Port-Royal est une pièce en un acte de Henry de Montherlant (1896-1972), publiée et représentée en 1954. "Port-Royal" achève la "trilogie catholique" de Montherlant qui comprend par ailleurs "Le maître de Santiago" et "La ville dont le prince est un enfant".
La scène se passe au monastère de Port-Royal, faubourg Saint-Jacques, à Paris, en août 1664. L'autorité entend faire signer aux religieuses de Port-Royal un formulaire "qui condamne toutes les idées", c'est-à-dire les résolutions jansénistes, "sur lesquelles ce monastère a été réformé". La pièce débute à l'instant où un représentant de l'Assemblée des évêques incite les religieuses à renier les règles qui font de leur couvent "un lieu maudit (...) qui rend maudit tout ce qui y touche". Les religieuses refusent de se plier et de signer le formulaire. La pièce s'achève après que l'Archevêque de Paris, venant d'essuyer un refus définitif de la part des religieuses, leur annonce les mesures qui seront prises contre elles. Elles seront sacrifiées à la paix du royaume et de l' Eglise.
Cette oeuvre, dont l'action extérieure est extrêmement resserrée, montre essentiellement les mouvements d'âme de quelques religieuses, en particulier soeur Angélique et soeur Françoise. Son sujet, dit Montherlant, est le parcours que fait une âme conventuelle vers un certain événement dont elle prévoit qu'il créera en elle une crise de doute religieux, et par ailleurs le renversement d'une autre âme conventuelle qui, sous l'effet du même événement, passe d'un état à l'état opposé. La soeur françoise est mise, à l'improviste, devant "la lumière". La soeur Angélique s'achemine, d'un cours logique et prévu, vers "les portes des ténèbres".
"Port-Royal" est un drame de l' injustice dans lequel la vérité humaine et la vérité historique se confondent dans un style et un rythme particuliers que le dépouillement des dialogues, le resserrement extrême de l'action, la noblesse et la vigueur de la langue ne font qu'accentuer. De même, la construction simple vient renforcer et mettre en évidence le côté cruel et injuste des circonstances déterminées par des états d'âme d'une rare complexité. La psychologie des personnages est minutieusement approfondie et analysée. Ce sujet, peut-être le plus difficile qu'ait traité Montherlant, permet à l'auteur, par sa grandeur et sa noblesse, de donner libre cours à une fermeté et une rigueur poétique tout à fait exceptionnelles dont Jacques de Laprade a dit: "L'état d'âme des protagonistes et le spectacle fastueux et grotesque que nous donnent leurs accusateurs s'opposent de façon saisissante: cette pièce est comme une marche funèbre (...) qui accompagne la soeur Angélique jusqu'au seuil de la grande nuit."
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