Ce lundi 16 novembre 2015, à 8.20h en entrant en classe, je savais que rien ne serait jamais plus comme avant.
Nous avons immédiatement abordé le sujet avec les élèves dans toutes les classes et à tous niveaux. C'était une demande des élèves, traumatisés, quel que soit leur âge ( de 12 à 20 ans). Les profs qui n'étaient pas capables de répondre à leurs attentes n'en ont pas parlé, en revanche tous ceux qui étaient disposés à le faire l'ont fait, sinon il aurait été impossible de donner cours. Répondre aux questions posées par les elèves, dédramatiser, rectifier l'info, rendre l'espoir, mettre du baume au coeur. Ils m’ont demandé pour faire un dessin, aux couleurs de la France, avec les mots paix, amour; liberté etc...Ils feront l'objet d'un immense panneau qui sera exposé dans un endroit clé de l'école, et notre sapin de Noël de 3m dans la cour sera cette année aux trois couleurs de la France et orné de mots et de colombes blanches...ce qu'ils ont décidé. Oui, l'école est de nos jours le repère face aux dérives de la société et du monde. Plus que jamais, nous les enseignants avons la mission d'éducation, alors que les familles souvent démissionnent. Mes élèves sont de plus de 30 nationalités différentes, de confessions différentes, c'est une richesse, il faut la protéger.
Ce mardi 17 novembre 2015, en rentrant à 17h.
Je n'en puis plus de lire des statuts haineux, d'entendre des imbécilités, de lutter contre les amalgames. Je me retrouve comme le 12 septembre 2001, à décortiquer avec mes élèves les événements de la veille, à remettre les pendules à l'heure, à panser les plaies d'une jeunesse effrayée, abasourdie par les propos tenus un peu partout sur les réseaux sociaux, dont ils sont friands, dont ils ne mesurent pas encore les dommages qu'ils peuvent causer, dont ils se servaient jusque là pour partager leur petit monde d'adolescents "bisounours". La jeunesse s'est réveillée avec une gueule de bois et elle souffre. Beaucoup de mes élèves sont de confession musulmane. Ils sont salis, choqués, leurs valeurs sont aussi bafouées que celles du citoyen à l'arbre généalogique celte, gaulois, ménapien, nervien, aduatique ou burgonde. L'école reste le dernier rempart contre les amalgames, par l'éducation qu'elle dispense et promeut, elle reste garante de la liberté et de la démocratie. La bête s'est exprimée aujourd'hui devant moi. Je l'ai trucidée et continuerai encore et toujours.
Ce mardi 24novembre 2015, voici les premiers dessins !
La Palestine fait toujours son apparition, et je ne censure pas, mais relie aux événements tout le symbole d'une lutte universelle pour la paix . Les mots Pray et For sont aux couleurs de la France et de la Belgique.
Tout réside dans la tolérance.
Photo trouvée sur le net.
Commentaires
Je vous remercie tous et toutes.
Gil, je fais ce métier depuis 35 ans.
Rien n'est parfait, mais l'école est le dernier rempart contre l'obscurantisme.
Si tu savais combien d'enfants l'on sauve du désespoir, de la misère, si tu voyais combien nos élèves restent à l'école alors que libérés plus tôt, ils devraient rentrer à la maison...
Si tu pouvais voir les sourires réapparaître sur des visages émaciés ou bouffis par une maltraitance familiale...
Alors tu comprendrais pourquoi nous croyons encore tant à ce que nous faisons, et pourquoi jamais je ne laisserai la jeunesse sans réponse, car même si elle est imparfaite, réponse il y a.
Et c'est ce que la jeunesse attend de nous.
INCULQUER LA PAIX, la fraternité, le partage,l'amour des différences, et enseigner le PARDON.
MERCI Mesdames Messieurs les professeurs
merci Liliane de diffuser ce témoignage et merci aux enseignants dignes de ce nom. Un enfant comprend plus que l'on croit et souvent mieux que l'adulte déjà bien ancré dans ses conditionnements.
Inutile de vous de dire que je suis multiculturelle et suis passée par tous les stades........
Bonjour Liliane
Juste un bout de ma réflexion …
Depuis deux ou trois décennies, je me demande sérieusement quelle peut être l’influence des enseignants vis-à-vis des enfants et des adolescents d’aujourd’hui dans ce vacarme abrutissant, dans ce grand fatras de la dégringolade, de la décomposition sociale et culturelle. Ce qui fait désormais autorité, c’est malheureusement nombre d’impostures, la dictature d’une modernité qui mène à la dérive, à l’asphyxie, à la destruction du genre humain. C’est l’escalade de la violence, la corruption, la voix des insultes, des injures, des agressions en tous genres, et pire encore celle des forces brutales, des armes, les lois scélérates de la peur, de la panique, de l’impuissance aussi face à tant de misères, de détresses humaines, face aussi à tant de trafics en tous genres, à tant de calculs et de valeurs. C’est la nouvelle légitimité des idées pourries et puantes, propices au tri sélectif de l’humanité dans toutes les cités et qui fait des cimetières qui n’en sont pas en cent lieux sur la planète … Bien sûr, il est ni possible, ni souhaitable d’empêcher les enfants, les adolescents de s’exprimer vis-à-vis des derniers événements tragiques de Paris. Mais je ne suis absolument pas persuadé que les enfants, les adolescents puissent comprendre ni pourquoi ces événements là, ni comment on peut faire en sorte pour que ça ne se reproduise pas. Comment le pourraient-ils ? Comment le pourraient-ils quand les adultes y compris les enseignants sont bien démunis à comprendre le monde d’aujourd’hui avec de grands pans d’ignorance en de multiples domaines, avec des schémas de raisonnement qui souvent datent, et sous influence aussi de médias braqueurs sur des morceaux de vérité qui ne font pas la vérité, ou sous influence tellement novice de réseaux sociaux où sévissent bien des gogos d’une morale, d’une spiritualité sans substance concrète, bien des imposteurs aux égos surdimensionnés et bien des détraqués de la tête … Parler des derniers événements de Paris est nécessaire mais en parler mal, c'est-à-dire avec précipitation, sans rien d’une interrogation ou avec la prétention d’être bien informé et d’avoir des solutions pour demain et après-demain serait bien dommageable et inexcusable. Malheureusement, ça fait plus de trois ou quatre décennies où la liberté d’expression est galvaudée, où la réflexion, le débat ont cruellement manqué dans mon beau pays de France, alors que peu à peu, s’installaient les pouvoirs qui décident en petits comités de qui a le droit d’exister, de vivre, d’ouvrir la bouche et de qui ne l’a pas…
Aux armes, citoyens ? Non, à nos élans, à nos chansons entre camarades, à nos visages fleuris, à nos amours, les enfants …
Bonne journée. Amitiés. Gil
Je pense aussi que les enseignants peuvent apporter beaucoup à la jeunesse en sachant écouter et surtout ne pas ériger de barrières entre les différences sociales et autres.
Félicitation ! Il est tellement important d'apporter un autre regard à la jeunesse que celui renvoyé par certains médias à longueur de journée. Merci à vous. Cécile
Bonsoir chère Liliane,
Les enseignants ont bien du mérite en ce genre de circonstances car ils sont les dépositaires de notre avenir. Bon courage et merci pour votre impartialité de professeur qui ne fait pas de différences entre les enfants. Amitiés, gilbert.
Bonsoir Liliane , j'ai aimé ton texte que je me suis permis de diffuser à quelques amis .
Je te comprends d'autant plus que j'ai une petite fille par alliance Kabyle qui arrive vendredi avec notre petit fils pour le WE ....Bonne soirée ....Merci Jacky
Enseignante pendant pratiquement toute ma carrière en milieu multi culturel, je ne peux que souscrire à ce témoignage de notre amie Liliane.
Et, cerise sur le gâteau, ma petite fille a épousé un marocain. Sur la photo ci-contre, mon arrière petite-fille.
Ravissante, pleine de vie et intelligente.
Merci.
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