Jeanne avec Nicole Croisille au Centre Culturel d’Auderghem
Solitude, cynisme, paranoïa, tendresse quand même…
Jeanne : un rôle de femme qui n’a pas peur de dire ce qu’elle pense ! Marin : un rôle de jeune-homme mal dans sa peau, déconnecté de tout, au bord de la faillite relationnelle, mais mû par la force de la vie. Craquant comme un bouton d’or au printemps. L’or de scène où coule une énergie de Don Quichotte qui va à l’encontre de la violence sociale qui enferme les aînés dans des prisons de silence et de désintérêt général. L’or de l’espoir qui se mêle de changer quelque chose au désert d’une vie bas de gamme. L’or de la patience à l’épreuve d’une femme de fer qui tantôt vitupère tantôt crie au loup et hallucine. …Sa tanière est pourtant protégée d’une série impressionnante de verrous. La « vioque » comme elle se nomme sans détours, vit dans une tour au 23e étage, cernée par l’infini du ciel et de ses nuages libres et gracieux, où elle espérait rêver le bonheur. Elle ne sort à peu près plus, passant ses heures à découper en bandelettes des magazines publicitaires, travail de souris qui détricote une vie. Une vie de secrétaire exemplaire, objet de désir et de luxure pour un patron sans amour. Une femme atteinte d’une maladie rare incidemment jetée de la société où elle a passé toute sa vie. Un baiser perfide sur la joue, une coupe de mousseux et des pistaches qu’elle déteste comme A Dieu.
La rencontre improbable avec le jeune homme s’est faite à l’occasion d’une action électorale de la mairie, qui s’est mise à proposer divers services sociaux aux démunis de l’arrondissement, visées électorales très peu dissimulées à la clef. Le personnage stéréotypé de l’assistante sociale (Florence Muller) est conçu pour provoquer le rire. On rit moyennement. D’un rire un peu jaune, un peu délavé. Trop de répétitions. L’auteur veut ratisser trop large.
La mission du jeune homme providentiel est de porter des repas aux vieux du quartier. Pour Marin, c’est l’occasion de tisser de chaque côté du plateau une relation d’intimité. Une première dans sa vie de nul, transparente et fade. Voilà une Jeanne qui se livre comme jamais elle ne l’avait fait et le livreur de repas se rassasie enfin de confidences vraies, pour la première fois de sa vie, découvrant avec émerveillement le cheminement du bonheur et de l’échange. C’est le plus beau de l’histoire. Prendre un râteau pour déblayer une fin …de plus en plus noire, mais apprécier pleinement la chute inattendue.
Nicole Croisille est loin de sa chanson… « Parlez-moi de lui » ! En jupe plissée écossaise, elle rentre ici dans le type grinçant des octogénaires d’Agatha Christie et s’en trouve fort bien : Tatie Danielle, en moins coriace, en plus friable. Mais le jeune homme? Le charismatique Charles Templon, bourré d’humour, sterling gold? Il incarne un personnage immaculé et succulent, pétri de bienveillance, d’écoute de l’autre, de respect, d’empathie et de joyeuse humeur, à l’opposé de la dame 100% caractérielle, perverse et manipulatrice qui hante les lieux. » Pourquoi vous vivez seule d’ailleurs ? » la question cruciale. Adroite mise en scène de Jean-Luc Revol du texte Jean Robert Charrier dans des décors de Sophie Jacobs et des costumes de Michel Dussarat. Aux lumières, François Menou et à la sono, Bernard Valéry pour alterner réalité et passages des songes à travers le miroir de l’âme.
JEANNE
Du mardi 12 au samedi 16 mars 2019 à 20h30 et le dimanche 17 mars 2019 à 15h
Une pièce de Jean Robert-Charrier
Mise en scène : Jean-Luc Revol
Avec : Nicole Croisille, Charles Templon, Florence Muller, Geoffrey Palisse
Décors : Sophie Jacob
Costume(s) : Michel Dussarrat
Lumières : François Menou
Musique : Bernard Valéry
Durée : 1h40
Réservation par téléphone : lundi, mercredi, jeudi et vendredi de 11h à 17h, le mardi de 11h à 15h et le samedi de 10h à 14h. 02/ 660 03 03
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