Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

nouvel esperanza aiem

CLAUDE AIEM : OU LA TENTATION DU SIGNIFIE

 

Du 12-06 au 30-06-13, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles) vous invite à découvrir les œuvres du peintre Français, Monsieur CLAUDE AIEM, dans une exposition intitulée  ŒUVRES REVISITEES.

On n’entre pas dans l’œuvre de CLAUDE AIEM avec aisance. Le visiteur y entre animé d’une interrogation parfaitement légitime, tout interpellé qu’il est par la nature même de ce qu’il voit. Pour l’appréhender, il se doit de poser un temps d’arrêt, lequel devient un temps de méditation, voire d’introspection au cours duquel il se demande quelle relation il pourrait entretenir avec l’œuvre rencontrée.

Les créations de CLAUDE AIEM            sont des « hommages » chromatiques que l’artiste dépose aux pieds des Maîtres de la peinture européenne, ayant chacun apporté un jalon particulier à l’évolution de l’Histoire de l’Art.

DELACROIX, DUFY, UCCELLO (et  bien d’autres) sont mis à l’honneur par le biais d’un vocabulaire contemporain, lequel retient l’essentiel du message universel de l’artiste dont il s’inspire.

Le vocabulaire de CLAUDE AIEM s’exprime essentiellement par la couleur, entendue comme l’essence même des tableaux ayant servi de point de départ. A partir du collage d’un détail appartenant à un tableau de maître, situé souvent dans un coin de la toile, pris en tant qu’œuvre inspiratrice, l’artiste abolit le sujet, pris dans son enveloppe figurative, pour en arriver à son essence, retrouvant ainsi la dynamique originelle qui lui a conféré la vie. A titre d’exemple, A LA FACON DE DUFY (acrylique sur toile 80 x 80 cm) (dont nous reparlerons plus loin), reprend l’essence de la dynamique fauviste, où les couleurs se télescopent et se déchirent, pour aboutir à une grande symphonie chromatique.

Son parcours est des plus intéressants. Graphiste de formation, il se passionne pour l’Histoire de l’Art dès l’âge de  dix ans. Néanmoins, il ne débute dans la peinture qu’en 1985, en réalisant des tableaux reprenant, par ordinateur, l’image de sportifs, mis en parallèle dans le but de disséquer le mouvement.

Il n’échappera pas au visiteur le fait que les œuvres de cet artiste sont parsemées de textes. Ceux-ci sont en rapport étroit avec les peintres dont il s’inspire.

A titre d’exemple, des fragments d’écrits de Baudelaire relatifs à des peintres s’inscrivent sur les toiles. Mais il n’échappera pas non plus au même visiteur que ces textes sont calligraphiés de manière inversée, rappelant les jeux à l’encre sympathique fort usités, notamment, pendant la Renaissance. Mais dans ce cas précis, la démarche de l’artiste est celle d’inciter le visiteur (le regardant) à se concentrer en premier lieu sur les nombreuses composantes picturales du tableau, avant de se consacrer à la lecture des textes (qu’il n’arrivera jamais à décrypter entièrement).

S’il s’attaque aux grands Maîtres, CLAUDE AIEM évite de reprendre les tableaux les plus connus, pour se concentrer sur des œuvres moins célèbres. Sa démarche demeure séculaire, en ce sens que tout artiste reprend les Maîtres, sauf que lui, les transpose en un vocabulaire contemporain.

HOMMAGE A UCCELLO – 2 (acrylique sur toile 50 x 50 cm)

12272909063?profile=original

L’artiste offre son discours personnel sur la démarche originelle du peintre Italien PAOLO UCCELLO concernant la BATAILLE DE SAN ROMANO (ca.1456). A la mathématique originelle de la composition de départ, concrétisée par les trajectoires directionnelles apportées par les lances des chevaliers, lesquelles outre la dynamique du récit narratif, assurent la mise en équilibre du cadrage en le structurant par des droites et des diagonales (la perspective géométrique), CLAUDE AIEM marque le tableau d’origine en lui superposant sa folie personnelle, par le rendu de traits blancs et rouges mettant en exergue les lances des soldats. Tandis que des touches rouges, largement étalées par un pinceau nourri de matière, s’affirment en tant que réminiscences du volume des chevaux cabrés, faisant face à l’impact des lances adverses. Un fond sombre, principalement composé de brun, de vert foncé et de noir fait écho à l’arrière-plan de la toile d’origine.

HOMMAGE A DELACROIX – 5 (acrylique sur toile 80 x 80 cm),

12272909084?profile=original

reprend une œuvre d’Eugène Delacroix intitulée LA FIANCEE D’ABYDOS (1843), inspirée du poème de Lord Byron THE BRIDE OF ABYDOS (1813) chantant les amours impossibles de Sélim et Zuleïka.

La démarche est la même : le jet chromatique reprend l’idée première du peintre. Dans ce cas-ci, la courbe aiguisée du trait de couleur blanche fait référence à la brillance de la lame tenue par le héros du drame. Tandis que le trait rouge symbolise le prolongement du bras ainsi que la main tenant l’épée. L’arrière-plan, globalement noir du tableau, évoque la fumée nourrie d’un incendie. L’artiste délaisse le « poème héroïque » littéraire pour souligner l’instant pictural à l’origine du geste fougueux, participant de la dynamique narrative. Il ne s’attarde nullement sur l’anecdote mais sur l’essentiel qui soutient, au regard sensible du visiteur, la construction plastique.

HOMMAGE A RUBENS – 2 (acrylique sur toile 80 x 80 cm)

12272910091?profile=original

reprend le détail d’un tableau du maître Flamand intitulé LA KERMESSE FLAMANDE (1635-36). Ce détail repris par le peintre se focalise sur la gestuelle de l’homme tendant ses bras, agrémentée par le blanc presque translucide de sa chemise. Il est contrasté par l’éclat rouge vif du vêtement de la femme, près de lui, tenant un enfant.

CLAUDE AIEM restitue cela par deux traits jaunes symbolisant les bras tendus de l’homme, entrecoupés par une masse importante de couleur blanche badigeonnée en de larges plages au pinceau, mettant en exergue la chemise de l’homme. Divers dégradés de rouge, au centre et à l’arrière-plan font référence à la robe de la femme.

A LA FACON DE DUFY (acrylique sur toile 80 x 80 cm)

12272909696?profile=original

Cette œuvre « polarise » en quelque sorte l’esthétique du travail exposé de l’artiste à partir de divers questionnements. Ce tableau est le seul de l’ensemble à ne pas être un « Hommage » direct rendu au précurseur du Fauvisme. Bien entendu, l’ « Hommage » existe en bonne et due forme. Néanmoins, le fait de l’intituler « A la façon de… », indique que la prise de conscience par rapport au style du maître est primordiale, ne fût-ce qu’inconsciemment. Ensuite, quelque chose ressort particulièrement de ce tableau, à savoir la dimension de l’existence de l’abstrait en tant qu’évocateur de ce qu’il est convenu d’appeler la tentation du signifié quant à la réception de l’image par le regardant comme de la part du créateur.    

Et dire qu’il y a dans l’expression de CLAUDE AIEM une résurgence fauviste indiscutable ! Le feu de ses couleurs se retrouve tant dans la restitution d’Uccello que dans celle de Rubens. Et pourtant, ce ne sont que des « Hommages ». On peut se demander si avec Dufy il n’y aurait pas une démarche (inconsciente ?) de vouloir affirmer ne fût-ce qu’une esquisse d’identité propre. Le tableau est éclatant de vérité : le bleu, couleur dominante, le vert en dégradés, le rouge et le blanc sortent à proprement parler du détail tiré de l’œuvre de Raul Dufy pour se retrouver étalés en amples couches sur la surface de la toile de l’artiste.

Néanmoins, en arriver à la conclusion selon laquelle son abstraction ne servirait qu’à rendre « hommage » aux artistes du passé occulterait le fait de considérer que le peintre (comme précisé plus haut) fait avant tout œuvre de graphiste et que sa technique, essentiellement en acrylique, est axée sur des extraits figuratifs, pris comme prétextes à des développements chromatiques d’un splendide effet. Car l’artiste se concentre avant tout sur les détails autour desquels il compose. C’est à partir de ceux-ci qu’un langage nouveau se développe. Avant de poser les textes (jugés comme accessoires), il se concentre sur l’image originale, prise dans l’espace étroit d’un collage, parfaitement définit en tant que cadre autonome à l’intérieur de la toile, ensuite il construit le tableau comme une mise en page, c'est-à-dire élément par élément. Une fois la toile terminée, il la reprend sous diverses photos, considérées comme des essais, pour introduire et structurer les textes dans l’espace (le total de lignes à ne pas dépasser), à partir d’un travail typographique minutieux.

CLAUDE AIEM qui vit en Normandie traverse les siècles à travers un langage esthétique personnel. Fidèle au message original, il le transforme en le diluant littéralement dans des éclairs de couleurs, pour en ressusciter l’essence.

François L. Speranza.

Envoyez-moi un e-mail lorsque des commentaires sont laissés –

Vous devez être membre de Arts et Lettres pour ajouter des commentaires !

Join Arts et Lettres

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles