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administrateur théâtres

« 1984 » George Orwell au théâtre du Parc (Bruxelles)

Mars16, 2019

On dirait qu’après avoir extrait l’élixir maléfique de ce roman d’anticipation écrit en 1948 , Thierry Lebroux a investi le plateau avec une œuvre encore plus parlante et plus explicite … Nos jeunes, installés aux premières loges, car c’est sur eux que repose tout notre avenir, apprécieront!

D’un visionnaire à l’autre...

Si on avait la moindre tentation de banaliser le propos que Georges Orwell développe minutieusement dans son roman « 1984 », l’adaptation qu’en a faite Thierry Debroux à l’aube de la nouvelle décennie l’an 2000, brûle d’un pouvoir de suggestion et d’urgence encore plus vif que l’œuvre mère. Savamment filtrée par le mystérieux alambic du directeur du théâtre du Parc, l’adaptation retient l’essentiel et nous parle en direct et sans ambages. Elle se fonde sur notre vécu et l’observation des multiples dérives du monde abrutissant qui nous entoure. Ce ne sont plus les dérives épouvantables de l’hitlérisme et du stalinisme conjugués qui sont ici évoquées, mais celles des temps présents, que nous ne cessons de déplorer chaque jour et qui semblent projeter un horizon 2050 totalitaire, encore plus désincarné et déspiritualisé et certainement totalement déshumanisé. Le prix à payer à l’essor des technologies et de l’intelligence artificielle dans un monde hyperconnecté et à la gourmandise des puissants? Un froid glacial nous glisse dans le dos.

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Comme à la sortie du roman d’Orwell, on est à nouveau devant un faisceau d’avertissements dont on craint à juste titre qu’il soient prophétiques. Les prendrons-nous en compte, cette fois?

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Le super duo Fabian Finkels-Guy Pion a fait merveille une fois de plus. Présence théâtrale confirmée, esprit, vivacité, diction impeccable, justesse de ton, sensibilité, charisme, tout y est.Guy Pion prend habilement les habits de la « mauvaise pensée » du héros Winston, (Fabian Finkels) et sert de personnage supplémentaire à Thierry Debroux pour mettre en scène le journal intime , fil conducteur de l’œuvre d’Orwell. Coup de maître, puisque le même Guy Pion, très astucieusement vêtu du même manteau et chapeau appartenant à un siècle révolu, joue aussi le rôle d’O Brien , l’opposant au régime, ou pas… La résultante des méprises est d’autant plus glaçante. Une méprise semblable à celle annoncée dans la conclusion de « Animal Farm» (1945) la fable prophétique d’Orwell où les personnages finissent par se mélanger indistinctement dans l’esprit du narrateur. ..Et si ce splendide équipage Finkels-Pion , un véritable bijou d’art scénique, représentait par leur ensemble tellement bien huilé, l’essence charnelle et spirituelle de notre nature humaine? Quelle paire! Unique en son genre, extraordinairement vibrante et bouleversante!

De même, le formidable duo Winston -Julia (Muriel Legrand) creuse les sentiers interdits de l’amour prêt à succomber. Ou ceux de la trahison… Mention spéciale décernée au terrifiant duo mère-fille, Magda et Lysbeth Parsons, joué à la perfection par Perrine Delers et en alternance, Ava Debroux, Laetitia Jous et Babette Verbeek , aussi impressionnante que Misery, personnage de Stephen King. C’est tout dire! Pierre Longnay tient le rôle de Syme, avec conviction. La mise en scène de Patrice Mincke, alterne dialogues, chansons et les superbes chorégraphies de Johann Clapson et Sidonie Fossé. Fort heureusement, les voix humaines qui s’élèvent à travers les chants et les ballets des danseurs trouent par moment l’univers étouffant des circuits électroniques et des écrans omniprésents et convoquent notre émotion en aiguisant notre nostalgie, comme si déjà on y était, au cœur de cette détestable uchronie, où sévissent des drones de tout poil. C’est à pleurer! Et pas de rire…

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Le décor irrespirable et oppressant de Ronald Beurms est fait de monstrueux containers imbriqués au début du spectacle, dans une sorte de rubik’s cube glauque fait de métal et de bois brut comme un immense coffre-fort.

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« Morituri te salutant » Le monde ne tourne plus rond, il se bloque dans des mouvements d’abscisse et d’ordonnée, , celui d’un ordre nouveau jouant sur la verticalité et l’horizontalité ne laissant plus aucune place à la pensée, à la vie, aux courbes, à la nature, à la féminité. Les concepts sont inversés, on marche donc sur la tête. L’Amour n’est plus, vaincu par la Haine que l’on se doit de vénérer en groupes. Elle est érigée en principe de vie dès le plus jeune âge, la dénonciation d’autrui étant devenu le modus vivendi. Vivre ou mourir, quelle importance? La seule raison d’exister est de servir Big Brother ou vous êtes vaporisé. Le monde n’a plus aucune notion de paix puisqu’il est en état de guerre perpétuelle. La liberté, même celle inscrite au plus profond de nos rêves est mise hors la loi. Le langage, à long terme est appelé à disparaître, pour empêcher toute ébauche de critique du régime politique en place. L’inoffensif terme «Monsieur» est même en passe de disparaître du dictionnaire. Tout comme l’amour, le vin, la musique, les parfums et Shakespeare. C’est l’avènement d’un langage épicène visant à l’extinction de la pensée. «Big Brother »vise à ce que les citoyens soient rendus à une existence de moutons coupables, dociles et décérébrés. Happy End.

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Applaudir ou ne pas applaudir? Là est la question. On applaudira à tout rompre, mus par la pertinence et la beauté du spectacle, sa créativité parfaitement aboutie et l’élan vital et spirituel qui nous habite encore.

Dominique-Hélène Lemaire

« 1984 »

Du jeudi 7 mars 2019 au samedi 6 avril 2019

Avec : Perrine DELERS
Julie DIEU
Béatrix FERAUGE
Fabian FINKELS
Muriel LEGRAND
Pierre LOGNAY
Guy PION
les enfants Ava DEBROUX, Laetitia JOUS ou Babette VERBEEK

Ainsi que les figurants:
Pauline BOUQUIEAUX, Johann FOURRIÈRE, Laurie GUENANTIN, Vanessa KIKANGALA, Barthélémy MANIAS-VALMONT, Romain MATHELART, Franck MOREAU et Lucie VERBRUGGHE.

Mise en scène : Patrice MINCKE

Assistanat : Melissa LEON MARTIN
Scénographie et costumes : Ronald BEURMS

Éclairages : Laurent KAYE

Vidéos : Allan BEURMS

Musique originale : Laurent BEUMIER
Maquillages : Urteza DA FONSECA

Chorégraphie : Johann CLAPSON et Sidonie FOSSÉ

Crédit photos: ZvonocK

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Basée sur le roman Mille neuf cent quatre-vingt-quatre de George Orwell (Copyright, 1949), avec l’accord de Bill Hamilton, ayant-droit du patrimoine littéraire de la défunte Sonia Brownell Orwell.

Une coproduction du Théâtre Royal du Parc, du Théâtre de l’Eveil et de La Coop asbl.

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Commentaires

  • administrateur théâtres

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  • administrateur théâtres

    Passion amoureuse, scènes de comédie musicale, projections, androïdes… Voilà une adaptation de 1984 de George Orwell pour le moins déconcertante. Un choix artistique fait par la troupe du théâtre du Parc, qui occulte certains messages de fond que portait l’œuvre originale, pour apporter une toute autre interprétation.

    Sous le regard de Big Brother, Winston Smith évolue dans un petit container qui lui sert de chambre. Travaillant au ministère de la Vérité, il vit au sein d’une dictature où Big Brother, le leader du Parti, se révèle comme un dieu quasi omniscient : tous les faits, gestes et pensées des habitants de cette dystopie sont surveillés par les multiples écrans qui gèrent leur quotidien. Comparé à la sensation de morne froideur que renvoyait le roman, l'adaptation de 1984 jouée au théâtre du Parc en est presque trop chaleureuse. Ponctuée de chansons, la revisite est complète : en tant que spectateur, nous assistons à une pièce de théâtre montée par le Parti lui-même, dans une visée purement didactique, ce qui  annonce directement la couleur. Il s’agit de nous montrer à nous, citoyens du Parti, que s’écarter de la pensée admise par cette société n’est pas sans conséquence... Le quatrième mur brisé, nous sommes témoins dès le début du basculement de Winston Smith hors de l’idéologie du Parti. En effet, la dictature cherche à éradiquer toute capacité de se révolter, et ce par divers mécanismes : endoctrinement du peuple contre tout ce qui lui est étranger, manipulation du passé par l’effacement de certaines archives, ou encore création d’un nouveau dictionnaire ayant banni un bon nombre de mots — comme « amour » ou « liberté » — afin d’empêcher leur conceptualisation par l’esprit. Rapidement, Winston se fait entraîner par une mauvaise pensée, purement imaginaire, personnalisée sur scène sous les traits d’un des hauts fonctionnaires du Parti, nommé O’Brien. Celle-ci tente de le pousser vers ce sentiment interdit depuis longtemps : l’amour.


    © Zvonock

    En effet, la troupe a fait le choix de lire l’œuvre d’Orwell à la lumière d’un amour passionné, et plus précisément, celui de Roméo et Juliette. Pourtant absent de l’œuvre originale, on retrouve ici un parallèle créé de toutes pièces entre l’amour soudain que ressent Winston pour Julia, une jeune femme travaillant au département théâtre, et celui des célèbres amants maudits. La mauvaise pensée de Winston lui conte cette histoire iconique en déclamant quelques vers enflammés, alors que les œuvres de Shakespeare ont été depuis longtemps effacées de la mémoire collective de cette société. Ces dernières,  jugées sans doute déviantes par leurs thèmes (la passion de Roméo et Juliette, la folie de King Lear, la jalousie maladive d’Othello), ne devaient pas plaire au Parti. La pièce insiste alors sur la dimension romantique en glissant ici et là quelques références supplémentaires à cet amour passionné, vu que Winston récupère les trois dernières pages de l’œuvre interdite. Embarqués dans une liaison secrète, Winston et Julia semblent vivre une passion dévorante — sans grande conviction pourtant aux yeux du spectateur, probablement à cause de l’absence de profondeur de leur relation. Celle-ci constitue toutefois le moteur qui les pousse à se dresser contre ce système oppressant.

    « Qui est fou, celui qui accepte le système ou celui qui se révolte ? »

    Winston et Julia décident donc de rejoindre la résistance, appelée « la Fraternité », par le biais d’O’Brien (le vrai et non la projection mentale de Winston) qui a sous-entendu détenir un manuscrit interdit par le Parti. Le piège se referme doucement sur eux tandis qu’ils prêtent allégeance avec ferveur à la résistance, promettant de commettre des actes terroristes afin de faire tomber cette dictature. Pourtant il n’en est rien : O’Brien fait partie du système et cherchait justement à les arrêter. Le spectateur en vient presque à douter de l'existence d’une quelconque résistance tandis que Winston et Julia sont emmenés, afin d’être « remis sur le droit chemin ». Alors que nos deux révoltés étaient portés par l’idée que « le but n’est pas de rester vivants, mais de rester humains », sous la torture, leur amour vole en éclats. Chacun dénonce l’autre et supplie avec désespoir de violenter l’être aimé plutôt que sa propre personne. Comme promis au début de la pièce, le Parti nous offre un happy ending : complètement dressés et lobotomisés, Winston et Julia retournent servir le Parti, avec conviction cette fois.


    © Zvonock

    Cette adaptation de 1984 est transposée à notre époque : la résistance est incarnée par un groupe terroriste qui revendique leurs attentats par vidéos, commentées en live par ce qui semble être des tweeteurs, tandis que Witson doit se plier à des exercices physiques quotidiens ordonnés par le droïde qui vit sur les écrans de sa chambre. Casques virtuels, tablettes, androïdes… Tout cela fait partie intégrante du système de Big Brother. Le rapport à la technologie, moins présent chez Orwell, semble être utilisé ici afin de se rapprocher du spectateur du XXIe siècle, pour qui un écran n’est plus si exceptionnel. Les acteurs évoluent alors dans un décor truffé de technologies, mais dont la pièce maîtresse reste néanmoins un énorme bloc modulable. Sous les yeux ébahis du spectateur, les blocs se font, se défont et dévoilent différents endroits : les locaux aseptisés du ministère de la Vérité, la froideur de la chambre de Winston, la dangerosité d’une rue mal famée… Nos personnages sont complètement à la merci des silhouettes qui déplacent sans cesse les structures. L’ombre des blocs s’étend sur la scène et une impression d’écrasement et d’impuissance se diffuse lentement, renvoyant à l’impuissance ressentie par cette machine dictatoriale qu’est Big Brother.

    Néanmoins, on peut regretter une prise de position trop légère par rapport au message porté par la dystopie initiale qui met en abyme la société actuelle, peu importe sa temporalité. Bien que publiée en 1949, l’œuvre d’Orwell adopte ce ton ironique et dérangeant propre à son genre afin de faire réfléchir le lecteur sur sa propre réalité. Seules certaines phrases − « La vérité n’existe que dans les yeux du Parti » − et quelques scènes choisies − lorsque Winston est torturé physiquement et psychologiquement − peuvent interpeller le spectateur quant à l’essence de sa société et à la part de liberté qu’il a dans celle-ci. Cette réflexion apportée par le genre est partiellement effacée par l’importance que prennent la relation amoureuse et les parties chantées, qui finalement donnent des airs agréables à la pièce. On perd cette véritable angoisse qui se diffusait à la lecture de 1984par l’encensement de la relation amoureuse de cette version théâtrale, ce qui permet au spectateur de respirer. La légèreté grandit encore pendant les passages chantés, dont le texte ne porte pas toujours un message profond (« Je ne suis pas la ligne, mais la ligne du Parti »). Seule la chanson du Carnaval de la Haine aura réussi à transmettre ce sentiment d’effroi par la contraste entre l’horreur des actes sur la scène (pendaisons des traîtres) et la joie du chant. Malheureusement, ce sentiment n’est pas rencontré lors de toutes les scènes. Ainsi, c’est avec un certain contentement que le spectateur sort de la salle, alors qu’il devrait plutôt sentir poindre cet effroi, si caractéristique de la dystopie. Ou bien…

    EN SAVOIR PLUS...

    Coup de foudre sous le regard de Big Brother

    1984

    Mise en scène de Patrice Mincke

    Avec Perrine Delers, Julie Dieu, Béatrix Ferauge, Fabian Finkels, Muriel Legrand, Pierre Lognay, Guy Pion
    Assistanat : Melissa Leon Martin
    Scénographie et costumes : Ronald Beurms
    Éclairages : Laurent Kaye
    Vidéos : Allan Beurms
    Musique originale : Laurent Beumier
    Maquillage : Urteza Da Fonseca
    Chorégraphie : Johann Clapson Et Sidonie Fossé

    D’après le roman 1984 de George Orwell.

    https://karoo.me/livres/coup-de-foudre-sous-le-regard-de-big-brothe...


  • administrateur théâtres

    1984 au Théâtre Royal du Parc: Et si en imaginant cette dystopie terrifiante, George Orwell s’était juste trompé de date ?


    Le Théâtre Royal du Parc nous propose actuellement 1984, une création de Thierry Debroux librement adaptée du roman phare  » 1984  »  de George Orwell. Une pièce aussi terrifiante que ne l’était déjà le roman, et qui nous plonge dans un monde où la technologie permet à certains de connaître nos moindres faits et gestes et nos moindres pensées. Un monde qui fait froid dans le dos créé de toutes pièces par l’auteur pour ce roman d’anticipation, qui finalement n’est pas tellement éloigné de notre civilisation de plus en plus basée sur des dérives totalitaires inquiétantes et qui nous ramène hélas souvent à l’oeuvre visionnaire d’Orwell


    © Zvonock

    Imaginez…Un monde où la technologie permet à certains de connaître nos moindres faits et gestes, nos moindres pensées.

    Imaginez…Une nation énorme dirigée par un fantoche au vocabulaire restreint qui assène avec aplomb les contre-vérités qui le servent.

    Imaginez…Ce même fantoche qui assoit son pouvoir sur les sentiments primaires du peuple : haine, rejet de l’autre, réflexe sécuritaire.

    Imaginez…Un travail sur le langage qui empêche l’expression de toute idée complexe.

    Imaginez…Des médias qui diffusent volontairement des fake news pour manipuler l’opinion publique à des fins politiques. Un peuple gavé de malbouffe qui a oublié les saveurs les plus simples. Une pensée  basée sur l’affirmation au détriment de la réflexion. Des individus isolés, coupés d’eux-mêmes. Et parmi eux, quelques-uns décidés à se battre contre le système. Prêts à mourir. Prêts à commettre des actes pouvant entraîner la mort de centaines d’innocents. ( source Théâtre Royal du Parc)


    © Zvonock

    Toute personne ayant eu la chance de lire le roman de George Orwell sait à quel point l’univers décrit par l’écrivain est absolument terrifiant. Dans le livre c’est le narrateur qui se confie à nous et nous fait part de ses réflexions intimes face à ce parti totalitaire dont il est un des pions manipulés en mal de liberté. Dans la pièce de Debroux le narrateur est remplacé par la mauvaise pensée du héros Winston Smith, incarnée sur scène par l’excellent Guy Pion. Et l’astuce fonctionne dès les premiers instants du spectacle où nous sommes happés par la mise en scène de Patrice Mincke et la scénographie exceptionnelle de Ronald Beurms aux décors grandioses et pivotants.

    On ne soulignera jamais assez l’effort mis en place par le Théâtre du Parc pour offrir au public des scénographes inventives, actuelles, et presque cinématographiques à mille lieues d’un théâtre poussiéreux qui a fait son temps.


    © Zvonock

    Avec 1984, on baigne dans un univers oppressant ou le Parti régit la vie de chaque être, le forçant à une gymnastique matinale obligatoire et ridicule, à un don de sperme mensuel et à un bannissement de tout plaisir comme le sexe, le vin, la lecture, l’art, le parfum, la musique… Un monde basé sur la délation où la haine règne en maîtresse et où la propagande vise à annihiler toute ambition de révolte et toute réflexion personnelle. Un monde ou deux et deux ne font plus quatre, mais cinq , car le Parti l’a décidé. Un monde où Big Brother vous observe 24h sur 24 et où le moindre écart de conduite même inconscient est puni de torture ou de meurtre.


    © Zvonock

    Pour incarner les personnages d’un tel chef d’oeuvre il fallait des acteurs solides capables de nous émouvoir autant que nous faire peur lorsqu’ils sont poussés dans leurs derniers retranchements par ce récit noir et glacial, limite oppressant . Face à Guy Pion on trouve Fabian Finkels, épatant qui n’en finit pas au fil de ses rôles de démontrer le talent immense qui l’habite. Il est touchant et parfait dans le personnage de Winston , torturé et perdu dans cet univers implacable qui aura raison de lui. Soulignons aussi la performance de Muriel Legrand dans le rôle de Julia dont Winston tombe éperdument amoureux et déclenchera sa révolte. Mention spéciale aussi ce soir-là pour la jeune Ava Debroux absolument terrifiante en enfant totalement déshumanisée capable de dénoncer ses propres parents au nom du Parti.

    En résumé, on est là face à une création quasi parfaite, même si la première partie de la pièce avant l’entracte semble moins percutante que la deuxième totalement formidable, et très proche du sentiment de malaise que génère le roman.


    © Zvonock

    La chute finale que je vous laisse le soin de découvrir en allant voir la pièce, est une trouvaille géniale qui nous fait penser que tout n’est peut-être pas totalement perdu.

    Brillant tout simplement !

    Et si en imaginant cette dystopie terrifiante, Orwell s’était juste trompé de date ?

    Jean-Pierre Vanderlinden.

    Heure de début de spectacle : en matinée 15h – en soirée 20h15.
    A partir de 14 ans

    Durée : 1h55 entracte compris

    Avec : Perrine DELERS
    Julie DIEU
    Béatrix FERAUGE
    Fabian FINKELS
    Muriel LEGRAND
    Pierre LOGNAY
    Guy PION
    les enfants Ava DEBROUX, Laetitia JOUS ou Babette VERBEEK

    Ainsi que les figurants:
    Pauline BOUQUIEAUX, Johann FOURRIÈRE, Laurie GUENANTIN, Vanessa KIKANGALA, Barthélémy MANIAS-VALMONT, Romain MATHELART, Franck MOREAU et Lucie VERBRUGGHE.

    Mise en scène : Patrice MINCKE

    Assistanat : Melissa LEON MARTIN
    Scénographie et costumes : Ronald BEURMS

    Éclairages : Laurent KAYE

    Vidéos : Allan BEURMS

    Musique originale : Laurent BEUMIER
    Maquillages : Urteza DA FONSECA

    Chorégraphie : Johann CLAPSON et Sidonie FOSSÉ

    Basée sur le roman Mille neuf cent quatre-vingt-quatre de George Orwell (Copyright, 1949), avec l’accord de Bill Hamilton, ayant-droit du patrimoine littéraire de la défunte Sonia Brownell Orwell.

    Une coproduction du Théâtre Royal du Parc, du Théâtre de l’Eveil et de La Coop asbl.

    Avec le soutien du Tax Shelter du Gouvernement fédéral belge.

  • administrateur théâtres

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  • administrateur théâtres

    1984

    © Photo Y.P. -

    © Photo Y.P. -

    Bienvenue dans le Bloc C-36 !

    Big Brother vous regarde ! Encore et toujours.... Plus que jamais !


    Thierry Debroux, par ailleurs directeur du Théâtre Royal du Parc, à Bruxelles, a eu l'excellente idée d'adapter pour le théâtre le chef d'oeuvre de George Orwell, écrit en 1949.
    Un roman qui connaît ces dernières années des records de vente, comme si le propos orwellien était de plus en plus d'actualité, comme si la société de surveillance que l'auteur britannique décrit était bel et bien en place.

     

    Dans le livre, c'est un narrateur qui raconte les mésaventures de Winston Smith, un modeste employé, nous décrivant puis tentant de combattre la société totalitaire et policière, inspirée du nazisme et du stalinisme.


    Thierry Debroux a donc dû trouver un procédé dramaturgique afin de passer du roman à la forme théâtrale.
    Il a adjoint au personnage de Smith (l'excellent et totalement convaincant Fabian Finkels) le personnage de la « mauvaise pensée », interprété par le formidable Guy Pion.
    Le duo fonctionne à la perfection, nous faisant comprendre les doutes, les angoisses, puis nous permettant de saisir les motivations et les mécanismes de la révolte qui vont animer le modeste employé.


    Le metteur en scène Patrice Mincke s'est appuyé en grande partir sur la magnifique et très astucieuse scénographie de Ronald Beurms.
    Nous verrons dans la première partie le bloc C-36, un gigantesque cube constitué d'espèces de containers, monté sur tournette, arrivant jusqu'aux cintres, révélant de multiples espaces, et créant une véritable oppression architecturale. D'un point de vue formel, c'est magnifique.


    Ce dispositif permet au metteur en scène de travailler sur une traditionnelle horizontalité, mais également sur une totale verticalité : trois étages sont matérialisés, permettant aux comédiens et aux figurants de jouer non plus sur le plateau, mais en hauteur, comme dans une sorte d'immeuble austère. (Des projections vidéo splendides donnent cette impression d'espaces confinés, mélangés à des images d'écrans d'ordinateurs, avec des personnages pré-filmés, comme Big Brother, la coach de fitness obligatoire, etc, etc...)


    Un deuxième duo qui fonctionne complètement, c'est celui formé par Fabien Finkels et Muriel Legrand, la Julia qui va provoquer la révolte du héros. Les scènes intimistes sont totalement crédibles. J'étais vraiment dans cette histoire d'amour et de refus du totalitarisme, avec un judicieux rapprochement shakespearien.


    Un autre personnage très intéressant est joué en alternance par trois très jeunes filles qui interprètent la fille de la voisine (la truculente Perrine Delers). Cette petite qui ne pense qu'à dénoncer ses parents, qui ne jure que par la pendaison, en chantant « Et l'on pendouilla Pierre et sa Jeannette avec », cette petite est très drôle, tout en faisant froid dans le dos !
    L'humour noir est en effet omniprésent.

    Ce spectacle est aussi un spectacle musical.
    Comme pour accentuer le côté en apparence dérisoire et superficiel de la société que Big Brother a réussi à mettre en place, nous seront montrés des tableaux chorégraphiés et chantés.
    Les comédiens interprètent de bien belle façon des chansons à la gloire de l'AngSoc, le parti au pouvoir, ou enjoignant le peuple à suivre les préceptes.
    Tout ceci est très réussi.


    Il faut noter également les magnifiques costumes de Ronald Beurms, (encore lui), qui permettent d'actualiser également le propos, avec notamment des liserés lumineux sur les uniformes en espèce de jersey gris, et qui comprennent une tablette numérique amovible intégrée.

    Mais nous aussi allons travailler.
    Guy Pion aura l'occasion par deux fois de s'adresser au public, nous rendant acteurs nous aussi de la pièce. Il nous demandera de nous livrer durant l'entracte à une activité que je vous laisse découvrir (c'est une trouvaille formidable et jubilatoire !)

     

    Et puis à la toute fin, il fera en sorte que nous aussi puissions nous révolter.
    Je n'en dis pas plus. C'est très malin et déclenche l'enthousiasme de tous les spectateurs !

    Oui, cette adaptation est remarquable. Vraiment remarquable !
    Il s'agit d'une création mondiale.
    Thierry Debroux et Patrice Mincke ont parfaitement réussi à transposer en deux heures tout ce qui fait le caractère terrifiant, visionnaire et on ne peut plus pessimiste du roman.

    La pièce est donnée à Bruxelles jusqu'au 6 avril prochain.
    Comme j'aimerais qu'elle soit reprise en France, dans un théâtre national, lors d'une prochaine saison !

    © Photo Y.P. -

    1984 De Thierry Debroux, d’après George Orwell M. e. S. Patrice Mincke

  • administrateur théâtres

    Traduire, c’est déjà trahir… et c’est davantage le cas encore pour une adaptation”, reconnaît bien volontiers Thierry Debroux, directeur du Théâtre royal du Parc, dont la dernière création, 1984, est librement adaptée du célèbre roman de George Orwell.

    Pour ancrer le récit, Thierry Debroux n’a pas repris le fil rouge du journal intime dans lequel le personnage principal, Winston Smith (interprété par Fabian Finkels) couche toutes ses pensées, ce qui se bouscule dans sa tête par rapport au monde et à ce qu’il est devenu, façonné, modelé par des dirigeants avides de pouvoir et d’un contrôle total et absolu de leurs citoyens. Le directeur du Parc a fait le pari de faire intervenir la “mauvaise pensée” de Winston, incarnée par Guy Pion. Et ça marche  ! Dès l’entame du spectacle, le public est pris à partie et emmené sur le chemin de l’histoire.

    Winston, employé au ministère de la Vérité, est chargé de réécrire l’Histoire, d’amender les archives selon la version défendue par le Parti, annihilant ainsi tout esprit critique, toute remise en cause, tout embryon de révolte. La propagande est seule maîtresse dans cette société devenue stérile, où les sentiments, l’amour, l’art, le vin, le parfum, la musique,… ont été bannis au profit d’une surveillance vidéo permanente (Winston est contraint à faire une séance de sport chaque matin, à donner son sperme tous les mois,…), insupportable, régie par la délation à outrance, la haine de tout ce qui ne serait pas conforme au Parti, la torture et le meurtre.

    Noir, mais en chansons et musiques

    Cette atmosphère oppressive est extrêmement bien rendue grâce à une scénographie aux décors grandioses – un immense cube divisé en plusieurs containers pivotant pour créer différents lieux (appartement de Winston, ministère de la Vérité,…) au fil du spectacle –  et aux costumes futuristes – des uniformes gris avec tablette et led intégrés – signés Ronald Beurms. Si en 1949 lorsqu’est paru son livre, George Orwell imaginait une société ultra-connectée, aujourd’hui, la technologie a rattrapé son esprit visionnaire. Le travail de création vidéos, de musique et de lumières sur 1984 (réalisés par Allan Beurms, Laurent Beumier et Laurent Kaye) emporte définitivement les spectateurs dans l’univers terrifiant de Big Brother  : “on vous observe, vous êtes coupable de tout”. Par moment, on se croirait même davantage au cinéma qu’au théâtre.

    Néanmoins, la noirceur du propos est adoucie par une mise en scène, orchestrée par Patrice Mincke, alliant dialogues, chansons et chorégraphies (de Johann Clapson et Sidonie Fossé) faisant de 1984 un spectacle aussi musical qu’alarmant sur ce à quoi pourrait un jour définitivement ressembler notre société

    Bruxelles, Théâtre du Parc, jusqu’au 6 avril. Infos et rés. au 02.505.30.30 ou sur www.theatreduparc.be

    Stéphanie Bocart
  • administrateur théâtres

    1984: de la fiction à la réflexion !

    1984-ZVONOCK
    1984 est un roman cultissime écrit par George Orwell en 1949.  Dans ce chef-d’œuvre d’anticipation, George Orwell imagine un monde qui fait froid dans le dos. Alors quand Thierry Debroux l’adapte au théâtre, on fonce voir le résultat ! 1984 : voici la parfaite piqûre de culture pour retourner au théâtre. 

    Le pitch :L’histoire se passe dans un monde où la technologie permet de connaître nos moindres faits et gestes, nos moindres pensées et même nos rêves. Un monde où le vocabulaire a été restreint pour éviter l’expression de toute idée complexe. Un monde où les médias diffusent volontairement des fake news pour manipuler l’opinion publique à des fins politiques. Un monde où les individus sont isolés, coupés d’eux-mêmes et de leurs rêves les plus profonds. Jusqu’au jour où Winston, employé au ministère de la Vérité, tombe amoureux et décide, se battre contre le système.

    Notre avis : 

    Thierry Debroux est le directeur du Théâtre Royal du Parc depuis 2010 et on peut dire qu’il a réussi à apporter un vent de fraicheur et de modernisme dans la programmation de ce théâtre, datant de 1782. Après la version très rock de Macbeth, voici l’adaptation de 1984 par Thierry Debroux, lui-même et mis en scène par Patrice Mincke. Ce dernier a dû trouver un procédé dramaturgique afin de passer du roman à la forme théâtrale en incarnant la “mauvaise pensée” de Winston (Fabian Finkels) en un personnage, interprété par le formidable Guy Pion. Le duo des comédiens fonctionne à la perfection et nous entraîne dans la dualité des sentiments, des doutes, des peurs et des pensées qui assaillent le héros. 

    Au fur et à mesure que l’histoire avance, nous sombrons avec les protagonistes dans une atmosphère de plus en plus oppressante rendue grâce à une scénographie hallucinante et des décors grandioses. Une imposante structure imaginée par Ronald Beurms, scénographe et costumier. Au total, trois blocs de containers en métal et en bois de plus de sept mètres de haut forment, dans la première partie, un immense cube, avant de se désolidariser pour constituer, en seconde partie, trois entités séparées  et donc trois décors pour des scènes spécifiques. Un travail de géant pour un résultat spectaculaire ! À cela s’ajoute des projections vidéos qui viennent accentuer le côté futuriste de Big Brother : “Big Brother is watching you!” 

    Si 1984 est aussi percutant, c’est parce que ce futur orwellien est de plus en plus d’actualité, comme si la société de surveillance que l’auteur britannique avait décrite en 1949 était bel et bien en place… La seule erreur de George Orwell est de l’avoir situé en 1984 ! 

    1984-Parc


    Plus d’info ?

    www.theatreduparc.be

    source: https://brusselsisyours.com/1984-theatre-parc/?fbclid=IwAR3P0Hx6hdI...

  • administrateur théâtres

    JOURNAL de Roger SIMONS (numéro 48)


    Je suis allé au théâtre Royal du PARC ! Quelle chance de pouvoir encore m'y rendre et d'être accueilli chaleureusement par son directeur Thierry DEBROUX !

    Dans le taxi à l'aller, Mijanou (mon accompagnatrice du jour et co-rédactrice de cet article) me dit : 
    "Amusant : Orwell publie ce roman en 1949, soit 35 ans avant ET la pièce de Thierry Debroux se joue 35 ans après 1984 ! 
    Et donc, ... nous avons plongé avec tous les spectateurs (Back to the future !) en 1984. L'an 1984 tel que "prévu" par George Orwell, ET tel que "ré-aménagé" ou "ré-imaginé" par la très subtile créativité de Thierry DEBROUX ! 
    Une fantastique adaptation, on pourrait même dire une véritable "re-création" de ce roman, écrite par Thierry DEBROUX, pour la scène, et ce avec l'accord de Bill Hamilton, ayant droit du patrimoine littéraire de la défunte Sonia Brownell Orwell.

    Thierry Debroux : "Il n'est pas surprenant que ce roman de George Orwell se vende à nouveau à des millions d'exemplaire.
    A l'heure des "fake news" et de l'intrusion du net dans notre vie privée, l'univers de 1984 ressemble de plus en plus à la société que nous sommes en train de construire."

    Après avoir magnifiquement mis en scène Guy Pion dans "L'Avare" puis dans "Le Noël de M. Scrooge", Patrice Mincke (le metteur en scène) se penche cette fois sur cette œuvre prophétique.
    Voilà une réalisation toute particulière qui va impressionner le spectateur.
    Le jeudi 7, soir de la première, les spectateurs étaient... tout à tour médusés, admiratifs des éléments de mise en scène, impressionnés par le jeu des comédiens... et en même temps, nous avions par moment froids dans le dos ! ... 1984 ... comment sera 2084 ? ... on n'ose pas y penser ! ... mais déjà comment sera 2024 ? Tout change tellement vite ! 
    Heureusement quelques touches d'humour sont bien présentes aussi ! 
    La musique, le chant et de la danse "quelque peu robotisée" étant aussi incluses , cela donne du souffle et du rythme à cet univers ... comment le qualifier ? ... global et formaté, déshumanisé ! Mais l'amour, le ressenti de cette motion interdite va y trouver un chemin ...

    Musique originale : Laurent Beumier.
    Quelques mots du metteur en scène, Patrice Mincke : "Imaginez ... Un monde où la technologie permet à certains de connaître nos moindres faits et gestes, nos moindres pensées. ... Des médias qui diffusent volontairement des fake news pour manipuler l'opinion publique à des fins politiques. ... Et parmi eux, quelques-uns ... prêts à mourir, à commettre des actes pouvant entraîner la mort de centaines d'innocents ..." 
    Thierry Debroux: J'espère que vous prendrez du plaisir à découvrir le travail de toute une équipe qui s'est efforcée de rendre au mieux l'incroyable atmosphère du roman de George Orwell.
    Certes, voici des tonnes de choses à découvrir ! Intéressant ! Palpitant ! Etonnant ! 
    Avec un Guy PION, sorte de diable malicieux et rusé des pensées ... excellent comme à son habitude et de nombreux comédiens intéressants à découvrir. 
    Un décor exceptionnel et astucieux!
    Futurs spectateurs : procurez-vous le programme du spectacle ! Comme toujours au Parc c'est une source d'information qui dépasse le spectacle en lui-même !

    Un tout grand BRAVO à l'équipe du spectacle !

    THEATRE ROYAL DU PARC
    TEL réservation = 02 505 30 40

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