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administrateur théâtres

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Pour dénouer, il faut du doigté. Peindre, écrire, jouer de l’instrument ou monter sur scène. Honorer ses promesses…


Sa pugnacité légendaire et ses choix audacieux comme avocat l’avait fait surnommer le « Jacques Vergès belge » . Cette pugnacité, il l’avait acquise très jeune, en triomphant de la tuberculose, qu’il contracta à 19 ans. Il dut quitter subitement le cloître familial pour celui tout aussi sévère de l’ hôpital. Une maladie qui exalte ceux qui luttent contre elle. La montagne magique. A peine guéri, il adhère au parti communiste, et, en mai 68, fait partie de ceux qui lanceront l’occupation de notre université: Alma Mater.

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Avocat haut en couleur… Rouge. Ténor et enfant terrible du barreau bruxellois, virtuose de la formule, fervent défenseur des droits de l’homme, il tenait des propos incendiaires sur les prisons et leur inutilité. A son arrestation en 1979, accusé d’avoir aidé son client François Besse, un ancien lieutenant de Jacques Mesrine, à s’évader du Palais de Justice, sa fille Catherine, future violoniste et comédienne a 9 ans. Déjà jeune femme turbulente.

Comme dans « L’atelier rouge » de Matisse, trente ans plus tard, Catherine égrène le sable de souvenirs empressés, mi-nostalgiques, mi ironiques, elle dispose les reliques de son père sous le rétro-projecteur et fait chavirer les cœurs. Du bout des doigts. Avec délicatesse, les yeux rivés dans ceux des spectateurs, comme si elle-même était à la barre. En pinçant les cordes du passé, pour respirer à l’air libre… En se jouant de tous les enfermements.

Comment se reconstruire quand la mort d’un père détruit? L’écriture sauve. Comment échapper aux griffes du passé? Au sentiment d’étouffement. Ah la figure paternelle immense et l’admiration, inconditionnelle…. Ah! L’histoire familiale truffée de murs d’en face, de police, de gardiens de prison! Un labyrinthe truffé d’ impasses mais de résilience tenace, malgré une nouvelle maladie de fin de vie qui s’acharne sur le corps, alors que l’esprit danse encore le sirtaki! Sur Scène, c’est la Grèce des vacances heureuses qui prend le pas et fait vibrer le cœur. La lutte engagée contre les colonels… La danse, comme viatique, comme étendard, comme signe de ralliement. La Danse, comme chez Matisse. Déjà les larmes perlent au bord des paupières! C’est toute notre jeunesse qui palpite. Notre père qui aime Zorba et se joint à son rythme. C’est une prison que l’on démolit, la musique du violon qui déchire les mots évanouis et arrache la dernière grille avant de la jeter dans un container. Une musique qui ensevelit comme une dernière caresse.

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La vie peut recommencer. comme le printemps après l’hiver. L’œuvre du grain qui ne meurt jamais. La foi dans l’immortalité du lien et, enfin, sa légèreté. La paix qui en résulte. L’œuvre sur scène, un cadeau que l’on porte de place en place. Un prix du meilleur seul en scène qui ne cesse d’émouvoir et de guérir. Mais est-elle vraiment seule? Merci Catherine Graindorge.

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Dominique-Hélène Lemaire 

Du 16 au 27 janvier 2019

Comédie Claude Volter

TEASER ICI Avenue des Frères Legrain, 98 1150 Woluwe-Saint-Pierre

http://www.comedievolter.be
secretariat@comedievolter.be


Création au théâtre des Tanneurs

Une coproduction du Théâtre Les Tanneurs et du Théâtre de Namur

De et avec Catherine Graindorge 
Collaborateur artistique Bernard van Eeghem

 Dramaturgie Jorge León
Composition musicale Catherine Graindorge 
Création son Catherine Graindorge et Joël Grignard
Création lumière Gaëtan Van den Berg
Création vidéo Elie Rabinovitch
Costumes Marie Szersnovicz
Direction Technique Gaëtan Van den Berg

Avec le soutien du Théâtre des Doms

NDLR.

L'une des grandes figures du barreau dans les années 90, l'avocat Michel Graindorge est décédé en 2015 à l'âge de 75 ans des suites d'une longue maladie. Souvent qualifié "d'avocat engagé", il a notamment défendu Roberto D'Orazio, le père Samuel, et les familles des paracommandos tués au Rwanda. Il avait été aussi un acteur important dans l'affaire des tueries du Brabant.

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Commentaires

  • Merci à Deashelle pour ce témoignage. A côté de quoi passe -t-on dans la vie ? Tant de choses à lire, à écouter. Que ne peut-on renaître sous de bons auspices pour assouvir une soif présente ? amitiés

  • administrateur théâtres

    par Jean Campion

    Un Témoignage lucide et tendre

    "Il a insisté pour que j’apporte mon violon. Je joue. Puis on le reconduit dans sa chambre. Avant de s’endormir, il me demande : "Tu feras quelque chose pour moi ?" Sentant la mort s’approcher, Michel Graindorge suggère à sa fille comédienne et violoniste, un spectacle. Cette idée ne la surprend pas. Elle l’a senti germer en elle, durant les quinze mois, où son père hospitalisé était enfermé dans une "prison de soins". Lui consacrer un spectacle, c’était le ramener dans le monde du dehors. C’était également, pour elle, un moyen d’exorciser sa douleur, en remettant la mort au centre de la vie.

    Catherine partageait avec son père une forte angoisse de la mort. Et il lui a fallu de nombreux mois pour faire son deuil, après son décès. Aujourd’hui elle évoque avec humour ce combat difficile : elle a diversifié potions et anxiolytiques, consulté des thérapeutes de tous bords et même un médium. Fiasco complet ! Son spectacle ne sera ni un hommage, ni un plaidoyer pour l’avocat engagé. Commenter les épisodes célèbres de sa carrière controversée ne l’intéresse pas. Elle le fait sentir ironiquement à la journaliste, venue l’interviewer. En dansant le sirtaki, écho de vacances heureuses en famille, à Santorin, Catherine suggère son intention : cerner la relation entre père et fille.

    Elle remonte le fil de leur histoire et découvre certains témoins du travail ou des intérêts de Michel : des phrases enregistrées par dictaphone, une boîte à musique qui serine l’Internationale ou un texte de chanson pas facile à interpréter. La maison est envahie par des montagnes de livres. On ne s’étonne pas d’y trouver l’oeuvre complète de Marx et quantité d’écrits révolutionnaires. Plus inattendus, les nombreux ouvrages consacrés à différentes religions. Cet agnostique avait soif de spiritualité. Chaque année, il faisait une retraite, dans une abbaye, près de Saint-Hubert. Catherine, à son tour, y a passé trois jours, en occupant la chambre de son père.

    L’enfermement traverse toute l’existence de Michel Graindorge. Ce fils d’un surveillant de la prison de Verviers bénit la maladie, qui le frappe durant son enfance. Elle lui offre la chance de s’évader de la sévère maison familiale, où il étouffait. Une brève interview montre que très tôt, l’avocat de gauche s’est battu pour améliorer les conditions de vie des détenus. Un combat qui trouve un écho dans une longue séquence symbolique, soutenue par la musique déchirante du violon. Sur l’écran , grues et bulldozers démolissent la prison de Verviers...

    Les derniers mois de sa vie, l’avocat pugnace s’est senti emprisonné par les contraintes de la maladie. Une réclusion, durant laquelle cet homme public recevait très peu de visites. De plus en plus proches, père et fille ont vécu solidairement l’approche de la mort. Michel masquait la peur qu’elle lui inspirait par des formules du genre : "Je n’ai jamais considéré la mort comme une hypothèse de travail." On peut imaginer leurs discussions sur les questions existentielles. Catherine ne les confie pas au public. Normal. Par contre, elle décrit avec précision le déroulement du dernier jour (20 avril 2015), en soulignant l’absurdité d’une obéissance aveugle aux règlements. A 14 heures, le malade est prêt. Mais la sédation n’est prévue qu’à 16 heures... On impose deux heures de vie à un homme qui ne demande qu’à mourir ! Dans son compte-rendu, Catherine montre également que son père a besoin d’être rassuré. Par les paroles d’Alain, ami et médecin de la famille ou par des gestes : "On lui caresse les bras, les jambes, le front."

    La vie reprend son cours. Témoins, ces deux scènes apaisantes. Alors que l’on verse les cendres de Michel dans la rivière, à Barvaux, sa petite-fille détend l’atmosphère par une remarque désarmante. Un peu plus tard, Catherine rencontre François Besse. Le truand repenti (sorti de prison en 2006) lui parle chaleureusement de son père et confirme qu’il n’est pas complice de son évasion. "Avant la fin" est un témoignage lucide et tendre, qui frappe par sa sincérité et sa retenue. Catherine Graindorge se sert des mots, des images et de la musique avec sobriété, pour nous faire découvrir un papa, qu’elle apprend à mieux connaître. Jamais larmoyant, son seule-en-scène très personnel nous confronte à notre perception de la mort et à nos réactions devant la perte d’un être cher.

    Jean Campion

  • administrateur théâtres

    Critique_lesoir_30.01.18-258x300.jpg

  • administrateur théâtres

    "Avant la fin" : la promesse pudique d’une fille à son père  par MARIE BAUDET ( janvier 2018)   Teaser Avant la fin, les Tanneurs


    SCÈNES Catherine Graindorge, seule en scène, revisite plusieurs vies en une, aux Tanneurs. Critique.
     
    Ceci n’est pas une hagiographie mais le fruit d’une promesse. Celle d’une fille à son père, peu avant la fin : "Un spectacle ? - Oui… Ce serait pas mal…" Le père, c’est Michel Graindorge, avocat engagé à gauche, personnage public, la fille, Catherine, musicienne et comédienne, à la demande de son père et suivant aussi ses propres désirs, crée "Avant la fin". Basé sur les quinze derniers mois de vie de cet homme, le spectacle parcourt plus largement sa généalogie (son grand-père Auguste, policier, son père Joseph, gardien de prison, homme silencieux qui jouait du violon), ses engagements, ses liens, ses curiosités. Mais aussi ouvre sur des pans d’autobiographie de sa fille. Car, au centre du récit, figure la façon qu’elle a eue d’accompagner les derniers mois, de vivre la perte, de faire face au deuil.


    © Gregory Navarra


    "Ça fait plus dans deux ans et demi que mon père est mort", dit-elle avant de confier n’avoir toujours pas atteint le stade de l’acceptation. "Pourtant j’ai tout essayé. […] L’équilibre tant attendu tarde à paraître."

    Dans un dispositif simple (une table, un rétroprojecteur, un écran, son violon…), elle n’utilise que l’ordinaire des traces laissées par l’absent - des photos, les lettres, une partition, quelques vidéos anciennes, une pincée d’archives sonores - pour évoquer une vie pas banale et dont certains pans furent très médiatisés. Dont la fameuse "affaire Graindorge" quand, à l’été 1979, l’avocat fut arrêté, suspecté d’avoir aidé son client François Besse (bras droit de Jacques Mesrine et passe-muraille patenté) dans sa spectaculaire évasion avec prise d’otage, en pleine audience. Michel Graindorge passera quatre mois en détention avant d’être acquitté. L’épisode - outre qu’il impliquait un homme très engagé dans la question des conditions carcérales et de la réinsertion - aura marqué les esprits dans le grand public, et a fortiori celui d’une petite fille criant devant les caméras "Papa, avec moi !"

    Les souvenirs, la vie, la trace

    Devenue "sa confidente, son aide-soignante, sa mère", Catherine tient son rôle d’adulte sans effacer celui d’enfant de ce père-là qui, obstinément, continue de recevoir ses clients sur son lit d’hôpital. Celui qui, plus tard, résiste sans le vouloir au sommeil qui l’emportera.

    Il y a les souvenirs, précis, cocasses, graves, émouvants. Il y a la vie, vécue, pensée. Il y a la trace, ce qu’a laissé l’absent, ce qu’il raconte encore à travers le journal qu’il a tenu, les livres qu’il a écrits, ceux qu’il a amassés, celui qu’il n’a pas eu le temps de terminer et qu’il dictait d’une voix sûre sur un petit cassettophone.

    © Gregory Navarra

    Une matière foisonnante et vivante que, pudiquement, sa fille artiste façonne, dans un langage où l’intime d’un homme, d’une famille, tutoie l’histoire d’un pays.

    Du lien avec son père, Catherine Graindorge avait déjà tiré le subtil "Rari nantes", spectacle en forme d’enquête, en duo inversé avec Bernard Van Eeghem : lui né sous X, elle d’une figure connue. Le plasticien et acteur est toujours là, collaborateur artistique d’"Avant la fin", avec aussi Jorge León à la dramaturgie, Elie Rabinovitch à la création vidéo, Gaëtan van den Berg à la direction technique et aux lumières, Marie Szersnovicz aux costumes. Un seul en scène se construit à plusieurs…

    Celui-ci, ciselé sans affectation, d’une humble générosité, concilie l’homme public et le père. Promesse tenue.

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