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Orphée et Eurydice à l'Opéra Royal de Liège
Une production spectaculaire tout en français!
En déployant les couleurs les plus variées des sentiments d’amour, d’espoir, de chagrin et de détresse, Varduhi Abrahamyan nous a donné une interprétation passionnée du rôle principal dans l’opéra de Gluck arrangé par Berlioz. En 1859, Berlioz arrangea l'opéra de Gluck afin qu'Orphée puisse être chanté par la grande mezzo-soprano Pauline Viardot, avec laquelle il travaillait en étroite collaboration. Il modifia la structure formelle de l'opéra, l en divisant l'œuvre en quatre actes au lieu de trois et plaça les scènes chez Hadès et aux Champs Élysées dans des actes séparés. Il modifia également certaines parties d’Orphée, principalement dans les récitatifs, tout en reprenant la majeure partie de l’orchestration de Gluck. L'Orphée de Varduhi Abrahamyan affiche une ligne solide, étendue et puissante tout au long de son voyage amoureux dans le séjour des morts. Permettant de franchir les portes de l'enfer et de braver ses féroces gardiens, la beauté de sa musique a fait oeuvre de magie. Varduhi Abrahamyan a plongé les spectateurs dans les brumes bleues du mystère. Le décor très onirique conçu par Pierre Dequivre est décliné en cinquante nuances de bleu. Cependant, la prononciation plutôt médiocre du chanteur en français nous a poussés à utiliser les sous-titres plus d'une fois, ce qui était en quelque sorte agaçant. Néanmoins, vocalisant aisément à travers la vaste gamme de matière vocale, la voix superbe de Varduhi Abrahamyan se frayait un chemin à travers les flots d'émotions, soulignant à la fois le pouvoir de guérison inhérent à la musique, en tant qu’art suprême. En quête de la note bleue? Il demande à Eurydice de l'écouter… Ce qu'elle fait, même si elle ne souffrait plus de la moindre douleur, un fois échouée dans la paix du royaume des morts. En accord avec la vision paisible de Socrate!
« Cet asile aimable et tranquille par le bonheur est habité. Nul objet ici n’enflamme l’âme; une douce ivresse laisse un calme heureux dans tous les sens. Et la sombre tristesse cesse dans ces lieux innocents. C’est le riant séjour de la félicité. »
Les débuts de Melissa Petit dans le rôle d’Eurydice à l’Opéra Royal de Wallonie ont été lumineux et applaudis avec entrain, dès la chute du rideau. Née à Saint-Raphaël dans le sud de la France, Melissa Petit a commencé à étudier le chant à 14 ans à l'École de musique de Saint-Raphaël. En 2009, elle a fréquenté l'Université de musicologie de Nice et a travaillé comme soliste avec l'orchestre de chambre de Saint-Raphaël. La même année, elle remporte le 2e prix du concours international «Concorso Musica Sacra di Roma» et plus tard, récolte le 1er prix du concours national de chant à Béziers en France. Inutile de dire que sa prononciation aux impeccables sonorités était du pur bonheur et impeccables sonorités à l'oreille française. Sa performance cristalline semblait appeler la célèbre étoile inaccessible, celle décrite par Jacques Brel, celle qui symbolise un amour et un désir inaccessibles. Rappelée à la vie par l’art de son amant, Eurydice supplie Orphée de lui parler ... Ce qu’il ne fait pas, parce que les Dieux le lui ont interdit. Donc, le voilà pris dans une double impasse! Entraîné dans des souffrances insurmontables et, bien sûr, comme il ne pouvait s'empêcher de lui jeter un regard, voilà Eurydice ravalée par la tombe, pour la deuxième fois!
La délicieuse soprano belge Julie Gebhart a chanté le troisième grand rôle: celui de l'Amour, l'allégorie utilisée comme tiers dans l'opéra de Berlioz. Amour ou destin?
« Apprends la volonté des dieux: sur cette amante adorée garde-toi de porter un regard curieux, ou de toi pour jamais, tu la vois séparée. Tels sont de Jupiter les suprêmes décrets; rends toi digne de ses bienfaits. »
Son engagement scénique très admiré, toujours en phase parfaite avec les gracieuses modulations de son chant. Quel talent!
D'ailleurs, selon Gluck, «l'opéra et le théâtre vont de pair et doivent être unis jusqu'à la fusion pour exprimer la quintessence du drame». C'est le défi qu'Aurélien Bory a relevé dans une mise en scène à couper le souffle. Il a tout d'abord évoqué un tableau extrêmement bucolique «Orphée ramenant Eurydice des Enfers» de Camille Corot (Musée des beaux-arts de Houston, 1867). Celui-ci capture l'instant même où Orphée est sur le point de se tourner vers Eurydice… Cette image gigantesque de L'Arcadie se reflétait ensuite dans un dispositif constitué d'un immense miroir pivotant, qui au départ faisait plutôt penser au couvercle d'une boîte de Pandore. Diverses positions d' écrans dévoilaient également une suite de passages secrets vers des réalités mystérieuses. Quoi qu'il en soit, les choeurs vibrants de Pierre Iodice se sont finalement installés dans un cercle lumineux au centre du plateau, de même que les six danseurs qui tissaient l'histoire sans relâche, bercés par l'opulente matière orchestrale dirigée avec une énergie de feu par l'admirable maître de musique, Guy Van Waas, homme d'une rare sensibilité. Les chœurs et les danseurs s'unissaient pour soutenir corporellement la moindre phrase musicale, fabriquant au fur et à mesure une sorte de tapisserie vivante bouleversante. La matière de rêves ? Orphée et Eurydice, contrairement au reste des artistes se mouvaient peu et lentement, comme s'ils étaient englués dans la toile de la destinée. Le déploiement sonore était également accompagné de mouvement fluides de voiles balayant le sol, prêts à emporter les protagonistes impuissants. Ce spectacle a donc témoigné d'une créativité visuelle particulièrement hypnotisante, mêlant rêve et imagination, et faite pour souligner de visu, les performances vocales parfaites des chœurs et des solistes au service de la musique de Berlioz. Au final, un spectacle d' une modernité absolue, consacrant une histoire légendaire immortelle et bouleversante.
Dominique-Hélène Lemaire, pour Arts et Lettres
L'article en anglais :ici
crédits photos: OPRLW
Prochain spectacle à L'opéra royal de Liège : Ve. 08 Novembre 2019
https://www.operaliege.be/spectacle/les-pecheurs-de-perles-2019/
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À la mort d'Eurydice, Orphée et les bergers d'Arcadie sont inconsolables. Frappé de compassion, L'Amour autorise Orphée à entamer le voyage aux Enfers. Il pourra ramener Eurydice au royaume des vivants mais en respectant les deux conditions imposées par les dieux : charmer les forces souterraines par sa lyre et son chant et ne pas se retourner avant d'avoir retrouvé la lumière du jour... Orphée et Eurydice est le symbole de l'art classique. On y porte la douleur de la double perte de l'être cher. La première est affaire de destin, la seconde montre la faiblesse de l'homme qui n'a pas fait confiance aux dieux et s'est perdu lui-même. La beauté de l'oeuvre doit autant à l'intensité des échanges qu'à l'éloquence de l'orchestre et à l'implication spectaculaire du choeur. Les airs superbes et bouleversants s'enchainent avec un équilibre parfait et nous emportent dans le tourment de l'âme en deuil. Pour sa mise en scène, Aurélien Bory s'est inspiré du XIXème siècle, période où Berlioz reprend le chef-d'oeuvre de Christoph Gluck. En fond de scène, un immense panneau, tantôt réfléchissant, tantôt transparent, inspiré du système de Pepper's ghost (un dispositif optique bien connu des illusionnistes), lui permet de retourner l'espace. Des trouvailles magnifiques qui donnent à ce spectacle sa dimension étonnante et merveilleuse.
PBA EXTRA Parenthèse musicale
Introduction à l'oeuvre par Olga Novak, historienne de la musique
Jeudi 31 octobre à 19h00 (Durée 45min)
Gratuit - Réservation obligatoire
PBA / Grande Salle - Palais des Beaux-Arts
Place du Manège
6000 Charleroi
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