30

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