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années (2)

administrateur théâtres

Le dernier amour d’Arsène est une improbable jeune normande, fine comme une aiguille, vêtue d’une tenue bien sage de jeune fille rangée, telle une ménagère soumise des années 50! Par ailleurs, elle est la fille du baron d’Etigues qui vit loin des fastes de la Vile-Lumière, au fin fond de la province  normande pluvieuse et monotone, qui en prend vraiment pour son grade, de Honfleur à Etretat.

Néanmoins, preuve qu’Arsène Lupin, gentleman-cambrioleur est toujours vivant, et même franchement immortel, toutes les adaptations, chansons et séries phénomène produites depuis l’an 2000 ne cessent d’engager les spectateurs à relire l’œuvre originale.

Ce Robin des Bois du pavé parisien est en effet né de la plume fertile de Maurice Leblanc, entre 1907 et 1923 avec un total impressionnant de 17 romans et 39 nouvelles, publiées dans la revue « Je sais tout ». Les nouveaux auteurs belges de l’adaptation contemporaine, Othmane Moumen et Thibaut Nève, situent l’action au tournant des années 1920. Et Arsène va désormais s’appeler Raoul!

L’idée est que Lupin s’est subitement arrêté, tel une montre ancienne, sans raison. Il a quarante ans et l’aventure est finie pour lui, au grand damn de ses anciens complices et de ses multiples poursuivants, tous soudain privés de leur véritable raison de vivre.

Erreur ! Ce nouveau tournant d’Arsène, sous les traits d’un assureur normand marié avec ses contrats, conformiste au plus haut point, démarre cependant  une nouvelle aventure. Car les auteurs sont très décidés  à piéger  ce jeune pépère en charentaises,  à la faveur de mille tentations surprenantes et étincelantes pour le forcer à retourner à sa vie passionnante d’avant. Celle où le héros défiait avec panache toutes poursuites policières, changeait sans cesse de domicile, de costume, de tête et d’écriture, maître de tous les passages secrets et métamorphoses, prenant chaque fois poliment rendez-vous avec ses victimes,  avant de les cambrioler et de signer ensuite son passage par des traits d’humour irrésistible.En effet,  le héros possède cette réputation mystérieuse et élégante du gentleman aventurier et voleur que l’on retrouve plus tard dans les histoires de The Saint dans les années 50-60, personnage incarné par Simon Templar. « Brillant comme un diamant, le roi des tombeurs, rapide comme le vent…» nous chante Dutronc. Mais c’est maintenant au tour de l’anti héros d’opérer. 

Méconnaissable, cet Arsène dont l’écriture est complexe, assez dispersée, même disparate, pleine de chausse-trappes qui finissent par perdre le plus bienveillant des spectateurs. Tenez vous bien, la future belle-mère de Raoul est une ardente suffragette qui ne rêve que de briser la relation romantique entre Raoul et sa fille et veut la faire  monter au créneau lorsque les premières suffragettes descendront dans la rue à Paris. C’est l’occasion rêvée pour les auteurs de mettre en scène une saga des débuts du féminisme qui éclôt justement lors des années 20 du 20e siècle. Le vrai propos de la pièce? Ou bien, peut-on y voir une lecture au second degré qui stigmatiserait l’ensemble de nos litanies néoféministes qui peuplent notre nouveau siècle? 

Si ce n’est pas le cas… c’est finalement un peu lourd de s’appesantir autant sur le nouveau politically correct propre à notre époque et de geindre en chœurs sur la persistance de la suprématie masculine  et des œuvres toxiques de séducteurs sans scrupules.  Il semble en outre que nous sommes en pleine lessive - et à juste titre - des méfaits de la ségrégation raciale, de l’impérialisme occidental et des problèmes de genre. Or, pour être crédible, point trop n’en faut, n’est-ce pas? 

Après, prétendre  que c’est un spectacle familial est un peu exagéré… De six à 16 ans, nos petits auraient été  rapidement largués, même sous le couvert d’animations musclées, de changements de décor étourdissants, de chorégraphies très réussies, de combats corps à corps mais aussi de scènes de violence quand même outrancières. Tandis que,  d’un bout à l’autre, les voix de tous les personnages, sauf la voix off, s’égosillent sans penser à nos oreilles sensibles. Soulignons d’ailleurs une élocution ultra-moderne, rapide et peu articulée,  même difficile à suivre pour des spectateurs non francophones.  Mais serions-nous par chance une nouvelle fois, enrobés par l’ambiguïté du fameux second degré? En revanche, la représentation est  bouillante d’action, de punch, au propre comme au figuré, et le jeu de tous les comédiens est absolument impeccable.

Ce que nous avons préféré: le long medley de chansons romantiques à la fin de la première partie. … Même si, à moins de constituer une reposante digression, ce ravissant intermède est probablement destiné à faire le ménage des princesses et princes charmants. Et ce qui est sûr,  c’est que par dessus tout, nous avons adoré la présence sculpturale et musicale de Joséphine Baker sous les traits de l’excellente Olivia Harkay.

Arsène Lupin

Jusqu’au 3 juin 2023 au théâtre royal du Parc

Une Création de Thibaut Nève et Othmane Moumen, d’après l’œuvre de Maurice Leblanc

Avec Julie Dacquin, Christian Dalimier, Damien De Dobbeleer, Anton Drutskoy Sokolinsky, Manon Hanseeuw, Olivia Harkay, Sarah Lefèvre, Othmane Moumen, Thibault Packeu, Bernard Sens, Laurence Warin

Mise en scène de  Thibaut Nève 

Scénographie de Vincent Bresmal et Matthieu Delcourt 

Costumes de Anne Guilleray 

Lumières Xavier Lauwers 

Chorégraphies Natasha Henry  et Maïté Gheur 

Chorégraphie des combats Emilie Guillaume 

Création sonore Ségolène Neyroud  et Agathe Regnier 

Maquillages et coiffures Valérie Locatelli

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SPECTACLES

Une muse particulière … La dame à la camionnette

Conversations avec ma mère… de plus en plus amères…

EN TOURNÉE SAISON 2020-2021 Notre immense comédienne nationale Jacqueline Bir, 87 ans, s’est emparée avec Alain Lempoel, son metteur en scène, du rôle de Miss Shepherd dans « The Lady in the Van », un superbe film de la BBC réalisé par Nicholas Hytner (2015) et qui passe sur Netflix. On la comprend aisément, les éloges ont été dithyrambiques. Le film est adapté par Alan Bennett des mémoires qu’il a écrites pour la London Review of Books où il raconte une histoire de relations mère-fils haute en couleurs. Un sujet qui la passionne.

 Miss Sheperd est une sans-abri rebelle, hautaine et acariâtre qui a forcé Bennett à la laisser finalement parquer son camping-car délabré, fait-maison, devant chez lui, dans son allée, au cœur du quartier londonien réputé de Camden.  Cela durera de 1974 à 1989, au lieu de quelques semaines. Le voisinage bon chic bon genre ne rêve que de la voir partir, tandis que des vauriens rêvent de renverser le véhicule.  Cette Miss Shepherd pourrait bien être le double sauvage et imaginaire de sa propre et sage petite mère bourgeoise, très réelle, qui commence à perdre la tête et qui risque de se retrouver bientôt dans un home. Lui en profite pour se dédoubler à son tour en deux personnages : l’homme qui vit sa vie et celui qui écrit. « I live, you write, that’s how it works !»  La réalité vs. la fiction. A propos de création, Bennett réalise que l’on ne projette pas dans l’écriture celui que l’on pense être mais que c’est en écrivant que l’on découvre qui l’on est.

 La Miss Shepherd a un caractère épouvantable. Sulfureuse en diable, elle ne dit jamais merci et ne supporte pas la moindre action de type charitable. Cette femme, qui a passé sa prime jeunesse chez les nonnes, qui a été éduquée et parle français, fut même une pianiste talentueuse – et qui a fait ambulancière dévouée sous le blitz – semble devoir se défouler en s’embarquant dans son taudis à roulettes, d’une culpabilité secrète. Elle exprime dans la première partie du spectacle un chapelet sans fin de lamentations tandis que ses voisins de rue bien famée répriment difficilement leur dégoût du concerto d’odeurs répugnantes qu’elle dégage. 

 Mais si on n’a pas vu le film, on ne sait pas qu’elle en est arrivée là pour un délit de fuite suite à une collision accidentelle avec un jeune écervelé à moto. C’est ainsi qu’elle s’est retirée brutalement du monde… et des lumières de la rampe. La voilà même poursuivie par un maître chanteur, ancien flic !  Son frère l’a fait colloquer dans un asile psychiatrique … Elle en est venue à détester la musique qui était toute sa vie, la prière, en mieux. Mais il est intéressant de voir comme elle fascine celui qui l’accueille sur son terrain.  Car lui, de son côté, doit domestiquer les culpabilités qu’il éprouve vis-à-vis d’une mère étouffante en fin de vie et qu’il laissera emporter dans un home…. La clocharde au caractère de chien qui veut désespérément rester incognita, lui sert de catalyseur et de d’éclaireur sur ses inquiétudes profondes. Ah ! les magnifiques guenilles signées Ronald Beurms !

Quelques reproches s’appliquent néanmoins à une mise en scène à la fois trop proche – on ne peut pas faire du copié-collé du film de Netflix – et trop lointaine :  il manque plein de morceaux, omis on ne sait pourquoi, qui brisent véritablement la ligne dramatique. Quelle lourdeur dans l’entreprise !  Et puis, malgré toute l’admiration que l’on puisse avoir pour Jacqueline Bir, si fine et bouleversante dans les « Conversations avec ma mère », elle n’arrive pas à la cheville de la splendide Maggie Smith, tellement plus convaincante et chatoyante.  Si attachante malgré son horrible caractère ! Le débit scandé comme un métronome de notre comédienne belge devient lancinant à la longue, si pas carrément soporifique dans la première partie du spectacle fort chaotique et décousu. Bon, la seconde partie sauve enfin les meubles… au vu de l’histoire qui prend enfin forme plus excentrique et au vu des nombreuses problématiques qu’elle soulève. Ouf ! L’adaptation belge veut camper sur l’ironie grinçante et le surréalisme, tandis que la version anglaise s’avère beaucoup plus humaine… et plus plausible ! Les célèbres « Conversations avec ma mère » se poursuivent, mais sur un ton bien plus amer et pessimiste. 

La dame à la camionnette | Théâtre de Namur

Histoire vraie

La traduction française : Danielle De Boeck

Alain Leempoel : Mise en scène et adaptation

Ronald Beurms : Scénographie, décor, accessoires et costumes

La distribution :

Jacqueline Bir – Miss Shepherd ; Bernard Cogniaux – lan Bennett 1 ; Patrick Donnay – Alan Bennett 2 ; Frederik Haugness – Rufus Underwood, Médecin de Mam, Médecin de Miss Sherpherd, Rustre, Ambulancier, Leo Fairchild; Isabelle Paternotte – Assistante sociale, Médecin de Mam, Pauline, Intervieweuse, Mam’s

Première au Wolubilis : https://www.wolubilis.be/a-voir/la-dame-a-la-camionnette/

Du 29 septembre au 9 octobre 2021

Théâtre de Wolubilis
Cours Paul-Henri Spaak, 1 1200 Woluwe-Saint-Lambert Contact: http://www.wolubilis.be

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