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Luciole

Luciole

        Antonia Iliescu

Luciole, larme de lune,

Qui es-tu ?

Ecoute les gouttes de pluie

Elles disent que le destin terni

se joue sur leur peau argentée ;

Elles viennent et s’en vont résignées

comme les larmes, ces gouttes chaudes

qui inondent nos âmes lourdes et nos cœurs,

coquilles fermées de solitude, aux perles

qui pleurent en nous, à l’intérieur.

 

Luciole, larme de lune,

Etoile en quête d’aventure vagabondant

Dans l’univers qui pousse de l’herbe.

Je baisse les yeux pour regarder

le ciel que tu mis à mes pieds

ciel qui tomba sous mes pas

insouciant de ses diamants

que j’écrase, malgré moi, en marchant.

La grandiose céleste nuit

Se fit tout à coup si petite

Que tu la cachas sous un pli.

Et depuis lors, je rêve, je vis,

Je vis en plein soleil qui brille

Et qui s’éclate sur mes jours

et sur mes nuits.

 

28 février 2008
(du volume « Nãscãtorul de perle » - Antonia Iliescu, Ed. Pegasus Press, 2010)

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Les eaux de Saint Jean

Les eaux de Saint Jean

                           Antonia Iliescu

 

Tu lavais tes mains dans les eaux de Saint Jean

Et par ce geste simple se dévoila l’énigme

As-tu donc compris l’étrange paradigme

Qui dessine mon monde né voici un an ?

 

Pas besoin de savon, l’eau se charge de tout

Nettoie l’âme tachetée d’ennuis solitaires

Redorant les désirs qui cessent de se taire

Devant le mystère de cet hiver doux.

 

Tu penses et tu existes dans ce monde cruel

Que je voyais vide avec mes yeux morts,

Où je vis à peine et où je vis à tort,

Cachant mes angoisses sous grimaces pastel.

 

Dorien-musique, gamme en dorien

Notes tristes, timides, aux nuances antiques

Gouttes de sang blanc dégoulinent sceptiques

Sur la roue trop vieille du figé moulin.

 

Tout ce monde nouveau, vieux depuis un an,

Dont les eaux muettes lavent toujours tes mains,

D’où vient-il, du Bien ou bien du Malin ?

Est-il bien réel ou caprice errant ?

 

 (du volume « Nãscãtorul de perle » - Antonia Iliescu, Ed. Pegasus Press, 2010)

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journal de bord, mercredi 6 juillet (2)

"Faudra mettre de l'anti-mite"

 

Ai-je entendu le week-end dernier.

 

On avait rassemblé toute une série de chemises dans une caisse, en vue de déménager une armoire (dans laquelle ces fringues charmants se trouvaient encore).

 

"Faudra mettre de l'anti-mite"

 

OK, OK. J'avais bien compris. Les mites, ça fait des trous dans les vêt'ments. Et y en a pas mal, dans certains coins. Donc, un produit bien adapté est de circonstance.

 

"Faudra mettre de l'anti-mite"

 

Allez-vous en savoir pourquoi j'ai buté sur cette phrase.
Allez-vous en savoir pourquoi cette phrase m'a bloqué.

Allez-vous en savoir pourquoi la crise (d'asthme), lié à un sentiment d'étouff'ment soudain, a failli se déclencher, sur base de cette simple phrase.

Allez-vous en savoir pourquoi je suis dev'nu nerveux, après avoir entendu cette phrase.

C'est bête, non ?

 

"Faudra mettre de l'anti-mite"

 

Ca y est, ça commence à faire tilt.

Ce n'est pas sur l'information (justifiée) que j'ai buté, mais ... sur autre chose.

J'ai du mal, parfois, à identifier les objets, quand je n'ai pas l'habitude de m'en servir. Avec les médicaments, par exemple, j'ai souvent le même problème.

J'ai du mal, parfois, à identifier, visuell'ment, les objets quand je n'en ai pas l'habitude, quand ça ne fait pas partie de mes repères habituels.

A quoi ça ressemble, une boîte d'anti-mites ? Quelle couleur ça peut-il avoir ? Où peut-on en trouver ? Où peut-on trouver une boîte d'anti-mites dans la maison ?

 

Bref : je suis bloqué par l'élément pratique de la situation. J'aim'rais tell'ment qu'on me la montre, cette boîte d'anti-mites.

Bref : c'est un véritable trou dans ma tête.

 

Que de fois ça ne m'est pas arrivé de devoir remplir une tâche (simple, en soi), et de m'en sentir incapable, parce qu'il y avait, à la clé, comme par hasard, une condition à remplir et qui me paraissait ... hors de portée ?

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journal de bord, mercredi 6 juillet 2011

Encore un enrichiss'ment dans mon vocabulaire.

 

"Shatsu" ou "shitsu" : mince, je ne me rappelle plus du mot exact. Ce que j'en retranscris n'est déjà qu'approximation. Qu'importe.

 

Sur ma tournée (de facteur), j'en apprends, des choses.

 

"Shatsu" ou "shitsu". Mot japonais. On l'aura d'viné.

Très curieus'ment, ce mot n'était pas inconnu dans mon oreille.

Le resto "japonais" de la chaussée d'Ixelles, que je dessers, y est-il pour quelque chose ?

 

Ici, le mot recouvrait autre chose.

Une étudiante (qui travaille dans un magasin de sports) faisait toute une étude. Y avait quatre dessins de visages, de morphologie sur sa feuille.

 

S'agissait de savoir comment pratiquer le "shatsu", discipline japonaise qui ressemble un peu à l'acupuncture. Sauf que ... dans ce cas-ci, on n'utilise pas les aiguilles, mais le pouce.

 

Tiens, donc !

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Emma Lapassouze

D’abord on regarde les toiles d’Emma Lapassouze pour les rouges brûlants jetés d’instinct sur leur surface.

Pour les ocres profonds, les terres de siennes et les blancs qui font respirer les carmins. Pour leur lumière. Pour la
franchise et la puissance des lignes de force qui se dégagent de cet ensemble. Puis irrésistiblement, on s’approche et
on tend le doigt. On veut sentir cette matières, ces empâtements qui recouvrent la toile, tantôt lisse et sage, tantôt
grenue et rebelle.

La sensation est surprenante. Une peinture d’émotion et de sensualité, à voir et à effleurer du bout des doigts.


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Emmal Lapassouze dans l'émission "Regards sur l'art:

 

Page proposée par Robert Paul

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La galerie Calvin à Genève

 

Accrochage réussi  à la galerie Calvin perchée dans la vieille ville de Genève. Ici les peintures restent au frais, cette demeure fait partie des plus vieux bâtiments de Genève.. Le  nom de Calvin ajoute à l'austérité du lieu.. La cité de Calvin ne laisse pas passer le soleil facilement...

J'ai accroché 14 variations de Flo, la plupart date de 2011 avec une dominante rouge vermillon, ou grisaille verdâtre.

de grands formats qui se glissent bien dans les pièces hautes de plafond.

J'aime cet espace que vous pouvez voir sur les photos faites ce matin

Pas de vernissage ici, mais expo de longue durée, de juillet à Octobre

Je vous propose de voir cette expo pendant l'été, si vous passez à Genève.grand mur calvin

bureau calvin

escalier calvin


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Au sujet de la précarité

 

Voilà un sujet qui préoccupe beaucoup de monde aujourd'hui. Après une petite plongée dans le passé, quelques réflexions bien d'aujourd'hui.

 

 

La précarité, voilà un mot qui nous est de plus en plus familier. En tant qu’artistes ou marginaux – souvent ces deux notions vont de pair – cela nous parle immédiatement. Nous l’avons connue cette précarité dans les années 50 avec d’autres personnes qui parfois nous étaient proches, comme ce couple qui s’est battu comme un beau diable pour nourrir les deux enfants qu’il avait eu le courage d’adopter. Avec le recul, certains souvenirs prêtent à sourire. Comme la vision de mon mari démontant de vieux radiateurs dans une maison promise à la démolition, sur les indications de ce voisin et ami. Il paraît qu’à deux nous avons poussés ces radiateurs, sur une charrette à bras, jusqu’au chez un démolisseur. On a ensuite partagé l’argent avec l’informateur. Celui-ci a ensuite démonté en douce des cheminées de marbre dans des maisons promises à la démolition pour les vendre, brûlant ainsi la politesse aux démolisseurs. Toujours dans cet esprit de débrouille, il a liquidé les quelques meubles qu’il avait gardés pour lui, après avoir tourné la page de l’époque où il était antiquaire. Je me souviens d’avoir gardé sa boutique un jour où il devait s’absenter et où il m’avait octroyé un billet de 500 Fr que j’ai été très contente d’empocher pour cette presque sinécure. N’empêche que je paniquais à l’idée qu’un acheteur éventuel aurait pu me poser des questions sur tel meuble ou tel bibelot.

Mon compagnon, de son côté, a travaillé au rafistolage de transformateurs qui devaient être envoyés dans les pays de l’Est et il partageait avec son coéquipier le bénéfice de la vente à la sauvette de quelques kilos de cuivre. Aujourd’hui, en France comme en Belgique, des pilleurs délestent la nuit les chemins de fer de ce précieux métal provenant des caténaires ou d’autre matériel. De temps à autre, l’un d’eux se fait électrocuter. Ce malheureux travaillait-il à son compte ou pour une bande organisée ? Appât du gain ou nécessité de survivre, ce type de vol conduit de plus en plus souvent à des issues dramatiques.

Tout est une question d’échelle. Nous pouvons sourire lorsque, autour d’une tablée amicale, les fidèles potes de notre jeunesse, racontent comment ils trouvaient normal, dans leur état de dèche, de piquer dans les grandes surfaces, de la nourriture mais aussi des jouets, au moment de la Saint Nicolas. A quoi bon épiloguer sur ces péchés de jeunesse ? Il n’y a sans doute pas de quoi fouetter un chat. Mais ce qui se passe aujourd’hui n’est pas anecdotique. C’est toute une partie de la planète qui est contrainte de migrer à tout prix, parfois jusqu’à risquer la mort, pour trouver de quoi survivre. Des exploiteurs de tout poil se pressent au portillon pour faire leur profit de toute cette misère. Passeurs, marchands de sommeil, fournisseurs de main-d’œuvre au noir, maquereaux…

Ces réflexions me sont inspirées par « It’s a free world » film de Ken Loach que j’ai découvert à la télévision ce 9 juin. Angie et sa colocataire Rose s’engagent, en ouvrant une officine de placement de travailleurs clandestins, dans un terrible engrenage, au risque de perdre tout sens moral et toute chaleur humaine. Pas de jugement de la part du cinéaste mais quel monde cruel il dévoile à nos yeux ! « Réussir », gagner beaucoup d’argent, plutôt que de subir un monde du travail sans pitié où l’on est pressé comme un citron, avant d’être jeté. Ecraser les autres, comme on a été écrasé, ne se termine pas en apothéose, lorsqu’on rencontre sur sa route des broyeurs autrement puissants et organisés que soi-même.

 

La précarité est au coin de nos rues, avec la multiplication des mendiants et des sans abri. Cela nous gêne car le spectacle n’est pas plaisant. Pourtant ces êtres déchus sont nos semblables. On n’ose toutefois pas les regarder dans les yeux, comme si la pudeur nous ordonnait  de détourner la tête d’un spectacle dégradant. Je déteste – je l’avoue – les femmes qui mendient en geignant, berçant un enfant qui n’est pas nécessairement le leur. Comme je suis scandalisée que des parents n’aient pas d’autre ambition pour leurs mômes que de les apprendre à tendre la main. Ces enfants pourtant restent des enfants et je m’attendris de les voir courir gaîment sur un quai de métro, avec une belle insouciance, lorsqu’ils cessent un court moment de faire la manche.

La charité que pratiquaient les dames patronnesses ne me paraît plus de mise, à une époque où règne l’Etat Providence. On a beau jeu d’ailleurs de parler des cotisations  que nous versons  à la Sécurité Sociale, pour se dispenser de donner une pièce aux nombreux solliciteurs que nous croisons sur notre route. Leur présence obsédante dans le quartier finit pourtant par nous interpeler.

C’est ce qui m’est arrivé cet hiver, au cours duquel j’ai vu, jour après jour, un homme, entre cinquante et soixante ans, assis en tailleur sur le trottoir, le dos appuyé à une voiture, murmurer à mon passage, une main à la place approximative du cœur : « S’il vous plaît, Madame, pour manger, Inch’Allah ». Là où j’habite, cette référence à Allah doit rapporter car certains Musulmans continuent à faire l’aumône. Pour moi, Allah ou tout autre « bon dieu » sert plutôt de répulsif. Mais, enfin, cet homme, que j’ai vu un jour de grand gel, remplacé par un homme jeune, portant un enfant de trois à quatre ans sur les genoux, il fait à présent partie du quartier.

J’ai appris, par une femme qui sortait de la pharmacie, qu’il a cinq enfants et que, lui, au moins, mendie pour manger et non pour boire.  Je me suis dit, à part moi, que lorsqu’on n’a plus rien, il est assez humain de se réfugier dans la chaleur trompeuse de l’alcool. Je me suis dit, également, qu’il est irresponsable de faire cinq enfants quand on n’a pas un clou pour se gratter le derrière. Toutefois, comme le disait ma belle-mère, dans sa sagesse populaire, l’amour, c’est quelque chose qu’on ne fait pas avec la main, en d’autres termes, c’est une activité pas totalement « contrôlable ».

Si bien qu’un jour, après avoir donné une pièce à cet homme, je lui ai adressé quelques mots. Je lui ai demandé s’il ne recevait rien pour ses enfants. A quoi il a secoué négativement la tête. Je lui ai demandé aussi s’il habitait le quartier. Pas de réponse à cette question mais dans les yeux noirs très doux de cet homme que je regardais de haut – fatalement puisqu’il était assis en tailleur sur le sol – j’ai lu qu’il préférait éviter de répondre. Drôle de contact humain qui m’a bouleversée. Je n’avais pas, d’évidence, à poser des questions. Je n’étais ni flic, ni « bienfaitrice » attitrée, ni de sa culture, ni de sa religion. Alors du bout des doigts il m’a envoyé un baiser, comme pour m’absoudre. J’en suis restée toute bête. Les copains à qui j’ai conté l’anecdote se sont esclaffés. Ils n’ont rien compris à mon émotion.

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Mardi dernier

12272743660?profile=originalJ’ai cueilli un petit bouquet de menthe fraîche

Alors que les perles du rhum cubain

Caressent les zestes du citron vert

Bulles d’eau agitées aux éclats des glaçons pilés

Et quelques gouttes de sirop de canne

Son regard d’azur a rencontré mon regard noisette

Nous avons trinqué : « Santé bonheur »

Autour des astres de tournesol qu’il m’a apportés

Feu et flammes pétales dorés au soleil de juillet

Yeux clos nos lèvres se sont effleurées

Son souffle léger comme une brise d’été

Et sur la branche de l’arbre à papillons

Les oiseaux se sont embrassés

Nada le, 05/07/11

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Le Rimailleur

Le Rimailleur


Il relut son traité, muet devant le e,
Élidant quelque doute à l'égard du silence.
Le désir de renom lui répétait: "fais-le !
De te savoir poète blanchit toute arrogance."

 

La plume impatiente attendait l'embryon
Ripailleuse de gloire, avide d'aventure.
Prête à porter ombrage à l'illustre Orion,
La rime de richesse ornerait l'écriture.

 

Le rêveur virtuose au vouloir inspiré,
Couronna de succès l'ouvrage avant son heure.
Imbu de son talent, sans l'avoir transpiré,
Il s'attelle au projet de son œuvre majeure.

 

Le souvenir semblait le propos prétendu,
Celui qui d'émouvant peut ébranler les âmes,
Touche à perfection en gardant suspendu
Le rythme de ses vers, comme autant d'oriflammes !

 

Propulsant l'innocence au zénith de son art
Il égrena sa vie, explora le registre,
Feuilleta chaque instant, serait-il égrillard,
Se prétendant critique, avec orgueil de cuistre.

 

Il fit rimer deux mots entre deux calembours,
Enjamba la césure en pensant harmonie,
De quelque mignardise imbiba ses labours,
Martyrisa l'accent, et cria son génie.

 

Orgueilleux de fadaise, il exalta ses vers,
S'affirmant, le pédant, à clamer son histoire,
Assuré d'éblouir les critiques divers
Et d'être couronné, sans délai probatoire.

 

Suffit-il le dessein, au simple rimailleur,
Pour se nommer poète en toute fantaisie,
Dédaignant cet effort qui donne au travailleur
Le talent inhérent qui sert la poésie?

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journal de bord, mardi 5 juillet 2011

Comme c'est beau, un chat qui s'approche d'un arrosoir !

 

Et le soleil de juillet, qui s'apprécie particulièr'ment vers ... neuf du soir, aux terrasses ...

 

Il semblerait que ... le grand sac-à-dos, attaché à la guitare, quand on le transporte (avec des fringues, en plus), c'est tout à fait faisable.

J'ai fait l'expérience, comme promis, en fin de journée, en vue des futures journées sur les ch'mins de Saint-Jacques, en principe dès lundi prochain.

 

Il n'est pas dit qu'un pote ne viendra pas me rejoindre.

Ca m'enchante et ça me contrarie en même temps.

Oui, quand on est deux, on perd une part d'espace et de liberté. Comme par hasard, le compère qui vous accompagne n'est pas (trop) différent de vous.

Mais ... on fait aussi, à deux, des choses qu'on ne f'rait pas seul. Et qu'on aime. Et qu'on n'oublie pas.

Je sais aussi que, malgré mon attrait, mon amour de la liberté, si j'effectue trois, quatre journées de suite en marchant seul, je peux m'essouffler, éprouver brusquement le besoin d'une compagnie, d'une rencontre stable.

Alors ?

 

J'ai peut-être une possibilité, aussi, d'aller chanter vers le 16, en Corrèze. Ca demande (encore) confirmation.

 

En attendant ...

 

Y a encore des papiers à remplir au préalable. L'Onem m'a renvoyé un formulaire (que j'avais envoyé en r'commandé), afin de régler officiell'ment ma situation d'agent des postes ... en 4/5ème.

 

En attendant ...

 

On est entré chez moi quand je bossais. Histoire de régler des tuyaux. Et le concierge n'a pas récupéré le double de clés que je lui avais passé, avant-hier soir, afin que les ouvriers rentrent. De plus, on a déplacé mon séchoir ... sans le remettre à sa place.

Enfin : les ouvriers peuvent encore rev'nir demain. Y a plus de peur que de mal. Mais je n'aime pas ça.

 

En attendant ...

 

Au boulot, à la poste, y au moins deux sacs entiers de catalogues ("Trois Suisses" ?) qui m'attendent.

 

 

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Crever d'envie

 

À une Française, que l’on reconnaîtra sans peine

 

Quand elle devient maladive,

Jusqu’où l’envie peut nous mener?

Je n’aurais pu l’imaginer.

La raison parfois s’inactive.

 

La Fontaine fit le récit

D’une grenouille prétentieuse,

Devenue soudain envieuse.

Être énorme fut son souci.

 

Qui jalouse un plus gros que soi,

Peut ressentir de la souffrance.

Lors, accueillir la médisance,

Peut se retourner contre soi.

 

Je pense à cette femme haineuse,

Mal dans sa peau, rongée d’envie.

Je lui donne, ici, pour avis,

De chercher à se rendre heureuse.

 

Que l’on puisse crever d’envie,

Ne me semblait pas concevable;

Je n’avais pas compris la fable

Et je me questionne aujourd’hui.

 

4 juillet 2011

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Flo à Genève

 Je mets la dernière touche à mes peintures qui partent demain et jeudi pour 2 expos personelles.

 Et là, comme dab, ça devient insupportable.. je re...visite chaque pièce et le désir de changer ou de revoir un fond surgit, resurgit..

 Les peintures s'entassent les unes contre les autres, je mets de coté celle-là et celle là aussi.

A l'orée de son ventre

146x110 acry et nombreux marouflages sur toile gegout©adagp

oree-de-son-ventre-copie-1.jpg 

 Changer le fond sans toucher à la forme, peut-être y toucher un peu, beaucoup et souvent trop.

Comment faire pour ne plus défaire... 

Se défaire de la peinture, la vendre si possible, la donner..? Non jamais..!

 Plutôt la reprendre entièrement, lui relooker le faciès, et attendre que la pièce quitte mon atelier, rarement avec regrets, même si les années passées auprès d'elle sont nombreuses..

 


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12272745896?profile=originalPour la première fois, la Bibliothèque royale de Belgique et la Bibliothèque nationale de France réunissent leurs collections et s’associent pour célébrer ensemble les grandes heures de la miniature flamande en organisant une exposition de portée internationale. Un événement culturel majeur.

Cette exposition « à quatre mains » débutera à Bruxelles (de septembre à décembre 2011), se poursuivra à Paris (de mars à juillet 2012) et présentera dans chaque lieu des manuscrits différents. Ce projet commun profitera des recherches entreprises depuis plusieurs années dans les deux institutions pour la publication de catalogues raisonnés.

Au total, plus de 140 manuscrits enluminés parmi les plus prestigieux - certains n’ont plus été montrés depuis plus de 50 ans, d’autres restent inédits - seront présentés au public dans une mise en scène originale, qui mettra en valeur ces pièces exceptionnelles tout en respectant le contexte qui les a vues naître.

Au fil des pages, le visiteur plongera ainsi au coeur d’un imaginaire médiéval peuplé de héros et de légendes, où Alexandre le Grand, Charlemagne, Lancelot et la fée Mélusine côtoient Renard le goupil, des dragons ailés et des licornes bienveillantes.

Véritable échange entre institutions nationales, cette manifestation sera une occasion exceptionnelle et unique de voir exposées les collections de manuscrits belges et français. Les précieuses enluminures de la Bibliothèque nationale de France seront en partie présentées à Bruxelles et vice-versa. Le visiteur pourra ainsi découvrir des manuscrits qu’il n’aura plus l’occasion d’admirer par la suite… 



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Un souffle d'hiver en plein été

Si vous souffrez de la chaleur, voici de quoi vous rafraîchir. Je vous propose "Brumaire".

                                                       BRUM AIRE

 

Il est quatre heures et déjà le soir tombe.  On est aux plus mauvais jours de ce mois que le calendrier républicain rebaptisa brumaire.  Et, depuis le matin, le brouillard ne décolle pas.  Sa présence glacée farde les fenêtres. Simone qui tricote au coin du feu, en remuant les lèvres, évite de regarder de ce côté, comme si un visage maléfique allait se matérialiser sous ses yeux.

D'ici un moment elle quittera son fauteuil, en s'accrochant à la barre tiède du poêle de Louvain et elle fermera les rideaux, pour exorciser la menace extérieure.  Mais alors elle sera encore plus seule, livrée à ses propres ombres.  Ses obsessions, ses vieilles rancunes, le contentieux de soixante années d'amertume, la frôleront du coude, pèseront sur sa poitrine, comme si elle s'était pris un mauvais catarrhe.

Allons, il est temps d'aller voir comment "il" va.  Elle glisse sur ses chaussons jusqu'à la pièce voisine où "il" végète depuis sa congestion.  Trois mois se sont écoulés depuis son refus de l'envoyer à l'hôpital.  Elle se le garde.  C'est son mari, n'est-ce pas ? L'infirmière qui vient, matin et soir, le changer et faire sa toilette, la félicite de son dévouement.

Simone renifle l'air vicié de la chambre, mi dégoûtée, mi jouisseuse.  Bien fait pour lui ! Est-ce qu'il lui a donné une quelconque satisfaction ? Il était bien trop occupé à caresser sa bouteille.  Qu'il paie maintenant ! Mais il ne faudrait pas qu'il lui empoisonne la vie trop longtemps.

Simone, pourtant, en femme de devoir, fait ce qu'il faut.  Trois fois par jour elle lui enfourne un biberon d'une solution protéinée.  Et il faut voir comme il ouvre une bouche édentée et caverneuse quand il sent l'approche de sa mixture.  Simone s'amuse parfois à feindre de lui reprendre la bouteille mais il improvise alors de si horribles grimaces, ponctuées de grognements, qu'elle se dépêche à la lui rendre.  Normal ! Il a toujours été goinfre.  Elle devait se dépêcher à manger, avant qu'il  n’engouffre les meilleurs morceaux.

 

Simone regagne la cuisine où elle vit à présent confinée, dormant sur le vieux canapé dont elle a appris dans son sommeil à éviter le ressort le plus saillant.  Elle tisonne le feu, remonte son fichu sur ses épaules, gagne l'oratoire qu'elle a fignolé. Sur une étagère, recouverte d'un chemin de table brodé et surmontée d'un papier doré punaisé au mur,  se côtoient des figurines de plâtre peinturluré, quelques images pieuses et des fleurs en papier dans de tout petits vases, sentinelles soigneusement alignées dont le plumeau à poussières frôle de temps à autre la ligne de crête. Deux cierges allumés dans les grandes circonstances, entre autres lorsque l'orage se déchaîne, encadrent cet agencement que clôt, à l'extrême droite, la bouteille d'eau bénite. Le maigre corps convulsé d'un christ en argent noirci domine l'ensemble, berger hautain de ce modeste troupeau.

 

Simone contemple avec un brin de rancune la Vierge et l'Enfant Jésus, le Sacré-Cœur, Saint Ghislain, Saint Antoine, Saint Donat et Sainte Rita. Pour la Vierge, elle n'a pu se décider à laquelle se vouer car Marie a tant d'appellations, de miracles à revendiquer et de lieux de dévotion particulière que c'est la bouteille à encre. Pourquoi l'une, plutôt que l'autre ? Les neuvaines, jusqu'ici, n'ont rien donné, bien qu'elle s'y soit meurtri les genoux.

 

Cette fois elle a glissé un coussin sur le fond paillé et rugueux du prie-Dieu. Elle a décidé de s'adresser cette fois à Notre Seigneur Jésus. Elle a recopié  les neuf pages d'oraisons, de sa grande écriture maladroite, l'assaisonnant de quelques ratures qui viennent rompre la  monotonie du texte.  Elle lit le premier feuillet à mi-voix.

O Dieu, venez à mon aide. Seigneur, hâtez-vous de me secourir.  Gloire soit au Père, au fils et au Saint Esprit.

O très doux Enfant Jésus qui, pour notre salut éternel, êtes descendu  des splendeurs du Père et qui, conçu de l'Esprit Saint, n'avez point eu horreur du sein d'une vierge ; verbe fait chair, qui avez pris  la forme d'un esclave, ayez pitié de nous.

Elle marmonne encore quelques invocations  et court à la dernière page où elle a transcrit la prière au Divin Enfant Jésus, révélée par la Sainte Vierge au Père Cyrille.

O Enfant Jésus, j'ai recours à vous, je vous en prie, par votre Sainte Mère assistez-moi dans cette nécessité…

Elle bute sur la mention : exposez ici ce que vous souhaitez.  Peut-elle vraiment dire le fond de sa pensée ?  Alors, elle se lance très vite : Délivrez mon mari de cette vie de souffrance et que son trépas lui ouvre le Paradis.  C'est sans doute généreux de sa part de lui souhaiter le Ciel mais l'important, c'est qu'il soit ailleurs et non ici.  Pour elle, la santé ça va.  Elle est encore robuste et tient solidement à la terre.  Il coulera encore pas mal d'eau sous les ponts avant qu'ils se retrouvent face à face dans l'autre monde.

 

Un coup de sonnette vient interrompre son chuchotis  mais elle s'accroche, fait la sourde oreille.  Elle lui faut dire la prière d'une traite et elle ne tient pas à devoir tout reprendre dès le premier verset.  Mais l'autre aussi s'accroche, sonne une nouvelle fois et, pour faire bonne mesure, tambourine sur la fenêtre. D'un geste brusque l'orante  se lève, écarte un peu l'étoffe brun sombre.  Un visage blafard, au nez camus, s'écrase contre la vitre, auréolé d'une toison hirsute,  blanche comme neige.

Simone soupire, mi exaspérée, mi heureuse de la distraction qui s'offre. Elle va à la porte, fait glisser les verrous, abat la barre transversale qui la persuade que son abri est inexpugnable, tourne deux fois la grosse clé dans la serrure, tire enfin à elle la lourde porte dont la face interne est peinte en faux bois.  Un gnome femelle se faufile prestement dans la pièce, emballé d'un châle noir qui descend jusqu'aux mollets.

-          Pas de dérangement, m'fille ?

-          Asseyez-vous, Charlotte. J'étais à ma sieste mais on ne peut pas fermer sa porte à une voisine quand on est malheureuse comme moi.  Seule au monde, comme qui dirait.

 

La visiteuse n'est pas dupe.  Elle a remarqué la marque des genoux dans le coussin.  Elle n'en dit mot mais elle s'arrange pour que son regard parle pour elle.  Un regard sombre, étonnamment vif, dans un visage finement ridé.  Ensuite c'est un assaut de politesses.  L'offre d'une jatte de café qu'elles sirotent, en faisant un canard et dans laquelle elles trempent des biscuits secs à  l'arrière-goût de savon. 

Simone se lamente.  Elle envie, dit-elle, sa voisine, veuve depuis si longtemps qu'on se souvient à peine comment était fait son mari.  Charlotte peut donc aller et venir à sa guise, manger des gaufres plutôt que d'éplucher des patates et de cuire des biftecks qui n'ont plus le goût d'avant, se verser  une petite liqueur si le cœur lui en dit. 

Charlotte se récrie.  Et la solitude, qu'est-ce que Simone en fait ?  Les nuits sans sommeil tant les genoux et les reins font mal. Personne pour un petit massage.  Personne pour réchauffer une tasse de tisane.  Personne pour une petite caresse.

Simone prend une mine sévère.  Elle ne tient pas à ce que Charlotte se mette à raconter des insanités.  C'est honteux, à son âge, d'être toujours si portée sur la chose.  Si on ne l'arrêtait pas, elle glisserait sur les souvenirs de sa maturité quand elle tenait une Maison, toujours pleine les jours de quinzaine. Elle la tenait d'une poigne de fer, donnant un coup de gueule par-ci par-là, pour garder le pot droit.  Et même un coup de main, s'il faut la croire, lorsqu'il y avait affluence et que les filles ne suffisaient plus à la besogne.

Et quand elle s'était rangée, vers les cinquante-cinq ans, elle avait épousé un homme largement plus jeune qu'elle. Le pauvre ! Elle l'avait si bien épuisé qu'il était mort au bout de dix ans, lorsque la poudre de cantharide qu'elle lui prodiguait dans son café ne lui faisait plus aucun effet. On le sait, elle connaît les hommes comme sa poche, ainsi que la manière de prendre ces animaux-là.

 

Mais il vaut mieux être en bons termes avec Charlotte.  Elle passe pour être un peu sorcière, connaît les simples, joue à l'occasion les rebouteuses. Simone préfère l'accueillir, plutôt que de verser du sel sur le seuil, pour lui interdire sa porte. D'autant qu'elle peut être utile à l'occasion, si on ne la rebute pas et si on satisfait sa curiosité.

Et justement la voilà qui demande comment va le pauvre homme, si on peut lui dire un petit bonjour.  Même s'il n'a plus tout à fait sa connaissance, ça pourrait lui faire plaisir.  Simone n'a pas le temps de dire ni oui, ni non, la visiteuse déjà trottine vers la porte, qu'elle pousse de ses petites mains crochues, en avançant son museau pointu de belette.  Elle regarde le malade sous le nez, le flaire, lui pétrit la main, marmonne des mots tendres, les mêmes qu'elle aurait pour un petiot.  Elle l'observe un long moment, dépose la main flétrie sur le drap, se retourne vers Simone qui se tient derrière elle, hoche la tête d'un air de compassion.

Les deux femmes retournent à leur jatte de café. 

- Ma pauvre, il n'est pas près de passer, tu peux me croire.  Tu n'as pas fini tes mauvais jours.

- Je le sais.  Jusqu'au bout il m'aura esquinté le tempérament.  Ce n'est plus une vie.  Pas un instant de répit. L'infirmière, c'est très bien mais qui fait la lessive, qui le débarbouille quand il remet sa bouillie, qui l'entend geindre ou ronfler comme une basse, toutes les nuits, qui respire son odeur, qui ne couche plus dans un vrai lit ? C'est moi, pas vrai ?

- Allons, allons, calme-toi.  Ne te bile pas ainsi. Une bistouille dans ton café, ça te ferait du bien, ça te calmerait les nerfs. Dis-toi que tout a une fin, même quand on trouve le temps long.

La fine mouche se délecte à l'avance car elle sait que Simone n'attend que ce conseil pour sortir sa bouteille de péket  et en verser une lampée dans l'épais café à la chicorée qui laissera des traces brunes sur la faïence.  Emoustillées par l'odeur âcre de l'alcool, les deux femmes égrènent à présent les derniers potins.

 

On a beau faire, le sexe et l'argent, il n'y a que ça dans la vie.  C'est la femme du boulanger qui vient de mettre les voiles avec le mitron. Oui, mais attends, tu n'as pas tout vu.  Cette autre pimbêche, que sa mère et sa grand-mère font dans le grand genre, toujours avec un chapeau, même pour un saut chez l'épicier, elle a épousé il n'y a pas un an l'héritier de la plus grosse ferme du village. Tu y es ? Eh bien, elle vient de tout planter là. Son mari, pourtant si bien de sa personne et si gentil, n'a plus que ses yeux pour pleurer. Elle s'est acoquinée avec l'un des valets.  Paraît même qu'elle a vidé le compte en banque commun.  Elle a pris le train pour Bruxelles avec son gaillard. Au guichet ils se tenaient bras dessus bras dessous sans vergogne. Ils n'ont pas attendu d'être en première classe, pour se lécher le museau devant tout le monde.

 

Charlotte glisse à un autre sujet, tout aussi friand. Les gamines qui fréquentent l'école communale prétendent qu'un vieux saligaud les suit en exhibant sa marchandise.

- Elles sont tellement dévergondées qu'on se demande si c'est bien vrai.  Et pourquoi alors, il ne se passerait rien du côté des Enfants de Marie ?

- Eh, eh, s'égaie Charlotte, peut-être bien qu'elles baissent les yeux mais qu'elles n'en perdent pas une miette.

-  On s'en va-t-on, vraiment, embraie Simone. Quelques voyous ont vidé les caisses de la Superette.  Tous masqués mais ils se sont faits prendre quand même. Le plus jeune avait treize ans ! De la graine de potence !  Ils ne pensent qu'à s'amuser, à voler, à se mettre au chômage ou sur la mutuelle.  Moi, toute gamine j'ai arraché le lin, j'ai fait des briques, jusqu'au moment où je suis entrée en service chez un notaire. 

-  Là, j'étais logée, nourrie et blanchie, c'est vrai. Mais je n'arrêtais pas du matin au soir, avec cinq ou six moutards dans les jambes. Je n'avais pourtant pas 16 ans. Et la lessive, c'était pour moi, même que c'était moi qui cassais le petit bois et allumais le feu sous la bouilleuse. En voilà pour deux jours.  Une tournée au savon noir, une au savon blanc, rincer et tordre que je ne sentais plus mes mains et mettre à blanchir sur la prairie.

-  Puis venait le repassage.  Il fallait chauffer les fers sur le poêle qui allait un train d'enfer. Puis tu en prenais un que tu l’approchais de ta joue pour voir, qu'à la fin elle te cuisait. Alors je crachais sur la semelle. Si ça chuintait avec des petites perles tourbillonnantes, j'étais dans le bon.  Ca durait des heures debout à suer, avec mes pieds qui gonflaient. Tout y passait, jusqu'au moindre mouchoir et aux « cravates de curé » de Madame.  Le plus dur, c'était les chemises au plastron plissé et leurs saloperies de nappes amidonnées parce que ces bourgeois, ça reçoit à n'en plus finir.  Et les tapis à battre et que je te bouffe la poussière, parce qu'il n'y n'avait pas d'aspirateur en ce temps-là ! Rien d'électrique d'ailleurs ! Tout à la main. Toute l'énergie, comme on dit aujourd'hui, c'était ton corps que la produisait.

-  Et faire briller les parquets avec une grande et lourde brosse, plus haute que moi.  Comme je ne m'en sortais pas la première fois,  Madame m'a montré comment faire, en récitant l'Ave Maria en cadence. Que soit disant je gagnais mon Ciel, tout en me cassant les reins !

- Et qui sonnait à la porte, avec toutes sortes de salamalecs, les jours de quinzaine, pour empocher ma paie ? Ma mère, qui ne s'est jamais retournée de moi jusqu'à ce que je lui rapporte un peu d'argent.

 

Charlotte a laissé parler Simone, sans l'interrompre.  Elle sait que lorsqu'elle est partie sur le chapitre de sa vie de fillette martyre, elle est intarissable. Les misères que son homme lui a fait endurer dès le début de leur vie commune, ce sera pour demain.

 

Les jours suivants Simone reprend sa neuvaine, à une heure où elle est sûre que Charlotte ne viendra pas l'interrompre.  Pas de changement du côté de l'impotent. L'infirmière, avec ses airs sucrés, retourne le fer dans la plaie quand elle dit que si le cœur est solide, les choses pourraient traîner des mois, voire des années.  Tous les jours Charlotte y va de sa visite.  Elle branle la tête, plaint Simone, insinue qu'il y aurait peut-être un moyen. 

-          Je ne peux pourtant pas lui donner le bouillon d'onze heures, éclate Simone.

-          Qui te parle de ça ?  Si tu le souhaitais très fort,  si tu avais la foi, les choses finiraient bien par s'arranger. Il suffit d'y penser, jour après jour.  A nous deux on y arriverait.  Réfléchis.  Fais-moi signe. 

Simone se remue, mal à l'aise.  Il lui semble qu'une odeur de soufre émane de l'ample jupe noire de la vieille.  Et, qui sait, ses pantoufles fatiguées  cachent peut-être des pieds fourchus.

Les jours passent et rien ne bouge.  On est bientôt à la Noël et il ne veut toujours pas décarrer. Simone se met à ses cartes de vœux.  Elle calligraphie comme elle peut des souhaits de bonne et sainte année.  Elle trempe sa plume dans l'eau de mélisse, faute de pouvoir la tremper dans le bénitier. On n'écrit pas aux curés et aux bonnes sœurs comme on écrit à sa famille. 

Elle recevra en retour des sentences tout aussi douceâtres, la louant de sa piété et de sa générosité car, bien sûr, elle n'est pas avare de ses oboles.  Elle donne aux missionnaires, parraine un orphelin, cotise pour la Fondation Damien et les îles de Paix, verse son écot à l'entretien des églises dédiées à la Vierge et aux Saints faiseurs de miracles. Parfois elle se prend à douter, se demande si ça sert à quelque chose de thésauriser des centaines de jours d'indulgence.  N'y a-t-il pas de la tromperie là-dessous ?  Toute cette engeance s'y entend à vous soutirer vos picaillons.  A peine cette idée-là l'a-t-elle effleurée qu'elle se confond en prières de repentance, accusant le diable de l'avoir induite en tentation.

 

Le mois de décembre est déjà bien avancé et il gèle dur.  Les rues miroitent de verglas. Le froid et le vent coupant ne dissuadent pas Charlotte d'accomplir sa visite quotidienne.  De temps en temps elle apporte un petit gâteau ou une boîte de biscuits.  Une fois même elle s'est fendue d'un flacon de rhum. Dans le café, avec du miel, rien de tel pour vous dégager la poitrine quand il fait si froid.

Simone se languit après sa chambre à coucher qu'elle a soigneusement aménagée, avec un protège matelas bien chaud, des oreillers moelleux et un super sommier qu'elle n'a pas encore fini de payer.  Elle a repris pour elle la couette en vrai duvet.  Des fois qu'il la saloperait ! Elle a empilé sur le lit du malade toutes les vieilles  couvertures de la maison. Heureusement, elle est économe et ce n'est pas son genre de jeter. Mais la couette est trop large pour le canapé et tout un pan traîne par terre.

 

Les deux femmes sont devenues de plus en plus proches.  On ne peut pas dire qu'elles s'aiment mais enfin elles se comprennent.  Complices et vigilantes, les antennes en action pour démêler toutes les arrière-pensées.  Elles se traitent mutuellement in petto de vieille canaille, mais si elles ne se voyaient pas tous les jours, elles seraient en manque.  Chacune se dit qu'elle est loin d'atteindre le degré de cynisme de l'autre.  Pouvoir se murmurer tout bas : elle est pire que moi, ça rassure.

Finalement, pour la première fois, elles décident de réveillonner ensemble. Quelques bouteilles de mousseux, un demi mètre de boudin noir aux raisins, du bon beurre salé, une cougniole, une bûche moka, voilà pour le festin.  Et des biscuits au fromage à grignoter en regardant la messe de minuit à la télévision.

Simone a cédé aux instances de Charlotte.  Elle l'a laissée décorer la cuisine de quelques branches de pin synthétique.  Un petit sapin tout aussi artificiel, quelques boules colorées, un nuage de cheveux d'ange, une guirlande de loupiotes qui clignotent, on a beau dire, ça crée de l'ambiance.  Oui mais l'odeur du vrai sapin ?  T'en fais pas, on a ça en spray ! Cette Charlotte a réponse à tout.

 

Le soir du Réveillon, la voilà qui s'amène sur le coup de huit heures. Ma parole, elle a natté ses cheveux qui sont encore abondants et les a relevés en chignon. Sur ce chignon tremble une petite étoile d'argent.  Des escarpins rouges pointent sous la longue jupe de satin noir.  Sur le corsage blanc à volants s'étale toute une bimbeloterie de faux brillants.  Quelle menteuse ! Elle avait parlé d'un petit tête-à-tête sans cérémonie et la voilà  sur son trente et un.

Heureusement Simone avait prévu le coup.  Elle n'est pas à la mendicité !  Elle arbore une robe habillée, d'un bourgogne très chic, commandée en grand secret aux Trois Suisses et des mules neuves à bordure de fausse fourrure.  Noël ou pas, elle tient à avoir les pieds à l'aise. Seigneur ! Ils en ont tant vu, les pauvres, depuis qu'elle les oblige à la porter, elle et ses quatre-vingt kilos.  Ils ont tant trotté, grimpé tant d'escaliers, battu et rebattu tant de carrelages, planchers et parquets, qu'ils sont tout déformés et fourbus.

Au fond, elles sont bien bêtes de se mettre ainsi en frais, alors que l'élément mâle et valide leur fait défaut. La rivalité en est diminuée.  Elles se contemplent d'un air bonhomme et se complimentent.  Te voilà bien jolie !  Et toi, donc !  Que tu parais dix ans de moins, arrangée ainsi. Lorsqu'elles se sont embrassées – Noël oblige – un nuage de poudre de riz s'est répandu dans l'air, aggravant la prégnance antagoniste du Soir de Paris de Charlotte et de l'eau de toilette musquée dont Simone s'est aspergée.  C'est peut-être pour hommes mais elle ne va pas laisser ce machin si cher tourner à rien puisque "il" n'en mettra plus jamais !

Elles se sont attablées pour l'apéritif.  Au mousseux, pour éviter les mélanges.  Elles piochent dans les mendiants, les Apéricubes et les chips.

Charlotte n'est pas longue à attaquer. 

- As-tu pensé à ma proposition de te donner un coup de main, pour libérer ce pauvre homme qui souffre tellement  ?

- Dis plutôt que c'est moi qui dépéris !

Et les voilà parties ! Simone finit par avouer qu'elle craint de commettre un péché en recourant à la sorcellerie.  Quelle sorcellerie ?  Il s'agit tout au plus de décupler la force qui est en nous.  En  priant, qui plus est !

 

Entre Noël et Nouvel An, Simone digère le message.  Après tout, pourquoi pas ?  Que risque-t-elle à essayer ?  A la mi-janvier elle donne le feu vert à Charlotte qui commence par se faire prier.  Il faut, paraît-il, attendre la lune descendante. 

Elle est enfin là, cette lune descendante et Charlotte se pointe vers les dix heures du soir, munie de tout un attirail qu'elle extrait de son cabas.  Apparaissent un brûle-parfum dans lequel elle dépose quelques bâtonnets d'encens, deux bougies blanches, un grand papier immaculé sur lequel elle a tracé un pentacle, tête en bas. 

Simone dégage, à sa demande, une petite table ronde qu'on pousse contre le lit du malade et Charlotte installe sa panoplie. Elle allume les bougies et l'encens.  Elle trace en marchant quelques cercles concentriques, sa tête, à l'expression recueillie, dodeline.  Enfin elle s'arrête, un peu chancelante, et se met à réciter un charabia que Simone écoute avec stupéfaction. Tout en continuant son baragouin, Charlotte s'est approchée du lit, a décroché le crucifix qui le somme, l'a déposé sur la table et couvert d'un chiffon noir.  Puis elle a tiré des profondeurs de sa jupe une croix de paille qu'elle a accrochée au mur, juste à l'endroit où le crucifix se trouvait depuis si longtemps que ses contours sont comme gravés sur le papier peint. 

La figure de l'officiante grimace et ses yeux flamboient. Elle reprend haleine, éponge son visage laqué de sueur, se laisse tomber sur une chaise, comme une personne épuisée, prête à s'évanouir.  Un verre d'eau, chuchote-t-elle à Simone, qui s'empresse, les mains tremblantes.

Un ange passe, Lucifer peut-être, tandis que les deux femmes se taisent.  Au bout de quelques minutes, lourdes comme du plomb, Charlotte s'ébroue, éteint bougies et brûle-parfum puis elle range son matériel, avec exactement les mêmes gestes que la pédicure rassemblant ciseaux, emplâtres et limes.  L'air attentif, pour ne rien oublier.

Elle donne ensuite ses instructions à Simone. Lorsque le malade aura passé, il faudra brûler sans tarder la croix de paille. Le crucifix doit reposer sur la table, jusqu'à ce que tout soit fini et le pauvre homme dans sa tombe.  Pour tout paiement, elle ne demande qu'un peu de reconnaissance et la porte toujours ouverte. Pas d'argent entre elles, car ça ferait tout capoter. Puis la voilà partie, dans un grincement de porte.

 

Simone se retrouve seule, face à la pendule qui marque déjà minuit. N'a-t-elle pas rêvé ? Un coup d'œil à la forme voilée du Crucifix gisant sur la table la détrompe, ainsi que l'odeur de cire et  d'encens. Elle s'oblige à s'allonger sur le canapé, bien qu'elle n'ait pas du tout sommeil, comme si elle avait bu un pot de café fort. Elle presse la main sur son cœur qui bat la chamade pendant un moment.  A la fin la fatigue l'emporte et elle sombre dans une somnolence agitée. Rêves confus et cauchemars se succèdent pendant quelques heures tandis qu'elle se tourne et se retourne sur son fichu canapé.

 

Vers les six heures elle se réveille avec le sentiment d'un grand vide. On n'entend plus que le bruit de la pendule. Tout fait silence dans la chambre voisine. Finis les soupirs, les ronflements, la respiration rauque. Elle s'est traînée jusque là, après avoir passé son peignoir par décence. Elle a versé quelques larmes en lui fermant les yeux. Quelques instants plus tard elle a entrouvert le poêle, y a jeté la croix de paille qu'une grande flamme a dévorée en rugissant tandis qu'une lueur sanglante dansait au plafond. Simone en a frissonné.  Elle se hâte à présent de tout ranger avant l'arrivée de l'infirmière.  Elle relègue la table ronde dans le débarras.  

 

Dans quelques jours tout sera rentré dans l'ordre. "Il" dormira sous la terre et le Crucifix regagnera sa place au-dessus du grand lit de Simone, dans lequel elle reprendra tous ses aises.  Parfois, vers minuit ou deux heures elle se réveillera, les yeux pleins de larmes qu'elle écrasera des deux poings. Va-t-elle s'avouer qu'"il" lui manque un peu malgré tout ?

 

                                                                                                                          MARCELLE DUMONT

    

 

 

 

 

 

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L'horizon du passé.



L'horizon du passé.

22.05.2011

J'exhale mon ennui sur les rives désertes
D'un horizon sans joie attristé de langueur,
Dans le décor cloitré de ces portes ouvertes
Qui n'approuvent l'accès qu'à un espoir fugueur.

Robinson échoué dans un port de chimère,
Je parcours l’avenir sur les mers du passé
Dénudant le désir d’un amour éphémère 
Qui chavire à l’instant d’un tourment dépassé.


J'ai travesti mon âme en rêvant d’aventure
Dans des flots incertains déferlant sur l’attrait
Au mépris négligé du surcroît qui sature
Et soumet l’habitude au danger de l’abstrait.

En voulant te quitter j’ai façonné des chaines
À mon cœur affranchi de toute liberté,
Assommé sans répit par ces tristes rengaines
Qui ressassent la fin d’un bonheur déserté.

Naufragé de l’amour, prisonnier d’amertume,
Je contemple le flux de cet âpre destin,
Qui croupi dans l’ennui, se tait et s’accoutume,
Négligeant le fracas d’un avenir certain.

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journal de bord, 4 juillet 2011

Allez : juste une petite semaine de boulot, à nouveau. Cinq jours.

 

Si j'en ai l'énergie, tout à l'heure, je ferai une expérience : faire, peut-être, le tour des rues d'Etterbeek, avec ma guitare et le grand sac-à-dos attaché à mon instrument (avec des tendeurs).

J'ai mis le ukulélé dans le grand sac à dos. Il arrive encore, le salopard, à dépasser d'une tête. Mais bon, y a moyen de s'arranger.

Ce qu'il y a, c'est que ...

Je compte, dès lundi prochain, m'envoler à nouveau sur les chemins de Saint-Jacques. Pour quelque temps, j'imagine. Faut dire : dès lundi prochain, j'aurai quatre semaines de congé.

Il faudra donc que j'emporte, avec moi, aussi, un minimum de fringues. L'intérieur de ma housse de guitare ne suffit plus.

 

Je ne sais pas encore si je partirai sam"di ou lundi. Tout dépend des circonstances. Je n'ai pas envie de (trop) programmer.

 

Bien sûr, y a le Festival du Conte, à Chiny, ce week-end. Je ne projette pas spécial'ment de m'y rendre, cette année. Ceci dit, si un pote m'y convie, je peux encore changer d'avis. Mais bon ...

 

Tiens, un oiseau chante déjà, de l'autre côté de ma fenêtre. Les quatre heures trente (du matin) et le ciel encore noir ne sont pas des obstacles, à ce que je vois, à ce que je sens.

 

La dernière nuit s'est passée tranquill'ment.

 

Faudra pas oublier les deux vir'ments à payer.

 

Ma dernière chanson, "LA SERVEUSE DE L'HOTEL", commence à vivre derrière une musique qui lui ressemble, et lui ressemblera, dans les jours futurs, de plus en plus.

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Haïkus

 

Poussées en tous sens,

inclinées jusqu’au gazon,

les pivoines pleurent.

 

Du frêle pommier,

le zéphyr cueille les fruits

et les plante en terre.

 

Dans la rue déserte,

frémissant les grands érables,

projettent leur ombre.

 

Sur maintes autos,

le soleil agit railleur;

effets amusants.

 

Silence insipide

mais un courant d’énergie

qui tient en éveil.

 

Dimanche 3 juillet 2011

 

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