Emilio Ocon y Rivas.
Le costumbrisme, né du romantisme et du naturalisme dans un mouvement propre à l'Espagne, une Espagne d'us et coutumes, et même, nous l'avons vu, à l'Andalousie, se déclina en genres "précieux" pour s'éteindre "fin de siècle" avec notamment :
Emilio Ocon y Rivas (1845-1908) et cette "Marine" au style très marqué par Caspar David Friedrich,
jusqu'à cet "Avis de naufrage"
de José Navarro Llorens (1867-1927).
Où sont-ils, les marins sombrés dans les nuits noires ?
Ô flots, que vous savez de lugubres histoires !
Flots profonds redoutés des mères à genoux !
Vous vous les racontez en montant les marées,
Et c'est ce qui vous fait ces voix désespérées
Que vous avez le soir quand vous venez vers nous !
Victor Hugo, Oceano Nox.
Pourtant, non seulement ces peintres costumbristes, s'ils sont oubliés, sont loin d'être négligeables mais forment un socle sur lequel le modernisme put croitre, fut-ce en rejet.
"Et puis c'est beau", écrivait Cavanna à propos des "pompiers" vilipendés. "Même si nos sensibilités 'modernes', formées à de nouvelles modes, goûtent moins spontanément les effets de cet art trop 'académiques', trop 'léché', nous sommes néanmoins à même d'en saisir la beauté. Il y a là-dedans des fulgurances qui laissent pantois.
La beauté n'a pas d'époque. Seule la mode en a. Et ce que vénère la mode n'est pas forcément la beauté. Être prêt à être saisi par la beauté d'où qu'elle jaillisse, se laisser aller à elle, s'abandonner, sans se demander si elle est 'in' ou pas... La beauté se savoure seul à seule. Comme l'amour. S'abandonner, sans honte, sans calcul ]...[ faire fi des snobismes, des modes et des idées toutes faites. S'abandonner..."
Et quand la tombe enfin a fermé leur paupière,
Rien ne sait plus vos noms, pas même une humble pierre
Dans l'étroit cimetière où l'écho nous répond.
Id.
Tout passe. - L'art robuste
Seul a l'éternité ;
Le buste
Survit à la cité.
Théophile Gautier, L'art.
Ils méritaient bien ici d'être réhabilités.
Et, sans peut-être parler d'influence mais plutôt, pour être juste, de réminiscences, on peut trouver leur marque jusque chez Picasso.
Picasso, né à Malaga (où un musée lui est consacré), qui bouleversa l'art du vingtième siècle.
L'ogre a digéré. Mais dans sa "femme à l'éventail", avec cet accessoire indispensable à toute belle Andalouse, ne retrouve-t-on pas la tradition de sa région natale ?
Femme à l'éventail (Après le bal), 1908 (musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg).
Sur ce coup de poignet, il est temps de nous dire au revoir avec
cet hommage à Picasso et à ses "Deux femmes courant sur la plage" (Torremolinos, près de Malaga),
et allons danser la séguedille.
Michel Lansardière (texte et photos).
Note : la plupart des photographies (romantiques, précieux, fin de siècle - Luz andaluz 2., 3. et 4. - et la Santa Marina de Zurbaran - Luz andaluz 1. -) ont été prises au musée Carmen Thyssen à Malaga, Andalousie.