Ière Partie :
Dédicace
En mémoire à notre fier lionnin [1] de Darius, innocent parti prématurément rejoindre la Voûte étoilée à l’aube de ses candides vingt deux mois [2], et se fondre dans l’infini du cosmos, après s’être délesté de son enveloppe matérielle encombrante, nous dédions ce message intime « félinesque », ayant, en outre, plus qu’une pensée à l’égard de tous ceux que le destin a jadis rudoyé, et n’épargnera sans doute guère à l’avenir, (ne nous berçons pas en vain d’illusions), les éprouvant par la perte de leur compagnon, qu’il soit à Quatre pattes ou à Deux, pour paraphraser une fervente amie des bêtes , veillant jalousement sur elles [3] !
Et quand bien même, nous n’aurions pas le privilège de nous connaître, nous autres « bipèdes », et que pareillement, notre petit protégé vous serait tout aussi « étranger », nous nous permettons, malgré ce fait indubitable et au nom de nos Affinités électives goethéennes en faveur de la gent « chattesque », de vous livrer nos pensées les plus impudiques, fleurissant à l’heure de sa partance, osant présumer que votre sensibilité vous portera volontiers à l’indulgence, comprenant un tant soit peu, de grâce, non, pas que sur un plan de l’intellect mais de l’affect, notre vive émotion exception faite, naturellement, pour quelques âmes sèches, Pauvres d’esprit et Faibles de cœur [4], dépourvus de semblables dispositions !
Fasse, que cet hommage posthume, prenant la tournure d’une déploration, consacré à « l’incarnation de la douceur », digne héritière d’une longue dynastie venue du froid conquérir nos contrées, contribue à pérenniser, ne serait-ce que l’espace d’un instant, son souvenir !
Et puisque désormais, il ne saurait être question le moins du monde, d’aspect charnel, il nous plait à imaginer notre aimable figure évoluant ad vitam aeternam en plein cœur d’un univers radieux, libéré du sombre versant du manichéisme, parmi le cortège orphique de petits sacrifiés, ayant tour à tour enfin trouvé une place d’élection au sein d’un pays idyllique ou Paradis de rêve [5], loin, bien loin de la pléthore de mesquineries, bassesses et iniquités inhérentes à l’espèce humaine:
Au franciscain Saint Roch et son chien au grand cœur,
À Saint François d’Assise et son loup de Gubbio,
À Saint Antoine ermite et ses lions protecteurs ;
À tous les Saints amis et frères des animaux
Qui surent réparer, en de trop rares instants
De la terrible histoire depuis le premier homme,
L’abominable plaie qui, par leurs divins baumes,
S’est remise à rêver de ce bienheureux port
Où mal et maladie n’existaient pas encore.
Félinement vôtre.
DARIUS Ier
Du Domaine D’Asgard
habité d’un calme olympien au temps de l’efflorescence juvénile de ses jours
(ici posant pour la postérité à l’âge de sept mois) mais néanmoins dubitatif :
« Dites moi, mon cher,
vous prendriez vous par hasard
pour Robert Doisneau ?
Ce n’est pas un peu fatiguant de me tirer le portrait ?
Ah, franchement, ces humains, à quelles drôles d’occupations, ils s’adonnent !!!
Étranges étrangers aurait devisé Jacques Prévert…»
[1] : locution renaissance appartenant à l’un des chantres du groupe de la Pléiade, le poète Joachim du Bellay, veillant ardemment sur son favori de «Belaud», qu’il chérissait au point de lui avoir dédié une pièce d’essence lyrique.
2 : Nous avons eu la douleur de perdre notre gentil compagnon, il y a maintenant de cela un an, le 5 Mars 2010, tandis que nous le pensions en pleine épanouissement et promis à une longue destinée à nos côtés...
[4] : Emprunt à un quatrain du poète persan, Omar Khayyâm issu du recueil le « Robaïyat».
[5] : Allusion à la dédicace signée de la plume du regretté Docteur vétérinaire Francis Lizon, auquel nous devons cette merveilleuse définition.
Commentaires
Dans un premier temps, le deuil m'inspire la compassion pour la perte dans le silence ...
et puis je peux exprimer que :
Darius se sentirait honoré et fier de cette si généreuse et touchante dédicace,
aussi proportionnellement riche en littérature que profondément éplorée ...
Je me risque à penser qu'il souhaiterait peut être que le chagrin de sa perte en soit un peu adouci.
Nous le souhaitons aussi et admirons la verve et l'inspiration suscitées,
tout en mesurant qu'un seul être vous manque et tout est désolé.
Et que la tendresse est la plus belle chose !