Un événement à ne pas manquer à Mons, à la Maison Losseau (lieu historique et culturel), La "Guinguette littéraire", tous les we de l'été. Et le 21 août, il y aura une rencontre autour de mon roman SEPARATIONS, une lecture à plusieurs voix, accompagnée d'un jeune violoncelliste talentueux qui jouera des morceaux des Suites de Bach :) :)
Mon cœur immobile depuis l'arrière-saison Apaisé par une pluie du printemps Arrosant la terre et les feuilles L' âme inondée de doux crachin La joie descend en moi Rompant avec la mélancolie
Pensée aux victimes de la folie des hommes Maintenues délibérément dans la pauvreté et l'ignorance Puisque la guerre est propre de l'homme Et si la guerre est la loi de la nature Malheur à ceux qui sont poussés par leur avidité de pouvoir Ceux qui manigancent le mal
Malheur à ces lâches sans foi Voyous sans moralité Ceux qui sont endoctrinés à la haine Peut-être qu'après la terreur et la barbarie Naîtra une nouvelle aurore Un rayon de lumière Dans un monde où nous, les gens de tous les jours Libérés et purifiés par l'amour Célébreront la vie rêvée des enfants heureux
Y a t-il un miroir de l’autre côté… du miroir ? Pas un miroir à deux faces, non, un miroir qui nous renverrait la face cachée de nous-même ? Et si c’était le cas sur quelle face nous regarderions-nous le plus souvent puisqu’elles seraient identique ? Aurions-nous le courage parfois de l’inverser afin de connaître notre face cachée ? N’en aurions nous pas peur, et cette dernière aidant, par pure lâcheté, ne ferions nous pas mine d’ignorer cet autre moi avoué ou inavouable ?
Nous sommes d’accord pour admettre qu’une glace nous permet de regarder notre visage, notre corps, afin d’en reconnaître les défauts et les qualités, et donc d’en modifier la forme naturelle dans sa plus libre expression, et de la modifier par la coiffure, l’habillement, le maquillage ou tout autre artifice qui nous permet de donner une identité, une apparence, à celles et ceux qui croiseront notre route ou notre regard dans les prochaines heures. Ce miroir est donc notre laisser passer pour une identité sans cesse renouvelée, afin de pouvoir argumenter notre façon d’être et de vivre envers la communauté qui nous accueille ou nous entoure.
… Essai ...
Georges se lève vers 7h, il enfile ses pantoufles, un slip, le tee-shirt de la veille négligemment posé sur la chaise, et se dirige vers les toilettes.
Le pipi du matin ! Dira t-il comme d’habitude.
Puis sans un mot se dirige vers la salle de bain, se lave les mains et le visage, entre dans la cuisine et d’une manière mécanique ouvre la porte gauche du placard mural, sort une tasse avec une anse, toujours la même, allume la machine à café automatique, insère une capsule, ajoute un verre d’eau dans le réservoir, attends le bip de la machine et appuie sur le bouton vert qui clignote. Pendant que le café s’écoule lentement il sort 2 toasts, le pot de beurre allégé, un yaourt, un fruit et quatre ou cinq gâteaux secs. Après avoir déjeuné, il range le bol et les couverts dans le lave-vaisselle, replace le beurre dans le frigo, essuie la table en enlevant les quelques miettes des toasts, passe un coup d’éponge avec une cuillerée de javel sur la table et dans l’évier, jette un coup d’œil sous la table, et d’un pas lent se dirige vers la chambre pour la faire aérer. Puis il entre dans la salle de bain, allume l’eau chaude de la douche, se retourne et se retrouve comme tous les matins devant le miroir.
Georges s’avance vers lui-même, dans le miroir, se caresse le visage pour toucher sa barbe de la nuit, se gratte les cheveux, ouvre la bouche, et tourne le robinet du lavabo, puis le referme, comme tous les matins. D’abord la douche, puis Georges coupe l’arrivée d’eau chaude, et reste sous l’eau froide quelques secondes, s’essuie vigoureusement et se dirige vers le lavabo pour se savonner la barbe et brosser les dents. Puis vient le soin de la peau, pourquoi pas, et la touche finale, un peu d’eau de toilette et le brossage des cheveux. La brosse démêle les boucles en désordre et Georges fini à la main d’aligner les quelques mèches rebelles habituelles.
Il a terminé, il se regarde dans le miroir et se trouve changé, les yeux sont un plus ouverts, les cheveux ont retrouvé un ordre appliqué, l’eau de toilette s’instille dans les narines et donne une touche supplémentaire à l’éveil des sens. Direction la chambre ou Georges enfile des sous-vêtements propres, la chemise blanche immaculée, le pantalon en velours, puis cherche une cravate parmi la quinzaine bien alignée sur le présentoir, se regarde dans la glace et satisfait de l’ensemble se dirige vers le salon tout en nouant sa cravate. Puis il allume son ordinateur, l’ouvre pour voir les messages de la nuit. Attrape son téléphone portable, et se connecte pour voir les derniers SMS. Il allume la télé pour connaître la météo du jour et s’assoit quelques instants pour savourer ce moment de plénitude maintenant qu’il est prêt à affronter le monde extérieur. Soudain… il se relève pris d’une angoisse indicible qui lui sert les tripes, il se dirige vers la salle de bain tout en libérant le nœud de sa cravate, entre dans la pièce encore embuée et attrapant le miroir le tourne à l’envers. Surprise il y a un autre miroir de l’autre côté, mais Georges n’est plus lavé ni habillé, il est encore avec ses cheveux hirsutes, sa barbe de la veille, ses yeux fatigués. Il retourne le miroir sur l’autre face et se retrouve de nouveau en cravate les cheveux bien alignés. C’est une histoire de fou, Georges retourne une nouvelle fois le miroir et cette fois-ci reste à se regarder plus profondément, il touche ses joues bien rasées sous la peau de la main et mal rasées dans le miroir, il frôle le dessus de son crâne et sent ses cheveux bien ordonnés alors que le miroir lui renvoi une autre image, sa cravate a disparu pour laisser voir les poils blancs de sa poitrine sur laquelle apparaît une croix de Jésus, pas de chemise non plus dans le miroir, pourtant Georges sent les boutons quand il touche sa poitrine, c’est à devenir fou, qui est celui qui est dans le miroir. Alors il hurle, il crie, chante une chanson guerrière mais rien ne se passe, son image du miroir ne bouge pas, ne chante pas, ne hurle pas, pire, plus Georges s’énerve plus un petit sourire ironique s’affiche à la commissure des lèvres de son propre reflet.
Pourquoi te caches-tu derrière l’eau de toilette, pourquoi as-tu mis ce morceau de tissus ridicule autour de ton cou, pourquoi as-tu aligné tes cheveux comme s’ils allaient à la parade ? Dis soudain son reflet dans le miroir !
Mais qui es-tu ? Quelle est cette sorcellerie ou cette blague idiote ?
Mais je suis toi ! Je suis celui qui s’est levé ce matin, je suis celui d’avant maintenant, avant que tu ne me changes, me lave, me maquille pour aller voir les autres. J’étais bien avant, tournes encore le miroir de l’autre côté !
Georges s’exécute et se retrouve cravate nouée devant l’étrange miroir, mais il ne sourit plus, il se touche les joues, bien lisses, sent l’eau de toilette au bout de ses doigts, et brusquement retourne le miroir. Rien, plus de double face, rien qu’un carton blanc avec une étiquette made in China bien entendu, comme si la France ne savait plus fabriquer quoi que ce soit. La double image avait disparu. Georges retourne le miroir, se regarde une dernière fois, se lisse les cheveux sur les tempes et se parlant à lui-même… :
T’as le choix mon pote, ou tu te laves, te rases, te peignes et t’habilles avec des fringues propres, ou tu te laisses aller, tu pues, et tu te caches! Puis il tourna le dos au miroir bien résolu à oublier ce délire. Mais en fermant la lumière de la salle de bain…
Bonne journée Georges, à ce soir !
Instinctivement Georges se signa, il savait que son mental lui jouait des tours, que la fatigue accumulée du travail et des soucis quotidiens lui empêchaient de bien gérer son calme intérieur. Il jeta un regard à son portable, huit heure et dix minutes, le temps d’attraper l’autoroute, c’était fichu il était en retard. Georges fit… peut-être 300m. et s’arrêta. Ferma les portières, se dirigea vers l’édifice, gravi les quelques marches, poussa la porte, entra et posa son doigt dans une vasque en pierre.
Vide, c’est quoi aujourd’hui cette manie de ne plus trouver d’eau bénite ?
Il se signa, avança vers l’autel, et se posa aux pieds de Marie. Un calme se répandait autour et en lui, un calme étrange, presque irréel. Georges sourit. Sacré miroir pensa t-il, mais je te remercie pour avoir guidé mes pas vers ce lieu de plénitude. Tu n’as plus qu’à m’aider à trouver une bonne excuse quand je vais embaucher avec une heure de retard !
En refermant la porte de l’église, Georges se toucha le front en se disant qu’en définitive le mental, était la bonne clé. Celle qui ouvre ou qui ferme les bonnes ou les mauvaises portes.
C'était un enfant malheureux et solitaire, Nash ; sa mère était gravement malade psychologiquement, avec des accès de violence terrible, la maison était un caveau. Le petit Nash prend l'habitude de fuir se réfugier dans la forêt. A l'âge de 11 ans il a une révélation : la Nature est vivante. Elle est dotée d'une pensée propre. Elle nous observe, nous les pauvres humains. Elle vit à son rythme, et si nous ne voyons pas les pierres se déplacer, c'est parce que nous sommes, nous les hommes, devenus artificiels. Il décide de consacrer sa vie à Peindre le "Génie de la Nature". Ado, il fuit l'Académie. Rester enfermé des heures à dessiner des modèles, très peu pour lui. Du reste, peindre l'être humain ne l'intéresse absolument pas.
Il se lance dans une oeuvre magnifique, dans ses dessins et ses toiles la Nature semble nous parler, nous révéler des choses indicibles. Et l'AIR. L'air dans ces toiles...je ne connais pas d'autre Peintre ayant réussi à peindre la sensation de l'air, du pouvoir de respirer. Il fallait un asthmatique pour peindre comme ça (il en mourra, de son asthme). Et cette palette, unique...
Et puis un jour... Un jour c'est 1914, il a 23 ans, et il se retrouve dans les tranchées... Il ne comprend pas, Nash. Il n'arrive pas à prendre la guerre au sérieux. Il voit ça comme un immense jeu débile, il voit avec les yeux de la Nature, il ne voit que des fourmis occupées à s'entre-dévorer, et pour quoi ? Alors qu'il est occupé à dessiner hors de sa tranchée (Nash...), il glisse sur la boue, tombe, et se brise plusieurs côtes. Quelques jours plus tard, pendant qu'il est à l'hôpital, c'est la triste bataille de Pasendaele qui commence. La plus meurtrière de la guerre. Un carnage sans nom. Une vision d'apolcalypse. Plus de 200.000 morts en une poignées de journées infernales. Toute sa compagnie est décimée. Tous ses amis sont massacrés.
Nash s'en veut, il a honte d'avoir survécu. Il se met à être obsédé par une chose : devenir Peintre de guerre. Il sollicite l'armée qui refuse (soyons sérieux, Messieurs. La Peinture de guerre, c'est la représentation de batailles, de hauts faits, de blessés, de héros ! Qu'est-ce qu'il veut, le paysagiste, là ?!). A force d'écrire partout, il arrive à fatiguer les gradés. "Ok, Nash, va donc peindre la guerre, fais-nous rire"...
Et Paul Nash va réaliser ce qui est, à mon sens, une des deux plus incroyables séries de peintures de guerre du 20e siècle. Il va prendre la guerre "à rebours". Pas de corps ensanglantés, pas d'actes "héroiques" à la con. Non. La guerre vue...par la Nature. Le regard d'un homme qui n'en a rien à foutre, lui, des bonnes mauvaises raisons que l'humain se trouve pour avoir juste le curieux plaisir de détruire.
Et, en 1918, il peint le chef-d'oeuvre de la série. Le sol comme un corps labouré de cicatrices, les organes sans dessus-dessous...les arbres pétrifiés, calcinés, comme des mains lancées vers le ciel...et ce soleil, blanc, froid, qui ne réchauffe plus rien.
Et Nash, que ses amis décrivent comme "incapable d'une action cynique", Nash le rêveur, Nash donne un titre terrible à son tableau.
"We Are Making a New World".
Aaah Paul Nash...Paul Nash, quoi...
Paul Nash (1889-1946) "We are making a new world" Huile/toile 1918.
VERS UN AUTRE SACRE : L’ŒUVRE DE RODRIGUE VANHOUTTE Du 08 – 06 au 25 – 06 - 16, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) vous propose une exposition consacrée à l’œuvre du peintre et dessinateur belge Monsieur RODRIGUE VANHOUTTE, intitulée LE TRIANGLE DE KARPMAN. Dès la première approche, l’œil du visiteur est saisi par un choc, au sens étymologique du terme. Le regard est envoûté par cet amas de chairs dévastées, putréfiées, lesquelles sont en réalité, le reflet peint à vif de divers états d’Etre. Le « Triangle de Karpman », appelé aussi « triangle dramatique », sanctionne, dans l’analyse transactionnelle, la dynamique d’un jeu de pouvoir pervers, impliquant trois sujets (d’où le nom de « triangle »). La caractéristique de ces sujets réside dans le fait que leur position est interchangeable. Ils occupent, tour à tour, le rôle du persécuteur, de la victime et du sauveur. Comme précisé plus haut, rien dans ce jeu pervers n’est définitif : la victime peut devenir, à son tour, persécuteur et celui-ci peut se muer en sauveur. Ce triptyque intitulé précisément LE TRIANGLE DE KARPMAN (325 x 175 cm – huile sur double papier),
illustre le résultat d’une telle expérience interpersonnelle, laquelle, même si dans les études de Karpman, elle se déroule au sein d’un microcosme tel que l’entreprise, régit l’ensemble des mécanismes de ce que Balzac nommait « la comédie humaine ». A la vue d’un tel spectacle scénique, une question envahit le visiteur : sont-ce encore des corps ? Assurément ! Mais ce sont des corps n’obéissant plus aux lois de l’harmonie (si tant est qu’elle existe !). Ce sont des études de décomposition progressive de la forme aboutissant à la matière première, à savoir la chair dans tout ce qu’elle a de concret et d’organique, tout en se plongeant dans les arcanes de la condition humaine. Ces chairs en ébullition, en fermentation, sont les témoins du talent de l’artiste, à la fois en tant que peintre et dessinateur. La première chose qui s’impose au regard, est la puissance du trait révélant les volumes à la lumière tant dans les contorsions musculaires que dans les plis des chairs. Il s’agit incontestablement de l’œuvre d’un dessinateur qui peint car c’est le dessin qui décide de la conduction de la matière peinte. La couleur est là pour souligner l’élasticité des chairs dilatées ainsi que pour conférer à la forme l’expression cadavérique qu’exige le sujet. Stylistiquement parlant, cette peinture est une vision apocalyptique de l’excès, en ce sens que la musique qui se dégage de ce spectacle est une musique torturée, se révélant comme telle sans aucun complexe. Cette façon de procéder n’est pas sans évoquer l’esthétique d’Egon Schiele. Sauf que chez l’artiste autrichien, même squelettiques, même défaits, les formes restent entières ne détruisant jamais l’idée même du corps. Ici, le corps « explose » pour ne laisser que sa trace, sa « forme » originelle, désormais en total anéantissement pour aboutir à un étalement de la matière sur l’espace scénique. N’est reconnaissable que l’idée des jambes, des pieds et du torse (la « forme ») mais tout se dilate progressivement, au fur et à mesure que la figure s’étale sur la surface. C’est à partir d’un fond entièrement blanc que se façonne le corps à l’état présent, lequel par l’intermédiaire de la matière corporelle en souffrance, devient le corps malade du Monde. De larges notes noires, rouges (en dégradés), vertes et brunes entourent la partie supérieure de la forme étalée pour mieux la mettre en relief. Les chairs portent également dans leur chromatisme l’empreinte de l’esthétique schilienne faite de brun (en dégradés), de rouge, de vert et de jaune : tout ce qui dans la symbolique évoque la décrépitude et le pourrissement. La représentation de la matière se concentre parfaitement dans le panneau du milieu, lequel montre, dans sa partie supérieure, un étalement de chairs lesquelles (toutes proportions gardées), ne sont pas sans évoquer Rembrandt (souvenez-vous du célèbre BŒUF ECORCHE (1655), abrité au Louvre, qui depuis sa création n’a cessé de hanter des peintres tels que Soutine, Chagall ou Bacon, fascinés la symbolique du corps mort étalé, voire crucifié). AUTOPORTRAIT (190 x 120 cm – huile sur double papier)
nous offre, à l’instar des corps malades, la vision d’un visage dont les traits sont attaqués par l’épreuve et le temps. L’autoportrait est avant tout (du moins depuis Rembrandt) la matière nécessaire à l’établissement d’un « état des lieux » de la conscience à travers le temps. Le visage ravagé est axé sur trois éléments-clés de l’expression : les yeux (hallucinés, cerclés par des cernes, semblables à un terrain labouré). Le nez (droit que l’artiste fait dévier en situant la source de l’arête dans une anfractuosité complètement tordue, confinant avec la partie supérieure droite du front (gauche par rapport au visiteur). La bouche, entrouverte, édentée dont une crevasse laisse apparaître deux dents béantes, également à la droite du visage (à gauche par rapport au visiteur). Le haut et le bas de l’espace sont plongés dans une zone blanche, carrément vaporeuse, laissant apparaître le visage comme un masque d’épouvante, lequel est parcouru sur les deux côtés par tout un réseau de sillons, augmentant l’effet de décrépitude physique, répondant à une protestation morale. Le chromatisme usité ne diffère en rien de celui du triptyque (jaune, rouge, blanc et vert, en dégradés). Remarquez le traitement spécifique des yeux, lequel fait toujours référence à Rembrandt, puisque c’est par ceux-ci que son visage acquiert à chaque fois une lumière nouvelle. RODRIGUE VANHOUTTE est un artiste qui veut aller au-delà de l’image. La dissoudre pour atteindre la finalité de tout créateur : le Sacré. Le corps est le réceptacle du Monde. L’artiste le dénude pour le désincarner. Il touche au plus profond du sensible par un contrôle constant de la matière. Que faut-il entendre par là ? De prime abord (c'est-à-dire vu de loin), le visiteur a l’impression d’une surabondance de peinture, typique d’un travail au couteau. Au fur et à mesure qu’il s’approche de l’œuvre, il constate que l’apport de la matière sur le papier est très pauvre et qu’en réalité, c’est par la brillance propre à cette même matière, cernée par le trait, amplifiant le volume, que la lumière engendrée donne vie à la forme. C’est par l’appauvrissement constant de l’apport de matière sur le corps désincarné que l’artiste arrive à l’essentiel : l’essence même du Monde réfléchie dans la forme. Même si le corps est torturé, il n’en demeure pas moins vivant ! C'est-à-dire protestant son indignation contre l’état actuel de l’humanité. Par « actuel », nous entendons une dimension devenue « contemporaine » de l’Homme. L’œuvre de RODRIGUE VANHOUTTE se trouve au bout d’une chaîne de réactions à vif de la part de nombreux artistes de toutes disciplines depuis le 19ème siècle. C'est-à-dire depuis que la question sociale a commencé à habiter l’histoire de l’Art. Plus exactement, lorsque l’ordre social a commencé à être bouleversé par une remise en question de la société de la part de l’Art. Au fur et à mesure, cette dénonciation de l’état social s’est transformée progressivement en une remise en question de la place de l’Homme dans le Monde, c'est-à-dire au sein du créé, ouvrant ainsi la porte à un autre Sacré. Celui déposé dans l’intériorité même de l’Homme, en dehors de toute instance religieuse officielle. A titre d’exemple, LE TRIANGLE DE KARPMAN (mentionné plus haut), est un triptyque privé d’un système de lecture : on peut le lire dans tous les sens. Néanmoins, le simple fait que ce soit un triptyque est un emprunt direct à l’Art religieux, obéissant à d’autres impératifs. Cette recherche d’un autre Sacré couvait depuis longtemps. Des œuvres telles que le célèbre CRI de Munch dénonçaient déjà ce qu’on allait appeler « l’aliénation de l’Homme moderne », empêtré au cœur de la Révolution industrielle, laquelle allait façonner le 20ème siècle naissant, en lui imposant d’abord une Première Guerre Mondiale ensuite un Krach économique planétaire, puis une Seconde Guerre Mondiale couronnée par une ère atomique. De tous ces événements, l’Art se faisait déjà le prophète bien avant leur déroulement. Sauf que ces symptômes ne sont perceptibles que bien longtemps après le déclenchement de la maladie. Une vue rétrospective nous permet d’observer que dès 1911, Henri Bergson proclamait que « le monde occidental a besoin d’un supplément d’âme ». Concernant l’œuvre, en apparence désespérée, de RODRIGUE VAN HOUTTE, rappelons que nous avons affaire à une matière vivante, héritière, notamment, de l’esthétique schielienne, laquelle présente dans une certaine mesure, une variation expressionniste sur la figure humaine, dictée par le déchirement des chairs, lui-même signifiant celui du Monde. Il y a dans cette œuvre une filiation philosophique due au fait qu’outre sa formation académique (il a fréquenté les Académies de Tournai et de Liège), l’artiste a également suivi des cours de Philosophie et surtout d’Histoire de l’Art. Ce qui a énormément influencé son langage pictural, en ce sens que, comme nous l’avons spécifié, l’artiste veut aller au-delà du narratif. Car pour lui, le peintre est tout sauf un fabricant d’images. Il doit, à travers le geste pictural, atteindre la sphère littéraire, philosophique et historique avec laquelle le visiteur doit se confronter par le véhicule du sentiment à l’idée et à l’émotion que dégage le tableau. Nous avons fait observer, plus haut, que son œuvre est assurément celle d’un dessinateur qui peint. C’est précisément en tant que dessinateur qu’il a débuté son parcours artistique. Ensuite, ce fut la découverte du Greco et du Caravage, en matière de peinture dans la sphère classique. Et lorsque nous abordions plus haut, l’impact de l’Art du 19ème siècle dans l’aboutissement vers un autre Sacré, rappelons que ce fut précisément à cette époque que El Greco et le Caravage (savamment enterrés et oubliés depuis leur mort), furent redécouverts à la lumière d’un nouveau langage à la fois humaniste et pictural. L’artiste ne « surjoue » pas dans la mise en signes. Si ses œuvres comportent si peu de matière, c’est précisément parce qu’il veut éviter de les surcharger par une sorte de « maquillage » inutile dans le but de les rendre « lisses », au fur et à mesure que le regard les appréhende. La puissance du trait est là pour sublimer la matière. L’artiste qui, à la manière d’un alchimiste, fabrique lui-même ses pigments, utilise la technique de l’huile sur double papier. Il ne donne jamais de titre à ses tableaux car il préfère laisser ce soin au visiteur qui doit les interpréter. Ses œuvres résultent d’un contact « direct » avec le sujet, en ce sens qu’il ne peint jamais d’après photo. Il nourrit d’ailleurs pour la photographie une certaine méfiance, trouvant que, de manière générale, elle falsifie la réalité. Bien sûr, lorsqu’on lui fait remarquer que la lumière usitée par tel photographe n’est pas celle d’un autre, il se ravise et admet que dans ce domaine il y a eu de grands créateurs. Néanmoins, pour des raisons de pureté narrative, il refuse catégoriquement de mêler la peinture à l’objectif ! Il cherche aussi à redéfinir la notion de « portrait », car il estime qu’aujourd’hui, ce langage traduit plus les états du peintre que ceux du sujet « portraituré ». Il n’a certainement pas tort. Néanmoins, la création, quelle qu’elle soit, ne se réalise pas « sans y laisser les plumes » ! L’artiste y laisse fatalement (parfois à son insu) quelque trace de lui-même…quelque trace, indispensable pour mieux se fondre au sujet. L’Histoire de l’Art, la Philosophie et la Peinture sont pour lui les outils par lesquels il cherche, en stigmatisant l’humanité d’aujourd’hui, à individualiser la possibilité d’un Homme nouveau. Sa peinture est l’expiation d’un Monde qui, par le corps martyrisé, cherche une issue.
N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.
Rodrigue Vanhoutte François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles
(8 juin 2016 - Photo Robert Paul)
Exposition Rodrigue Vanhoutte à l'Espace Art Gallery en juin 2016 - Photo Espace Art Gallery
Expositions choisies
1992Ateliège Galerie, Liège
1993 Galerie Saint Luc, Liège
1994 Université du Sart-Tilman, Liège
1999 Abbaye du Val-Saint-Lambert, Belgique
2000 Abbaye du Val-Saint-Lambert, à l’occasion de l’inauguration de la Salle Capitulaire nouvellement restaurée
2001 Galerie Art-Home, Belgique, Exposition « Autoportraits » avec la participation du saxophoniste de Jazz Arthur Blyte en concert solo
2002 Galerie Art-Home, Belgique, avec lecture des textes de l’écrivain Michel Rabbin consacrés aux œuvres exposées
HACIA OTRA CONSAGRA: LA OBRA DE RODRIGUE VANHOUTTE Del 08 - 06 al 25 - 06 - 16, el ESPACIO ARTE GALLERY (Calle Lesbroussart, 35, 1050 Bruselas) le propone una exposición dedicada a la obra del pintor y dibujante belga Señor RODRIGUE VANHOUTTE, titulada EL TRIÁNGULO DE KARPMAN. Desde el primer enfoque, el ojo del visitante es cogido por un choque, con sentido etimológico del término. La mirada es hechizada por este montón de carnes devastadas y pudridas, las cuales son en realidad, el reflejo pinta- a -vivo de estados diversos de Ser. El " Triángulo de Karpman ", llamado también " triángulo dramático ", sanciona, en el análisis transaccional, la dinámica de un juego de poder depravado, implicando tres sujetos (de donde el nombre de "triángulo"). La característica de estos sujetos reside en el hecho de que su posición es intercambiable. Ocupan, por turno, el papel del perseguidor, de la víctima y del salvador. Así como precisado aqui arriba, nada en este juego depravado es definitivo: la víctima puede volverse, a su vuelta, perseguidora y éste puede cambiarse en salvador. Este tríptico titulado precisamente EL TRIÁNGULO DE KARPMAN (325 x 175 cm - aceite sobre papel doble), ilustra el resultado de tal experiencia interpersonal, la cual, aunque en los estudios de Karpman, se celebra en el seno de un microcosmo tal como la empresa, rige el conjunto de los mecanismos de lo que Balzac nombraba " la comedia humana ". A la vista de tal espectáculo escénico, una cuestión invade al visitante: ¿ todavía son cuerpos? ¡ Ciertamente! ¡ Pero son cuerpos que no obedecen más a las leyes de la armonía (por muy tanto que que existan!). Justo estudios de descomposición progresiva de la forma que acaban en la materia prima, a saber la carne en todo lo que tiene de concreto y de orgánica, sumiéndose en los arcanos de la condición humana. Estas carnes en ebullición, en fermentación, son los testigos del talento del artista, a la vez como pintor y dibujante. La primera cosa que se impone a la mirada, es la potencia de la raya que revela los volúmenes a la luz tanto en las contorsiones musculares como en los pliegues de las carnes. Se trata indiscutiblemente de la obra de un dibujante que pinta porque es el dibujo que decide la conducción de la materia pintada. El color está allí para subrayar la elasticidad de las carnes dilatadas así como para conferir sobre la forma la expresión cadavérica que exige el sujeto. Al hablar Stylistiquement, esta pintura es una visión apocalíptica del exceso, en el sentido que la música que se libra de este espectáculo es una música torturada, revelándose como tal sin ningún complejo. Este modo de proceder no es sin evocar la estética de Egon Schiele. Excepto que en el caso del artista austríaco,bien que esquelético,bien que deshechos, las formas quedan enteras jamás destruyendo la idea misma del cuerpo. Aquí, el cuerpo "estalla" para dejar sólo su rastro, su "forma" original, presentemente en destrucción total para llegar a una ostentacion de la materia sobre el espacio escénico. Es perceptible sólo la idea de las piernas, de los pies y del torso (la " forma ") pero todo progresivamente se dilata, a medida que la figura se extiende sobre la superficie. Es a partir de un fondo totalmente blanco que toma forma el cuerpo en el estado presente, el cual a través de la materia corporal en sufrimiento, se transforma en el cuerpo enfermo del mundo. Matices anchas negras y rojas (en desvanecidos), verdes y morenas rodean el lado superior de la forma para obtener un relieve màs fuerte. Las carnes también llevan en su cromatismo la huella de la estética schilienne hecha de pardo (en desvanecidos), de rojo, de verde y de color amarillo: todo lo que en la simbología evoca la decrepitud y la podredumbre. La representación de la materia se concentra perfectamente en la trampa del medio, el cual muestra, en su lado superior, un escalonamiento de carnes las cuales (todas proporción guardadas), no son sin evocar a Rembrandt (acuérdese del cèlebre BUEY DESOLLADO(1655), que se halla en el Louvre a Paris, que desde su creación no ha dejado obsesionar a pintores tales como Soutine, Chagall o Bacon, fascinados por la simbología del cuerpo muerto expuesto, incluso crucificado). AUTORRETRATO (190 x 120 cm - aceite sobre papel doble) nos ofrece, a ejemplo de los cuerpos enfermos, la visión de una cara cuyas rayas son atacadas por la vida y el tiempo. El autorretrato es ante todo (por lo menos desde Rembrandt) la materia necesaria para el establecimiento de un " inventario " de la conciencia a través del tiempo. La cara asolada es orientada sobre tres elementos-claves de la expresión: los ojos (alucinados, cercados por ojeras, semejantes a un terreno arado). La nariz (derecha que el artista hace derivar situando la fuente de la espina en una cavidad completamente retorcida, confinando con el lado superior derecho de la frente (izquierda con relación al visitador). La boca, entreabierta, desdentada cuya grieta deja aparecer dos dientes boguiabiertos, también a la derecha de la cara (a la izquierda con relación al visitador). El alto y el bajo del espacio son sumergidos en una zona blanca, en ángulo recto vaporosa, dejando aparecer la cara como una máscara de espanto, el cual es recorrido sobre ambos lados por toda una red de surcos, aumentando el efecto de decrepitud física, respondiendo a una protesta moral. El cromatismo usado no difiere en nada del del tríptico (amarillo, rojo, blanco y verde, en desvanecidos). Observe el tratamiento específico de los ojos, el cual hace siempre referencia a Rembrandt, ya que es por aquellos que su cara adquiere cada vez una luz nueva. RODRIGUE VANHOUTTE es un artista que quiere ir más allá de la imagen. Disolverla para alcanzar la finalidad de todo creador: Lo Sagrado. El cuerpo es el receptáculo del mundo. El artista lo desnuda para desincarnarlo. Toca en lo más hondo de lo sensible mediante un control constante de la materia. ¿ Que hay que entender por eso? De buenas a primeras (es decir visto de lejos), el visitante tiene la impresión de una superabundancia de pintura, típica de un trabajo al cuchillo. A medida que se acerca a la obra, comprueba que la aportación de la materia sobre el papel es muy pobre y que en realidad, es por la brillantez propria a la misma materia, llevada por la raya, ampliando el volumen, que la luz engendrada da vida a la forma. Es por el empobrecimiento constante de la aportación de materia sobre el cuerpo desencarnado que el artista llega a lo esencial: la pura esencia del mundo reflejada en la forma. ¡ Aunque el cuerpo es torturado, no permanece menos vivo! Es decir protestando su indignación contra el estado actual de la humanidad. Por "actual", oímos una dimensión hecha "contemporánea" del Hombre. La obra de RODRIGUE VANHOUTTE se encuentra al cabo de una cadena de reacciones a vivo por parte de numerosos artistas de toda disciplina desde el siglo 19. Es decir desde que la cuestión social comenzó a habitar la historia del Arte. Más exactamente, cuando el orden social comenzó a ser revuelto por una puesta en cuestión de la sociedad por parte del Arte. A medida, esta denuncia del estado social progresivamente se transformó en un cuestionamiento sobre lugar del Hombre en el mundo, es decir en el seno de lo creado, abriendo así la puerta a otra Consagra. El depositado en la misma interioridad del Hombre, aparte de toda instancia religiosa oficial. A titulo de ejemplo, EL TRIÁNGULO DE KARPMAN (mencionado más alto), es un tríptico privado de un sistema de lectura: podemos leerlo en todos los sentidos. Sin embargo, el hecho simple sea un tríptico es un préstamo directo al Arte religioso, obedeciendo a otros imperativos. Esta búsqueda de otro Sagrado incubaba desde hace tiempo. Obras tales como el GRITO célebre de Munch ya denunciaban lo que se iba a llamar " la alienación del Hombre moderno ", enredado en el corazón de la Revolución industrial, la cual iba a dar forma al siglo 20 naciente, imponiéndole primero una Primera Guerra Mundial luego una Quiebra económica planetaria, luego una Segunda Guerra Mundial coronada por una era atómica. De todos estos acontecimientos, el Arte ya se hacía el profeta bien antes de su desarrollo. Excepto que estos síntomas no son perceptibles que sólo mucho tiempo después de la survenencia de la enfermedad. Una vista retrospectiva nos permite observar que desde 1911, Enrique Bergson proclamaba que " la gente occidental necesitaba un suplemento de alma ". Concerniendo a la obra, en apariencia desesperada, de RODRIGUE VAN HOUTTE, recordemos que estamos en relación con una materia viva y heredera, particularmente, de la estética schielienne, la cual presenta en cierta medida, una variación al significar expresionista sobre la figura humana, dictado por la aflicción de las carnes, al del mundo. Hay en esta obra una filiación filosófica debida al hecho que además de su formación académica (frecuentó las Academias de Tournai y de Lieja), el artista también siguió cursos de Filosofía y sobre todo de Historia del Arte. Lo que muchísimo influyó sobre su lenguaje pictórico, en el sentido que, como lo especificamos, el artista quiere ir más allá del narrativo. Porque para él, el pintor no es un fabricante de imágenes. Debe, a través del gesto pictórico, alcanzar la esfera literaria, filosófica e histórica con la cual el visitante debe confrontarse por el vehículo del sentimiento con la idea y con la emoción que desempeña la obra pictural. Hicimos observar, más alto, que su obra es ciertamente la de un dibujante que pinta. Precisamente es como dibujante que empezó su trayecto artístico. Luego, fue el descubrimiento del Greco y de Caravage, en materia de pintura en la esfera clásica. Y cuando abordábamos más alto, el impacto del Arte del siglo 19 en el cumplimiento hacia otro Consagrado, recordamos que precisamente fue en esa época que El Greco y Caravage ( enterrados y olvidados desde su muerte), fueron redescubiertos a la luz de un nuevo lenguaje a la vez humanista y pictórico. El artista no dramatiza " en la puesta en signos. Si sus obras contienen tan poca materia, precisamente es porque quiere evitar sobrecargarlas por un tipo de "maquillaje" inútil con el fin de hacerlas "alisarlas", a medida que la mirada las aprehende. La potencia de la raya está allí para sublimar la materia. El artista que mismo, a manera de un alquimista, fabrica sus pigmentos, utiliza la técnica del aceite sobre papel doble. Jamás da título a sus cuadros porque prefiere dejarle este cuidado al visitante que debe interpretarlos. Sus obras resultan de un contacto "directo" con el sujeto, en el sentido que jamás pinta según foto. Alimenta por otra parte para la fotografía una desconfianza cierta, opinando que, de manera general, falsifica la realidad. Por supuesto, cuando se le hace ver que la luz usada por tal fotógrafo no es la de otro, cambia de opinión y supone que en este dominio hubo grandes creadores. ¡ Sin embargo, por razones de pureza narrativa, categóricamente se niega a mezclar la pintura al objetivo! Procura también volver a definir la noción de "retrato", porque considera que hoy, este lenguaje traduce más los estados del pintor que los del sujeto " retratado ". Ciertamente no le falta razon. ¡ Sin embargo, la creación, sea la que sea, no se realiza " sin dejar parte de si mismo"! El artista mismo deja allí fatalmente (a veces sin saberlo l) algún rastro ,rastro indispensable para derretirse mejor en el sujeto. La Historia del Arte, la Filosofía y la Pintura son para él las herramientas por las cuales procura, estigmatizando la humanidad de hoy, individualizar la posibilidad de un Hombre nuevo. Su pintura es la expiación de un mundo que, por el cuerpo martirizado, busca una salida. François L. Speranza.