Une grande première en Occident…
Trois jours au rythme de la vie des temples taoïstes chinois…
C’est en effet la première fois qu’une délégation aussi importante, par la taille et le prestige des personnalités qui la composent, quitte la Chine pour se rendre en Occident. 88 moines et dignitaires du taoïsme ont quitté la terre de l’empire du Milieu pour se rendre chez nous, au cœur de l’Europe et animer le festival du Taoïsme à Bruxelles. En effet un séminaire présentant plusieurs pratiques taoïstes (art martial, calligraphie, initiation aux instruments de musique traditionnels, offices, cérémonies et rituels …) s’est déroulé au palais des Beaux-Arts de Bruxelles.
Un spectacle de musique traditionnelle taoïste et d’art martial taoïste clôturait cet événement présenté pour la première fois en Europe.
Même en Chine, peu de temples assurent ces offices de cette façon, c’est-à-dire dans le cadre d’une cérémonie avec une dizaine de moines qui officient. Seuls les grands temples, pourvus d’une grande communauté ayant reçu les enseignements propres aux lectures, musiques et chants des textes sacrés peuvent les présenter. A Bruxelles, dans le cadre du festival, ces cérémonies seront assurées par des moines de Changchun Guan, le temple taoïste de Chine qui réalise le plus d’offices et de rituels.
Ces rituels ont souvent pour objectif de transmettre une requête aux immortels ayant trait à la protection de la famille, la réussite dans les affaires ou dans les études, l’apaisement des âmes des ancêtres, la fécondité, le mariage, … Le taoïsme est un art de vie basé sur une sagesse chinoise ancestrale. Il nous permet d’être en chemin et d’aller à la rencontre de notre vraie nature, d’être nous-mêmes.
Art de vie aux multiples facettes, le taoïsme peut être appréhendé par différents côtés de la montagne. Selon la voie empruntée, le chemin sur lequel nous marchons et les paysages qui s’offrent à nos sens sont différents. « Se connaître soi-même est la vraie sagesse », chapitre 33 du Dao De Jing.
Les trois maîtres de cérémonie de Chang Chun Guan étaient présents, ce qui est en soi un fait exceptionnel car ils ne se déplacent généralement pas tous ensemble.
Le spectacle s’ouvre sur une procession d’une vingtaine de moines coiffés d’une toque particulière. Ils portent un long manteau rouge bordé de noir et une étole précieuse. Est-on insidieusement frappé de berlue ? Le jeu de lumières sur les grands orgues ? On jurerait que nous sommes arrivés dans un grand temple taoïste. Au centre il y a ce grand tambour rouge, à gauche, le gong de bois et à droite, le bol sonore, deux éléments qui en plus des cymbales, de la cloche et des chants portent les prières vers le grand immortel.
Le salut des arts martiaux et les voilà remplacés par une procession de femmes vêtues de costumes bleutés entourant les trois sages en manteaux brodés d’ors jaune, rouge et vert. Des bruits de nature, le ruissellement de l’eau et les chants d’oiseaux mêlés de luth et de flûte enlacent la danse de quatre danseuses qui opèrent avec lenteur et harmonie. La danseuse principale se dégage et fait claquer un éventail rouge sorti de sa manche à chacune de ses postures énergiques. . Au son d’un tambour, ce sont maintenant deux hommes qui s’affrontent ; le dernier développe un solo héroïque et flamboyant. Un orchestre en manteaux bleu suie est arrivé avec ses instruments à cordes, ce qui ressemble à un orgue et des flûtes. On contemplera aussi une procession de femmes vêtues de manteaux saumon bordé de noir. Elles portent deux étendards. Le symbole du Ying et du Yang est partout. L’officiant semble disperser des gouttes d’eau d’une feuille trempée dans un vase. Quel voyage au cœur de la culture chinoise !
Voici maintenant la menue nonne chinoise qui va faire quelque chose d’extraordinaire : du jamais vécu dans la salle Henri Le Bœuf. D’une voix en anglais de là-bas, frêle et forte à la fois, elle va promettre la sérénité, la paix d’esprit et le bien-être à tous les spectateurs. Ils obéissent à sa voix et se concentrent tous sur l’exécution d’une respiration coutumière au yoga, assis les yeux fermés … 1500 disciples en un coup de filet magique ? Du jamais vu : les 1500 spectateurs se lèveront, à la commande de la jeune prêtresse pour faire une posture de torsion à gauche et à droite, les brais noués vers le ciel… Un sourire est monté aux lèvres de tous.
Après l’entracte, l’ambassadeur de Chine présente le grand maître … qui dans un dialecte haut en tonalités répand sur l’assemblée ses bénédictions de paix avec les autres et avec soi-même. Sans oublier la prospérité et la longévité… La deuxième partie du spectacle se fait beaucoup plus dynamique avec des danseurs qui manipulent des flambeaux de crins de yak, des épées ondulantes. La récitante dont le costume pantalon et chemise longue blanche et orné d’une chasuble en voile couleur parme se diluera dans un solo de danse fluide et méditative. Le tout s’achève par un triple concert de moines musiciens en bleu et or présente une musique trépidante, au bord de la transe avec les trompettes tibétaines qui s’insinuent dans l’immense variété de gongs, de tambours et d’instruments à vent et à cordes aux timbres rares. Voilà bien une expérience esthétique inoubliable, une rythmique mystérieuse et des vibrations qui sont faites pour nettoyer l’esprit de tout ce qui encombre.