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administrateur théâtres

Il a remporté le concours Reine Elisabeth en 2013,  il est maintenant en résidence à Flagey et ses liens avec la Belgique sont privilégiés. Il  jouera ce soir  son fameux 3e concerto pour piano de Prokofiev.  Cela se passe  à l’occasion  des  Piano Days à Flagey,  un rendez-vous de l’avant printemps qui devient maintenant une tradition de 5 jours de festival  où se succèdent grands pianistes de musique classique  et de jazz mais également de jeunes virtuoses…  Par élection,  nous avions épinglé le concert du samedi soir, sachant qu’il y participait,  avec au programme :

  • Guillaume Connesson — Kadath & Le soleil couchant (2017)
  •  Igor Stravinsky — L’Oiseau de feu (suite) (version 1919)
  •  Sergei Prokofiev — Piano Concerto no. 3 in C, op. 26

Nous ne serons nullement déçus par  l’exécution brillante, dense et corsée  de l’opus de Guillaume Connesson sous la baguette follement imaginative de Stéphane Denève qui embarque les spectateurs dans un univers  méphistophélique cuivré où se côtoient des plaintess d’âmes en détresse, un cité d’or perdue dans un désert  où pleuvent des cascades de sons en forme de glaçons ou de sable, un éparpillement de voix confuses et des bourdonnements de vie domestique paisible,   avalés par la fièvre subite  d’assauts guerriers sur un rythme de sacre du Néant. Les mesures finales éblouissent dans de sombres ricanements.  Voilà une puissante et fantastique  introduction au conte de L’oiseau de feu créé  par Stravinsky.

 Quelques mots sur l’histoire d’Ivan Tsarévitch  qui aperçoit un jour un oiseau  fantastique fait d’or et de flammes. Il le  poursuit et il réussit  à lui arracher une de ses plumes scintillantes. Sa poursuite l’a mené jusque dans les domaines de Kachtcheï l’Immortel,  une  redoutable  puissance qui s’empare de maints preux chevaliers pour les changer en pierre. Les filles de Kachtcheï et les treize princesses captives, intercèdent et s’efforcent de sauver  le jeune homme. Par chance, l’Oiseau de feu survient et dissipe les  sortilèges. Le château de Kachtcheï disparaît laissant les jeunes filles, les princesses, Ivan Tsarévitch et les chevaliers délivrés …s’emparer des précieuses pommes d’or du jardin. La version 1919  de Stravinsky débute par des murmures fantomatiques, des enlacements tendres et un festin de gloussements et de pépiements d’où émegent et fusent violons et flûte.  Un climat de torpeur solaire s’installe avec  la langueur des cordes  et la harpe rêveuse encadrée par les flûtes.  Stéphane Denève, tout comme dans l’exécution précédente,  ordonne  des frappes fantastiques, une parade de fracassements bercés par le battement élégant des violoncelles. L’expressivité aérienne du chef d’orchestre se transforme en pulsations et en vibrations intenses. Les sons claquent, la terre tremble. Ce qui semble être une apothéose spectaculaire se métamorphose en un filet de sonorités humbles, en courbes souriantes apaisées, illuminées d’or. La forme des plumes magiques?   Le tempo est lent et majestueux, indolent presque imperceptible et se fond dans le chatoiement de la harpe.  Ainsi se clôt la berceuse avant le final rutilant gorgé de vitalité et de couleurs. Le chef d’orchestre est flamboyant.

Et enfin, rencontre avec le musicien de nos rêves, un façonneur de beauté  un architecte virtuose de la musicalité: Boris Giltburg que l’on écoute avec le Brussels Philaharmonic en  troisième partie  de programme, une apothéose. Boris  Giltburg entre dans le jeu du concerto de Prokofiev, bondissant. Il roule des pointillés précis, tresse des notes incandescentes. Evoque des accès de tendresse et de rêve, enlace  des torrents de cheveux d’anges puis se pet è construire de façon trépidante. Il a un tempérament de feu il catalyse des coulées de lave brûlante des éclaboussures sismiques des jaillissements de Stromboli en délire. L’orchestre propose un chant séculaire aux accents paisibles. Boris reprend au clavier, façon séraphique. La promenade se transforme en course d’obstacles  franchis avec grâce, pour déployer un jeu de douceur  et de rêverie lisse et lumineuse.  A travers l’errance,  des paysages s’évanouissent et  la saveur de l’éphémère infuse.  Encore une  reprise de l’aventure paroxystique et un ralentissement subit et le reste est silence…   Les spectateurs sont suspendus au temps.

 

 La  souplesse brillante de l’orchestre entoure les gouttes de bonheurs simples au clavier, leur humilité, leur délicatesse et  l’écoute de L’Univers.  Lorsque le pianiste reprend le thème ou le joue à l’unisson, c’est une véritable amplification poétique qui naît sous les doigts du magicien. Le clavier est devenu une divine monture,  nimbée de voiles transparents et lumineux.  L’aventure musicale, menée dans un train d’enfer à travers la poussière d’étoiles, est fougueuse, maîtrisée  et impeccablement souveraine. Et le jeune virtuose reste,  malgré les applaudissements et l’adoration du public, modeste et heureux de donner encore : deux bis où l’orchestre  entier écoute et savoure,  les yeux fermés deux interprétations à grande intensité émotive : deux  Études-Tableaux  de  Rachmaninov op. 39 - no. 8  en ré mineur et  no. 6 en la mineur. 

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Commentaires

  • administrateur théâtres

    Lovecraft mis en musique !

    Le 1 mars 2018 par Bruno Peeters

    Guillaume Connesson © D.R.

    Guillaume Connesson, compositeur français, né en 1970, semble démontrer un intérêt particulier pour les littératures de l'imaginaire. Il est déjà l'auteur de deux pages d'après Abraham Merritt, The Ship of Ishtar, pour orchestre à cordes, et un concerto pour piano, The Shining One. D'autres de ses oeuvres évoquent Agartha ou l'Atlantide. Une de ses dernières inspirations est le Maître de Providence, à qui il consacre un triptyque orchestral, composé l'an dernier, Les Cités de Lovecraft. Titres des mouvements, inspirés directement des "Contrées du Rêve" (1917-1921) "ce cycle qui voit le songe d'or sombrer peu à peu dans le cauchemar" (Francis Lacassin) : Céléphaïs, Kadath, et La Cité du soleil couchant. Le premier a été interprété ce jeudi 22 février par le Brussels Philharmonic, les deux autres ce samedi 24, l'ensemble sous la baguette de son directeur musical, Stéphane Denève. Il est étrange - et passionnant -  d'entendre ce que peut évoquer l'oeuvre de Lovecraft à un jeune musicien contemporain. Elève de Marcel Landowski, Connesson écrit une musique tonale des plus accessible, avec un haut sens des couleurs. En une brève allocution, le chef a présenté les deux ouvrages.  Tout commence par le souffle mystérieux de l'éoliphone (machine à vent), sur un tapis de cordes et de sourds coups de timbales. Suit un beau passage descriptif et désolé, très lent, faisant un peu penser au langage d'Edmund Rubbra. Après un moment plus rapide, intervient un solo d'alto accordé en demi-tons, puis en quarts de tons : voilà qui fait l'effet d'une plainte déchirante, bien dans l'atmosphère de ces contrées de l'horreur. L'oeuvre se termine par une sorte de scherzo effréné, où brillent les étincelles du piano et de la harpe. Un magnifique choral, clamé par les cors, et rythmé aux  timbales, introduit la dernière partie du triptyque, La Cité du soleil couchant. C'est une page très spectaculaire, comme les aime le compositeur, selon ses propres dires, frénétique même, à l'instrumentation éblouissante,  grandiose sans doute et fortissimo, mais d'une parfaite clarté d'écriture, s'inscrivant ainsi dans la grande tradition orchestrale française. Voilà une musique contemporaine parfaitement audible, aussi fascinante que... l'oeuvre de Lovecraft.
    Suivaient deux tubes de la musique du XXème siècle. La suite de L'Oiseau de feu, tout d'abord, dirigée d'une manière toute aussi claire et précise, ce qui est toujours requis pour Stravinsky. Après une tellurique Danse infernale de Katscheï, Denève inspira à ses vents (quel beau basson !) une poésie accrue dans la Berceuse, et de jolies interventions d'un tout jeune violoncelle solo. Beaucoup de mélomanes s'étaient déplacés pour réentendre Boris Giltburg, fascinant lauréat du Concours Reine Elisabeth 2013. Il n'a pas déçu. Souvent courbé sur son clavier, comme Glenn Gould, il a livré du Troisième Concerto de Prokofiev une vision spectaculaire, toute en force, mais en parfaite osmose avec l'orchestre. S'il est capable d'un jeu poétique et délicatement ourlé, (début du deuxième mouvement), parfois même un rien précieux (finale), il impressionna surtout par une puissance de jeu formidable, qui laissa le public pantois. Public qu'il choya avec deux bis de Rachmaninov et de Liszt.
    Le très nombreux public du Studio 4 de Flagey (quelle acoustique !) a réservé une ovation sans pareille au Brussels Philharmonic et à son chef charismatique, Stéphane Denève, grand défenseur de la musique de Connesson, ainsi qu'à Boris Giltburg, qu'il était tout heureux de retrouver. Une superbe soirée !
    Bruno Peeters
    Bruxelles, Flagey, Studio 4, le 24 février 2018

  • administrateur théâtres

    And Boris said: "Last night was a blast :) It's always such a pleasure to play in Belgium – many thanks to the really warm audience at Flagey! You can listen to the concert again on Musiq'3 - RTBF's website (link – http://bit.ly/2FssIUx). And thank you of course to the Brussels Philharmonic and Stéphane Denève for a really exciting collaboration."

    L’image contient peut-être : 2 personnes, texte

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