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administrateur théâtres

Théâtre de la cruauté : tous les écrits de Strindberg témoignent de sa vie et portent la trace de ses crises, de ses combats, de ses révoltes contre une société au conformisme rigide qu’il exècre et qu’il dénonce. Né en 1849, dans un milieu petit bourgeois, il perd sa mère atteinte de tuberculose à treize ans et souffre du remariage d’un père autoritaire avec la gouvernante des enfants, Emma Charlotta Peterson dont il a un fils, Emil.  Il devient auteur de théâtre après avoir  échoué dans la carrière de comédien. Sa jalousie féroce envers sa première épouse, la baronne Siri Von Essen sera à l’origine de ses premiers délires paranoïaques.  Marié et divorcé trois fois, il doit travailler beaucoup pour assurer la subsistance des enfants qu’il a de chacun de ses mariages. Névrosé, champion de misogynie, ses relations avec les femmes sont terriblement conflictuelles. Toute sa vie il luttera contre ses fantômes pour extraire de son être, une œuvre noire qui nous dit sa détresse intérieure.

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Mademoiselle Julie (Fröken Julie) (1888) : comme il est dit dès le début du texte :
« Mademoiselle Julie est folle, complètement folle ».Nous voilà avertis !

Midsummernight’s Nightmare :  De Zola à Munch, tout se passe dans la cuisine du château. On y découvre une trinité infernale qui incube pendant la nuit des feux de la Saint Jean. Christine (une formidable Caroline Cons), la cuisinière - figure iconique de la représentation de la femme traditionnelle - assiste, pleine de réprobation divine et silencieuse, à la fulgurante passion entre Julie, sa maîtresse et Jean, son fiancé. Une confrontation violente du masculin et du féminin, de la noblesse et des manants. Ambiguïté : ne fait-elle-même un rêve? On la voit dormir et marcher comme une somnambule…

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 La présence des bottes noires du terrible comte dans la cuisine 19e suggère son absence et sa personnalité  pesante. L’absence d’une mère se fait encore plus flagrante au cours de l’action traversée par la puissance onirique.  Punk déboussolée, la fantasque et fascinante Julie débarque et  se jette à la tête  du valet, qui se voit  incapable de résister au feu de l’amour-haine de la jeune tentatrice et obéit à ses caprices. La belle excuse, il a essayé maintes fois de la dissuader! Mais il finit par avouer  qu’il convoite depuis de nombreuses années la  jeune comtesse. Est-ce de l’amour ou  un moyen de monter dans l'échelle sociale ? Le jeu de L’excellent Roland Vouilloz est particulièrement ambigu et crédible. L’acte sexuel dans une soupente éclate en mille explosions sonores dévastatrices.  Symbolisme : on assiste au meurtre prémonitoire de l’oiseau de la jeune  aristocrate tandis que  Jean ne cesse de se laver les mains… Rêve de pureté - le plus beau passage - lorsque Jean lave le visage de Julie avec immense douceur,  seul répit de la pièce. Est-il vraiment dévoré d’ambition? Peut-il vraiment emmener Julie, au lac de Côme et recommencer une nouvelle vie grâce à la cassette de la fille du Comte qu’il installera derrière le comptoir?  

Mais les sortilèges de cette nuit fatale  où tout est permis se dissipent et Jean reste enfermé dans son rôle de valet, il retourne à Christine figée dans l’attente, tandis que  Julie, effarée par son acte déshonorant, seule, trahie et désespérée  se  supprime avec le rasoir que l’amant lui a  laissé dans les mains. D’héroïne de vaudeville, enfermée dans un huis-clos tragique, Julie devient une absurde victime sacrificielle qui se lave dans son propre sang. Trois étapes douloureuses, de plus en plus noires, et en correspondance avec des œuvres musicales très pertinentes choisies par le metteur en scène. Est-ce notre monde entre grandeur et décadence  que Strindberg exécute ainsi? Entre violence verbale et violence physique, cette pièce  donne réellement froid dans le dos.

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Que reste-t-il au spectateur après ce regard dévastateur sur la nature humaine signé Gian Manuel Rau?

Goûter  sa parfaite mise en scène expressionniste d’un théâtre fait d’explosions, de convulsions, de  pulsions en liberté où l’on peut  admirer le jeu inspiré  de la très talentueuse actrice néerlandaise Berdine Nusselder, glaciale, ardente, audacieuse, révoltée et dérangeante. Gardant un accent nordique intense, elle soutient néanmoins vaillamment  toute les autres interprétations du personnage de Julie, au théâtre comme au cinéma.

Profiter des larges  pauses, comme dans le théâtre de Pinter, pour se distancier du cauchemar, observer les costumes (Gwendolyn Jenkins) et le maquillage fantastique de Julie (Emmanuelle Olivet Pellegrin).

Peser le vertige de la chute de l’héroïne comme celui du désir d’ascension de Jean, et l’enlisement final de la « normalité » qui enterre tous les rêves.  

http://theatre-martyrs.be/saison/mademoiselle-julie/C1106AB6-F64C-5277-AC2B-9E6A50B07C0D/

MADEMOISELLE JULIE
August STRINDBERG / Gian Manuel RAU

Photos : Mario del Curto

JEU Caroline Cons, Berdine NusselderRoland Vouilloz
MISE EN SCÈNE Gian Manuel Rau
ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE Anne Schwaller, Elodie Vraiment 
SCÉNOGRAPHIE Anne Hölck
COSTUMES Gwendolyn Jenkins 
MAQUILLAGE Emmanuelle Olivet Pellegrin
HABILLAGE, COIFFURE, MAQUILLAGE Cécile Vercaemer-Ingles, Pauline Miguet
ACCESSOIRES Georgie Gaudier
SON Bernard Amaudruz, Graham Broomfield, Gian Manuel Rau, Manu Rutka 
LUMIÈRES Gian Manuel Rau, Eusébio Paduret
RÉGIE GÉNÉRALE ET SON Manu Rutka
RÉGIE LUMIERE Eusébio Paduret
RÉGIE PLATEAU Cam Ha Ly-Chardonnens
ADMINISTRATION DE TOURNÉE Nina Vogt
RÉGIE Nicola Pavoni & Justine Hautenauve

PRODUCTION Théâtre de Carouge - Atelier de Genève

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administrateur théâtres

« Comment je fais, avec ta mort, sans toi ? » Adèle pleure sa grand-mère Maria. Une femme immense, « au large de l’amour, posée sur l’autel de la mer… » comme le dirait Brel !12273200888?profile=original

Comment ne pas tomber immédiatement amoureux de la comédienne, de la jeune enfant bâtarde, de la jeune femme en quête de réponses, de sa grand-mère disparue, de son ténébreux amoureux voyageur, de ce village naufragé aux confins des terres, de ces embruns de vastes mers, de ce cœur féminin et vaillant qui bat à travers tout cela et ne rêve que d’indépendance ?

Nous voulons parler d’une histoire d’amour, de ce qui s’imprime dans le corps. Parler des choix de vie, des tournants, des rêves, des passions, de l’imprévu. Nous sommes faites de nos héritages et de ce que nous voulons devenir.

Le personnage d’Adèle apparaît à la croisée de ces chemins, entre deuil, projets et naissance.

Le texte de Veronika Mabardi a du souffle et la langue est primesautière. En marche sur le fil de la vie, sur l’écume des jours, il fait œuvre de transmission et de filiation. Le rythme d’interprétation d’Agathe Detrieux est une sorte de perfusion rafraîchissante continue, d’une fluidité parfaite, aux sonorités marines. Et au cœur des failles, entre les rocs du souvenir on voit briller les feux de cette histoire emblématique, l’histoire de cette pirate rebelle des années 1720, Anne Bonny. Une énergie fondatrice, qui autant que le personnage de la grand-mère, devenu, lui aussi légendaire, a fabriqué l’étoffe dont la jeune Adèle est faite. Cette toile de marin, à toute épreuve ! Rien à voir avec l’écharpe de Pénélope !

On pourrait écrire: « Ce à quoi elle croit, est lié à un attachement, et à une personne : Maria. Son point d’ancrage. Dans cette croyance, elle va pouvoir soutenir quelque chose qui, à son tour, la soutiendra et qui continuera à vibrer, bien après la disparition des êtres… » si on jouait avec les mots de Christian Bobin à propos d’Adèle. Sur la route noire du spleen, se profilent ses souvenirs, qu’elle rallume, patiemment, comme une fée ou une sorcière. Les grand-mères ne sont-elles pas toujours un peu les deux ? La jeune femme trimbale dans une carriole improvisée, tout ce qui a fait son enfance dans le village de bord de mer en Armorique : du moulin à café, au châle, à la mouette rieuse, aux paniers, au tabouret de cheminée ou de prairie, aux boîtes à malice, aux livres rescapés rouge et or, aux lampes de nuit, en fleurs ou en guirlandes, le tout arrimé en un énorme baluchon.

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Est-ce un cerveau gigantesque et mystérieux qui est juché sur le tricycle bleu ciel…ou un paquet de tripes soigneusement ficelé sur un trois roues, mère, fille et petite-fille… ? Et cela roule, sur les pointillés de la vie avec des arrêts sur image époustouflants de vérité, poudrés du plus pur bonheur. N’oubliez pas d’enrouler le cordage : ce lien qui lie la petite fille à sa grand-mère est indéfectible ! A l’encodage ! « Voici venu le temps de vivre. Voici venu le temps d’aimer » Encore Brel !

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Le message de la grand-mère tutélaire, elle l’assimile par petites goulées comme des gorgées de rhum, en fier matelot qu’elle est. Et quand cela descend dans le ventre… comme cela fait du bien ! C’est dans ce ventre que s’arriment et l’amour et la vie. Elle a tout compris. Elle est prête. « Laisse faire ton corps, Adèle ! » « Descends dans ton ventre, pirate ! » entend-elle les vagues lui dire ! Elle réplique, complice... Sois libre, mon enfant, comme le vent…

Ce spectacle ? Tu rigoles ou quoi ? Il vous envole et il vous envoie des paquets de mer, il vous sale du sel universel qui se mêle intimement à la vie et à ses embruns. Une bouteille à la mer qui arrive à bon port !

Un texte de Veronika Mabardi
Mis en scène par Patricia Houyoux
Avec Agathe Détrieux
Scénographie : Chloé De Wolf (Collectif Marvayus) 
Création lumière : Renaud Ceulemans
Assistanat à la mise en scène : Laure Tourneur...Le texte de la pièce est édité aux Éditions Émile Lansman.

Crédit Photos: Maxime Pistorio

Une coproduction du Festival Royal de Théâtre de Spa et du Théâtre des Riches-Claires - Remerciements à l’Infini Théâtre et au Centre Culturel d’Auderghem.

Du 10 au 26 novembre
Le mercredi à 19h
Du jeudi au samedi à 20h30
Lundi-Théâtre : le 14/11 à 20h30
Petite Salle

Infos et réservations : 02 548 25 80 - www.lesrichesclaires.be.

https://lesrichesclaires.be/une-rencontre-de-femmes-une-rencontre-de-pirates/

https://journaladele.wordpress.com/

http://www.comedien.be/agathedetrieux

 

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