Nouvelle Féline en Mémoire D'Un Disparu
Une Destinée Inachevée :
D comme Darius la Douceur de Norvégien incarnée
Celui qui n’aime nul être ignore la joie de vivre.
Saadi.
Prologue -
Pour le sage, tristesse et bonheur se confondent
Comme le bien, le mal, qui partagent le monde
Il prend d’un cœur égal le bonheur qui survient
Et la peine qui frappe et qu’il n’attendait point.
Par ce quatrain d’une prégnante philosophie intemporelle, le poète persan médiéval Omar Khayyâm nous engage à consentir au sentiment d’acceptation dont le simple commun des mortels devrait être pourvu pour prétendre évoluer dans son existence, dégagé de phénomènes paroxystiques destructeurs auxquels la souffrance le confronte fréquemment, sagesse épicurienne prônant de s’emparer de chaque feuille égrenée du calendrier, « cueillant le jour » de ce Carpe diem fugace avec une indescriptible saveur et volupté : Ô douce volupté sans qui, dès notre enfance, le vivre et le mourir nous deviendraient égaux, prophétise une plume sagace, l’auteur du Songe de Vaux [1], incitation à savourer l’instant présent, fort d’une foi effervescente inaltérable, tout en se préparant à l’inéluctable : à ce que la grande faux sévisse à tout moment, du haut de sa sentence tranchante, implacable !
Cette doctrine ne nous enseigne t’elle pas aussi, qu’un esprit serein s’acquiert volontiers par l’abandon des passions et la recherche continuelle de plaisirs tempérés ?
Hélas, cette ligne de conduite nous recommandant une maîtrise de soi exemplaire n’en reste pas moins, craignons-le, un idéal à accomplir, en analogie de la quête d’une inaccessible étoile ou de la chimère rêvée par le preux chevalier de la Mancha, le valeureux Don Quichotte. Prenons-en pour preuve ce constat : quand la fortune cesse brutalement de nous sourire, meurtris, nous nous empressons sitôt, de maudire l’arrêt qui nous touche de plein fouet, et c’est là, concédons-le, un sentiment humain bien intelligible, hormis de quelques pauvres d’esprit ou faibles de cœur [2], et si, tels des oiseaux blessés qui se cachent pour mourir [3], nous nous évertuons, dans un élan de pudeur souhaitable, à dissimuler notre désolation aux yeux d’autrui, en empruntant un masque de composition afin de les épargner, elle n’en est pas pour autant moins vivace, dénuée de profondeur, cette désolation honnie !!!
La nature de l’humane status, notre condition humaine, est foncièrement instable, soit ! Inconstant est notre sort, inconstant, il perdurera encore jusqu’à la fin des temps, pour des siècles et des siècles. C’est un fait de l’admettre du point de vue de l’intellect, certes, c’en est un autre de l’assimiler sur le plan de l’affect, le mettant en application au gré de nos desiderata, sans être incontinent anéantis aux tréfonds de notre âme, par le ressentiment et la révolte.
Or, comment apprivoiser, sinon retenir l’éphémère, capter les fils ténus des dédales et labyrinthes ponctuant notre périple d’hominiens vulnérables, appelées à plus ou moins longue échéance à une partance inexorable, comment faire en sorte qu’elles ne s’échappent point trop vite ces mailles, tandis que l’on voudrait éternellement prolonger, préserver les rares moments de grâce privilégiés, cette Clarté de vie [4], subtilisée à l’Ombre des jours [5] et dispensée selon l’humeur de dame Providence, avaricieuse de bienfaits, il nous faut bien l’avouer ?
Si l’amertume t’envahit comme la mer
Un pays, qui plus tard, n’est qu’un sable sauvage ;
Garde au moins en toi les songes du désert,
Ces souvenirs si doux que l’on nomme mirages ,
nous préconise une sensibilité poétique[6] à fleur de peau...
Tiendrions-nous là, une possibilité de nous libérer de nos tourments délétères, en ne conservant, au contraire, qu’une souvenance bénéfique contribuant à nous redonner un peu de baume au cœur, atténuant d’une once, s’il se peut, nos plaies à vif, à l’heure de l’épreuve endurée ?
Tant qu’usant de faux-fuyants, nous demeurerons dans l’incapacité majeure de réaliser, que l’univers qui nous entoure est constitué de contrastes, d’ambivalences, et qu’en raison de cette dualité fondamentale qui oppose les joies des peines, il nous faut instamment saisir la Vie opportune [7] comme si notre avenir en dépendait, lorsque munificente, elle condescend à s’offrir à nous, au lieu de sempiternellement gémir, nous apitoyer et nous répandre en lamentations, maugréant contre les malheurs s’abattant sur nos fronts de «déshérités», nous ne risquons guère de prétendre atteindre une maturité salutaire, souveraine, de «contemplatif », épousant ce dogme de l’ataraxie [8], sans toutefois sombrer dans le piège inverse du détachement excessif, d’un stoïcisme complet, si l’on adhère un tant soit peu à une pénétrante devise spirituelle à inscrire en exergue de son journal intime, puisque :
L’Indifférence est une paralysie de l’âme,
une mort prématurée. [9]
A fortiori, s’affranchir de tortures néfastes, d’une démesure infligée par le chagrin, n’est pas à la portée du premier d’entre nous, reconnaissons-le honnêtement ; le mépris de l’« endolorissement » de la psyché, base de la fameuse morale d’Épictète, supporte et abstiens-toi, n’en persiste pas moins une gageure à relever, voire une utopie à atteindre !
En l’occurrence, parvenir à adopter et établir un équilibre savamment dosé est sans nul doute, ce qu’il y a de plus malaisé à réussir au long de notre parcours d’adultes ; la règle incontournable édictée par on ne sait quelle suprématie céleste, surnaturelle, veut que l’injustice prévaudra ad vitam aeternam ici-bas, et ce, envers n’importe quelle forme d’espèces vivantes que ce soit, humanité, faune et flore confondues, indissociables les unes des autres, proies et prédateurs reliés entre eux, non pas, dans un souci d’entraide, mais par un ingénieux instinct de survie propre à chacun.
De grâce, gardons-nous, et en dépit de ce fait, de toute émanation manichéenne, car les « bourreaux » comme les « innocents », ce nous semble, sont exposés pareillement à être rudoyés après avoir entrevu et recueilli, même subrepticement, les secrets de la voûte étoilée.
Oui, l’attente d’un quelconque dédommagement en faveur d’un « juste » est à la fois vaine et simpliste ; ainsi, n’oublions jamais, en adéquation avec un penseur du mouvement romantique, que :
Le genre de mort, pas plus que le genre de vie, ne doivent être considérés comme punition ou récompense. La rémunération ne peut être de ce monde [10] !
Certes, nous ne pouvons nier pareille évidence : aspirer à l’éternité pour nous et nos semblables, sans omettre nos Amies les bêtes [11] composant le Cortège d’Orphée [12], ainsi que la floraison d’essences botaniques volatiles, fructueuse Corne d’abondance appartenant au noble univers du Règne végétal, est un vœu pieux, frisant le ridicule et l’invraisemblable !
N’est-il pas grotesque de nourrir l’illusion de la constance, de la possession sur cette planète où nous ne sommes que de passage, invités appelés à jouer un rôle conditionné, prédestiné par des puissances supérieures tenant de l’invisible, de l’impalpable, conformément à cette maxime [13] qui tente de nous éclairer sur la chose, en proclamant que :
Rien n’est jamais acquis à l’homme ni sa Force
Ni sa faiblesse ni son cœur. Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce.
Pourtant, même si nous savons ô combien ceci, qu’ :
"Il n’y a pas d’amour heureux mais qu’en revanche
C’est notre amour à tous deux’’ [14]],
nous nous efforçons d’être parfaitement conscients de vers où exactement, nous nous dirigeons, acheminant nos pas de Wanderer[15] ou de Mélancoliques Pèlerins [16] dans l’incertitude totale quant à l’achèvement de notre itinéraire, et bien que le mystère de notre destination irrévocable subsiste (même s’il faut raison garder, peut-on encore nourrir le fol espoir de trouver une échappatoire, une consolation, nous libérant de nos sombres émotions en songeant au principe de la réincarnation ?) un questionnement nous interpelle et nous taraude continûment : pourquoi certains fleurons sont condamnés à se flétrir prématurément, alors que d’autres ont l’incroyable chance de se distinguer, d’être élus par un bon génie «non identifiable », frère de la clémence ?
Tel est le lot qui nous est réservé et qu’il nous faut vaille que vaille endurer : s’éteindre naturellement , comme un « beau coucher de soleil », à « l’hiver de sa vie », non sans avoir goûté, lors d’étapes précédentes successives, à de délectables présents, ou hélas, s’éclipser de façon précoce au «printemps » de celle-ci, ou à la rigueur « au cœur de l’été », s’inclinant devant le fatidique, pour ne pas dire le Fatum, au lieu de s’insurger contre l’indécence des vicissitudes nous enlevant ceux que nous chérissons.
Quant à en comprendre la signification, le message de ce fatum, bien malin serait l’heureux vainqueur qui pourrait se targuer de détenir un semblant de réponse plausible ! Nous ne sommes pas égaux devant le droit de vie ou de mort, c’est un truisme avéré, irréfutable, que nous n’essayerons ni de combattre ni de contredire, ayant nous-mêmes, à plusieurs reprises, fait l’expérience de cette brûlante vérité, ressortant à chaque fois de l’abîme, plus éprouvées que jamais !
L’aimable figure à laquelle nous dédions notre hommage posthume par message épistolaire interposé, et qui, à l’aube de sa jeunesse florissante, s’est soudainement retirée de ce monde, en est une illustration probante.
Nous permettant de détourner ces vers provenant d’une Ode [17] compatissante de style baroque, rédigée en l’honneur d’un père au supplice d’avoir perdu sa fille chérie, nous osons reprendre sans fausse honte cette déclaration à notre compte (toute proportion gardée, étant donné qu’il n’est nullement question présentement, de mentionner un membre de notre race dite « supérieure »; mais dites-nous, cher ami lecteur, si selon vous, il existe un degré spécifique dans l’échelle des valeurs chargées de soupeser notre affliction?), pièce d’essence lyrique, précieuse, professant ce credo :
Mais elle était du monde où les plus belles choses
Ont le pire destin:
Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L’espace d’un matin.
Et je vous en conjure, ne nous dites pas, dans l’objectif louable d’apaiser notre émoi, qu’un noble représentant de la gent Grippefromage pourra bientôt s’enorgueillir de « remplacer » (ô le vilain verbe proche du blasphème), de se substituer à notre cher disparu, ce serait là, sans conteste, lui faire offense, tant la singularité de son tempérament, inhérente à toute créature animée peuplant le globe terrestre, le dispense de successeurs.
Incomparable il était, incomparable, il s’inscrira désormais dans nos mémoires, en similitude de ces paroles insignes proférées par un noble savant[18] animé d’un feu sacré :
La vie durant
on peut soutenir
que des fleurs comme la mienne
Il en existe des millions, des millions.
Comment convaincre
que non seulement la mienne,
Mais que toute
et n’importe quelle fleur
N’a pas sa pareille qu’elle est unique ?
Ah ! S i seulement vous pouviez deviner à quel point nous aurions tant aimé nous exclamer à son égard :
Le royal exilé prend de sublimes poses ;
Il allonge son nez sur ses pieds de satin ;
Il s’endort, il échappe au stupide destin,
À l’irrémédiable écroulement des choses.
Mais non, n’en croyez rien! Point de lendemains luxuriants pour ce voyageur sans bagages. Aujourd’hui « l’irrémédiable » est bel et bien consommé ; celui que nous nommions hier encore, notre gentil bambino gatto (gentil, dans le sens vertueux, médiéval du mot) s’est métamorphosé en contours immatériels, venant, telle une obsession, nous hanter nuit et jour. Sa trajectoire abolie, cependant qu’aucun signe précurseur ne présageait une semblable calamité, a été brisée net, par un intransigeant et triste sire, le hasard, auquel nous sommes tous soumis, sans condition, ni distinction de naissance, de fortune, de beauté et d’âge…
De là où il est, le pauvret, dans la dernière demeure où sa dépouille repose au pied d’un rosier aux corolles enluminées et embaumantes, bénéficie-t-il seulement de l’ombre tutélaire des divinités du Domaine d’Asgard ? A t-il été placé d’emblée, sous la protection de Freyja la blonde, déesse phare de la Beauté et de l’Amour dans la mythologie scandinave ? Pourquoi soupçonnerions-nous le contraire en adeptes de l’école du scepticisme ? Le cher trésor ne rayonnait-il pas d’attraits ?
Par conséquent, sa personnalité, la douceur incarnée, ne peut – elle perdurer à rayonner, en son nouvel et saint ermitage, au-delà de son sort de météore traversant le ciel de nos planètes astrologiques, continuant d’inspirer de tendres sentiments, même aux plus sévères des critiques d’une cour suprême tutoyant l’azur [19],ce store bleu de l'infini. [20]
Quelle originalité, raillerez-vous ? Mais nous n’ambitionnons pas, ne vous en déplaise, à être originales, même en exprimant notre dénuement moral ! Non, nous aspirons à un simple dessein : traduire à l’aide de notre dialectique, notre trouble profond.
Néanmoins, nous savons que trop bien à quel point la douleur aiguë et le poids de ce fardeau s’estomperont un jour prochain (Dieu merci?), que nous serons immanquablement délivrées de ces affres alors à leur apogée, violence, pour l’heure où nous rédigeons notre « déploration », au point culminant de son exacerbation, frôlant parfois l’insoutenable et l’indescriptible, sur le plan sensoriel…
Faut-il s’en réjouir ne serait-ce que l’espace d’un instant, ou bien, mues par un élan pétri de remords un rien coupables, le regretter, en considérant ceci :
Quel que soit le choc qu’engendre une disparition, qui pourrait se prévaloir de vivre en permanence avec cette sensation imprimée dans sa chair, traduisant une impression de vide saisissant, de manque absolu, procurée par l’absence irréfutable d’un être qui, patiemment, telle une araignée tissant avec art sa toile, a su se rendre ô combien attachant, nous captivant par la ferveur de ses prunelles obliques « parlantes », caressantes, fidèles miroirs de son« intériorité » ?
Fasse que dans un futur proche, plus « félinement » fructueux, notre vœu soit promptement exaucé : que s’adoucisse enfin l’intensité de notre détresse !!!
Nonobstant, soyons une once, réalistes :
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage [21],
suivant une illustre et haute devise, car il est irréfutable, qu’il nous faudra encore tourner nombre de pages de notre « livre d’heures », avant que puisse enfin, officier la paix ; la guérison ardemment convoitée, si guérison il y a, ne se fera qu’à ce prix, nous ne l’ignorons pas, et si nous ne respectons pas à la lettre ce travail « d’acceptation », de compromis avec notre seule véritable, incontournable ennemie, l’inflexible Atropos [22] , nous serons perpétuellement tentées de nous retourner vers le passé, nanties d’une crainte paralysante, partagées entre le désir de cultiver « la fleur précieuse de la souvenance » ou de nous complaire dans un pessimisme aux relents méphitiques, affirmant le dilemme suivant par intermittence :
J’ai fait mon nid au bois dans l’orage des pleurs.
Maintenant l’arc-en-ciel rit au ciel de pervenche :
Mais il suffit d’un rien pour qu’aussitôt mon cœur
Sente encore pleuvoir l’ancien temps des pleurs [23].
Ah s’il savait, le « poverino », sacrifié par cette Déesse pressante, cruelle [24], combien il nous est pénible d’esquisser son portrait en empruntant le temps de l’imparfait, nous qui, en égoïstes patentées, dévotes conquises et confites devant son culte, aurions amplement préféré jouir de sa radieuse présence, chantant les mérites du mignon, à travers maints récits relatant l’épanouissement, ou plutôt l’efflorescence de notre gentil lutin !
Nous étions assurément, il y a peu de cela, à cent lieues de présumer que son devenir serait irrévocablement menacé, à quel point nous rivaliserions de malchance et à quel point, surtout, nous serions derechef exposées aux images négatives de naguère, ébranlées par cette séparation inopinée avec notre « Pussy-cat » de Norvégien, « chat-fée », la quintessence de l’amabilité ( selon des critères purement subjectifs, concédons-le, dictés par nos sentiments et non par des données imposées, censées se rapprocher de la perfection esthétique subissant le diktat d’une vogue fugace, en adéquation de la perspicace citation due au créateur de l’Aigle à deux têtes [25], proclamant qu’ : il n’y a rien qui se démode plus vite que la mode), « chat-fée » donc, ne se défaisant qu’en de rares circonstances, de son flegme aristochattesque au pouvoir absolutique, revêtant à l’intention de sa frèrie de cœur et non de sang, ainsi qu’à notre endroit, mille et une pattes de velours, scellant donc avec la maisonnée, un pacte de non agressivité revendiqué.
C’est ainsi, que de sa « tour d’ivoire »,c'est-à-dire de la fenêtre de sa résidence de citadin obligé, s’adonnant à l’un de ses loisirs de prédilection, observer attentivement les « bipèdes » , nos congénères, foulant d’un pas pressé, réglé au métronome, le pavé tourangeau, notre protagoniste de l’histoire, graine en germination d’une somptueuse inflorescence se fanant malencontreusement bien trop tôt, surprit, peu avant son « envol » pour d’autres cieux, ce dialogue insensé entre acteurs du genre humain, ravi, que l’un de ces passants, mystique converti au culte de sa Majesté féline , subjugué par son mystère, n’en doutons pas, puisse la confondre avec une voluptueuse corolle botanique de la famille des Opiacées, en la prenant pour un attribut de Morphée[26], car, bien qu’exécrant les flagorneries de courtisans, sa Seigneurie Darius (« Dada » pour son cercle rapproché usant d’une familiarité un peu bêta) n’en prisait pas moins les compliments sincères déposés à ses pieds, dévolus à célébrer ses appâts charnels souverains :
Oh ! La jolie fleur derrière la vitre !
-Oui. C’est un petit pavot blanc.
-Je ne vous parle pas des petits pavots,
je vous montre la fleur d’en bas, tachetée de clair et de sombre, veloutée,
avec deux gouttes de rosée qui brillent et de grandes étamines blanches pointues...
Tiens, je me trompais : ce n’est pas une fleur, c’est un chat.
-Non, non, vous aviez raison, poète : c’est une fleur. [27]
Conseil philosophique –
à méditer, sur l’heure de notre partance…
La Mort ne surprend point le sage ;
Il est toujours prêt à partir,
S’étant su lui-même avertir
Du temps où l’on se doit résoudre à ce passage.
Ce temps, hélas ! embrasse tous les temps :
Qu’on le partage en jours, en heures, en moments,
Il n’en est point qu’il ne comprenne
Dans le fatal tribut ; tous sont de son domaine ;
Et le premier instant où les enfants des rois
Ouvrent les yeux à la lumière,
Est celui qui vient quelquefois
Fermer pour toujours leur paupière.
Défendez-vous par la grandeur,
Alléguez la beauté, la vertu, la jeunesse,
La mort ravit tout sans pudeur
Un jour le monde entier accroîtra sa richesse.
Il n’est rien de moins ignoré,
Et puisqu’il faut que je le die,
Rien où l’on soit moins préparé.
Jean de La Fontaine
(Première partie ou introduction en forme de morale
de la Fable I du Livre VIII : « La Mort et le Mourant. »)
-
Impressions sentimentales -
Ou
Variations enamourées autour d’une lettre de l’alphabet : D comme Darius.
Tu deviens responsable pour toujours
de ce que tu as apprivoisé.
Antoine de Saint Exupéry.
De ta sagesse, ami, que nul n’ait à souffrir,
Domine ta colère et sans cesse pardonne.
Pour la paix de ton cœur accepte sans gémir
Le destin qui te frappe, et ne frappe personne.[28]
D comme Darius, notre tendre « Norvégien », dont chaque voyelle et consonne de son identité, rebaptisée par nos soins, reflète un éventail succinct de vertus léguées par Dame Nature, le dotant d’un prestige unique à nos yeux :
D douceur
A aura
R radieux
I inimitable
U unanimité
S sensible
Ainsi la douceur de son aura radieuse et inimitable ne faisait-elle pas l’unanimité même auprès des non initiés, n’ayant pourtant guère le loisir d’approfondir, d’être sensibilisés aux différentes facettes de son idiosyncrasie de « chat-fée » semblant tout droit échappé du pays des farfadets peuplant les terres nordiques, où s’ élancent, au centre des sapinières, tant de géants en bonnets pointus, résineux verdoyants ou immaculés, chers à Guillaume Apollinaire [29]…
D comme Darius I er du nom, d’une dynastie aristocratique, prénom glorieux saluant le berceau d’origine de sa civilisation avant qu’elle soit introduite sous les cieux scandinaves par ces conquérants de Vikings, à l’aide de leurs somptueux drakkars, si l’on en croit la légende, appellation donc, évocatrice du puissant Empire de Perse (royaume persan nimbé de magie) que nous avions choisi délibérément d’attribuer à notre gentil dauphin, en raison de son panache d’aristochat.
D comme damoiseau, assumant dignement son titre,dont nous n’ aurons pas le plaisir, hélas, de voir grandir, ou plutôt éternel jouvenceau ayant dû renoncer à conter fleurette aux damoiselles de son rang qui, n’en doutons pas, se seraient aisément prêtées, au rite de la Parade Nuptiale, tant les charmes de notre dandy inné auraient causé de ravages, dandy ne se découvrant jamais, au grand jamais, jusqu’à l’heure de son trépas, de son digne maintien, de son allure majestueuse sans imitation possible, gage de sa haute extraction aristochattesque de Chat des Forêts Norvégiennes parfaitement civilisé... Diamant étincelant d’un éclat à nul autre pareil, selon nos critères partiaux de rigueur, venant parachever le diadème ouvragé de sa lignée d’essence princière, composée de six joyaux au charisme ineffable…
D comme Damas, oasis d’un Proche-Orient légendaire, source probable de son arbre généalogique aux ramures florifères, puis fructifères, d’antique Felis catus anciennement silvestris, s’inscrivant dans la postérité, sous la dénomination reconnue de Norsk Skogkatt. Damas, cité impériale résonnant de mille et une splendeurs raffinées au passé florissant, synonyme de magnificence, telle l’illustre étoffe soyeuse, damassée, telle la mythique inflorescence médicinale aux effluves enivrants, Rosa damascena, fleur de prédilection chantée par une floraison de poètes lyriques persans, ou bien, telle encore, une prune fétiche goûteuse, à la chair bleue-ardoise, immortalisée dès son implantation occidentale, au temps de la Reine Anne de Bretagne, grâce à son « portraitiste » botaniste [30] attitré, le peintre Jean Bourdichon, dévolu au service de quatre générations de monarques, François I er inclus...
D comme le danger imminent, fulgurant de violence, dangereux intrus qui nous guettait au détour de notre sente commune déjà parcourue, que nous avons été inaptes à détecter, et dont il est vrai, nous ne pouvions imaginer qu’il nous conduirait vers une semblable détresse, tant son parcours juvénile rayonnait - pensions-nous, candides - de promesses. C’était sans compter les méandres, les dédales de l’imprévu se profilant à l’horizon, s’invitant à trancher le fil de notre Romance sans paroles tissée d’une délicatesse indescriptible...
D comme la datation de notre serment, de notre engagement inassouvi, rompu par son départ foudroyant, ferme résolution que nous nous étions faites à nous-mêmes de veiller sur notre bébé-chat, suite à notre visite inaugurale, heureuse rencontre validée par un « contrat officiel » scellant les prémices de notre pacte d’amitié, de compagnonnage et plus si affinités...
D comme la date fatidique de sa disparition, jour, inopportun et inique, damné, mettant un terme à notre intimité et signant par cet acte, notre infortune, disgrâce accentuée par la scène déplorable à laquelle il nous fallut assister, jouant malgré nous le rôle de spectatrices impuissantes, désemparées, soumises à le voir se retirer du monde du vivant, éclipse non pas provisoire mais irrévocable, que nous aurions tant aimé contribuer à différer.
D comme le défi de sauver notre « bel ami » des griffes d’Atropos, qui nous aura échappé, entourant de son dédain notre vibrante supplique afin qu’il revienne à la vie... Mais non, nous devons nous plier au vœu de l’horrible marâtre en robe de Moire [31] qui vint enlever le cher petit.
Dorénavant, que pouvons-nous faire d’autre que de nous résigner, acceptant le verdict funeste de la grande loi universelle, cette Plume qui a tout écrit depuis la première heure puisque Le livre du destin n’est jamais raturé [32] et qu’une deuxième chance ne se présentera pas, concernant une opportunité de reviviscence...
D comme déloyal, la fatalité et le sort déloyaux, cruels, qui lui furent réservés, si jeunot ;
D comme les dommages créés par notre séparation irrémédiable, d’une dureté implacable, déchirement qu’il nous faut dominer et soustraire au « regard » de la société, toujours si prompte à juger !
D comme Dante Alighieri et sa Divine Comédie. Trilogie poétique traitant du Paradis, du Purgatoire et de l’Enfer, enfer d’où notre innocent, voué à être sacrifié par une inflexible mégère que nul n’apprivoisera jamais, sera exempté de séjour, trouvant illico presto refuge au cœur d’un Éden reconstitué, antérieur au péché originel... en vertu de sa nature féline généreuse de « juste », l’incarnation même de la douceur, « doux agneau » dépourvu d’une mine doucereuse, véritablement bienveillant jusqu’à en être désarmant, tant il paraissait sans défense, ne répondant même pas aux assauts d’un belligérant confraternel à vibrisses, voulant imposer sa suprématie de dominant…
D comme dédicace, comme le dédicataire de notre éloge posthume, ou comment dédier à notre choupinet (sobriquet dont nous usions et abusions à son endroit) un hommage subtil, incantatoire, au travers d’un vocable, admettons le, prosaïque, dans l’objectif que sa mémoire ne puisse s’éteindre dans notre souvenance sensitive, sensorielle, déclaration de notre vive affection, ayant pour vocation de dévoiler sans fausse pudeur, aux yeux d’autrui, un pan infime de la dimension de nos sentiments... indicibles, sous évalués, tandis que ce noble lionnin régnait encore sur nous…
D comme description fidèle ; d’emblée, nous renonçons à le décrire sous peine de le trahir, soit en livrant une définition incomplète, fort imprécise, de ses adorables attraits, assurément irrésistibles pour nous, versant de ce fait , dans un style grossier dénué de finesse de traits, soit à l’inverse du portrait « humanisé » de son essence féline, nous nous astreignons à contenir nos élans impulsifs qui nous feraient volontiers sombrer dans le dithyrambe frôlant la caricature, proche de coutumes sacrées usitées sous l’ère de l’Antiquité égyptienne, « embaumement » spirituel déifiant notre chère seigneurie Raminagrobis. et puis nous ne tenons pas davantage à dépoétiser la pléiade de ses atours en déployant nos « maigres » moyens, ayant recours à des propos cartésiens... rebattus, allant à l’encontre de notre volonté, de notre idéal de ne point déflorer son personnage de « libertaire », « libre-penseur » énigmatique, revêtant des poses hiératiques de Grand sphinx allongé au fond des solitudes, qui semble s’endormir dans un rêve sans fin. [33]
D comme défunt, les défuntes heures d’un autrefois révolu et idéalisé... comme nos défuntes espérances d’avoir la joie d’observer sa plénitude d’adulte alliant l’esthétisme à un rayonnement comportemental... Ou bien
D comme dédommagement ; rien ni personne ne saurait nous dédommager de la perte de notre mignard sourien [34]...
D comme se délecter ou la délectation qu’il se faisait à l’avance devant l’idée d’un « safari » organisé par nos soins en sa faveur ou qu’il improvisait lui-même, en traquant assidûment les menues proies venues le défier sur le « terrain » privatif de son logis, insectes et araignées détectés de son « œil de lynx », le comblant au plus haut point sur le côté psychologique, d’une part, et de l’autre, satisfaisant son palais de fin gourmet aux antipodes d’un vorace de notre connaissance à l’appétence pantagruélique : alias signore La Goulue [35]...
D comme le délice toujours nouveau, chassant la fâcheuse manie, l’habitude, de le contempler... comme les délicieux tableaux qui s’offraient à notre vue et dont le décor de notre cadre de vie nous remémore que trop bien, combien notre environnement riche de l’empreinte indélébile de notre douceur incarnée de Darius, l’une des mascottes présidant à l’honneur du foyer, orgueil de la maison [36] selon un fin connaisseur des Fleurs maladives, est aujourd’hui désespérément vide , sans vie intérieure et sans âme, en dépit de la présence de nos deux compagnons, « rescapés » félins de cette fratrie recomposée, pour le meilleur, mais aussi pour le pire !!!
D comme défaillir, comme notre courage qui, par instants, défaille... climat de désolation s’emparant de nos cœurs dolents, troublés, pour ne pas dire assaillis de doutes, qui s’interrogent sur le bien-fondé de cette troublante défaite, de ce cuisant échec à le conserver auprès de nous, contraint, à son corps défendant, d’abandonner un foyer accueillant, aimant, où il se plaisait à se faire dorloter, pour gagner une rive inquiétante, d’où l’on ne revient jamais...
D comme se déguiser (dans le sens de travestir ses sentiments) ou revêtir un déguisement de parade afin de « tromper l’ennemi » ne comprenant pas l’étendue de notre chagrin, ou par souci de pudeur, tenter, sous ce masque, de dissimuler nos états d’âme pour ne pas encombrer notre entourage, chantant par couverture [37], prochain ne manquant pas de juger incongrus, déplacés et déraisonnables au demeurant, ces derniers, en plus d’être dérangeants ; n’entendons-nous pas d’ici s’élever les voix discordantes d’une majorité de Fâcheux molièresques, s’insurgeant contre un désarroi qualifié d’excessif :
«Mais tâchez de vous maîtriser, que diable ! Il ne s’agit quand même que d’une bête ! »... Commentaires déplacés, fort explicites au demeurant, nous laissant sous entendre qu’il n’est question là, que d’une créature vivante appartenant à une catégorie mineure, et pour laquelle, il est, ô combien ridicule, selon la raison imparable des hommes, de se lamenter…
Censeurs, saluant allégrement votre ouverture d’esprit, ne serions-nous pas tentées de vous repartir la saillie suivante : notre race de « bipèdes » douée, il est vrai, d’un langage articulé éminemment sophistiqué, se révèle tout aussi créative, sinon plus ingénieuse, lorsqu’il lui faut déployer des trésors de perfidie, de perversité, s’adonnant ainsi sans remords, à une bestialité féroce, pure et dure ; comment alors, ne pas préférer la saine animalité d’ un « quatre pattes » guidé, quant à lui, par un instinct de survie élémentaire, faussement cruel, puisque exclusivement animé d’une pulsion viscérale, consistant à assouvir les nécessités inhérentes à son espèce [38] !
D comme se délester d’un pesant fardeau : celui de la souffrance ; tourments envahissant de manière insidieuse notre conscience, rejaillissant sur notre affect, nous faisant, de plus, culpabiliser, pour avoir été dans l’incapacité, au moment crucial, critique, de son malaise, de le ranimer, de lui insuffler notre propre souffle et fluide positif, par ondes magnétiques interposées.
Où avons-nous pu démériter ? Quand notre vigilance nous a-t-elle fait défaut ? Aurions-nous pu éviter ce désastre ? Nous le pardonnerons-nous un jour, seulement ? Le temps viendra-t-il, par miracle, à notre rescousse, afin d’atténuer la prégnance de notre ressentiment actuel, faisant, au contraire, sourdre en nos cœurs moult souvenirs fleurissant le cheminement trop tôt interrompu de notre Darius ?
D comme demain, ou comment dépasser cette pénible expérience, en envisageant des lendemains plus souriants, tandis que nous sentant, pour lors, démunies, il nous faudra faire sans la « lumière » de son attendrissant minois, à présent dématérialisé, évanoui, ayant rejoint l’immensité du néant ou la miséricorde divine, au libre choix des convictions de chacun…
Maintenant, notre dormeur repose de son dernier sommeil, d’un sommeil éternel, preuve, s’il en est, que l’irréparable est consommé.
En attendant que notre mal soit estompé, sinon dissipé comme par enchantement, tâchons de ne pas nous complaire dans un apitoiement malsain et jurons-nous de nous ressaisir... Demain !
Car pour l’heure, ce n’est pas encore à l’ordre du jour :
Demain ! J’irai demain voir ce pauvre chez lui,
Demain je reprendrai ce livre ouvert à peine,
Demain je te dirai, mon âme, où je te mène,
Demain je serai juste et fort... pas aujourd’hui. [39]
D comme délier ; déliés de nos liens affectifs tombés en déliquescence, déliées de notre parole de protéger notre mistigri, nœuds dénoués par des puissances infernales, et que nous aurions tant aspiré à prolonger...
D comme demeurer. Notre regretté fripon dont l’organe fragile s’est brusquement arrêté de battre à l’âge de vingt mois, à notre grand dam, et cela sans faire référence à la moindre logique, demeurera dans nos esprits et dans nos cœurs de manière vivace, ne s’altérant que d’une once, malgré les saisons effeuillées. Que les grâces auréolant sa « plastique » ainsi que son caractère soient ainsi célébrées !
Nous nous inclinons devant ses dispositions spontanées à dispenser une affabilité d’envergure, devant le don qu’il détenait à distiller l’harmonie, devant son potentiel d’adaptation, d’une souplesse inégalée. Et c’est par son humeur d’une grande stabilité, par la « dolcor » de ses attitudes et de son aménité, que le trésor se distingua des comparses de sa tribu, à jamais « orpheline » de son « clair soleil »...
D comme destin ; comme l’absurdité de celui-ci, éphémère, insondable et impitoyable, coupant la sève à une jeune tige ne demandant qu’à prospérer et dont on s’ingénierait cependant, en vain, à comprendre le dessein.
Paradoxe, Réversibilité [40] de l’existence qui nous portent à appréhender la règle rigoureuse des contrastes, comme, si l’on épouse l’une des maximes de monsieur de La Rochefoucault :
Dans toutes les existences,
on note une date ou bifurque la destinée,
soit vers une catastrophe, soit vers le succès.
Que désincarnée, dégagée de son enveloppe charnelle, elle puisse se fondre au sein de notre cosmos, retournant aux origines, aux mystères de la création précédant son éclosion, dorénavant accueillie au Walhalla aux côtés de héros mythologiques scandinaves, sous la garde infaillible des Walkyries…A près avoir constellé le ciel de notre quotidien, notre jeune étoile aura-t-elle la chance de se transmuer en astre immortel, guidant les siens, de là où elle se trouve ?
D comme le dernier-né de notre couvée, le dernier tant attendu, si désiré avant qu’il fasse son entrée au centre d’une famille chattesque reconstituée, « frères » de cœur, d’adoption, apprenant d’abord à se tolérer, à s’accepter, afin de mieux partager le territoire de leur fief, puis enfin à s’aimer ; modèle où régnait une entente idyllique enchanteresse nous ravissant, et suscitant, de surcroît, l’admiration de la part d’intimes visitant ces « gentilshommes » aux longues vibrisses, en leurs appartements.
Duo de juniors, parrainé par messire Cherubino de la Haute Roche de la Falaise de Tuffeau de la Vallée Ligérienne, vénérable doyen aux treize printemps, qui imposait le respect avec un savoir-faire de fin diplomate exempt de tyrannie.
Nous berçant d’illusions, nous avons cru pendant longtemps que notre numéro de duettistes sans cesse au diapason serait « programmé » pour un « développement durable », un voyage au long cours ; c’était, hélas, faire fi des caprices du sort, d’un futur plus qu’improbable !
Maintenant, amputé d’un fleuron éminent, notre exquis benjamin, il nous faut faire le deuil de ce trio uni jadis, nous soumettant tant bien que mal à ce précepte immuable:
Tout s’anéantit, tout périt, tout passe
Il n’y a que le monde qui reste. Il n’y a que le temps qui dure. [41]
D comme le «duel amical », forgé d’une complicité fusionnelle confondante avec notre diablotin de Prince Noir dit aussi Diabolus [42], le protecteur attitré qu’il s’était assigné...,
D comme son art de dialoguiste consommé, dialogues ou joutes oratoires truffés d’effusions auxquels se livrait notre tandem «roucoulant » à l’envie, langage indescriptible qui n’appartenait qu’à lui seul !
D comme devise, comme celle d’un fabuliste d’exception de la période baroque, doté d’une prodigalité inouïe, l’un de nos Maîtres révérés du patrimoine littéraire, analysant maintes véracités, moralité qui nous convie à supporter bien des maux et à laquelle nous nous empressons de souscrire, en théorie… :
Plutôt souffrir que mourir,
C’est la devise des hommes.
D comme don ; en postlude de ces louanges plus que méritées, destinées à notre « beau sire », « la douceur incarnée », nous refermerons sa « déploration » en manifestant à notre regretté Darius, toute notre infinie gratitude pour le don enrichissant qu’il nous a fait de sa « personne » durant sa vie brève, particulièrement pour nous avoir permis de l’aimer pour lui-même et non pour ce que nous aurions voulu qu’il soit, en fonction de nos besoins et desiderata personnels à satisfaire, de nos failles et névroses à combler !
Puissions-nous lui être, par la pensée, du moins, éternellement fidèles, doublement fidèles, à ce qu’il nous a légué, lui étant à jamais gré de notre désir d’offrande, en vertu de la devise littéraire de Chamfort :
Donner est un plaisir plus durable que recevoir,
car celui des deux qui donne
est celui qui se souvient le plus longtemps.
Valériane d’Alizée.
Texte composé pour le vingt-six mars 2010
(Première version)
revu et modifié en Mars de l’année suivante et dédié à M.
DARIUS I er Du Nom
Du Domaine D’Asgard
à l'âge de sept mois sous la protection vigilante du "Prince Noir"
[1] : Les deux premiers vers précités ouvrent l’« Éloge de la Volupté » de Jean de La Fontaine, pièce faisant partie du
recueil poétique des « Amours de Psyché ».
[2] : Expression d’Omar Khayyâm issue du quatrain « L’Éloge des buveurs », recueil « Le Robaïyat ».
[3] : Formule signée du même auteur provenant du quatrain « Les oiseaux blessés » (éditions « Le Cherche Midi »
adaptation de Jean Rullier du Livre des Quatrains dit le «Robaïyat» d’Omar Khayyâm.).
[4] : Allusion au titre d’une œuvre poétique de Francis Vielé-Griffin.
[5] : Titre du Corpus éponyme de la poétesse Anna de Noailles.
[6] : En référence au « Poète rustique » d’Orthez, Francis Jammes.
[7] : Emprunt à une expression verlainienne tirée de « Clair de lune », recueil « Fêtes Galantes ».
[8] : Évocation à la quiétude de l’esprit que « rien ne saurait venir troubler », à l’absence de douleur morale
professée au cœur des mouvements philosophiques épicurien et stoïcien...
[9] : Devise d’Anton Tchekhov.
[10] : Citation due à Alfred de Vigny.
[11] : Formule de Colette révérant ô combien ses héros quadrupèdes souvent victimes de cet affreux bipède : l’homme.
[12] : Titre d’un recueil poétique de Guillaume Apollinaire.
[13] : Première strophe du poème de Louis Aragon « Il n’y a pas d’Amour Heureux. ».
[14] : Derniers vers du poème de Louis Aragon mentionné précédemment.
[15] : Vocable germanique désignant dans la langue littéraire métaphorique : le voyageur.
[16] : Évocation de « Donneurs de Sérénades » de P. Verlaine ou plutôt de « Mandoline », corpus « Fêtes Galantes ».
[17] : Fragment du long poème de F. de Malherbe intitulé « Consolation à Monsieur du Périer, gentilhomme d’Aix en
Provence, sur la mort de sa Fille. »
18 : Allusion au père du recueil poétique « le Rosaire » de Dom Helder dont est issue cette œuvre portant le titre
Suivant : « Uniques. »
[19] : Expression empruntée au peintre pré- Impressionniste, Eugène Boudin, le « Roi des Ciels ».
[20] : Citation due au poète Francis Jammes.
20 : Moralité signée Jean de La Fontaine provenant de la Fable XI du Livre II « Le Lion et le Rat ».
[22] : Allusion à la terrible déité faisant parti du trio infernal des Moires régissant la destinée des mortels.
[23] : Quatrain de Francis Jammes issu du « Quatrième Lire des Quatrains» intitulé « La Crainte du Passé ».
[24] : Formule de J. de La Fontaine extrait de la fable I du Livre VIII « La Mort et le Mourant », voir en finalité les
dix neuf premiers vers reproduits, «morale » illustrant fort bien notre élégie.
23 : En référence à un amoureux de la gent féline, Jean Cocteau.
[26] : Allusion aux vertus de la semence de pavot, « papavéracée » nous plongeant dans les bras du divin sommeil.
[27] : Détournement d’une prose signée Colette (« Autres Bêtes, Chats de Paris ») dont nous avons modifié
légèrement la première phrase ; l’original spécifie : « dans la vitrine » au lieu de « derrière la vitre. »
28] : Quatrain issu du recueil le Robaïyat du poète persan Omar Khayyâm (1048-1131) portant le titre suivant : « Ne frappe personne ».
29] : Allusion à une expression du poète précité désignant sa majesté conifère, l’Épicéa, honoré au sein d’un fameux poème portant le titre suivant : « Les Sapins », tiré du recueil « Alcools ».
[30] : Allusion au créateur du « Grand Livre d’Heures» d’Anne de Bretagne, sorte d’herbier composé de la flore tourangelle et donc d’espèces botaniques exotiques lointaines, récemment acclimatées…
[31] : Allusion à la trinité de divinités grecques qui, sous l’Antiquité, présidait à la destinée, dont la plus terrible des trois (Atropos) tranchait le fil de la vie.
[32] : Reprise ou détournement d’une partie d’un quatrain d’Omar Khayyâm (« Le Livre du Destin »).
[33 : Allusion à une citation de Charles Baudelaire, op. Cit.
[34] : Expression renaissance due à la plume de Joachim du Bellay.
[35] : Surnom de notre senior « Poil de Carotte » alias Cherubino, poulbot sans blason princier de notre fratrie féline, mais riche de bien des attributs... gargantuesques !
[36] : Emprunt légèrement modifié au poème de C. Baudelaire « Les Chats » (Sonnet LVI des « Fleurs du Mal ») qui commence ainsi :
« Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires. »
[37] : Détournement du premier vers d’un poème de Christine de Pisan illustrant fort bien notre propos; se reporter en fin de texte pour prendre connaissance de ce dernier dans son intégralité.
[38] : « Quatre pattes », formule due à la plume imaginative de Colette désignant « nos Amies les bêtes. »
39] : Quatrain de Sully-Prudhomme (« Le Temps Perdu ») provenant du volume de « Poésies » complètes.
[40] : Titre de poésie de Charles Baudelaire recueil « Les Fleurs du Mal » et qui commence par l’interpellation suivante :
« Ange plein de gaieté, connaissez-vous l’angoisse,
La honte, les remords, les sanglots, les ennuis,
Et les vagues terreurs de ces affreuses nuits
Qui compriment le cœur comme un papier qu’on froisse ?
Ange plein de gaieté, connaissez-vous l’angoisse » ?
[41 : Adage de Denis Diderot.
[42] : Surnom de Cyrus, dit le Prince Noir, Angora Turc à la robe d’ébène et qui en raison de ses « diableries » à n’en plus finir, est ainsi dénommé...