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Une histoire banale

 

 

Lorsqu’Hélène est morte, j’avais cinquante ans à peine. L’âge où on s’interroge quant à sa vie et quant à son avenir. Souvent trop tard pour changer quoi que ce soit. Changer, oui. Mais sans bouleverser ce à quoi on est habitué.

C’est une boutade que mon ami Robert répétait souvent. Changer de femme, c’est changer de vie. C’est parfois la transformer de fond en comble sans devoir changer de voiture.

J’avais toujours rêvé de faire ma compagne de Julie mais c’est Robert qu’elle avait épousé et moi dont elle avait fait son témoin de mariage. J’ai parfois eu le sentiment qu’elle aurait accepté que je devienne son amant. Mais Robert était mon ami. Plus tard,  elle m’a dit qu’elle n’avait pas compris. Elle m’a demandé si je ne l’avais pas trouvée assez belle, ce jour-là ? 

Les hommes souvent, après quelques années de mariage, rêvent de femmes différentes selon les différentes saisons de la vie ou de la journée. C’est surtout vrai durant la nuit lorsque, en caressant leur femme, ils évoquent celles qui figurent en couverture des magazines. Ou la femme d’un ami.

Autant que les hommes, les femmes ont leurs rêves. Un certain nombre d’entre-elles, si pas toutes.  Elles rêvent d’hommes qui combleront leurs pulsions sexuelles. Et de celui qui à leur seule vue contribuera à améliorer leur image sociale. Ce sont rarement les mêmes. Les premiers sont jeunes en général. Et vigoureux.

Aux yeux de Julie, moi j’étais différent. Nous nous connaissions depuis si longtemps que ce n’était pas tromper son mari que de le faire avec moi. J’étais une sorte de double imparfait de Robert. S’il devait mourir avant elle, il aurait été heureux que je lui succède dans le lit de sa femme. Certaines nuits, je pataugeais dans ces idées saugrenues. Finalement sait-on ce qui est saugrenu ou non ?   

Hélène, un matin, ne s’est pas réveillée. Durant la nuit son cœur s’était arrêté de battre. Le jour même Robert avait un accident de voiture qui le tuait sur le coup. Etrange coïncidence ! A se demander si les morts ne se donnent pas d’étranges rendez-vous.

Aux  funérailles d’Hélène, j’ai reçu les condoléances de Julie qui m’a serré contre elle pour m’embrasser. Le lendemain c’est elle qui recevait les miennes et me serrait à nouveau contre son corps.  Elle  s’était parfumée un peu plus fort que la veille.

Trois jours plus tard, nous avons passé la nuit ensemble chez moi dans ce qui avait été notre lit à Hélène et à moi. Julie disait qu’elle était angoissée dans le sien. C’était la première fois qu’elle dormait seule. Elle a posé la main sur mon sexe.

Le sentiment amoureux, celui qu’on ne s’explique pas, a ressurgi au moment où elle m’a dit :

- Merci, c’était bon, tu sais.

Et des gestes qu’elle a évoqués en me mordant le lobe de l’oreille. Je l’aimais, je le savais.

Durant quelques jours, nous avons pris des précautions afin de ne pas susciter des propos vulgaires chez nos voisins. Elle rentrait chez elle dès la fin de l’après-midi mais revenait à la nuit tombée. J’avoue que cela augmentait notre excitation réciproque.

- Tu as pensé à moi en m’attendant ?

Puis elle est restée et nous avons vécu comme un couple établi.

Nous nous sommes mariés six mois plus tard.

A plusieurs reprises depuis, j’ai comparé Julie à Hélène. Une nuit, alors qu’elle s’était étendue sur moi, j’ai dit :

- Arrête Hélène.

Julie à éclaté de rire.

- Elle te faisait ça, Hélène ?

Elle m’avait caressé et j’avais réagi sans ardeur. Nous étions mariés depuis trois mois.

C’est à cette époque qu’elle a commencé à manifester une fringale d’achats. Elle avait de nombreuses courses à faire. Elle n’avait rien à se mettre, disait-elle. Elle s’absentait pour un après-midi entier et je constatais que j’en étais soulagé. C’était sûr désormais, j’avais eu tort d’épouser Julie. Même si elle était moins assoiffée de sexe qu’elle ne l’était à la mort de Robert.

Un jour, je l’ai suivie. Elle est entrée dans un hôtel et quelques minutes plus tard Gérard, un ami commun à Robert et à moi, la suivait. Trois heures se sont passées. Elle en sortit et Gérard sortait à son tour.

C’est la vie.

 

 

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